Language of document : ECLI:EU:T:2011:131

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

31 mars 2011 (*)

« Régime linguistique – Avis de vacance pour le recrutement du secrétaire général du CESE – Publication en trois langues officielles – Information relative à l’avis de vacance – Publication dans toutes les langues officielles – Recours en annulation – Recevabilité – Articles 12 CE et 290 CE – Article 12 du RAA – Règlement n° 1 » 

Dans l’affaire T‑117/08,

République italienne, représentée par M. R. Adam, en qualité d’agent, assisté de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

partie requérante,

soutenue par

Royaume d’Espagne, représenté par Me F. Díez Moreno, en qualité d’agent,

partie intervenante,

contre

Comité économique et social européen (CESE), représenté initialement par M. M. Bermejo Garde, puis par Mme M. Arsène, en qualité d’agents, assistés de Me A. Dal Ferro, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation, d’une part, de l’avis de vacance d’emploi n° 73/07 concernant un emploi de secrétaire général(e) au secrétariat du CESE publié au Journal officiel de l’Union européenne du 28 décembre 2007 dans les versions allemande, anglaise et française (JO C 316 A, p. 1), et, d’autre part, du rectificatif audit avis de vacance publié au Journal officiel de l’Union européenne du 30 janvier 2008 dans les versions allemande, anglaise et française (JO C 25 A, p. 19),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de M. V. Vadapalas (rapporteur), faisant fonction de président, Mme K. Jürimäe et M. L. Truchot, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 avril 2010,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Les articles 12 CE et 290 CE énoncent :

« Article 12

Dans le domaine d’application du présent traité, et sans préjudice des dispositions particulières qu’il prévoit, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité.

[…]

Article 290

Le régime linguistique des institutions de la Communauté est fixé, sans préjudice des dispositions prévues par le statut de la Cour de justice, par le Conseil statuant à l’unanimité. »

2        L’article 22 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée le 7 décembre 2000 à Nice (JO C 364, p. 1, ci-après la « charte »), prévoit :

« L’Union respecte la diversité culturelle, religieuse et linguistique. »

3        Les articles 1er, 4, 5 et 6 du règlement n° 1, du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), dans leur rédaction applicable à la présente espèce, disposent :

« Article premier

Les langues officielles et les langues de travail des institutions de l’Union sont le bulgare, l’espagnol, le tchèque, le danois, l’allemand, l’estonien, le grec, l’anglais, le français, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le hongrois, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le finnois et le suédois.

[...]

Article 4

Les règlements et les autres textes de portée générale sont rédigés dans les langues officielles.

Article 5

Le Journal officiel de l’Union européenne paraît dans les langues officielles.

Article 6

Les institutions peuvent déterminer les modalités d’application de ce régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. »

4        L’article 1er, paragraphes 2 et 3, de l’annexe III du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») énonce :

« 2. Pour les concours généraux, un avis de concours doit être publié au Journal officiel des Communautés européennes, un mois au moins avant la date limite prévue pour la réception des candidatures et, le cas échéant, deux mois au moins avant la date des épreuves.

3. Tous les concours font l’objet d’une publicité au sein des institutions des trois Communautés européennes dans les mêmes délais. »

5        L’article 12 du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après le « RAA ») énonce :

« 1. L’engagement des agents temporaires doit viser à assurer à l’institution le concours de personnes possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutées sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres des Communautés. »

 Antécédents du litige

6        Le 28 décembre 2007 a été publié, selon l’article 2, sous a), et l’article 8 du RAA, l’avis de vacance d’emploi n° 73/07 concernant un emploi de secrétaire général(e) au secrétariat du Comité économique et social européen (CESE) (ci-après l’« avis de vacance litigieux »), dans les seules éditions allemande, anglaise et française du Journal officiel (JO C 316 A, p. 1). L’avis de vacance litigieux précise que le secrétaire général sera recruté en tant qu’agent temporaire au grade AD 16, troisième échelon.

7        Sous la rubrique « Qualifications requises », l’avis de vacance litigieux mentionnait notamment l’exigence d’« [ê]tre fonctionnaire titulaire ou agent temporaire en service dans une institution européenne, un organe, bureau ou agence » et d’avoir une « [c]onnaissance approfondie d’une langue officielle de l’Union européenne et [une] excellente connaissance d’au moins deux autres langues officielles de l’Union européenne », en précisant que « [p]our des raisons de service, une bonne connaissance de l’anglais et/ou du français [était] fortement souhaitée ». Sous la rubrique « Date limite d’introduction des candidatures », l’avis de vacance mentionnait le « 28 janvier 2008 ».

