Language of document : ECLI:EU:T:2010:139

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

13 avril 2010 (*)

« Recours en annulation – Aides d’État – Avantages fiscaux – Récupération d’aides d’État déclarées illégales – Application du régime des intérêts composés – Acte confirmatif – Irrecevabilité »

Dans les affaires jointes T‑529/08 à T‑531/08,

Territorio Histórico de Álava – Diputación Foral de Álava, (Espagne), représenté par Mes I. Sáenz-Cortabarría Fernández et M. Morales Isasi, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑529/08,

Territorio Histórico de Guipúzcoa – Diputación Foral de Guipúzcoa, (Espagne), représenté par Mes I. Sáenz-Cortabarría Fernández et M. Morales Isasi, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑530/08,

Territorio Histórico de Vizcaya – Diputación Foral de Vizcaya, (Espagne), représenté par Mes I. Sáenz-Cortabarría Fernández et M. Morales Isasi, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑531/08,

contre

Commission européenne, représentée par M. C. Urraca Caviedes, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la lettre de la Commission, du 2 octobre 2008, indiquant aux requérants qu’il y a lieu d’appliquer des intérêts composés dans le cadre de la récupération des aides d’État déclarées illégales par les décisions 2002/820/CE, 2002/894/CE et 2003/27/CE de la Commission, du 11 juillet 2001, concernant le régime d’aides d’État mis à exécution par l’Espagne en faveur des entreprises des provinces respectivement d’Álava, de Guipúzcoa et de Vizcaya sous la forme d’un crédit d’impôt de 45 % des investissements (respectivement JO 2002, L 296, p. 1, JO 2002, L 314, p. 26, et JO 2003, L 17, p. 1), et 2002/892/CE, 2002/540/CE et 2002/806/CE de la Commission, du 11 juillet 2001, concernant le régime d’aide d’État mis à exécution par l’Espagne en faveur de certaines entreprises nouvellement créées dans les provinces respectivement d’Álava, de Guipúzcoa et de Vizcaya (respectivement JO 2002, L 314, p. 1, JO 2002, L 174, p. 31, et JO 2002, L 279, p. 35), décisions validées par les arrêts du Tribunal du 9 septembre 2009, Diputación Foral de Álava e.a./Commission (T‑227/01 à T‑229/01, T‑265/01, T‑266/01 et T‑270/01, non encore publié au Recueil), et Diputación Foral de Álava e.a./Commission (T‑230/01 à T‑232/01 et T‑267/01 à T‑269/01, non encore publié au Recueil),

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de Mme I. Wiszniewska-Białecka, président, MM. F. Dehousse (rapporteur) et H. Kanninen, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Cadre juridique

1        L’article 14 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO L 83, p. 1), intitulé « Récupération de l’aide », prévoit :

« 1. En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire (ci-après dénommée « décision de récupération »). La Commission n’exige pas la récupération de l’aide si, ce faisant, elle allait à l’encontre d’un principe général de droit communautaire.

2. L’aide à récupérer en vertu d’une décision de récupération comprend des intérêts qui sont calculés sur la base d’un taux approprié fixé par la Commission. Ces intérêts courent à compter de la date à laquelle l’aide illégale a été mise à la disposition du bénéficiaire jusqu’à celle de sa récupération.

3. Sans préjudice d’une ordonnance de la Cour de justice des Communautés européennes prise en application de l’article [242 CE], la récupération s’effectue sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national de l’État membre concerné, pour autant que ces dernières permettent l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission. À cette fin et en cas de procédure devant les tribunaux nationaux, les États membres concernés prennent toutes les mesures prévues par leurs systèmes juridiques respectifs, y compris les mesures provisoires, sans préjudice du droit communautaire. »

2        Dans sa communication, du 8 mai 2003, sur les taux d’intérêt applicables en cas de récupération d’aides illégales (JO C 110, p. 21, ci-après la « communication de 2003 »), la Commission des communautés européennes relève ce qui suit :

« […] la question s’est […] posée de savoir si ces intérêts devaient être simples ou composés […L]a Commission juge urgent de clarifier sa position à cet égard.

