Language of document : ECLI:EU:T:1999:40

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

9 mars 1999 (1)

«Fonctionnaires — Procédure de recrutement — Application de l'article 29, paragraphe 1, du statut — Recrutement d'une personne figurant sur la liste de réserve d'un concours général réservé aux ressortissants des nouveaux États membres — Rejet de candidature»

Dans l'affaire T-273/97,

Pierre Richard, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Luxembourg, représenté par Me André Lutgen et, lors de la procédure orale, par Me Jeanne Feltgen, avocats au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de ces derniers, 1, rue Jean-Pierre Brasseur,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. João Sant'Anna, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès du secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d'une part, une demande d'annulation de la décision du Parlement européen portant rejet de la candidature du requérant au poste visé par l'avis de vacance n° 8011 et, d'autre part, une demande d'annulation de la

nomination de Mme S. audit poste ainsi que de la procédure ayant conduit à cette nomination,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et Mme P. Lindh, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 8 décembre 1998,

rend le présent

Arrêt

Faits à l'origine du recours

1.
    Le 24 juin 1996, le Parlement européen a publié l'avis de vacance d'emploi n° 8011 pour le poste (grade A 3) de chef de la division «équipement et service intérieur» de la direction A «infrastructures et service intérieur» de la direction générale Administration (DG VI), modifié par corrigendum du 28 juin 1996, supprimant l'exigence relative à la connaissance de la langue française. Cet avis de vacance se lit comme suit:

«[...]

L'autorité investie du pouvoir de nomination a décidé d'ouvrir la procédure de pourvoi de cet emploi, conformément aux dispositions statutaires, d'abord par voie de mutation ou de promotion.

Au cas où cet emploi ne pourrait être pourvu à cette phase, les possibilités d'autres procédures prévues par le statut des fonctionnaires seront examinées.

[...]

Qualifications et connaissances requises

—    connaissances de niveau universitaire sanctionnées par un diplôme ou expérience professionnelle garantissant un niveau équivalent;

—    aptitude confirmée à organiser et à diriger efficacement un service aux tâches multiples et variées;

—    connaissances et expérience professionnelle dans des domaines analogues à ceux repris sous 'Nature des fonctions‘;

—    expérience confirmée dans le domaine de la gestion budgétaire;

—    connaissance approfondie d'une des langues officielles de l'Union européenne, très bonne connaissance d'une autre de ces langues. Pour des raisons fonctionnelles, la connaissance de la langue française est exigée.

[...]»

2.
    Parmi les douze candidatures recevables, deux personnes se sont présentées au titre de la mutation et dix personnes au titre de la promotion, dont le requérant. Celui-ci, administrateur principal de grade A 4, s'est porté candidat le 3 juillet 1996.

3.
    Par note du 25 juillet 1996, le directeur général de la DG VI a proposé la promotion du requérant au poste considéré.

4.
    Le chef de la division du personnel, ayant pris connaissance du choix du directeur général de la DG VI, lui a adressé le 23 septembre 1996 une note ainsi rédigée:

«Suite à l'avis de vacance d'emploi susmentionné, vous avez, par note du 25 juillet 1996, conclu que sur les douze candidatures recevables au titre de la mutation ou de la promotion seuls deux candidats possédaient les qualifications nécessaires et remplissaient les conditions de base de l'avis de vacance d'emploi en question, et proposé la promotion de M. Richard.

Afin d'élargir la gamme des candidats potentiels à cette vacance d'emploi, et conformément aux instructions de Monsieur le Président, je vous prie de bien vouloir consulter les listes de réserve établies à l'issue des concours généraux A 3 réservés aux ressortissants des nouveaux États membres avant de prendre une décision finale.»

5.
    Par note du 26 septembre 1996 le directeur général de la DG VI a répondu à la note du chef de la division du personnel en précisant qu'il appartenait à l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») de se prononcer sur la proposition de nomination du requérant et que, en l'état actuel de la procédure, il n'avait pas à consulter les autres listes de réserve.

