ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre élargie)
8 juillet 1998 (1)
«Droits antidumping sur photocopieurs à papier ordinaire Réexamen
Période d'application du droit antidumping Erreur manifeste d'appréciation»
Dans l'affaire T-232/95,
Committee of European Copier Manufacturers (Cecom), association de droit
allemand, établie à Cologne (Allemagne), représentée par Mes Dietrich Ehle et
Volker Schiller, avocats à Cologne, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de Me
Marc Lucius, 6, rue Michel Welter,
contre
Conseil de l'Union européenne, représenté par M. Antonio Tanca, membre du
service juridique, en qualité d'agent, assisté de Mes Hans-Jürgen Rabe et Georg M.
Berrisch, avocats à Hambourg, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M.
Alessandro Morbilli, directeur général de la direction des affaires juridiques de la
Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,
ayant pour objet une demande d'annulation de l'article 3, deuxième alinéa, du
règlement (CE) n° 2380/95 du Conseil, du 2 octobre 1995, instituant un droit
antidumping définitif sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire
originaires du Japon (JO L 244, p. 1),
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre élargie),
composé de MM. B. Vesterdorf, président, C. W. Bellamy et R. M. Moura Ramos,
juges,
greffier: M. H. Jung,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 25 novembre 1997,
rend le présent
Arrêt
Faits à l'origine du litige
- 1.
- A la suite d'une plainte déposée, en juillet 1985, par le Committee of European
Copier Manufacturers (comité des fabricants européens d'appareils de copie, ci-après «Cecom»), la Commission a adopté, le 21 août 1986, le règlement (CEE)
n° 2640/86, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de
photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 239, p. 5).
- 2.
- Le 23 février 1987, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n° 535/87, instituant un
droit antidumping définitif sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire
originaires du Japon (JO L 54, p. 12, ci-après «règlement n° 535/87»).
- 3.
- A la suite de la publication, au Journal officiel des Communautés européennes du 27
août 1991 (JO C 222, p. 2), d'un avis d'expiration prochaine des mesures
antidumping en vigueur concernant les importations de certains photocopieurs à
papier ordinaire en provenance du Japon, la Commission a été saisie d'une
demande de réexamen desdites mesures, introduite par le Cecom conformément
aux dispositions de l'article 15, paragraphe 3, du règlement (CEE) n° 2423/88, du
Conseil, du 11 juillet 1988, relatif à la défense contre les importations qui font
l'objet d'un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la
Communauté économique européenne (JO L 209, p. 1, ci-après «règlement de
base 1988»).
- 4.
- Par avis publié au Journal officiel des Communautés européennes du 11 février 1992
(JO C 33, p. 4), la Commission a annoncé son intention de procéder à un
réexamen des droits antidumping institués par le règlement n° 535/87.
- 5.
- Le 16 juillet 1992, le Cecom a demandé l'extension du réexamen aux photocopieurs
à papier ordinaire d'une capacité de reproduction supérieure à 75 photocopies par
minute sur papier de format A4, ces photocopieurs ne faisant pas l'objet du droit
antidumping institué par le règlement n° 535/87 (article 1er, paragraphe 4, premier
tiret, dudit règlement).
- 6.
- Par avis publié au Journal officiel des Communautés européennes du 14 août 1992
(JO C 207, p. 16), la Commission a annoncé l'ouverture d'une procédure de
réexamen au titre des articles 14 et 15 du règlement de base 1988. Conformément
à l'article 15, paragraphe 3, dudit règlement, les mesures antidumping sont restées
en vigueur dans l'attente du résultat de ce réexamen.
- 7.
- Sur la base du réexamen effectué, qui portait sur la période comprise entre le 1er
juillet 1991 et le 30 juin 1992, et sur proposition de la Commission, présentée après
consultation du comité consultatif, le Conseil a arrêté le règlement (CE) n° 2380/95,
du 2 octobre 1995, instituant un droit antidumping définitif sur les photocopieurs
à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 244, p. 1, ci-après «règlement
n° 2380/95»). Le droit antidumping institué par le règlement n° 2380/95 s'applique
également aux photocopieurs à papier ordinaire d'une capacité de reproduction
supérieure à 75 photocopies par minute sur papier de format A4.
- 8.
- Selon son article 3, deuxième alinéa, le règlement n° 2380/95 «expire deux ans
après son entrée en vigueur, sauf si un réexamen des mesures instituées par le
présent règlement est en cours à cette date, auquel cas il reste en vigueur dans
l'attente des résultats du réexamen».
- 9.
- A cet égard, il est indiqué au point 103 des considérants du même règlement:
«En ce qui concerne la période d'application des mesures, le Conseil a observé
que, compte tenu de la complexité inhabituelle de divers aspects de la présente
affaire, son traitement a occasionné des retards importants. Tout d'abord,
pratiquement six mois se sont écoulés entre la publication par la Commission de
l'avis d'intention de réexamen des mesures et le début effectif de ce réexamen.
Ensuite, l'enquête effectuée au titre du réexamen, qui a été ouverte le 14 août
1992, a duré plus de trois ans. Conformément à l'article 15, paragraphe 3, du
règlement [de base 1988], le droit antidumping initial institué sur les importations
de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon est resté en vigueur tout
au long de cette période. Le Conseil juge donc raisonnable, vu ces circonstances
exceptionnelles, de limiter la période d'application des nouvelles mesures, qui
expireront deux ans après leur entrée en vigueur, sous réserve des dispositions
applicables aux réexamens.»
Procédure et conclusions des parties
- 10.
- C'est dans ces conditions que le requérant a, par requête déposée au greffe du
Tribunal le 19 décembre 1995, introduit le présent recours.
- 11.
- Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre élargie) a décidé
d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables.
- 12.
- Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux
questions du Tribunal lors de l'audience du 25 novembre 1997.
- 13.
- L'audience a eu lieu devant la première chambre élargie composée de MM.
A. Saggio, président, B. Vesterdorf, C. W. Bellamy, R. M. Moura Ramos et
J. Pirrung, juges. Suite à la nomination de M. A. Saggio, le 4 mars 1998, comme
avocat général à la Cour de justice, le présent arrêt a été délibéré par les trois
juges dont il porte la signature, conformément à l'article 32, paragraphe 1, du
règlement de procédure.
- 14.
- Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
ordonner à la Commission et au Conseil de produire les comptes rendus de
séance du comité antidumping et du Conseil portant sur l'adoption du
règlement n° 2380/95;
annuler l'article 3, deuxième alinéa, du règlement n° 2380/95;
pour autant que de besoin, ordonner le maintien du droit antidumping
institué par l'article 1er du règlement n° 2380/95 jusqu'à ce que les
institutions compétentes aient pris les mesures que comportent l'exécution
de l'arrêt du Tribunal;
condamner le Conseil aux dépens.
- 15.
- Le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
rejeter le recours;
condamner le requérant aux dépens.
Sur la demande d'annulation de l'article 3, deuxième alinéa, du règlement
n° 2380/95
Sur le moyen tiré de ce que le Conseil n'est pas autorisé à adopter des mesures
antidumping pour une durée inférieure à cinq ans
Arguments des parties
- 16.
- Ce moyen se compose de deux branches.
- 17.
