Language of document : ECLI:EU:T:2015:950

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

10 décembre 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure de déchéance – Marque communautaire figurative Vieta – Usage sérieux de la marque – Nature de l’usage – Article 15, paragraphe 1, et article 51, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 207/2009 – Forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif – Preuve de l’usage pour les produits enregistrés »

Dans l’affaire T‑690/14,

Sony Computer Entertainment Europe Ltd, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par M. S. Malynicz, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Marpefa, SL, établie à Barcelone (Espagne), représentée par Me I. Barroso Sánchez-Lafuente, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 2 juillet 2014 (affaire R 2100/2013-2), relative à une procédure de déchéance entre Sony Computer Entertainment Europe Ltd et Marpefa, SL,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse et A. M. Collins (rapporteur), juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 septembre 2014,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 27 février 2015,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 5 février 2015,

à la suite de l’audience du 16 septembre 2015, à laquelle l’intervenante n’a pas participé,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 3 août 2000, Gedelson, SA a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant (ci-après la « marque contestée ») :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Disques acoustiques, dispositifs de nettoyage pour disques acoustiques, haut-parleurs, enceintes acoustiques, amplificateurs de son, bandes vidéo, bandes magnétiques, boîtiers de haut-parleurs, caméras vidéo, films cinématographiques impressionnés, disques compacts, diapositives, appareils photographiques, ordinateurs, écrans vidéo, appareils pour la reproduction du son et des images, appareils de télévision, tourne-disques ».

4        La marque contestée a été enregistrée le 13 septembre 2001 sous le numéro 1790674 pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        Le 12 décembre 2002, le transfert de la marque contestée au profit de l’intervenante, Marpefa, SL, a été inscrit au registre de l’OHMI.

6        Le 25 juillet 2010, l’enregistrement de la marque contestée a été renouvelé jusqu’au 3 août 2020.

7        Le 14 novembre 2011, la requérante, Sony Computer Entertainment Europe Ltd, a présenté une demande en déchéance, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, de la marque contestée pour tous les produits pour lesquels elle avait été enregistrée. Dans cette demande, elle soutenait que cette marque n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pendant la période pertinente de cinq ans et qu’il n’existait pas de justes motifs pour le non-usage.

8        En réponse à ladite demande, le 21 mars 2012, l’intervenante a affirmé que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage sérieux, au moins en Espagne, entre le 14 novembre 2006 et le 13 novembre 2011, pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus et a présenté les éléments de preuve suivants :

–        une étude, datée du 29 juillet 2011 et portant sur l’année 2010, relative à l’électronique grand public réalisée par la société GFK Emer, dans laquelle étaient exposées les parts de marché détenues en Espagne par différentes marques, dont une marque identifiée par le terme « vieta » ;

–        un catalogue de produits électroniques (dont des autoradios, des assistants de navigation personnels, des lecteurs DVD portables, des amplificateurs, des enceintes hifi, des projecteurs, des stations d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents), relatif aux années 2008 et 2009, portant la marque figurative suivante (ci-après la « marque figurative VIETA ») :

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–        ce catalogue contenait également des références au terme « vieta » ;

–        un catalogue de produits électroniques (dont des casques, des amplificateurs, des récepteurs, des enceintes hifi, des lecteurs DVD, des projecteurs, des stations d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents, des autoradios), relatif à l’année 2011, sur lesquels figurait la marque figurative VIETA (également représentée en couleur grise) ;

–        un extrait, daté du 20 juillet 2011, du site Internet du quotidien espagnol El Mundo, contenant une publicité pour un téléviseur avec un lecteur DVD intégré portant la marque figurative VIETA ;

–        cet extrait faisait également mention du terme « vieta » ;

–        un extrait, daté du 20 juillet 2011, du site Internet « Google », contenant une publicité parue dans El Mundo pour une station d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents portant la marque figurative VIETA ;

–        cette publicité contenait également des références au terme « vieta » ;

–        une publicité parue dans l’édition du quotidien espagnol ABC du 13 décembre 2009 pour une station d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents portant la marque figurative VIETA ;

–        cette publicité contenait également des références au terme « vieta » ;