[…] Il apparaît […], en dépit de la variété des situations possibles, qu’une aide illégale a pour effet de fournir des fonds au bénéficiaire selon les mêmes conditions qu’un prêt à moyen terme ne portant pas d’intérêts. Il en résulte que l’application d’intérêts composés semble nécessaire pour garantir la neutralisation totale des avantages financiers découlant d’une telle situation.

La Commission souhaite donc informer les États membres et les parties intéressées que, dans toute décision ordonnant la récupération d’une aide illégale qu’elle pourra adopter à l’avenir, elle appliquera le taux de référence utilisé pour le calcul de l’équivalent subvention net des aides régionales sur une base composée. Conformément aux pratiques usuelles du marché, cette composition devra se faire sur une base annuelle. De la même manière, la Commission attendra des États membres qu’ils appliquent des intérêts composés lors de l’exécution de toute décision de récupération en instance, à moins que ce ne soit contraire à un principe général du droit communautaire. »

 Antécédents du litige

3        Le 11 juillet 2001, la Commission a adopté six décisions par lesquelles elle a qualifié d’aides d’État incompatibles avec le marché commun les régimes d’aides en cause. Les décisions 2002/820/CE, 2002/894/CE et 2003/27/CE concernent les régimes d’aides d’État mis à exécution par l’Espagne en faveur des entreprises des provinces respectivement d’Álava, de Guipúzcoa et de Vizcaya sous la forme d’un crédit d’impôt de 45 % des investissements (respectivement JO 2002, L 296, p. 1, JO 2002, L 314, p. 26, et JO 2003, L 17, p. 1). Les décisions 2002/892/CE, 2002/540/CE et 2002/806/CE concernent les régimes d’aides d’État mis à exécution par l’Espagne en faveur de certaines entreprises nouvellement créées dans les provinces respectivement d’Álava, de Guipúzcoa et de Vizcaya (respectivement JO 2002, L 314, p. 1, JO 2002, L 174, p. 34, et JO 2002, L 279, p. 35).

4        Ces six décisions (ci-après les « décisions de 2001 ») ont fait l’objet de recours en annulation, rejetés par le Tribunal (arrêts du Tribunal du 9 septembre 2009, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑227/01 à T‑229/01, T‑265/01, T‑266/01 et T‑270/01, non encore publié au Recueil, et Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑230/01 à T‑232/01 et T‑267/01 à T‑269/01, non encore publié au Recueil, actuellement sous pourvoi).

5        L’article 3, paragraphe 2, des décisions de 2001 prévoit la récupération des aides dans les termes suivants :

« La récupération a lieu sans délai, conformément aux procédures du droit national, pour autant qu’elles permettent l’exécution immédiate et effective de la présente décision. Les aides à récupérer incluent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires, jusqu’à la date de leur récupération. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l’équivalent subvention dans le cadre des aides à finalité régionale. »

6        Le 19 novembre 2003, la Commission a introduit un recours en manquement contre le Royaume d’Espagne pour inexécution des décisions de 2001.

7        Par lettre du 9 juillet 2004, la Commission a demandé aux autorités espagnoles de lui fournir, dans un délai de deux mois, les informations concernant la récupération des aides en cause dans ces décisions. Elle s’est référée à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 659/1999, selon lequel la récupération des aides doit s’effectuer conformément aux procédures prévues par le droit national, pour autant que ces dernières permettent l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission. Elle a également indiqué que « les montants à récupérer sont productifs d’intérêts composés depuis la date à laquelle l’aide a été versée jusqu’à la date de sa récupération ».

