Language of document : ECLI:EU:T:2017:884

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

11 décembre 2017 (*)

« Union douanière – Importations de bananes en provenance de l’Équateur – Recouvrement a posteriori de droits à l’importation – Demande de remise de droits à l’importation – Décision prise à la suite de l’annulation par le Tribunal d’une décision antérieure – Délai raisonnable »

Dans l’affaire T‑125/16,

Firma Léon Van Parys NV, établie à Anvers (Belgique), représentée par Mes P. Vlaemminck, B. Van Vooren, R. Verbeke et J. Auwerx, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. A. Caeiros, B.‑R. Killmann et E. Manhaeve, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2016) 95 final de la Commission, du 20 janvier 2016, constatant qu’il est justifié de procéder à la prise en compte a posteriori des droits à l’importation et que la remise des droits est justifiée à l’égard d’un débiteur, mais qu’elle est justifiée pour une partie à l’égard d’un autre débiteur dans un cas particulier et n’est pas justifiée pour une autre partie à l’égard de ce débiteur particulier, et modifiant la décision C(2010) 2858 final de la Commission, du 6 mai 2010, et, d’autre part, une demande tendant à ce qu’il soit dit pour droit que l’article 909 du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO 1993, L 253, p. 1), a produit ses effets à l’égard de la requérante à la suite de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136),

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, J. Schwarcz (rapporteur) et C. Iliopoulos, juges,

greffier : Mme G. Predonzani, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 4 juillet 2017,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine du litige

1        Entre le 22 juin 1998 et le 8 novembre 1999, la requérante, la Firma Léon Van Parys NV, a déposé, par l’intermédiaire de son commissionnaire en douane, 116 déclarations d’importation de bananes en provenance de l’Équateur au bureau des douanes d’Anvers (Belgique).

2        Les déclarations d’importation étaient appuyées par 221 certificats d’importation, apparemment émis par le Royaume d’Espagne, qui permettaient d’importer des bananes dans la Communauté européenne, dans le cadre d’un contingent tarifaire avec paiement d’un droit de douane réduit de 75 euros par tonne, en vertu du règlement (CEE) no 404/93 du Conseil, du 13 février 1993, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la banane (JO 1993, L 47, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 3290/94 du Conseil, du 22 décembre 1994, relatif aux adaptations et aux mesures transitoires nécessaires dans le secteur de l’agriculture pour la mise en œuvre des accords conclus dans le cadre des négociations commerciales multilatérales du cycle d’Uruguay (JO 1994, L 349, p. 105), pour la période s’achevant le 31 décembre 1998, et en vertu du règlement no 404/93 et du règlement (CE) no 2362/98 de la Commission, du 28 octobre 1998, portant modalités d’application du règlement no 404/93 en ce qui concerne le régime d’importation de bananes dans la Communauté (JO 1998, L 293, p. 32), pour la période débutant le 1er janvier 1999.

3        Par courrier du 1er février 2000, l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) a informé les autorités douanières belges que de faux certificats d’importation espagnols, portant de faux cachets de l’autorité espagnole compétente pour délivrer ces documents, avaient été utilisés pour importer des bananes dans la Communauté. Lors d’une enquête, les autorités douanières ont découvert que les 221 certificats d’importation présentés par la requérante au bureau des douanes d’Anvers, pendant la période allant du 22 juin 1998 au 8 novembre 1999, correspondaient à de faux certificats espagnols.

4        Le 5 juillet 2002, l’administration des douanes et accises belge a établi un procès-verbal consignant les constatations effectuées, qu’elle a adressé notamment à la requérante et au commissionnaire en douane. Il ressort de ce procès-verbal que 233 certificats d’importation utilisés par la requérante correspondent à des faux certificats espagnols, 221 de ces certificats ayant été présentés à Anvers et 12 à Hambourg (Allemagne). S’agissant de la période allant du 1er janvier au 8 novembre 1999, 107 certificats, tous présentés par la requérante au bureau des douanes d’Anvers, seraient concernés.

