Language of document : ECLI:EU:T:2010:234

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

15 juin 2010 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale TERRAEFFEKT matt & gloss – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑118/08,

Actega Terra GmbH, établie à Lehrte (Allemagne), représentée par Me A. Andorfer-Erhard, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. S. Schäffner, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 7 janvier 2008 (affaire R 1467/2007‑1), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal TERRAEFFEKT matt & gloss comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. K. O’Higgins (rapporteur), juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 mars 2008,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 16 juin 2008,

à la suite de l’audience du 18 novembre 2009, à laquelle la requérante n’a pas participé,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 novembre 2006, la requérante, Actega Terra GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal TERRAEFFEKT matt & gloss.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 2 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Laques, en particulier pour l’industrie graphique ; tous les produits précités non destinés à l’utilisation dans la construction ».

4        Par décision du 13 juillet 2007, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009].

5        Le 23 juillet 2007, la requérante a formé un recours contre cette décision auprès de l’OHMI.

6        Par décision du 7 janvier 2008 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré, en substance, que le signe TERRAEFFEKT matt & gloss était composé des éléments verbaux « terraeffekt » et « matt & gloss ». Selon la chambre de recours, le premier de ces éléments est composé du terme « terra », qui signifie « terre » en latin, et du terme « effekt », qui est un mot allemand courant signifiant « effet ». Le deuxième élément verbal comprendrait, d’une part, un mot allemand courant, à savoir le mot « matt », qui, par rapport aux laques, indiquerait un aspect mat, et, d’autre part, le mot « gloss », qui n’appartiendrait pas à la langue allemande. La combinaison de ces deux mots signifierait, dans les régions anglophones, « mat et brillant ». La chambre de recours indique également que, dans les régions germanophones, l’élément « terraeffekt » et le mot « matt » signifient, respectivement, un « effet de couleur de terre sur les objets » et « conférant aux objets un aspect mat ». Le signe TERRAEFFEKT matt & gloss informerait ainsi directement le public pertinent, qui serait constitué de professionnels opérant dans l’industrie graphique, des caractéristiques des produits concernés, pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé. Il serait donc descriptif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, des caractéristiques des produits visés. Ayant constaté qu’un motif absolu de refus s’appliquait en l’espèce, la chambre de recours s’est abstenue de se prononcer sur l’absence de caractère distinctif de la marque demandée, constatée par l’examinateur, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        constater que l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94 ne fait pas obstacle à l’enregistrement de la marque TERRAEFFEKT matt & gloss ;

–        à titre subsidiaire, premièrement, limiter la liste des produits couverts par la marque demandée aux « vernis dont l’application permet d’obtenir, selon la nature du support, une surface mate ou brillante, notamment pour l’industrie graphique ; tous les produits précités pour une utilisation autre que la construction » et, deuxièmement, constater que, à cet égard, l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94 ne fait pas obstacle à l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions ainsi que du chef de conclusions présenté à titre subsidiaire

 Arguments des parties

9        L’OHMI fait valoir que le deuxième chef de conclusions et le chef de conclusions présenté à titre subsidiaire par la requérante sont irrecevables. Premièrement, le règlement n° 40/94 ne prévoirait pas la possibilité pour le Tribunal de constater que l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94 ne fait pas obstacle à l’enregistrement de la marque demandée. Deuxièmement, selon l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, la requérante ne peut modifier l’objet du recours par la requête et, au surplus, aucune demande au sens de l’article 44, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenu article 43, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009) n’aurait été adressée à l’OHMI. Une telle demande aurait dû être effectuée par la requérante de manière expresse et non conditionnelle.

 Appréciation du Tribunal

10      Il convient de constater que, par son deuxième chef de conclusions, la requérante vise à obtenir du Tribunal un jugement déclaratoire. Or, il résulte de l’article 63, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 (devenu article 65, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009) que le recours ouvert devant le Tribunal vise à examiner la légalité des décisions des chambres de recours et à obtenir, le cas échéant, l’annulation ou la réformation de celles-ci [arrêt de la Cour du 12 octobre 2004, Vedial/OHMI, C‑106/03 P, Rec. p. I‑9573, point 28 ; voir également, en ce sens, arrêts du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY), T‑247/01, Rec. p. II‑5301, point 46, et du 6 novembre 2007, SAEME/OHMI – Racke (REVIAN’s), T‑407/05, Rec. p. II‑4385, point 65], de sorte qu’il ne saurait avoir pour objet d’obtenir, au regard de telles décisions, des jugements confirmatifs ou déclaratoires.

