Language of document : ECLI:EU:T:2008:482

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

12 novembre 2008 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative Limoncello di Capri – Marque nationale verbale antérieure LIMONCHELO – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑210/05,

Nalocebar – Consultores e Serviços, Ldª, établie à São Pedro (Portugal), représentée par Mes G. Pasquarella et R. Pasquarella, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par Mme M. Capostagno, puis par M. O. Montalto, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Limiñana y Botella, SL, établie à Monforte del Cid (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 18 mars 2005 (affaire R 646/2004‑1), relative à une procédure d’opposition entre Limiñana y Botella, SL et Nalocebar – Consultores e Serviços, Ldª,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de Mme V. Tiili (rapporteur), président, M. F. Dehousse et Mme I. Wiszniewska-Białecka, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 mai 2005,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 8 décembre 2005,

à la suite de l’audience du 17 juin 2008,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 juillet 2000, Big Ben Establishment a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif reproduit ci-après, qui, selon la description contenue dans la demande, est de couleur bleue, jaune, verte, blanche, bleue ciel, grise, dorée, noire et rouge :

Image not found

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 30, 32 et 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 30 : « Produits de pâtisserie, confiserie, caramels, chocolat, chocolats et glaces à base de citron ou fourrés de crème au citron » ;

–        classe 32 : « Sirops et autres boissons à base de citron compris en classe 32 » ;

–        classe 33 : « Liqueur à base de citron ».

4        Cette demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 103/2001, du 3 décembre 2001.

5        Le 27 février 2002, l’opposante, Limiñana y Botella, SL, a formé une opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94, à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée. L’opposition était fondée sur l’enregistrement espagnol n° 2 020 372, demandé le 27 mars 1996, de la marque verbale LIMONCHELO, désignant des produits relevant de la classe 33 (« Vins, spiritueux et liqueurs »).

6        L’opposition concernait une partie des produits désignés dans la demande de marque communautaire, à savoir les produits relevant des classes 32 et 33. Elle était fondée sur tous les produits visés par la marque antérieure.

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94.

8        Par décision du 15 juin 2004, la division d’opposition a accueilli l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Elle a considéré qu’il existait un risque de confusion sur le territoire espagnol, compte tenu de l’identité et de la similitude des produits en question et de la similitude visuelle et phonétique entre les marques en conflit.

9        Le 27 juillet 2004, Big Ben Establishment a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 18 mars 2005 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a rejeté le recours. Elle a considéré que, compte tenu de la ressemblance entre les marques en conflit et de la concordance des produits en question, il existait un risque que les consommateurs espagnols confondent ou associent leur origine commerciale.

11      La demande de marque Limoncello di Capri a été transférée à la requérante, Nalocebar – Consultores e Serviços, Ldª. Ce transfert a été inscrit au registre des marques communautaires le 16 juin 2005.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité des documents produits pour la première fois devant le Tribunal

14      L’OHMI fait valoir que l’annexe f) de la requête est une pièce nouvelle en ce qu’elle n’a pas été produite devant l’OHMI.

15      L’annexe f) de la requête consiste en des extraits de sites Internet, imprimés postérieurement à la procédure administrative devant l’OHMI. En outre, l’annexe g) de la requête, qui consiste en une copie du certificat d’enregistrement d’une marque figurative Limoncello di Capri aux États-Unis, en date du 29 juin 2004, n’a pas été produite devant l’OHMI, ce que la requérante a confirmé lors de l’audience.

16      Dès lors, ces pièces, produites pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent pas être prises en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 19, et la jurisprudence citée].

 Sur le fond

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

18      La requérante fait valoir qu’il n’existe pas de risque de confusion entre les marques en conflit. La chambre de recours n’aurait pas apprécié correctement le caractère distinctif réel des mots « limoncello » et « limonchelo ». Le premier serait un terme générique désignant un certain type de liqueur au citron, tandis que le second ne serait que la simple traduction du mot « limoncello » en espagnol. En outre, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de l’importance des autres éléments verbaux et figuratifs de la marque demandée.