5        Par courrier du 26 juillet 2002, l’administration des douanes et accises belge a enjoint à la requérante et au commissionnaire en douane de payer la somme de 7 084 967,71 euros pour les importations de bananes datant du 1er janvier 1998 au 8 novembre 1999, correspondant à l’application d’un droit de douane de 850 euros par tonne importée, en application de l’article 18, paragraphe 2, du règlement no 404/93.

6        Le 28 novembre 2003, un procès-verbal complémentaire a été établi par l’administration des douanes et accises belge, faisant notamment état de l’accomplissement de commissions rogatoires en Espagne, en Italie et au Portugal, dans le cadre de l’enquête sur les faux certificats d’importation espagnols.

7        Après que la requérante et le commissionnaire en douane eurent contesté le recouvrement a posteriori des droits de douane mis à leur charge, l’administration des douanes et accises belge a estimé qu’une suite favorable devait être donnée à la demande de non-recouvrement a posteriori et de remise des droits et a transmis, par courrier du 14 décembre 2007, le dossier à la Commission des Communautés européennes pour qu’elle prenne une décision, conformément aux articles 871 et 905 du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO 1993, L 253, p. 1), tel que modifié.

8        Dans son courrier du 14 décembre 2007, l’administration des douanes et accises belge était d’avis qu’il ne pouvait être fait application en l’espèce des dispositions de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1, ci-après le « CDC »), puisqu’il n’existait pas assez d’éléments probants pour qu’une erreur soit retenue à l’encontre des autorités des États membres ou de la Commission. En revanche, elle considérait qu’il y avait lieu de remettre les droits, en application de l’article 239 du CDC, car il existait une situation particulière au sens des dispositions de cet article et la requérante comme le commissionnaire en douane n’avaient pas commis de négligence manifeste.

9        Le 5 mai 2008, les 18 et 26 novembre 2008, le 15 janvier 2009 et le 4 mars 2010, la Commission a adressé des demandes de renseignements supplémentaires à l’administration des douanes et accises belge, qui a répondu à chacune de ces demandes.

10      Par un courrier du 8 janvier 2010, la Commission a, sur le fondement de l’article 906 bis du règlement no 2454/93, informé l’administration des douanes et accises belge et la requérante qu’elle avait l’intention de prendre une décision défavorable à la demande de remise et de remboursement des droits. Dans un courrier du 8 février 2010, la requérante a présenté ses observations.

11      Le cas de la requérante a été examiné, conformément aux articles 873 et 907 du règlement no 2454/93, par un groupe d’experts composé de représentants de tous les États membres, lors d’une réunion du 12 avril 2010.

12      Par décision C(2010) 2858 final, du 6 mai 2010, la Commission a fait droit à la prise en compte a posteriori des droits à l’importation (article 1er, paragraphe 1) et à la remise des droits à l’égard d’un débiteur, le commissionnaire en douane (article 1er, paragraphe 2), mais pas à l’égard d’un autre débiteur, la requérante, dans un cas particulier (article 1er, paragraphe 3) (ci-après la « première décision »).

13      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 août 2010, la requérante a introduit un recours en annulation contre la première décision.

14      Par un arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), le Tribunal a annulé l’article 1er, paragraphe 3, de la première décision, par lequel la Commission avait estimé que la remise des droits, en vertu de l’article 239 du CDC, n’était pas justifiée à l’égard de la requérante.

15      Par une première lettre du 16 septembre 2013, la Commission a informé l’administration des douanes et accises belge que, à la suite de l’annulation partielle de la première décision, elle avait conclu à la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires pour adopter une nouvelle décision et elle lui a demandé certaines informations concernant les importations effectuées par la requérante à l’origine de la demande de remise des droits. La Commission a également demandé à l’administration des douanes et accises belge de communiquer la réponse à la demande d’informations à la requérante et de solliciter de celle-ci une déclaration écrite dont il ressortirait que cette dernière avait pris connaissance de ladite réponse, qu’elle marquait son accord et n’avait rien à y ajouter ou qu’elle avait des observations à formuler ainsi que des informations supplémentaires à fournir. Enfin, la Commission a fait savoir que le délai de neuf mois pour traiter la demande de remise des droits, prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93, était prolongé de la période écoulée entre le 22 août 2013 et la date de réception des informations supplémentaires.

