Language of document : ECLI:EU:T:2011:241

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

24 mai 2011 (*)


« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative ancotel – Marque communautaire figurative antérieure ACOTEL – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Public pertinent »

Dans l’affaire T‑408/09,

ancotel GmbH, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par MH. Truelsen, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. S. Schäffner, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Acotel SpA, établie à Rome (Italie), représentée initialement par Mes D. De Simone et D. Demarinis, avocats, puis par Mes D. De Simone, D. Demarinis et J. Wrede, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI, du 19 juin 2009 (affaire R 1385/2008‑1), relative à une procédure d’opposition entre Acotel SpA et ancotel GmbH,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 octobre 2009,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 11 février 2010,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 25 janvier 2010,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 14 août 2003, la requérante, ancotel GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant, exclusivement dans la police de caractères Monaco et de couleurs rouge et grise :

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3        L’enregistrement a, notamment, été demandé pour les services de la classe 38 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, correspondant à la description suivante : « Télécommunications ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 45/2005, du 7 novembre 2005.

5        Le 3 février 2006, l’intervenante, Acotel SpA, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée, notamment pour les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était, notamment, fondée, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 207/2009], sur la demande de marque communautaire figurative pour les services de la classe 38 au sens de l’arrangement de Nice correspondant à la description « Télécommunications », introduite par l’intervenante le 27 décembre 1999 et tendant à l’enregistrement du signe reproduit ci-après :

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7        Le 10 avril 2008, ce signe a été enregistré comme marque communautaire figurative sous le numéro 1442268 (ci-après la « marque antérieure »).

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

9        Le 28 juillet 2008, la division d’opposition a accueilli l’opposition en ce qui concerne la demande d’enregistrement de marque communautaire pour les services visés au point 3 ci-dessus. Elle a, à cet égard, considéré que les signes en conflit étaient similaires et que les services de la classe 38, visés par eux, étaient identiques. La division d’opposition a rejeté l’opposition pour le surplus.

10      Le 25 septembre 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

11      En réponse aux observations de l’intervenante sur le recours, la requérante a, par lettre du 17 février 2009, limité, au sens de l’article 44, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenu article 43, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009), sa demande d’enregistrement de marque communautaire, en ce qui concerne les services de la classe 38, aux services correspondant à la description suivante : « Télécommunications, à savoir services de colocation, de téléhousing et d’interconnexion ».

12      Par décision du 19 juin 2009, notifiée à la requérante le 29 juillet 2009 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours et confirmé la décision de la division d’opposition.

13      La chambre de recours a constaté, à titre liminaire, d’une part, que selon les indications de la requérante, non réfutées par l’intervenante, les services visés par la demande d’enregistrement après sa limitation étaient destinés à des professionnels et, d’autre part, que la comparaison des marques en conflit effectuée par la division d’opposition n’avait pas été contestée (points 18 et 19 de la décision attaquée).

14      S’agissant du public pertinent, la chambre de recours a relevé, au point 20 de la décision attaquée, que les services visés par la demande d’enregistrement étaient destinés à des professionnels, alors que les services visés par la marque antérieure étaient destinés soit à des utilisateurs professionnels, soit au grand public. La chambre de recours a poursuivi : « Par conséquent, afin d’établir l’existence d’un éventuel risque de confusion entre les marques en cause, il y a lieu de considérer que le public pertinent ciblé par ces services sont les consommateurs moyens de l’ensemble des États membres de l’Union européenne. »

15      La chambre de recours a, ensuite, relevé que les services visés par les marques en conflit étaient identiques, dès lors que les « télécommunications » concernées par la marque antérieure incluaient les services visés par la demande d’enregistrement après sa limitation. La chambre de recours a, donc, rejeté le recours et confirmé la décision de la division d’opposition (points 22 et 23 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

17      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      La requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. À l’appui de ce moyen, elle avance une argumentation axée sur trois griefs tenant à l’identification erronée du public pertinent ainsi qu’à l’absence d’identité ou de similitude entre les marques en conflit et les services visés par elles.

 Sur la recevabilité du deuxième grief

19      L’intervenante conteste la recevabilité du deuxième grief, tenant à l’absence d’identité ou de similitude des marques en conflit. Elle fait valoir, à cet égard, que la requérante ne peut plus contester, devant le Tribunal, la similitude desdites marques, dès lors qu’elle ne l’a pas fait devant la chambre de recours. L’intervenante invoque, à cet égard, l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal ainsi que l’article 65, paragraphe 4, du règlement no 207/2009.