8        Un avis (ci-après l’« avis succinct »), rédigé et publié dans toutes les langues officielles, également paru au Journal officiel du 28 décembre 2007 (JO C 316, p. 61) indiquait « qu’[i]l [était] porté à la connaissance du personnel des institutions européennes que l’avis de vacance [litigieux] [était] publié au Journal officiel de l’Union européenne en versions française, allemande et anglaise (JO C 316 A du 28.12.2007) ».

9        Le 30 janvier 2008, un rectificatif à l’avis de vacance litigieux (ci-après le « rectificatif ») a été publié au Journal officiel dans les seules versions allemande, anglaise et française (JO C 25 A, p. 19). Dans ce rectificatif, le CESE indiquait une nouvelle date limite pour l’introduction des candidatures au poste de secrétaire général, à savoir le 8 février 2008.

10      Un avis de rectificatif de l’avis de vacance litigieux, rédigé et publié dans toutes les langues officielles, également paru au Journal officiel du 30 janvier 2008 (JO C 25, p. 21) indiquait qu’« [i]l [était] porté à la connaissance du personnel des institutions européennes que l’avis de vacance [litigieux] publié au Journal officiel de l’Union européenne en versions française, allemande et anglaise (JO C 316 A du 28.12.2007) [avait] été modifié (cf. JO C 25 A du 30.1.2008) ».

 Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 mars 2008, la République italienne a introduit, à l’encontre de la Commission des Communautés européennes et du CESE, le présent recours, en vue de l’annulation de l’avis de vacance litigieux et de son rectificatif.

12      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 29 avril 2008, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité, au titre de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal.

13      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 juin 2008, le Royaume d’Espagne a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la République italienne. Par ordonnance du 11 juillet 2008, le président de la sixième chambre du Tribunal a admis cette intervention.

14      Le 28 août 2008, le Royaume d’Espagne a déposé son mémoire en intervention.

15      Par ordonnance du 16 décembre 2008, le Tribunal (sixième chambre) a rejeté comme irrecevable le recours pour autant qu’il était dirigé contre la Commission.

16      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a invité les parties à répondre par écrit à plusieurs questions. Les parties ont déféré à ces demandes.

17      Par lettre du 11 février 2010, le Royaume d’Espagne a indiqué qu’il ne participerait pas à l’audience.

18      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 14 avril 2010.

19      M. le juge Tchipev ayant été empêché de siéger après la clôture de la procédure orale, l’affaire a été réattribuée à M. le juge Vadapalas en tant que juge rapporteur et Mme le juge Jürimäe a été désignée, en application de l’article 32, paragraphe 3, du règlement de procédure, pour compléter la chambre.

20      Par ordonnance du 8 juillet 2010, le Tribunal (sixième chambre), dans sa nouvelle composition, a rouvert la procédure orale et les parties ont été informées qu’elles seraient entendues lors d’une nouvelle audience le 22 septembre 2010.

21      Par lettres, respectivement, des 16 et 19 juillet 2010, la République italienne et le CESE ont informé le Tribunal qu’ils renonçaient à être entendus une nouvelle fois.

22      En conséquence, le président de la sixième chambre a décidé de clore la procédure orale.

23      La République italienne, soutenue par le Royaume d’Espagne, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler l’avis de vacance litigieux et son rectificatif.

24      Le Royaume d’Espagne conclut en outre à ce qu’il plaise au Tribunal de condamner le CESE aux dépens.

25      Le CESE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou dénué de fondement ;

–        condamner la République italienne aux dépens.

 En droit

1.     Sur la recevabilité

26      Sans soulever une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure, le CESE conteste la recevabilité du présent recours, introduit au titre de l’article 230 CE.

 Arguments des parties

27      Le CESE fait valoir que ses actes n’émanent d’aucune des institutions mentionnées à l’article 230, premier alinéa, CE et invoque l’arrêt de la Cour du 15 mars 2005, Espagne/Eurojust (C‑160/03, Rec. p. I‑2077, points 35 à 44). Selon le CESE, la motivation de cet arrêt laisse, en substance, entendre que le recours n’a pas seulement été déclaré irrecevable parce qu’Eurojust ne figure pas parmi les institutions susvisées, mais également en raison de la nature même des actes attaqués, à savoir des appels à candidatures, qui ne relèveraient pas des actes visés à l’article 230 CE.

28      La République italienne conteste, en substance, l’absence de légitimation passive du CESE au titre de l’article 230 CE.

 Appréciation du Tribunal

29      À titre liminaire, il y a lieu de constater que le CESE ne figure pas parmi les institutions visées par l’article 230, premier alinéa, CE. Cependant, ce constat ne s’oppose pas à ce que le Tribunal contrôle la légalité de ses actes.