–        une publicité conjointe, datée du 19 mai 2010, du quotidien espagnol La Crónica de León et de la chaîne de magasins Media Markt en Espagne pour une station d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents portant la marque figurative VIETA ;

–        des publicités figurant dans des brochures des années 2009, 2010 et 2011 de la chaîne de magasins Media Markt en Espagne pour des produits électroniques (dont des lecteurs de DVD portables, des enceintes hifi et des stations d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents) portant la marque figurative VIETA ;

–        des photographies, non datées, de publicités placées à l’extérieur de magasins Media Markt en Espagne pour des chaînes hifi et des stations d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents portant la marque figurative VIETA ;

–        des publicités figurant dans des brochures des années 2010 et 2011 de la chaîne de magasins Saturn en Espagne pour des produits électroniques (dont des chaînes hifi, des lecteurs DVD portables, des enceintes hifi, des autoradios et des stations d’accueil pour baladeurs numériques et téléphones intelligents) portant la marque figurative VIETA ;

–        des publicités figurant dans des brochures des années 2009 et 2010 de la chaîne de magasins Racing en Espagne pour des autoradios, des lecteurs de DVD portables et des enceintes pour véhicules portant la marque figurative VIETA ;

–        des publicités figurant dans des brochures des années 2008, 2009 et 2011 de la chaîne de magasins Norauto en Espagne pour des autoradios et des lecteurs de DVD portables portant la marque figurative VIETA ;

–        ces publicités contenaient également des références au terme « vieta » ;

–        un livre, non daté, célébrant les 50 ans du groupe de sociétés Vieta, dans lequel apparaissaient à quelques reprises la marque contestée ainsi que les signes suivants :

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–        des extraits, datés du 6 février 2012, de la page d’accueil du site Internet du groupe de sociétés Vieta détaillant les quatre gammes de produits commercialisés par celui-ci et mentionnant la marque figurative VIETA ;

–        des extraits, datés du 6 février 2012, du site Internet du groupe de sociétés Vieta contenant un historique de ce groupe et présentant des signes figuratifs qu’il avait utilisés au cours des dernières décennies, à savoir :

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–        des factures couvrant la période s’étendant du 16 novembre 2006 au 30 septembre 2011, adressées par Vieta Audio, SA à différents clients établis en Espagne, en Lituanie, aux Pays-Bas et au Portugal, concernant divers produits électroniques et audiovisuels et comportant toutes, en leur partie supérieure gauche, la marque figurative VIETA.

9        Par décision du 23 août 2013, la division d’annulation a rejeté la demande en déchéance pour les produits suivants : « haut-parleurs, enceintes acoustiques, amplificateurs de son » et « ordinateurs, écrans vidéo, appareils pour la reproduction du son et des images, appareils de télévision et tourne-disques ». Elle l’a accueillie pour les autres produits couverts par la marque contestée.

10      Le 28 octobre 2013, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, tendant à l’annulation de la décision de la division d’annulation dans la mesure où elle rejetait la demande en déchéance.

11      Le 2 janvier 2014, la requérante a déposé le mémoire exposant les motifs du recours.

12      Le 24 mars 2014, l’intervenante a présenté ses observations sur ce mémoire.

13      Par décision du 2 juillet 2014 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté ce recours. En substance, elle a considéré que les éléments de preuve fournis par l’intervenante démontraient que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pendant la période pertinente s’agissant des « haut-parleurs, enceintes acoustiques, amplificateurs de son » et des « ordinateurs, écrans vidéo, appareils pour la reproduction du son et des images, appareils de télévision et tourne-disques », relevant de la classe 9.

14      Dans la décision attaquée, en premier lieu, la chambre de recours, après avoir rappelé les principes applicables, a indiqué que la période pertinente pour l’appréciation de l’usage sérieux de la marque contestée s’étendait du 14 novembre 2006 au 13 novembre 2011 inclus (points 17 à 24 de la décision attaquée).