11      Par conséquent, le deuxième chef de conclusions doit être rejeté comme étant irrecevable.

12      Quant au chef de conclusions présenté à titre subsidiaire, il convient de relever que, selon la jurisprudence, lorsque la limitation de la liste des produits ou des services contenue dans une demande de marque communautaire a pour objet la modification, en tout ou en partie, de la description desdits produits ou services, il ne peut être exclu que cette modification puisse avoir un effet sur l’examen de la marque en cause, effectué par les instances de l’OHMI au cours de la procédure administrative. Dans ces circonstances, admettre cette modification au stade du recours devant le Tribunal équivaudrait à une modification de l’objet du litige en cours d’instance, interdite par l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure [arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec. p. II‑1927, point 29].

13      En l’espèce, par le biais de sa modification, la requérante a supprimé la référence à la catégorie générale « laques, en particulier pour l’industrie graphique ; tous les produits précités non destinés à l’utilisation dans la construction » et y a substitué la description « vernis dont l’application permet d’obtenir, selon la nature du support, une surface mate ou brillante, notamment pour l’industrie graphique ; tous les produits précités pour une utilisation autre que la construction ». Force est de constater que cette limitation consiste en des spécifications modifiant la description des produits concernés et susceptibles d’influer sur l’appréciation de la marque demandée et, par conséquent, de modifier le cadre factuel qui avait été présenté devant la chambre de recours. Par conséquent, le chef de conclusions présenté à titre subsidiaire par la requérante doit être rejeté comme étant irrecevable.

 Sur le fond

14      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement. Le Tribunal considère qu’il y a lieu d’examiner, tout d’abord, le second moyen.

 Arguments des parties

15      La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié les éléments de preuve, et ce en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. Selon la requérante, la chambre de recours aurait dû conclure que l’expression « terraeffekt matt & gloss » n’est pas, dans son ensemble, exclusivement descriptive. Ni l’élément « terraeffekt » ni l’élément « matt & gloss » ne seraient descriptifs des produits en cause pour le public pertinent. Au soutien de sa thèse, la requérante fait valoir cinq arguments.

16      En premier lieu, la requérante affirme que, contrairement à ce que la chambre de recours a conclu, le premier élément de la marque demandée, à savoir l’élément verbal « terraeffekt », n’a aucun contenu descriptif pour les professionnels de l’industrie graphique concernés.

17      À cet égard, tout d’abord, elle fait valoir que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 doit être interprété de manière stricte et que l’existence d’un certain rapport allusif entre la marque demandée et les caractéristiques des produits en cause ne permet pas de considérer celle-ci comme étant descriptive. Ensuite, elle affirme que le public pertinent serait particulièrement avisé et qu’il ne comprendrait pas l’expression résultant de la combinaison des mots « terra » et « effekt » comme signifiant que le vernis donne aux objets un « effet terreux ». Enfin, le public pertinent germanophone associerait directement l’élément « terra » à la requérante, qui est active dans le secteur depuis plus de 30 ans sous la raison sociale et la marque TERRA Lacke, et à plusieurs autres marques contenant le préfixe « terra » qu’elle détient.

18      En deuxième lieu, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié l’effet contraignant de l’enregistrement antérieur de la marque communautaire n° 4209541, TERRAEFFEKT, qu’elle détient et qui est toujours en vigueur. Selon la requérante, et par analogie avec l’article 1er et l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenus article 1er et article 99, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009), la chambre de recours aurait dû considérer qu’elle devait tenir compte de l’effet contraignant de cette marque. Un tel effet contraignant confirmerait que l’élément « terraeffekt » peut être protégé. Au soutien de sa thèse, la requérante fait valoir que la chambre de recours a conclu, au point 18 de la décision attaquée, que cet élément ne présentait aucun caractère descriptif pour le public anglophone.

19      En troisième lieu, la requérante soutient que le second élément de la marque demandée, à savoir l’élément « matt & gloss », n’est pas directement descriptif des caractéristiques des produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé, ni pour le public germanophone, ni pour le public anglophone.

20      À cet égard, tout d’abord, le public germanophone ne connaîtrait pas l’élément « gloss », lequel serait donc dépourvu de caractère descriptif. Ensuite, même si le public anglophone comprenait l’élément « gloss » comme signifiant « brillant », il ne connaîtrait pas l’élément « matt » et celui-ci ne serait pas descriptif pour les produits en cause. Enfin, il n’y aurait pas lieu d’examiner si le consommateur anglophone assimilera le terme anglais « mat » à la notion allemande « matt ».