- Dans une première branche, le requérant invoque une violation de l'article 15,
paragraphe 1, du règlement de base 1988. Il ressortirait du libellé clair et
inconditionnel de cette disposition, qui dispose que «[...] les droits antidumping [...]
deviennent caducs après un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle ils
sont entrés en vigueur ou ont été modifiés en dernier lieu ou confirmés», qu'elle
fixe légalement la période d'application des mesures antidumping ainsi que le début
de la période d'application, y compris lorsque les droits antidumping sont confirmés
dans le cadre d'une procédure de réexamen. Par conséquent, la limitation à deux
ans de la période d'application des droits antidumping prévue à l'article 3,
deuxième alinéa, du règlement n° 2380/95 serait illégale, le Conseil n'étant pas
autorisé à déroger à la période d'application de cinq ans lors de la modification ou
de la confirmation des mesures antidumping dans le cadre de procédures de
réexamen.
- 18.
- Cette interprétation de l'article 15, paragraphe 1, du règlement de base 1988 serait
confirmée par une analyse de la genèse et des objectifs poursuivis par ladite
disposition. En effet, pour autant que l'on puisse se référer à l'historique afin
d'interpréter cette disposition univoque, le requérant rappelle que l'ancien accord
relatif à la mise en oeuvre de l'article VI de l'accord général sur les tarifs douaniers
et le commerce (ci-après «ancien code antidumping»), approuvé, au nom de la
Communauté, par la décision 80/271/CEE du Conseil, du 10 décembre 1979,
concernant la conclusion des accords multilatéraux résultant des négociations
commerciales de 1973 à 1979 (JO 1980, L 71, p. 1), ne fixe certes pas une période
déterminée d'application des droits antidumping, mais que son article 9 dispose
qu'«un droit antidumping ne restera en vigueur que le temps et dans la mesure
nécessaire pour neutraliser le dumping qui a causé un préjudice». Dès lors, il y
aurait lieu de considérer que le législateur communautaire a fixé à cinq ans le délai
considéré comme nécessaire afin d'éliminer les effets néfastes d'un dumping et de
rétablir le jeu normal de la concurrence. Cette constatation serait confirmée par
le point 28 des considérants du règlement de base 1988, selon lequel «il y a lieu de
prévoir qu'après un certain délai les mesures antidumping et compensatrices
deviennent caduques, à moins que la nécessité de leur maintien ne puisse être
démontrée».
- 19.
- Le requérant en conclut que l'article 15, paragraphe 1, du règlement de base 1988
fixe aussi bien une durée minimale qu'une durée maximale d'une mesure
antidumping. En ce qui concerne la durée minimale, celle-ci viserait à la défense
et à la protection juridique de l'industrie communautaire, qui, en principe, a déjà
subi un préjudice important avant même que des mesures antidumping ne soient
imposées. En outre, la même durée de protection de cinq ans s'imposerait lorsqu'il
apparaît, après l'expiration du délai, que les importateurs n'ont pas abandonné
leurs pratiques de dumping et que le préjudice persiste.
- 20.
- De plus, dans sa pratique antérieure, le Conseil aurait toujours, conformément à
l'article 15, paragraphe 1, du règlement de base 1988, fixé à cinq ans la durée des
mesures antidumping, même lorsqu'elles ont été confirmées après une procédure
de réexamen de longue durée (voir, notamment, le règlement faisant l'objet de
l'arrêt du Tribunal du 2 mai 1995, NTN Corporation et Koyo Seiko/Conseil, T-163/94 et T-165/94, Rec. p. II-1381).
- 21.
- Lorsque l'article 15, paragraphe 3, du règlement de base 1988 prévoit que le droit
antidumping initial reste en vigueur dans l'attente du résultat du réexamen, cela
constituerait un risque qui, selon la volonté expresse du législateur communautaire,
doit être assumé par les exportateurs responsables du dumping. Il en serait de
même, selon l'article 15, paragraphe 4, du règlement de base 1988, en ce qui
concerne les procédures de réexamen déjà en cours lors de l'expiration de la
période initiale d'application des mesures antidumping. Dès lors, la durée
d'application d'une mesure antidumping ne saurait, contrairement à ce qui est
indiqué au point 103 des considérants du règlement n° 2380/95, dépendre de la
durée de la procédure de réexamen, car celle-ci dépendrait d'un certain nombre
de circonstances qui sont indépendantes de la volonté de l'industrie
communautaire.
- 22.
- Enfin, «les circonstances exceptionnelles» invoquées par le Conseil ne pourraient,
en tout état de cause, pas justifier la limitation de la période d'application des
mesures antidumping pour les photocopieurs ayant une capacité de reproduction
supérieure à 75 copies par minute car, pour ces photocopieurs, le droit
antidumping a été institué pour la première fois par le règlement n° 2380/95.
- 23.
- Dans une seconde branche du moyen, le requérant fait valoir que la réduction de
la période d'application des mesures antidumping constitue une violation du régime
juridique institué par les règlements de base en matière d'antidumping, et en
particulier de la répartition des droits et obligations existant entre l'industrie
communautaire et les entreprises pratiquant le dumping. Il se réfère, à cet égard,
aux dispositions du règlement (CE) n° 3283/94 du Conseil, du 22 décembre 1994,
relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part
de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 349, p. 1, ci-après
«règlement de base 1994»), tout en soulignant que les règlements de base
antérieurs contenaient des dispositions similaires.
- 24.
- Il expose en détail les voies procédurales permettant à l'industrie communautaire
d'exercer ses droits par le dépôt d'une plainte (article 5 du règlement de base
1994) ou d'une demande de réexamen (article 11 du règlement de base 1994). La
plainte et/ou la demande de réexamen doit contenir des éléments de preuve
suffisants pour justifier l'ouverture d'une procédure, l'initiative et la charge de la
preuve incombant ainsi à l'industrie communautaire. Or, une fois que des droits
antidumping définitifs sont imposés, il ressortirait de l'article 11, paragraphe 2, du
règlement de base 1994 que l'industrie communautaire est protégée contre la
pratique de dumping pendant une période de cinq ans, à moins qu'une procédure
de réexamen soit entamée.
- 25.
- Au cours de la période de cinq ans à compter de la date d'entrée en vigueur des
mesures antidumping définitives, l'initiative ainsi que la charge de la preuve
incomberaient, selon l'article 11, paragraphe 3, du règlement de base 1994, aux
entreprises pratiquant le dumping.
- 26.
- Le requérant considère que, en réduisant à deux ans la période d'application des
mesures antidumping, le Conseil a porté atteinte au rapport équilibré établi par le
règlement de base entre les droits et obligations de l'industrie communautaire et
les entreprises pratiquant le dumping. En effet, l'industrie communautaire étant
obligée, après l'écoulement d'environ un an, de reprendre l'initiative d'une
demande de réexamen, la réduction de la période d'application des mesures
antidumping porterait atteinte à la protection juridique de l'industrie européenne
et provoquerait de manière injustifiée un renversement de la charge de la demande
et de la preuve au détriment de celle-ci.
- 27.
- Le Conseil conteste l'interprétation du libellé de l'article 15, paragraphe 1, du
règlement de base 1988 que propose le requérant. En effet, puisqu'il ressort
simplement du libellé de cette disposition que les droits antidumping deviennent
caducs au plus tard après un délai de cinq ans, elle ne saurait être interprétée
comme fixant une durée minimale d'application des droits antidumping.
