Language of document : ECLI:EU:F:2014:179

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

3 juillet 2014 (*)

« Fonction publique – Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire F‑5/12 DEP,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens récupérables au titre de l’article 92 du règlement de procédure,

Slawomir Bogusz, ancien agent temporaire de l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne, demeurant à Dobroszyce (Pologne), représenté par Me S. A. Pappas, avocat,

partie requérante,

contre

Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (Frontex), représentée par MM. S. Vuorensola, H. Caniard, en qualité d’agents, assistés de Mes A. Duron et D. Waelbroeck, avocats,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de Mme M. I. Rofes i Pujol, président, MM. K. Bradley et J. Svenningsen (rapporteur), juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Par acte parvenu au greffe du Tribunal le 15 février 2014, M. Bogusz a saisi le Tribunal de la présente demande de taxation des dépens au titre de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, à la suite de l’arrêt du Tribunal du 12 juin 2013, Bogusz/Frontex, (F‑5/12, EU:F:2013:75, ci-après l’« arrêt F‑5/12 »).

 Cadre juridique

2        Sous l’intitulé « Dépens récupérables », l’article 91 du règlement de procédure, prévoit :

« Sans préjudice des dispositions de l'article 94, sont considérés comme dépens récupérables :

[…]

b)      les frais exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération du représentant, s'ils sont indispensables. »

 Faits à l’origine du litige

3        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 13 janvier 2012, le requérant a demandé l’annulation, d’une part, de la décision du 15 avril 2011 révoquant ses droits d’accès comme administrateur au réseau de l’Agence européenne pour la gestion et la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (ci-après « Frontex » ou l’« Agence ») ainsi que son accès physique aux serveurs informatiques et à certaines salles techniques du département des technologies de l’information et de la communication de Frontex et, d’autre part, de la décision du 24 mai 2011 mettant un terme à son contrat à l’issue de sa période de stage.

4        Après un échange de mémoires et la tenue d’une audience, le 20 septembre 2012, le Tribunal a, par l’arrêt F‑5/12, rejeté le recours et décidé que Frontex devait supporter ses propres dépens et être condamnée à un quart des dépens exposés par le requérant.

5        À la suite du prononcé de l’arrêt F‑5/12, l’un des agents représentant Frontex a, par courriels du 16 mai 2013, dans un premier temps indiqué au conseil du requérant qu’il acceptait de présenter, aux services financiers de l’Agence, la facture produite par ce dernier et portant sur un montant de 12 550 euros au titre des honoraires, tout en lui précisant, dans un second temps, que ceci ne pourrait pas créer un précédent pour d’autres affaires à venir, étant donné que l’Agence avait négocié des honoraires réduits avec un cabinet d’avocats, et ce pour un montant bien inférieur à 12 550 euros par affaire.

6        Par la suite, Frontex a, par lettre du 18 juin 2013, formellement demandé au conseil du requérant de lui fournir une facture acquittée ainsi que la preuve du paiement par le requérant des honoraires liés à la procédure, telle qu’un extrait de compte bancaire du cabinet d’avocats.

7        Dans un courriel en date du 26 juin 2013, le conseil du requérant a expliqué à l’agent de Frontex que, jusqu’à présent, il n’avait jamais eu à soumettre la preuve des honoraires, question relevant de la relation confidentielle entre son client et lui-même, et que, dans sa pratique, il s’était à chaque fois préalablement entendu avec l’agence ou l’institution défenderesse concernée et émettait, par la suite, la facture du cabinet pour paiement au comptant. Le conseil du requérant a ajouté dans ce courriel que, dans la mesure où l’affaire en cause était « une affaire plutôt normale, [comportant] un échange d’écrits […], des observations à deux reprises pour répondre à de[s] mesures d’organisation de la procédure […] et, enfin, l’audience, il [lui] parai[ssait] raisonnable d’évaluer les dépens à 12 500 [euros] dont [un quart] s’élèv[ait] à 3 125 euros ». Il concluait son courriel en se proposant, si Frontex était d’accord, d’envoyer à cette agence une facture de ce montant pour paiement.