15      En deuxième lieu, la chambre de recours a considéré que les exigences relatives au lieu de l’usage étaient remplies en l’espèce. Elle a estimé qu’il était incontestable que la plupart des éléments de preuve fournis par l’intervenante démontraient l’usage de la marque contestée en Espagne, avant de relever qu’il ressortait de l’arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken (C‑149/11, Rec, EU:C:2012:816), que l’usage dans un seul État membre n’empêchait pas d’établir un usage sérieux dans l’Union, pour autant que les autres conditions requises fussent remplies. Elle a ajouté, notamment, que certaines des factures présentées par l’intervenante étaient adressées à des clients ou acheteurs établis en Lituanie, au Portugal et aux Pays-Bas (points 25 à 30 de la décision attaquée).

16      En troisième lieu, s’agissant de la durée de l’usage, la chambre de recours a estimé, en substance, que, pris dans leur ensemble, les éléments de preuve présentés par l’intervenante démontraient la « fréquence » et la « régularité » de l’usage de la marque contestée dans l’Union, notamment entre 2008 et 2011 (points 31 à 33 de la décision attaquée).

17      En quatrième lieu, s’agissant de la nature de l’usage, la chambre de recours a considéré que la marque contestée n’avait pas été utilisée sous une forme qui altérait son caractère distinctif par rapport à la forme sous laquelle elle avait été enregistrée. À cet égard, tout d’abord, elle a constaté que les éléments de preuve fournis contenaient la représentation de la marque verbale VIETA et plusieurs stylisations du terme « vieta » pour différents groupes de produits électroniques. Ensuite, elle a relevé que tant la marque contestée que les formes utilisées dans ces éléments de preuve comportaient le terme « vieta » et que, dans toutes les marques figuratives en cause, ce terme était clairement dominant. Elle a considéré que ni la typographie ni la couleur (noire ou grise) des différentes représentations du terme « vieta » n’étaient suffisamment originales ou inhabituelles pour être de nature à altérer le caractère distinctif de la marque contestée, lequel résidait dans ce terme. Elle a également indiqué qu’il était tout à fait usuel pour les distributeurs, dans le secteur du commerce, de ne pas reproduire les marques figuratives sur leurs factures, et ce pour de simples raisons pratiques. En outre, la marque contestée apparaîtrait dans certains des éléments de preuve sous la forme dans laquelle elle avait été enregistrée. Enfin, elle a avancé que le fait que la marque figurative VIETA soit elle-même enregistrée en tant que marque communautaire était dénué de pertinence pour l’appréciation de l’usage sérieux de la marque contestée (points 34 à 40 de la décision attaquée).

18      En cinquième lieu, s’agissant des produits pour lesquels les marques avaient été utilisées, la chambre de recours a considéré qu’une appréciation globale des éléments de preuve présentés par l’intervenante révélait que la marque contestée avait été utilisée pour désigner les produits mentionnés au point 13 ci-dessus (point 41 de la décision attaquée). Elle a notamment relevé que ces produits étaient des « systèmes, articles et produits électroniques et audiovisuels qui [étaient] composés ou [faisaient] partie d’ʽappareils pour la reproduction du son et des images’ », qu’ils « [avaient] tous une nature et un objectif similaires ou identiques et [n’étaient] pas complémentaires, mais intrinsèquement liés », et qu’ils « [appartenaient] au ‘champ d’extension naturel’ ». Elle a ajouté que l’expression « appareils pour la reproduction du son et des images » était définie de manière suffisamment précise et circonscrite pour désigner les produits pour lesquels l’usage avait été démontré et qu’il n’y avait aucune raison valable d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de cette catégorie (point 46 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

19      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI et l’intervenante aux dépens.

20      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

21      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–         rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

22      À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 207/2009, en ce que la chambre de recours aurait erronément conclu que l’intervenante avait apporté la preuve de l’usage de la marque contestée dans la forme sous laquelle elle avait été enregistrée. Le deuxième moyen est pris de la violation de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009, en ce que la chambre de recours aurait erronément conclu que l’intervenante avait apporté la preuve de l’usage de la marque contestée sous une forme qui diffère de celle-ci par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée. Le troisième moyen est tiré de la violation du principe d’usage partiel visé à l’article 51, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

23      Il convient d’examiner, tout d’abord, le deuxième moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009

24      La requérante prétend qu’il ressort de la jurisprudence du juge de l’Union que, s’agissant de l’interprétation à donner de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009, une approche rigoureuse tenant compte des éléments graphiques de la marque concernée s’impose. Cette disposition viserait l’hypothèse dans laquelle cette marque serait utilisée dans le commerce sous une forme « légèrement différente » de celle sous laquelle elle aurait été enregistrée.

