Language of document : ECLI:EU:T:2013:219

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

25 avril 2013(*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant un dispositif de nettoyage – Marque communautaire tridimensionnelle représentant un dispositif de nettoyage muni d’un vaporisateur et d’une éponge – Déclaration de nullité »

Dans l’affaire T‑55/12,

Su-Shan Chen, établie à Sanchong (Taïwan), représentée par Me C. Onken, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

AM Denmark A/S, établie à Kokkedal (Danemark), représentée par Me C. Type Jardorf, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 26 octobre 2011 (affaire R 2179/2010-3), relative à une procédure de nullité entre AM Denmark A/S et Su-Shan Chen,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. A. Dittrich, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. M. Prek (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 février 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 16 mai 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 27 avril 2012,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Su-Shan Chen, est titulaire du dessin ou modèle communautaire déposé le 24 octobre 2008 et enregistré sous le numéro 1027718-0001 auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

2        Le dessin ou modèle contesté, destiné à être incorporé dans des dispositifs de nettoyage, est représenté comme suit :

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3        Le dessin ou modèle contesté a été publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires n° 236/2008, du 11 novembre 2008.

4        Le 6 octobre 2009, l’intervenante, AM Denmark A/S, a présenté devant l’OHMI une demande en nullité du dessin ou modèle contesté, fondée sur les articles 4 à 9 et sur l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1). Dans la demande en nullité, l’intervenante alléguait qu’il était fait usage dans le dessin ou modèle contesté d’un signe distinctif au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous e), dudit règlement.

5        À l’appui de sa demande en nullité, l’intervenante a invoqué la marque communautaire tridimensionnelle enregistrée sous le numéro 5185079, le 13 février 2008, reproduite ci-après :

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6        La marque antérieure a été enregistrée pour les produits des classes 3 et 21 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits nettoyants (non pour procédés de fabrication ni à usage médical), y compris pour machines de bureau, appareils audio et vidéo et ordinateurs ; liquides nettoyants (non pour procédés de fabrication ni à usage médical), y compris liquides nettoyants pour machines de bureau, lecteurs CD, aiguilles de tourne-disques, lecteurs vidéo, magnétophones, têtes de magnétophones ; liquides nettoyants pour écrans d’ordinateurs, filtres en verre pour écrans d’ordinateurs, claviers, souris, imprimantes et copieurs, unités de disques, DVD, CD, CD-ROM ; serviettes imprégnées de produits nettoyants pour machines de bureau, DVD, CD ; produits polissants pour surfaces plastiques d'ordinateurs, imprimantes et scanners ; chiffons jetables imprégnés » ;

–        classe 21 : « Matériel et récipients de nettoyage, y compris éponges, brosses, chiffons, torchons, balais à franges ».

7        Par décision du 17 septembre 2010, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité sur le fondement de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002. Tout d’abord, elle a estimé que le dessin ou modèle contesté incluait la forme tridimensionnelle d’un dispositif de nettoyage et que ce dernier pouvait être perçu comme étant un signe. Ensuite, elle a considéré que ledit signe et la marque antérieure étaient similaires. Enfin, elle a conclu que, en raison de la similitude entre les signes en cause et de l’identité des produits, il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

8        Le 8 novembre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 55 à 60 du règlement n° 6/2002, contre la décision de la division d’annulation.

9        Par décision du 26 octobre 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours a confirmé que le dessin ou modèle contesté devait être déclaré nul en vertu de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002.

10      En premier lieu, elle a relevé que les formes géométriques, les dimensions ainsi que les formes de la marque antérieure et du dessin ou modèle contesté étaient hautement similaires et en partie presque identiques, et que les légères modifications contenues dans le dessin ou modèle contesté étaient d’importance secondaire. Elle a ainsi considéré que le dessin ou modèle contesté incluait le signe tridimensionnel antérieur et qu’il était ainsi fait usage de la marque antérieure dans le dessin ou modèle contesté, conformément à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002.