20      Cette argumentation ne saurait être retenue. Ainsi que l’a jugé la Cour dans son arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul (C‑29/05 P, Rec. p. I‑2213, point 57), par l’effet du recours dont elle est saisie, la chambre de recours est appelée à procéder à un nouvel examen complet du fond de l’opposition, tant en droit qu’en fait.

21      À cet égard, force est de constater qu’une opposition à l’enregistrement d’une marque communautaire, lorsqu’elle est fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, saisit l’OHMI de la question de l’identité ou de la similitude des marques en conflit ainsi que des produits et des services visés par elles [arrêt du Tribunal du 18 octobre 2007, AMS/OHMI – American Medical Systems (AMS Advanced Medical Services), T‑425/03, Rec. p. II‑4265, point 28].

22      Par conséquent, le fait que la similitude des marques en conflit n’ait pas été contestée par la requérante devant la chambre de recours ne saurait nullement avoir pour effet de dessaisir l’OHMI de la question de savoir si ces marques étaient identiques ou similaires [arrêts du Tribunal AMS Advanced Medical Services, point 21 supra, point 29, et du 13 septembre 2010, Inditex/OHMI – Marín Díaz de Cerio (OFTEN), T‑292/08, non encore publié au Recueil, point 42].

23      Une telle circonstance ne saurait donc davantage avoir pour effet de priver une partie du droit de contester devant le Tribunal, dans les limites du cadre juridique et factuel du litige devant la chambre de recours, les appréciations portées par cette dernière instance à ce sujet [arrêt AMS Advanced Medical Services, point 21 supra, point 29 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN), T‑57/03, Rec. p. II‑287, points 24 et 25].

24      Cette conclusion n’est pas infirmée par les dispositions invoquées par l’intervenante. L’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure est dépourvu de pertinence, dès lors qu’il concerne la production de moyens nouveaux en cours d’instance, tandis que le deuxième grief de la requérante a été avancé dans la requête.

25      S’agissant de l’article 65, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, celui‑ci prévoit que le recours devant le Tribunal est ouvert à toute partie à la procédure devant la chambre de recours pour autant que la décision de celle-ci n’a pas fait droit à ses prétentions.

26      Tel a été effectivement le cas de la requérante, qui a vu sa demande de marque communautaire rejetée pour les services litigieux de la classe 38. La requérante était, donc, en droit d’attaquer la décision de la chambre de recours devant le Tribunal et, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 23 ci‑dessus, elle était en droit de contester, dans ce contexte, la similitude des marques en conflit, constatée par la division d’opposition et confirmée par la chambre de recours, laquelle a fait siens, ainsi que l’admet la jurisprudence, les motifs de la décision de la division d’opposition [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec. p. II‑1927, point 50, et du 24 septembre 2008, HUP Uslugi Polska/OHMI – Manpower (I.T.@MANPOWER), T‑248/05, non publié au Recueil, point 49].

 Sur le fond

27      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque.

28      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

29      Il s’ensuit que le risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, entre deux marques en conflit, ne doit pas être apprécié sur la base d’une comparaison, dans l’abstrait, des signes en conflit et des produits ou services qu’ils désignent. L’appréciation de ce risque doit, plutôt, être fondée sur la perception que le public pertinent aura desdits signes, produits et services.

30      Il convient, à cet égard, de tenir compte du fait qu’un public restreint et spécialisé est susceptible d’avoir des connaissances spécifiques relatives aux produits ou aux services concernés par les marques en conflit et/ou de faire, à cet égard, preuve d’un niveau d’attention élevé, par rapport à celui du grand public [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 19 novembre 2008, Ercros/OHMI − Degussa (TAI CROS), T‑315/06, non publié au Recueil, point 26 ; du 28 octobre 2009, Juwel Aquarium/OHMI − Potschak (Panorama), T‑339/07, non publié au Recueil, point 33, et du 9 février 2010, PromoCell bioscience alive/OHMI (SupplementPack), T‑113/09, non publié au Recueil, point 31]. Il s’agit de facteurs pouvant jouer un rôle déterminant, s’agissant de l’existence ou de l’absence d’un risque de confusion entre lesdites marques.