25      La requérante fait également valoir que, selon la jurisprudence du Tribunal, il y a lieu de tenir compte des éléments graphiques de la marque concernée pour apprécier si celle-ci a fait l’objet d’un usage conformément à l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009. Or, en l’espèce, la chambre de recours se serait contentée de prendre en considération le fait que tant les signes figurant dans les éléments de preuve que la marque contestée contenaient le terme « vieta ».

26      Selon la requérante, la chambre de recours n’a pas appliqué le critère juridique approprié. En effet, premièrement, elle n’aurait pas comparé le caractère distinctif de la marque telle qu’elle est enregistrée et celui de la marque telle qu’elle est utilisée, en examinant si le premier était altéré. Deuxièmement, au lieu de tenir compte du principe selon lequel toute altération du caractère distinctif devait être « légère », elle aurait appliqué un critère d’« impression d’ensemble ».

27      Enfin, la requérante compare la marque contestée avec les signes pour lesquels l’usage au cours de la période pertinente a, selon elle, été démontré par l’intervenante et prétend que l’altération du caractère distinctif de cette marque ne saurait être considérée comme « légère ». Ainsi, premièrement, s’agissant de la marque contestée et de la marque figurative VIETA, elle avance que celles-ci sont radicalement différentes. Deuxièmement, s’agissant de la marque contestée et du signe constitué du terme « vieta », elle relève que ce signe est complètement dépourvu de la « stylisation très poussée » qui caractérise ladite marque. Selon elle, la stylisation et les éléments graphiques de la marque contestée contribuent à lui conférer un caractère distinctif.

28      L’OHMI et l’intervenante rejettent les arguments de la requérante. Ils insistent notamment sur le fait que le caractère distinctif de la marque contestée réside dans son élément verbal « vieta ».

29      Aux termes de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, le titulaire de la marque communautaire est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’OHMI, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage. 

30      L’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, dispose :

« Si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque communautaire n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans [l’Union] pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque communautaire est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage.

Sont également considérés comme usage au sens du premier alinéa :

a) l’usage de la marque communautaire sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée ;

[…] »

31      L’objet de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les modifications qui, sans en altérer le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être limité aux situations dans lesquelles le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner des produits ou des services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susmentionnée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [voir arrêt du 12 mars 2014, Borrajo Canelo/OHMI – Tecnoazúcar (PALMA MULATA), T‑381/12, EU:T:2014:119, point 26 et jurisprudence citée].

32      Le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert l’examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque (arrêt PALMA MULATA, point 31 supra, EU:T:2014:119, point 30).

33      Par ailleurs, selon la règle 22, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), tel que modifié, applicable mutatis mutandis dans les procédures de déchéance en vertu de la règle 40, paragraphe 5, dudit règlement, la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque.

34      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. [arrêts du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, Rec, EU:T:2004:225, point 42, et MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, Rec, EU:T:2004:223, point 36].

35      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’intervenante avait apporté la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée.

36      En l’espèce, en premier lieu, il convient de relever que la requérante ne conteste pas la décision attaquée en ce que la chambre de recours a conclu que les documents produits par l’intervenante dans le cadre de la procédure administrative prouvaient suffisamment le lieu, la période et l’importance de l’usage de la marque contestée. En revanche, elle considère que les documents n’établissent pas l’usage de la marque contestée en ce qui concerne sa nature. En effet, selon la requérante, les formes sous laquelle ladite marque est utilisée impliquent une altération de celle-ci, telle qu’enregistrée.

37      En deuxième lieu, il convient de constater que la marque contestée, telle qu’enregistrée, est une marque complexe composée d’un élément verbal et d’éléments figuratifs. L’élément verbal « vieta » est écrit en lettres minuscules dans une police de caractères carrée de couleur grise, de taille différente (les lettres « v » et « a » sont de taille identique, mais plus grandes que les lettres « i » et « t », elles-mêmes de taille identique, mais plus grandes que la lettre « e ») et séparées les unes des autres par un petit rectangle de couleur grise. Cet élément verbal se situe à l’intérieur d’un cadre rectangulaire dont les bords droit et gauche sont épais, de couleur gris foncé et comportent, chacun, en leur milieu, un petit rectangle de couleur blanche.