6.
    Par une autre note du 11 octobre 1996, le directeur général de la DG VI a exposé les critères fonctionnels expliquant la proposition de nomination du requérant et a, à cet égard, mentionné ce qui suit:

«Si l'[AIPN] devait considérer ces qualifications fonctionnelles comme négligeables au profit de critères plus géographiques, l'examen des listes des candidats issus des concours suédois (PE/79/A), finlandais (PE/78/A) et autrichiens (PE/77/A) me conduit à penser que deux candidats, après une période d'adaptation sans doute longue et ingrate, pourraient à la rigueur couvrir le poste, dans l'ordre préférentiel suivant: 1) Mme S. (suédoise), 2) M. P. (finlandais).»

7.
    Le 8 janvier 1997, le secrétaire général du Parlement (ci-après «secrétaire général») a proposé de nommer Mme S., candidate de nationalité suédoise, au poste vacant, proposition qui a été acceptée le 9 janvier 1997 par l'AIPN.

8.
    Par lettre du 11 février 1997, le service du recrutement a informé le requérant que l'AIPN n'avait pas retenu sa candidature.

9.
    Le 6 mai 1997, le requérant a introduit une réclamation par laquelle il sollicitait l'annulation de la décision de l'AIPN.

10.
    Le bureau du Parlement a conclu au rejet de cette réclamation lors de sa réunion du 17 juillet 1997. Le président du Parlement a adressé une lettre au requérant le 23 juillet 1997 mentionnant, notamment, ce qui suit:

«Le bureau, en tant qu'[AIPN], a analysé votre réclamation et m'a chargé de vous transmettre la décision respective ainsi que sa motivation.

Je vous rappellerai d'abord que, lorsqu'il y a lieu de pourvoir un poste vacant, l'AIPN n'est pas tenue, d'une manière absolue, de le faire par le biais d'une promotion ou d'une mutation, même si à ce titre elle dispose de candidatures valables, mais qu'elle doit simplement examiner successivement si chacune des procédures, prévues à l'article 29, paragraphe 1, du statut, est susceptible d'aboutir à la nomination d'une personne possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité.

L'AIPN a procédé à l'examen des candidatures au titre de la mutation et de la promotion et est arrivée à la conclusion que le nombre réduit de candidats valables ne permettait pas un choix suffisant en vue du pourvoi du poste. Elle a ainsi décidé, pour élargir son choix, de passer à l'évaluation des lauréats inscrits sur les listes d'aptitude de concours généraux au lieu de procéder à la nomination d'un des candidats valables qui s'était présenté au titre de la promotion. En prenant cette décision, l'AIPN, qui jouit dans cette matière d'un large pouvoir d'appréciation, n'a pas commis une violation de vos droits statutaires en tant que candidat à ce poste.

[...]

Ayant considéré que les deux candidats proposés avaient des mérites sensiblement égaux et que tous les deux remplissaient les conditions et qualifications requises — et que les impératifs d'intérêt du service et de prise en considération des mérites

personnels des candidats étaient donc assurés —, l'AIPN a décidé de prendre encore en considération d'autres éléments de choix, à savoir le besoin d'assurer une représentation adéquate de ressortissants des nouveaux États membres en vue de remplir l'objectif fixé par l'article 27 du statut de maintenir ou de rétablir l'équilibre géographique au sein de son personnel.»

Procédure et conclusions des parties

11.
    C'est dans ces circonstances que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 octobre 1997, le requérant a introduit le présent recours.

12.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a, d'une part, décidé d'ouvrir la procédure orale et, d'autre part, invité la partie défenderesse à expliquer précisément quelle procédure, au titre de l'article 29 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»), a été appliquée aux fins de pourvoir au poste en cause, et à justifier le choix d'une telle procédure. Le Parlement a déféré à cette invitation lors de l'audience.

13.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience publique du 8 décembre 1998.

14.
    Lors de l'audience, la représentante de la partie requérante a allégué l'existence d'un fait nouveau. Mme S., candidate nommée, aurait été mutée le 3 novembre 1998 dans une autre division, à la suite d'un rapport d'une commission d'audit chargée d'enquêter sur les difficultés qui s'étaient présentées dans la division «équipement et service intérieur». La partie requérante demande, en conséquence, au Tribunal d'ordonner, en vertu de l'article 65 de son règlement de procédure, la production dudit document. Le Parlement a déclaré qu'il ignorait l'existence d'un tel rapport d'audit et que, en tout état de cause, la restructuration de cette division ne résultait pas, contrairement aux allégations de la partie requérante, de l'incompétence de Mme S.

