Language of document : ECLI:EU:T:2020:538

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

11 novembre 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale Lottoland – Marques nationales figuratives antérieures LOTTO et Lotto – Marque nationale verbale antérieure lotto – Déclaration de nullité partielle – Motif relatif de refus – Absence d’atteinte à la renommée – Absence de lien entre les marques en cause – Article 8, paragraphe 5, et article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑820/19,

Totalizator Sportowy sp. z o.o., établie à Varsovie (Pologne), représentée par Me B. Matusiewicz-Kulig, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. P. Sipos et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Lottoland Holdings Ltd, établie à Ocean Village (Gibraltar), représentée par Me A. Gérard, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 2 octobre 2019 (affaire R 97/2019‑4), relative à une procédure de nullité entre Totalizator Sportowy et Lottoland Holdings,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. C. Iliopoulos (rapporteur) et R. Norkus, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 3 décembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 14 février 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 14 février 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 23 novembre 2012, Lottoland Ltd, prédécesseur de l’intervenante, Lottoland Holdings Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Lottoland.

3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 41 :      « Éducation ; formation ; activités sportives et culturelles » ;

–        classe 42 :      « Services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherche et de conception y relatifs ; services d’analyses et de recherches industrielles ».

4        Après un refus partiel de la demande d’enregistrement, le signe verbal Lottoland a été enregistré en tant que marque de l’Union européenne le 20 avril 2017 sous le numéro 11369981 pour les services visés au point 3 ci-dessus.

5        Le 4 octobre 2017, la requérante, Totalizator Sportowy sp. z o.o., a présenté auprès de l’EUIPO une demande en nullité de la marque contestée, pour l’ensemble des services pour lesquels celle-ci avait été enregistrée.

6        La demande en nullité était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque polonaise figurative, déposée le 28 décembre 2010 et enregistrée le 6 février 2012 sous le numéro 244397, désignant notamment les services relevant de la classe 41 et correspondant à la description suivante : « Organisation et conduite de loteries et loteries en espèces, activités récréatives et sportives dans le domaine de l’organisation et de la conduite de jeux de hasard, loteries et paris vidéo ; jeux de hasard, loteries et paris vidéo ; production de programmes de radio et de télévision et de divertissement à la télévision ; organisation et conduite de concerts ; amusements », telle que réproduite ci-après :

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–        la marque polonaise figurative, déposée le 4 juin 2009 et enregistrée le 18 août 2010 sous le numéro 231054, désignant notamment les services relevant de la classe 41 et correspondant à la description suivante : « Organisation et conduite de loteries et loteries en espèces, activités récréatives et sportives dans le domaine de l’organisation et de la conduite de jeux de hasard, loteries et paris vidéo ; jeux de hasard, loteries et paris vidéo ; production de programmes de radio et de télévision et de divertissement à la télévision ; organisation et conduite de concerts ; amusements », telle que reproduite ci-après :

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–        la marque polonaise verbale lotto, déposée le 29 mars 2010 et enregistrée le 27 mai 2011 sous le numéro 243728, désignant notamment les services relevant de la classe 41 et correspondant à la description suivante : « Organisation et conduite de jeux et paris numériques ; organisation et conduite de loteries et loteries en espèces, loteries à gratter, loteries vidéo, paris mutuels, jeux d’argent et de hasard en ligne sur le réseau informatique ; organisation de manifestations récréatives ; organisation de manifestations sportives, organisation de compétitions sportives, création conjointe de programmes de divertissement télévisés, location de machines à sous ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de la demande en nullité étaient ceux visés à l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, de ce même règlement.

8        Le 15 novembre 2018, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité et a déclaré la nullité de la marque contestée dans son intégralité, au motif qu’il existait un risque que l’usage de la marque contestée tire indûment profit de la renommée de la marque polonaise figurative antérieure, enregistrée sous le numéro 244397, au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

9        Le 15 janvier 2019, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation.

10      Par décision du 2 octobre 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a partiellement accueilli le recours et a annulé la décision de la division d’annulation en tant qu’elle avait déclaré nulle la marque contestée pour tous les services compris dans la classe 42, à savoir les « services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherches et de conception y relatifs ; services d’analyses et de recherches industrielles ».