11      En second lieu, elle a procédé à une analyse du risque de confusion. Tout d’abord, après avoir souligné que les produits couverts par la marque antérieure s’adressaient au grand public et que le territoire pertinent aux fins de l’analyse du risque de confusion était celui de l’ensemble de l’Union européenne, elle a constaté que les produits dans lesquels le dessin ou modèle contesté était destiné à être incorporé étaient inclus dans la liste des produits visés par la marque antérieure et qu’ils étaient donc identiques.

12      Ensuite, elle a estimé que la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté ne pouvaient être comparés que sur le plan visuel et non sur les plans phonétique et conceptuel. En effet, elle a considéré qu’aucun des signes ne contenait un élément verbal, qu’ils ne se prêtaient pas à une description verbale simple et courte et qu’ils ne renvoyaient pas à un quelconque concept particulier.

13      Par ailleurs, elle a estimé que la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté étaient similaires sur le plan visuel, en précisant, à cet égard, que le public accordait moins d’attention aux légers ajouts et modifications apportés au dessin ou modèle contesté et davantage à sa forme globale.

14      En outre, tout en faisant observer que le public pouvait ne pas considérer le dispositif de nettoyage comme une indication de son origine, elle a néanmoins relevé que, eu égard au fait que la marque antérieure avait été enregistrée et n’avait pas été déclarée nulle au motif d’une absence de caractère distinctif, il convenait de présumer qu’elle possédait un degré minimal de caractère distinctif nécessaire à son enregistrement.

15      Enfin, elle a conclu que, compte tenu de la similitude du dessin ou modèle contesté avec la marque antérieure et l’identité des produits, il existait un risque de confusion et que le faible degré de caractère distinctif de la marque antérieure ne pouvait suffire à exclure ledit risque.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI et l’intervenante aux dépens.

17      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

18      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

19      La requérante soulève deux moyens. Le premier est tiré de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002 et de l’interprétation erronée de la notion d’« usage ». Le second moyen est tiré de la violation de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002 et d’une interprétation erronée de la notion d’« usage »

20      La requérante fait valoir que la marque antérieure n’est pas utilisée dans le dessin ou modèle contesté. Tout d’abord, elle estime que certains éléments de la marque antérieure sont absents du dessin ou modèle contesté et d’autres éléments y sont ajoutés. Ensuite, elle fait observer que la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté ont des proportions totalement différentes et que les différences concernant la forme géométrique ainsi que les dimensions de la marque et du dessin ou modèle contesté produisent une impression d’ensemble très différente. Enfin, elle soutient que l’OHMI n’était pas obligé de supposer que la marque antérieure possédait au moins le degré minimal de caractère distinctif nécessaire à son enregistrement.

21      L’OHMI et l’intervenante contestent ces arguments.

22      Il convient de rappeler que l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002 prévoit qu’un dessin ou modèle peut être déclaré nul s’il est fait usage d’un signe distinctif dans un dessin ou modèle ultérieur et que le droit communautaire ou la législation de l’État membre concerné régissant ce signe confère au titulaire du signe le droit d’interdire cette utilisation.

23      Il y a également lieu de souligner que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, le motif de nullité visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002 n’implique pas nécessairement la reproduction intégrale et détaillée d’un signe distinctif antérieur dans un dessin ou modèle communautaire ultérieur. En effet, quand bien même certains éléments du signe en question seraient absents dans le dessin ou modèle communautaire contesté ou d’autres éléments y seraient ajoutés, il pourrait s’agir d’un « usage » dudit signe, notamment lorsque les éléments omis ou ajoutés sont d’une importance secondaire [arrêt du Tribunal du 12 mai 2010, Beifa Group/OHMI – Schwan-Stabilo Schwanhäußer (Instrument d'écriture), T‑148/08, Rec. p. II‑1681, point 50].