15.
    M. Richard, partie requérante, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    annuler la décision de l'AIPN portant rejet de sa candidature au poste litigieux;

—    annuler la procédure ayant conduit à l'adoption de la décision litigieuse;

—    annuler la décision de nomination de Mme S.;

—    annuler la décision prise par le bureau lors de sa réunion du 17 juillet 1997, rejetant la réclamation introduite par le requérant en application de l'article 90, paragraphe 2, du statut;

—    ordonner à l'AIPN de statuer sur sa candidature;

—    lui donner acte qu'il se réserve le droit de réclamer en temps et lieu utiles réparation du préjudice tant matériel que moral subi.

16.
    Le Parlement, partie défenderesse, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    rejeter comme irrecevable la conclusion demandant d'enjoindre à l'AIPN de statuer dans le sens réclamé par le requérant;

—    rejeter les autres conclusions du requérant et le recours comme non fondés;

—    statuer sur les dépens comme de droit.

Sur la recevabilité

17.
    Il ressort de la jurisprudence que le juge communautaire ne peut empiéter sur les prérogatives de l'AIPN en lui adressant des injonctions de nature à fixer ses choix (voir arrêts de la Cour du 15 décembre 1966, Serio/Commission, 62/65, Rec. p. 813, 828, et du 9 juin 1983, Verzyck/Commission, 225/82, Rec. p. 1991, point 19).

18.
    Il convient donc de constater que la conclusion de la partie requérante tendant à obtenir que le Tribunal ordonne à l'AIPN de statuer sur sa candidature est irrecevable.

Sur le fond

19.
    Le requérant invoque, en substance, cinq moyens tirés, premièrement, de la violation de l'article 29, paragraphe 1, du statut, deuxièmement, de la violation de l'article 25 du statut et de l'excès de pouvoir en résultant, troisièmement, de la violation de l'article 7 du statut, quatrièmement, d'une erreur manifeste d'appréciation et, cinquièmement, de la violation de certains principes dégagés par la jurisprudence (prise en compte de l'intérêt du service, appréciation fondée sur des sources d'informations comparables, respect des critères de sélection de l'avis de vacance).

Sur le premier moyen, tiré d'une prétendue violation de l'article 29, paragraphe 1, du statut

Arguments des parties

20.
    Le requérant fait valoir que, en vertu de l'article 29, paragraphe 1, du statut, l'AIPN ne peut ouvrir la procédure de recrutement externe qu'après avoir examiné

les possibilités de pourvoir à l'emploi vacant qu'offrent les autres procédures de recrutement interne, et cela afin d'assurer le respect du principe de la vocation des fonctionnaires à la carrière. Il fait, à cet égard, observer que l'article 4, troisième alinéa, du statut énonce que, s'il n'est pas possible de pourvoir à une vacance d'emploi par voie de mutation, de promotion ou de concours interne, celle-ci est portée à la connaissance du personnel des trois Communautés européennes.

21.
    Il estime que le recours à un élargissement de la gamme des candidats potentiels n'était, en l'espèce, ni admissible ni indispensable, eu égard au nombre de candidatures recevables au titre de la promotion/mutation et compte tenu de la jurisprudence invoquée par le Parlement (voir arrêts de la Cour du 25 novembre 1976, Küster/Parlement, 123/75, Rec. p. 1701, et du 11 juin 1996, Anacoreta Correia/Commission, T-118/95, RecFP p. II-835). A l'audience, le requérant a ajouté que le Parlement aurait dû, pour élargir véritablement la gamme de son choix, engager une procédure de concours général accessible aux candidats tant internes qu'externes, quelle que soit leur nationalité.