11      En premier lieu, la chambre de recours a accueilli la demande en nullité de la marque contestée sur le fondement de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, en tant qu’elle visait les services relevant de la classe 41 et a rejeté la demande en tant qu’elle désignait les services compris dans la classe 42, au motif qu’ils étaient différents des services visés par les marques antérieures et que, partant, le risque de confusion était exclu. En particulier, elle a considéré que, compte tenu de l’identité ou de la similitude moyenne des services relevant de la classe 41, de la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle supérieure à la moyenne des signes en cause, du caractère distinctif normal de la marque verbale antérieure, ainsi que du niveau d’attention moyen du public pertinent, il existait un risque de confusion entre la marque contestée et la marque verbale antérieure pour les services relevant de cette dernière classe.

12      En second lieu, la chambre de recours a rejeté la demande en nullité sur le fondement de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 5, de ce règlement, au motif de l’absence de lien entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent en ce qui concerne les services relevant de la classe 42 et visés par la marque contestée. Pour ce faire, premièrement, elle a estimé que les marques figuratives antérieures jouissaient d’une renommée élevée uniquement pour les services d’« organisation et conduite de loteries et loteries en espèces », compris dans la classe 41 et non pour les autres services relevant de la même classe. Deuxièmement, elle a estimé que les services relevant de la classe 42 couverts par la marque contestée étaient différents des services couverts par les marques antérieures, en ce qu’ils étaient fournis par des entreprises différentes et étaient destinés aux utilisateurs différents et qu’ils ne pouvaient être considérés comme complémentaires ou concurrents. Troisièmement, elle a conclu que, bien que la renommée élevée des marques figuratives antérieures eût été démontrée sur le territoire pertinent pour une partie des services compris dans la classe 41, il n’existait pas de lien entre les marques en conflit au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. Aucune conclusion différente ne pouvait non plus être tirée en ce qui concerne la marque verbale antérieure. Quatrièmement, la chambre de recours a considéré que, à défaut d’un tel lien, dans l’esprit du public pertinent, l’usage de la marque contestée pour les services compris dans la classe 42 ne tirerait pas indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures et ne leur porterait pas non plus préjudice.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en tant qu’elle déclare la validité de la marque contestée pour tous les services compris dans la classe 42 pour lesquels elle a été enregistrée ;

–        modifier la décision attaquée en déclarant la nullité de la marque contestée dans son intégralité, y compris pour tous les services relevant de la classe 42 ;

–        à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant l’EUIPO ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens de la procédure.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit 

16      À titre liminaire, il y a lieu de préciser que la requérante invoque, d’une part, dans la partie introductive de la requête, un moyen unique, tiré de la violation « de l’article 60, paragraphe 1, sous a), lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 5, du règlement délégué (UE) no 2018/625 de la Commission du 5 mars 2018 complétant le règlement (UE) no° 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil sur la marque de l’Union européenne, abrogeant le règlement délégué (UE) no 2017/1430 » et, d’autre part, au point 17 de la requête, une violation de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

17      L’EUIPO estime, en substance, que cette référence au règlement délégué 2018/625 résulte d’une erreur rédactionnelle manifeste et que le moyen unique soulevé par la requérante doit être interprété comme tiré d’une violation des dispositions de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 5, du même règlement, les dispositions de la même numérotation du règlement délégué 2018/625 étant sans rapport avec le motif de nullité invoqué en l’espèce.

18      À cet égard, il ressort sans ambiguïté de la requête que la requérante a entendu faire référence au règlement 2017/1001. En effet, nonobstant le fait que la requérante se réfère à l’intitulé complet du règlement délégué 2018/625, elle ne développe que des arguments relatifs à une violation, par la chambre de recours, des dispositions de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 5, du même règlement [voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 31 mai 2016, Jochen Schweizer/EUIPO (Du bist, was du erlebst.), T‑301/15, non publié, EU:T:2016:324, point 12, et du 30 janvier 2019, Arezzo Indústria e Comércio/EUIPO (SCHUTZ), T‑256/18, non publié, EU:T:2019:38, point 11].