19      L’OHMI soutient que la chambre de recours a correctement apprécié l’existence du risque de confusion.

20      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la validité d’une marque nationale, en l’espèce celle de l’opposante, ne peut pas être mise en cause dans le cadre d’une procédure d’enregistrement d’une marque communautaire, mais uniquement dans le cadre d’une procédure de nullité entamée dans l’État membre concerné [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 55, et du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, non encore publié au Recueil, point 36]. Ainsi, la marque LIMONCHELO doit être considérée comme une marque valide en Espagne aux fins de la présente procédure.

21      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement nº 40/94, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

22      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

23      Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

24      Aux fins de cette appréciation globale, le consommateur moyen est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a cependant lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause et le fait que le consommateur n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire [arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26, et arrêt du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 38].

25      En l’espèce, la marque sur laquelle l’opposition était fondée est une marque nationale enregistrée en Espagne. Dès lors, le territoire pertinent pour l’analyse du risque de confusion est le territoire espagnol.

26      Étant donné que les produits en question sont des produits de consommation courante, le public pertinent est constitué par les consommateurs moyens espagnols normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés.

27      Il n’est pas contesté que les produits couverts par les marques en conflit sont partiellement identiques et partiellement similaires. En effet, la division d’opposition a considéré que les liqueurs désignées par la marque antérieure couvraient aussi les liqueurs à base de citron et, partant, que ces produits relevant de la classe 33 étaient identiques. Quant aux sirops et autres boissons à base de citron compris dans la classe 32, la division d’opposition a considéré qu’ils étaient analogues aux vins, aux spiritueux et aux liqueurs, ce que la requérante n’a pas contesté et que la chambre de recours a confirmé. Ainsi, il n’y a pas lieu d’examiner davantage la similitude des produits en question.

 Sur la comparaison des signes en conflit

28      Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips‑Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et la jurisprudence citée].

29      La requérante considère que les signes en conflit ne sont pas similaires, tandis que l’OHMI conclut à leur similitude.

30      Les signes en conflit sont les suivants :

Marque antérieure          Marque demandée

LIMONCHELO          Image not found

31      La marque antérieure est constituée d’un seul élément, à savoir l’élément verbal LIMONCHELO. Étant donné qu’il est le seul élément de cette marque, l’argument de la requérante, selon lequel ce mot serait devenu usuel en langue espagnole, n’a pas d’importance aux fins de la comparaison des signes en conflit.

32      La marque demandée est, quant à elle, selon sa description, constituée d’une surface quadrillée de losanges sur laquelle des citrons sont représentés. Au milieu du logo se trouve l’élément verbal « limoncello di Capri ». Dans la partie inférieure de sa surface apparaît un écusson de fantaisie au centre duquel figure une tranche de citron. Cette partie inférieure est complétée par l’élément verbal « tradizionale liquore di limoni » et d’autres éléments verbaux qui ne sont pas clairement perceptibles.

33      La chambre de recours a considéré que le mot « limoncello » constituait l’élément dominant de la marque demandée et que, partant, les signes en conflit étaient visuellement et phonétiquement quasiment identiques, tandis que la requérante fait valoir, en substance, que, étant donné que le mot « limoncello » ne possède pas de caractère distinctif, dès lors qu’il désigne les liqueurs à base de citron, il ne peut constituer l’élément dominant de cette marque aux fins de la comparaison des signes en conflit.

34      Il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêts de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, points 41 et 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, points 42 et 43).