- 28.
- Cette interprétation serait confirmée par la genèse de ladite disposition. Avant
l'adoption du règlement n° 2176/84, du Conseil, du 23 juillet 1984, relatif à la
défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions de
la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (J L 201,
p. 1, ci-après «règlement de base 1984»), les règlements de base n'auraient contenu
aucune disposition spécifique relative à la durée des mesures antidumping, ce qui
impliquait que le Conseil pouvait fixer librement une telle durée. Sous cet ancien
régime, le Conseil n'aurait, dans sa pratique, généralement pas limité la durée des
mesures antidumping, celles-ci restant donc en vigueur jusqu'à ce que les
exportateurs demandent un réexamen. Toutefois, certains exportateurs auraient
oublié de demander un réexamen ou ils n'y auraient eu aucun intérêt, par exemple
parce qu'ils n'exportaient plus vers la Communauté. Ce serait pour cette raison
que, dans l'article 15, paragraphe 1, du règlement de base 1984, une disposition
correspondant à celle de l'article 15, paragraphe 1, du règlement de base 1988 a
été introduite pour la première fois. L'objectif en était, selon le point 34 des
considérants du règlement de base 1984, qui correspond au point 28 des
considérants du règlement de base 1988, qu'il y avait «lieu de prévoir qu'après un
certain délai les mesures antidumping et compensatrices deviennent caduques, à
moins que la nécessité de leur maintien ne puisse être démontrée».
- 29.
- Le Conseil estime que, pour des raisons de sécurité juridique et afin d'assurer une
protection minimale de l'industrie communautaire, il y a lieu de prévoir
systématiquement une période d'application de cinq ans lors de l'adoption de
mesures antidumping pour la première fois, de sorte que l'industrie communautaire
soit protégée pendant une période d'au moins cette durée, généralement prolongée
par la période d'application des mesures antidumping provisoires. Les mêmes
considérations ne s'appliqueraient pas lors de l'ouverture d'une procédure de
réexamen, l'industrie communautaire ayant, dans ce cas, déjà été protégée depuis
un certain temps. En outre, les mesures antidumping initiales restant en vigueur
pendant la procédure de réexamen, l'industrie communautaire serait également
protégée pendant toute la durée de ladite procédure. En l'espèce, du fait de
l'institution des droits antidumping par le règlement n° 2380/95, les droits
antidumping institués par le règlement n° 535/87 auraient, en réalité, été prolongés
de cinq ans et huit mois.
- 30.
- La pratique antérieure des institutions communautaires quant à la fixation de la
période d'application des mesures antidumping arrêtées à l'issue d'une procédure
de réexamen ne saurait, contrairement à ce qu'affirme le requérant, être considérée
comme étant de nature à lier le Conseil.
- 31.
- Enfin, le fait que le règlement n° 2380/95 a introduit pour la première fois un droit
antidumping sur les photocopieurs à papier ordinaire d'une capacité de
reproduction supérieure à 75 copies par minute sur papier de format A4 ne ferait
pas non plus obstacle à la fixation d'une période d'application du règlement
inférieure à cinq ans (voir point 15 des considérants du règlement).
- 32.
- S'agissant de la seconde branche du moyen, le Conseil fait valoir que la fixation à
deux ans de la période d'application du droit antidumping institué par le règlement
n° 2380/95 ne crée pas, contrairement à ce qu'affirme le requérant, une situation
dans laquelle les exportateurs japonais et l'industrie communautaire ne luttent pas
à armes égales.
- 33.
- En effet, quant à la situation de l'industrie communautaire, celle-ci aurait bénéficié
d'une protection supplémentaire du fait que le droit antidumping est resté en
vigueur tout au long de la période de réexamen.
- 34.
- Pour les exportateurs japonais, le maintien en vigueur pendant la procédure de
réexamen du droit antidumping institué par le règlement n° 535/87 aurait, en
revanche, constitué un inconvénient non négligeable car ils ont dû attendre d'abord
l'issue de la procédure de réexamen et, ensuite, une période supplémentaire d'un
an avant de pouvoir eux-mêmes introduire une demande de réexamen.
Appréciation du Tribunal
- 35.
- A titre liminaire, il convient de constater que, bien que le règlement n° 2380/95 ait
été adopté après l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1995, du règlement de base 1994,
il ressort de l'article 24 de ce dernier règlement que le règlement de base 1988
continue à s'appliquer pour les procédures de réexamen engagées avant le 1er
septembre 1994. Le règlement n° 2380/95 ayant été adopté à l'issue d'une
procédure de réexamen engagée au mois d'août 1992, sa légalité doit donc être
appréciée au regard des dispositions du règlement de base 1988.
- 36.
- L'article 15, paragraphe 1, du règlement de base 1988 prévoit que «les droits
antidumping [...] deviennent caducs après un délai de cinq ans à compter de la date
à laquelle ils sont entrés en vigueur ou ont été modifiés en dernier lieu ou
confirmés».
- 37.
- Il résulte, tout d'abord, d'une interprétation textuelle de cette disposition que, en
prévoyant que les droits antidumping «deviennent caducs» après une période de
cinq ans, elle fixe un délai d'expiration automatique de ces droits, et non une
période minimale obligatoire d'application des droits antidumping.
- 38.
- L'interprétation textuelle de cette disposition ne saurait être remise en cause par
l'analyse de sa genèse, contrairement à l'argumentation développée en ce sens par
le requérant.
- 39.
- En effet, une disposition équivalente à celle de l'article 15, paragraphe 1, du
règlement de base 1988 a été intégrée pour la première fois dans la réglementation
antidumping par l'article 15, paragraphe 1, du règlement de base 1984. Le point 34
des considérants de ce dernier règlement, identique au point 28 des considérants
du règlement de base 1988, en indiquant qu'«il y a lieu de prévoir qu'après un
certain délai les mesures antidumping et compensatrices deviennent caduques, à
moins que la nécessité de leur maintien ne puisse être démontrée», ne fait, en
réalité, que confirmer que cette disposition fixe un délai d'expiration automatique
des droits antidumping.
- 40.
- Par ailleurs, l'ancien code antidumping, en vigueur à l'époque de l'adoption du
règlement de base 1984, prévoyait, en son article 9, qu'«un droit antidumping ne
[devait rester] en vigueur que le temps et dans la mesure nécessaire pour
neutraliser le dumping qui a causé un préjudice». Or, cette disposition ne vise,
selon son libellé, que la durée d'application maximale des droits antidumping.
- 41.
- Il convient d'examiner, ensuite, s'il résulte, comme le soutient le requérant, de
l'économie et de la finalité du règlement de base 1988 que son article 15,
paragraphe 1, doit être interprété en ce sens qu'il fixe une période d'application
minimale obligatoire des droits antidumping.
- 42.
- A cet égard, il importe de relever, en premier lieu, que les paragraphes 2 à 4 de
l'article 15 du règlement de base 1988 se réfèrent implicitement au délai de cinq
ans prévu au paragraphe 1 de ce même article. C'est notamment ainsi que l'article
15, paragraphe 4, dispose:
«Lorsque le réexamen d'une mesure en vertu de l'article 14 est en cours à la fin
du délai de cinq ans, la mesure reste en vigueur dans l'attente du résultat du
réexamen. Un avis à cet effet est publié au Journal officiel des Communautés
européennes avant l'expiration du délai de cinq ans correspondant.»