16      Par une seconde lettre du 16 septembre 2013, la Commission a informé la requérante que, à la suite de l’annulation partielle de la première décision, elle avait conclu à la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires pour adopter une nouvelle décision et que le délai de neuf mois pour traiter la demande de remise des droits était prolongé de la période écoulée entre le 22 août 2013 et la date de réception des informations supplémentaires.

17      Le recours en annulation présenté par la requérante contre les deux lettres du 16 septembre 2013 a été rejeté comme manifestement irrecevable par ordonnance du 24 juin 2014, Léon Van Parys/Commission (T‑603/13, non publiée, EU:T:2014:610).

18      Par lettre du 14 janvier 2014, l’administration des douanes et accises belge a fait savoir à la Commission qu’elle trouvait sa demande d’informations étrange, puisqu’il avait été démontré que tous les certificats d’importation en litige étaient faux, et que, dès lors, il était impossible de donner suite à cette demande.

19      Par lettre du 24 janvier 2014, la Commission a confirmé à la requérante la réception de la lettre de l’administration des douanes et accises belge, du 14 janvier 2014, et l’a informée que, au vu de l’absence de réponse de cette administration à sa demande d’informations supplémentaires, le délai de traitement continuait à être suspendu, conformément à l’article 907 du règlement no 2454/93.

20      Le recours en annulation présenté par la requérante contre la lettre du 24 janvier 2014 a été rejeté par ordonnance du 26 novembre 2014, Léon Van Parys/Commission (T‑171/14, non publiée, EU:T:2014:1025).

21      Par lettre du 17 juin 2014, la Commission a une nouvelle fois demandé à l’administration des douanes et accises belge de lui fournir les informations qu’elle lui avait demandées par lettre du 16 septembre 2013. La Commission a joint, à sa lettre du 17 juin 2014, ses propres calculs sous forme de tableau.

22      Le 10 décembre 2014, l’administration des douanes et accises belge a rédigé un projet de réponse à la lettre de la Commission du 16 septembre 2013, contenant un calcul que ladite administration envisageait de transmettre à la Commission et invitant la requérante à faire part de ses observations.

23      Par lettre du 16 février 2015, adressée à la Commission, l’administration des douanes et accises belge a formulé des observations sur le tableau que lui avait transmis la Commission et a notamment corrigé les montants figurant aux lignes 18, 60, 67 et 99 dudit tableau.

24      Par lettre du 16 juillet 2015, la Commission a fait savoir à la requérante qu’elle avait l’intention d’adopter une décision négative concernant sa demande de remise de droits.

25      Le 10 août 2015, la requérante a présenté ses observations sur la lettre de la Commission du 16 juillet 2015.

26      Par décision C(2016) 95 final, du 20 janvier 2016, la Commission a fait droit à la prise en compte a posteriori des droits à l’importation (article 1er, paragraphe 1), à la remise des droits à l’égard du commissionnaire en douane (article 1er, paragraphe 2), à la remise des droits à l’égard de la requérante pour un montant de 632 241,28 euros correspondant aux certificats traditionnels (article 1er, paragraphe 3), mais a refusé la remise des droits à l’égard de la requérante pour un montant de 2 996 007,20 euros, correspondant aux certificats de nouveaux arrivés (article 1er, paragraphe 4) (ci-après la « décision attaquée »).

27      Aux considérants 18 à 23 de la décision attaquée, la Commission a notamment rappelé que, par la première décision, elle avait fait droit à la prise en compte a posteriori des droits à l’importation (article 1er, paragraphe 1, de la première décision) et à la remise des droits à l’égard d’un débiteur, le commissionnaire en douane (article 1er, paragraphe 2, de la première décision), mais pas à l’égard de l’autre débiteur, la requérante, dans un cas particulier (article 1er, paragraphe 3, de la première décision).

