Language of document : ECLI:EU:T:2020:288

DOCUMENT DE TRAVAIL


ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

25 juin 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne figurative Credit24 – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑651/19, 

Brands Up OÜ, établie à Tallin (Estonie), représentée par Me M. Welin, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. V. Ruzek, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 16 juillet 2019 (affaire R 465/2019-2), concernant une demande d’enregistrement du signe figuratif Credit24 comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, U. Öberg (rapporteur) et Mme O. Spineanu-Matei, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 26 septembre 2019,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 19 décembre 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 10 août 2018, la requérante, Brands Up OÜ, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, après limitation intervenue au cours de la procédure devant l’EUIPO, de la classe 36 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Services d’assurance ; services financiers ; transactions financières ; services de biens immobiliers ; prêts ; services de prêts financiers ; services de cartes de crédit et de débit ; fourniture de cartes prépayées et de bons de valeur, services d’évaluation financière ; services financiers et monétaires, services bancaires ; services de dépôt en coffres forts ; collecte de fonds et parrainage financier ; et services de conseil, de consultation et d’information liés aux services précités relevant de cette classe ».

4        Par lettre du 31 août 2018, l’examinateur a informé la requérante que le signe ne pouvait pas être enregistré en tant que marque de l’Union européenne en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001 pour l’ensemble des services visés au point 3 ci-dessus, dans la mesure où celui-ci était descriptif et dépourvu de caractère distinctif.

5        Le 31 octobre 2018, la requérante a fait part de ses observations dans lesquelles elle a, en substance, indiqué ne pas partager la position de l’examinateur.

6        Par décision du 20 décembre 2018, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement du signe figuratif demandé en tant que marque de l’Union, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, ainsi que sur le fondement de l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement.

7        Le 20 février 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de l’examinateur.

8        Par décision du 16 juillet 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, au motif que la marque demandée était descriptive des services visés et dépourvue de caractère distinctif. En substance, tout d’abord, elle a, d’une part, considéré que le terme « credit » et le nombre 24 de ladite marque constituaient une combinaison d’éléments descriptifs des services visés par celle-ci qui se rapportent au financement de crédit et seraient disponibles de manière constante, et, d’autre part, elle a estimé que les éléments figuratifs de cette marque étaient relativement basiques et qu’ils n’étaient pas de nature à infirmer son caractère descriptif. Ensuite, dès lors que la même marque était directement descriptive des services visés, elle a ajouté que celle-ci était également dépourvue de caractère distinctif. Enfin, elle a rejeté le moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, comme irrecevable, dans la mesure où il avait été soulevé pour la première fois devant elle, et, en tout état de cause, comme dépourvu de tout fondement en droit, la requérante n’ayant pas prouvé que la marque en question avait acquis un caractère distinctif par l’usage dans la partie de l’Union où celle-ci en était initialement dépourvue.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        enregistrer le signe figuratif en cause en tant que marque de l’Union européenne ;

–        ordonner que le terme « litigieux » soit supprimé de la décision de l’examinateur de l’EUIPO du 20 décembre 2018, page 1 ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

10      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité des deuxième et troisième chefs de conclusions

11      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal d’enregistrer la marque demandée. Par son troisième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal d’ordonner que le terme « litigieux » soit supprimé de la décision de l’examinateur de l’EUIPO du 20 décembre 2018, page 1. Elle considère que, contrairement à ce qu’avance l’examinateur, elle n’a jamais utilisé une telle expression pour qualifier sa marque et que l’EUIPO se serait exprimé en des termes inappropriés.

12      L’EUIPO soulève l’irrecevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante, sans se prononcer sur la question de la recevabilité du troisième chef de conclusions de la requérante.