35      Il y a lieu de relever, tout d’abord, que le mot « capri » occupe visuellement une place quasiment aussi importante que le mot « limoncello » dans la marque demandée. En ce qui concerne les autres éléments verbaux de la marque demandée, il convient de relever que les éléments verbaux contenus dans la partie inférieure de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, car la taille des caractères de l’élément verbal « tradizionale liquore di limoni » est bien plus petite que celle des mots « limoncello » et « capri » et n’attire aucunement l’attention du public pertinent. De même, les autres éléments verbaux de la marque demandée sont à peine perceptibles. Les éléments figuratifs de la marque demandée, situés tant dans sa partie supérieure que dans sa partie inférieure, sont secondaires dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci. Ces éléments n’attirent en effet pas l’attention des consommateurs moyens des produits en question, lesquels sont régulièrement confrontés à des images de citron apposées sur les liqueurs à base de citron ainsi qu’à des écussons apposés sur les boissons en général.

36      En outre, il y a lieu de rappeler que les consommateurs des produits en cause sont habitués à les désigner et à les reconnaître en fonction de l’élément verbal qui sert à les identifier [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 13 juillet 2005, Murúa Entrena/OHMI – Bodegas Murúa (Julián Murúa Entrena), T‑40/03, Rec. p. II‑2831, point 56, et du 12 mars 2008, Sebirán/OHMI – El Coto de Rioja (Coto d’Arcis), T‑332/04, non publié au Recueil, point 38].

37      Ensuite, en ce qui concerne plus particulièrement les mots « capri » et « limoncello », il y a lieu de relever que, même si le mot « capri » est également central, il est écrit en caractères légèrement plus petits que le mot « limoncello », qui est le premier mot figurant sur la marque demandée, attirant ainsi davantage l’attention du consommateur. Partant, le mot « capri » occupe une place subsidiaire dans l’impression d’ensemble produite par la marque demandée. En effet, eu égard à la place centrale du mot « limoncello », au fait qu’il est écrit en blanc sur un fond bleu, ce qui le fait bien ressortir de ce fond, et à sa taille par rapport à tous les autres éléments de la marque demandée, il y a lieu de constater que c’est ce mot que le public pertinent garde en mémoire.

38      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que le mot « limoncello » est susceptible de dominer l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par la marque demandée.

39      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante, selon lequel le mot « limoncello » n’a pas de caractère distinctif, car il est descriptif, usuel et générique. Sans pour autant examiner la question de savoir si le mot « limoncello » est descriptif, usuel ou générique pour le public pertinent, il y a lieu de rappeler que, en tout état de cause, un éventuel caractère distinctif faible d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne saurait constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe ou de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [arrêts du Tribunal du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, Rec. p. II‑1677, point 32, et PAGESJAUNES.COM, précité, point 54 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 juillet 2004, AVEX/OHMI – Ahlers (a), T‑115/02, Rec. p. II‑2907, point 20].

40      Par conséquent, il n’y a pas lieu de se prononcer, à ce stade de l’examen, sur l’éventuel caractère distinctif faible du mot « limoncello », car il est évident, eu égard aux considérations mentionnées aux points 35 à 38 ci-dessus, que c’est ce mot qui est susceptible de s’imposer à la perception du public pertinent et d’être gardé en mémoire par celui-ci (voir, en ce sens, arrêt PAGESJAUNES.COM, précité, point 55).

41      Ainsi, en ce qui concerne la comparaison visuelle des signes en conflit, considérés chacun dans son ensemble, il y a lieu de relever qu’il existe une certaine similitude entre ceux-ci. En effet, les mots « limoncello » et « limonchelo » sont visuellement quasiment identiques, ce qu’admet la requérante elle-même, et, partant, il y a lieu de constater que la marque antérieure est incluse dans la marque demandée. Il convient de relever que les différences liées à l’ajout du mot « capri », ainsi qu’aux autres éléments verbaux ou figuratifs qui sont négligeables ou, à tout le moins secondaires, comme cela a été constaté au point 35 ci-dessus, ne sont pas suffisamment importantes pour écarter cette similitude créée par le mot « limoncello », qui constitue le premier mot de la marque demandée et attire ainsi davantage l’attention du consommateur.