8        Par courriel du 26 juin 2013, l’agent de Frontex a expliqué au conseil du requérant que, dans une autre affaire, en l’occurrence celle ayant donné lieu à l’arrêt Wahlström/Frontex (F‑87/11, EU:F:2013:10), il avait certes accepté, à titre exceptionnel, de soumettre le montant, pourtant important, réclamé par lui en tant que conseil de ce requérant, directement aux services financiers de l’Agence. Cependant, il a notamment fait valoir que, en l’espèce, la demande de l’Agence relative à une facture acquittée n’était pas de nature à porter atteinte au devoir de confidentialité du conseil du requérant ; que l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Wahlström/Frontex (EU:F:2013:10) était très différente de celle ayant donné lieu à l’arrêt F‑5/12 (ci-après l’« affaire F‑5/12 ») ; qu’exiger une facture finale acquittée permettait aux services financiers de Frontex de s’acquitter de leurs obligations, tout en assurant une égalité de traitement dans le recouvrement des dépens relatifs à des affaires mettant en cause l’Agence ; que, d’ailleurs, celle-ci avait déjà, dans une affaire où c’était elle qui réclamait le paiement des dépens à la partie requérante, produit une facture acquittée de son cabinet d’avocats ; que ceci constituait une pratique croissante ; et que, sans la preuve du montant payé par le requérant à son conseil, les services financiers de Frontex ne sauraient se satisfaire d’une entente entre le service juridique de l’Agence et le conseil du requérant.

9        Par courriel du 10 juillet 2013, le conseil du requérant a adressé à Frontex l’état de ses frais et honoraires ainsi qu’une facture, laquelle, à l’issue de calculs plus détaillés effectués par celui-ci, s’élevait, en ce qui concernait le quart à la charge de l’Agence, à un montant de 4 252,50 euros. Par ailleurs, le conseil du requérant précisait dans ce courriel que la transmission à l’Agence de la facture qu’il avait envoyée à son client relevait du secret professionnel et, en tout état de cause, ne constituait pas une condition pour l’exécution de l’arrêt F‑5/12.

10      Par lettre du 22 juillet 2013, Frontex a contesté le montant réclamé par le conseil du requérant au titre des dépens récupérables. En particulier, l’Agence contestait, comme étant excessifs et manifestement disproportionnés, le volume global de 60 heures de travail revendiqué par le conseil du requérant ainsi que le taux horaire de 270 euros qu’il entendait appliquer.

11      À cet égard, Frontex soulignait notamment, dans la lettre du 22 juillet 2013, le fait que l’affaire en cause présentait une difficulté faible ; la circonstance que le conseil du requérant avait représenté d’autres personnes dans des affaires portées contre l’Agence, ce qui lui avait permis de réutiliser, dans l’affaire F‑5/12, des arguments et développements déjà rédigés à l’occasion de ces autres affaires ; et le fait que les questions posées par le Tribunal, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure, étaient très factuelles et techniques, de sorte que la rédaction des réponses n’avait pu être faite qu’avec le concours du requérant lui-même, spécialisé dans les technologies de l’information et de la communication.

12      Par lettre du 19 septembre 2013, le conseil du requérant a contesté les arguments de Frontex et lui a indiqué maintenir ses prétentions quant au volume horaire de travail et au tarif horaire afférent à ses prestations.

 Conclusions des parties

13      Le requérant demande au Tribunal :

–        de fixer le montant des dépens récupérables à 17 010 euros ;

–        de fixer le montant des dépens à la charge de Frontex dans le cadre de l’affaire F‑5/12 à 5 332,50 euros, incluant 1 080 euros au titre des frais exposés par le requérant pour l’introduction de la présente demande.

14      Frontex demande au Tribunal, d’une part, de fixer le montant des dépens récupérables au titre de la procédure ayant conduit à l’arrêt F‑5/12 et, d’autre part, d’estimer les frais relatifs à la présente procédure et de les mettre à la charge du requérant.