13      En ce qui concerne le deuxième chef de conclusions de la requérante, il convient de constater qu’une demande tendant à ce que le Tribunal enregistre la marque demandée vise, en réalité, à ce que le Tribunal réforme la décision attaquée au sens de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, en adoptant la décision que la chambre de recours aurait dû prendre, conformément aux dispositions dudit règlement. Or, les instances de l’EUIPO compétentes en la matière n’adoptent pas de décision formelle constatant l’enregistrement d’une marque de l’Union qui pourrait faire l’objet d’un recours. Par conséquent, la chambre de recours n’est pas compétente pour connaître d’une demande visant à ce qu’elle enregistre une marque de l’Union. Dans ces circonstances, il n’appartient pas davantage au Tribunal de connaître d’une demande de réformation visant à ce qu’il modifie la décision d’une chambre de recours en ce sens [ voir arrêt du 28 novembre 2013, Vitaminaqua/OHMI – Energy Brands (vitaminaqua), T‑410/12, non publié, EU:T:2013:615, point 17 et jurisprudence citée ].

14      En ce qui concerne le troisième chef de conclusions de la requérante, il convient de rappeler, d’une part, qu’il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’EUIPO, auquel il incombe de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 20 et jurisprudence citée]. D’autre part, aux termes de l’article 72, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001, le recours ouvert devant le Tribunal vise à examiner la légalité des décisions des chambres de recours et à obtenir, le cas échéant, l’annulation ou la réformation de celles-ci. La compétence du Tribunal pour connaître d’une demande en réformation doit ainsi être appréciée au regard des compétences qui sont conférées à la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2016, Raimund Schmitt Verpachtungsgesellschaft/EUIPO (Brauwelt), T-56/15, EU:T:2016:618, point 12 et jurisprudence citée].

15      Or, conformément à l’article 71, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, la chambre de recours n’est pas compétente, en l’espèce, pour décider de supprimer le terme « litigieux » de la décision de l’examinateur de l’EUIPO du 20 décembre 2018, page 1. Dès lors, il n’appartient pas davantage au Tribunal de connaître d’une demande de réformation visant à ce qu’il modifie ladite décision de l’examinateur de l’EUIPO en ce sens.

16      Partant, les deuxième et troisième chefs de conclusions de la requérante doivent être rejetés comme irrecevables.

 Sur le fond

17      À l’appui du recours, la requérante invoque trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, et, le troisième, de la violation des principes d’égalité de traitement et de « cohérence de la jurisprudence » en ce qui concerne l’appréciation du caractère distinctif au sens de cette dernière disposition.

18      En ce qui concerne le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir considéré que la marque demandée était descriptive au sens de cette disposition.

19      En premier lieu, s’agissant du terme « credit », la requérante estime qu’il n’est pas directement lié aux services visés par la marque demandée, dans la mesure où il s’agit d’un terme anglais qui n’a de sens dans aucune autre langue et qui, même en anglais, est susceptible de recouvrir de nombreuses significations, si bien que la chambre de recours s’est, à tort, limitée à lui donner celle de « prêt ».

20      En outre, la requérante considère que le terme « credit » n’est pas descriptif de l’ensemble des services visés par la marque demandée, qui incluent de nombreuses activités qui ne sont pas directement rattachées à des opérations de financement de crédit, à l’instar des services de bien immobilier ou des services de dépôt en coffres forts.

21      En deuxième lieu, la requérante estime que le nombre 24 ne sera pas automatiquement perçu par le public pertinent comme signifiant que les services visés par la marque demandée sont disponibles 24 heures sur 24 et peut, au contraire, se référer à de nombreux autres éléments.

22      En troisième lieu, la requérante fait valoir que la combinaison du terme « credit » et du nombre 24 est inhabituelle, s’écarte des règles de grammaire et n’est pas couramment utilisée, de sorte que la marque demandée est apte à distinguer les services visés.

23      En quatrième lieu, la requérante s’appuie sur le fait qu’une précédente version du même signe a été enregistrée comme marque de l’Union en 2007 sous le numéro 005444526 et sur une décision nationale de l’United Kingdom Intellectual Property Office (Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni) du 28 décembre 2018 enregistrant la marque figurative et la marque verbale de la requérante « CREDIT 24 » pour les mêmes services de la classe 36.

24      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

25      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En outre, l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement précise que le paragraphe 1 de cet article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union européenne.

26      Des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative [arrêt du 17 septembre 2019, TrekStor/EUIPO (Theatre), (T-399/18, non publié, EU:T:2019:612), point 16].