28      Elle a précisé, au considérant 20 de la décision attaquée, avoir fondé son évaluation dans la première décision sur l’article 220, paragraphe 2, sous b), du CDC et avoir conclu qu’il ne pouvait être question d’une erreur commise par les autorités espagnoles, dans la mesure où elles n’avaient pas participé à l’établissement des certificats en cause. Par ailleurs, au considérant 23 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que, dans la première décision, elle avait examiné si les conditions de l’article 239 du CDC étaient remplies et avait conclu que le commissionnaire en douane n’avait commis ni manœuvre ni négligence et pouvait dès lors bénéficier de la non-prise en compte ou de la remise des droits à l’importation. Dans la première décision, la Commission avait aussi considéré que la requérante n’avait pas fait preuve de diligence et avait dès lors conclu qu’elle ne pouvait pas bénéficier du non-recouvrement ni de la remise des droits à l’importation.

29      Aux considérants 25 à 32 de la décision attaquée, la Commission a rappelé que, le Tribunal ayant annulé l’article 1er, paragraphe 3, de la première décision, elle devait, conformément à l’article 266 TFUE, adopter une nouvelle décision dans un délai raisonnable, seul délai applicable en l’espèce.

30      En ce qui concerne l’adoption de cette nouvelle décision, la Commission a indiqué, d’une part, au considérant 33 de la décision attaquée, qu’un groupe d’experts composé de représentants de tous les États membres s’était réuni le 21 septembre 2015 dans le cadre du comité du CDC afin d’examiner le dossier. Elle a indiqué, d’autre part, au considérant 37 de la décision attaquée, qu’elle allait examiner uniquement si la seconde condition énoncée à l’article 239 du CDC, relative à l’absence de manœuvre ou de négligence, était remplie.

31      Au considérant 39 de la décision attaquée, la Commission a par ailleurs rappelé que, dans son arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), le Tribunal avait considéré qu’il y avait lieu de relever que, en défense, la Commission estimait que le dispositif utilisé par la requérante pour obtenir l’usage de certificats d’importation était « illicite », car contraire à l’article 21, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 2362/98, qui proscrivait toute transmission de droits découlant d’un certificat d’importation d’un opérateur nouvel arrivé à un opérateur traditionnel. Le Tribunal ajoutait que, sur ce point, force était de constater que la première décision, en ce qu’elle refusait la remise des droits à l’importation, n’était pas fondée sur l’illégalité du dispositif d’achat de l’utilisation des certificats d’importation, mais sur la négligence manifeste de la requérante. Le Tribunal en concluait que, partant, l’argument de la Commission ne pouvait, en l’espèce, influer sur le bien-fondé du refus de remettre les droits à l’importation. La Commission en a tiré la conclusion, dans ce même considérant de la décision attaquée, qu’elle devait examiner dans le cadre de cette nouvelle décision si le dispositif dont s’était servie la requérante afin d’utiliser les certificats d’importation était licite, compte tenu du fait que l’article 21, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 2362/98 proscrit toute transmission de droits découlant d’un certificat d’importation d’un opérateur nouvel arrivé à un opérateur traditionnel. Elle a ajouté qu’elle devait également réexaminer les motifs permettant de déterminer s’il y avait eu absence de manœuvre ou de négligence.

32      La Commission a estimé, aux considérants 49 et 50 de la décision attaquée, que, si rien dans le dossier ne suffisait à démontrer un manque de diligence en ce qui concerne les certificats d’opérateurs traditionnels acquis par la requérante, en ce qui concerne les certificats de nouveaux arrivés, un simple examen des certificats aurait dû lui permettre à de conclure qu’elle ne pouvait pas faire usage des droits fondés sur ces certificats, puisqu’un tel usage aurait été contraire à l’article 21, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 2362/98.

33      Au considérant 60 de la décision attaquée, la Commission a par conséquent décidé, d’une part, que, en utilisant des droits de nouveaux arrivés, la requérante, qui est un opérateur traditionnel, n’avait pas respecté l’interdiction énoncée à l’article 21, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 2362/98 et, d’autre part, que, sur la base de l’article 239 du CDC, rien ne justifiait la remise des droits d’un montant de 2 996 007,20 euros relatifs aux certificats de nouveaux arrivés utilisés par la requérante pour la période comprise entre le 1er janvier et le 8 novembre 1999.

34      Enfin, au considérant 62 de la décision attaquée, la Commission a précisé que les dispositions de l’article 1er, paragraphes 1 et 2, de la première décision devaient rester en l’état, dès lors qu’elles n’avaient été ni contestées ni annulées par l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136).