8        Par lettre du 21 mars 2005, la Commission a réitéré sa demande aux autorités espagnoles de lui fournir des informations concernant la récupération des aides visées par les décisions de 2001. Elle a sollicité la communication d’une liste des entreprises bénéficiaires, ainsi que les montants en cause et a rappelé que, en vertu de l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 659/1999, les montants à récupérer sont productifs d’intérêts composés depuis la date à laquelle l’aide a été versée jusqu’à la date de sa récupération. Elle a demandé aux autorités espagnoles d’indiquer comment elles avaient procédé pour calculer lesdits intérêts et de lui adresser les informations requises dans un délai de deux mois.

9        Par arrêt du 14 décembre 2006, Commission/Espagne (C‑485/03 à C‑490/03, Rec. p. I‑11887), la Cour s’est prononcée sur le recours de la Commission du 19 novembre 2003 (voir point 6 ci-dessus) et a constaté le manquement du Royaume d’Espagne pour inexécution des décisions de 2001.

10      À la suite d’une mise en demeure, qui leur a été signifiée par la Commission le 10 juillet 2007, les autorités espagnoles lui ont adressé une liste de bénéficiaires et une copie des ordres de paiement.

11      Par lettres du 3 avril 2008, elles ont indiqué à la Commission avoir appliqué un taux d’intérêt composé dans le cadre de la récupération des avantages fiscaux en cause et, en s’interrogeant sur la validité de cette solution, elles ont précisé qu’il était ainsi « possible qu’aient été récupérés des montants d’intérêts supérieurs à ceux qui légalement auraient dû l’être ».

12      Par lettres du 23 juin 2008, les autorités espagnoles, se fondant sur le devoir de coopération loyale prévue à l’article 10 CE, ont demandé à la Commission d’expliquer les raisons pour lesquelles le recours au taux d’intérêt composé serait justifié et ont suggéré la tenue d’une réunion sur cette question.

13      Le 7 juillet 2008, la Commission a envoyé un avis motivé au Royaume d’Espagne concernant l’inexécution des obligations lui incombant au titre de l’arrêt Commission/Espagne, point 9 supra, conformément à l’article 228, paragraphe 2, CE.

14      Par lettres du 21 août 2008, les autorités espagnoles, évoquant le devoir de coopération loyale prévu à l’article 10 CE, ont réitéré leur demande à la Commission de se prononcer sur la validité de l’application d’intérêts composés au lieu d’intérêts simples.

15      Par lettre du 2 octobre 2008 (ci-après la « lettre attaquée »), la Commission a indiqué qu’elle procédait à l’analyse de la réponse des autorités espagnoles concernant les bénéficiaires des aides en cause. S’agissant de la demande adressée à la Commission visant à ce qu’elle indique si l’application des intérêts composés était correcte, la lettre attaquée est rédigée comme suit :

« Ces services estiment ce qui suit :

–        le 8 mai 2003, la Commission a publié sa communication relative aux intérêts applicables en cas de récupération d’aides illégales ; la Commission clarifie ainsi que dans les décisions de récupération futures, elle appliquera un intérêt composé annuel, comme il est de pratique normale sur le marché ; de même, la Commission explique qu’elle attend des États membres qu’ils appliquent également un intérêt composé dans le cadre de l’exécution des décisions de récupération, sauf si cela va à l’encontre d’un principe général de droit communautaire ;

–        au cas particulier, si les décisions de récupération ont effectivement été adoptées avant le 8 mai 2003, les autorités espagnoles n’avaient pas procédé à la récupération à cette date ; d’autre part, la Commission estime que le principe de confiance légitime invoqué par les autorités espagnoles, ne justifie pas l’application du régime des intérêts simples ;

–        en outre, les autorités espagnoles nous confirment dans leur lettre qu’elles ont demandé aux bénéficiaires des aides déclarées illégales de les reverser assorties d’intérêts calculés de manière composée.