27      En interdisant l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne de tels signes ou indications, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (voir arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 31 et jurisprudence citée).

28      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques. L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [voir arrêt du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, EU:T:2005:373, point 37 et jurisprudence citée].

29      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le premier moyen de la requérante.

30      En l’espèce, s’agissant du public pertinent, la chambre de recours a, en substance, estimé, aux points 14 et 15 de la décision attaquée, que les services visés par la marque demandée étaient destinés à la fois au grand public et aux professionnels, faisant preuve d’un niveau d’attention était élevé. Cette conclusion n’est d’ailleurs pas contestée par la requérante.

31      Par ailleurs, il convient de relever que, dans le cadre de son appréciation relative au caractère descriptif du signe, aux points 16 à 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que le terme « credit » et le nombre  24 composant la marque demandée étaient chacun descriptif des services visés, avec, d’une part, ledit terme renvoyant, pour le public pertinent, aux services de financement de prêt, et d’autre part, ledit nombre renvoyant au fait que lesdits services seraient disponibles 24 heures sur 24. Il en résultait, selon elle, une combinaison de deux éléments descriptifs qui était, dès lors, elle-même descriptive. Au point 24 de ladite décision, elle a ajouté que les éléments figuratifs simples de la marque demandée ne détournaient pas l’attention du public pertinent du message descriptif transmis par l’élément verbal de celle-ci. Elle en a déduit que ladite marque était descriptive des services visés dans la demande d’enregistrement au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

32      Dès lors, il convient d’examiner, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, s’il existe, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret entre la marque demandée et les services visés.

33      En l’espèce, la marque demandée est une marque complexe, constituée, d’une part, d’une combinaison du terme « credit » et du nombre 24, et, d’autre part, des éléments figuratifs, consistant en une police de couleur blanche pour ledit terme et rouge pour ledit nombre, le tout sur un arrière-fond grisé.

34      En premier lieu, s’agissant du terme « credit », la chambre de recours a considéré, au point 17 de la décision attaquée, que ledit terme possédait la même signification dans les langues anglaise, française et roumaine, dans lesquelles il est associé à la notion de prêt financier. En outre, elle a estimé que ce terme avait une signification similaire pour l’ensemble du public pertinent anglophone de l’Union et que le fait qu’il ne soit pas orthographié de manière parfaitement régulière n’était pas de nature à porter atteinte à sa compréhension.

35      Ces appréciations de la chambre de recours doivent être validées. En effet, quand bien même le terme « credit » est susceptible d’être associé, comme le fait valoir la requérante, à plusieurs significations différentes, il recouvre en général, et ce, en anglais et dans la majorité des langues de l’Union, une signification identique, à savoir celle de désigner une opération par laquelle un agent, une institution ou toute autre entité met à disposition de quelqu’un d’autre une somme d’argent sous forme de prêt.

36      En l’espèce, le fait que le terme « credit » ne se prononce pas et ne s’écrive pas « crédit », comme en français, n’est pas susceptible de faire obstacle à ce que la partie francophone du public pertinent puisse y associer la notion de financement de prêt. En effet, la différence graphique consistant en la présence d’un « e » et non d’un « é » dans le signe demandé, n’est pas susceptible d’être perceptible phonétiquement, les termes « credit » et « crédit » se prononçant d’une manière quasi similaire.

37      En outre, la compréhension d’un signe peut être présumée si un signe est demandé pour un territoire sur lequel la langue du signe est la langue maternelle de la population du territoire et elle doit être prouvée sur les territoires sur lesquels la langue pertinente n’est pas la langue maternelle de ladite population, à moins qu’une connaissance suffisante de la langue du signe par le public ciblé sur ces territoires soit établie. À l’époque des faits de l’espèce, les consommateurs au Royaume-Uni, en Irlande et à Malte, où l’anglais est une langue officielle, étaient donc susceptibles de comprendre le sens du terme « credit ».