- 43.
- Or, si, comme le démontrent ces références, les paragraphes 2 à 4 de l'article 15
du règlement de base 1988 se fondent sur la supposition que le délai de cinq ans
constitue le délai normal d'application des droits antidumping définitifs, ces
dispositions ne sauraient être interprétées en ce sens que ledit délai doit,
contrairement à ce qui résulte d'une interprétation textuelle de l'article 15,
paragraphe 1, du règlement, être considéré comme une période minimale
obligatoire d'application des droits antidumping définitifs.
- 44.
- Pour ce qui est du rapport existant entre les droits et obligations des entreprises
pratiquant le dumping, d'une part, et l'industrie communautaire, d'autre part, tel
qu'il ressort du règlement de base, il faut souligner que le Conseil lui-même a
soutenu qu'il convenait de prévoir systématiquement une période d'application de
cinq ans pour les mesures antidumping définitives instituées pour la première fois,
et ce afin d'assurer une protection suffisante de l'industrie communautaire.
- 45.
- Toutefois, rien ne permet de considérer que le système juridique instauré par le
règlement de base exclut, comme le soutient le requérant dans la seconde branche
du moyen, que le Conseil soit en droit de fixer, dans des cas spécifiques et s'il
existe des raisons objectives le justifiant, une durée d'application inférieure à cinq
ans d'un règlement instituant des droits antidumping définitifs, tout au moins
lorsqu'il s'agit de droits antidumping définitifs adoptés à l'issue d'une procédure de
réexamen des mesures initialement arrêtées. En effet, le pouvoir d'adopter des
mesures antidumping dont dispose le Conseil, en vertu du règlement de base, doit
être considéré comme comportant le pouvoir implicite de limiter dans le temps la
durée d'application desdites mesures si une telle limitation est conforme aux
objectifs poursuivis par le règlement et à la répartition des droits et obligations des
parties intéressées opérée par celui-ci.
- 46.
- Sur la base des considérations qui précèdent, il convient d'interpréter l'article 15,
paragraphe 1, du règlement de base 1988 en ce sens que le Conseil dispose d'un
pouvoir d'appréciation lui permettant de fixer à moins de cinq ans la période
d'application des droits antidumping définitifs adoptés à l'issue d'une procédure de
réexamen des mesures initialement arrêtées si, en raison de l'existence de
circonstances particulières, une telle limitation constitue la meilleure façon de
prendre en compte les intérêts divergents des parties à la procédure et de
maintenir l'équilibre entre ces intérêts que le règlement de base vise à établir.
- 47.
- Il importe de relever que le seul fait que le Conseil n'ait pas, avant l'adoption du
règlement n° 2380/95, fait usage, dans d'autres cas, du pouvoir d'appréciation lui
permettant de fixer à moins de cinq ans la période d'application des droits
antidumping définitifs adoptés à l'issue d'une procédure de réexamen des mesures
initialement arrêtées est dénué de pertinence, et ce d'autant plus que, selon le
Conseil lui-même, il s'agit d'un pouvoir d'appréciation ne pouvant être invoqué
qu'en la présence de circonstances particulières.
- 48.
- Il y a lieu d'ajouter que, pour autant que les arguments du requérant visent à
contester que le Conseil ait été, in concreto, en droit de limiter à deux ans la
période d'application des droits antidumping instaurés par le règlement n° 2380/95,
ils doivent être examinés dans le cadre des autres moyens invoqués par le
requérant. En effet, le présent moyen étant tiré de ce que le Conseil ne serait pas,
en principe, autorisé à fixer la durée d'application des droits antidumping à une
durée inférieure à cinq ans, les arguments concernés doivent être considérés
comme inopérants dans le présent contexte.
- 49.
- Au vu de ce qui précède, le moyen doit être rejeté.
Sur les moyens tirés d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une violation de l'article
190 du traité
Arguments des parties
- 50.
- Le requérant fait valoir que, à supposer même que le Conseil dispose, quod non,
d'un pouvoir d'appréciation dans la détermination de la période d'application d'une
mesure antidumping, il a commis une erreur manifeste d'appréciation en limitant
la période d'application du règlement n° 2380/95.
- 51.
- La procédure de réexamen ne pourrait pas constituer une «circonstance
exceptionnelle» justifiant la réduction de la période d'application de la mesure
antidumping. L'on ne saurait considérer, compte tenu de la complexité de la
procédure relative aux droits antidumping sur les photocopieurs et des enquêtes
nécessaires effectuées par la Commission, qu'une période de réexamen de trois ans
soit exceptionnelle. Par ailleurs, il serait sans importance qu'une enquête d'une
durée de plus de trois ans soit ou non anormale car l'important serait que la durée
d'une procédure de réexamen est finalement déterminée par les institutions
communautaires.
- 52.
- En prétendant que les producteurs communautaires seraient protégés pendant
toute la durée de la procédure de réexamen, le Conseil méconnaîtrait la nature
juridique de cette procédure. En effet, lorsque l'article 15, paragraphe 3, du
règlement de base 1988 prévoit que la mesure reste en vigueur dans l'attente du
résultat du réexamen, ce maintien en vigueur serait lié à l'issue de la procédure de
réexamen car si le réexamen conduit, par exemple, à constater que les exportateurs
ne pratiquent plus de dumping, les mesures sont abrogées et les exportateurs se
voient en principe rembourser, sur leur demande, les droits antidumping qu'ils ont
versés au cours de la période de l'enquête.
- 53.
- De plus, le requérant conteste l'affirmation du Conseil selon laquelle la durée de
l'enquête et le maintien, durant cette période, des droits antidumping institués par
le règlement n° 535/87 auraient causé un inconvénient non négligeable aux
exportateurs. En effet, les exportateurs auraient tout tenté pour allonger, par leurs
interventions, la période de réexamen, car un déroulement plus rapide de cette
procédure n'aurait présenté pour eux que des désavantages. Les exportateurs
auraient su que les droits antidumping seraient probablement étendus aux
photocopieurs à papier ordinaire d'une capacité de reproduction supérieure à 75
copies par minute et que la procédure conduirait à une augmentation du droit
antidumping. En revanche, l'industrie communautaire des fabricants de
photocopieurs aurait eu particulièrement intérêt à ce que la procédure de
réexamen soit rapidement clôturée et à ce que de nouvelles mesures antidumping
soient adoptées.
- 54.
- L'élimination du dumping devant permettre le rétablissement des conditions loyales
et ouvertes de marché et la suppression des distorsions de la concurrence résultant
de pratiques commerciales illégales, seule la question de savoir si, compte tenu des
résultats du réexamen effectué, de (nouvelles) mesures antidumping étaient
nécessaires pour contrebalancer un dumping causant un préjudice aurait dû être
déterminante dans l'exercice du pouvoir d'appréciation du Conseil. A cet égard,
celui-ci aurait dû apprécier si les objectifs poursuivis par les mesures antidumping
pouvaient être atteints si la période d'application était réduite à deux ans.
- 55.
