Language of document : ECLI:EU:T:2007:114

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

25 avril 2007(*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Exceptions relatives à la protection de l’intérêt public – Accès partiel »

Dans l’affaire T‑264/04,

WWF European Policy Programme, établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Mme R. Haynes, barrister,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. B. Driessen et M. Bauer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme E. Montaguti et M. P. Aalto, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision du Conseil du 30 avril 2004 refusant à la requérante l’accès à certains documents relatifs à la réunion du comité du Conseil dit « comité de l’article 133 » du 19 décembre 2003,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. H. Legal, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. E. Moavero Milanesi, juges,

greffier : Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 novembre 2006,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        L’article 2 du règlement (CE) nº 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), qui définit les principes, les conditions et les limites du droit d’accès aux documents de ces institutions, adopté en application de l’article 255 CE, dispose :

« 1. Tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre a un droit d’accès aux documents des institutions, sous réserve des principes, conditions et limites définis par le présent règlement.

[…]

3. Le présent règlement s’applique à tous les documents détenus par une institution, c’est-à-dire établis ou reçus par elle et en sa possession, dans tous les domaines d’activité de l’Union européenne. »

2        L’article 4 du règlement nº 1049/2001 prévoit :

« 1. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où la divulgation porterait atteinte à la protection :

a)       de l’intérêt public, en ce qui concerne :

–        [...]

–        [...]

–        les relations internationales,

–        la politique financière, monétaire ou économique de la Communauté ou d’un État membre ;

b)       de la vie privée ou de l’intégrité de l’individu, notamment en conformité avec la législation communautaire relative à la protection des données à caractère personnel.

2. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection :

–        des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle,

–        [...]

à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

3. L’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

L’accès à un document contenant des avis destinés à l’utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l’institution concernée est refusé même après que la décision a été prise, dans le cas où la divulgation du document porterait gravement atteinte au processus décisionnel de l’institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

4. Dans le cas de documents de tiers, l’institution consulte le tiers afin de déterminer si une exception prévue au paragraphe 1 ou 2 est d’application, à moins qu’il ne soit clair que le document doit ou ne doit pas être divulgué.

[…]

6. Si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions susvisées, les autres parties du document sont divulguées. »

3        Aux termes de l’article 7 du règlement nº 1049/2001 :

« 1. Les demandes d’accès aux documents sont traitées avec promptitude. Un accusé de réception est envoyé au demandeur. Dans un délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, l’institution soit octroie l’accès au document demandé et le fournit dans le même délai conformément à l’article 10, soit communique au demandeur, dans une réponse écrite, les motifs de son refus total ou partiel et l’informe de son droit de présenter une demande confirmative conformément au paragraphe 2 du présent article.

2. En cas de refus total ou partiel, le demandeur peut adresser, dans un délai de quinze jours ouvrables suivant la réception de la réponse de l’institution, une demande confirmative tendant à ce que celle-ci révise sa position. »

4        La décision 2002/682/CE, Euratom du Conseil, du 22 juillet 2002, portant adoption de son règlement intérieur (JO L 230, p. 7, ci-après le « règlement intérieur »), dans son article 19, dispose :

« 1. Le [Comité des représentants permanents (Coreper)] a pour tâche de préparer les travaux du Conseil et d’exécuter les mandats qui lui sont confiés par celui-ci. Il veille, en tout état de cause, à la cohérence des politiques et actions de l’Union et au respect des principes et règles suivants :

[...]

d)       règles de procédure, de transparence et de qualité rédactionnelle.

[...]

3. Des comités ou des groupes de travail peuvent être institués par le Coreper, ou avec son aval, pour l’accomplissement de certaines tâches de préparation ou d’étude préalablement définies.

Le secrétariat général met à jour et rend publique la liste des instances préparatoires. Seuls les comités et groupes de travail figurant sur cette liste peuvent se réunir en qualité d’instance préparatoire du Conseil. »

5        Aux termes de l’article 21 du règlement intérieur :

« Nonobstant les autres dispositions du présent règlement intérieur, la présidence organise les réunions des différents comités et groupes de travail de façon que leurs rapports soient disponibles avant la réunion du Coreper qui les examine.

[…] »

 Faits à l’origine du litige

6        Par lettre du 23 février 2004, WWF European Policy Programme, une association sans but lucratif de droit belge, a, sur la base de l’article 6 du règlement nº 1049/2001, adressé une demande au Conseil afin d’obtenir l’accès aux documents relatifs au premier point de l’ordre du jour de la réunion des membres suppléants du comité dit « comité de l’article 133 » (ci-après le « comité ») du 19 décembre 2003. Ce point était intitulé « OMC‑Développement durable et commerce après Cancun ». Les informations demandées étaient, d’une part, les documents préparatoires et autres informations, fournis aux membres suppléants du comité par la Commission, à propos de ce point de l’ordre du jour, et qui incluaient, notamment, selon la requérante, un rapport sur l’état des négociations concernées, les positions adoptées par d’autres États, les évaluations des résultats de l’approche actuelle de l’Union européenne et l’exposé d’idées générales en vue d’une nouvelle stratégie, et, d’autre part, les comptes rendus, résolutions ou recommandations établis sur ce point de l’ordre du jour à la suite de la réunion.