30      En effet, ainsi que le Tribunal l’a relevé notamment dans ses arrêts du 8 octobre 2008, Sogelma/AER (T‑411/06, Rec. p. II‑2771, point 36), et du 2 mars 2010, Evropaïki Dynamiki/EMSA (T‑70/05, non encore publié au Recueil, point 64), en se référant à l’arrêt de la Cour du 23 avril 1986, Les Verts/Parlement, dit « Les Verts » (294/83, Rec. p. 1339), la Communauté européenne est une communauté de droit et le traité a établi un système complet de voies de recours et de procédures destiné à confier à la Cour le contrôle de la légalité des actes des institutions. Le système du traité est d’ouvrir un recours direct contre toutes dispositions prises par les institutions et visant à produire un effet juridique. Sur ces prémisses, la Cour a dès lors conclu, dans l’arrêt Les Verts, précité, que le recours en annulation pouvait être dirigé contre les actes du Parlement européen destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers, alors même que la disposition du traité relative au recours en annulation, dans sa rédaction alors en vigueur, ne citait que les actes du Conseil de l’Union européenne et de la Commission. En effet, une interprétation de cette disposition excluant les actes du Parlement de ceux qui peuvent être attaqués aurait abouti, selon la Cour, à un résultat contraire tant à l’esprit du traité tel qu’il a été exprimé dans l’article 164 du traité CE (devenu article 220 CE), qu’à son système (voir, en ce sens, arrêt Les Verts, précité, points 23 à 25).

31      Il peut être déduit de cet arrêt le principe général que tout acte émanant d’un organe de l’Union, tel le CESE, destiné à produire des effets juridiques à l’égard des tiers, doit être susceptible d’un contrôle juridictionnel (voir, par analogie, arrêt Evropaïki Dynamiki/EMSA, précité, point 65).

32      Certes, l’arrêt Les Verts, précité, ne mentionne que les institutions communautaires, tandis que le CESE, ainsi qu’il a été constaté au point 29 ci-dessus, ne fait pas partie des institutions mentionnées à l’article 230 CE. Toutefois, il convient de relever qu’un organe tel que le CESE dispose d’une compétence pour adopter des avis de vacance tels que celui en cause en l’espèce. Or, de tels actes déterminent, en définissant les conditions relatives à l’accès à l’emploi, quelles sont les personnes dont la candidature est susceptible d’être retenue et constituent donc des actes faisant grief aux candidats potentiels, dont la candidature est exclue par lesdites conditions (arrêts de la Cour du 19 juin 1975, Küster/Parlement, 79/74, Rec. p. 725, points 5 à 8, et du 11 mai 1978, De Roubaix/Commission, 25/77, Rec. p. 1081, points 7 à 9 ; arrêt du Tribunal du 20 novembre 2008, Italie/Commission, T‑185/05, Rec. p. II‑3207, point 55). Partant, force est de constater que la situation du CESE, organe doté du pouvoir d’adopter des actes, tels que ceux en cause en l’espèce, qui produisent des effets juridiques à l’égard des tiers, est comparable à celle du Parlement dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Les Verts, précité. Il ne saurait dès lors être acceptable, dans une communauté de droit, que de tels actes échappent à tout contrôle juridictionnel (voir, par analogie, arrêt Evropaïki Dynamiki/EMSA, précité, point 66, et la jurisprudence citée).

33      Il s’ensuit que l’avis de vacance litigieux adopté par le CESE, et destiné à produire des effets juridiques à l’égard de tous les candidats dont la candidature n’aura pas été retenue en vertu des conditions requises, constitue un acte attaquable.

34      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’arrêt Espagne/Eurojust, précité, évoqué par le CESE, dans lequel un recours en annulation fondé sur l’article 230 CE contre des appels à candidatures pour des emplois d’agents temporaires a été déclaré irrecevable, la Cour ayant relevé dans cet arrêt que l’article 41 UE, applicable au cas d’espèce, ne prévoyait pas l’application de l’article 230 CE aux dispositions relatives à la coopération policière et judiciaire en matière pénale figurant au titre VI du traité sur l’Union européenne, dont relève Eurojust, la compétence de la Cour en cette matière étant précisée à l’article 35 UE, auquel renvoie l’article 46, sous b), UE (arrêt Espagne/Eurojust, précité, point 38).

35      Il résulte ainsi de l’article 230, premier alinéa, CE, tel qu’interprété à la lumière de l’arrêt Les Verts, précité (points 23 à 25), et de l’arrêt Sogelma/AER, précité (points 36 et 37), que le présent recours est recevable.

2.     Sur le fond

36      À l’appui du présent recours, la République italienne invoque, en substance, la violation des articles 1er, 4, 5 et 6 du règlement n° 1, des articles 12 CE, 253 CE et 290 CE, de l’article 6 UE, de l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de l’annexe III du statut, de l’article 22 de la charte, de l’article 12 du RAA, des principes de non-discrimination, de multilinguisme et de protection de la confiance légitime, ainsi qu’un détournement de pouvoir.