 Sur la demande de taxation des dépens

 Arguments des parties

15      À titre liminaire, le requérant conteste la prétention de Frontex à obtenir la production de pièces justifiant la réalité du paiement des honoraires revendiqués par son avocat et faisant l’objet de la facture déjà produite par ce dernier et adressée à l’Agence. À cet égard, le requérant ne partage pas l’interprétation faite par Frontex du point 21 de l’ordonnance X/Parlement (F‑14/08 DEP, EU:F:2009:149) dans lequel il a été jugé qu’il « appartient au requérant de produire des justificatifs de nature à établir la réalité des frais dont il demande le remboursement ». Selon lui, la réalité des prestations de son avocat pourrait être déduite du simple fait que ce dernier a introduit la requête, participé à l’audience et produit différents écrits. En outre, la production d’une facture acquittée par son conseil entrerait en conflit avec les obligations déontologiques qui sont applicables à celui-ci en vertu du droit national de l’État membre dans lequel il exerce.

16      Tout en reconnaissant que le litige en cause dans l’arrêt F‑5/12 ne soulevait pas de questions juridiques nouvelles et que son importance, sous l’angle du droit de l’Union, était limitée, le requérant soutient qu’il posait néanmoins des problèmes juridiques relativement complexes, notamment du fait de l’imbrication des deux décisions contestées. Par ailleurs, le litige aurait suscité une charge de travail importante résultant des exceptions d’irrecevabilité soulevées par Frontex, des questions posées par le Tribunal ainsi que des observations sur les mesures d’organisation de la procédure. Le requérant invoque notamment l’ordonnance Brune/Commission (F‑5/08 DEP, EU:F:2012:42, point 27) pour soutenir que, à l’instar d’une affaire nécessitant deux échanges de mémoires et une audience, l’affaire F‑5/12, laquelle a impliqué, en plus d’un échange de mémoires et d’une audience, la rédaction d’observations sur les mesures d’organisation de la procédure et sur les exceptions d’irrecevabilité, est d’une ampleur supérieure à celle d’une affaire ne présentant pas de difficulté particulière.

17      Quant à l’importance des intérêts économiques en jeu, le requérant soutient que, dans sa situation, d’autant plus dans la mesure où il contestait son licenciement à l’issue d’un stage accompli en qualité d’agent temporaire, la perte d’une chance d’être recruté en tant qu’agent temporaire constituait un enjeu économique substantiel, ainsi que l’a déjà jugé le Tribunal (voir ordonnance Suvikas/Conseil, F‑6/07 DEP, EU:F:2009:74, point 29).

18      S’agissant de la circonstance que son conseil a pu utiliser, dans le contexte de l’affaire F‑5/12, des moyens et arguments qu’il avait déjà élaborés dans le contexte d’autres affaires portées contre l’Agence, le requérant soutient que ces dernières présentaient des situations factuelles et juridiques différentes.

19      Quant au volume de six heures de travail revendiqué au titre des réponses aux mesures d’organisation de la procédure, le requérant indique que, même s’il a collaboré activement à leur rédaction, son conseil a dû communiquer avec lui, préparer le texte et le relire.

20      Le requérant conclut que, en l’espèce, un volume de 60 heures au tarif horaire de 270 euros est raisonnable. Quant aux frais engagés, son conseil aurait appliqué la technique du forfait en les limitant à 5 % des honoraires.

21      En outre, le requérant demande au Tribunal de fixer les dépens relatifs à la présente procédure de taxation des dépens à 1 080 euros correspondant à quatre heures de travail de son conseil au tarif horaire de 270 euros.