22.
    Enfin, le requérant soutient que tant la lettre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), sous b), et sous c), du statut que la jurisprudence invoquée par le Parlement (voir arrêts de la Cour du 24 mars 1983, Colussi/Parlement, 298/81, Rec. p. 1131, du 14 juillet 1983, Mogensen e.a./Commission, 10/82, Rec. p. 2397, et arrêt du Tribunal du 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T-586/93, Rec. p. II-665) lui imposent d'examiner distinctement et successivement les différentes possibilités de pourvoir à un poste vacant, ce qui prohiberait toute mise en concurrence entre candidats internes et externes.

23.
    Le Parlement soutient que, bien que l'AIPN doive, ainsi qu'il ressortirait de la jurisprudence de la Cour et du Tribunal, prioritairement examiner les candidatures suivant les modalités établies par l'article 29, paragraphe 1, sous a), sous b) et sous c), du statut, il ne s'agirait que d'un simple examen tendant à vérifier si, en application de cet article, une personne possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité peut être nommée (voir arrêts de la Cour du 31 mars 1965, Ley/Commission, 12/64 et 29/64, Rec. p. 143, du 19 mars 1975, Van Reenen/Commission, 189/73, Rec. p. 445, Colussi/Parlement, précité, et Mogensen e.a./Commission, précité). A cet effet, la jurisprudence aurait également reconnu la possibilité de publier simultanément, pour un même emploi, un avis de vacance interne et un avis de vacance interinstitutionnel ou encore de passer directement de la procédure du paragraphe 1 à celle du paragraphe 2 de l'article 29 du statut, afin d'élargir les possibilités de choix (voir arrêts du Tribunal du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour de justice, T-160/89 et T-161/89, Rec. p. II-871, du 12 février 1992, Volger/Parlement, T-52/90, Rec. p. II-121, Kotzonis/CES, précité, et Anacoreta Correia/Commission, précité).

24.
    En outre, il serait possible à l'AIPN d'élargir son choix en ajoutant d'autres candidatures à celles prévues à l'article 29, paragraphe 1, du statut, si elle ne

dispose pas d'un choix suffisant lui permettant d'assurer un recrutement aussi conforme que possible aux exigences du poste à pourvoir (voir arrêt Küster/Parlement, précité). A cet égard, le Parlement se réfère à l'arrêt Anacoreta Correia/Commission, précité, au terme duquel l'AIPN peut «[...] ouvrir directement la procédure de l'article 29, paragraphe 2, du statut, afin de recueillir une ou plusieurs autres candidatures, de façon à pouvoir effectivement choisir la personne la plus apte à occuper l'emploi et à procéder effectivement à un examen comparatif des mérites».

25.
    Le Parlement précise qu'il n'est pas pertinent de considérer que l'existence de deux candidats au titre de la promotion justifiait l'inutilité d'un élargissement du choix de candidatures. Le Tribunal aurait, en effet, considéré, dans une autre espèce, que «[...] le seul fait que treize candidats, parmi lesquels un directeur et douze chefs de division avaient présenté leur candidature dans le cadre de la procédure de promotion ou de mutation ne saurait signifier nécessairement que l'AIPN disposait déjà de possibilités de choix suffisantes» (voir arrêt Kotzonis/CES, précité). A ce titre, ne devraient pas être confondues les douze candidatures formellement recevables au titre de la promotion des deux seules candidatures jugées valables par le directeur général et sur la base desquelles l'AIPN a considéré le choix offert comme insuffisant.

26.
    Enfin, le Parlement signale que le règlement (CE) n° 626/95 du Conseil, du 20 mars 1995, instituant, à l'occasion de l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, des mesures particulières et temporaires concernant le recrutement de fonctionnaires des Communautés européennes (JO L 66, p. 1), n'a pas été appliqué à l'espèce, la décision ayant été prise de ne pas créer de nouveaux postes réservés aux ressortissants de nouveaux États membres mais d'utiliser les procédures statutaires normales.

