Language of document : ECLI:EU:T:2009:374

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

30 septembre 2009 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire figurative représentant un point d’exclamation – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Absence de caractère distinctif acquis par l’usage – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 3, du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 3, du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑75/08,

JOOP! GmbH, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par Mes H. Schmidt-Hollburg, W. Möllering, A. Löhde, H. Leo, A. Witte, T. Frank, A. Theil, H.-P. Rühland, B. Willers et T. Rein, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 26 novembre 2007 (affaire R 1134/2007‑1), concernant une demande d’enregistrement d’un signe figuratif comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (septième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, D. Šváby et E. Moavero Milanesi (rapporteur), juges,

greffier : Mme T. Weiler, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 février 2008,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 24 juin 2008,

à la suite de l’audience du 4 juin 2009,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 7 septembre 2006, la requérante, JOOP! GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent des classes 14, 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 14 : « Insignes en métaux précieux, agates, amulettes (bijouterie), épinglettes (bijouterie), bracelets (bijouterie), bracelets de montres, montres-bracelets, cendriers en métaux précieux, barres en métaux précieux, verres en métaux précieux, récipients en métaux précieux (pour le ménage et la cuisine), goussets, bijoux en ambre, ferrures de plats (en métaux précieux), bonbonnières en métaux précieux, broches (bijouterie), brosses en métaux précieux, chronographes (horlogerie), chronomètres (instruments chronométriques), chronoscopes, diamants, boîtes en métaux précieux, poudriers en métaux précieux, tabatières en métaux précieux, boîtes à thé en métaux précieux, boîtes à cigarettes en métaux précieux, sucriers en métaux précieux, articles en doublé (métaux précieux), fils en métaux précieux (bijouterie), pierres précieuses, coquetiers en métaux précieux, horloges électriques, bijoux en ivoire, huiliers en métaux précieux, étuis en métaux précieux, étuis à montres en métaux précieux, étuis et boîtes à cigares en métaux précieux, statuettes en métaux précieux, flacons en métaux précieux, récipients en métaux précieux pour le ménage ou la cuisine, récipients de cuisine en métaux précieux, récipients sacrés en métaux précieux, boîtiers de montres, porte-monnaie en métaux précieux, services en métaux précieux, services de table en métaux précieux, verres, verres de montres, objets en or et en argent (à l’exception de la coutellerie, des fourchettes et des cuillers), fils d’or (bijouterie), objets en imitation or, pierres semi-précieuses, colliers (bijouterie), porte-serviettes en métaux précieux, appareils ménagers en métaux précieux, ornements de chapeaux en métaux précieux, joaillerie, bijouterie, cabarets (plateaux à servir) en métaux précieux, cafetières en métaux précieux (non électriques), services à café en métaux précieux, théières en métaux précieux, coffrets en métaux précieux, caisses en métaux précieux, coffrets à cigares en métaux précieux, éteignoirs en métaux précieux, chandeliers en métaux précieux, bobèches en métaux précieux, chaînes (bijouterie), chaînes de montres, bourses de mailles en métaux précieux, boutons de manchettes, corbeilles en métaux précieux pour le ménage, pinces à cravates, épingles de cravates, brocs (petits) en métaux précieux, appareils de cuisine en métaux précieux, objets d’art en métaux précieux, chandeliers en métaux précieux, médailles, médaillons (bijouterie), pièces, épingles (bijouterie), épinglettes, épingles en métaux précieux, casse-noix en métaux précieux, boucles d’oreilles, perles (bijouterie), poivriers en métaux précieux, garnitures de harnachements en métaux précieux, platine, plaques en métaux précieux, ambroïne, perles en ambroïne, bagues (bijouterie), salières en métaux précieux, pots à sel en métaux précieux, pochettes d’allumettes en métaux précieux, porte-clés, coffrets à bijoux en métaux précieux, boucles en métaux précieux, boîtes de tabac à priser en métaux précieux, ornements de chaussures en métaux précieux, plats en métaux précieux, services en métaux précieux, services de table en métaux précieux, ronds de serviettes en métaux précieux, tamis en métaux précieux, argenterie, argent filé, bijoux en argent, cadrans solaires, spinelles (pierres précieuses), statuettes en métaux précieux, chronomètres, strass (imitations de pierres précieuses), boîtes d’allumettes en métaux précieux, soupières en métaux précieux, tablettes en métaux précieux pour le ménage, services de table en métaux précieux, goussets, tasses en métaux précieux, boules à thé en métaux précieux, services à thé en métaux précieux, passe-thé en métaux précieux, assiettes en métaux précieux, horlogerie, pendules, étuis pour montres, soucoupes en métaux précieux, vases en métaux précieux, réveils, porte-cure-dents en métaux précieux, fume-cigarettes en métaux précieux, fume-cigares en métaux précieux » ;