7        Après avoir reçu cette demande, le Conseil a, en vertu de l’article 4, paragraphe 4, du règlement nº 1049/2001, consulté les services de la Commission et, par lettre du 17 mars 2004, répondu à la demande de la requérante.

8        Quant à la première partie de cette demande, le Conseil a indiqué, tout d’abord, qu’il avait identifié une note portant sur un large éventail de questions relatives à la suite de la conférence de Cancun et évoquant la manière dont il conviendrait de traiter les questions dans le domaine du commerce lors des négociations multilatérales en cours au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Cette note, portant le numéro MD 578/03 et intitulée « Développement durable et commerce après Cancun », avait été établie à l’attention du comité par les services de la Commission le 10 décembre 2003 (ci-après la « note »). Le Conseil a précisé ensuite que, compte tenu de la nature et du contenu de la note, l’accès à celle-ci devait être refusé en vertu de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement nº 1049/2001, au motif que sa divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux de l’Union européenne et porterait également préjudice à ses relations économiques avec les pays tiers mentionnés dans la note. Enfin, le Conseil a refusé d’accorder un accès partiel à la note au motif que les exceptions susmentionnées seraient applicables au document dans son intégralité. Le Conseil a toutefois fourni à la requérante une communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen intitulée « Un an après le sommet mondial sur le développement durable : mise en œuvre de nos engagements » [COM (2003) 829 final] et son annexe, le document de travail de la Commission [SEC (2003) 1471], déjà publiquement disponibles.

9        Quant à la seconde partie de la demande de la requérante, le Conseil a indiqué qu’il n’était pas établi par ses services de comptes rendus des réunions des membres suppléants du comité.

10      Par lettre du 5 avril 2004, la requérante a, sur la base de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001, présenté une demande confirmative, tendant à ce que le Conseil révise sa position quant à la divulgation des documents demandés, et notamment des parties de la note relatives au développement durable et au commerce. En outre, elle a demandé des précisions sur l’institution qui détiendrait les comptes rendus des réunions du comité.

11      Par décision du 30 avril 2004 (ci-après la « décision attaquée »), le Conseil a confirmé son refus de divulguer la note dans les termes suivants :

« [L]a divulgation du document en question porterait gravement atteinte aux relations économiques internationales de l’UE avec les pays tiers mentionnés dans le document et irait également à l’encontre des intérêts commerciaux de l’UE. La note de la Commission porte principalement sur les efforts déployés par l’UE pour répondre aux besoins et aux objectifs des pays en développement, en vue d’accentuer le renforcement mutuel de l’environnement et du développement, en développant l’accès au marché, en utilisant au mieux les technologies commerciales et en encourageant les investissements. Le document procède à une réévaluation de questions importantes ayant trait au commerce et à l’environnement, ainsi qu’à un examen approfondi des besoins des pays en développement, afin de contribuer à la bonne gestion des affaires publiques dans ce contexte. Dans ce cadre, ce document contient des éléments d’analyse et des observations sensibles concernant l’orientation suivie par l’UE pour renforcer la gouvernance internationale et définir la ligne de politique générale de l’UE ainsi que des actions concrètes dans les volets essentiels de la relation avec l’OMC. La divulgation de ces éléments et de ces observations porterait atteinte aux relations entre l’UE et les pays tiers concernés et nuirait gravement aux négociations en cours dans lesquelles la Communauté et ses États membres sont engagés et, en dernière analyse, à l’ensemble de leur politique économique.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que l’accès au document en question doit être refusé sur la base de l’article 4, paragraphe 1, [sous] a), troisième et quatrième tirets, du règlement [nº 1049/2001]. Il n’est pas non plus possible d’accorder un accès partiel au document en invoquant l’article 4, paragraphe 6[, du règlement nº 1049/2001], étant donné que les exceptions susmentionnées s’appliquent au texte du document dans son intégralité. »

12      Dans la décision attaquée, le Conseil a également confirmé qu’il n’existait pas de compte rendu des réunions des membres suppléants du comité. Il a fait observer que, selon une pratique courante, en l’absence de comptes rendus, le progrès effectué sur une question particulière était reflété, le cas échéant, directement dans des notes, rapports ou documents similaires, rédigés postérieurement aux réunions concernées. Le Conseil a souligné toutefois qu’il ne possédait pas en l’espèce de tels documents, portant sur le résultat de la réunion du 19 décembre 2003 quant au premier point de l’ordre du jour.

13      Le 1er juin 2004, la Commission a, dans une lettre au Conseil, explicité sa position sur la demande de la requérante. La Commission y a indiqué que, selon elle, la note ne devait pas être divulguée en vertu de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe l, sous a), troisième tiret, du règlement nº 1049/2001, visant à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales. La Commission a invoqué aussi, comme motif supplémentaire de refus, l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, en ce qui concerne la protection du processus décisionnel des institutions.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 juin 2004, la requérante a introduit le présent recours.

15      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 23 novembre 2004, Friends of the Earth Ltd, société de droit privé établie à Londres (Royaume-Uni), a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la partie requérante.

16      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 10 décembre 2004, la Commission a demandé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil.

17      Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 14 février 2005, la Commission a été admise à intervenir.

18      Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 18 mars 2005, la demande en intervention présentée par Friends of the Earth a été rejetée.