37      En premier lieu, le Tribunal examinera la question de savoir si le CESE a compétence pour fixer le régime linguistique de l’avis de vacance litigieux en vertu de l’article 290 CE. En deuxième lieu, sera examinée la question de savoir si le CESE, en établissant ledit régime, a méconnu les articles 1er, 4, 5 et 6 du règlement n° 1. En troisième lieu, sera examinée la question de savoir si la publication intégrale au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux en trois langues seulement ainsi que l’indication dans l’avis de vacance litigieux d’une bonne connaissance de l’anglais et/ou du français parmi les qualifications requises sont contraires aux principes de non-discrimination et de multilinguisme. Dans l’hypothèse où la réponse à cette question serait négative, en quatrième lieu, seraient examinées les allégations de violation du principe de protection de la confiance légitime, de détournement de pouvoir et de défaut de motivation.

 Sur la violation de l’article 290 CE

 Arguments des parties

38      La République italienne estime que le CESE s’est substitué au Conseil pour fixer le régime linguistique de l’avis de vacance litigieux, en violation de l’article 290 CE, alors qu’il aurait dû simplement suivre le régime fixé par le Conseil dans le règlement n° 1. Par ailleurs, aucune des normes qui régissent le CESE ne lui attribueraient de compétences en matière linguistique.

39      Le Royaume d’Espagne soutient les arguments de la République italienne quant à l’absence de compétence du CESE pour modifier le régime linguistique consacré par l’article 290 CE.

40      Le CESE ne conteste pas le fait que seul le Conseil peut adopter les actes qui définissent le régime linguistique de la Communauté, conformément à l’article 290 CE. Toutefois, le CESE expose que le Conseil a laissé, en vertu de l’article 6 du règlement n° 1, une marge aux institutions pour leurs besoins internes dont le CESE aurait fait usage pour la publication de l’avis de vacance litigieux.

 Appréciation du Tribunal

41      Le règlement n° 1, qui porte fixation du régime linguistique des institutions, a été adopté par le Conseil en application de l’article 290 CE. L’article 6 dudit règlement permet expressément aux institutions de déterminer les modalités d’application du régime linguistique dans leurs règlements intérieurs, compétence dans l’exercice de laquelle il convient au demeurant de leur reconnaître une certaine autonomie fonctionnelle, en vue d’assurer leur bon fonctionnement (voir conclusions de l’avocat général M. Poiares Maduro sous l’arrêt Espagne/Eurojust, précité, Rec. p. I‑2079, point 48, et la jurisprudence citée).

42      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que l’avis de vacance litigieux ne méconnaît pas l’article 290 CE, mais a été adopté au titre de la compétence reconnue aux institutions et aux organes communautaires par l’article 6 du règlement n° 1.

43      Il s’ensuit que le moyen tiré de la violation de l’article 290 CE doit être écarté.

 Sur la violation des articles 1er, 4, 5 et 6 du règlement n° 1

 Arguments des parties

44      En premier lieu, la République italienne fait valoir que la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux seulement en allemand, en anglais et en français est contraire aux articles 4 et 5 du règlement n° 1. En effet, des actes de portée générale, tels qu’un avis de vacance, devraient être rédigés dans toutes les langues officielles, conformément à l’article 4 du règlement n° 1 et, ainsi, paraître au Journal officiel dans toutes les langues officielles, conformément à l’article 5 du règlement n° 1.

45      L’expression « textes de portée générale » utilisée à l’article 4 du règlement n° 1 exclurait que cette disposition fasse référence aux seuls actes normatifs. Ainsi, le règlement n° 1 prévoirait que toute manifestation de volonté des institutions susceptible d’intéresser l’ensemble des citoyens de l’Union soit publiée au Journal officiel dans toutes les langues officielles. Or, un avis de vacance serait un acte qui présente ces caractéristiques.

46      La République italienne fait également observer que l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de l’annexe III du statut, qui réglemente le lieu de publication de l’avis de concours et le délai pour introduire des candidatures à un concours, ne fournit aucun élément sur les langues dans lesquelles l’avis doit être publié. Au contraire, l’article 4 du règlement n° 1 prévoirait que les règlements et les autres textes de portée générale doivent être rédigés dans toutes les langues officielles.

47      En second lieu, la République italienne fait valoir que l’indication dans l’avis de vacance litigieux de seulement deux langues comme langues de travail au CESE serait contraire à l’article 1er du règlement n° 1 selon lequel toutes les langues nationales des États membres ont le rang de langue officielle et de langue de travail. Cette limitation introduirait, en outre, une hiérarchie entre les langues des États membres contraire à cet article.