22      Frontex fait valoir que, selon la jurisprudence résultant notamment de l’ordonnance U/Parlement (F‑92/09 DEP, EU:F:2011:179, point 37), il appartient au requérant de produire des justificatifs de nature à établir la réalité des frais dont il demande le remboursement et que, à cet égard, contrairement à ce qu’il soutient, la notion de « frais » couvrirait notamment les honoraires de l’avocat. Frontex souligne que la production de pièces justificatives permet d’éviter un risque d’inflation artificielle des dépens réclamés à une agence ou à une institution postérieurement à une condamnation par le Tribunal et que, en tant qu’agence de l’Union, elle est tenue à une bonne gestion des finances publiques impliquant de n’honorer que des factures acquittées. En tout état de cause, s’agissant des frais pour un montant de 810 euros réclamés par le requérant et correspondant à 5 % du montant des honoraires revendiqué, ce dernier resterait en défaut de prouver leur réalité et leur caractère indispensable.

23      S’agissant du volume de 60 heures de travail revendiqué par le requérant, Frontex fait valoir que ce dernier se contredit en admettant le caractère limité de l’importance du litige en cause dans l’affaire F‑5/12, tout en affirmant que ce litige présentait un caractère inhabituel et soulevait des questions juridiques nouvelles. La circonstance que le requérant avait contesté la légalité de deux décisions distinctes de l’Agence ne permettrait pas de conclure que le litige soulevait une difficulté ou une problématique particulières.

24      Frontex relève également que, s’agissant de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Brune/Commission (F‑5/08, EU:F:2010:111), que le requérant invoque en l’espèce, le Tribunal a, dans son ordonnance Brune/Commission (EU:F:2012:42), statuant sur la demande de taxation des dépens en lien avec cette affaire, précisément fixé le volume horaire nécessaire à 40 heures, bien en-deçà des prétentions du requérant en l’espèce.

25      Frontex réitère son argument selon lequel l’élaboration des réponses aux questions techniques posées par le Tribunal dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure impliquait le concours direct et actif du requérant lui-même, ce qui aurait nécessairement allégé la charge de travail de son conseil. De la même manière, même si le litige comportait un intérêt économique indéniable pour les parties, le fait que le conseil du requérant avait auparavant représenté d’autres agents dans des litiges analogues mettant en cause l’Agence aurait été de nature à alléger son travail de représentation dans l’affaire F‑5/12.

26      Enfin, s’agissant du taux horaire de 270 euros, Frontex soutient qu’il est manifestement disproportionné au regard de ce que le Tribunal a retenu dans plusieurs ordonnances de taxation des dépens (voir, notamment, ordonnances X/Parlement, EU:F:2009:149 ; De Nicola/BEI, F‑55/08 DEP, EU:F:2011:155, et Missir Mamachi di Lusignano/Commission, F‑50/09 DEP, EU:F:2012:147), à savoir un taux horaire oscillant entre 180 et 220 euros.

27      Quant aux dépens engagés au titre de la présente procédure, Frontex soutient que cette procédure est le résultat de l’absence de collaboration du requérant en ce qu’il a exigé un montant manifestement disproportionné dans le cadre des pourparlers, d’ailleurs engagés à l’initiative rapide de l’Agence, et du refus de son conseil de fournir des pièces justificatives à Frontex. Dans ces circonstances, il serait inéquitable de mettre à sa charge les dépens qu’il a exposés aux fins de la présente procédure.

 Appréciation du Tribunal

28      À titre liminaire, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables « les frais exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération du représentant, s’ils sont indispensables ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins.

 Sur les dépens récupérables en lien avec l’arrêt F‑5/12

29      Selon le requérant, la procédure ayant conduit à l’arrêt F‑5/12 l’a exposé à un coût total de 17 010 euros, qui se décompose en un montant de 16 200 euros au titre des 60 heures de travail facturées par son avocat au tarif unitaire de 270 euros et en un montant de 810 euros couvrant des frais calculés forfaitairement à 5 % des honoraires totaux. Ceci figure en détails dans l’état des frais et honoraires de son conseil.

30      À cet égard, s’agissant de l’argument de Frontex quant à la possibilité d’exiger une facture acquittée pour prouver la réalité des frais indispensables et, partant, récupérables, exposés par le requérant aux fins de la procédure dans l’affaire F‑5/12, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le juge de l’Union n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces rémunérations peuvent être récupérées auprès de la partie condamnée aux dépens (ordonnance Cuallado Martorell/Commission, F‑96/09 DEP, EU:F:2013:186, point 28).