–        classe 18 : « Porte-documents, classeurs de documents, sacs de bain, sacs d’emballage (pochettes et sacs) en cuir, garnitures de meubles en cuir, portefeuilles, sacs de camping, couvertures, couvertures en peau, coffres pour documents, boîtes en cuir ou en carton-cuir, boîtes et caisses en fibre vulcanisée, filets à provisions, sacs à provisions; étuis pour clés (maroquinerie); gaines de ressorts en cuir, peaux, fourreaux de parapluies, porte-monnaie, bourses de mailles (non en métaux précieux), valises, sacs à main, gibecières, pochettes pour cartes (portefeuilles), coffrets en cuir ou en carton-cuir, sacs-housses pour vêtements pour le voyage, coffres, malles, vanity-cases, parapluies, sacs de voyage, sacs à dos, pochettes en cuir ou en carton-cuir, cartables, sacs d’école, parasols, cannes, sacs à roulettes, havresacs, sacs à outils en cuir, chevreau » ;

–        classe 25 : « Costumes, linge pour bébés, maillots de bain, shorts de bain, sorties de bain, bonnets de bain, sandales de bain, chaussures de bain, bandanas (tissus d’habillement), vêtements en imitation cuir, vêtements pour automobilistes, vêtements, vêtements en papier, ferrures de chaussures, justaucorps (bodys), soutiens-gorges, ceintures (habillement), vêtements de gymnastique, chaussures de gymnastique, bottillons, foulards, gants, pantoufles, blouses, chemises, pantalons, bretelles, chapeaux, vestes, vêtements en jersey, housses pour vêtements, vêtements de confection, chapellerie, cache-corsets, corsets, cravates, bavoirs (non en papier), vêtements en cuir, linge de corps, manteaux, bonneterie, robes de chambre, manchons (habillement), bonnets, vêtements de dessus, couvre-oreilles (habillement), pardessus, pantoufles, parkas, pèlerines, capes (habillement), jupons, vêtements pour cyclistes, manteaux de pluie, jupes, sandales, écharpes, pyjamas, voilettes (habillement), voiles pour la tête et le buste, culottes, bottines à lacets, chaussures, cordonnerie, lacets, bottines de ski, slips, chaussettes, fixe-chaussettes, chaussures de sport, bottes, bottes à lacets, bandeaux (habillement), espadrilles, étoles, vêtements de plage, chaussures de plage, jarretières, bas, collants, chandails, T-shirts, toges (vêtements), vêtements en tricot, tricots, surtouts (vêtements), vêtements de dessous, caleçons, sous-vêtements, linge (vêtements), combinaisons de ski nautique, gilets, vêtements en maille ».

4        Par décision du 22 juin 2007, l’examinateur de l’OHMI a rejeté la demande d’enregistrement de marque communautaire au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

5        Le 20 juillet 2007, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 26 novembre 2007 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En substance, elle a considéré, d’une part, que, eu égard aux produits concernés, le public pertinent percevrait le signe en cause comme un simple éloge publicitaire ou une accroche et non comme une indication de l’origine commerciale des produits visés dans la demande et, d’autre part, que les faits invoqués par la requérante concernant l’usage du signe ne satisferaient pas aux conditions prévues par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 (devenu article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009).

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Arguments des parties

9        À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés de la violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009].

10      S’agissant du moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, la requérante soutient que la chambre de recours a donné une interprétation trop restrictive de ladite disposition, sans tenir compte, dans l’examen concret du caractère distinctif du signe, de la pratique habituelle dans le secteur commercial concerné. À cet égard, la chambre de recours aurait dû prendre en considération le fait que, dans le domaine concerné, le public est habitué à reconnaître des caractères isolés ou de simples formes géométriques en tant que marques.