38      Il ressort des éléments de preuve présentés par l’intervenante dans le cadre de la procédure administrative que, pendant la période pertinente, à savoir du 14 novembre 2006 au 13 novembre 2011 inclus, la marque contestée a été utilisée sous la forme de la marque figurative VIETA (également représentée en couleur grise) ainsi que sous la forme du terme « vieta ». Cette constatation est d’ailleurs expressément partagée par la requérante.

39      Certes, comme il est constaté par la chambre de recours au point 35 de la décision attaquée, la marque contestée, telle qu’enregistrée, ainsi que les signes mentionnés au point 8, dix-huitième tiret, ci-dessus sont également représentés dans deux des éléments de preuve produits, en l’occurrence le livre célébrant les 50 ans du groupe de sociétés Vieta et l’extrait du site Internet du même groupe contenant un historique de celui-ci (voir point 8 ci-dessus).

40      Toutefois, aucun de ces deux éléments de preuve ne saurait être retenu. En effet, d’une part, s’agissant du livre susmentionné, il doit être relevé que celui-ci n’est pas daté et que, en tout état de cause, il se situe en dehors de la période pertinente, ayant vraisemblablement été publié aux alentours de l’année 2004, puisque l’entreprise Vieta a été créée en 1954. D’autre part, s’agissant de l’extrait du site Internet du groupe de sociétés Vieta, celui-ci porte la date du 6 février 2012 et se situe donc également en dehors de la période pertinente.

41      Premièrement, il y a lieu de comparer la marque contestée, sous sa forme enregistrée, et la marque figurative VIETA (également représentée en couleur grise) de l’intervenante, utilisée dans nombre d’éléments de preuve produits par cette dernière lors de la procédure administrative.

42      À cet égard, force est de constater que, comme le soutient à juste titre la requérante, la forme enregistrée, d’une part, et la forme utilisée, d’autre part, présentent certaines différences sur le plan figuratif (voir la description de la marque contestée, telle qu’enregistrée, au point 37 ci-dessus). En revanche, ces deux formes ont en commun l’élément verbal « vieta ».

43      Il convient donc d’examiner si, comme le prétend la requérante, les différences sur le plan figuratif que présente la forme ainsi utilisée de la marque contestée par rapport à la forme sous laquelle elle a été enregistrée sont de nature à altérer le caractère distinctif de ladite marque.

44      Le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments omis dans la forme utilisée de la marque antérieure en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque, telle qu’elle a été enregistrée [voir arrêt du 10 juin 2010, Atlas Transport/OHMI – Hartmann (ATLAS TRANSPORT), T‑482/08, EU:T:2010:229, point 31 et jurisprudence citée ; arrêt du 5 décembre 2013, Olive Line International/OHMI – Carapelli Firenze (Maestro de Oliva), T‑4/12, EU:T:2013:628, point 24].

45      En effet, selon la jurisprudence, lorsqu’une marque est constituée ou composée de plusieurs éléments et que l’un ou plusieurs d’entre eux ne sont pas distinctifs, l’altération de ces éléments ou leur omission n’est pas de nature à affecter le caractère distinctif de la marque dans son ensemble [arrêt du 29 septembre 2011, New Yorker SHK Jeans/OHMI – Vallis K.-Vallis A. (FISHBONE), T‑415/09, EU:T:2011:550, point 61 ; voir également, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, GfK/OHMI – BUS (Online Bus), T‑135/04, Rec, EU:T:2005:419, points 35 à 41].

46      Partant, il y a lieu de déterminer si les éléments figuratifs de la marque contestée, telle qu’elle a été enregistrée, constituent un élément distinctif de celle-ci.

47      À cet égard, il y a lieu de considérer que, en réalité, comme constaté à juste titre par la division d’annulation et par la chambre de recours, le caractère distinctif de la marque contestée provient essentiellement, non de ses éléments figuratifs, mais de son élément verbal « vieta » (voir points 36 et 37 de la décision attaquée).