 Procédure et conclusions des parties

35      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 mars 2016, la requérante a introduit le présent recours.

36      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        dire pour droit que l’article 909 du règlement no 2454/93 a produit pleinement ses effets à son égard à la suite de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), de sorte qu’elle bénéficie de la pleine remise de la dette douanière ainsi que des intérêts ou des frais qui y sont directement ou indirectement liés ;

–        condamner la Commission aux dépens.

37      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

38      À l’appui de son recours, la requérante invoque cinq moyens. Les premier et deuxième moyens sont tirés de la violation des articles 907 et 909 du règlement no 2454/93 ainsi que de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Le troisième, invoqué à titre subsidiaire, est tiré de la violation du principe de bonne administration. Le quatrième, invoqué à titre encore plus subsidiaire, est tiré d’un abus de pouvoir et, le cinquième, invoqué à titre encore plus subsidiaire, est tiré d’une interprétation erronée du cadre règlementaire portant organisation du marché des bananes et d’une violation du principe d’égalité.

 Sur la recevabilité

 Sur le premier chef de conclusions, tendant à l’annulation de la décision attaquée

39      La Commission, sans soulever d’exception d’irrecevabilité, fait valoir que le recours n’est recevable qu’en ce qui concerne l’article 1er, paragraphe 4, de la décision attaquée. Selon elle, d’une part, le recours serait irrecevable en ce qui concerne l’article 1er, paragraphes 1 et 2, de la décision attaquée, dès lors que ces deux dispositions sont purement confirmatives de l’article 1er, paragraphes 1 et 2, de la première décision. À cet égard, elle relève que ces deux dispositions seraient identiques, qu’elles ne contiendraient pas d’éléments nouveaux et qu’elles n’auraient pas été précédées d’un nouvel examen de la situation de la requérante. D’autre part, elle indique que l’article 1er, paragraphe 3, de la décision attaquée ayant modifié l’article 1er, paragraphe 3, de la première décision en faveur de la requérante, cette disposition ne lui ferait pas grief et ne serait pas susceptible de recours.

40      La requérante rétorque que le recours est, à juste titre, dirigé contre la décision attaquée dans son ensemble, celle-ci étant entachée d’une illégalité au motif qu’elle constituerait une décision adoptée au titre des dispositions combinées des articles 907 et 909 du règlement no 2454/93 et que le délai pour adopter de telles décisions avait déjà expiré au moment de son adoption.

41      Il convient de rappeler que la recevabilité d’un recours en annulation introduit par une personne physique ou morale est subordonnée à la condition qu’elle justifie d’un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Selon une jurisprudence constante, seuls peuvent faire l’objet d’un recours en annulation les actes qui produisent des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique. Or, pour déterminer si un acte ou une décision produit de tels effets, il y a lieu de s’attacher à sa substance (voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2000, Coca‑Cola/Commission, T‑125/97 et T‑127/97, EU:T:2000:84, point 77 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, la requérante ne démontre pas en quoi l’article 1er, paragraphes 1 à 3, de la décision attaquée modifierait de manière défavorable sa situation. Les paragraphes 1 et 2, qui reprennent, s’agissant des droits en cause, le dispositif de l’article 1er, paragraphes 1 et 2, de la première décision, sans qu’une nouvelle analyse ait été effectuée à cet égard, ne modifient pas sa situation antérieure et le paragraphe 3 modifie favorablement sa situation en ce qu’il lui accorde la remise des droits à l’importation d’un montant de 632 241,28 euros, correspondant aux certificats traditionnels. Il n’apparaît donc pas que la requérante ait un intérêt à agir à l’encontre de ces dispositions, si bien que le recours dirigé contre celles-ci est irrecevable.

43      En revanche, l’article 1er, paragraphe 4, de la décision attaquée refusant la remise des droits à l’égard de la requérante à la suite d’un nouvel examen et modifiant donc sa situation de manière défavorable le recours en annulation est recevable qu’en ce qu’il est dirigé contre cette disposition.