Appréciation du Tribunal

27.
    Il convient préliminairement de rappeler que l'article 29 du statut fixe les modalités selon lesquelles il y a lieu de pourvoir à une vacance d'emploi. C'est ainsi que l'institution doit examiner, successivement, d'abord les possibilités de promotion et/ou de mutation, ensuite les possibilités d'organisation d'un concours interne et, finalement, les demandes de transfert de fonctionnaires d'autres institutions. Ce n'est que si ces possibilités se révèlent inappropriées que l'institution procède à l'organisation d'un concours (voir arrêts de la Cour du 5 décembre 1974, Van Belle/Conseil, 176/73, Rec. p. 1361, points 5 et 6, et du Tribunal, Volger/Parlement, précité, points 19 et 20, du 18 avril 1996, Kyrpitsis/CES, T-13/95, RecFP p. II-503, point 31, et du 22 mai 1996, Gutiérrez de Quijano y Llorens/Parlement, T-140/94, RecFP p. II-689, point 41).

28.
    A cet égard, il est vrai que l'utilisation du terme «possibilités», au sens du paragraphe 1 de l'article 29 du statut, signifie que l'AIPN n'est pas tenue, s'il y a

lieu de pourvoir un poste vacant, de procéder à une promotion ou à une mutation ou à l'organisation d'un concours interne. Toutefois, elle est tenue d'examiner dans chaque cas si ces mesures sont susceptibles d'aboutir à la nomination d'une personne possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité (voir arrêt Ley/Commission, précité).

29.
    Il y a également lieu de souligner que le rejet des candidatures au titre de la promotion ou de la mutation en application de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut est une condition nécessaire pour pouvoir passer aux étapes ultérieures de la procédure prévue par l'article 29, paragraphe 1, du statut, puisque cette disposition établit un ordre de priorité entre les différentes étapes qu'elle prévoit (voir arrêt Küster/Parlement, précité, et arrêts du Tribunal du 14 février 1990, Hochbaum/Commission, T-38/89, Rec. p. II-43, point 102, et du 23 février 1994, Coussios/Commission, T-18/92 et T-68/92, RecFP p. II-171).

30.
    A cet égard, il convient de signaler que le présent avis de vacance précisait que si cet emploi ne pouvait être pourvu à ce stade, les possibilités d'autres procédures prévues par le statut seraient examinées.

31.
    C'est à la lumière des exigences qui viennent d'être exposées qu'il convient d'examiner la question de savoir si l'AIPN a pourvu à l'emploi en cause conformément aux dispositions de l'article 29 du statut.

32.
    Le Parlement a confirmé, lors de l'audience, que, conformément à l'avis de vacance, la procédure suivie était celle de l'article 29, paragraphe 1, du statut.

33.
    A cet égard, il ressort du dossier et des allégations du Parlement que, après avoir examiné les candidatures au titre de la promotion/mutation, l'AIPN a décidé d'élargir son choix en prenant en considération les listes de réserve des ressortissants des nouveaux États membres.

34.
    Il s'ensuit que l'AIPN, sans procéder à un examen des potentialités offertes par l'article 29, paragraphe 1, sous b) et sous c), du statut, a décidé de procéder à un examen comparatif des candidatures de M. Richard, candidat au titre de la promotion, et de Mme S., inscrite sur l'une des listes de réserve des ressortissants de nouveaux États membres.

35.
    La note du chef de la division du personnel à l'attention du directeur général de la DG VI du 23 septembre 1996 expose, à cet égard, que, afin d'élargir la gamme des candidats potentiels à l'emploi, il était nécessaire, avant l'adoption d'une décision finale, de consulter la liste de réserve des ressortissants des nouveaux États membres (voir point 4 ci-dessus).

36.
    Or, au terme de l'examen des douze candidatures jugées recevables au titre de la promotion ou de la mutation, deux candidatures ont été jugées satisfaisantes, dont celle du requérant qui avait la préférence du directeur général de la DG VI.

37.
    En effet, dans sa note du 25 juillet 1996, il a considéré que «[la] formation et [l']expérience professionnelle [du requérant], à l'extérieur et au sein de l'institution, le prédispos[aient] naturellement à une promotion au rang de chef de division».

38.
    Cette note mentionne également: «Dans l'intérêt du service et dans un souci d'équité, j'estime que la promotion de M. Richard prime celle de M. A, parce qu'il bénéficie d'une expérience plus longue et encore plus étendue que celle de son concurrent.»

