Language of document : ECLI:EU:T:2024:251

 DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

17 avril 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative doyum – Marque nationale verbale antérieure Doyum – Motif relatif de refus – Absence de similitude des produits – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/2001 »

Dans l’affaire T‑209/23,

Yadex International GmbH, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Me P. Kohl, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Armada Gida Ticaret Sanayi AŞ, établie à Akdeniz (Turquie),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme M. J. Costeira, présidente, M. U. Öberg (rapporteur) et Mme E. Tichy‑Fisslberger, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Yadex International GmbH, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 février 2023 (affaire R 1436/2022-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 4 juin 2020, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, Armada Gida Ticaret Sanayi AŞ, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits relevant des classes 29 et 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Légumes secs ; fruits à coque et fruits séchés ; fruits à coque et fruits préparés ; fruits à coque et fruits conservés ; fruits à coque et fruits séchés préparés en tant qu’en-cas ; fruits à coque et fruits séchés et conservés »;

–        classe 30 : « Poudre à lever ; farine, semoule, amidon à usage alimentaire ; thé, thé glacé ; en-cas à base de céréales ; maïs grillé et éclaté [popcorn] ; avoine écachée ; chips de maïs ; céréales pour petit-déjeuner ; froment traité pour l’alimentation humaine ; orge égrugé pour l’alimentation humaine ; avoine transformée ; avoine transformée pour l’alimentation humaine ; seigle traité pour l’alimentation humaine ; riz ».

4        Le 22 septembre 2020, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        l’enregistrement international de la marque verbale Doyum, déposée et enregistrée le 9 avril 2010, sous le numéro 1039385, désignant des produits relevant des classes 29 et 32 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Lait, produits laitiers » ;

–        classe 30 : « Eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; jus de fruits, boissons à base de fruits » ;

–        la marque allemande verbale antérieure Doyum, enregistrée le 28 octobre 2011 sous le numéro 302011044414, désignant les produits relevant des classes 29, 30 et 32 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Viande, poisson, volaille et gibier ; saucisses, charcuterie ; extraits de viande ; fruits et légumes conservés, séchés et cuits ; gelées alimentaires ; œufs ; lait et produits laitiers ; huiles et graisses comestibles » ;

–        classe 30 : « Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café, farines et préparations faites de céréales ; pain, pâtisseries et confiseries ; glaces comestibles ; miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel ; moutarde ; vinaigre, sauces (condiments), sauces pour salades, mayonnaise ; épices ; glace à rafraîchir » ;

–        classe 32 : « Bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons » ;

–        la marque allemande verbale antérieure Doyum, enregistrée le 12 octobre 2009 sous le numéro 302009059820, désignant les produits relevant des classes 29 et 32 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Lait et produits laitiers » ;

–        classe 32 : « Eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; jus de fruits, boissons à base de fruits ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        À la suite de la demande formulée par l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, l’EUIPO a invité la requérante à apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition. Cette dernière a déféré à ladite demande dans le délai imparti.

8        Le 13 juillet 2022, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

9        Le 3 août 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Elle a concentré son appréciation du risque de confusion sur la marque allemande antérieure no 302011044414 et a pris en considération les produits pour lesquels la requérante avait prouvé un usage sérieux de cette marque, à savoir les « fromage, saucisses, charcuterie » relevant de la classe 29. Au motif que ces produits n’étaient pas similaires aux produits couverts par la marque demandée, la chambre de recours a constaté qu’il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Elle a, en outre, relevé que, étant donné que les deux autres marques antérieures étaient identiques à la marque allemande antérieure n302011044414 et couvraient une gamme plus restreinte de produits, aucune méconnaissance de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 ne pouvait être invoquée sur le fondement de ces droits antérieurs.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter la demande d’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits concernés ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens, dans l’hypothèse où une audience serait prévue.