- Tous les éléments d'appréciation pertinents auraient dû amener le Conseil à fixer
une nouvelle période d'application de cinq ans à compter de la date d'entrée en
vigueur du règlement n° 2380/95. A cet égard, le requérant développe trois séries
d'arguments.
- 56.
- Dans une première série d'arguments, le requérant soutient que les autorités
communautaires ont conclu, sur la base du réexamen effectué, que les exportateurs
japonais avaient renforcé leur pratique de dumping, que le préjudice causé à
l'industrie communautaire avait été aggravé et que l'intérêt de préserver l'industrie
communautaire s'en trouvait également renforcé.
- 57.
- En effet, il ressortirait des constatations faites par les autorités communautaires que
les marges de dumping étaient sensiblement supérieurs, pour chaque exportateur
concerné, au taux du droit antidumping initialement applicable car la marge
moyenne pondérée de dumping aurait été de 41 % (voir points 76 et 78 des
considérants du règlement n° 2380/95). Il conclut que les exportateurs japonais
avaient renforcé leur pratique de dumping et que le Conseil aurait donc dû fixer
des droits antidumping en tenant compte de ces nouvelles conclusions.
- 58.
- De plus, le préjudice causé à l'industrie communautaire se serait renforcé. En ce
qui concerne l'ensemble des photocopieurs considérés comme des produits
similaires, il serait ainsi établi que les principaux indicateurs économiques de
l'industrie communautaire se sont détériorés sensiblement entre 1988 et la fin de
la période d'enquête, qu'il s'agisse de la production (moins 16 %), de la part de
marché (tombée de 15,4 à 12,4 %) et de la rentabilité des ventes de photocopieurs
à papier ordinaire (tombée de 11,1 à 2,7 %) (points 33 à 35 des considérants du
règlement n° 2380/95). Malgré la réduction du volume des exportations en
provenance du Japon, la Commission aurait, en outre, constaté des marges de sous-cotation importantes (points 42 et 43 des considérants du règlement). Sur la base
de ces constatations, le Conseil serait arrivé à la conclusion que l'expiration du
droit antidumping en vigueur entraînerait la réapparition d'un préjudice important
(voir, en particulier, points 81 et 87 des considérants du règlement).
- 59.
- Enfin, le Conseil aurait constaté, d'une part, le renforcement de l'intérêt de la
Communauté à préserver une production européenne de photocopieurs et, d'autre
part, que l'expiration des droits inciteraient les exportateurs japonais à réduire leur
production dans la Communauté de manière à diminuer sensiblement les stocks
existant au Japon et à y améliorer l'utilisation des capacités (points 88 et suivants
des considérants).
- 60.
- Le requérant en conclut que les constatations faites par les autorités
communautaires elles-mêmes dans le cadre de la procédure de réexamen
s'opposent clairement à toute limitation de la période d'application des mesures
antidumping. Le lien entre lesdites constatations et la durée d'application des
mesures antidumping ne ressortirait pas seulement de l'article 15, paragraphe 1, du
règlement de base 1988, mais existerait, a fortiori, à la lumière du fait que le
dumping et le préjudice causé à l'industrie communautaire, au lieu d'être éliminés,
se sont considérablement renforcés au cours de la période d'application du
règlement n° 535/87.
- 61.
- Dans une deuxième série d'arguments, le requérant soutient que le Conseil a
méconnu les particularités propres aux photocopieurs d'une capacité de
reproduction supérieure à 75 copies par minute, qui sont protégés pour la première
fois contre les importations faisant l'objet d'un dumping par le règlement
n° 2380/95. Les photocopieurs appartenant à ce segment supérieur auraient fait
l'objet d'une politique particulièrement agressive de la part des exportateurs
japonais et le fait qu'un droit antidumping ne soit institué pour ce segment de
photocopieurs que pour une période de deux ans devrait, dans ces conditions, être
considéré comme contraire aux constatations faites par les autoritéscommunautaires elles-mêmes.
- 62.
- Le secteur des photocopieurs à papier ordinaire d'une capacité de reproduction
supérieure à 75 copies par minute revêtirait une importance particulière pour les
producteurs communautaires. Or, dans le règlement n° 2380/95 (points 42 et 46 des
considérants), le Conseil et la Commission auraient établi que ce secteur se
caractérisait aussi bien par une hausse substantielle des importations que par une
majoration de la sous-cotation.
- 63.
- Le requérant ne demanderait pas une «réglementation particulière» pour ces
appareils mais simplement l'application de la règle normale de l'article 15,
paragraphe 1, du règlement de base 1988. En effet, le Conseil admettrait lui-même
que, pour des raisons de sécurité juridique et de protection minimale, il convient
de prévoir une durée d'application de cinq ans pour les mesures adoptées pour la
première fois.
- 64.
- L'absence de motivation des raisons qui ont amené le Conseil à limiter également
à deux ans la période d'application des mesures antidumping pour lesdits
photocopieurs constituerait, en outre, une violation de l'article 190 du traité.
- 65.
- Enfin, certains producteurs japonais auraient, avant l'entrée en vigueur du
règlement n° 2380/95, constitué des stocks importants de ces photocopieurs de
manière à contourner l'objectif des mesures antidumping.
- 66.
- Dans une troisième série d'arguments, le requérant soutient que la limitation à
deux ans de la période d'application du règlement n° 2380/95 constitue un
précédent dangereux de nature à entraîner une dévalorisation manifeste de
l'instrument antidumping. Il en serait d'autant plus ainsi lorsque, en dépit d'une
situation se caractérisant par un renforcement du dumping, une aggravation du
préjudice et l'existence d'un puissant intérêt de la Communauté pour le maintien
d'un secteur industriel important, les institutions communautaires réduisent la durée
d'application des mesures antidumping. Cette argumentation ne serait pas,
contrairement aux affirmations du Conseil, fondée sur des considérations purement
politiques.
- 67.
- Le Conseil rappelle, à titre liminaire, qu'il ressort expressément du point 103 des
considérants du règlement n° 2380/95 que les éléments qui l'ont amené à fixer, à
titre exceptionnel, à deux ans la durée d'application du règlement étaient la durée
extraordinairement longue de la procédure de réexamen ainsi que le fait que le
droit antidumping était resté en vigueur pendant cette procédure. Le règlement
n° 2380/95 aurait donc, en réalité, prorogé la période d'application du droit
antidumping de cinq ans et huit mois et, par conséquent, la situation actuelle du
requérant serait plus favorable que celle dans laquelle il aurait été placé si le
Conseil avait immédiatement prorogé le droit antidumping initial de cinq ans.
- 68.
- En ce qui concerne la durée de la procédure de réexamen, celle-ci aurait
effectivement été inhabituellement longue, ce qui serait confirmé par le fait que la
procédure ayant conduit à l'adoption, par le règlement n° 535/87, du droit
antidumping initial n'avait duré qu'environ un an et demi.
- 69.
- Les éléments, autres que la durée de la procédure de réexamen, qu'invoque le
requérant afin de démontrer que la période d'application du règlement n° 2380/95
n'aurait pas dû être limitée, ne seraient pas de nature à infirmer l'appréciation
portée par le Conseil.
- 70.