11      En outre, la chambre de recours n’aurait pas considéré le caractère distinctif du point d’exclamation, accru par son graphisme particulier. Dans ce contexte, elle n’aurait pas non plus considéré la circonstance que les points d’exclamation isolés ne sont pas usuels dans le commerce et dans la publicité des produits visés ni le fait que le signe en cause n’a aucun rapport avec les produits désignés.

12      La requérante fait aussi valoir que la marque demandée présente un caractère au moins aussi distinctif que d’autres caractères et signes de ponctuation enregistrés en tant que marques nationales ou communautaires.

13      La chambre de recours aurait également commis une erreur en ne prenant pas en compte le fait que le public concerné est habitué, d’une part, à la marque principale de la requérante, à savoir la marque JOOP!, et, d’autre part, à la marque demandée, intensément utilisée comme marque au moins depuis l’année 1995. À cet égard, la requérante propose au Tribunal de recueillir le témoignage de son conseiller juridique.

14      S’agissant du moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, la requérante soutient que la chambre de recours a donné une interprétation trop restrictive de cette disposition, puisque l’enregistrement de la marque demandée ne se heurtait pas à un « impératif de disponibilité ».

15      L’OHMI conteste l’ensemble des allégations de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

16      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante invoque formellement deux moyens, tirés de la violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 7, paragraphe 1, sous c) du règlement n° 40/94. Or, bien que la requérante n’invoque pas expressément la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, elle fait également valoir que le public serait habitué à la marque demandée, invoquant de ce fait une erreur dans l’application de ladite disposition, portant sur le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque en question.

17      À cet égard, il convient de rappeler qu’un requérant n’est pas tenu d’indiquer explicitement la règle de droit spécifique sur laquelle il fonde son grief, à condition que son argumentation soit suffisamment claire pour que la partie adverse et le juge communautaire puissent identifier sans difficultés cette règle (arrêt du Tribunal du 10 mai 2006, Galileo International Technology e.a./Commission, T‑279/03, Rec. p. II‑1291, point 41).

18      En l’espèce, l’argumentation de la requérante est suffisamment claire et a permis à l’OHMI et au Tribunal d’identifier sans difficultés la règle invoquée.

19      Par conséquent, il convient d’examiner le bien-fondé du présent recours à la lumière des trois moyens susvisés.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

20      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

21      Ainsi que le Tribunal l’a déjà jugé, les marques visées par ladite disposition sont, notamment, celles qui ne permettent pas au public pertinent de répéter une expérience d’achat, si elle s’avère positive, ou de l’éviter, si elle s’avère négative, lors de l’acquisition ultérieure des produits ou des services en question [arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Rewe-Zentral/OHMI (LITE), T‑79/00, Rec. p. II‑705, point 26]. Tel est le cas, notamment, des signes qui sont communément utilisés pour la commercialisation des produits ou des services concernés.

22      Il n’en demeure pas moins que l’enregistrement d’une marque composée de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par cette marque n’est pas exclu, en tant que tel, en raison d’une telle utilisation. Toutefois, un signe qui remplit d’autres fonctions que celle d’une marque au sens classique n’est distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, que s’il peut être perçu d’emblée comme une indication de l’origine commerciale des produits ou des services visés afin de permettre au public pertinent de distinguer sans confusion possible les produits ou les services du titulaire de la marque de ceux qui ont une autre provenance commerciale [arrêt du Tribunal du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, Rec. p. II‑2235, point 21].

23      Par ailleurs, il résulte d’une jurisprudence constante que ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen desdits produits ou services (arrêts de la Cour du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C‑473/01 P et C‑474/01 P, Rec. p. I‑5173, point 33, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, Rec. p. I‑5719, point 25). Le niveau d’attention du consommateur moyen, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26, et arrêt du Tribunal du 10 octobre 2007, Bang & Olufsen/OHMI (Forme d’un haut‑parleur), T‑460/05, Rec. p. II‑4207, point 32].