31      Or, il peut être déduit du fait que l’avocat du requérant a introduit une requête, participé à l’audience et produit différents écrits que cet avocat a effectivement effectué des actes et prestations nécessaires aux fins de la procédure devant le Tribunal (ordonnance Martinez Erades/SEAE, F‑64/12 DEP, EU:F:2013:111, point 21).

32      S’agissant de la détermination du montant de ces prestations nécessaires, le Tribunal rappelle qu’il appartient certes au requérant de produire des justificatifs de nature à établir la réalité des frais dont il demande le remboursement (ordonnance Martinez Erades/SEAE, EU:F:2013:111, point 20).

33      Cependant, en statuant sur une demande de taxation des dépens, d’une part, le juge de l’Union n’a pas à prendre en considération un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (ordonnance Leeuwarder Papierwarenfabriek/Commission, 318/82‑DEPE, EU:C:1985:468, point 2). D’autre part, et contrairement à ce que soutient Frontex, même si la production d’une facture acquittée est susceptible d’établir la réalité du montant des frais auxquels le requérant a été exposé pour sa représentation aux fins de la procédure devant le Tribunal (voir, en ce sens, ordonnance Comunidad autónoma de La Rioja/Diputación Foral de Vizcaya e.a., C‑465/09 P‑DEP, EU:C:2013:112, points 26 et 27), il n’en demeure pas moins que la preuve du paiement des dépens dont la récupération est demandée n’est pas une condition préalable à la taxation par le Tribunal des dépens récupérables (voir ordonnance Kronofrance/Allemagne e.a., C‑75/05 P‑DEP, EU:C:2013:458, point 30).

34      Il appartient donc au Tribunal, nonobstant l’absence de production par le requérant d’une facture acquittée ou de la preuve d’un paiement effectif à son conseil, de déterminer à concurrence de quel montant les honoraires de ce dernier peuvent être récupérés auprès de Frontex, partie condamnée à un quart des dépens du requérant par l’arrêt F‑5/12.

35      Pour ce faire, il est de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions de l’Union de nature tarifaire, le juge de l’Union doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu nécessiter de la part des agents ou conseils qui sont intervenus et des intérêts économiques que le litige a représenté pour les parties. La liberté d’appréciation du juge de l’Union en la matière peut le conduire à fixer les dépens récupérables à un montant inférieur à celui que la partie qui est tenue d’en supporter la charge aurait été disposée à payer à l’autre partie (ordonnance X/Parlement, EU:F:2009:149, point 23, et la jurisprudence citée).

36      S’agissant de l’objet et de la nature du litige dans l’affaire F‑5/12, le Tribunal constate que, ainsi que le requérant le reconnaît lui-même, ce litige ne présentait pas de difficulté particulière, même si deux décisions de nature et de portée différentes étaient contestées et malgré les exceptions d’irrecevabilité soulevées par l’Agence. De la même manière, l’importance de l’affaire sous l’angle du droit de l’Union était limitée.

37      S’agissant des difficultés de la cause, le Tribunal reconnaît que le caractère technique du domaine dans lequel était employé le requérant et auquel se rapportait directement l’une des décisions attaquées, à savoir celui des technologies de l’information et de la communication, a pu constituer une difficulté particulière pour son conseil. Cela étant, précisément en raison de ce caractère technique, le contenu des réponses aux mesures d’organisation de la procédure décidées par le Tribunal sollicitait davantage l’expertise du requérant que celle de son conseil.

38      Quant à l’intérêt économique du litige, celui-ci revêtait une importance particulière puisque l’une des décisions contestées consistait à mettre fin au contrat d’engagement d’une durée de cinq ans au cours de la première année d’engagement par Frontex, et, partant, de priver le requérant de l’emploi qu’il aurait pu conserver pendant les quatre années suivantes.