 Sur le deuxième chef de conclusions, tendant à ce que le Tribunal dise pour droit que l’article 909 du règlement no 2454/93 a produit pleinement ses effets à l’égard de la requérante à la suite de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T324/10, EU:T:2013:136)

44      Il convient de constater que le contentieux de l’Union européenne ne connaît pas de voie de droit permettant au juge de prendre position par le biais d’une déclaration générale ou de principe (arrêt du 15 décembre 2005, Infront WM/Commission, T‑33/01, EU:T:2005:461, point 171 ; ordonnances du 3 septembre 2008, Cofra/Commission, T‑477/07, non publiée, EU:T:2008:307, point 21, et du 24 mai 2011, Nuova Agricast/Commission, T‑373/08, non publiée, EU:T:2011:237, point 46).

45      Dès lors, il y a lieu de rejeter ce chef de conclusions.

 Sur le fond

46      Il y a lieu de relever que, par l’argumentation invoquée au soutien de ses quatre premiers moyens du recours, la requérante conteste, en substance, la façon dont la Commission a exécuté l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136). Selon elle, premièrement, aucune nouvelle décision n’était nécessaire. Deuxièmement, à supposer qu’une telle décision pouvait être adoptée, elle considère qu’elle devait l’être dans un délai qui ne devait pas dépasser le délai initial de forclusion de neuf mois prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93. Troisièmement, elle considère que, à supposer que la Commission ait disposé d’un délai raisonnable pour exécuter l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), celui-ci ne pouvait en aucun cas dépasser un nouveau délai de forclusion de neuf mois prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93. Enfin, quatrièmement, elle prétend que l’annulation partielle de la première décision ne conférait pas à la Commission une nouvelle et pleine compétence décisionnelle afin de mener une nouvelle enquête et d’adopter une nouvelle décision fondée, qui plus est, sur des motifs déjà examinés par le Tribunal.

47      La Commission conteste le bien-fondé des quatre premiers moyens du recours.

48      Selon une jurisprudence constante, afin de se conformer à un arrêt d’annulation et de lui donner pleine exécution, l’institution concernée est tenue de respecter non seulement le dispositif de l’arrêt, mais également les motifs qui ont amené à celui-ci et qui en constituent le soutien nécessaire, en ce sens qu’ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif. En effet, ce sont ces motifs qui, d’une part, identifient la disposition exacte considérée comme illégale et, d’autre part, font apparaître les raisons exactes de l’illégalité constatée dans le dispositif et que l’institution concernée doit prendre en considération en remplaçant l’acte annulé (arrêts du 26 avril 1988, Asteris e.a./Commission, 97/86, 99/86, 193/86 et 215/86, EU:C:1988:199, point 27, et du 6 mars 2003, Interporc/Commission, C‑41/00 P, EU:C:2003:125, point 29).

49      Cependant, l’article 266 TFUE n’oblige l’institution dont émane l’acte annulé que dans les limites de ce qui est nécessaire pour assurer l’exécution de l’arrêt d’annulation. En ce sens, cette disposition impose à l’institution concernée d’éviter que tout acte destiné à remplacer l’acte annulé soit entaché des mêmes irrégularités que celles identifiées dans ledit arrêt (arrêt du 6 mars 2003, Interporc/Commission, C‑41/00 P, EU:C:2003:125, point 30). Toutefois, les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation pour décider des moyens à mettre en œuvre afin de tirer les conséquences d’un arrêt d’annulation ou d’invalidation, étant entendu que ces moyens doivent être compatibles avec le dispositif de l’arrêt en cause et les motifs qui en constituent le soutien nécessaire (arrêt du 28 janvier 2016, CM Eurologistik et GLS, C‑283/14 et C‑284/14, EU:C:2016:57, point 76).

50      Par ailleurs, il importe de rappeler que l’annulation d’un acte de l’Union n’affecte pas nécessairement ses actes préparatoires (arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 73).