24      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner la thèse de la requérante selon laquelle la marque demandée jouit d’un caractère distinctif.

25      Tout d’abord, il convient de relever que la chambre de recours a correctement défini le public pertinent en l’espèce, en constatant que les produits désignés sont d’usage courant et s’adressent à l’ensemble des consommateurs, et en précisant que les produits en métaux précieux relevant de la classe 14 font l’objet d’achats effectués à de plus grands intervalles et avec une plus grande attention.

26      En outre, le motif absolu de refus n’a pas été soulevé quant à une langue spécifique. Par conséquent, le public pertinent par rapport auquel il faut apprécier le caractère distinctif de la marque est le consommateur moyen des produits en cause de tous les États membres, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, dont le degré d’attention sera plus élevé pour les produits en métaux précieux relevant de la classe 14.

27      Ensuite, il convient de relever que c’est à juste titre que la chambre de recours a, en l’espèce, déduit l’absence de caractère distinctif du fait que le consommateur, y compris le consommateur ayant un degré d’attention plus élevé, ne sera pas en mesure de conclure à l’origine des produits désignés en se fondant sur un simple point d’exclamation qui sera plutôt perçu comme un simple éloge ou une accroche. Dès lors, le signe en cause ne sera pas perçu d’emblée comme une indication de l’origine commerciale des produits et ne permettra pas au consommateur de l’associer à des produits particuliers, de sorte que le signe n’est pas à même de remplir la fonction essentielle de la marque, à savoir celle de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit de ceux qui ont une autre provenance.

28      Il convient, en outre, de relever, d’une part, que la demande de marque en cause ne contient aucune indication quant à la reproduction du signe dans une position stable et déterminée sur les produits sur lesquels elle serait apposée, dans des dimensions proportionnées auxdits produits, et, d’autre part, que le point d’exclamation en question ne présente pas un graphisme particulier qui pourrait être reconnu par le public pertinent et différencié du graphisme standard. Contrairement à ce que prétend la requérante, les différences graphiques entre la police utilisée par le signe demandé et la police standard « Times New Roman » ne sont nullement de nature à attirer l’attention du consommateur et à être retenues par celui-ci. Il est sans pertinence, de ce point de vue, que le signe en cause ait été conçu par un designer.

29      Il résulte des considérations qui précèdent que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en concluant que la marque demandée ne pouvait pas être considérée comme étant susceptible d’identifier l’origine commerciale des produits qu’elle désigne et, par conséquent, de remplir la fonction essentielle de la marque.

30      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments invoqués par la requérante.

31      En effet, en premier lieu, l’argument selon lequel le public du secteur commercial concerné serait habitué à reconnaître les abréviations, les caractères et les signes isolés en tant qu’indication de la source commerciale des produits est sans pertinence. En effet, la circonstance que de tels signes soient reconnus en tant que marque par les consommateurs ne signifie pas qu’ils soient pourvus d’un caractère distinctif intrinsèque, mais seulement qu’il est possible qu’ils acquièrent un caractère distinctif à travers leur usage dans le temps ou par le biais d’une campagne de marketing importante.

32      En deuxième lieu, dans la mesure où la requérante invoque la connaissance par le public concerné de sa marque principale JOOP! et de la marque demandée, c’est à juste titre que l’OHMI fait valoir que l’examen du caractère distinctif d’un signe dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 fait abstraction de l’usage antérieur des signes en question, lequel est pris en compte dans le seul cadre de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement.

33      En troisième lieu, la circonstance que les points d’exclamation isolés ne seraient pas habituels dans la publicité générale des produits, à supposer qu’elle soit correcte, est sans conséquence quant à la capacité d’un tel signe à distinguer les produits sur lesquels il est apposé de ceux provenant d’une autre entreprise.