19      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience du 8 novembre 2006.

20      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal annuler la décision attaquée.

21      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

22      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens, en ce compris ceux de la Commission.

 En droit

23      La requérante soulève trois moyens tirés, premièrement, de la violation de l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001, en ce que le Conseil, en lui refusant l’accès à la note, n’aurait pas suffisamment motivé son refus et aurait mal évalué le caractère communicable des informations pertinentes, deuxièmement, de la violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001, en ce que le Conseil, en rejetant la possibilité d’une divulgation partielle de la note, n’aurait pas fait une application correcte du principe de proportionnalité, et, troisièmement, de la violation de l’article 2 du règlement nº 1049/2001, en ce que le Conseil aurait méconnu son droit d’accès aux documents en lui refusant l’accès au procès-verbal relatif au premier point de l’ordre du jour de la réunion du 19 décembre 2003 ou, en l’absence de procès-verbal, à des informations sur le contenu des discussions tenues au cours de cette réunion ainsi qu’aux notes des participants à ladite réunion.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001

 Arguments des parties

24      La requérante fait valoir que le Conseil, d’une part, n’a pas suffisamment motivé son refus d’accès à la note et, d’autre part, a effectué une évaluation erronée de la nature communicable de celle-ci.

25      S’agissant de l’exigence d’une motivation suffisante, la requérante expose que, dans la mesure où la note est relative à l’OMC, et notamment au développement durable et au commerce, le Conseil aurait omis d’indiquer de quelle manière la divulgation d’un contenu aussi général pouvait véritablement porter atteinte aux relations internationales et à la politique économique de la Communauté.

26      S’agissant de l’évaluation prétendument erronée de la nature communicable de la note, la requérante rappelle la jurisprudence du Tribunal portant sur les règles antérieures du Conseil relatives à l’accès aux documents, en soulignant que cette jurisprudence reste pertinente à l’égard des décisions adoptées en application du règlement n° 1049/2001 et des règles de procédure internes qui les remplacent. Il résulterait notamment de l’arrêt du Tribunal du 19 octobre 1995, Carvel et Guardian Newspapers/Conseil (T‑194/94, Rec. p. II‑2765), que toute réponse à une demande d’informations devrait comprendre une mise en balance, au cas par cas, d’une part, de l’intérêt du citoyen à obtenir accès aux documents concernés et, d’autre part, de l’intérêt éventuel du Conseil à préserver le secret de ces documents. De même, toute exception invoquée devrait être interprétée restrictivement et le refus de divulgation devrait être dûment motivé. En outre, le Conseil n’aurait pas établi de lien entre le sujet de la note et les conséquences négatives potentiellement liées à sa divulgation.

27      La requérante en déduit que le Conseil a agi de manière erronée en omettant d’évaluer correctement les intérêts en jeu dans son appréciation de la demande d’accès à la note, et en n’accordant pas la considération appropriée au droit fondamental d’accès aux documents reconnu par l’article 2 du règlement n° 1049/2001.

28      En premier lieu, le Conseil avance qu’il a motivé sa décision de la manière la plus complète possible, sans divulguer le contenu de la note. Afin de faire preuve de la plus grande transparence possible en ce qui concerne les objectifs des négociations, il aurait transmis à la requérante deux documents de la Commission qui donnent de plus amples informations sur les objectifs en cause.

29      À cet égard, la Commission fait observer que, dans la décision attaquée, le Conseil a décrit le contenu de la note d’une façon appropriée et suffisamment détaillée, en expliquant pourquoi l’accès à ce contenu faisait l’objet d’une dérogation. Conformément à une jurisprudence constante en la matière, une telle motivation serait suffisamment claire pour permettre à la requérante de comprendre les raisons pour lesquelles le Conseil ne lui a pas donné accès à la note et pour permettre au Tribunal d’exercer son contrôle de légalité de la décision attaquée.

30      En second lieu, le Conseil précise que la note porte sur la manière dont la Communauté devrait mener les négociations au sein de l’OMC en matière de commerce et d’environnement dans le cadre du cycle de Doha. Plus spécifiquement, la note contiendrait des éléments d’analyse et des observations sensibles concernant l’orientation suivie par la Communauté pour renforcer la gouvernance internationale, y compris des éléments relatifs à une réponse aux besoins et aux objectifs des pays en développement. Elle définirait également la ligne de politique générale de la Communauté ainsi que des actions concrètes concernant les aspects essentiels de sa relation avec l’OMC. Le Conseil a précisé à l’audience qu’il s’agissait d’une note d’information sur l’état d’avancement des négociations, présentant, d’une part, les positions adoptées par les pays tiers et, d’autre part, les options ouvertes à la Communauté.

31      La divulgation de la note porterait atteinte aux relations entre la Communauté et les pays tiers qui y sont mentionnés et nuirait gravement aux positions de la Communauté et de ses États membres dans le cadre des négociations menées au sein de l’OMC et, de ce fait, à l’ensemble de leur politique économique.