48      Cette limitation ne serait pas non plus justifiée par l’article 6 du règlement n° 1. Certes, il est vrai que cette disposition permettrait aux institutions de déterminer les modalités d’application du régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. Toutefois, cette faculté ne concernerait que le fonctionnement interne des institutions et non le déroulement des concours externes visant à recruter le personnel appelé à travailler au service des institutions. De plus, aucune institution n’aurait, jusqu’à présent, adopté de règlement prévoyant l’usage de langues spécifiques en son sein et encore moins l’usage de l’allemand, de l’anglais ou du français, la seule exception étant prévue pour la Cour de justice qui fait délibérément l’objet d’une mention spéciale à l’article 7 du règlement n° 1.

49      Le Royaume d’Espagne considère que l’article 6 du règlement n° 1 permettrait aux institutions de déterminer les modalités d’application du régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. Cependant, il ajoute, en premier lieu, qu’il n’existerait pas de règles écrites indiquant que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues de travail internes. En deuxième lieu, l’avis de vacance litigieux ne serait pas destiné qu’au personnel des institutions. En troisième lieu, il existerait une jurisprudence de la Cour qui interdirait l’établissement de priorités entre les langues (arrêt de la Cour du 2 avril 1998, EMU Tabac e.a., C‑296/95, Rec. p. I‑1605, point 36).

50      Le CESE conteste l’ensemble des arguments de la République italienne.

 Appréciation du Tribunal

51      Les articles 1er, 4 et 5 du règlement n° 1, invoqués par la requérante, ne sont pas applicables aux relations entre les institutions et leurs fonctionnaires et agents, en ce qu’ils fixent uniquement le régime linguistique applicable entre les institutions et un État membre ou une personne relevant de la juridiction de l’un des États membres (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 5 octobre 2005, Rasmussen/Commission, T‑203/03, RecFP p. I‑A–279 et II‑1287, point 60, et Italie/Commission, précité, point 117). Il en est donc de même s’agissant des relations entre les organes, tel le CESE, et les fonctionnaires et autres agents des Communautés.

52      En effet, les fonctionnaires et les autres agents des Communautés, ainsi que les candidats à de tels postes, relèvent de la seule juridiction des Communautés, s’agissant de l’application des dispositions du statut, y compris celles relatives au recrutement au sein d’une institution (voir, par analogie, arrêts du Tribunal du 7 février 2001, Bonaiti Brighina/Commission, T‑118/99, RecFP p. I‑A‑25 et II‑97, point 13, et Italie/Commission, précité, point 118).

53      L’assimilation aux fonctionnaires et aux autres agents des Communautés des candidats à de tels postes, en matière de régime linguistique applicable, trouve sa justification dans le fait que lesdits candidats entrent en relation avec une institution uniquement aux fins d’obtenir un poste de fonctionnaire ou d’agent pour lequel certaines connaissances linguistiques sont nécessaires et peuvent être exigées par les dispositions communautaires applicables pour pourvoir le poste en cause (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 119).

54      Il en découle que les articles 1er, 4 et 5 du règlement n° 1 ne s’appliquent pas à l’avis de vacance litigieux.

55      L’article 6 du règlement n° 1 permet expressément aux institutions de déterminer les modalités d’application du régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. Dans ces conditions, il relève de la responsabilité des institutions de choisir la langue de communication interne, chaque institution ayant le pouvoir de l’imposer à ses agents et à ceux qui revendiquent cette qualité (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général M. Poiares Maduro sous l’arrêt Espagne/Eurojust, précitées, point 46). Le choix de la langue de publication externe d’un avis de vacance relève également de la responsabilité des institutions (voir, en ce sens, arrêt Italie/Commission, précité, point 122).

56      En conséquence, l’argument selon lequel le CESE aurait utilisé une faculté qui ne lui est pas reconnue par l’article 6 du règlement n° 1 doit être rejeté.

57      Compte tenu de tout ce qui précède, le moyen tiré de la violation des articles 1er, 4, 5 et 6 du règlement n° 1 doit être rejeté.

 Sur la violation des principes de non-discrimination et de multilinguisme

 Arguments des parties

58      En premier lieu, la République italienne estime que la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux en trois langues n’a pas permis à tous les citoyens de l’Union de prendre connaissance de son existence dans des conditions d’égalité, selon le principe de non-discrimination en raison de la nationalité posé par l’article 12 CE. En effet, un avantage compétitif serait conféré aux citoyens de langue allemande, anglaise ou française, par rapport à tous les autres citoyens de l’Union. Cette publication constituerait également une violation du principe de multilinguisme consacré à l’article 6, paragraphe 3, UE, et à l’article 22 de la charte, en ce que chaque citoyen de l’Union aurait le droit d’être informé, dans sa propre langue, des actes communautaires qui affectent ses droits, d’autant plus qu’il lirait le Journal officiel dans sa langue maternelle.