- En premier lieu, les arguments du requérant concernant la prétendue aggravation
du dumping et du préjudice causé à l'industrie communautaire ainsi que le
renforcement de l'intérêt de la Communauté se fonderaient essentiellement sur les
constatations exposées dans le règlement n° 2380/95 lui-même. Cependant, aucun
lien n'existerait entre ces facteurs et la détermination de la durée d'application du
droit antidumping institué par ledit règlement.
- 71.
- En second lieu, le Conseil rappelle qu'il a exposé, au point 15 des considérants du
règlement n° 2380/95, les raisons pour lesquelles il n'était pas possible de prévoir
une réglementation particulière pour les photocopieurs d'une capacité de
reproduction supérieure à 75 copies par minute. Puisqu'il n'aurait donc pas été
possible de fixer une période d'application du droit antidumping différente pour ces
appareils, il n'aurait pas non plus été nécessaire que le règlement n° 2380/95
contienne une motivation particulière sur ce point.
Appréciation du Tribunal
- 72.
- Il doit être constaté, à titre liminaire, que le requérant ne peut pas valablement
soutenir que la durée de la procédure de réexamen n'a pas, en l'espèce, été
anormalement longue. Il suffit de relever qu'il ressort de l'article 7, paragraphe 9,
du règlement de base 1988, qu'«une enquête est conclue soit par sa clôture, soit
par une mesure définitive. La conclusion doit normalement avoir lieu dans un délai
d'un an après l'ouverture de la procédure». Or, la Commission n'a annoncé
l'ouverture de la procédure de réexamen que le 14 août 1992, soit après un délai
d'environ six mois à compter de la publication, le 11 février 1992, de l'avis signalant
son intention d'ouvrir la procédure de réexamen. Ensuite, la procédure de
réexamen a duré du mois d'août 1992 au mois d'octobre 1995, soit environ 38 mois.
- 73.
- Dans ces conditions, il convient d'examiner, d'abord, si la durée anormalement
longue de la procédure de réexamen a constitué un élément dont le Conseil
pouvait légitimement tenir compte lors de la fixation de la durée d'application des
droits antidumping définitifs institués à l'issue du réexamen. A cet égard, il y a lieu
de déterminer les conséquences de cette durée anormalement longue de la
procédure pour les entreprises soumises au droit antidumping, d'une part, et pour
l'industrie communautaire, d'autre part.
- 74.
- S'agissant des entreprises soumises au droit antidumping, les mesures antidumping
définitives instituées par le règlement n° 535/87 sont restées en vigueur pendant
toute la durée de la procédure de réexamen, conformément à l'article 15,
paragraphe 3, du règlement de base 1988. De plus, même si le réexamen effectué
a porté sur la période allant du 1er juillet 1991 jusqu'au 30 juin 1992, l'institution
de nouvelles mesures définitives par le règlement n° 2380/95 a eu pour
conséquence que les entreprises soumises aux mesures antidumping n'ont pu
demander l'ouverture d'une nouvelle procédure de réexamen avant le mois
d'octobre 1996. En effet, il ressort de l'article 14, paragraphe 1, du règlement de
base 1988 qu'une demande de réexamen ne peut être présentée qu'«à condition
qu'une année au moins se soit écoulée depuis la conclusion de l'enquête».
- 75.
- Pour l'industrie communautaire, une protection contre les pratiques de dumping
a donc, en raison de la durée de la procédure de réexamen, été assurée pendant
une période allant, au moins, jusqu'au mois d'octobre 1996.
- 76.
- C'est donc à bon droit que le Conseil a considéré que la durée anormalement
longue de la procédure de réexamen a affecté la situation juridique des parties à
la procédure au détriment des entreprises soumises aux mesures antidumping.
- 77.
- Par conséquent, la durée anormalement longue de la procédure de réexamen
constituait un élément de nature à justifier une limitation de la période
d'application des mesures antidumping définitives arrêtées à l'issue de ladite
procédure. De plus, le Conseil ne peut pas être considéré comme ayant dépassé
les limites de sa marge d'appréciation en considérant que, compte tenu de la durée
de la procédure de réexamen, une période d'application de deux ans du règlement
n° 2380/95 était raisonnable. En effet, l'institution de nouvelles mesures définitives
par le règlement n° 2380/95 avait pour conséquence que l'industrie communautaire
serait protégée, sauf introduction d'une demande de réexamen des mesures
instituées par ce règlement, contre les pratiques de dumping jusqu'au mois
d'octobre 1997, c'est-à-dire pendant une période de plus de cinq ans à partir de
l'expiration du droit antidumping initial.
- 78.
- Il convient, ensuite, d'examiner si les autres éléments invoqués par le requérant
auraient dû amener le Conseil à ne pas limiter à deux ans, en dépit de la durée
anormalement longue de la procédure de réexamen, la période d'application du
règlement n° 2380/95.
- 79.
- A cet égard, il y a lieu de souligner, en premier lieu, que le requérant n'a pas
produit le moindre élément de preuve à l'appui de son affirmation selon laquelle
la procédure de réexamen aurait été retardée de manière dilatoire par les
entreprises soumises au droit antidumping.
- 80.
- En second lieu, il convient de rejeter l'argumentation du requérant tirée de ce que
les constatations opérées par les autorités communautaires, dans le cadre de
l'enquête au sujet du dumping, du préjudice causé par celui-ci et de l'intérêt
communautaire auraient dû amener le Conseil à confirmer le droit antidumping
pour une nouvelle période de cinq ans.
- 81.
- A cet égard, il y a lieu de rappeler que le réexamen effectué a porté sur la période
comprise entre le 1er juillet 1991 et le 30 juin 1992. En outre, il doit être rappelé
que les mesures antidumping instituées par le règlement n° 535/87 sont restées en
vigueur pendant toute la procédure de réexamen. Enfin, c'est sur la base des
constatations opérées par les autorités communautaires, dans le cadre de l'enquête
au sujet du dumping, du préjudice causé par celui-ci et de l'intérêt communautaire
que le Conseil a estimé qu'il y avait lieu, d'une part, de ne pas laisser expirer les
mesures antidumping instituées par le règlement n° 535/87 et, d'autre part, de
confirmer le taux du droit antidumping fixé par ledit règlement. La durée
d'application du droit antidumping définitif institué par le règlement n° 2380/95
ayant été fixée à deux ans, l'industrie communautaire a donc été protégée contre
les pratiques du dumping pendant une période de plus de cinq ans et demi après
la date à laquelle le droit antidumping institué par le règlement n° 535/87 aurait
expiré, soit au mois de février 1992, si aucune procédure de réexamen n'avait été
ouverte.
- 82.
- Dans ces conditions, le requérant ne saurait valablement prétendre que les
constatations concernées auraient dû être prises en considération lors de la fixation
de la période d'application des nouvelles mesures antidumping définitives. Il y a
lieu de souligner, à cet égard, que, si les constatations concernées étaient
pertinentes aux fins de la détermination du taux du droit antidumping fixé par le
règlement n° 2380/95, le requérant ne demande cependant pas l'annulation de ce
taux.
- 83.
- En troisième lieu, le requérant soutient que la période d'application des nouvelles
mesures antidumping n'aurait pas dû être limitée puisque, pour les photocopieurs
d'une capacité de reproduction supérieure à 75 copies par minute sur papier A4,
un droit antidumping a été institué pour la première fois par le règlement
n° 2380/95. Il est constant que ces photocopieurs n'avaient pas fait l'objet du droit
antidumping institué par le règlement n° 535/87, car, à l'époque, de tels
photocopieurs n'étaient pas importés du Japon, d'une part, et que les
photocopieurs d'une capacité de reproduction supérieure à 75 photocopies par
minute n'étaient pas fabriqués par l'industrie communautaire, d'autre part.