Conformément à ce qui précède, et considérant que seule l’application d’un intérêt composé peut mettre fin à la distorsion de concurrence, nous insistons, en accord avec ce qui est établi dans la communication, pour qu’il s’applique à tous les cas de récupération en cours. »

 Procédure et conclusions des parties

16      Par trois requêtes déposées au greffe du Tribunal le 2 décembre 2008, les requérants, le Territorio Histórico de Álava – Diputación Foral de Álava, le Territorio Histórico de Guipúzcoa – Diputación Foral de Guipúzcoa et le Territorio Histórico de Vizcaya – Diputación Foral de Vizcaya ont introduit les présents recours. Les requérants concluent, dans chacune des affaires, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la lettre attaquée dans la mesure où elle exige l’application d’un intérêt composé ;

–        condamner la Commission aux dépens.

17      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 23 février 2009, la Commission a soulevé, dans chacune des affaires, une exception d’irrecevabilité en vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal et conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable ;

–        condamner le requérant aux dépens.

18      Dans leurs observations sur les exceptions d’irrecevabilité, déposées le 1er avril 2009 dans chacune des affaires, les requérants demandent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission ;

–        subsidiairement, joindre l’examen de l’exception d’irrecevabilité à l’examen au fond et déclarer le recours recevable ;

–        en tout état de cause, condamner la Commission aux dépens.

19      Par ordonnance du président de la première chambre du Tribunal du 30 novembre 2009, les affaires T‑529/08, T‑530/08 et T‑531/08 ont été jointes aux fins de l’examen des exceptions d’irrecevabilité.

 En droit

20      En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité, l’incompétence ou sur un incident, sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal.

21      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour statuer sur la demande présentée par la Commission sans qu’il y ait lieu d’ouvrir la procédure orale.

 Arguments des parties

22      La Commission soutient que la lettre attaquée est une simple mesure d’information, non susceptible d’être attaquée. Selon elle, cette lettre, qui s’insère dans le cadre d’échanges informels avec le Royaume d’Espagne, se limite à exposer l’opinion de ses services, sans modifier la situation juridique des requérants. Seules les décisions de 2001 produiraient des effets juridiques obligatoires. Elle invoque par analogie la jurisprudence relative à la phase précontentieuse de la procédure en manquement prévue à l’article 226 CE, selon laquelle l’avis motivé et les échanges informels de correspondance ne sont pas des actes attaquables.

23      La Commission fait valoir, à titre subsidiaire, que la lettre attaquée constitue un acte confirmatif des lettres du 9 juillet 2004 et du 21 mars 2005, par lesquelles elle a indiqué aux autorités espagnoles que les intérêts applicables aux aides à récupérer étaient des intérêts composés. La lettre attaquée n’ajouterait aucun élément nouveau et ne révélerait pas un réexamen de la situation. Elle ajoute que les autorités espagnoles ont récupéré les aides en cause en appliquant des intérêts composés.

24      Les requérants contestent que les décisions de 2001 soient les seuls actes attaquables. Selon eux, ces décisions ne règlent pas la question des intérêts simples ou composés, laquelle est réglée par la lettre attaquée, qui constitue l’acte décisionnel attaquable. Ils estiment que ladite lettre, qui se réfère à la communication de 2003 et non aux décisions de 2001, étend la portée de l’obligation de récupération des aides résultant des décisions de 2001 et ne peut pas être considérée comme constituant une simple mesure d’information.

25      Ils contestent également le fait que cette question des intérêts puisse se poser dans le cadre de la mise en oeuvre d’une procédure en manquement ou d’une procédure d’exécution de l’arrêt de la Cour fondée sur les articles 226 CE ou 228 CE, comme l’évoquerait la Commission. Le recours en annulation et les procédures en manquement n’auraient pas la même finalité. En outre, compte tenu de l’article 40 du statut de la Cour de justice, ils n’auraient pas qualité pour intervenir dans le cadre d’un recours fondé sur les articles 226 CE et 228 CE.