19      Il y a donc lieu de considérer que la requête est entachée d’une erreur de plume et que le moyen unique soulevé doit être interprété comme tiré d’une violation des dispositions de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

20      Le moyen unique s’articule, en substance, en deux branches, tirées, la première, de l’existence d’un lien entre les marques en conflit et, la deuxième, de l’existence d’une des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

21      Par la première branche du moyen unique, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a commis des erreurs dans son appréciation des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, en ce qui concerne le constat selon lequel le public pertinent ne ferait pas de lien avec les marques antérieures. Par la seconde branche dudit moyen, elle fait valoir que la conclusion de ladite chambre selon laquelle la marque contestée ne tirerait pas indûment profit de la renommée des marques antérieures et ne porterait pas préjudice au caractère distinctif ou à la renommée des marques antérieures est erronée au motif que cette chambre a négligé  de  prendre en compte des éléments de preuve relatifs à l’existence de l’une des atteintes visées par ladite disposition. Elle allègue que, si, notamment, la même chambre avait tenu compte de tous ces éléments de preuve, celle-ci aurait dû conclure à l’existence d’un risque de profit indu qui s’étend à l’ensemble des services pour lesquels la marque contestée avait été enregistrée.

22      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

23      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’Union et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.

24      S’agissant du risque visé par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, il convient de relever que si, certes, la fonction première d’une marque consiste en sa fonction d’origine, il n’en demeure pas moins qu’une marque agit également comme moyen de transmission d’autres messages concernant, notamment, les qualités ou caractéristiques particulières des produits ou des services qu’elle désigne, ou les images et sensations qu’elle projette. En ce sens, toute marque possède une valeur économique intrinsèque autonome et distincte par rapport à celle des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée. Les messages véhiculés notamment par une marque renommée ou qui lui sont associés confèrent à celle-ci une valeur importante et digne de protection, et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, la renommée d’une marque est le résultat d’efforts et d’investissements considérables de son titulaire. Ainsi, cette disposition assure la protection d’une marque renommée, à l’égard de toute demande de marque identique ou similaire qui pourrait porter atteinte à son image, même si les produits visés par la marque demandée ne sont pas analogues à ceux pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée [arrêts du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, point 35, et du 8 décembre 2011, Aktieselskabet af 21. november 2001/OHMI – Parfums Givenchy (only givenchy), T‑586/10, non publié, EU:T:2011:722, point 58].

25      Il ressort du libellé de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 que l’application de cette disposition est soumise à trois conditions, à savoir, premièrement, l’identité ou la similitude des marques en conflit, deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, l’existence d’un risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice. Ces conditions sont cumulatives et l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [arrêt du 16 mars 2016, The Body Shop International/OHMI – Spa Monopole (SPA WISDOM), T‑201/14, non publié, EU:T:2016:148, point 17 ; voir également, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, VIPS, T‑215/03, EU:T:2007:93, point 34 et jurisprudence citée].

26      Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, les atteintes visées par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, lorsqu’elles se produisent, sont la conséquence d’un certain degré de similitude entre la marque demandée et la marque antérieure, en raison de laquelle le public concerné effectue un rapprochement entre les deux, c’est-à-dire établit un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas [ voir, en ce sens, arrêt du 25 mai 2005, Spa Monopole/OHMI – Spa-Finders Travel Arrangements (SPA-FINDERS), T‑67/04, EU:T:2005:179, point 41 et jurisprudence citée ; arrêt du 12 novembre 2009, Spa Monopole/OHMI – De Francesco Import (SpagO), T‑438/07, EU:T:2009:434, point 15 ; voir également, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 30 et jurisprudence citée]. L’existence d’un tel lien dans l’esprit du public pertinent entre la marque demandée et la marque antérieure est, par conséquent, une condition essentielle pour l’application de ladite disposition [voir, en ce sens, arrêts du 10 mai 2007, Antartica/OHMI – Nasdaq Stock Market (nasdaq), T‑47/06, non publié, EU:T:2007:131, point 53 et jurisprudence citée, et du 11 décembre 2014, Coca-Cola/OHMI – Mitico (Master), T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 26 et jurisprudence citée].