21      En quatrième lieu, la requérante estime que le second élément de la marque demandée, à savoir l’élément « matt & gloss », doit être apprécié comme un concept global, au motif que les deux mots qu’il contient sont associés par le signe typographique « & ». Selon la requérante, même si l’un des deux mots, pour le public germanophone, ou les deux mots, pour le public anglophone, devaient être considérés comme descriptifs, le concept global « matt & gloss » ne serait pas descriptif pour ces publics. Elle prétend que, dès lors que ces consommateurs ne connaissent que les vernis donnant un aspect soit uniquement brillant, soit uniquement mat, et que les vernis en cause ne produisent pas uniquement un seul effet selon la surface sur laquelle ils sont utilisés, l’association des deux propriétés contradictoires donne lieu à une expression fantaisiste.

22      En cinquième lieu, la requérante critique l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle l’association de l’élément non descriptif « terraeffekt » à l’élément « matt & gloss », prétendument descriptif pour le public anglophone, est descriptive. Elle affirme que cette appréciation ne serait fondée que si l’élément « matt & gloss » dominait l’impression générale de la marque demandée. Or, elle soutient que la chambre de recours a omis d’examiner si l’élément « terraeffekt » dominait l’impression générale de la marque demandée pour l’ensemble du public pertinent, alors que cet élément est situé en première position au sein de cette marque, qu’il est écrit en majuscules et qu’il fait partie d’une marque déjà enregistrée.

23      L’OHMI conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

24      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du même règlement (devenu article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009) énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

25      Il ressort d’une jurisprudence constante que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 empêche que les signes ou les indications qu’il vise soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 31 ; arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, point 27, et du 12 juin 2007, MacLean-Fogg/OHMI (LOKTHREAD), T‑339/05, non publié au Recueil, point 27].

26      En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement a été demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, réputés inaptes à remplir la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative (arrêts OHMI/Wrigley, précité, point 30 ; ELLOS, précité, point 28, et LOKTHREAD, précité, point 28).

27      Il en résulte que, pour qu’un signe relève de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 40, et LOKTHREAD, précité, point 29].

28      Pour qu’une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot résultant d’une combinaison d’éléments soit considérée comme descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il ne suffit pas qu’un éventuel caractère descriptif soit constaté pour chacun de ces éléments. Un tel caractère doit également être constaté pour le néologisme ou le mot lui-même [arrêts du Tribunal du 12 janvier 2005, Wieland-Werke/OHMI (SnTEM, SnPUR, SnMIX), T‑367/02 à T‑369/02, Rec. p. II‑47, point 31, et LOKTHREAD, précité, point 30].

29      Une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement a été demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits ou de ces services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sauf s’il existe un écart perceptible entre le néologisme ou le mot et la simple somme des éléments qui le composent. Cela suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le néologisme ou le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, de sorte qu’il prime la somme desdits éléments. À cet égard, l’analyse du terme en cause au vu des règles lexicales et grammaticales appropriées est également pertinente (voir arrêt LOKTHREAD, précité, point 31, et la jurisprudence citée).

30      Il convient également de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la perception qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés (voir arrêt LOKTHREAD, précité, point 32, et la jurisprudence citée).

31      Enfin, il y a lieu de rappeler que l’enregistrement d’un signe verbal doit être refusé si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés (arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 32, et ordonnance de la Cour du 5 février 2004, Telefon & Buch/OHMI, C‑326/01 P, Rec. p. I‑1371, point 28).

32      En l’espèce, les produits visés par la marque en cause sont les laques, en particulier pour l’industrie graphique, qui ne sont pas destinées à être utilisées dans le domaine de la construction (voir point 3 ci-dessus).

33      Quant au public pertinent par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus, il est constitué, ainsi que l’a à juste titre indiqué la chambre de recours au point 16 de la décision attaquée, sans que cela soit contesté par la requérante, d’un public spécialisé de professionnels qui opèrent dans l’industrie graphique, compétents pour l’achat desdits vernis et ayant un degré d’attention plus élevé qu’un public ordinaire.

34      Par ailleurs, le signe verbal en cause étant composé de deux éléments, dont le second comprend un mot de langue allemande et un mot de langue anglaise, la chambre de recours a tenu compte, dans le cadre de son examen, des publics germanophone et anglophone. Ainsi, en application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, il convient d’apprécier le motif absolu de refus par rapport à ces deux publics pertinents composés de professionnels qui opèrent dans l’industrie graphique.