48      En effet, cet élément verbal revêt un caractère distinctif élevé et occupe une position importante dans l’impression d’ensemble produite par la marque contestée, telle qu’enregistrée, tandis que ses éléments figuratifs n’ont qu’un caractère distinctif faible et n’occupent qu’une place accessoire dans cette impression d’ensemble. Lesdits éléments figuratifs, y compris la police de caractères utilisée, ont un impact visuel relativement marginal. Le cadre rectangulaire ne présente aucune originalité par rapport aux usages habituels du commerce. Quant aux éléments figuratifs constitués, d’une part, des rectangles de couleur grise séparant les lettres du terme « vieta » et, d’autre part, des rectangles de couleur blanche figurant au milieu des bords du cadre rectangulaire, ils sont de taille très réduite, ne sont pas frappants et ne présentent aucune originalité.

49      En outre, il y a lieu de rappeler que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du 2 février 2011, Oyster Cosmetics/OHMI – Kadabell (Oyster cosmetics), T‑437/09, EU:T:2011:23, point 36 et jurisprudence citée].

50      Par ailleurs, il convient d’entériner l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la typographie et la couleur (noire ou grise) des représentations du terme « vieta » dans la forme utilisée de la marque contestée, à savoir dans la forme de la marque figurative VIETA, ne sont pas à ce point originales ou inhabituelles qu’elles altéreraient le caractère distinctif que la marque contestée tire dudit terme (voir point 37 de la décision attaquée). Cette forme utilisée ne comporte aucun élément figuratif possédant un caractère dominant au même titre que le terme « vieta » ou un quelconque caractère distinctif intrinsèque qui empêcheraient d’y reconnaître visuellement la marque contestée, telle qu’enregistrée. Il y a lieu d’ajouter que, comme relevé à juste titre par l’OHMI dans ses écritures, il se dégage tant de la forme enregistrée que de la forme utilisée en question un « effet panoramique », même si celui-ci est plus harmonieux et plus prononcé dans le cas de ladite forme utilisée.

51      Deuxièmement, s’agissant de la comparaison de la marque contestée, sous sa forme enregistrée, et du terme « vieta », qui est repris dans plusieurs des éléments de preuve produits par l’intervenante lors de la procédure administrative, il y a lieu de considérer que, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 46 à 49 ci-dessus en relation avec la marque figurative VIETA, l’utilisation dudit terme constitue une variation acceptable de la marque contestée, conformément à l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009.

52      En troisième lieu, force est de constater qu’il ressort des considérations figurant aux points 47, 48 et 50 ci-dessus que l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours n’a pas comparé le caractère distinctif de la marque contestée telle qu’elle était enregistrée et celui de la marque telle qu’elle était utilisée, en examinant si le caractère distinctif de la première marque était altéré, manque totalement en fait.

53      En quatrième lieu, il doit être considéré que la requérante ne saurait faire grief à la chambre de recours d’avoir appliqué en l’espèce, au point 37 de la décision attaquée, un critère d’« impression d’ensemble ». En effet, il ressort de la jurisprudence qu’il est pertinent d’examiner si les différences existant entre la marque utilisée et la marque telle qu’enregistrée sont de nature ou non à modifier l’impression d’ensemble produite par cette dernière marque [voir, en ce sens, arrêts du 10 juin 2010, Atlas Transport/OHMI – Hartmann (ATLAS TRANSPORT), T‑482/08, EU:T:2010:229, point 42, et du 24 mai 2012, TMS Trademark-Schutzrechtsverwertungsgesellschaft/OHMI – Comercial Jacinto Parera (MAD), T‑152/11, EU:T:2012:263, point 41].

54      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la chambre de recours a conclu à bon droit que la marque contestée avait été utilisée sous une forme qui n’altérait pas son caractère distinctif. Partant, le deuxième moyen doit être rejeté comme non fondé.