32      Le Conseil souligne le contexte délicat de ces négociations, les résistances rencontrées et les difficultés pour arriver à un accord, démontrées par l’échec des négociations lors de la conférence ministérielle de l’OMC à Cancun, en septembre 2003. Dans ce contexte, la divulgation de la note, qui décrit les différentes possibilités qui s’offrent à la Communauté, en proposant l’approche que celle-ci devrait adopter lors de ces négociations, et qui évalue les positions des autres parties aux négociations, porterait gravement atteinte à la marge de négociation dont les institutions de la Communauté ont besoin pour mener à bonne fin des négociations complexes au sein de l’OMC. En ce sens, la requérante elle‑même aurait reconnu qu’une tactique de négociation, par sa nature, ne devrait pas être communiquée au public.

33      Le Conseil en déduit que l’accès à la note devait être refusé sur la base de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement n° 1049/2001, afin de protéger l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales ainsi que la politique financière, monétaire ou économique de la Communauté.

34      Enfin, le Conseil, soutenu par la Commission, fait valoir que, en l’espèce, il n’avait pas à mettre en balance la nécessité de préserver la confidentialité de la note, d’une part, et l’intérêt de la requérante à obtenir l’accès à la note, d’autre part. Même si les paragraphes 2 à 4 de l’article 4, du règlement n° 1049/2001 impliquent une mise en balance conformément à la jurisprudence en la matière, tel ne serait cependant pas le cas du paragraphe 1 de cet article. On ne saurait supposer qu’il s’agit d’une simple omission de la part du législateur. Il s’agirait plutôt d’un choix explicite, justifié par l’importance des intérêts à protéger. Cette thèse serait confirmée par l’inclusion, à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001, de l’exception relative à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, en conformité avec la législation communautaire relative à la protection des données à caractère personnel.

35      Par ailleurs, selon le Conseil, à supposer même que toutes les exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 doivent faire l’objet d’une interprétation stricte, cela ne signifie pas pour autant que ces exceptions doivent être interprétées comme n’ayant pas d’effet utile. Si les conditions énoncées à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001 étaient réunies, le Conseil serait tenu d’appliquer cette disposition et de refuser l’accès à la note.

 Appréciation du Tribunal

36      S’agissant de l’insuffisance alléguée de la motivation de la décision attaquée, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation pour l’institution de motiver sa décision refusant l’accès à un document a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est, éventuellement, entachée d’un vice permettant d’en contester la validité et, d’autre part, de permettre au juge communautaire d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. La portée de cette obligation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (voir arrêt du Tribunal du 17 mars 2005, Scippacercola/Commission, T‑187/03, Rec. p. II‑1029, point 66, et la jurisprudence citée).

37      En l’espèce, dans la décision attaquée, le Conseil a présenté d’une façon détaillée les motifs de son refus, en fournissant des éléments qui permettent de comprendre l’objet de la note et les raisons pour lesquelles sa divulgation pouvait porter atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales et la politique financière, monétaire ou économique de la Communauté. Comme le relève à juste titre le Conseil, il n’est pas possible de fournir toutes les informations justifiant le caractère non communicable de la note sans divulguer son contenu et sans priver, par conséquent, l’exception de sa finalité essentielle. Il en résulte que l’argument de la requérante selon lequel le Conseil n’aurait pas suffisamment motivé son refus ne peut être retenu, la motivation apportée dans la décision attaquée étant suffisamment claire pour permettre à la requérante de comprendre les raisons pour lesquelles le Conseil ne lui a pas donné accès à la note, pour lui permettre de contester utilement ce refus devant le Tribunal et pour permettre à celui-ci d’exercer son contrôle de légalité de la décision attaquée.

38      S’agissant de l’évaluation du caractère communicable de la note et du refus d’accès à celle-ci en vertu de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement nº 1049/2001, il convient de constater que les dispositions du règlement n° 1049/2001 reprennent en substance le contenu de la législation antérieure quant à la portée des exceptions au droit d’accès aux documents.

39      Selon la jurisprudence relative à cette législation, l’accès du public aux documents des institutions constitue un principe et le refus d’accès l’exception à ce principe. Par conséquent, les cas de refus doivent être interprétés et appliqués de façon restrictive, afin de ne pas tenir en échec l’application du principe. De plus, une institution est tenue d’examiner, pour chaque document auquel l’accès est sollicité, si, au regard des informations dont cette institution dispose, la divulgation du document est effectivement susceptible de porter atteinte à l’un des aspects de l’intérêt public protégé par les exceptions permettant un refus d’accès. Pour que ces exceptions soient applicables, le risque d’atteinte à l’intérêt public doit donc être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir arrêt du Tribunal du 7 février 2002, Kuijer/Conseil, T‑211/00, Rec. p. II‑485, points 55 et 56, et la jurisprudence citée).

40      Il ressort aussi de la jurisprudence que les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation lorsqu’elles examinent si l’accès à un document peut porter atteinte à l’intérêt public et que, en conséquence, le contrôle exercé par le Tribunal sur la légalité des décisions des institutions refusant l’accès à des documents en raison des exceptions obligatoires relatives à l’intérêt public doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits et de l’absence d’un détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 19 juillet 1999, Hautala/Conseil, T‑14/98, Rec. p. II‑2489, points 71 et 72, et Kuijer/Conseil, point 39 supra, point 53).