42      S’agissant de la comparaison phonétique, il convient de relever que la requérante admet elle-même que les mots « limoncello » et « limonchelo » sont phonétiquement similaires. Elle ne fait état d’aucune différence de prononciation entre ces deux mots. Les deux premières syllabes « li » et « mon » se prononcent d’une manière identique, et les deux syllabes « cello » et « chelo », bien qu’écrites différemment, se prononcent d’une manière similaire. En effet, il apparaît que le public espagnol prononce le mot « limoncello » selon les règles de prononciation italiennes, c’est-à-dire de la même manière que le mot « limonchelo » en espagnol. Bien que les marques en conflit diffèrent quant au nombre de mots, il existe une similitude phonétique entre ces marques, car la marque antérieure est entièrement incluse dans la marque demandée. De plus, l’élément commun aux deux marques en cause constitue le premier mot de la marque demandée et se prononce ainsi en premier lieu. Ni l’ajout du mot séparé « capri » ni l’ajout des autres éléments verbaux ne remettent en cause cette similitude. En effet, il ne saurait être aucunement exclu que, lors de commandes orales, le consommateur concerné prononce uniquement ce premier mot. Il est notoire que la liqueur à base de citron est souvent consommée à la suite d’une commande passée oralement, en tant que digestif à la fin d’un repas. Le mot « limoncello » constitue donc l’élément dominant de la marque demandée du point de vue phonétique. Dès lors, il existe une similitude phonétique importante entre les signes en conflit.

43      En ce qui concerne la comparaison conceptuelle des signes en conflit, il n’est pas exclu que, pour le public pertinent, les mots « limoncello » ou « limonchelo » puissent faire allusion à une liqueur à base de citron. S’agissant de l’expression « di capri », elle est vraisemblablement comprise par ce public comme signifiant « de Capri ». Quant à l’élément verbal « tradizionale liquore di limoni » de la marque demandée, il se limite à indiquer qu’il s’agit d’une liqueur traditionnelle de citron. Bien qu’écrite en langue italienne, il est tout à fait vraisemblable que cette dernière expression, qui correspond à « tradicional licor de limón » en espagnol, est également compréhensible pour le public espagnol. Partant, la signification conceptuelle de la marque demandée pour le public espagnol est « liqueur à base de citron, provenant de Capri, liqueur traditionnelle de citron ». Ainsi, la seule différence conceptuelle par rapport à la marque antérieure consiste en la précision que cette liqueur vient de Capri et qu’il s’agit d’une liqueur traditionnelle de citron. Or, rien n’empêche que les produits couverts par la marque antérieure viennent de Capri, bien que le mot constituant cette marque soit écrit selon les règles orthographiques espagnoles. De plus, il y a lieu de rappeler que tout risque de confusion ne saurait être exclu au seul motif que les lieux de production des boissons en cause sont différents (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, points 29 et 30, et ordonnance de la Cour du 24 avril 2007, Castellblanch/OHMI, C‑131/06 P, non publiée au Recueil, point 46). Par conséquent, il existe également une similitude conceptuelle des signes en conflit.

44      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure qu’il existe une certaine similitude entre les marques en cause. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’accepter la constatation de la chambre de recours, au point 24 de la décision attaquée, selon laquelle les marques sont quasiment identiques d’un point de vue visuel et d’un point de vue phonétique. Cependant, cette erreur n’est pas suffisante en elle-même pour conduire à l’annulation de la décision attaquée si la chambre de recours a correctement conclu qu’il existait un risque de confusion.

45      Par conséquent, il convient encore d’apprécier globalement s’il existe un risque de confusion entre les marques en conflit.

 Sur le risque de confusion

46      Il y a lieu de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, et notamment la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêt Canon, précité, point 17).