- 84.
- Or, conformément à la demande en ce sens présentée par le requérant, laprocédure de réexamen a inclus également les photocopieurs d'une capacité de
reproduction supérieure à 75 copies par minute sur papier A4. A ce propos, le
point 15, troisième alinéa, des considérants du règlement n° 2380/95 énonce:
«Ouvrir deux procédures distinctes concernant les mêmes produits originaires du
même pays serait illogique, ce qui est contraire au système prévu par le règlement
[de base 1988], et risquerait de donner des résultats incongrus. Dans le cas des
photocopieurs à papier originaire du Japon, le réexamen des mesures existantes a
été ouvert et effectué au titre des articles 14 et 15, au motif que leurs dispositions
seraient ou, de fait, sont nécessairement liées. Le réexamen des mesures existantes
sur cette base peut déboucher sur leur modification. Si, au terme d'un réexamen,
les mesures existantes ne pouvaient pas être modifiées de manière à couvrir les
nouveaux types des mêmes produits, l'efficacité des mesures s'en trouverait
compromise.»
- 85.
- Les photocopieurs de grande capacité ayant été inclus dans la procédure de
réexamen au motif qu'il serait illogique et contraire à l'effet utile des mesures
antidumping de prévoir deux régimes différents pour des pratiques de dumping
concernant des produits similaires originaires du même pays, le Conseil était en
droit de considérer que le droit antidumping devait être fixé pour une durée
identique pour l'ensemble des photocopieurs visés par la procédure.
- 86.
- De plus, le règlement n° 2380/95 ayant été adopté à l'issue d'une procédure de
réexamen des mesures initialement instituées, procédure n'ayant porté sur les
photocopieurs de grande capacité qu'à la suite de la demande expresse présentée
par le requérant, le Conseil n'a pas dépassé sa marge d'appréciation en ce qu'il a
estimé que l'inclusion de ces derniers photocopieurs dans la procédure de
réexamen ne justifiait pas la fixation d'une période d'application des nouvelles
mesures définitives supérieure à deux ans.
- 87.
- Il y a lieu d'ajouter que le requérant n'a pas fourni des éléments de preuve
susceptibles d'établir le bien-fondé de son affirmation selon laquelle certains
exportateurs japonais auraient, avant l'entrée en vigueur du règlement n° 2380/95,
constitué des stocks importants des photocopieurs en cause afin de contourner le
droit antidumping. Dès lors, il n'est pas nécessaire pour le Tribunal d'examiner si
l'existence d'indices probants d'une tentative de contournement des droits
antidumping institués, pour la première fois, pour ces photocopieurs aurait
constitué un facteur devant être pris en compte lors de la fixation de la période
d'application des nouvelles mesures antidumping définitives fixées par ledit
règlement.
- 88.
- Pour autant que le requérant fait valoir une violation de l'article 190 du traité, le
Tribunal rappelle que l'inclusion des photocopieurs d'une capacité de reproduction
supérieure à 75 copies par minute sur papier A4 dans la procédure de réexamen
est expliquée, au point 15 des considérants du règlement n° 2380/95, par la
demande expresse en ce sens présentée par le requérant et par le fait qu'il serait
illogique d'ouvrir deux procédures distinctes pour les photocopieurs originaires du
Japon. Dès lors, le Conseil ayant exposé, au point 103 des considérants du
règlement n° 2380/95 (voir ci-dessus point 9), les raisons qui l'ont amené à fixer à
deux ans la durée d'application du règlement, il n'était pas tenu de motiver
spécifiquement la limitation de la durée d'application du règlement à l'égard des
photocopieurs de grande capacité.
- 89.
- Enfin, en quatrième lieu, il convient de rejeter l'argument du requérant tiré de ce
que la limitation de la période d'application du règlement n° 2380/95 constituerait
un précédent dangereux susceptible d'entraîner la dépréciation de l'instrument
antidumping. En effet, cet argument n'est fondé sur la violation d'aucune règle de
droit. En tout état de cause, dans la mesure où le Conseil lui-même soutient que
le pouvoir d'appréciation lui permettant de fixer à moins de cinq ans la période
d'application des droits antidumping définitifs adoptés à l'issue d'une procédure de
réexamen des mesures initialement arrêtées ne peut être invoqué qu'en présence
de circonstances particulières, rien ne permet de considérer que la limitation de la
durée d'application du règlement n° 2380/95 constitue un précédent affectant
l'efficacité des mesures antidumping.
- 90.
- Sur la base des considérations qui précèdent, les moyens tirés d'une erreur
manifeste d'appréciation, d'une part, et d'une violation de l'article 190 du traité,
d'autre part, doivent être rejetés.
Sur le moyen tiré de la violation des droits de la défense de l'industrie communautaire
et des droits dont elle dispose pour assurer l'efficacité des mesures antidumping
Arguments des parties
- 91.
- Le requérant explique, à titre liminaire, que, peu de temps après l'institution des
droits antidumping définitifs sur les photocopieurs en 1987, les exportateurs
japonais ont largement contourné les mesures de protection par la construction
d'usines d'assemblage dans la Communauté [voir, notamment, règlement (CEE)
n° 3205/88 du Conseil, du 17 octobre 1988, portant extension du droit antidumping
institué par le règlement n° 535/87 à certains photocopieurs à papier ordinaire
assemblés dans la Communauté, JO L 284, p. 36]. De plus, les exportateurs
auraient pris partiellement en charge les droits antidumping de sorte que
pratiquement aucune augmentation de prix sur le marché communautaire n'aurait
été constatée. Il se réfère, à cet égard, aux constatations opérées par la
Commission lors de la procédure de réexamen, concluant à une aggravation du
dumping et de la sous-cotation.
- 92.
- Il faudrait prévoir des pratiques similaires des exportateurs et importateurs japonais
de photocopieurs visant à éviter des augmentations de prix et des pertes de parts
du marché communautaire après la confirmation des droits antidumping par le
règlement n° 2380/95. Il faudrait également tenir compte de la construction d'usines
d'assemblage par les producteurs de photocopieurs japonais dans d'autres pays
d'Asie, en particulier en république populaire de Chine, car les statistiques
montreraient une augmentation des exportations en provenance de ce pays vers la
Communauté. En effet, le requérant disposerait de preuves établissant le
contournement des droits antidumping sur les photocopieurs en cause.
- 93.
- Dans ces conditions, l'industrie communautaire devrait prendre toutes les mesures
nécessaires afin d'éviter l'absorption des droits antidumping et/ou le contournement
de ceux-ci par l'assemblage de photocopieurs dans la Communauté et/ou dans des
pays tiers en recourant aux procédures particulières du règlement de base en
matière d'antidumping. Les procédures particulières contre l'absorption des droits
antidumping (article 12 du règlement de base 1994) et contre les contournements
(article 13 dudit règlement) supposeraient, toutefois, l'introduction d'une demande
par l'industrie communautaire. Une telle demande devrait contenir des éléments
de preuve ou des informations suffisants pour justifier l'ouverture d'une enquête.