27      Il ressort, enfin, de la jurisprudence que l’existence d’un lien entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, parmi lesquels figurent le degré de similitude entre les marques en conflit, la nature des produits ou des services concernés par les marques en conflit, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou services ainsi que le public concerné, l’intensité de la renommée de la marque antérieure, le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure et l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public [ordonnance du 30 avril 2009, Japan Tobacco/OHMI, C‑136/08 P, non publiée, EU:C:2009:282, point 26, et arrêt du 6 juillet 2012, Jackson International/OHMI – Royal Shakespeare (ROYAL SHAKESPEARE), T‑60/10, non publié, EU:T:2012:348, point 21, voir également, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 41 et 42].

28      Selon la jurisprudence, il ne saurait être exclu que le public concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée soit tout à fait distinct de celui concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure a été enregistrée et que la marque antérieure, quoique renommée, soit inconnue du public visé par la marque postérieure. En pareil cas, le public visé par chacune des deux marques peut ne jamais être mis en présence de l’autre marque, de sorte qu’il n’établira aucun lien entre ces marques. En outre, même si les publics concernés par les produits ou les services pour lesquels les marques en conflit sont respectivement enregistrées sont les mêmes ou se recoupent dans une certaine mesure, lesdits produits ou services peuvent être si dissemblables que la marque postérieure sera insusceptible d’évoquer la marque antérieure dans l’esprit du public pertinent. Dès lors, la nature des produits ou des services pour lesquels les marques en conflit ont été respectivement enregistrées doit être prise en considération aux fins d’apprécier l’existence d’un lien entre ces marques (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 48 à 50).

29      Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du public pertinent est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause. C’est pourquoi le degré d’attention dudit public est également un facteur pertinent aux fins de l’appréciation de l’existence d’un lien entre les marques en conflit [arrêt du 1er mars 2018, Shoe Branding Europe/EUIPO – adidas (Position de deux bandes parallèles sur une chaussure), T‑629/16, EU:T:2018:108, point 31].

30      À défaut de l’existence d’un tel lien d’association dans l’esprit du public, l’usage de la marque postérieure n’est pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou de lui porter préjudice (voir, en ce sens, ordonnance du 30 avril 2009, Japan Tobacco/OHMI, C‑136/08 P, non publiée, EU:C:2009:282, point 27 et jurisprudence citée).

31      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le bien-fondé du moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

 Sur la similitude des marques en conflit

32      Il ressort du point 34 de la décision attaquée que la chambre de recours a constaté, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion en application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, que les marques en conflit présentaient une similitude supérieure à la moyenne sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

33      La requérante ne conteste pas cette appréciation.

34      L’intervenante fait valoir que les marques en conflit ne présentaient qu’une faible similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuelle en raison de l’élément supplémentaire « land » figurant dans la marque contestée.

35      Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que l’existence d’une similitude entre la marque antérieure et la marque contestée constitue une condition d’application commune au paragraphe 1, sous b), et au paragraphe 5 de l’article 8 du règlement 2017/1001. Cette condition de similitude entre les marques en conflit présuppose, tant dans le cadre du paragraphe 1, sous b), que dans celui du paragraphe 5 dudit article, l’existence, notamment, d’éléments de ressemblance visuelle, phonétique ou conceptuelle (arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, points 51 et 52).

36      Certes, le degré de similitude requis dans le cadre de l’une et de l’autre des dispositions mentionnées au point 35 ci-dessus est différent. En effet, tandis que la mise en œuvre de la protection instaurée par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 est subordonnée à la constatation d’un tel degré de similitude entre les marques en conflit tel qu’il existe, dans l’esprit du public concerné, un risque de confusion entre celles-ci, l’existence d’un tel risque n’est pas requise pour la protection conférée par le paragraphe 5 du même article. Ainsi, les atteintes visées à ce dernier paragraphe peuvent être la conséquence d’un degré moindre de similitude entre la marque antérieure et la marque demandée, pour autant que celui-ci est suffisant pour que le public concerné effectue un rapprochement entre lesdites marques, c’est-à-dire établisse un lien entre celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 53).

37      En revanche, il ne ressort ni du libellé des dispositions mentionnées au point 35 ci-dessus ni de la jurisprudence que la similitude entre les marques en conflit devrait être appréciée de manière différente selon qu’elle est effectuée au regard de l’une ou de l’autre de ces dispositions (arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 54).