41      S’agissant de l’erreur manifeste dans l’appréciation des faits, que fait valoir en substance la requérante, il y a lieu de constater que le Conseil a refusé l’accès à la note afin de ne pas risquer de perturber des négociations qui se déroulaient à l’époque dans un contexte délicat, caractérisé par des résistances de la part tant des États en développement que des États développés et des difficultés pour arriver à un accord, comme l’a démontré l’échec des négociations lors de la conférence ministérielle de l’OMC à Cancun en septembre 2003. Ainsi, en estimant que la divulgation de cette note aurait pu porter atteinte aux relations avec les pays tiers qui y sont mentionnés ainsi qu’à la marge de négociation de la Communauté et de ses États membres, nécessaire pour mener ces négociations à terme, le Conseil n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation et a pu considérer que la communication de la note comportait un risque d’atteinte à l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales et la politique financière, monétaire ou économique de la Communauté qui était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.

42      Il résulte de ce qui précède que le Conseil, d’une part, a suffisamment motivé son refus d’accès à la note et, d’autre part, n’a pas méconnu les conditions d’application des exceptions à l’accès du public aux documents prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement nº 1049/2001.

43      Ces conclusions ne sauraient être infirmées par les arguments de la requérante concernant la nécessité d’une mise en balance de son intérêt à avoir accès à la note et celui du Conseil à ne pas la communiquer.

44      Les exceptions énoncées à l’article 4, paragraphe 1, du règlement nº 1049/2001 sont rédigées en termes impératifs et, partant, les institutions sont obligées de refuser l’accès aux documents relevant de ces exceptions obligatoires lorsque la preuve des circonstances visées par ces exceptions est rapportée (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 5 mars 1997, WWF UK/Commission, T‑105/95, Rec. p. II‑313, point 58). Elles se distinguent donc des exceptions concernant l’intérêt des institutions à préserver le secret de leurs délibérations, prévues à l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, pour l’application desquelles les institutions disposent d’un pouvoir d’appréciation leur permettant de mettre en balance, d’une part, leur intérêt à préserver le secret de leurs délibérations et, d’autre part, l’intérêt du citoyen à obtenir un accès aux documents (voir, par analogie, arrêt Carvel et Guardian Newspapers/Conseil, point 26 supra, points 64 et 65).

45      Les exceptions en cause dans le litige relevant de l’article 4, paragraphe 1, du règlement nº 1049/2001, le Conseil n’avait pas, en l’espèce, à mettre en balance la protection de l’intérêt public et l’intérêt de la requérante à avoir accès à la note.

46      Au vu de ce qui précède, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001

 Arguments des parties

47      La requérante fait valoir, en substance, que le Conseil n’a pas effectué une application correcte du principe de proportionnalité lorsqu’il a évalué la possibilité d’une divulgation partielle de la note.

48      Le Conseil prétend qu’il a examiné la possibilité d’une divulgation partielle de la note, conformément à l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 et à la jurisprudence existante en la matière, en consultant aussi sur ce point la Commission, qui avait élaboré la note. À la suite de cet examen, le Conseil a conclu que les exceptions visées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement n° 1049/2001 s’appliquaient à la note dans son intégralité et que, par conséquent, un accès partiel à la note ne pouvait pas être accordé. En outre, il lui aurait été difficile d’apporter davantage de précisions sans divulguer le contenu de la note.

49      Pendant l’audience, le Conseil a précisé qu’il s’agissait d’un document compact, conçu pour informer des experts en la matière sur des points spécifiques concernant les négociations en cours et ne comportant pas de généralités qui auraient pu être isolées et divulguées. Ainsi, tant les éléments d’analyse que les observations contenus dans la note seraient de nature sensible.

 Appréciation du Tribunal

50      Il résulte des termes mêmes de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 qu’une institution est tenue d’examiner s’il convient d’accorder un accès partiel aux documents visés par une demande d’accès, en limitant un refus éventuel aux seules données couvertes par les exceptions visées. L’institution doit accorder un tel accès partiel si le but poursuivi par cette institution, lorsqu’elle refuse l’accès au document, peut être atteint dans l’hypothèse où cette institution se limiterait à occulter les passages qui peuvent porter atteinte à l’intérêt public protégé (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 décembre 2001, Conseil/Hautala, C‑353/99 P, Rec. p. I‑9565, point 29).

51      En l’espèce, il ressort de la décision attaquée, et il a été confirmé pendant l’audience, que le Conseil a examiné la possibilité d’une divulgation partielle de la note, possibilité à propos de laquelle il a aussi consulté la Commission, en vertu de l’article 4, paragraphe 4, du règlement n° 1049/2001. À la suite de cet examen, le Conseil a conclu qu’une telle divulgation partielle, au sens de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001, n’était pas possible parce que les exceptions visées par l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001, s’appliquaient à la totalité de la note. Cette appréciation a été également formulée par la Commission, auteur de la note, dans sa correspondance avec le Conseil, notamment dans sa lettre du 1er juin 2004.

52      Le Conseil a justifié son refus d’accès partiel à la note par la circonstance que celle-ci était entièrement composée d’éléments d’analyse et d’observations portant sur les positions des divers partenaires de la Communauté dans les négociations au sein de l’OMC et sur les options de négociation ouvertes aux négociateurs communautaires, dont la divulgation nuirait gravement à la conduite des négociations en cours. Il a aussi précisé que la note avait été conçue pour informer des experts tels que les membres du comité.