51      À cet égard, il convient de rappeler que l’obligation pour l’institution de l’Union d’exécuter un arrêt d’annulation rendu par le juge de l’Union découle de l’article 266 TFUE. Il a été reconnu par la Cour que cette exécution exige l’adoption d’un certain nombre de mesures administratives et ne peut normalement s’effectuer de manière immédiate, et que l’institution dispose d’un délai raisonnable pour se conformer à un arrêt annulant une de ses décisions (arrêt du 19 mars 1997, Oliveira/Commission, T‑73/95, EU:T:1997:39, point 41 ; voir également, en ce sens, arrêt du 12 janvier 1984, Turner/Commission, 266/82, EU:C:1984:3, points 5 et 6). Le caractère raisonnable de la durée d’une procédure administrative s’apprécie en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, du contexte dans lequel elle s’inscrit, des différentes étapes procédurales qui ont été suivies, de la complexité de l’affaire ainsi que de son enjeu pour les différentes parties intéressées (arrêt du 15 juillet 2004, Espagne/Commission, C‑501/00, EU:C:2004:438, point 53). Par ailleurs, la question de savoir si le délai dans lequel a été exécuté un arrêt d’annulation a été raisonnable doit également être appréciée au cas par cas. Le caractère raisonnable de ce délai dépend de la nature des mesures à prendre ainsi que des circonstances contingentes propres à chaque cas. Partant, il faut tenir compte des différentes étapes que la procédure de décision a comportées (arrêt du 19 mars 1997, Oliveira/Commission, T‑73/95, EU:T:1997:39, point 45).

52      Enfin, il y a lieu de souligner que, sauf à ce que l’irrégularité constatée ait entaché de nullité l’ensemble de la procédure, les institutions concernées peuvent, afin d’adopter un acte visant à remplacer un précédent acte annulé ou invalidé, rouvrir la procédure au stade où cette irrégularité a été commise (voir, en ce sens, arrêt du 29 novembre 2007, Italie/Commission, C‑417/06 P, non publié, EU:C:2007:733, point 52 et jurisprudence citée).

53      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les quatre premiers moyens, en commençant par l’argumentation invoquée dans le cadre des premier, deuxième et quatrième moyens, qu’il y a lieu de traiter ensemble.

 Sur les premier, deuxième et quatrième moyens, tirés de la violation des articles 907 et 909 du règlement no 2454/93, de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux et d’un abus de pouvoir

54      En l’espèce, il y a lieu de constater que, par le présent recours, la requérante conteste une décision prise par la Commission pour remplacer la première décision ayant statué sur sa demande de remise de droits à l’importation, cette décision ayant été partiellement annulée par l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), au motif que les éléments sur lesquels la Commission s’était fondée dans sa décision n’établissaient pas le manque de diligence de la requérante.

55      Partant, la Commission était obligée de réexaminer les éléments du dossier et de prendre une nouvelle décision sur la demande de remise de droits ayant fait l’objet de l’annulation pour remédier à l’irrégularité constatée (voir, par analogie, arrêt du 19 mars 1997, Oliveira/Commission, T‑73/95, EU:T:1997:39, point 32).

56      Ce faisant, elle était tenue de prendre en considération tous les éléments de fait et de droit disponibles au moment de l’adoption de l’acte. L’obligation de la Commission de préparer une décision avec toute la diligence requise et de prendre sa décision sur la base de toutes les données pouvant avoir une incidence sur le résultat découle notamment du principe de bonne administration, du principe de légalité et du principe d’égalité de traitement. Dans ces circonstances, contrairement à ce que prétend la requérante, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir estimé qu’il convenait de reprendre son enquête et de compléter le dossier (voir, par analogie, arrêt du 19 mars 1997, Oliveira/Commission, T‑73/95, EU:T:1997:39, point 32).

57      Par ailleurs, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel, en substance, à supposer que la Commission fût en droit d’adopter une nouvelle décision, cette décision devait être limitée aux mesures nécessaires afin d’exécuter l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), et ne pouvait pas, en tout état de cause, être fondée sur le motif du non-respect de l’article 21, paragraphe 2, du règlement no 2362/98, lequel aurait déjà été débattu.