 En droit

13      La requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

14      La requérante conteste les appréciations de la chambre de recours en ce qui concerne la marque allemande antérieure no 302011044414 et, plus particulièrement, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les produits désignés par ladite marque et ceux couverts par la marque demandée sont différents. Selon elle, il existe un « lien étroit » entre les produits en cause. En effet, lesdits produits auraient la même nature, notamment parce qu’ils appartiennent au secteur du marché alimentaire, seraient destinés aux mêmes consommateurs, partageraient les mêmes canaux de distribution et points de vente, à savoir les supermarchés ou les épiceries, et auraient la même finalité, consistant à servir d’en-cas. Elle ajoute que les produits désignés par les marques en conflit sont souvent consommés ensemble ou bien se complètent. Par exemple, un fromage ou un yaourt pourraient être agrémentés de fruits à coque. Enfin, la requérante fait valoir que les produits en conflit sont en concurrence les uns avec les autres, étant donné que les produits à base de viande et de fromage peuvent servir d’en-cas au consommateur moyen.

15      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée. Ce risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a, des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celles des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

19      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si la chambre de recours a estimé à juste titre, s’agissant des marques en conflit, qu’il n’existait pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

20      S’agissant de la définition du public pertinent, au point 13 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que les produits désignés par les marques en conflit étaient destinés au grand public faisant preuve d’un niveau d’attention moyen. Dans la mesure où la marque antérieure était enregistrée en Allemagne, l’appréciation devait être fondée sur la perception du grand public dans ce pays.

21      Il convient de confirmer les conclusions de la chambre de recours en ce qui concerne la définition du public pertinent, qui apparaissent fondées eu égard aux éléments du dossier et ne sont, au demeurant, pas contestées par les parties.

22      Dès lors, aux fins de l’appréciation de la similitude des produits, il y a lieu de comparer, d’une part, les « fromage, saucisses, charcuterie », relevant de la classe 29 et couverts par la marque antérieure, et, d’autre part, les « légumes secs ; fruits à coque et fruits séchés ; fruits à coque et fruits préparés ; fruits à coque et fruits conservés ; fruits à coque et fruits séchés préparés en tant qu’en-cas ; fruits à coque et fruits séchés et conservés », relevant de la classe 29, et les « poudre à lever ; farine, semoule, amidon à usage alimentaire ; thé, thé glacé ; en-cas à base de céréales ; maïs grillé et éclaté [popcorn] ; avoine écachée ; chips de maïs ; céréales pour petit-déjeuner ; froment traité pour l’alimentation humaine ; orge égrugé pour l’alimentation humaine ; avoine transformée ; avoine transformée pour l’alimentation humaine ; seigle traité pour l’alimentation humaine ; riz », relevant de la classe 30 et couverts par la marque demandée.

23      À cet égard, la chambre de recours a observé que les produits en cause étaient de nature différente, qu’ils ne coïncidaient pas en ce qui concerne leur composition ou leur processus de fabrication et qu’ils étaient généralement produits par des fabricants différents. La chambre de recours a relevé que les produits en cause pouvaient avoir une utilisation différente étant donné que le fromage, les saucisses et la charcuterie, couverts par la marque antérieure pouvaient être consommés en tant qu’en-cas, mais aussi comme hors-d’œuvre ou comme plat principal. Enfin, la chambre de recours a indiqué que les produits en cause n’étaient pas complémentaires. Eu égard à l’ensemble de ces considérations, elle a conclu que lesdits produits étaient différents, bien qu’il s’agisse de produits alimentaires qui peuvent être commercialisés par les mêmes canaux, tels que des épiceries, des magasins ou des supermarchés.

24      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

25      En l’espèce, il convient de confirmer la constatation de la chambre de recours selon laquelle les produits en cause ont une nature différente. Même si les produits couverts par la marque antérieure et les produits couverts par la marque demandée appartiennent au secteur du marché alimentaire, la composition desdits produits est manifestement différente. En effet, les produits couverts par la marque antérieure sont d’origine animale tandis que les produits couverts par la marque demandée sont d’origine végétale. Par ailleurs, comme l’a souligné à juste titre l’EUIPO, les produits désignés par la marque antérieure ont un cycle de vie plus court que les produits désignés par la marque demandée et doivent normalement être conservés dans un réfrigérateur.