39      En ce qui concerne l’ampleur du travail fourni, l’état des frais et honoraires, le requérant avance le nombre de 60 heures.

40      À cet égard, il convient de rappeler que le juge de l’Union n’est pas lié par le décompte déposé par la partie qui entend récupérer des dépens, mais qu’il lui appartient de tenir uniquement compte du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure (ordonnances Schönberger/Parlement, F‑7/08 DEP, EU:F:2010:32, point 29, et Missir Mamachi di Lusignano/Commission, EU:F:2012:147, point 21).

41      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation du volume d’heures indispensable aux fins de la procédure dans l’affaire F‑5/12 en le fixant à 35 heures.

42      Quant au tarif horaire revendiqué par le conseil du requérant, le Tribunal estime que, dans une affaire telle que celle F‑5/12, un tarif de 270 euros apparaît disproportionné et qu’une rémunération à hauteur de 250 euros reflète davantage le niveau de rémunération raisonnable pouvant être dû à un avocat dans une affaire de cette nature et revêtant certains aspects techniques.

43      Les honoraires d’avocat indispensables pour assurer la représentation du requérant dans l’affaire F‑5/12 doivent être évalués en l’espèce à un montant de 8 750 euros. Partant, Frontex, qui a été condamnée à supporter un quart de ce montant, devra rembourser au requérant un montant de 2 187,50 euros à ce titre.

44      S’agissant des frais généraux, le Tribunal relève que le requérant ne produit pas les factures afférentes à ces frais, mais se limite à revendiquer un forfait global de 5 % des honoraires récupérables. Dès lors qu’un tel taux n’est pas déraisonnable (ordonnances Martinez Erades/SEAE, EU:F:2013:111, point 30, et Brune/Commission, EU:F:2012:42, point 38, et la jurisprudence citée), il convient en l’espèce, eu égard au montant de 2 187,50 euros précédemment retenu au titre des honoraires récupérables, de fixer le montant des frais généraux récupérables à 110 euros.

 Sur les dépens engagés au titre de la procédure de taxation des dépens

45      Même si, formellement, il n’y a pas lieu de statuer séparément sur les frais et honoraires exposés aux fins de la présente procédure, il appartient néanmoins au Tribunal, lorsqu’il fixe les dépens récupérables, de tenir compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de l’ordonnance de taxation des dépens (ordonnances Schönberger/Parlement, EU:F:2010:32, points 46 et 47).

46      En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que l’avocat du requérant, après avoir initialement avancé un montant total de 12 500 euros, qui était certes supérieur à celui retenu dans la présente ordonnance, mais se situait dans une même échelle de grandeur, a ultérieurement fait état d’un montant de 16 200 euros qui est clairement excessif et qui justifiait le refus de Frontex d’honorer un quart de la facture ainsi émise au motif que le montant des honoraires avait été artificiellement augmenté.

47      En outre, il convient de rappeler qu’une demande de taxation des dépens présente un caractère plutôt standardisé et se distingue, en principe, par l’absence de toute difficulté pour l’avocat qui a déjà traité du fond de l’affaire (voir ordonnances France Télévisions/TF1, C‑451/10 P‑DEP, EU:C:2012:323, point 32, et OCVV/Schräder, C‑38/09 P‑DEP, EU:C:2013:679, point 42).

48      Dans ces circonstances, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation du montant raisonnable des dépens récupérables liés à la présente procédure en le fixant à 250 euros (voir, en ce sens, ordonnance Schwaaner Fischwaren/Rügen Fisch, C‑582/11 P‑DEP, EU:C:2013:754, point 33).

49      Il résulte de ce qui précède que le montant total des dépens récupérables par le requérant auprès de Frontex dans l’affaire F‑5/12 s’élève à 2 547,50 euros.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne à M. Bogusz au titre des dépens récupérables dans l’affaire F‑5/12, Bogusz/Frontex, est fixé à 2 547,50 euros.

Fait à Luxembourg, le 3 juillet 2014.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       M. I. Rofes i Pujol


* Langue de procédure : le français.