Language of document : ECLI:EU:T:2013:225

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

30 avril 2013(*)

« Marque communautaire – Enregistrement international désignant la Communauté européenne – Marque verbale RELY‑ABLE – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) nº 207/2009 – Motif surabondant »

Dans l’affaire T‑640/11,

Boehringer Ingelheim International GmbH, établie à Ingelheim am Rhein (Allemagne), représentée par Mes V. von Bomhard, A. Renck et C. Steudtner, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 30 septembre 2011 (affaire R 756/2011-4), concernant l’enregistrement international désignant la Communauté européenne du signe verbal RELY-ABLE,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. J. Azizi, président, S. Frimodt-Nielsen et Mme M. Kancheva (rapporteur), juges,

greffier : M. T. Weiler, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 décembre 2011,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 9 mars 2012,

à la suite de l’audience du 4 février 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 27 avril 2010, la requérante, Boehringer Ingelheim International GmbH, a obtenu, auprès du bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), un enregistrement international désignant la Communauté européenne pour le signe verbal RELY-ABLE.

2        Les services pour lesquels l’enregistrement international a été obtenu relèvent des classes 38, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 38 : « Fourniture d’accès par le biais d’Internet à des informations médicales et pharmaceutiques concernant des préparations pharmaceutiques » ;

–        classe 41 : « Publication de produits imprimés (non à des fins promotionnelles) comprenant les résultats d’essais cliniques de préparations pharmaceutiques (également sous forme électronique) » ;

–        classe 42 : « Réalisation d’essais cliniques de produits pharmaceutiques ».

3        Le 5 août 2010, l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) a reçu notification de l’enregistrement international. Les indications de l’enregistrement international prévues à l’article 152, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1) ont été publiées au Bulletin des marques communautaires n° 145/2010, du 6 août 2010.

4        Par décision du 2 février 2011, l’examinateur a refusé la protection de la marque en cause dans la Communauté pour tous les services couverts par l’enregistrement international, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

5        Le 4 avril 2011, la requérante a formé un recours contre la décision de l’examinateur auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009.

6        Par décision du 30 septembre 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours a rejeté le recours. Selon elle, le signe verbal RELY-ABLE était dépourvu de caractère distinctif, au motif qu’il ne pouvait être perçu et mémorisé par le consommateur pertinent comme une marque et que le signe dans son ensemble serait perçu comme n’étant rien de plus qu’un message promotionnel visant à mettre en évidence un aspect positif majeur des services, à savoir qu’ils sont fiables. En particulier, la chambre de recours s’est prononcée sur deux caractéristiques du signe demandé aux yeux du public pertinent : la graphie déformée et le message promotionnel. D’une part, elle a considéré que le public pertinent percevrait directement et sans équivoque le signe RELY-ABLE comme une graphie volontairement déformée du mot anglais « reliable » (fiable) pour le rendre plus « accrocheur », mais ne percevrait pas cette graphie comme étant particulièrement fantaisiste ou arbitraire. D’autre part, elle a estimé que le public pertinent percevrait directement le message transmis par le signe RELY-ABLE dans son ensemble, comme une banale information élogieuse sur une caractéristique majeure des services d’essais cliniques de produits pharmaceutiques, à savoir leur fiabilité. Cette évidente signification promotionnelle du signe RELY-ABLE éclipserait toute impression que celui-ci pût indiquer une origine commerciale. En réalité, les graphies déformées seraient devenues une caractéristique courante des messages promotionnels.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

10      Le moyen unique de la requérante s’articule, en substance, en deux branches, la première, tirée de ce que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la spécialisation du public pertinent et de la spécificité des services concernés, et la seconde, tirée de ce que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des caractéristiques distinctives alléguées du signe demandé.