35      Il y a donc lieu d’examiner si, comme le prétend la requérante, la chambre de recours a commis une erreur en considérant que le signe TERRAEFFEKT matt & gloss était descriptif des produits visés.

36      En premier lieu, en ce qui concerne la signification de l’élément verbal « terraeffekt », il convient de constater que celui-ci se compose de deux mots, dont le second, « effekt », est un mot courant en allemand qui signifie notamment « effet ». Il ne diffère du mot anglais « effect », qui signifie également « effet », que par une seule lettre. En ce qui concerne la signification du mot « terra », force est de constater que, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 17 de la décision attaquée, il s’agit d’un mot latin très courant qui signifie notamment « terre » et qui serait compris en ce sens par presque tous les germanophones et anglophones faisant partie de public visé. Le mot « terra » peut être utilisé comme adjectif, indiquant la couleur, ou comme substantif, indiquant la terre ou la couleur de terre d’un objet.

37      Dès lors, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il convient d’examiner si l’élément verbal « terraeffekt » présente, du point du vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret avec les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 novembre 2003, HERON Robotunits/OHMI (ROBOTUNITS), T‑222/02, Rec. p. II‑4995, point 38].

38      S’agissant de la compréhension de l’élément « terraeffekt » par le public anglophone, la chambre de recours a conclu au point 18 de la décision attaquée que ces consommateurs ne lui attribuent pas de caractère descriptif. La requérante ne conteste pas cette appréciation.

39      Pour ce qui concerne le public germanophone, il y a lieu de considérer que le mot « effekt » vise à informer les consommateurs que les produits en cause, visés au point 3 ci-dessus, ont un effet concret. Le mot « effekt » peut être utilisé afin d’indiquer le résultat ou les effets d’une chose et sera compris au moins par le public pertinent en ce sens. Il s’ensuit qu’il est descriptif pour les produits en cause.

40      Pour ce qui est du terme « terra », il convient de relever qu’il est généralement admis que les consommateurs utilisent une laque pour produire un effet précis sur une surface ou un objet. L’application d’une laque peut notamment servir soit à renforcer la couleur naturelle de la surface ou de l’objet, soit à la changer. Partant, le terme « terra » est descriptif pour les produits en cause.

41      Il s’ensuit que les termes « terra » et « effekt », ainsi que leur simple combinaison « terraeffekt », permettent au public germanophone de déceler immédiatement et sans autre réflexion la description d’une caractéristique fondamentale des produits concernés, à savoir que leur utilisation produit un aspect concret, c’est-à-dire un « effet de terre ».

42      L’appréciation du terme « terraeffekt » comme étant un élément descriptif pour le public germanophone ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante selon lesquels l’élément « terra » est présent dans plusieurs autres marques dont elle est titulaire, qui ont fait l’objet d’un enregistrement par l’OHMI, y compris la marque antérieure TERRAEFFEKT. En effet, selon une jurisprudence bien établie, la légalité des décisions des chambres de recours s’apprécie uniquement sur la base du règlement n° 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de celles-ci [voir arrêt du Tribunal du 12 mars 2008, Suez/OHMI (Delivering the essentials of life), T‑128/07, non publié au Recueil, point 32, et la jurisprudence citée].

43      En deuxième lieu, en ce qui concerne la signification de l’élément verbal « matt & gloss », la chambre de recours a constaté à juste titre, au point 18 de la décision attaquée, que cet élément se composait de deux mots, le premier étant un mot à la fois allemand et anglais qui signifie « mat » et le second un mot anglais qui signifie « brillant ».

44      En ce qui concerne le public germanophone, la chambre de recours a conclu que le mot « gloss » ne serait pas manifestement descriptif pour ledit public. Dans son mémoire en réponse, l’OHMI a toutefois nuancé cette position en indiquant que le mot « gloss » pourrait être compris par ce public comme signifiant « brillant » dès lors qu’il figure dans des expressions bien connues par ledit public, telles que « lipgloss » et « highgloss ». À cet égard, compte tenu, en particulier, du caractère spécialisé du public concerné, il convient de considérer que le mot « gloss » est descriptif pour le public germanophone.

45      En ce qui concerne le public anglophone, la chambre de recours a conclu à juste titre que ce public comprendrait l’élément verbal « matt & gloss » comme signifiant « mat et brillant » et donc comme désignant une caractéristique évidente des laques pour lesquelles l’enregistrement de la marque a été demandé.