38      Il a été jugé qu’une grande partie des consommateurs dans l’Union connaît un vocabulaire élémentaire de l’anglais [voir, en ce sens, arrêt du 13 octobre 2009, Deutsche Rockwool Mineralwoll/OHMI – Redrock Construction (REDROCK), T-146/08, non publié, EU:T:2009:398, point 53] et que des termes anglais ou l’une de leur signification peuvent ne pas être considérés comme faisant partie d’un tel vocabulaire de base [voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2014, Junited Autoglas Deutschland/OHMI – Belron Hungary (United Autoglas), T-297/13, non publié, EU:T:2014:893, points 32 et 42]. Il convient toutefois de relever que le mot anglais « credit » et sa signification en l’espèce font partie du même vocabulaire de base, et que, dès lors, ils peuvent être compris par une grande partie des consommateurs dans l’Union.

39      Il en découle que la signification du mot « credit » sera comprise, à tout le moins, par la partie du public pertinent qui est anglophone, à savoir les consommateurs au Royaume-Uni, en Irlande et à Malte, ou maitrise le vocabulaire de base de l’anglais, à savoir notamment les consommateurs en Finlande, en Suède, au Danemark, aux Pays-Bas et à Chypre, ainsi que, dans le cas d’espèce, par les consommateurs francophones et roumanophones, dans la mesure où ce mot a, également en français et en roumain, le sens de « crédit ».

40      En tout état de cause, il suffit qu’une marque soit descriptive des services visés dans une partie du territoire de l’Union pour refuser son enregistrement au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

41      La requérante relève une contradiction dans le raisonnement de la chambre de recours, en ce que celle-ci, d’une part, au point 18 de la décision attaquée, a utilisé l’expression « au moins » pour énumérer les langues et les pays dans lesquels le terme « credit » ou la marque demandée était dépourvu de caractère distinctif et a indiqué que le mot « credit » était dépourvu de caractère distinctif pour le public pertinent parlant anglais, français et roumain, et, d’autre part, au point 40 de ladite décision, celle-ci a confirmé que, initialement, ladite marque n’était pas dépourvue de caractère distinctif en France et en Roumanie. Cet argument ne saurait toutefois prospérer, dès lors que la signification dudit terme sera comprise par le public pertinent anglophone, ainsi que cela a été constaté au point 39 ci-dessus, et qu’il suffit, comme le rappelle l’EUIPO, que cette marque soit descriptive dans une partie de l’Union pour qu’un motif de refus trouve application, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c) du règlement 2017/1001. Par ailleurs, aucune contradiction ne saurait être relevée dans le raisonnement de la chambre de recours, en ce que, d’une part, celle-ci a conclu à bon droit, ainsi que cela a été constaté au point 39 ci-dessus, que ce terme était descriptif des services visés par la marque en question pour le public français et roumain et, d’autre part, le public de ces pays n’a initialement pas été répertorié.

42      Dans la mesure où il ressort des considérations qui précèdent que le terme « credit » est susceptible d’être directement associé, par le public pertinent, aux services visés dans la demande d’enregistrement, et ce dans une partie non négligeable du territoire de l’Union, la chambre de recours n’était donc nullement tenue d’indiquer, de manière exhaustive, dans quelles langues et parties de territoire ledit terme devait être considéré comme descriptif.

43      En outre, il n’est par ailleurs pas nécessaire que le signe composant la marque demandée soit effectivement utilisé à des fins descriptives des services pour lesquels la demande est présentée, ou des caractéristiques de ces services. Il suffit qu’il puisse, dans au moins une de ses significations potentielles, être rattaché, pour le public pertinent, à une caractéristique des services concernés [arrêt du 19 décembre 2019, Nosio/EUIPO (BIANCOFINO), T‑54/19, non publié, EU:T:2019:893, point 41].

44      Or, force est de constater que, comme l’a indiqué la chambre de recours au point 20 de la décision attaquée, l’ensemble des services couverts par la marque demandée est susceptible d’être lié ou rattaché à une opération de crédit. En effet, il ne fait aucun doute que les « services de biens immobiliers » ou les « services de collecte de fonds et de parrainage financier » sont associés à des opérations de prêt ou de financement.

45      Par conséquent, le terme « credit » est susceptible, dans au moins une de ses significations potentielles, d’être rattaché, pour le public pertinent, aux services visés par la marque demandée.