11      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

12      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

13      Il ressort d’une jurisprudence constante que le caractère distinctif d’une marque au sens de cet article signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (arrêts de la Cour du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C‑473/01 P et C‑474/01 P, Rec. p. I‑5173, point 32 ; du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI, C‑304/06 P, Rec. p. I‑3297, point 66, et du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, Rec. p. I‑535, point 33), afin de permettre au consommateur qui achète le produit désigné par la marque de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive, ou un autre choix si elle s’avère négative [arrêts du Tribunal du 5 décembre 2002, Sykes Enterprises/OHMI (REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS), T‑130/01, Rec. p. II‑5179, point 18, et du 11 décembre 2012, Fomanu/OHMI (Qualität hat Zukunft), T‑22/12, non publié au Recueil, point 13]. Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêts Procter & Gamble/OHMI, précité, point 33 ; Eurohypo/OHMI, précité, point 67, et Audi/OHMI, précité, point 34).

14      Pour constater l’absence de caractère distinctif, il suffit que le contenu sémantique du signe verbal en cause indique au consommateur une caractéristique du produit ou du service qui, sans être précise, procède d’une information à caractère promotionnel ou publicitaire que le public pertinent percevra en premier lieu en tant que telle, plutôt que comme une indication de l’origine commerciale des services [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, Rec. p. II‑2235, point 30, et la jurisprudence citée ; du 12 mars 2008, Suez/OHMI (Delivering the essentials of life), T‑128/07, non publié au Recueil, point 20, et la jurisprudence citée, et du 17 avril 2008, Nordmilch/OHMI (Vitality), T‑294/06, non publié au Recueil, point 23]. De plus, la seule absence d’information, dans le contenu sémantique du signe verbal demandé, relative à la nature des produits visés, ne saurait être suffisante pour conférer un caractère distinctif à ce signe [arrêt du Tribunal du 30 juin 2004, Norma Lebensmittelfilialbetrieb/OHMI (Mehr für Ihr Geld), T‑281/02, Rec. p. II‑1915, point 31, et arrêt Vitality, précité, point 23].

15      En l’espèce, le Tribunal relève d’emblée que la chambre de recours a considéré que le public pertinent était le consommateur professionnel anglophone de l’Union européenne, spécialisé dans le domaine pharmaceutique, lequel fait montre d’un niveau d’attention élevé (point 11 de la décision attaquée), et que les services concernés consistaient principalement en essais cliniques de produits pharmaceutiques et, accessoirement, en services d’information concernant des préparations pharmaceutiques (point 13 de la décision attaquée). Il y a lieu de retenir ces appréciations de la chambre de recours, dont, au surplus, il ressort du dossier qu’elles ne sont pas contestées par la requérante. En effet, il convient d’observer que la requérante reproche précisément à la chambre de recours de n’avoir pas tenu compte, dans son appréciation ultérieure du caractère distinctif, de la spécialisation du public pertinent et de la spécificité des services concernés. Par ailleurs, la requérante ne conteste pas non plus la conclusion de la chambre de recours au contenu élogieux voire au message promotionnel du terme « reliable », mais reproche à la chambre de recours d’avoir également appliqué une telle conclusion au signe RELY-ABLE, qu’elle considère doté de caractère distinctif dans l’esprit du public pertinent pour les services concernés.

16      Dans la première branche du moyen unique, tirée de ce que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la spécialisation du public pertinent et de la spécificité des services concernés, la requérante fait, en substance, valoir trois griefs.

17      Par un premier grief, la requérante allègue que les marques se rapportant aux essais cliniques ne seraient pas perçues par ouï-dire, mais uniquement par écrit, ce qui conférerait une prédominance à la perception visuelle sur la perception phonétique dans le domaine des essais cliniques.