59      La République italienne soutient qu’il importe peu que de nombreux citoyens de l’Union n’appartenant pas aux États membres de langue allemande, anglaise ou française, et notamment des ressortissants italiens, ont postulé pour le poste de secrétaire général du CESE en prenant connaissance de la vacance d’un tel poste par l’avis succinct publié au Journal officiel le même jour que l’avis de vacance litigieux dans les autres langues officielles. Il s’agirait d’un concours de circonstances tout à fait fortuit qui n’éliminerait pas la discrimination.

60      Une discrimination en raison de la nationalité existerait également en ce qui concerne le délai de présentation des candidatures au poste de secrétaire général du CESE. En effet, même si les candidats de langue allemande, anglaise ou française disposaient d’un délai d’un mois à compter de la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux, les autres candidats disposaient d’un délai plus court, car leur prise de connaissance de l’avis serait intervenue après avoir lu l’avis succinct publié au Journal officiel dans leur langue maternelle, lequel renvoie, pour la lecture intégrale du texte de l’avis de vacance litigieux, aux versions allemande, anglaise et française du Journal officiel.

61      La République italienne estime également que la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux en trois langues seulement serait contraire aux termes mêmes de l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de l’annexe III du statut, de l’article 12 du RAA et de l’article 72, paragraphe 2, du règlement intérieur du CESE.

62      La République italienne soutient que la nécessité d’une bonne connaissance de l’anglais ou du français conduirait également à une discrimination flagrante à l’encontre des autres langues, ce qui serait contraire aux principes de non-discrimination et de multilinguisme. Cette exigence produirait, en outre, une discrimination tout aussi manifeste au détriment de tous les ressortissants connaissant, outre leur propre langue, une deuxième et peut-être aussi une troisième, une quatrième et une cinquième langue officielle parmi lesquelles ne se trouvent ni l’anglais ni le français.

63      La République italienne soutient par ailleurs qu’un avis de concours ou un avis de vacance est un texte dont le contenu est exclusivement juridique, par lequel le candidat se fait une idée de ses propres droits et obligations en rapport avec un acte important, tel que la participation à un concours de recrutement dans les institutions. Dès lors, les candidats ayant une connaissance approfondie de l’allemand, de l’anglais ou du français seraient avantagés quant à la lecture d’un avis publié de manière intégrale au Journal officiel dans ces trois langues, par rapport à tout autre candidat n’ayant pas une excellente connaissance d’une de ces trois langues.

64      Le Royaume d’Espagne se range à l’argument invoqué par la République italienne selon lequel la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux en trois langues seulement viole l’article 12 CE et ajoute que ce type de publication sélective introduirait un précédent très grave s’il était appliqué à d’autres domaines, car il aurait pour conséquence que seules trois versions linguistiques du Journal officiel seraient fiables et complètes.

65      Le CESE rappelle qu’il appartient à la République italienne de démontrer que la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux en trois langues seulement aurait empêché tous les citoyens de l’Union de prendre connaissance de l’existence de l’avis dans des conditions d’égalité ou de non-discrimination et relève qu’aucun élément factuel quant à ce prétendu empêchement n’a été avancé.

66      Le fait que de nombreux citoyens de l’Union n’appartenant pas aux États membres de langue allemande, anglaise ou française aient postulé pour le poste de secrétaire général du CESE ne serait pas le résultat d’un concours de circonstances, mais s’expliquerait par la publication au Journal officiel dans toutes les langues officielles de l’avis succinct faisant mention de la publication de l’avis de vacance litigieux.

67      Le CESE considère que n’est pas fondé l’argument de la République italienne selon lequel les candidats dont la « première langue » n’est pas l’allemand, l’anglais ou le français disposeraient d’un délai plus court que celui dont disposent les candidats germanophones, anglophones ou francophones et feraient ainsi l’objet d’une différence de traitement injustifiée. Tout candidat potentiel ayant pris connaissance de l’avis de vacance litigieux par le biais de l’avis succinct paru au Journal officiel dans sa langue maternelle aurait pu se procurer rapidement la version intégrale de l’avis de vacance litigieux. Les personnes éventuellement intéressées seraient des personnes qualifiées ayant acquis une expérience de longue durée en tant que fonctionnaires ou agents au sein des institutions et qui, de ce fait, disposeraient de tous les outils nécessaires pour se procurer facilement une version linguistique donnée du Journal officiel.

68      Le CESE conteste également l’argument de la République italienne selon lequel la limitation à l’anglais et au français conduirait à une discrimination à l’égard des autres langues officielles. Premièrement, l’anglais et le français seraient, avec l’allemand, les langues de travail les plus utilisées au sein des institutions depuis plus de 35 ans. Deuxièmement, les candidats auxquels s’adresse notamment l’avis de vacance litigieux seraient des fonctionnaires ou des agents des Communautés ayant une longue expérience de travail à un haut niveau au sein des institutions et des agences communautaires et seraient donc parfaitement en mesure de comprendre l’avis de vacance litigieux dans ses moindres détails et, partant, d’être pleinement informés de son contenu précis.