26      Quant à leur finalité, il est certes vrai que les produits désignés par la marque antérieure et que certains des produits désignés par la marque demandée pourraient être consommés en tant qu’en-cas. Néanmoins, les indications relatives aux produits désignés par la marque antérieure, à savoir « fromages, saucisses, charcuterie », sont génériques et lesdits produits pourraient aussi être consommés comme hors-d’œuvre ou même comme plat principal. Or, il ne peut pas être déduit de ces indications que les produits désignés par la marque antérieure sont uniquement destinés à être consommés en tant qu’en-cas en tant que tels. Ainsi, les produits désignés par la marque antérieure et les produits désignés par la marque demandée peuvent avoir, et ont souvent, des finalités différentes.

27      À la lumière de ces considérations, le seul fait que les produits couverts par la marque antérieure, d’une part, et les produits couverts par la marque demandée, d’autre part, appartiennent à la catégorie générale des produits alimentaires destinés à la consommation humaine ne suffit pas, en soi, à les rendre similaires, dans la mesure où leur nature, les matières premières dont ils sont constitués, leur destination et leur utilisation peuvent être complètement différentes [voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2021, Chypre/EUIPO – Fontana Food (GRILLOUMI BURGER), T‑593/19, non publié, EU:T:2021:865, point 44].

28      De plus, la requérante ne conteste pas que les produits couverts par la marque antérieure et les produits couverts par la marque demandée sont habituellement fabriqués par des entreprises différentes.

29      Par ailleurs, la requérante n’a pas non plus démontré que les produits en cause étaient complémentaires. Selon une jurisprudence constante, des produits sont complémentaires lorsqu’il existe entre eux un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise (voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, point 57 et 58 et jurisprudence citée).

30      Même si certains produits couverts par la marque demandée, notamment les fruits à coque, peuvent certes être consommés avec du fromage, des saucisses et de la charcuterie, produits désignés par la marque antérieure, leur utilisation ensemble dépend des traditions culinaires et alimentaires de chaque État membre et ne peut être considérée comme indispensable. En tout état de cause, la requérante n’a pas démontré de quelle manière et pour quel public pertinent des produits couverts par la marque demandée seraient importants pour l’usage des produits désignés par la marque antérieure, de sorte que les consommateurs pourraient penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise, ce qui n’est manifestement pas le cas pour les produits en cause.

31      Il en va de même en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel les fruits à coque, couverts par la marque demandée, pourraient occasionnellement être présents dans les fromages couverts par la marque antérieure. En effet, selon la jurisprudence, le simple fait qu’un produit puisse être utilisé comme pièce, équipement ou composant d’un autre n’est pas suffisant en soi pour prouver que les produits finaux, englobant ces composants, sont similaires, car, notamment, leur nature, leur destination et les clients concernés peuvent être tout à fait différents [arrêt du 27 octobre 2005, Éditions Albert René/OHMI – Orange (MOBILIX), T‑336/03, EU:T:2005:379, point 61].

32      En outre, les produits en cause partagent certes les mêmes canaux de distribution, notamment les épiceries ou les supermarchés, et sont destinés au même public pertinent, constitué par le grand public.

33      Cependant, cette seule circonstance ne saurait fonder une similitude entre les produits en cause. En effet, le fait que des produits puissent être vendus dans les mêmes établissements commerciaux, tels que des grandes surfaces ou des supermarchés, ne revêt aucune importance particulière, dès lors que l’on peut trouver dans ces points de vente des produits de nature très diverse, sans que les consommateurs leur attribuent automatiquement une même origine [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2004, El Corte Inglés/OHMI – Pucci (EMILIO PUCCI), T‑8/03, EU:T:2004:358, point 43].