18      À cet égard, le Tribunal constate que la chambre de recours n’a nullement méconnu l’importance en l’espèce de la perception visuelle du signe en cause par le public pertinent. Ainsi, il convient d’observer que la chambre de recours, aux points 13 et 14 de la décision attaquée, a témoigné d’une attention particulière à la graphie volontairement déformée du mot anglais « reliable », et force est de constater que le terme « graphie » se réfère à la perception visuelle plutôt que phonétique. Dès lors, l’allégation de la requérante quant à la prédominance de la perception visuelle sur la perception phonétique dans le domaine des essais cliniques, même à la supposer fondée, ne saurait remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours en l’espèce, laquelle a dûment tenu compte de la perception visuelle du signe en cause par le public pertinent pour les services concernés.

19      Par un deuxième grief, la requérante soutient que la graphie déformée du signe RELY-ABLE est inhabituelle, fantaisiste et frappante aux yeux du public, spécialisé et hautement attentif, pertinent pour les services concernés.

20      À cet égard, le Tribunal rappelle que, selon la jurisprudence, pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009, les graphies déformées ne contribuent généralement pas à surmonter le refus d’enregistrement résultant du fait que le contenu du signe est immédiatement compréhensible comme étant élogieux ou descriptif [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 7 juin 2005, Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft/OHMI (MunichFinancialServices), T‑316/03, Rec. p. II‑1951, point 37 ; du 16 septembre 2008, ratiopharm/OHMI (BioGeneriX), T‑48/07, non publié au Recueil, point 30, et du 26 novembre 2008, En Route International/OHMI (FRESHHH), T‑147/06, non publié au Recueil, point 19]. Par ailleurs, une graphie déformée ne constitue généralement pas la preuve d’un élément d’ordre créatif susceptible de distinguer les produits de la requérante de ceux d’autres entreprises [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II‑433, point 25, et la jurisprudence citée]. Enfin, lorsque la graphie déformée d’une marque verbale n’est pas perceptible phonétiquement, elle est sans incidence sur l’éventuel contenu conceptuel que le public pertinent attribuera à ladite marque [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 novembre 2008, Avon Products/OHMI (ANEW ALTERNATIVE), T‑184/07, non publié au Recueil, point 26]. À cet égard, il sied de noter que l’allégation de la requérante, prétendument fondée sur l’arrêt ANEW ALTERNATIVE (précité, point 16), selon laquelle une graphie déformée fantaisiste ou frappante serait automatiquement distinctive, ne ressort pas de l’appréciation du Tribunal, mais des arguments de la requérante en cette affaire, dont le recours fut voué au rejet.

21      En l’espèce, il convient d’observer que la graphie déformée de l’adjectif « reliable » dans le signe en cause est perceptible visuellement plutôt que phonétiquement, de sorte qu’il n’existera aucune ambiguïté, sur le plan conceptuel, pour le public pertinent. Même visuellement, il appert que la requérante a simplement décomposé l’adjectif « reliable » en son radical verbal « rely » et son suffixe adjectival « able ». Or, la décomposition d’un adjectif en son radical verbal et son suffixe adjectival n’est pas inhabituelle dans une langue telle que l’anglais, et l’est d’autant moins pour le public pertinent, constitué de spécialistes hautement attentifs, ainsi que le reconnaît la requérante dans ses écritures. Il s’ensuit que le signe RELY-ABLE sera, malgré la graphie déformée, immédiatement perçu et compris par le public pertinent, même spécialisé, comme présentant le sens de « fiable » (reliable), sans qu’une quelconque herméneutique soit requise.

22      Or, le sens du terme « fiable » (reliable) est manifestement élogieux ou promotionnel pour les services concernés, notamment les essais cliniques. En effet, il est un fait notoire, d’ailleurs reconnu par la requérante lors de l’audience, que la fiabilité constitue une des caractéristiques principales des essais cliniques.

23      Dès lors, il y a lieu de constater que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant, d’une part, que le public pertinent percevrait directement le signe RELY‑ABLE comme une graphie volontairement déformée du mot anglais « reliable » (fiable), et non comme une graphie particulièrement inhabituelle, fantaisiste ou frappante qui fût de nature à conférer à ce signe un caractère distinctif, et, d’autre part, que le sens élogieux ou promotionnel du signe RELY‑ABLE, immédiatement perçu et compris comme tel par le public pertinent, éclipsait toute impression que le signe pût indiquer l’origine commerciale des services concernés et ne serait pas mémorisé par le public pertinent comme une indication de provenance.