 Appréciation du Tribunal

–       Remarques liminaires

69      Il y a lieu d’observer que le présent moyen se divise en deux branches. Dans le cadre de la première branche, le Tribunal est, en substance, appelé à se prononcer sur la question de savoir si la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux en trois langues seulement, à savoir l’allemand, l’anglais et le français, est conforme aux principes de non-discrimination et de multilinguisme. Dans le cadre de la seconde branche, le Tribunal est appelé à se prononcer sur la conformité aux principes de non-discrimination et de multilinguisme de l’indication dans l’avis de vacance litigieux d’une bonne connaissance de l’anglais et/ou du français parmi les qualifications « fortement souhaitée[s] », et non, comme l’invoque la requérante, parmi les qualifications « requises ».

–       Sur la première branche concernant la publication sélective au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux

70      En premier lieu, il convient de relever qu’aucune disposition ni aucun principe de droit communautaire n’impose que des avis de vacance, tels que celui en cause en l’espèce, soient systématiquement publiés au Journal officiel dans toutes les langues officielles (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 115).

71      Il est vrai que le poste à pourvoir visé par l’avis de vacance litigieux est susceptible d’intéresser potentiellement des candidats en provenance de tout État membre. Toutefois, ainsi qu’il a déjà été jugé par la Cour, les nombreuses références dans le traité CE à l’emploi des langues ne peuvent être considérées comme étant la manifestation d’un principe général de droit communautaire assurant à chaque citoyen le droit à ce que tout ce qui serait susceptible d’affecter ses intérêts soit rédigé dans sa langue en toutes circonstances (arrêt de la Cour du 9 septembre 2003, Kik/OHMI, C‑361/01 P, Rec. p. I‑8283, point 82, et arrêt Italie/Commission, précité, point 116).

72      En second lieu, il convient de constater que, si l’administration est en droit d’arrêter les mesures qui lui paraissent appropriées afin de régir certains aspects de la procédure de recrutement du personnel, ces mesures ne doivent pas conduire à une discrimination fondée sur la langue entre les candidats à un poste déterminé (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 127).

73      En effet, l’article 12, paragraphe 1, du RAA s’oppose à ce que l’institution exige des candidats à un poste d’agent temporaire une connaissance parfaite d’une langue officielle déterminée, lorsque cette condition linguistique a pour effet de réserver ledit poste à une nationalité déterminée, sans que cela soit justifié par des raisons ayant trait au fonctionnement du service (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 4 mars 1964, Lassalle/Parlement, 15/63, Rec. p. 57, 73 et 74, et arrêt Italie/Commission, précité, point 129).

74      Il s’ensuit que si le CESE décide de publier au Journal officiel le texte intégral d’un avis de vacance pour un poste de secrétaire général dans certaines langues, il doit, afin d’éviter une discrimination fondée sur la langue entre les candidats potentiellement intéressés par ledit avis, adopter des mesures appropriées afin d’informer l’ensemble desdits candidats de l’existence de l’avis de vacance concerné et des éditions dans lesquelles il a été intégralement publié (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 130).

75      Pour autant que cette condition est remplie, la publication au Journal officiel d’un avis de vacance dans un nombre restreint de langues n’est pas susceptible de conduire à une discrimination entre les différents candidats, s’il est constant que ces derniers possèdent une maîtrise suffisante d’au moins une de ces langues leur permettant de prendre utilement connaissance du contenu dudit avis (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 131).

76      À cet égard, il convient de rappeler la jurisprudence selon laquelle le fait que des documents adressés par l’administration à un de ses fonctionnaires sont rédigés dans une langue autre que la langue maternelle de ce fonctionnaire ou la première langue étrangère choisie par lui n’est constitutif d’aucune violation des droits dudit fonctionnaire, s’il possède une maîtrise de la langue utilisée par l’administration, lui permettant de prendre effectivement et facilement connaissance du contenu des documents en question. Cette conclusion est également valable s’agissant de l’avis de vacance litigieux (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 132, et la jurisprudence citée).

77      Ainsi, lorsque les nécessités du service ou celles de l’emploi l’exigent, l’institution concernée peut légitimement spécifier les langues dont la connaissance approfondie ou satisfaisante est requise (voir, a contrario, arrêt Lassalle/Parlement, précité, p. 73 et 74 ; voir, également, conclusions de l’avocat général M. Lagrange sous cet arrêt, Rec. p. 77, 94). Dans ce dernier cas, la circonstance que le texte de l’avis de vacance litigieux est uniquement disponible dans ces langues n’est pas susceptible de conduire à une discrimination entre les candidats, dès lors qu’ils doivent tous maîtriser au moins une de ces langues.