24      Cela est d’autant plus vrai que, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence bien établie, le public ne garde en mémoire qu’une image non imparfaite des marques enregistrées dans les États membres ou des marques communautaires [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26, et arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, point 33]. La jurisprudence précise que cette appréciation est valable pour tout type de signe distinctif. Par conséquent, en cas d’omission de certains éléments secondaires d’un signe distinctif, utilisé dans un dessin ou modèle communautaire ultérieur, ou en cas d’ajout de tels éléments à ce même signe, le public pertinent ne se rendra pas nécessairement compte de ces modifications du signe en question. Au contraire, il pourra penser qu’il est fait usage dudit signe, tel qu’il l’a gardé en mémoire, dans le dessin ou modèle communautaire ultérieur [arrêt Instrument d’écriture, point 23 supra, point 50].

25      En l’espèce, il y a lieu de constater, ainsi qu’il ressort des points 16 et 17 de la décision attaquée, que la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté consistent tous deux en un dispositif de nettoyage ayant une forme rectangulaire compacte arrondie sur les bords, qui héberge un vaporisateur d’un côté et une éponge cylindrique de l’autre.

26      Il y a lieu d’approuver l’appréciation de la chambre de recours au point 18 de la décision attaquée, selon laquelle les formes géométriques et les dimensions de la marque antérieure et du dessin ou modèle contesté sont hautement similaires et en partie identiques.

27      Certes, il doit être admis que le dessin ou modèle contesté présente certaines différences et certains ajouts par rapport à la marque antérieure. Toutefois, ceux-ci se limitent à un capuchon transparent, une partie inférieure transparente des deux côtés du corps principal ainsi qu’un fin couvercle en plastique placé autour de l’éponge. L’OHMI souligne à juste titre que, eu égard à leur importance secondaire, ces ajouts et différences ne peuvent dominer l’impression produite par le dessin ou modèle contesté. En effet, il y a lieu d’approuver les considérations formulées par l’OHMI selon lesquelles, d’une part, le capuchon et le couvercle sont amovibles et sont dès lors accessoires par rapport au corps principal du dispositif de nettoyage et, d’autre part, la transparence de la partie inférieure du corps dudit dispositif dans le dessin ou modèle contesté ne modifie en rien son apparence extérieure.

28      Partant, la chambre de recours a estimé à juste titre, au point 18 de la décision attaquée, que les ajouts et différences susvisées n’empêchaient pas de considérer que les caractéristiques de la marque antérieure, à savoir celles d’un dispositif de nettoyage ayant la forme d’un corps rectangulaire compact arrondi sur les bords et comportant un vaporisateur d’un côté et une éponge cylindrique de l’autre, sont perceptibles dans le dessin ou modèle contesté.

29      La chambre de recours n’a donc pas violé l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002 en considérant qu’il était fait usage de la marque antérieure dans le dessin ou modèle contesté.

30      Aucun des arguments de la requérante ne suffit à remettre en cause cette conclusion.

31      Premièrement, contrairement à ce que soutient en substance la requérante et ainsi qu’il résulte de la jurisprudence rappelée au point 23 ci-dessus, le motif de nullité visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002 n’implique pas la reproduction intégrale et détaillée du signe distinctif antérieur dans le dessin ou modèle concerné.

32      Deuxièmement, la requérante se prévaut en vain du fait que, le dessin ou modèle contesté ayant une forme presque carrée et la marque antérieure présentant une hauteur qui équivaut à une fois et demie sa largeur, la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté ont des proportions totalement différentes.

33      D’une part, ainsi que l’admet la requérante elle-même, le dessin ou modèle contesté est un rectangle et non un carré. D’autre part, elle affirme à tort que les proportions sont « totalement différentes ». En effet, compte tenu de la jurisprudence rappelée au point 24 ci-dessus, selon laquelle le public ne garde en mémoire qu’une image imparfaite du signe, le consommateur ne percevra pas le caractère légèrement plus allongé de la marque antérieure si les formes lui sont présentées à des moments différents.

34      Troisièmement, est inopérant l’argument de la requérante selon lequel l’OHMI n’aurait pas dû présumer que la marque antérieure possédait au moins un degré minimal de caractère distinctif nécessaire à son enregistrement. En effet, la validité de la marque antérieure ne peut être mise en cause dans une procédure en nullité d’un dessin ou modèle communautaire. Ainsi que le relève l’OHMI, si la requérante estimait que la marque communautaire antérieure était dépourvue de caractère distinctif et avait été enregistrée en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n°40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009], il appartenait à la requérante de déposer une demande en nullité, ce qui n’a pas été le cas.