En outre, la collecte des preuves, la préparation et l'introduction de la demande,
la consultation des États membres, l'ouverture de la procédure, les enquêtes
effectuées par la Commission ainsi que la préparation et l'adoption de la décision
par les autorités communautaires nécessiteraient une période qui excède, en tout
état de cause, deux ans.
- 94.
- La limitation à deux ans de la période d'application du règlement n° 2380/95
priverait, dès lors, l'industrie communautaire de la protection juridique accordée
par le règlement de base antidumping, car une telle période ne serait pas suffisante
pour assurer la mise en oeuvre effective des droits dont elle dispose en vertu des
articles 12 et 13 du règlement de base 1994. La limitation de la période
d'application porterait donc substantiellement atteinte aux droits dont dispose
l'industrie communautaire.
- 95.
- Par ailleurs, la Commission aurait indiqué, dans une lettre du 7 avril 1995, qu'il y
avait lieu de prévoir une période d'application du règlement antidumping
permettant la mise en oeuvre efficace des mesures antidumping et, le cas échéant,
l'ouverture des procédures particulières prévues par le règlement de base.
- 96.
- Le Conseil souligne, à titre liminaire, que les allégations du requérant concernant
l'absorption ou le contournement des droits antidumping à l'avenir relèvent de la
pure spéculation, le requérant ne fournissant pas la moindre preuve de ces
allégations. A cet égard, la référence, faite par le requérant, aux constatations
opérées dans le cadre de la procédure de réexamen serait sans pertinence, ces
constatations portant sur le passé. De plus, l'aggravation du dumping pourrait
s'expliquer non seulement par une absorption des droits antidumping mais
également par une augmentation de la valeur normale. Enfin, la Commission
n'aurait pas calculé de sous-cotation lors de la procédure aboutissant à l'adoption,
par le règlement n° 535/87, du droit antidumping initial et il ne serait donc pas
possible de constater une aggravation de la sous-cotation.
- 97.
- Quoi qu'il en soit, la limitation à deux ans de la période d'application du règlement
n° 2380/95 ne saurait être considérée comme privant le requérant de la protection
juridique que lui garantit le règlement de base 1994. En particulier, des demandes
introduites au titre des procédures en cause pourraient être fondées sur des
événements antérieurs à l'adoption du règlement n° 2380/95 car, lors de la
procédure de réexamen, le droit antidumping institué par le règlement n° 535/87
était toujours en vigueur. Le cas échéant, le requérant aurait même pu déjà
introduire de telles demandes lors de la procédure de réexamen.
- 98.
- En l'espèce, la limitation à deux ans de la période d'application du règlement
n° 2380/95 serait justifiée par l'existence de circonstances particulières. Dès lors, si
cette limitation de la période d'application des mesures antidumping devait être
considérée comme limitant le recours, par l'industrie communautaire, aux
procédures prévues aux articles 12 et 13 du règlement de base 1994, il s'agirait
d'une conséquence acceptée dans le cadre du système juridique instauré par ce
règlement.
- 99.
- Au surplus, si le requérant démontrait l'absorption ou le contournement des droits
antidumping, il pourrait se prévaloir de telles preuves à l'appui d'une nouvelle
demande de réexamen.
Appréciation du Tribunal
- 100.
- Il convient d'observer, à titre liminaire, que l'examen du présent moyen doit se
fonder sur le règlement de base en vigueur à la date de l'adoption du règlement
n° 2380/95, soit le règlement de base 1994, car les éventuelles demandes
d'ouverture des procédures visant à protéger l'industrie communautaire contre les
pratiques d'absorption ou de contournement des droits antidumping devaient être
introduites conformément aux dispositions de ce règlement.
- 101.
- En l'espèce, rien ne permet de considérer que la limitation à deux ans de la
période d'application du règlement n° 2380/95 a porté atteinte aux droits dont
dispose l'industrie communautaire afin de lutter contre les pratiques d'absorption
ou de contournement du droit antidumping.
- 102.
- En effet, il y a lieu de constater que le requérant n'a pas fourni le moindre élément
de preuve susceptible de démontrer qu'il existait, à l'époque de l'adoption du
règlement n° 2380/95, un risque imminent d'absorption ou de contournement des
droits antidumping. En tout état de cause, le règlement de base 1994 ne permet
pas l'adoption de mesures antidumping définitives applicables sur une période
excédant cinq ans et il est donc inévitable que, après une période de trois ans tout
au plus, les mesures antidumping définitives deviennent, si aucune demande de
réexamen n'est introduite, caduques dans un délai de deux ans ou moins. Il s'ensuit
que, à supposer même qu'il soit, en pratique, difficile pour l'industrie
communautaire de se prévaloir des procédures visant à la protéger contre leséventuelles pratiques d'absorption et/ou de contournement du droit antidumping
lorsque les mesures antidumping expirent dans un délai de deux ans, une telle
situation est inhérente au système juridique établi par le règlement de base.
- 103.
- Le présent moyen doit donc être également rejeté.
Sur la demande visant à la production de documents
- 104.
- Le requérant relève que la Commission a proposé que les mesures antidumping
définitives soient appliquées jusqu'au mois d'août 1998. Toutefois, lors des
discussions portant sur cette proposition au sein du comité antidumping et au sein
du Conseil, des représentants de certains États membres auraient demandé une
réduction de la période d'application des mesures définitives. Dans la mesure où
il ignore les motifs invoqués à l'appui d'une telle réduction, le requérant demande
au Tribunal d'ordonner à la Commission et au Conseil de produire les comptes
rendus de séance du comité antidumping et du Conseil portant sur la proposition
de la Commission.
- 105.
- Le Tribunal rappelle que l'examen du dossier interne des institutions en vue de
vérifier si l'acte attaqué a été influencé par des considérations autres que celles
indiquées dans la motivation de celui-ci ou invoquées par l'institution devant le
Tribunal constitue une mesure d'instruction de caractère exceptionnel. Elle suppose
que les circonstances entourant l'acte en cause donnent lieu à des doutes sérieux
quant aux motifs véritables et notamment à des soupçons que ces motifs soient
étrangers aux objectifs du droit communautaire et, donc, constitutifs d'un
détournement de pouvoir (voir ordonnance de la Cour du 18 juin 1986, BAT et
Reynolds/Commission, 142/84 et 156/84, Rec. p. 1899, point 11).
- 106.
- Or, en l'espèce, le requérant n'a pas soulevé de moyen tiré d'un détournement de
pouvoir, ni même expliqué les raisons pour lesquelles il considère que les motifs
figurant dans le règlement n° 2380/95 pourraient ne pas être identiques à ceux
invoqués lors de la procédure d'adoption de celui-ci.
- 107.
- La demande du requérant visant à la production de documents ne saurait donc être
accueillie.
- 108.
- Au vu de l'ensemble de ce qui précède, le recours doit être rejeté.
Sur les dépens
- 109.
- Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui
succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La partie
requérante ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens,
conformément aux conclusions en ce sens du Conseil.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (première chambre élargie)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) La partie requérante est condamnée aux dépens.
Vesterdorf Bellamy Moura Ramos
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Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juillet 1998.
Le greffier
Le président
H. Jung
B. Vesterdorf