55      Dans ces circonstances, le premier moyen est inopérant. Il pose, en effet, la question de savoir si la chambre de recours s’est aussi fondée sur la constatation selon laquelle l’intervenante avait également démontré l’usage sérieux de la marque contestée sous la forme sous laquelle elle avait été enregistrée.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009

56      À titre subsidiaire, la requérante remet en cause les constatations faites par la chambre de recours au point 46 de la décision attaquée, qui seraient erronées tant en fait qu’en droit. Elle fait valoir que les « appareils pour la reproduction du son et des images » incluent un éventail très large et diversifié d’appareils, tant professionnels que domestiques. Selon elle, il est manifestement incompatible avec le principe d’usage partiel que l’intervenante soit autorisée à conserver un enregistrement désignant une catégorie aussi large de produits, au sein de laquelle il serait possible de distinguer plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome. Le raisonnement adopté par la chambre de recours audit point de la décision attaquée aurait pour effet de permettre dans tous les cas au titulaire de la marque concernée, dès lors qu’il apporte la preuve d’un exemple d’usage au sein d’une catégorie plus large, de conserver cette dernière désignation. La requérante en conclut que la décision attaquée doit être annulée dans la mesure où elle prévoit que l’intervenante peut conserver l’enregistrement de la marque contestée pour les « appareils pour la reproduction du son et des images ». Interrogée à ce sujet lors de l’audience, la requérante a précisé qu’il fallait comprendre de ses arguments qu’elle entendait invoquer, notamment dans ce contexte, une violation du principe de la sécurité juridique, en ce sens qu’elle considérait que la catégorie des « appareils pour la reproduction du son et des images » n’était pas délimitée avec suffisamment de clarté et de précision.

57      L’OHMI rejette ces allégations. Il explique que, afin de surmonter certains problèmes de classification des produits et services, il a développé, en collaboration avec les offices nationaux de l’Union, l’Office Benelux de la propriété intellectuelle (OBPI) et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), une taxonomie, à savoir une « structure hiérarchique » des produits et services fondée sur la classification de Nice et allant des termes les plus généraux vers les termes les plus spécifiques. Cette structure serait notamment intégrée dans la base de données de classification de produits et services en matière de marque « TMclass ». L’OHMI prétend que, lorsque les termes de recherche « appareils de reproduction du son » et « appareils de reproduction d’images » sont entrés dans cette base de données, ces deux termes apparaissent au plus bas niveau de l’arborescence de la classe 9. Il n’existerait donc aucune sous-catégorie sous ces termes et la catégorie des « appareils pour la reproduction du son et des images » ne serait pas aussi large que la requérante l’affirme. Pour le surplus, l’OHMI renvoie aux points 41 à 46 de la décision attaquée.

58      L’intervenante considère que l’usage sérieux de la marque contestée a été valablement démontré pour les « appareils pour la reproduction du son et des images ».

59      Dans le cadre du troisième moyen, la requérante conteste le bien-fondé des constatations faites par la chambre de recours au point 46 de la décision attaquée, qui se lit comme suit :

« Il est clair d’emblée que les produits énumérés [au point 41 de la décision attaquée, à savoir les récepteurs, amplificateurs, haut-parleurs, écouteurs, projecteurs, lecteurs DVD portables, téléviseurs, équipements hifi, radios, antennes, écouteurs à infrarouge, téléviseurs portables], tels qu’ils apparaissent dans les éléments de preuve fournis, sont des systèmes, articles et produits électroniques et audiovisuels qui sont composés ou font partie d’appareils pour la reproduction du son et des images’. Ils ont tous une nature et un objectif similaires ou identiques et ne sont pas complémentaires, mais intrinsèquement liés. Ils appartiennent au ‘champ d’extension naturel’, tel que défini par le Tribunal dans l’[arrêt du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, Rec, EU:T:2005:288]. En outre, le terme ‘appareils pour la reproduction du son et des images’ est défini de manière suffisamment ‘précise et circonscrite’ pour désigner les produits pour lesquels l’usage a été démontré, et il n’y aurait aucune raison valable d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de cette catégorie. […] »

60      La requérante fait valoir, en substance, que la protection accordée à la marque contestée pour les « appareils pour la reproduction du son et des images » s’applique à une catégorie de produits beaucoup trop large et que celle-ci devrait être subdivisée en sous-catégories.

61      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée [arrêts du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, Rec, EU:T:2005:288, point 45, et du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 23].