39.
    Le président du Parlement a adhéré à l'opinion du directeur général de la DG VI concernant M. Richard. En effet, il ressort de sa lettre du 23 juillet 1997 que les candidatures du requérant et de Mme S. présentaient des mérites sensiblement égaux, qu'elles remplissaient les conditions et qualifications requises et que les impératifs d'intérêt du service et de prise en considération des mérites personnels des candidats étaient donc assurés.

40.
    Dès lors, l'AIPN ayant constaté l'équivalence des mérites du requérant et de Mme S., il y a lieu de considérer que le requérant présentait toutes les qualités et qualifications requises par l'avis de vacance, ce qui était de nature à justifier sa nomination au poste à pourvoir. Cette affirmation a été, de surcroît, corroborée à l'audience par le Parlement, qui a reconnu que les mérites et qualifications du requérant n'étaient, dans cette affaire, nullement en cause.

41.
    La candidature du requérant répondant aux exigences de l'emploi à pourvoir, l'AIPN ne pouvait légitimement estimer, nonobstant son large pouvoir d'appréciation, qu'elle ne disposait pas d'un choix suffisamment large afin d'assurer un recrutement en conformité avec l'avis de vacance.

42.
    En tout état de cause, il y a lieu de constater que, dans l'hypothèse où l'AIPN aurait considéré que la candidature du requérant n'était pas satisfaisante, elle était tenue, d'une part, de rejeter sa candidature et, d'autre part, de procéder à l'examen des possibilités offertes par l'article 29, paragraphe 1, sous b) et sous c), du statut avant de poursuivre la procédure de recrutement. En outre, la consultation de la liste de réserve des ressortissants des nouveaux États membres exigeait, quant à elle, l'annulation de la procédure entamée et la fixation de nouvelles conditions de pourvoi du poste (voir arrêt du Tribunal du 18 mars 1997, Rasmussen/Commission, T-35/96, RecFP p. II-187, point 62).

43.
    Or, il ressort du dossier, premièrement, que la candidature de M. Richard n'a pas été rejetée mais au contraire mise en concurrence avec celle de Mme S. et, deuxièmement, que l'AIPN a décidé de consulter directement les listes de réserve

des ressortissants des nouveaux États membres, ainsi qu'en témoigne la lettre du président du Parlement du 23 juillet 1997 (voir point 10 ci-dessus).

44.
    Enfin, à supposer que la volonté du Parlement ait été, tel qu'il l'allègue, d'assurer une représentation adéquate des ressortissants des nouveaux États membres, il lui était loisible d'appliquer le règlement n° 626/95, du 20 mars 1995, précité, permettant de pourvoir des emplois vacants par la nomination de ressortissants autrichiens, finlandais et suédois par dérogation notamment à l'article 29 du statut. Or, le Parlement a admis ne pas avoir appliqué ce règlement dans la présente procédure de nomination.

45.
    Il résulte de ce qui précède que, en ne rejetant pas formellement la candidature du requérant et en procédant à une mise en concurrence des candidatures du requérant et de Mme S., l'AIPN a violé l'article 29, paragraphe 1, du statut.

46.
    Le premier moyen étant donc fondé et la procédure de nomination de Mme S. devant être annulée, il n'est pas besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par le requérant.

47.
    Partant, il n'y a pas lieu d'examiner la demande de la partie requérante tendant à la production du rapport d'audit sur la base duquel aurait été prise la décision de mutation de Mme S. (voir point 14 ci-dessus).

Sur les dépens

48.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le Parlement ayant succombé en ses conclusions et le requérant ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de le condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1)    La procédure de nomination de Mme S. au poste de chef de division A 3 et la décision du 9 janvier 1997 sont annulées.

2)    Les décisions des 11 février et 23 juillet 1997 portant rejet, respectivement, de la candidature et de la réclamation du requérant sont annulées.

3)    Le Parlement supportera l'ensemble des dépens.

Cooke                García-Valdecasas            Lindh

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 mars 1999.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. D. Cooke


1: Langue de procédure: le français.