53      Ainsi, il ressort de la décision attaquée que, compte tenu du fait que le premier point de l’ordre du jour de la réunion du comité visait à analyser l’état des négociations au sein de l’OMC et du fait que c’est à cette fin que la note avait été distribuée préalablement aux membres du comité, le contenu intégral de la note devait être considéré comme étant de nature sensible et, partant, relevait intégralement de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales et la politique économique de la Communauté, protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement n° 1049/2001.

54      Il en résulte que, en refusant à la requérante un accès partiel à la note, le Conseil n’a pas appliqué de manière incorrecte l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001.

55      Au vu de ce qui précède, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 2 du règlement n° 1049/2001

56      Ce moyen comporte trois branches. La première branche est prise du refus du Conseil d’accorder l’accès au procès-verbal relatif au premier point de l’ordre du jour de la réunion du 19 décembre 2003 au motif de l’inexistence d’un tel procès-verbal. La deuxième branche est prise du refus du Conseil, en l’absence de procès-verbal, de fournir à la requérante des informations sur le contenu des discussions portant sur le premier point de l’ordre du jour de la réunion du 19 décembre 2003 sous une forme susceptible d’être diffusée. La troisième branche est prise du refus du Conseil d’accorder l’accès aux notes des participants à cette réunion.

 Sur la première branche, prise du refus du Conseil d’accorder l’accès au procès-verbal du premier point de l’ordre du jour de la réunion du 19 décembre 2003 au motif de l’inexistence d’un tel procès-verbal

–       Arguments des parties

57      La requérante considère que le règlement n° 1049/2001 est applicable aux documents établis et conservés par le comité. En vertu de l’article 21 du règlement intérieur, il devrait exister des comptes rendus des réunions de ce comité, que ce soit en sa formation réunissant les membres suppléants ou en celle comprenant les membres titulaires, étant donné son statut de comité préparatoire du Conseil.

58      L’absence de rédaction d’un procès-verbal d’une réunion du comité serait contraire au principe de transparence, évoqué dans le préambule du règlement n° 1049/2001 et dans l’article 19 du règlement intérieur, ainsi qu’au principe de bonne administration. Le droit d’accès aux documents, tel que garanti par l’article 2 du règlement n° 1049/2001, serait totalement vidé de sens si les institutions n’enregistraient pas les informations sous une forme qui permette leur diffusion au public. Les institutions seraient tenues d’enregistrer les informations, en particulier lorsque celles‑ci consistent en des délibérations d’un des comités dont l’existence a pour but d’éclairer le processus décisionnel du Conseil et de la Commission.

59      Le Conseil rétorque qu’aucun procès-verbal de cette réunion n’a été établi et qu’il n’existe pas de règle qui impose l’établissement d’un tel document. Vu le nombre de réunions organisées au Conseil, une telle obligation aurait manifestement des conséquences inacceptables et serait impossible à respecter.

60      Le Conseil rappelle la jurisprudence selon laquelle l’inexistence d’un document auquel l’accès a été demandé est présumée lorsqu’une affirmation en ce sens est faite par l’institution concernée et que cette présomption simple peut être renversée par tous moyens sur la base d’indices pertinents et concordants. Or, en l’espèce, les doutes exprimés par la requérante quant à l’inexistence d’un procès-verbal de la réunion du 19 décembre 2003 reposeraient sur une interprétation erronée du règlement intérieur.

–       Appréciation du Tribunal

61      Il serait contraire à l’impératif de transparence dont découle le règlement n° 1049/2001 que des institutions se prévalent de l’inexistence de documents pour échapper à l’application de ce règlement. L’exercice effectif du droit d’accès aux documents suppose que les institutions concernées procèdent, dans toute la mesure du possible et d’une manière non arbitraire et prévisible, à l’établissement et à la conservation de la documentation concernant leurs activités.

62      Il ressort de l’intitulé du premier point de l’ordre du jour de la réunion du 19 décembre 2003, et il a été confirmé pendant l’audience, que ce point a visé à informer les membres du comité sur l’état des négociations au sein de l’OMC. Le caractère purement informatif de ce point de la réunion et le fait qu’il n’appelle aucune mesure particulière de mise en oeuvre expliquent qu’il n’ait pas été considéré nécessaire d’en établir un procès-verbal et que ce point n’ait pas donné lieu à l’établissement d’un document de synthèse ou d’un autre acte ultérieur du comité.

63      Dans ces circonstances, il ne peut pas non plus être considéré que le Conseil ait procédé d’une manière arbitraire ou imprévisible en n’établissant pas de procès-verbal relatif à ce point de la réunion. Dès lors, il ne peut pas être conclu que le Conseil, en alléguant l’inexistence d’un tel procès-verbal, ait violé le droit de la requérante d’accéder aux documents, tel que reconnu par le règlement n° 1049/2001.

64      Partant, la première branche du troisième moyen doit être rejetée.

 Sur la deuxième branche, prise du refus du Conseil, en l’absence de procès-verbal, de fournir à la requérante des informations sur le contenu des discussions portant sur le premier point de l’ordre du jour de la réunion du 19 décembre 2003

–       Arguments des parties

65      La requérante souligne que, même si, d’après le Conseil, il n’existait pas de procès-verbal de la réunion du 19 décembre 2003, au sens où la Commission l’entendait dans sa lettre du 1er juin 2004, le Conseil aurait dû lui accorder un accès à l’information sur le contenu des discussions tenues lors de cette réunion.