38      En l’espèce, premièrement, en ce qui concerne la comparaison sur le plan visuel, il y a lieu de rappeler que la circonstance selon laquelle une marque est composée exclusivement de la marque antérieure à laquelle un autre mot est accolé constitue une indication de la similitude entre ces deux marques [voir arrêt du 7 mars 2013, FairWild Foundation/OHMI – Wild (FAIRWILD), T‑247/11, non publié, EU:T:2013:112, point 31 et jurisprudence citée]. À cet égard, il convient de relever que le terme « lotto » qui constitue le premier élément de la marque contestée est le mot constitutif des marques antérieures, de sorte que ledit terme « lotto » est commun aux deux marques.

39      Par ailleurs, il y a lieu de constater que l’élément « land » de la marque contestée constitue, certes, un élément de différenciation entre les marques en conflit, mais que cette différence est faible compte tenu de la place importante occupée par l’élément « lotto » dans lesdites marques. En effet, dans la marque contestée, ledit élément est susceptible d’attirer l’attention du public pertinent notamment en raison de sa position au début de ladite marque.

40      Par conséquent, il convient de conclure, à l’instar de la chambre de recours, que les marques en conflit présentent un degré de similitude visuelle supérieure à la moyenne.

41      Deuxièmement, en ce qui concerne la similitude phonétique, eu égard à la présence du terme « lotto » dans chacune des marques en conflit, il y a lieu de considérer, tel que la chambre de recours l’a constaté au point 27 de la décision attaquée, que lesdites marques présentent également une similitude. Contrairement à ce que fait valoir l’intervenante, la différence liée à l’ajout de l’élément « land » à la fin de la marque contestée ne remet pas en cause l’existence d’une similitude phonétique supérieure à la moyenne compte tenu de leur élément commun [voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2007, La Perla/OHMI – Worldgem Brands (NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC), T‑137/05, non publié, EU:T:2007:142, point 46 et jurisprudence citée].

42      Troisièmement, sur le plan conceptuel, il convient de souligner qu’il est constant entre les parties que le public pertinent comprenne le terme « lotto » comme une référence à « un jeu dans lequel des numéros sont tirés ». En revanche, l’intervenante, en s’appuyant sur des extraits de dictionnaires consultables sur Internet, a contesté l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le mot « land », faisant partie du vocabulaire de base des langues anglaise et allemande, était susceptible d’être largement connu par le consommateur polonais.

43      À cet égard, il convient de constater que le mot « land », dans la signification de « territoire », appartient au vocabulaire de base de l’allemand et de l’anglais et peut donc être compris par le public polonais [voir, en ce sens, arrêts du 13 octobre 2009, Deutsche Rockwool Mineralwoll/OHMI – Redrock Construction (REDROCK), T‑146/08, non publié, EU:T:2009:398, point 53 ; du 11 mai 2010, Wessang/OHMI – Greinwald (star foods), T‑492/08, non publié, EU:T:2010:186, point 52, et du 15 octobre 2018, Apple and Pear Australia et Star Fruits Diffusion/EUIPO – Pink Lady America (WILD PINK), T‑164/17, non publié, EU:T:2018:678, point 58]. Partant, ainsi qu’il a été constaté lors de l’analyse effectuée dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion, les marques en conflit présentent une similitude supérieure à la moyenne sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

 Sur la renommée des marques antérieures

44      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que les marques figuratives antérieures jouissaient d’une renommée élevée uniquement pour les services d’« organisation et conduite de loteries et loteries en espèces », compris dans la classe 41 et non pour les autres services relevant de la même classe. Par contre, elle n’y a pas consacré de développements spécifiques à la renommée de la marque verbale antérieure.

45      La requérante ne conteste pas les appréciations de la chambre de recours portant sur l’intensité de la renommée des marques figuratives antérieures. Au demeurant, aucun élément du dossier n’est de nature à remettre en cause une telle appréciation.

46      Par conséquent, il convient de considérer que la deuxième condition d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, rappelée au point 25 ci-dessus, est remplie en l’espèce.