35      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen, tiré de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002 et d’une interprétation erronée de la notion d’« usage » d’un signe distinctif, doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

36      À l’appui du second moyen, tiré de la violation de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la requérante soulève deux griefs, le premier tiré du fait que le dessin ou modèle contesté ne sera pas perçu comme une indication de l’origine du produit, le second fondé sur le fait que la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté ne sont pas similaires et qu’il n’existe donc pas de risque de confusion.

37      Au préalable, il doit être rappelé que, aux termes de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, le titulaire d’une marque communautaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public. Cette même disposition précise que le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque.

38      Dans le cadre du premier grief, la requérante fait valoir que, même s’il devait être considéré qu’il est fait usage de la marque antérieure dans le dessin ou modèle contesté, ce dernier consiste uniquement en la forme d’un dispositif de nettoyage et ne sera donc pas perçu comme une indication de l’origine de ce produit. Elle fait en effet observer que l’utilisation du dispositif de nettoyage ne constitue pas en soi un usage en tant que marque et souligne que l’usage du dessin ou modèle contesté ne peut donc être interdit en application de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

39      Il ressort de l’économie de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 que l’usage d’un signe pour des produits et services est un usage aux fins de distinguer lesdits produits ou services (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 11 septembre 2007, Céline, C‑17/06, Rec. p. I‑7041, point 20).

40      Pour démontrer que le dessin ou modèle contesté ne peut être perçu, en l’espèce, comme une indication de l’origine des produits, la requérante se contente d’invoquer la jurisprudence selon laquelle les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou sur celle de leur emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel (arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, Rec. p. I‑5089). D’une part, cette jurisprudence n’interdit pas de considérer que la reproduction de la forme d’un produit peut être perçue comme une indication de l’origine desdits produits. D’autre part, la forme du dessin ou modèle qui incorpore le dispositif de nettoyage apparaît comme suffisamment inhabituelle par rapport aux normes du secteur et suffisamment frappante pour que, lorsque ledit dessin ou modèle est utilisé, le consommateur pertinent soit amené à percevoir celui-ci comme une indication de l’origine des produits de nettoyage.

41      À cet égard, force est de constater que la requérante n’a présenté aucun élément visant à démontrer que le signe serait habituel par rapport aux normes du secteur et que le public ne le comprendrait pas comme une indication de l’origine des dispositifs de nettoyage.

42      Partant, il y a lieu de considérer que l’usage du dessin ou modèle contesté pour des dispositifs de nettoyage peut être un usage aux fins de distinguer lesdits produits de nettoyage. Dans ce contexte, l’OHMI peut appliquer l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 6/2002.

43      Dans le cadre du second grief, la requérante soutient qu’il n’y a pas de risque de confusion dans l’esprit du public concerné au motif que la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté ne sont pas similaires.

44      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt GIORGIO BEVERLY HILLS, point 24 supra, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

45      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des signes qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque ou un autre signe distinctif comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 23 ; Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 24 supra, point 25, et du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, Rec. p. I‑8551, point 28).

46      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion entre la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté et que, par conséquent, ce dernier devait être déclaré nul.

47      Tout d’abord, en ce qui concerne les produits, la chambre de recours indique à juste titre, au point 28 de la décision attaquée, que les « dispositifs de nettoyage » dans lesquels le dessin ou modèle contesté est destiné à être incorporé sont inclus dans la liste des produits pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, et qu’ils sont donc identiques à ceux couverts par ladite marque antérieure. La requérante ne le conteste d’ailleurs pas.

48      Ensuite, quant au consommateur pertinent, force est de relever que les produits concernés sont de consommation courante et qu’ils s’adressent dès lors au grand public, ainsi que le souligne la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée. La marque antérieure est une marque communautaire. Partant, il convient de tenir compte, aux fins de l’appréciation du risque de confusion, de la perception de la marque antérieure et de celle du dessin ou modèle contesté par le consommateur moyen de l’ensemble du territoire de l’Union européenne qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

49      Par ailleurs, en ce qui concerne la comparaison visuelle entre la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté, il ressort des points 25 à 29, 32 et 33 ci-dessus que les formes géométriques et les dimensions ainsi que les formes de la marque antérieure et du dessin ou modèle contesté sont hautement similaires et en partie identiques.