46      Les deux mots sont simplement liés par le signe typographique « & », qui signifie « et », ce qui n’est pas original sur le plan grammatical. En conséquence, le sens des termes ainsi combinés demeure inchangé. Ainsi, l’élément « matt & gloss », pris dans son ensemble, ne représente pas davantage que la somme des éléments qui le composent, et présente un caractère descriptif pour le public pertinent tant germanophone qu’anglophone.

47      En troisième lieu, la marque verbale demandée étant composée de plusieurs éléments, il y a lieu d’apprécier si le caractère descriptif constaté pour les éléments qui la composent existe aussi pour l’élément verbal « terraeffekt matt & gloss » considéré dans son ensemble [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 26].

48      À cet égard, s’agissant du rapport existant entre le contenu sémantique du signe TERRAEFFEKT matt & gloss et les produits concernés, la chambre de recours a considéré, en substance, que ce signe était descriptif pour le public germanophone et le public anglophone, parce qu’il désigne une caractéristique évidente des produits concernés qui peuvent, selon l’utilisation, produire un effet mat ou brillant. La chambre de recours a considéré que le public pertinent comprendrait le signe demandé, pris dans son ensemble, comme étant descriptif malgré la présence d’un élément non descriptif pour chacun des publics, au motif, en particulier, que les autres éléments du signe demandé, à savoir soit l’élément « terraeffekt » et le mot « matt » pour le public germanophone, soit l’élément « matt & gloss » par le public anglophone, désignaient de manière évidente une caractéristique des produits concernés.

49      La requérante considère que la chambre de recours aurait dû examiner si l’élément « terraeffekt » dominait l’impression générale de la marque demandée.

50      Il convient de relever à cet égard que, même si le premier élément de la marque demandée, à savoir l’élément « terraeffekt », est écrit en majuscules comme l’indique la requérante, il ne domine pas l’impression d’ensemble de la marque verbale demandée. En effet, le signe demandé est un signe verbal composé de sept courtes syllabes et son élément « terraeffekt » n’en comprend que quatre. Le second élément du signe demandé, à savoir l’élément « matt & gloss », est composé de trois syllabes et consiste en la combinaison de qualités que pourraient avoir des laques, ces qualités étant liées par le signe typographique « & ». Ce second élément n’est pas un élément négligeable car il est composé de trois mots courts faciles à retenir et contribue également à l’impression de la marque demandée par le public pertinent. En outre, le fait que l’élément « terraeffekt » figure dans une marque antérieure, comme le relève la requérante, est dépourvu de pertinence pour les motifs exposés au point 42 ci-dessus. Il s’ensuit que les arguments de la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause l’appréciation globale du signe demandé effectuée par la chambre de recours, dans la décision attaquée.

51      S’agissant du rapport existant entre le contenu sémantique du signe TERRAEFFEKT matt & gloss et les produits concernés pour le public germanophone, il convient de rappeler que la chambre de recours a considéré que ce signe était descriptif. À cet égard, elle a conclu à juste titre que les éléments « terraeffekt » et « matt » étaient manifestement descriptifs pour ce public. Même si l’élément « gloss » n’est pas manifestement descriptif des laques, ainsi que l’a indiqué l’agent de l’OHMI à l’audience, il n’est pas de nature à remettre en cause l’appréciation globale de la marque demandée dont les autres éléments sont clairement descriptifs pour les laques.

52      En effet, le signe demandé, pris dans son ensemble, peut servir à désigner les effets produits par les laques. Il en résulte que la teneur sémantique du signe TERRAEFFEKT matt & gloss permet au public pertinent germanophone d’établir immédiatement et sans autre réflexion un rapport direct et concret avec la fonction des laques.

53      Il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que, pour le public germanophone pertinent formé des professionnels qui opèrent dans l’industrie graphique, le signe TERRAEFFEKT matt & gloss était descriptif des produits visés par la demande d’enregistrement et a, par conséquent, considéré que cette demande se heurtait au motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de poursuivre l’examen des arguments de la requérante relatifs à l’appréciation du caractère descriptif du signe demandé effectuée par la chambre de recours au regard du public pertinent anglophone.

54      Par ailleurs, il n’y a pas non plus lieu d’examiner le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. En effet, selon une jurisprudence bien établie, il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 s’applique pour qu’un signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29 ; arrêt du Tribunal du 6 novembre 2007, RheinfelsQuellen H. Hövelmann/OHMI (VOM URSPRUNG HER VOLLKOMMEN), T‑28/06, Rec. p. II‑4413, point 43].

55      Partant, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

56      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Actega Terra GmbH est condamnée aux dépens.

Czúcz

Labucka

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 juin 2010.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.