47      La position de la chambre de recours quant à l’existence d’un risque de confusion est exposée, au point 25 de la décision attaquée, comme suit :

« Compte tenu de la ressemblance entre les marques et de la concordance des produits qu’elles désignent, compris dans les classes 32 et 33, il existe un risque que les consommateurs espagnols confondent ou associent leur origine commerciale […] »

48      La requérante fait valoir que, étant donné que le mot « limonchelo », en tant que traduction espagnole du mot « limoncello », est devenu usuel en langue espagnole en Espagne pour désigner les produits en question, la marque antérieure ne peut bénéficier d’aucune protection.

49      Il convient de relever, à cet égard, que la chambre de recours n’a aucunement examiné le caractère distinctif de la marque antérieure LIMONCHELO. S’agissant de la marque demandée et du mot « limoncello », elle a considéré que le caractère distinctif limité n’avait pas été démontré. La chambre de recours a estimé que la requérante n’avait pas apporté de preuve à l’appui de ses affirmations selon lesquelles le mot « limoncello » est connu en tant que terme générique désignant un certain type de liqueur en Espagne. Tout en relevant que les documents produits par la requérante devant l’OHMI prouvaient l’usage générique de ce mot en Italie, la chambre de recours a considéré qu’aucune preuve concernant le marché espagnol n’avait été présentée. (DA, point 23) À cet égard, il y a lieu de relever que, contrairement à ce qu’a estimé la chambre de recours, la requérante avait produit des copies des recherches effectuées via un site Internet concernant le mot « limoncello », comportant aussi une liste de sites espagnols utilisant ce mot.

50      Cependant, et sans qu’il soit besoin d’examiner les différents arguments de la requérante et la force probante des documents relatifs au caractère distinctif faible allégué des mots « limoncello » ou « limonchelo », il suffit de constater qu’une telle erreur n’est pas pertinente en l’espèce, car même si la chambre de recours n’avait à tort pas reconnu à ces mots un caractère distinctif faible, une telle erreur ne saurait conduire à l’annulation de la décision attaquée.

51      En effet, il convient de relever que la reconnaissance d’un caractère faiblement distinctif de la marque antérieure n’empêche pas de constater l’existence d’un risque de confusion en l’espèce. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion (voir, par analogie, arrêt Canon, précité, point 24), il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [arrêt PAGESJAUNES.COM, précité, point 70 ; voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec. p. II‑949, point 61].

52      En outre, la thèse défendue par la requérante à cet égard aurait pour effet de neutraliser le facteur tiré de la similitude des marques au profit de celui fondé sur le caractère distinctif de la marque nationale antérieure auquel serait accordée une importance excessive. Il en résulterait que, dès lors que la marque nationale antérieure n’est dotée que d’un faible caractère distinctif, un risque de confusion n’existerait qu’en cas de reproduction complète de celle‑ci par la marque dont l’enregistrement est demandé, et ce quel que soit le degré de similitude entre les signes en cause (ordonnance de la Cour du 27 avril 2006, L’Oréal/OHMI, C‑235/05 P, non publiée au Recueil, point 45). Un tel résultat ne serait toutefois pas conforme à la nature même de l’appréciation globale que les autorités compétentes sont chargées d’entreprendre en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 (arrêt de la Cour du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/Devinlec et OHMI, C‑171/06 P, non publié au Recueil, point 41, et arrêt PAGESJAUNES.COM, précité, point 71).

53      Il résulte de ce qui précède, en particulier du fait que le public pertinent ne garde en mémoire qu’une image imparfaite des marques en cause, de sorte que leur élément commun, le mot « limoncello » ou « limonchelo », génère une certaine similitude entre celles-ci, et de l’interdépendance des différents facteurs à prendre en considération, les produits concernés étant identiques ou similaires, qu’il existe, en l’espèce, un risque de confusion.

54      Par conséquent, il convient de constater que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

55      Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

56      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Nalocebar – Consultores e Serviços, Ldª est condamnée aux dépens.

Tiili

Dehousse

Wiszniewska-Białecka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 novembre 2008.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.