50      Les ajouts et les différences ne présentent qu’une importance secondaire pour les raisons rappelées au point 27 ci-dessus. Ainsi qu’il ressort du point 30 de la décision attaquée, les différences entre la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté concernent essentiellement de légères modifications apportées à des détails relativement mineurs dans l’ensemble du dispositif de nettoyage et ne modifient pas sa forme globale.

51      La requérante avance que l’OHMI a ignoré à tort le fait que la marque antérieure contient l’élément verbal « am » et soutient que, eu égard au fait que la forme tridimensionnelle du dispositif de nettoyage est dépourvue de caractère distinctif, l’appréciation de la similitude peut être faite sur la seule base dudit élément verbal. L’OHMI soutient, d’une part, que ce grief n’a jamais été soulevé au cours de la procédure devant l’OHMI et est dès lors irrecevable et, d’autre part, que l’élément verbal est en tout état de cause illisible.

52      Sans qu’il soit nécessaire d’examiner la question de la recevabilité de ce grief, il y a lieu de considérer qu’il ne saurait prospérer. En effet, il doit être rappelé qu’un signe si difficile à déchiffrer, à comprendre ou à lire que le consommateur raisonnablement attentif et avisé ne pourra y parvenir qu’en se livrant à une analyse dépassant ce qui peut être raisonnablement attendu de lui dans une situation d’achat, peut être considéré comme illisible [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 2 juillet 2008, Stradivarius España/OHMI – Ricci (Stradivari 1715), T‑340/06, non publié au Recueil, point 34, et du 11 novembre 2009, Frag Comercio Internacional/OHMI – Tinkerbell Modas (GREEN by missako), T‑162/08, non publié au Recueil, point 43]. En l’espèce, force est de constater, comme le souligne l’OHMI dans ses écritures, que l’élément verbal « am » est difficile à déchiffrer en raison de sa taille, de sa position et de l’absence de contraste dans la représentation graphique de la marque antérieure. Le consommateur moyen aura d’autant plus de difficultés à le lire que celui-ci ne se livre pas à un examen des différents détails de la marque lors de son achat (voir, en ce sens, arrêts de la Cour SABEL, point 45 supra, point 23 ; Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 24 supra, point 25, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 34). Ainsi, en raison de son caractère quasi illisible, cet élément verbal n’influencera pas la perception visuelle qu’aura le consommateur moyen de la marque antérieure.

53      En ce qui concerne la comparaison sur les plans phonétique et conceptuel, la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 29 de la décision attaquée, qu’elle ne pouvait procéder, en l’espèce, à une comparaison phonétique et à une comparaison conceptuelle entre la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté. En effet, d’une part, la marque antérieure ne contient qu’un élément verbal illisible et le dessin ou modèle contesté n’en contient aucun. Ils ne se prêtent pas non plus à une description verbale simple et courte, susceptible de faire l’objet d’une comparaison phonétique. D’autre part, ni la marque antérieure ni le dessin ou modèle contesté ne renvoient à un quelconque concept particulier, de sorte qu’une comparaison conceptuelle entre eux n’est pas non plus possible.

54      Il y a lieu de relever à cet égard que la requérante n’a présenté aucun élément visant à remettre en cause la position de la chambre de recours quant à l’impossibilité de procéder à une comparaison de la marque antérieure et du dessin ou modèle contesté des points de vue conceptuel et phonétique.

55      Enfin, s’agissant de la prise en considération du caractère distinctif de la marque antérieure dans le cadre de l’examen de l’appréciation globale du risque de confusion, la requérante fait valoir en vain que le degré minimal de caractère distinctif que l’OHMI a concédé à la marque antérieure provient exclusivement de l’élément verbal « am » et que l’appréciation de la similitude peut être réalisée sur la seule base dudit élément verbal. Il va de soi que l’élément verbal, dont le caractère négligeable a été mis en évidence au point 52 ci-dessus, ne saurait à lui seul dominer l’image de la marque antérieure que le public pertinent garde en mémoire.