26      Enfin, les requérants contestent que la lettre attaquée puisse constituer un acte confirmatif des lettres antérieures du 9 juillet 2004 et du 21 mars 2005. Ils soutiennent, d’une part, que la lettre attaquée n’a aucun lien formel ou matériel avec ces lettres et, d’autre part, qu’elle contient en tout état de cause des éléments nouveaux, comme la référence à la communication de 2003, alors que les lettres antérieures se bornaient à rappeler l’article 14 du règlement n° 659/1999. Les requérants invoquent l’existence d’un nouvel examen de la situation et mentionnent en particulier une réunion du 12 novembre 2008 entre la Commission et les autorités espagnoles.

 Appréciation du Tribunal

27      Selon une jurisprudence constante, constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9, et ordonnance du Tribunal du 2 septembre 2009, E.ON Ruhrgas et E.ON Földgáz Trade/Commission, T‑57/07, non publiée au Recueil, point 30).

28      En revanche, un recours en annulation dirigé contre une décision purement confirmative d’une décision antérieure non attaquée dans les délais est irrecevable (voir arrêt de la Cour du 11 janvier 1996, Zunis Holding e.a./Commission, C‑480/93 P, Rec. p. I‑1, point 14, et ordonnance du Tribunal du 16 mars 1998, Goldstein/Commission, T‑235/95, Rec. p. II‑523, point 41, et la jurisprudence citée).

29      Une décision est purement confirmative d’une décision antérieure lorsqu’elle ne contient aucun élément nouveau par rapport à un acte antérieur et n’a pas été précédée d’un réexamen de la situation du destinataire de cet acte antérieur (ordonnance de la Cour du 7 décembre 2004, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑521/03 P, non publiée au Recueil, point 47 ; arrêt du Tribunal du 15 octobre 1997, IPK/Commission, T‑331/94, Rec. p. II‑1665, point 24, et ordonnance Goldstein/Commission, point 28 supra, point 42).

30      En outre, le caractère confirmatif ou non d’un acte ne saurait être apprécié en fonction uniquement de son contenu par rapport à celui de la décision antérieure qu’il confirmerait. En effet, il y a également lieu d’apprécier le caractère de l’acte attaqué par rapport à la nature de la demande à laquelle cet acte constitue une réponse (arrêt du Tribunal du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, Rec. p. II‑557, point 45). En particulier, si l’acte constitue la réponse à une demande dans laquelle des faits nouveaux et substantiels sont invoqués, et par laquelle l’administration est priée de procéder à un réexamen de la décision antérieure, cet acte ne saurait être considéré comme revêtant un caractère purement confirmatif, dans la mesure où il statue sur ces faits et contient, ainsi, un élément nouveau par rapport à la décision antérieure (arrêt Inpesca/Commission, précité, point 46, et ordonnance du Tribunal du 29 avril 2004, SGL Carbon/Commission, T‑308/02, Rec. p. II‑1363, point 53).

31      En l’espèce, il ressort à la fois de la lettre du 9 juillet 2004, de celle du 21 mars 2005 et de la lettre attaquée, qui ont toutes les trois pour objet d’assurer l’exécution des décisions de 2001, que, selon la Commission, les montants à récupérer sont productifs d’intérêts composés. Force est donc de constater que, en ce qui concerne la question du calcul des intérêts applicables, la lettre attaquée ne fait que confirmer la position antérieure de la Commission, exprimée pour la première fois dans sa lettre du 9 juillet 2004.

32      En outre, il s’agit bien d’un acte confirmatif au sens de la jurisprudence citée aux points 29 et 30 ci-dessus.

33      Premièrement, contrairement à ce qu’affirment les requérants, le fait que la lettre attaquée se réfère à la communication de 2003, alors que les lettres antérieures mentionnent le règlement n° 659/1999, ne constitue pas un élément nouveau permettant, en l’espèce, d’écarter le caractère confirmatif de la lettre attaquée. En effet, la communication de 2003 est antérieure aux lettres du 9 juillet 2004 et du 21 mars 2005. Ainsi, même si elle n’est pas expressément mentionnée dans ces lettres, elle existait à l’époque où elles ont été rédigées et avait été portée à la connaissance des États membres. Dès lors, la communication de 2003 ne constitue pas en tant que tel un élément nouveau par rapport au cadre juridique existant à l’époque des lettres du 9 juillet 2004 et du 21 mars 2005. De plus, la référence à la communication de 2003 dans la lettre attaquée n’a aucunement modifié la substance de ce qui avait été énoncé dans les lettres antérieures, puisqu’elle a conduit la Commission à réaffirmer l’application du régime des intérêts composés.