46      Il découle de l’ensemble de ces considérations que le terme « credit », pris individuellement, sera compris par le public pertinent comme descriptif de la nature des services visés par la marque demandée, à savoir des opérations de financements de prêt.

47      En deuxième lieu, en ce qui concerne le nombre 24, la chambre de recours a estimé, au point 19 de la décision attaquée, que ledit nombre sera compris de manière immédiate par le public pertinent comme renvoyant à une abréviation de « 24 heures sur 24 » et sera, en conséquence, compris comme une indication sur la disponibilité des services visés par la marque demandée.

48      Cette appréciation de la chambre de recours doit être validée. En effet, le nombre 24 est couramment utilisé, aussi bien dans le monde professionnel que dans le langage courant, comme une abréviation de « 24 heures sur 24 », soit une indication de la disponibilité en temps. En outre, ainsi que ladite chambre l’a constaté, au point 19 de la décision attaquée, il ressort de la jurisprudence que ce nombre est susceptible d’être compris comme une abréviation courante de 24 heures, c’est-à-dire en permanence, soit 24 heures sur 24 [voir l’arrêt du 3 septembre 2015, iNET24 Holding/OHMI (IDIRECT24), T-225/14, non publié, EU:T:2015:585, point 56].

49      En l’espèce, le public pertinent, composé à la fois du grand public et d’un public professionnel, sera donc susceptible d’associer le nombre 24 à une indication relative à la disponibilité, dans le temps, des services visés par la marque demandée. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé, au point 16 de la décision attaquée, que ledit nombre était une abréviation de 24 heures, indiquant que les services commercialisés sous ladite marque seraient accessibles, dans le temps, sans interruption.

50      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que, pris isolément, le terme et le nombre composant l’élément verbal de la marque demandée, à savoir « credit » et « 24 », renvoient à des caractéristiques des services visés par ladite marque, le premier, renseignant sur la nature desdits services et, le second, sur leur disponibilité dans le temps.

51      En troisième lieu, en ce qui concerne l’expression « Credit24 », la chambre de recours a considéré que celle-ci, qui consiste en une combinaison de deux éléments descriptifs des services visés par la marque demandée, sera elle-même descriptive desdits services, étant dépourvue de toute variation inhabituelle. Elle a estimé en outre que les éléments figuratifs de ladite marque étaient relativement basiques et renforçaient le caractère descriptif de l’élément verbal de cette marque demandée.

52      Il ressort de la jurisprudence que, en règle générale, la simple combinaison d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé reste elle-même descriptive desdites caractéristiques, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. Toutefois, une telle combinaison peut ne pas être descriptive, au sens de cette disposition, à condition qu’elle crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la réunion desdits éléments (voir arrêt du 25 février 2010, Lancôme/OHMI, C‑408/08 P, EU:C:2010:92, point 61 et jurisprudence citée).

53      Ainsi, une marque constituée d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive desdites caractéristiques, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot et la simple somme des éléments qui le composent, ce qui suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments (voir arrêt du 25 février 2010, Lancôme/OHMI, C‑408/08 P, EU:C:2010:92, point 62 et jurisprudence citée).

54      Cela n’est pas le cas en l’espèce. En effet, ainsi que cela a été constaté au point 50 ci-dessus, chacun des éléments composant l’expression « credit24 » est descriptif des services visés par la marque demandée. En outre, il convient de relever que, contrairement à ce qu’avance la requérante, la combinaison de tels éléments descriptifs ne comporte pas de modifications inhabituelles, notamment d’ordre syntaxique ou sémantique, qui pourraient faire obstacle à ce que le public pertinent y voit une description des services visés. Au contraire, ces éléments sont accolés de façon naturelle et logique, le nombre 24 renvoyant directement au terme « credit » et venant préciser certaines de ses caractéristiques.

55      Il s’ensuit que la combinaison du terme « credit » et du nombre 24 contenue dans la marque demandée est elle-même descriptive des caractéristiques des services visés par celle-ci.