66      La requérante, premièrement, avance que l’information sur le contenu des discussions de la réunion aurait du être enregistrée sous une forme susceptible d’être diffusée afin de donner une substance au droit d’accès aux documents, qui devrait être interprété comme un droit à l’information à la lumière du principe de transparence et de l’arrêt Conseil/Hautala, point 50 supra, dans lequel la Cour aurait explicitement rejeté l’argument du Conseil selon lequel ce droit ne vise que l’accès aux documents et non celui aux éléments d’information figurant dans ceux-ci.

67      Le droit d’accès aux documents, interprété comme un droit d’accès à l’information, s’appliquerait avec d’autant plus de force dans le domaine de la protection de l’environnement, en vertu de la convention d’Århus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice dans le domaine de l’environnement, qui a été signée par la Communauté. La proposition de règlement concernant son application aux institutions communautaires qui, comme il a été précisé pendant l’audience, est ultérieurement devenue le règlement (CE) n° 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Århus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (JO L 264, p. 13), renverrait au règlement n° 1049/2001 en ce qui concerne l’accès à l’information sur l’environnement qui serait définie comme « toute information disponible sous forme écrite, visuelle, orale ou électronique ou sous toute autre forme matérielle ». Il serait donc clair que le règlement n° 1049/2001 s’applique de manière générale à l’information, et non pas simplement aux documents.

68      La requérante, deuxièmement, fait valoir que, afin de donner plein effet au droit d’accès à l’information garanti par le droit communautaire, l’information à laquelle une personne a un droit d’accès devrait être fournie sous une forme appropriée et, même si le document dans lequel l’information est enregistrée ne peut pas être fourni, elle devrait être rédigée, extraite, résumée ou paraphrasée à partir de ce document original.

69      En premier lieu, le Conseil soutient qu’il n’existe pas d’obligation de consigner des informations, telles que le contenu des discussions des réunions du comité, aux fins de leur transmission. En effet, l’interprétation de la requérante du droit d’accès aux documents comme un droit à l’information serait tirée d’une lecture erronée du règlement n° 1049/2001 et de la jurisprudence.

70      Ainsi, il ressortirait des dispositions du règlement n° 1049/2001, notamment de son titre, de son article 2, paragraphe 3, de son article 3, de son article 10, paragraphe 3, et de ses articles 11 et 14, que ce règlement s’applique à des documents existants, c’est-à-dire à des documents établis ou reçus par une institution et en sa possession.

71      De même, l’arrêt Conseil/Hautala, point 50 supra, ne répondrait qu’à la question de savoir s’il convient d’accorder un accès partiel à un document déjà existant. Rien dans la jurisprudence n’indiquerait que les institutions seraient tenues d’établir un compte rendu de toutes les réunions qu’elles organisent.

72      Cette conclusion ne serait pas infirmée par l’application du principe de l’accès à l’information dans le domaine de l’environnement alléguée par la requérante sur le fondement de la convention d’Århus, puisque, à l’époque où la décision attaquée a été adoptée, ni la convention d’Århus ni le règlement concernant son application n’étaient en vigueur. De plus, la notion d’information environnementale qui y est établie n’inclurait pas les débats du comité, étant donné leur caractère oral, et aucun de ces deux actes juridiques n’imposerait au comité l’obligation d’établir des procès-verbaux de ses réunions.

73      Par ailleurs, il découlerait des décisions du Médiateur européen qu’une institution ne serait pas tenue de produire des documents en vertu du règlement n° 1049/2001 lorsqu’il n’existe aucun document auquel l’accès aurait pu être accordé.

74      En second lieu, le Conseil fait valoir que les procès-verbaux ne sont pas, contrairement à ce que soutient la requérante, des documents qui en résument d’autres, mais plutôt des documents résumant un débat oral. Ce serait dès lors à tort que la requérante affirme que les moyens nécessaires pour établir un procès-verbal sont facilement disponibles pour le Conseil.

–       Appréciation du Tribunal

75      En premier lieu, il y lieu de rappeler le champ d’application du règlement n° 1049/2001, qui, conformément à son article 2, paragraphe 3, s’applique aux seuls « documents détenus par une institution, c’est-à-dire, établis ou reçus par elle et en sa possession ».

76      En second lieu, il résulte de la jurisprudence que la notion de document et celle d’information doivent être distinguées. Le droit d’accès du public à un document des institutions ne vise que des documents et non pas des informations entendues de manière plus générale et n’implique pas pour les institutions le devoir de répondre à toute demande de renseignements d’un particulier (voir, par analogie, ordonnance du Tribunal du 27 octobre 1999, Meyer/Commission, T‑106/99, Rec. p. II‑3273, points 35 et 36). Certes, il ressort de l’arrêt Conseil/Hautala, point 50 supra, que la décision 93/731/CE du Conseil, du 20 décembre 1993, relative à l’accès du public aux documents du Conseil (JO L 340, p. 43), qui a précédé le règlement n° 1049/2001, ne visait pas seulement les documents détenus par les institutions en tant que tels, mais aussi les éléments d’information contenus dans ces documents (point 23 de l’arrêt). Cependant, l’accès aux éléments d’information, au sens de cet arrêt, ne peut être assuré que si ces éléments figurent dans des documents, ce qui présuppose l’existence de ceux-ci.