31      L’identification du public concerné par les marques en conflit revêt, donc, une importance capitale pour l’appréciation du risque de confusion au sens de la disposition susvisée et, par conséquent, il convient de commencer l’analyse du moyen unique de la requérante par l’examen du grief relatif au public pertinent.

32      La requérante soutient, à cet égard, qu’elle offre des services qui s’adressent uniquement à des professionnels du secteur des télécommunications hautement spécialisés, comme les opérateurs de téléphonie ou les radiodiffuseurs.

33      En revanche, l’intervenante serait un prestataire de services dans le domaine de la téléphonie et proposerait, par exemple, des services de téléphonie mobile, qui intéressent tous les consommateurs. Le public pertinent visé par ces services inclurait des clients ayant certaines connaissances professionnelles spécialisées, mais serait, également, composé des consommateurs finaux.

34      Ainsi, le public pertinent concerné par la marque antérieure serait constitué tant des consommateurs moyens que des consommateurs professionnels. Les marques en conflit ne se présenteraient pas côte à côte au consommateur moyen, dès lors que le public visé par les services proposés par la requérante n’inclurait pas les consommateurs moyens. La conclusion de la décision attaquée, selon laquelle le public pertinent serait constitué des consommateurs moyens de l’ensemble des États membres de l’Union européenne serait, par conséquent, erronée.

35      L’OHMI relève que les services de la classe 38 visés par les marques en conflit s’adressent tant au grand public qu’à un public spécialisé composé de professionnels. L’argumentation de la requérante selon laquelle, lors de la comparaison desdits services, il ne doit être tenu compte que d’un public de professionnels, ne serait pas convaincante. Les intentions de la requérante quant à l’usage qu’elle ferait de la marque demandée après son enregistrement ou la prétendue absence de relation de concurrence entre elle et l’intervenante seraient dépourvues de pertinence, dès lors que seule la liste de produits ou de services visés par deux marques en conflit serait déterminante pour l’appréciation du risque de confusion entre elles.

36      L’intervenante soutient que la requérante se fonde, à tort, sur la seule perception des marques en conflit par ses propres clients. Elle méconnaîtrait, ainsi, la possibilité, du moins théorique, que l’intervenante s’adresse, dans le futur, également au même public. En effet, le titulaire d’une marque communautaire aurait toujours la faculté d’élargir ou de modifier le public auquel sa marque s’adresse, sous réserve de respecter l’obligation de faire un usage sérieux de sa marque.

37      Selon une jurisprudence constante, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

38      Le public pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est constitué des utilisateurs susceptibles d’utiliser tant les produits ou les services visés par la marque antérieure que ceux visés par la marque demandée [arrêt du Tribunal du 1er juillet 2008, Apple Computer/OHMI − TKS‑Teknosoft (QUARTZ), T‑328/05, non publié au Recueil, point 23].

39      Ainsi, en règle générale, lorsque les produits ou services de l’une des marques en conflit sont inclus dans la désignation plus large visée par l’autre marque, le public pertinent est défini par référence au libellé le plus spécifique [arrêt du Tribunal du 30 septembre 2010, PVS/OHMI − MeDiTA Medizinische Kurierdienst (medidata), T‑270/09, non publié au Recueil, point 28].

40      En l’espèce, la chambre de recours a expliqué, au point 18 de la décision attaquée que, les services de « téléhousing », visés par la marque demandée, consistaient dans le placement, dans les locaux d’opérateurs professionnels, d’un dispositif de télécommunications doté d’une connexion au réseau téléphonique public, à l’internet et, parfois, aux réseaux d’autres opérateurs. Les services de « colocation » consisteraient dans l’hébergement de serveurs et de différentes applications. Enfin, les services d’ « interconnexion » pourraient désigner la manière avec laquelle les fournisseurs d’accès Internet se connectent aux dorsales des autres opérateurs et transfèrent entre eux du trafic Internet.

41      Il ressort de ces explications que, ainsi que l’a constaté à bon droit la chambre de recours au point 20 de la décision attaquée, les services visés par la marque demandée sont destinés à des professionnels. Ainsi qu’il ressort du point 18 de la même décision, cette conclusion n’a pas été contestée par l’intervenante devant l’OHMI, pas plus qu’elle ne l’est devant le Tribunal.