34      Deuxièmement, contrairement à ce qu’affirment les requérants, la Commission ne procède pas à un nouvel examen de la situation concernant la question du taux d’intérêt applicable. Au contraire, dans la lettre attaquée (voir point 15 ci-dessus), la Commission rappelle les termes de la communication de 2003, prend acte de ce que la récupération des aides illégales a eu lieu sur la base d’intérêts composés et insiste sur le fait que c’est, selon elle, le mode de calcul applicable aux cas de récupération en cours. Il ne ressort donc pas des termes de la lettre attaquée que la Commission a procédé à un nouvel examen de la situation au regard de cette question du calcul des intérêts. En outre, la réunion mentionnée par les requérants (voir point 12 ci-dessus) n’a pas eu lieu avant l’adoption de la lettre attaquée et ne peut donc pas être prise en compte à cet égard.

35      Troisièmement, la lettre attaquée fait suite à des courriers émanant des autorités espagnoles en date des 3 avril, 23 juin et 21 août 2008 (voir points 11, 12 et 14 ci-dessus), dans lesquels ces autorités se sont limitées à exprimer leurs interrogations et à demander à la Commission de s’expliquer sur l’application du régime des intérêts composés. Il ne ressort pas de ces courriers, ni d’aucun autre élément du dossier, que des faits nouveaux et substantiels, de nature à justifier un nouvel examen de la question du mode de calcul des intérêts de retard, aient été invoqués.

36      Enfin, les requérants font valoir que la lettre attaquée ne se réfère pas expressément aux lettres antérieures et que, lors d’une réunion du 12 novembre 2008, le directeur général de la concurrence de la Commission se serait référé à la lettre attaquée pour l’application du taux d’intérêt composé. Toutefois, eu égard à ce qui précède (voir points 31 à 35 ci-dessus), ces éléments n’enlèvent pas à la lettre attaquée son caractère confirmatif au sens de la jurisprudence citée aux points 29 et 30 ci-dessus.

37      Il s’ensuit que la lettre attaquée doit être considérée comme un acte confirmatif de la position de la Commission concernant le mode de calcul des intérêts, exprimée pour la première fois dans sa lettre du 9 juillet 2004 et réitérée dans celle du 21 mars 2005.

38      À supposer que, comme le soutiennent les requérants, la lettre attaquée constitue un acte attaquable, tel serait alors également le cas des lettres du 9 juillet 2004 et du 21 mars 2005 en ce qu’elles prévoient la récupération des aides en cause sur la base d’intérêts composés.

39      Or, force est de constater que la lettre du 9 juillet 2004 n’a pas été attaquée en annulation dans le délai prévu pour l’introduction d’un tel recours, pas plus d’ailleurs que la lettre du 21 mars 2005, et qu’elle est donc devenue définitive.

40      Partant, les présents recours doivent être rejetés comme étant irrecevables.

 Sur les dépens

41      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

1)      Les recours sont rejetés comme irrecevables.

2)      Le Territorio Histórico de Álava – Diputación Foral de Álava, le Territorio Histórico de Guipúzcoa – Diputación Foral de Guipúzcoa et le Territorio Histórico de Vizcaya – Diputación Foral de Vizcaya supporteront chacun leurs propres dépens, ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

Fait à Luxembourg, le 13 avril 2010.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       I. Wiszniewska-Białecka


* Langue de procédure : l’espagnol.