56      En ce sens, ne saurait non plus prospérer l’argument selon lequel la forme tridimensionnelle du dispositif de nettoyage serait totalement dépourvue de caractère distinctif.

57      Tout d’abord, s’il est vrai, ainsi que l’a souligné la chambre recours elle-même aux points 32 et 33 de la décision attaquée, que les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou sur celle de leur emballage et qu’il est permis de douter que le public considère la forme d’un dispositif de nettoyage comme une indication de son origine, il n’en demeure pas moins, comme l’indique le point 34 de la décision attaquée, que la marque antérieure a été enregistrée et n’a pas été déclarée nulle au motif d’une absence de caractère distinctif. Il convient également d’approuver l’appréciation de l’OHMI selon laquelle, la marque antérieure ayant été enregistrée, il doit être présumé que la forme qui la compose est suffisamment inhabituelle par rapport aux normes du secteur et suffisamment frappante pour qu’elle puisse remplir la fonction essentielle d’une marque.

58      Ensuite, la requérante s’est limitée à faire valoir que la simple reproduction de la forme d’un produit ou de celle de son emballage n’est généralement pas perçue comme une indication de l’origine dudit produit. Elle se fonde à cet égard sur la jurisprudence selon laquelle les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou sur celle de leur emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, et qu’il pourrait donc s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif s’agissant d’une marque tridimensionnelle que s’agissant d’une marque verbale ou figurative [arrêt de la Cour du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, point 30 ; arrêt du Tribunal du 17 décembre 2008, Somm/OHMI (Abri ombrageant), T‑351/07, non publié au Recueil, point 32].

59      D’une part, comme souligné au point 40 ci-dessus, cette jurisprudence n’empêche pas de considérer que la reproduction de la forme d’un produit peut être perçue comme une indication de l’origine desdits produits.

60      D’autre part, la requérante n’a présenté aucun élément concret – tel que des exemples de dispositifs de nettoyage dont la forme du produit présente des similitudes avec celle de la marque antérieure déjà utilisés par des concurrents à la date du dépôt de la marque antérieure – en vue d’étayer son assertion visant à nier tout caractère distinctif à la forme tridimensionnelle de la marque antérieure.

61      Enfin, l’argumentation de la requérante semble devoir se comprendre dans le sens que l’OHMI ne peut interdire l’usage du dessin ou modèle en raison d’un impératif de disponibilité. Il importe de relever que la circonstance qu’il existe, pour des opérateurs économiques, un besoin de disponibilité du signe ne saurait faire partie des facteurs pertinents pour apprécier l’existence d’un risque de confusion (arrêt de la Cour du 10 avril 2008, adidas et adidas Benelux, C‑102/07, Rec. p. I‑2439, point 30).

62      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que la marque antérieure possédait au moins un degré minimal de caractère distinctif.

63      À cet égard, selon une jurisprudence constante, il convient de relever que, même en présence d’une marque antérieure ayant un caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 16 mars 2005, L'Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec. p. II‑949, point 61 ; du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, Rec. p. II‑5213, et du 31 janvier 2012, Spar/OHMI – Spa Group Europe (SPA GROUP), T‑378/09, non publié au Recueil, point 22].

64      Partant, la chambre de recours considère à juste titre au point 35 de la décision attaquée que, compte tenu de la similitude du dessin ou modèle contesté avec la marque antérieure et de l’identité des produits visés par la marque antérieure et des produits dans lesquels le dessin ou modèle est destiné à être incorporé, il existe un risque de confusion au sens de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et ce même en tenant compte du caractère distinctif faible de la marque antérieure.

65      Partant, le second moyen, tiré de la violation de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, n’est pas fondé.

66      Eu égard à l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Su-Shan Chen est condamnée aux dépens.

Dittrich

Wiszniewska-Białecka

Prek

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 avril 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.