24      Rien dans la requête n’indique en quoi cette appréciation serait remise en cause par la spécificité des services concernés ou par la spécialisation du public pertinent et son niveau d’attention élevé. Au contraire, la spécialisation du public pertinent dans le domaine médical ou pharmaceutique lui permettra de percevoir immédiatement dans le signe RELY-ABLE une référence élogieuse ou promotionnelle au caractère « fiable » (reliable) des services concernés, notamment des essais cliniques.

25      Par un troisième grief, la requérante conteste que les graphies déformées soient devenues courantes dans les messages promotionnels pour ce qui concerne les essais cliniques, lesquels ne pourraient être comparés à des produits de consommation courante.

26      Or, le Tribunal relève que l’assertion de la chambre de recours, au point 15 in fine de la décision attaquée, selon laquelle, « en réalité, les graphies déformées sont devenues une caractéristique courante des messages promotionnels » constitue un motif surabondant de la décision attaquée. En effet, tout d’abord, il convient d’observer que la décision de la chambre de recours se fonde sur une appréciation particulière et concrète de l’absence de caractère distinctif du signe RELY-ABLE, en considération des caractéristiques de ce signe, spécialement la graphie déformée et le message promotionnel, dans le cadre de l’application de la disposition législative aux termes de laquelle sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. Ainsi, la décision de la chambre de recours ne dépend nullement de l’application d’une loi générale et abstraite sur la relation entre les graphies déformées et les messages promotionnels dans les méthodes contemporaines de commercialisation. En outre, l’emploi de l’expression « en réalité » (« in fact » en anglais, langue originale de la décision attaquée) en son sein et sa position incidente en fin de paragraphe indiquent que cette assertion ne constitue guère un motif décisif, mais bien un motif surabondant de la décision attaquée. Enfin, et au demeurant, la requérante elle-même soutient, au point 9 de la requête, que la chambre de recours a commis une erreur en supposant que l’aspect selon lequel les graphies déformées seraient « une caractéristique fréquente des messages promotionnels » revêtait quelque importance en l’espèce. Par cette affirmation, la requérante reconnaît, implicitement, mais nécessairement, que cet aspect de la décision attaquée en constituait un motif surabondant.

27      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence établie, un motif, même dans l’hypothèse où il s’avérerait erroné, ne saurait justifier l’annulation de l’acte qui en est entaché s’il revêt un caractère surabondant et s’il existe d’autres motifs qui suffisent à fonder cet acte (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 avril 2011, Grèce/Commission, C‑321/09 P, non publié au Recueil, point 61, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 20 septembre 2012, France/Commission, T‑154/10, non encore publié au Recueil, point 99). Selon une jurisprudence également constante, les griefs dirigés contre des motifs surabondants d’une décision ne sauraient entraîner l’annulation de cette décision et sont donc inopérants (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 8 avril 2008, Saint-Gobain Glass Deutschland/Commission, C‑503/07 P, Rec. p. I‑2217, point 62 ; arrêt de la Cour du 29 mars 2011, Anheuser-Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, Rec. p. I‑2131, point 211 ; ordonnances de la Cour du 9 juin 2011, TF1/Commission, C‑451/10 P, non encore publiée au Recueil, point 63, et du 13 septembre 2011, Wilfer/OHMI, C‑546/10 P, non encore publiée au Recueil, point 39).

28      Le présent grief étant dirigé contre un motif surabondant de la décision attaquée, il doit être rejeté comme étant inopérant. Par corollaire, il n’y a pas lieu d’examiner si l’assertion de la chambre de recours est ou non erronée.