77      En l’espèce, en l’absence de procès‑verbal ou d’autres documents portant sur le premier point de l’ordre du jour de la réunion du comité du 19 décembre 2003, le Conseil n’était pas tenu de fournir à la requérante des informations sur le contenu de ce point de la réunion.

78      Il en résulte que le Conseil n’a pas violé le droit d’accès aux documents de la requérante, tel que reconnu par le règlement n° 1049/2001, en refusant de lui fournir des informations sur le contenu des discussions portant sur le premier point de l’ordre du jour de la réunion du 19 décembre 2003, alors que celles-ci n’existaient pas sous la forme d’un document susceptible d’être diffusé.

79      Cette constatation ne saurait être mise en cause par les arguments de la requérante relatifs à la convention d’Århus ou à la proposition de règlement concernant son application, considérant que, comme le souligne à juste titre le Conseil, à l’époque où la décision attaquée a été adoptée, ni la convention d’Århus ni le règlement concernant son application n’étaient en vigueur.

80      Partant, la deuxième branche du troisième moyen doit être rejetée.

 Sur la troisième branche, prise du refus du Conseil d’accorder l’accès aux notes des participants à la réunion du comité du 19 décembre 2003

–       Arguments des parties

81      En premier lieu, la requérante souligne que les notes des membres du comité et de la Commission relatives aux discussions au sein du comité ne sont pas exclues du champ d’application du règlement n° 1049/2001 et doivent, pour cette raison, être accessibles au public, à moins que l’exception visée à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001, concernant les délibérations internes, ne soit applicable.

82      En second lieu, la requérante fait valoir que sa demande d’information était suffisamment large pour inclure les notes relatives aux discussions du comité et que l’interprétation restreinte de la notion de « procès-verbal », donnée par la Commission, n’est aucunement justifiée. Par conséquent, les notes des membres du comité et de la Commission devraient être divulguées, l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001, en tant qu’exception à une obligation générale, devant faire l’objet d’une interprétation stricte. Par ailleurs, le Tribunal aurait déjà rejeté l’argument selon lequel la divulgation des délibérations internes des comités mettrait nécessairement en cause leur bon déroulement et leur efficacité.

83      Le Conseil affirme qu’il ignore si les délégations nationales ou la Commission ont rédigé des notes internes et sous quelle forme. Ces notes, étant destinées exclusivement à l’usage interne de l’État membre concerné ou de la Commission, n’auraient pas été communiquées au Conseil. En conséquence, n’étant pas détenues par le Conseil, ces notes n’entreraient pas dans le champ d’application de l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001.

84      Par ailleurs, le Conseil estime que la requérante, dans son mémoire en réplique, a considérablement modifié son argumentation en ce qui concerne le grief relatif à sa demande d’accès au procès-verbal de la réunion du 19 décembre 2003, en prétendant que le Conseil a violé le règlement n° 1049/2001 parce qu’il ne lui a pas accordé l’accès aux notes internes de la Commission et des délégations des États membres. À cet égard, le Conseil souligne que, selon la jurisprudence, la décision rendue sur la demande confirmative circonscrit l’objet de la procédure juridictionnelle. Or, il ressortirait de la demande confirmative que la requérante n’a pas demandé au Conseil de lui donner accès à ces notes internes de la Commission et des délégations des États membres. N’ayant pas refusé l’accès à ces documents dans la décision attaquée, le Conseil ne serait pas obligé de s’exprimer sur les arguments de la requérante sur ce point.

–       Appréciation du Tribunal

85      Force est de constater que l’accès aux notes des participants à la réunion du 19 décembre 2003 n’a pas été demandé au Conseil par la requérante dans les deux lettres qui sont à l’origine de la décision attaquée. Dès lors, la décision attaquée ne concerne pas l’accès aux notes des participants à la réunion du 19 décembre 2003. Étant donné, d’une part, que, lorsqu’il est saisi d’un recours en annulation d’une décision du Conseil refusant l’accès à des documents, le juge communautaire exerce, conformément à l’article 230 CE, un contrôle sur la légalité de cette seule décision et, d’autre part, que la décision attaquée ne fait pas suite à une demande d’accès aux notes internes de la Commission et des délégations des États membres, les arguments de la requérante concernant l’accès à ces notes ne peuvent, par conséquent, pas être retenus.

86      En tout état de cause, même s’il fallait considérer que la demande de la requérante devait être interprétée comme comprenant aussi l’accès aux notes internes de la Commission et des délégations des États membres, celles-ci, n’étant ni détenues ni reçues par le Conseil, ne peuvent pas être communiquées par lui au titre du règlement n° 1049/2001, conformément à son article 2, paragraphe 3.

87      Par conséquent, la troisième branche du troisième moyen doit être rejetée ainsi que ce moyen dans son intégralité.

88      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

89      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de décider qu’elle supportera, outre ses propres dépens, ceux du Conseil, conformément aux conclusions de ce dernier.

90      Selon l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens. Dès lors, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil.

3)      La Commission supportera ses propres dépens.

Legal

Wiszniewska-Białecka

Moavero Milanesi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 avril 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Legal


* Langue de procédure : l’anglais.