56      En quatrième lieu, selon la jurisprudence, aux fins de l’appréciation du caractère descriptif du signe en cause, la question décisive est celle de savoir si les éléments figuratifs changent, du point de vue du public pertinent, la signification de la marque demandée par rapport aux produits et services concernés [arrêt du 15 mai 2014, Katjes Fassin/OHMI (Yoghurt-Gums), T‑366/12, non publié, EU:T:2014:256, point 30].

57      Il s’ensuit que, si l’élément verbal d’une marque est descriptif, la marque est, dans son ensemble, descriptive si les éléments graphiques de cette marque ne permettent pas de détourner l’attention du public pertinent du message descriptif transmis par l’élément verbal [ordonnance du 20 novembre 2015, Zitro IP/OHMI (WORLD OF BINGO), T‑202/15, non publiée, EU:T:2015:914, point 22].

58      En l’espèce, le terme « credit » et le nombre 24 composant l’élément verbal de la marque demandée sont écrits dans des polices de deux couleurs différentes avec, d’une part, une police de couleur blanche pour ledit terme, et, d’autre part, une police de couleur rouge pour ledit nombre, le tout sur un arrière-plan gris foncé.

59      Il y a lieu de constater que, pour le public pertinent, le blanc et le rouge sont des couleurs relativement classiques et que le fait qu’elles soient présentées sur un arrière-plan gris n’est pas particulièrement frappant. En outre, l’utilisation d’une police de caractère peu distinctive et l’absence d’éléments fantaisistes ont pour effet de conférer un caractère dominant à l’élément verbal de la marque demandée, renforçant ainsi son impression descriptive.

60      Eu égard à la sobriété des éléments figuratifs de la marque demandée, il y a lieu de conclure que leur présence ne change pas, du point de vue du public pertinent, la signification de ladite marque par rapport aux services concernés.

61      Eu égard à l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de conclure que c’est à juste titre que, au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque demandée présentait un lien suffisamment étroit avec les services de prêt concernés pour tomber sous le coup de l’interdiction posée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

62      Par ailleurs, le Tribunal ne saurait être lié, conformément à la jurisprudence, par les deux décisions évoquées par la requérante, à savoir, d’une part, la décision d’enregistrement d’un signe similaire à la marque demandée comme marque de l’Union en 2007 et, d’autre part, la décision de l’Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni du 28 décembre 2018, quand bien même il s’agirait, comme l’avance la requérante, de la « plus haute autorité de langue anglaise ».

63      En effet, s’agissant de la pratique antérieure de l’EUIPO, celui-ci est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe d’égalité de traitement et le principe de bonne administration qui impliquent, conformément à la jurisprudence, de prendre en considération les décisions déjà adoptées sur des demandes similaires et de s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 73 et 74).

64      Cela étant, les principes d’égalité de traitement et de bonne administration doivent se concilier avec le respect du principe de légalité, ce qui implique que l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet et avoir lieu dans chaque cas concret (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 74, 75 et 77).

65      En outre, il convient de rappeler que, d’une part, selon une jurisprudence constante, la légalité des décisions de la chambre de recours, lesquelles relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire, doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement 2017/1001, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de l’EUIPO, laquelle ne saurait, en tout état de cause, lier le juge de l’Union (voir arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, point 47 et jurisprudence citée).

66      En outre, s’agissant de la décision de l’Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni du 28 décembre 2018, il convient de rappeler que le régime des marques de l’Union européenne est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Dès lors, l’EUIPO et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés par les décisions intervenues dans les États membres, voire dans des pays tiers, qui ne constituent qu’un élément qui, sans être déterminant, peut seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 6 juin 2018, Apcoa Parking Holdings/EUIPO, C‑32/17 P, non publié, EU:C:2018:396, point 34).

67      Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

68      Dans la mesure où il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 s’applique pour que le signe demandé ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne [arrêt du 16 octobre 2014, Larrañaga Otaño/OHMI (GRAPHENE), T‑458/13, EU:T:2014:891, point 31], il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire pour le Tribunal de se prononcer sur le deuxième et le troisième moyen.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

70      En l’espèce, la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Brands UP OÜ est condamnée aux dépens.



Spielmann

Öberg

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 juin 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : le finnois.-