42      S’agissant des services visés par la marque antérieure, leur libellé (Télécommunications) est suffisamment large pour inclure tout type de services de télécommunications. Sont, donc, visés aussi bien les services destinés au grand public, tels que la téléphonie mobile évoquée par la requérante dans son argumentation, que des services plus spécifiques destinés à des utilisateurs professionnels dont, notamment, les services visés par la marque demandée.

43      Ainsi qu’il vient d’être relevé, ces derniers services sont destinés à un public restreint et spécialisé, constitué de professionnels du secteur des télécommunications. Par conséquent, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu, au point 20 de la décision attaquée, que les services visés par la marque antérieure étaient destinés soit à des utilisateurs professionnels, soit au grand public.

44      Or, il ressort de la jurisprudence citée aux points 38 et 39 ci-dessus, que, eu égard à cette constatation, le risque de confusion en l’espèce devait être apprécié en tenant compte de la perception des signes et des services en cause par le public restreint et spécialisé auquel s’adressent les services visés par la marque demandée.

45      En revanche, le grand public, qui n’est pas concerné par les services visés par la marque demandée, ne sera jamais confronté à cette dernière marque, si bien que, pour ce public, tout risque de confusion entre les marques en conflit en l’espèce est, par définition, exclu.

46      Ces considérations ne sont pas remises en cause par l’argumentation de l’OHMI et de l’intervenante.

47      Certes, dans le cadre de la procédure d’opposition, l’OHMI peut seulement prendre en compte la liste de produits ou de services, telle qu’elle découle de la demande de marque concernée, sous réserve des modifications éventuelles de cette dernière. Les intentions du demandeur, quant à l’utilisation qu’il entend faire de la marque si elle est enregistrée, sont, dans ce contexte, sans pertinence [arrêts du Tribunal du 13 avril 2005, Gillette/OHMI – Wilkinson Sword (RIGHT GUARD XTREME sport), T‑286/03, non publié au Recueil, point 33, et du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI − Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, Rec. p. II‑757, point 89].

48      Toutefois, en l’espèce, la conclusion selon laquelle la marque demandée vise un public restreint et spécialisé de professionnels est, précisément, fondée sur la liste de services telle qu’elle découle de la demande d’enregistrement après sa modification par la requérante (voir le point 11 ci‑dessus) et non, comme l’OHMI et l’intervenante le prétendent à tort, sur les seules intentions de celle-ci quant à l’utilisation de sa marque, si elle est enregistrée.

49      Par conséquent, dès lors qu’elle a conclu, au demeurant sans expliquer les motifs de cette conclusion, que, pour apprécier le risque de confusion entre les marques en conflit en l’espèce, il convenait de considérer que le public pertinent était constitué de consommateurs moyens de l’ensemble des États membres (point 20 de la décision attaquée), la chambre de recours a commis une erreur de droit.

50      Cette erreur a vicié l’ensemble de l’appréciation, par ladite chambre, de l’éventuel risque de confusion entre les marques en conflit. En effet, s’il ne saurait, a priori, être exclu que, même pour un public restreint et spécialisé, un tel risque puisse subsister en cas d’identité ou de similitude entre les marques et les produits ou les services en cause, il n’en demeure pas moins que, ainsi qu’il a déjà été relevé (voir point 29 ci‑dessus), cette appréciation doit être fondée sur la perception de ces marques, produits ou services par le public pertinent.

51      Il ne saurait non plus être exigé du Tribunal de procéder lui-même à l’appréciation du risque de confusion entre les marques en conflit en l’espèce, en se fondant sur la perception du public restreint et spécialisé pertinent. Il s’agit, en effet, d’une question non examinée au fond par les instances de l’OHMI, qu’il n’appartient pas au Tribunal d’examiner, pour la première fois, dans le cadre de son contrôle de légalité de la décision attaquée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 mai 2010, Beifa Group/OHMI − Schwan-Stabilo Schwanhäußer (Instrument d’écriture), T‑148/08, non encore publié au Recueil, point 124, et la jurisprudence citée] .

52      Il s’ensuit que, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs invoqués par la requérante dans le cadre de son moyen unique, il convient de faire droit au recours et d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

54      L’intervenante ayant succombé en ces conclusions, celle-ci supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 19 juin 2009 (affaire R 1385/2008‑1) est annulée.

2)      L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par ancotel GmbH.

3)      Acotel SpA supportera ses propres dépens.

Czúcz

Labucka

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mai 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.