78      En revanche, la publication au Journal officiel du texte de l’avis de vacance litigieux uniquement dans certaines langues officielles, alors même que des personnes ayant seulement des connaissances d’autres langues officielles seraient recevables à poser leur candidature, est susceptible de conduire, en l’absence d’autres mesures visant à permettre à cette dernière catégorie de candidats potentiels de prendre utilement connaissance du contenu de cet avis, à une discrimination à leur détriment (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 135).

79      En effet, dans cette hypothèse, les candidats en question se trouveraient dans une position moins avantageuse par rapport aux autres candidats, dès lors qu’ils ne seraient pas en mesure de prendre utilement connaissance des qualifications exigées par l’avis de vacance ainsi que des conditions et des règles de la procédure de recrutement. Or, une telle connaissance constitue un préalable nécessaire à la présentation optimale de leur candidature, en vue de maximiser leurs chances d’être retenus pour le poste en cause (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 136).

80      En l’espèce, il ressort des dispositions du point 3 de l’avis de vacance litigieux, telles que citées au point 7 ci-dessus, que la connaissance de l’anglais et/ou du français est seulement « fortement souhaitée », et non exigée. Des candidats potentiels pour le poste de secrétaire général du CESE, maîtrisant de manière approfondie une langue officielle et de manière excellente au moins deux autres langues officielles, autres que l’une des trois langues de publication, avaient donc vocation à concourir, et auraient ainsi pu postuler pour ledit poste, si l’avis de vacance avait été publié dans une langue qu’ils connaissaient et s’ils avaient ainsi été informés de l’existence du poste à pourvoir.

81      De plus, des candidats, même possédant une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français, ne consultent pas nécessairement les éditions du Journal officiel dans l’une de ces trois langues, mais consultent celui dans leur langue maternelle (arrêt Italie/Commission, précité, point 148).

82      Il existe donc un risque important que les candidats potentiellement intéressés par l’avis de vacance litigieux n’aient consulté que les avis publiés dans toutes les langues officielles, c’est-à-dire l’avis succinct du 28 décembre 2007, faisant uniquement mention de la publication au Journal officiel de l’avis de vacance litigieux, et l’avis de rectificatif de l’avis de vacance litigieux du 30 janvier 2008, indiquant seulement que l’avis de vacance litigieux avait été modifié.

83      Il ne saurait être considéré que ces deux avis, qui ne comportent aucune indication importante, telle que la durée et la possibilité de renouvellement du mandat du poste à pourvoir, les conditions d’admission, les qualifications et l’expérience professionnelle requises, les modalités de sélection et la date limite d’introduction des candidatures, sont susceptibles de suffisamment informer les candidats potentiels du contenu de l’avis de vacance litigieux. Or, ainsi qu’il a été indiqué au point 79 ci-dessus, une telle connaissance constitue un préalable nécessaire à la présentation optimale de leur candidature.

84      A fortiori, les candidats ne connaissant ni l’allemand, ni l’anglais, ni le français, mais ayant néanmoins les connaissances linguistiques requises, n’auront jamais eu la possibilité de prendre connaissance du contenu intégral du texte de l’avis de vacance litigieux.

85      Il résulte de tout ce qui précède que la publication, dans les seules éditions allemande, anglaise et française du Journal officiel de l’avis de vacance litigieux constitue une discrimination fondée sur la langue entre les candidats potentiels, contraire à l’article 12 CE.

86      Au demeurant, le CESE a également violé, de manière indirecte, l’article 12 du RAA, dès lors que la publication de l’avis de vacance litigieux dans les seules langues allemande, anglaise et française est susceptible de favoriser, dans le cadre de la procédure de recrutement en tant qu’agent temporaire d’un secrétaire général, des candidats de certaines nationalités, à savoir ceux originaires des pays où ces langues sont parlées en tant que langue maternelle, et de porter préjudice à une partie, au moins, des candidats ressortissants des autres États membres (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 150).

87      À la lumière de ces considérations, il convient d’accueillir la première branche du présent moyen.

88      Dès lors, l’avis de vacance litigieux, publié au Journal officiel dans les seules éditions allemande, anglaise et française, doit être annulé, sans qu’il soit besoin d’analyser la seconde branche du présent moyen, ni les autres moyens invoqués par la République italienne.

 Sur les dépens

89      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, dudit règlement, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens.

90      En l’espèce, le CESE a succombé en ses conclusions. Toutefois, la République italienne n’a pas formulé de conclusions relatives aux dépens. Dans ces conditions, il convient d’ordonner que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      L’avis de vacance d’emploi n° 73/07 concernant un emploi de secrétaire général(e) au secrétariat du Comité économique et social européen (CESE), publié le 28 décembre 2007, tel que rectifié le 30 janvier 2008, est annulé.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Vadapalas

Jürimäe

Truchot

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 31 mars 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.