29      Partant, les griefs de la première branche du moyen unique ne sauraient prospérer.

30      Dans la seconde branche du moyen unique, tirée de ce que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des caractéristiques distinctives alléguées du signe en cause, la requérante fait, en substance, valoir trois griefs.

31      Sur le premier grief, pris de ce que le signe RELY-ABLE serait caractérisé par la juxtaposition grammaticalement incorrecte des termes « rely » et « able », il convient de relever, en l’espèce, que la graphie déformée du signe RELY-ABLE ne constitue nullement la juxtaposition de deux termes, mais bien, comme indiqué au point 21 ci-dessus, la décomposition de l’adjectif « reliable » en son radical verbal « rely » et son suffixe adjectival « able », laquelle n’est guère inhabituelle pour le public pertinent. Dès lors, c’est en vain que la requérante se réfère à la jurisprudence de la Cour qui traite de la combinaison de deux mots dépourvus de caractère distinctif (arrêt de la Cour du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619), laquelle s’avère dénuée de pertinence pour la graphie déformée d’un seul mot non distinctif, comme en l’espèce.

32      Sur le deuxième grief, par lequel la requérante se réfère à la jurisprudence du Tribunal sur l’utilisation d’un trait d’union dans le cadre des motifs relatifs de refus prévus à l’article 8 du règlement n° 207/2009, il convient de considérer que la conclusion selon laquelle l’impression globale produite par un signe est « plus frappante » dans le contexte de l’appréciation d’une similitude au sens de l’article 8 dudit règlement n’offre pas d’orientation pour répondre à la question distincte de savoir si un trait d’union supplémentaire pourrait rendre distinctif le signe demandé au sens du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement. En l’espèce, force est de constater que le trait d’union séparant le radical verbal « rely » et le suffixe adjectival « able » ne saurait rendre distinctif le signe RELY-ABLE.

33      Sur le troisième grief, par lequel la requérante se réfère à d’autres enregistrements communautaires dont elle est titulaire, y compris la marque RE-LY, il convient de rappeler, ainsi qu’il est dit à bon droit au point 16 de la décision attaquée, que la légalité des décisions de la chambre de recours, lesquelles relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire, doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement n° 207/2009, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI, laquelle ne saurait, en tout état de cause, lier le juge de l’Union [voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, Rec. p. I‑7975, point 47, et du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec. p. I‑551, point 48 ; arrêt du Tribunal du 20 septembre 2011, Couture Tech/OHMI (Représentation du blason soviétique), T‑232/10, non encore publié au Recueil, point 79].

34      Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec. p. I‑1541, point 77, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 8 novembre 2012, Hartmann/OHMI (Nutriskin Protection Complex), T‑415/11, non publié au Recueil, point 36]. Cette jurisprudence applique au cas spécifique de l’enregistrement d’une marque communautaire un principe général selon lequel il ne saurait y avoir d’égalité dans l’illégalité.

35      Partant, les griefs de la deuxième branche du moyen unique ne sauraient être accueillis.

36      Il ressort de ce qui précède que la marque en cause est dépourvue de caractère distinctif et que son enregistrement se heurte au motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

37      Dès lors, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en rejetant le recours contre la décision de refus de protection, après avoir conclu, au point 17 de la décision attaquée, que le signe verbal RELY-ABLE était dépourvu de caractère distinctif, au motif qu’il ne pouvait être perçu et mémorisé par le consommateur pertinent comme une marque, et que le signe dans son ensemble serait perçu comme n’étant rien de plus qu’un message promotionnel visant à mettre en évidence un aspect positif majeur des services, à savoir qu’ils sont fiables.

38      Au vu de l’absence de fondement ou, le cas échéant, du caractère inopérant des griefs invoqués par la requérante au sein de son moyen unique d’annulation, il y a lieu de rejeter le présent recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

39      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Boehringer Ingelheim International GmbH est condamnée aux dépens.

Azizi

Frimodt Nielsen

Kancheva

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 avril 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.