62      Cependant, si la notion d’usage partiel a pour fonction de ne pas rendre indisponibles des marques dont il n’a pas été fait usage pour une catégorie de produits donnée, elle ne doit pas avoir pour effet de priver le titulaire de ladite marque de toute protection pour des produits qui, sans être rigoureusement identiques à ceux pour lesquels il a pu prouver un usage sérieux, ne sont pas essentiellement différents de ceux-ci et relèvent d’un même groupe qui ne peut être divisé autrement que de façon arbitraire. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement. Par conséquent, la notion de « partie des produits ou des services » ne peut s’entendre de toutes les déclinaisons commerciales de produits ou de services analogues, mais seulement de produits ou de services suffisamment différenciés pour pouvoir constituer des catégories ou sous-catégories cohérentes (arrêt ALADIN, point 61 supra, EU:T:2005:288, point 46).

63      En l’espèce, force est de constater que, contrairement à ce que la chambre de recours affirme au point 46 de la décision attaquée, il ne saurait être considéré que l’expression « appareils pour la reproduction du son et des images » est définie de manière suffisamment « précise et circonscrite ». La preuve en est d’ailleurs que, invité, lors de l’audience, à indiquer ce que recouvrait cette expression, l’OHMI n’a pas été en mesure d’apporter la moindre réponse concluante.

64      L’argumentation que l’OHMI fonde sur la taxonomie ne saurait prospérer.

65      En effet, tout d’abord, ainsi que l’OHMI le relève lui-même et qu’il ressort de la communication n° 1/13 du président de l’OHMI du 25 novembre 2013, cette taxonomie, telle qu’intégrée dans la base de données « TMclass », n’est qu’un outil purement administratif, qui ne constitue pas une alternative à la classification de Nice et n’a aucun effet juridique.

66      Ensuite, ainsi qu’il est expressément indiqué dans la communication mentionnée au point 65 ci-dessus, l’étendue de la protection d’une marque communautaire est toujours déterminée en fonction du sens propre et usuel des termes choisis et non en fonction de la place de l’intitulé dans la taxonomie. Or, comme le fait valoir à juste titre la requérante, l’expression « appareils pour la reproduction du son et des images », comprise dans son sens propre et usuel, est susceptible d’inclure un large éventail d’équipements audiovisuels et électroniques, en ce compris des équipements pour lesquels la division d’annulation a considéré, en l’espèce, que la preuve de l’usage sérieux n’avait pas été rapportée, tels que des caméras vidéos ou des appareils photographiques.

67      Par ailleurs, ainsi que le fait d’ailleurs remarquer l’OHMI dans ses écritures, la taxonomie n’avait pas encore été mise en œuvre lorsque la division d’annulation a rendu sa décision.

68      Enfin, force est de constater que l’OHMI lui-même reconnaît que la catégorie des « appareils pour la reproduction du son et des images » peut, à tout le moins, être subdivisée en deux sous-catégories, lorsqu’il relève que, dans la base de données « TMclass », l’intitulé « Équipement audiovisuel et de technologie de l’information » de la classe 9 fait apparaître, « au plus bas niveau de l’arborescence » de cette classe, d’une part, les « appareils de reproduction de son » et, d’autre part, les « appareils de reproduction d’images ».

69      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’accueillir le troisième moyen et, partant, d’annuler la décision attaquée en tant qu’elle prévoit que la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée a été rapportée pour les « appareils pour la reproduction du son et des images » et, partant, qu’elle rejette le recours contre la décision de la division d’annulation de rejeter la demande en déchéance de la marque contestée pour lesdits appareils.

70      Le recours doit être rejeté pour le surplus.

 Sur les dépens

71      En vertu de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens.

72      En l’espèce, la requérante et l’OHMI ont, respectivement, partiellement succombé, dans la mesure où la décision attaquée est partiellement annulée. Par conséquent, il y a lieu d’ordonner que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,      

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 2 juillet 2014 (affaire R 2100/2013-2) est annulée dans la mesure où elle a rejeté le recours contre la décision de la division d’annulation de rejeter la demande en déchéance de la marque communautaire figurative Vieta pour les « appareils pour la reproduction du son et des images ».

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 décembre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.