 Sur la première branche du moyen unique, tiré de l’existence d’un lien entre les marques en conflit

47      Il ressort du point 48 de la décision attaquée que, pour l’ensemble des services relevant de la classe 42 et visés par la marque contestée, la chambre de recours a considéré que, nonobstant la renommée élevée des marques figuratives antérieures et indépendamment de la question de savoir si la renommée de la marque verbale antérieure a été établie, le public pertinent n’aurait établi aucun lien entre les marques en conflit.

48      À cet égard, en particulier, après avoir rappelé au point 50 de la décision attaquée, les facteurs susceptibles d’être pertinents aux fins de l’appréciation globale d’un lien entre les marques en conflit, la chambre de recours a, premièrement, considéré que rien n’indiquait que le public pertinent pourrait établir un lien mental entre la marque contestée pour les « services scientifiques et technologiques et travaux de recherche ainsi que services de conception connexes ; services d’analyses et de recherches industrielles » compris dans la classe 42 et les marques antérieures pour les services d’« organisation et conduite de loteries et loteries en espèces » compris dans la classe 41. Deuxièmement, elle a, en substance, considéré que la circonstance, avancée par la division d’annulation, qu’une entreprise fournissant des services d’organisation et conduite de loteries et loteries en espèces puisse investir dans la recherche de nouveaux produits, ne suffisait pas pour établir un lien pertinent entre les services contestés et les services qui proposent de telles recherches. Troisièmement, elle a estimé qu’aucune relation n’existait entre les marchés des services en conflit.

49      La requérante fait valoir que l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le public pertinent n’établira aucun lien entre les marques en conflit est erronée en ce que cette appréciation repose uniquement sur le fait que les services désignés par lesdites marques sont différents. En particulier, elle fait grief à ladite chambre d’avoir omis, lors de l’appréciation de l’existence d’un lien entre ces marques au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, de prendre en compte tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et, notamment, l’intensité de la renommée des marques antérieures et l’existence de la mauvaise foi de l’intervenante, ainsi que les éléments de preuves avancés aux fins d’établir cette renommée et de démontrer ladite mauvaise foi. En outre, elle soutient que cette chambre a retenu des constatations contradictoires en ce qui concerne le lien entre les mêmes marques. Selon elle, bien que la même chambre ait explicitement affirmé que l’existence d’un tel lien devait être appréciée globalement, elle en a conclu à tort, au point 52 de la décision attaquée, que, « en l’absence d’un tel lien, l’usage de la marque contestée [n’était] pas susceptible de tirer indument profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou de leur porter préjudice, indépendamment de la portée de cette renommée ».

50      L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante.

51      En l’espèce, il y a lieu d’examiner si tous les facteurs pertinents permettant d’établir l’existence d’un lien entre les marques en conflit, dans l’esprit du public pertinent, ont été appréciés par la chambre de recours.

52      À cet égard, la requérante se borne à évoquer seulement l’existence d’un élément sur lequel la chambre de recours se serait appuyée pour conclure à l’absence d’un rapprochement entre les marques en conflit, à savoir la dissimilitude des services en conflit. Or, il ressort de la décision attaquée que d’autres éléments ont été pris en compte par cette chambre, tels que le degré de la renommée des marques figuratives antérieures et le public concerné.

53      Premièrement, s’agissant de la prétendue incohérence dont serait entachée la décision attaquée, il suffit de relever que la requérante se livre à une lecture sélective et erronée de ladite décision. Il ressort, en effet, de la lecture combinée des points 43 à 47 et 51 de cette décision que la chambre de recours, après avoir examiné les éléments de preuve visant à établir la renommée des marques antérieures, a considéré que, nonobstant la renommée élevée dont jouissent les marques figuratives antérieures, aucun lien ne saurait être créé entre les marques en conflit. Ainsi, au point 51 de la même décision, elle s’est livrée à une appréciation relative à l’absence de lien entre les marques en conflit. Au point 52 de la décision attaquée, elle a estimé que, à défaut de l’existence d’un tel lien d’association dans l’esprit du public pertinent, l’usage de la marque postérieure n’était pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures, ou de leur porter préjudice.