34      Enfin, en quatrième lieu, il est sans pertinence que des signes similaires aient été enregistrés en tant que marque communautaire ou nationale. En effet, il y a tout d’abord lieu de relever qu’aucune des marques invoquées ne reproduit un simple point d’exclamation et la situation n’est, dès lors, pas comparable à celle faisant l’objet de la présente affaire. En outre, d’une part, s’agissant des décisions antérieures de l’OHMI, il suffit de rappeler que, même si des motifs de fait ou de droit figurant dans une décision antérieure de l’OHMI peuvent constituer des arguments à l’appui d’un moyen tiré de la violation d’une disposition du règlement nº 40/94, les décisions que les chambres de recours sont amenées à prendre, en vertu de ce règlement, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci [arrêts de la Cour du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, Rec. p. I‑7975, point 47, et du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec. p. I‑551, point 48 ; arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 39]. D’autre part, il résulte d’une jurisprudence constante que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué par un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Dès lors, la possibilité d’enregistrer un signe en tant que marque communautaire ne doit être appréciée que sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente [arrêts du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47 ; du 5 décembre 2002, Sykes Enterprises/OHMI (REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS), T‑130/01, Rec. p. II‑5179, point 31, et du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 70].

35      Dès lors, il convient de rejeter le présent moyen comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94

36      En vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, les motifs absolus de refus visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), de ce même règlement [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement n° 207/2009] ne s’opposent pas à l’enregistrement d’une marque si celle-ci, pour les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement est demandé, a acquis un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait. En effet, dans l’hypothèse visée par l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement, le fait que le signe constituant la marque en question est effectivement perçu, par le public pertinent, comme une indication de l’origine commerciale d’un produit ou d’un service est le résultat d’un effort économique du demandeur de la marque. Cette circonstance justifie d’écarter les considérations d’intérêt général sous-jacentes au paragraphe 1, sous b) à d), du même article, lesquelles exigent que les marques visées par ces dispositions puissent être librement utilisées par tous, afin d’éviter de créer un avantage concurrentiel illégitime en faveur d’un seul opérateur économique [voir arrêt du Tribunal du 29 avril 2004, Eurocermex/OHMI (Forme d’une bouteille de bière), T‑399/02, Rec. p. II‑1391, point 41, et la jurisprudence citée].

37      En premier lieu, il ressort de la jurisprudence que l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage de la marque exige qu’au moins une fraction significative du public pertinent identifie grâce à la marque les produits ou les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée. Toutefois, les circonstances dans lesquelles la condition liée à l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage peut être regardée comme satisfaite ne sauraient être établies seulement sur la base de données générales et abstraites (arrêt Forme d’une bouteille de bière, précité, point 42). Aux fins de l’appréciation de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage, il convient de tenir compte de facteurs tels que, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles. Si, sur la base de tels éléments, les milieux intéressés, ou, à tout le moins, une fraction significative de ceux-ci, identifient grâce à la marque le produit comme provenant d’une entreprise déterminée, il doit en être conclu que la condition exigée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 pour l’enregistrement de la marque est remplie (voir, en ce sens, arrêt Forme d’une bouteille de bière, précité, point 44 ; voir également, par analogie, arrêts de la Cour du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C‑108/97 et C‑109/97, Rec. p. I‑2779, points 51 et 52, et du 18 juin 2002, Philips, C‑299/99, Rec. p. I‑5475, points 60 et 61).

38      En second lieu, il doit être démontré que le caractère distinctif de la marque a été acquis par un usage antérieur à la date du dépôt de la demande d’enregistrement [arrêts du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY), T‑247/01, Rec. p. II‑5301, point 36, et du 15 décembre 2005, BIC/OHMI (Forme d’un briquet à pierre), T‑262/04, Rec. p. II‑5959, point 66].

39      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, dans la décision attaquée, la chambre de recours a commis une erreur de droit en écartant l’argumentation de la requérante tirée de ce que la marque demandée était connue par le public concerné et aurait dès lors dû être admise à l’enregistrement en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

40      À cet égard, il y a lieu de constater que la requérante a produit pour la première fois devant le Tribunal un certain nombre de documents visant à étayer la preuve de la connaissance de la marque demandée par le public concerné. Dès lors que ces documents n’ont pas été produits devant la chambre de recours, ils ne peuvent pas être pris en compte par le Tribunal. En effet, le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94 (devenu article 65 du règlement n° 207/2009). Dès lors, la fonction du Tribunal ne consiste pas à réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En outre, l’admission de preuves qui n’ont pas été produites au cours de la procédure administrative devant l’OHMI serait également contraire à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 mars 2003, DaimlerChrysler/OHMI (Calandre), T‑128/01, Rec. p. II‑701, point 18].