34      À cet égard, force est de constater que la requérante n’a fourni aucun élément de preuve à l’appui de son affirmation selon laquelle les fruits à coque, couverts par la marque demandée, et les fromages, couverts par la marque antérieure, sont généralement vendus à proximité immédiate les uns des autres dans les supermarchés.

35      Au contraire, il est notoire que les fromages, couverts par la marque antérieure, doivent normalement être réfrigérés, ce qui n’est pas le cas des fruits à coque, couverts par la marque demandée. Contrairement à ce que prétend la requérante, il y a donc lieu de constater que les produits en cause ne se trouvent pas nécessairement à proximité les uns des autres dans les grandes surfaces ou les supermarchés.

36      Par ailleurs, le fait que des produits puissent s’adresser au même public ne suffit pas en lui-même pour que soit constatée une similitude entre les produits en cause, dans la mesure où tous les produits qui s’adressent aux mêmes consommateurs ne sont pas forcément identiques ou similaires.

37      Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les produits litigieux s’inscrivent dans un rapport de concurrence, il y a lieu de rappeler que, afin de pouvoir considérer ces produits comme étant concurrents, il faut qu’ils revêtent un rapport d’interchangeabilité ou de substituabilité entre eux [voir, en ce sens, arrêt du 4 novembre 2003, Díaz/OHMI – Granjas Castelló (CASTILLO), T‑85/02, EU:T:2003:288, point 35].

38      Or, en l’espèce, pour une partie, voire même une grande majorité, du public pertinent, les produits visés par la marque demandée et ceux visés par la marque antérieure ne sont ni interchangeables ni substituables, dans la mesure où les produits visés par la marque antérieure sont d’origine animale et ont un cycle de vie court tandis que les produits désignés par la marque contestée sont d’origine végétale et ont un cycle de vie plus long et ne partagent pas la même destination. Cette conclusion est également étayée par l’argument de la requérante selon lequel certains des produits couverts par la marque antérieure seraient souvent consommés ensemble avec certains des produits couverts par la marque demandée, de sorte qu’ils seraient complémentaires.

39      Enfin, l’application par l’EUIPO des principes d’égalité de traitement et de bonne administration devant être conciliée avec le respect du principe de légalité, la personne qui a formé opposition à l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 73, 75 et 76).

40      En l’espèce, la chambre de recours a conclu à juste titre que l’opposition de la requérante contre la marque demandée ne pouvait qu’être rejetée en raison de l’absence de l’une des conditions nécessaires à l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, de sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de la division d’opposition de l’EUIPO.

41      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu à l’absence de similitude entre les produits couverts par les marques en conflit.

42      Partant, l’une des conditions nécessaires à la constatation d’un risque de confusion n’étant pas satisfaite, la chambre de recours a pu conclure, sans commettre d’erreur de droit ou d’erreur d’appréciation, qu’il n’existait pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent en ce qui concerne la marque demandée et la marque allemande antérieure no 30201144414.

43      En ce qui concerne les autres marques antérieures, la chambre de recours a indiqué que ces marques étaient identiques à la marque allemande antérieure no 302011044414 et qu’elles couvraient une gamme plus restreinte de produits. Il convient de confirmer cette conclusion de la chambre de recours, qui apparait fondée et n’est, au demeurant, pas contestée par les parties.

44      Au vu de ce qui précède, le moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 doit être rejeté et le recours doit être rejeté, sans qu’il soit nécessaire pour le Tribunal de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante tendant au rejet de la demande d’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits concernés ou ni la recevabilité, contestée par l’EUIPO, d’éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal.

 Sur les dépens

45      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

46      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens que dans le cas où une audience serait organisée. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Yadex International GmbH et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supporteront chacun leurs propres dépens.

Costeira

Öberg

Tichy-Fisslberger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 avril 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.