54      Ainsi, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la décision attaquée ne présente pas de contradiction.

55      Deuxièmement, s’agissant du grief de la requérante tiré d’une omission de prendre en compte, dans le cadre de l’appréciation de l’existence d’un lien entre les marques en conflit, l’intensité de la renommée des marques antérieures ainsi que les éléments de preuve qu’elle avait produits en vue d’établir cette renommée, force est de constater que cet argument repose sur une lecture erronée de la décision attaquée. En effet, il ressort, d’une part, du libellé même du point 48 de la décision attaquée, cité au point 47 ci‑dessus, que, aux fins de son analyse, la chambre de recours a dûment tenu compte de la renommée élevée des marques figuratives antérieures. D’autre part, ainsi que l’a relevé à juste titre l’EUIPO, la chambre de recours a constaté  qu’il ressortait des éléments de preuve fournis par la requérante que lesdites marques figuratives avaient acquis une renommée élevée en Pologne uniquement pour les services d’« organisation et conduite de loteries et loteries en espèces », compris dans la classe 41.

56      Troisièmement, il convient de relever que tous les autres facteurs qui devaient être évalués dans le cadre du lien entre la marque contestée et les marques antérieures ont été examinés dans le cadre de l’examen du risque de confusion entre lesdites marques, à savoir le degré de similitude entre elles, le degré de caractère distinctif des marques antérieures qui a été considéré comme étant normal, ainsi que le public concerné [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 26 juin 2018, Deutsche Post/EUIPO – Verbis Alfa et EasyPack (InPost), T‑537/15, non publié, EU:T:2018:384, point 114].

57      Quant à la matérialité des éléments invoqués par la chambre de recours et à la question de savoir si de tels éléments permettent, en l’espèce, d’établir un lien entre les marques en conflit, tout d’abord, il convient de relever que, dans la requête, la requérante ne formule aucune critique spécifique à l’égard d’aucun de ces éléments dans le cadre de ses arguments visant l’appréciation de l’existence d’un lien entre les marques en cause.

58      Parmi les facteurs pertinents dans l’appréciation globale visant à établir l’existence d’un lien entre les marques en conflit, il y a lieu de relever que, en l’espèce, les éléments plaidant en faveur de l’existence d’un tel lien sont la similitude entre ces marques et l’intensité de la renommée des marques figuratives antérieures, qui peut être considérée comme élevée.

59      S’agissant de la similitude des marques en conflit, la chambre de recours a estimé qu’il résultait de la comparaison entre les marques en conflit, effectuée dans le cadre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, que ces derniers étaient, sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, similaires à un degré supérieur à la moyenne.

60      S’agissant de l’intensité de la renommée des marques figuratives antérieures, la chambre de recours a concrètement examiné, aux points 43 à 47 de la décision attaquée, si la requérante avait suffisamment établi la renommée desdites marques ainsi que le degré d’intensité d’une telle renommée, en concluant que ces marques avaient acquis une renommée élevée pour une partie des services compris dans la classe 41, à savoir les services d’organisation et conduite de loteries et loteries en espèces.

61      En revanche, plaident à l’encontre de l’existence d’un lien entre les marques en conflit, d’une part, l’existence de deux publics pertinents distincts et, d’autre part, la nature différente des services concernés par ces marques, lesdits services ayant des canaux de distribution et des utilisateurs finaux différents, n’étant ni complémentaires ni concurrents.

62      Il convient de considérer, compte tenu des appréciations exposées quant à la définition du public pertinent aux points 23, 32 et 36 de la décision attaquée dans le cadre de l’examen d’un risque de confusion entre les marques en conflit en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, que les services du secteur des jeux de hasard couverts par les marques antérieures sont destinés au grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention moyen, alors que les services scientifiques et technologiques ainsi que les services de recherche et de conception y relatifs et les services d’analyses et de recherches industrielles désignés par la marque contestée s’adressent à un public professionnel. Ainsi, il y a lieu de conclure que, en l’espèce, les publics visés par les marques en conflit ne se chevauchent pas (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 46 et 48).