41      Quant aux documents produits devant la chambre de recours, force est de constater, ainsi que l’a d’ailleurs reconnu la requérante lors de l’audience, qu’ils font uniquement référence au marché allemand. Par conséquent, compte tenu du fait que la marque demandée doit être refusée, parce qu’elle manque de caractère distinctif pour les consommateurs de tous les États membres, l’éventuelle preuve de l’acquisition du caractère distinctif sur le marché allemand ne saurait en tout état de cause suffire.

42      En outre, il y a lieu de constater que les seules preuves portant sur l’usage de la marque demandée sont trois photos de jeans sur lesquels est apposé un morceau de tissu ou une étiquette reproduisant un point d’exclamation. Ces éléments sont à l’évidence dépourvus de toute capacité à prouver la connaissance de la marque demandée par les consommateurs concernés à un moment antérieur à la date de dépôt.

43      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le public concerné serait également habitué à sa marque principale et à son enseigne JOOP!, il y a lieu de rappeler qu’il n’est pas possible d’exclure que la marque demandée ait acquis un caractère distinctif dans le cadre de son usage en tant que partie de la marque principale de la requérante. En effet, l’acquisition d’un caractère distinctif peut résulter aussi bien de l’usage, en tant que partie d’une marque enregistrée, d’un élément de celle-ci que de l’usage d’une marque distincte en combinaison avec une marque enregistrée. Dans les deux cas, il suffit que, en conséquence de cet usage, les milieux intéressés perçoivent effectivement le produit ou le service désigné par la seule marque dont l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée (arrêt de la Cour du 7 juillet 2005, Nestlé, C‑353/03, Rec. p. I‑6135, point 30).

44      Les éléments pouvant démontrer que la marque demandée, utilisée en tant que partie d’une autre marque enregistrée ou en combinaison avec une autre marque enregistrée, s’est révélée susceptible d’identifier le produit ou le service concerné doivent être appréciés globalement et, dans le cadre de cette appréciation, peuvent être pris en considération, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit ou le service comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles (arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, points 49 et 51).

45      En l’espèce, les éléments de preuve soumis à la chambre de recours et visant à établir la notoriété de la marque concernent uniquement l’Allemagne et ne sauraient donc en tout état de cause suffire à prouver l’acquisition d’un caractère distinctif pour les raisons indiquées au point 44 ci-dessus.

46      Il résulte des considérations qui précèdent que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que la requérante n’avait pas démontré que la marque demandée avait acquis un caractère distinctif résultant de l’usage qui en avait été fait.

47      Par conséquent, il convient également de rejeter le présent moyen comme étant non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94

48      S’agissant du moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il suffit de constater que la chambre de recours a refusé l’enregistrement de la marque demandée, parce qu’elle manquait de caractère distinctif intrinsèque et que la preuve du caractère distinctif acquis par l’usage n’avait pas été apportée à suffisance de droit. En revanche, elle n’a à aucun moment fondé la décision attaquée sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), relatif au caractère descriptif.

49      Il s’ensuit que l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 ne fait pas l’objet du présent litige, au sens de l’article 63 dudit règlement, et, partant, du contrôle de légalité que le juge communautaire est tenu d’exercer en l’espèce [voir arrêt du Tribunal 20 mai 2009, CFCMCEE/OHMI (P@YWEB CARD et PAYWEB CARD), T‑405/07 et T‑406/07, non encore publié au Recueil, point 93, et la jurisprudence citée].

50      Dès lors, les arguments de la requérante concernant l’éventuelle absence de caractère descriptif de la marque demandée sont inopérants et il n’est pas nécessaire pour le Tribunal de les apprécier.

51      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son intégralité, sans qu’il y ait lieu d’entendre le conseiller juridique de la requérante comme témoin, le Tribunal ayant pu utilement se prononcer sur la base des conclusions, moyens et arguments développés au cours de la procédure écrite et au vu des documents produits.

 Sur les dépens

52      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      JOOP! GmbH est condamnée aux dépens.

Forwood

Šváby

Moavero Milanesi


Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 septembre 2009.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.