63      Il faut, en outre, remarquer que les services pour lesquels les marques figuratives antérieures jouissent d’une renommée sont utilisés pour permettre aux utilisateurs de participer, contre rémunération, à un jeu doté d’un prix, avec l’espoir d’en retirer un gain, alors que les services scientifiques et technologiques et travaux de recherche désignés par la marque contestée, même s’ils peuvent servir d’outil technique au secteur des jeux de hasard et des paris, n’ont en soi pour objet ni l’organisation de loteries ni la recherche de gains par ce biais. Enfin, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué, le seul fait qu’il existe une pratique des entreprises consistant à investir dans la recherche de nouveaux produits n’est pas suffisant, compte tenu du caractère général de cette pratique, pour établir un lien entre les marques en conflit.

64      Par ailleurs, ainsi que l’a relevé, à juste titre, la chambre de recours aux points 23 et 36 de la décision attaquée, il doit être relevé que, en l’espèce, les services en cause ne présentent pas non plus de caractère complémentaire, étant adressés à des publics différents. À cet égard, il convient de rappeler que les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Par définition, des services adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, points 57 et 58 et jurisprudence citée]. De plus, puisque lesdits services s’adressent à des publics différents, ils ne sauraient être considérés comme substituables ni, par conséquent, comme concurrents [voir, en ce sens, arrêt du 18 février 2011, PPTV/OHMI – Rentrak (PPT), T‑118/07, non publié, EU:T:2011:58, points 39 et 40 et jurisprudence citée].

65      En tout état de cause, la requérante se contente d’affirmer, au point 33 de la requête, que la question du degré de similitude entre les services concernés « n’est pas pertinente en tant que telle » sans expliquer en quoi les services relevant de la classe 41 couverts par ses marques antérieures présenteraient une proximité avec les services relevant de la classe 42 visés par la marque contestée.

66      En effet, dans des circonstances telles que celles de l’espèce, il peut être considéré que, en dépit de la renommée élevée des marques figuratives antérieures et de la similitude supérieure à la moyenne entre les marques en conflit, l’absence de lien entre les services en cause et la différence entre les publics pertinents, l’un d’eux étant spécialisé, ayant un degré d’attention plus élevé, sont telles qu’elles sont susceptibles d’exclure l’existence d’un lien entre les marques en conflit.

67      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait dû prendre en considération, aux fins d’apprécier l’existence d’un lien entre les marques en conflit, la mauvaise foi de l’intervenante et les éléments de preuve avancés aux fins de l’établir. À cet égard, il y a lieu de rappeler que la mauvaise foi, en tant que comportement abusif, est un facteur particulièrement pertinent dans le contexte d’une demande en nullité fondée sur l’article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. En revanche, elle ne constitue pas un élément qui doit être pris en compte dans le cadre des motifs relatifs de refus prévus à l’article 8 dudit règlement [arrêt du 17 décembre 2010, Amen Corner/OHMI – Comercio Electrónico Ojal (SEVE TROPHY), T‑192/09, non publié, EU:T:2010:553, point 77 ; voir également, par analogie, arrêt du 3 mai 2012, Conceria Kara/OHMI – Dima (KARRA), T‑270/10, non publié, EU:T:2012:212, point 84 et jurisprudence citée] ou des causes de nullité relative visées à l’article 60 de ce règlement.

68      Il s’ensuit que c’est, à juste titre, que la chambre de recours a considéré que l’une des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, à savoir l’existence d’un lien entre les marques en conflit, faisait défaut en l’espèce.

69      Dès lors, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 30 ci-dessus, dans la mesure où l’existence d’un lien entre les marques en conflit est une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour que la troisième condition prévue par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 soit remplie, à défaut d’un tel lien, il n’est pas nécessaire d’analyser l’existence de l’un des trois types de risques visés à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. Il n’est donc pas nécessaire de statuer sur la seconde branche du moyen unique, tirée de l’existence de l’une des atteintes visées à ladite disposition.

70      Partant, le moyen unique, tiré de la violation de l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 5, du même règlement doit être rejeté comme étant non fondé, de même que le recours dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du troisième chef de conclusions de la requérante visant à renvoyer l’affaire devant l’EUIPO.

 Sur les dépens

71      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

72      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Totalizator Sportowy sp. z o.o. est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Iliopoulos

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 novembre 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.