58      À cet égard, il convient de constater que ce motif ne figurait pas dans la motivation de la première décision et qu’il n’a dès lors pas été soumis au contrôle du Tribunal dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136). En effet, bien que la question du non-respect de l’article 21, paragraphe 2, du règlement no 2362/98 ait été invoquée par la Commission dans son mémoire en défense dans l’affaire susvisée, le Tribunal a constaté, aux points 90 et 91 de cet arrêt, que la première décision n’était pas fondée sur cette question et que, par conséquent, l’argument de la Commission ne pouvait influer sur le bien-fondé du refus de remise des droits à l’importation. Partant, si la question du non-respect de l’article 21, paragraphe 2, du règlement no 2362/98 a bien été mentionnée par le Tribunal au point 90 de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), elle n’a nullement été tranchée sur le fond.

59      En outre, s’agissant de l’argument selon lequel, en substance, la Commission aurait pu, ou en tout état de cause dû, invoquer le motif relatif au non-respect de l’article 21, paragraphe 2, du règlement no 2362/98, dès lors que ce motif était déjà connu lors de l’adoption de la première décision, il convient de considérer que le motif relatif à la négligence manifeste de la requérante retenu par la Commission dans la première décision suffisait en théorie, à lui seul, pour justifier le refus de remise de droits à l’importation. En effet, la Commission est libre de retenir le motif qu’elle estime le plus pertinent pour motiver sa décision, sans qu’une éventuelle erreur commise dans le choix de ce motif puisse l’empêcher de retenir ultérieurement un motif qu’elle aurait pu invoquer lors de la première décision (voir, par analogie, arrêt du 14 septembre 2016, National Iranian Tanker Company/Conseil, T‑207/15, non publié, sous pourvoi, EU:T:2016:471, point 54).

60      Partant, sans préjudice de l’examen du bien-fondé du motif retenu dans la décision attaquée, à savoir le non-respect de l’article 21, paragraphe 2, du règlement no 2362/98, lequel relève du cinquième moyen, il y a lieu de conclure que la Commission était en droit de se fonder sur le motif tiré du non-respect de cette disposition pour refuser la remise de droits à l’importation dans la décision attaquée. Au demeurant, il convient de souligner que le fait que ce motif n’ait pas été invoqué dans le cadre de la première décision n’empêchait nullement la Commission de l’invoquer dans la décision attaquée dès lors que, en vertu d’une jurisprudence constante, l’auteur d’un acte annulé peut invoquer, dans sa nouvelle décision, des motifs autres que ceux sur lesquels il avait fondé sa première décision (voir, en ce sens, arrêt du 5 septembre 2014, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑471/11, EU:T:2014:739, point 125 et jurisprudence citée).

61      S’agissant du grief par lequel la requérante reproche à la Commission d’avoir considéré que la constatation de l’illégalité de la première décision dans les motifs de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), lui permettait de remédier à cette illégalité dans la décision destinée à se substituer à celle-ci dans un délai raisonnable, il doit être rejeté. En effet, force est de constater qu’un tel délai est pleinement conforme à la jurisprudence constante visée au point 51 ci-dessus.

62      De même, doit être rejeté l’argument de la requérante selon lequel, en substance, à la suite de l’annulation partielle de la première décision avec effet ex tunc, la Commission n’avait plus que cinq jours pour adopter une décision quant à sa demande de remise, pour respecter le délai de forclusion de neuf mois prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93. Ainsi que le soutient à juste titre la Commission, le délai de neuf mois prévu par cette disposition ne saurait être applicable dans le cadre d’une procédure rouverte en vertu de l’article 266 TFUE.

63      En effet, à cet égard, ainsi que cela a été évoqué au point 52 ci-dessus, en cas d’irrégularité survenue au cours de l’enquête, les institutions concernées doivent pouvoir rouvrir la procédure au stade de l’enquête où l’irrégularité a été commise, ou entamer une nouvelle procédure au cas où l’irrégularité constatée aurait entaché de nullité l’ensemble de la procédure. Certes, il ressort de l’article 907 du règlement no 2454/93 que la décision établissant soit que la situation particulière examinée justifie l’octroi du remboursement ou de la remise, soit qu’elle ne le justifie pas, doit intervenir dans un délai de neuf mois. Toutefois, il convient de constater que ledit article 907 ne concerne que la procédure initiale et non les procédures qui ont été rouvertes à la suite d’un arrêt d’annulation. Il en découle que, la procédure en cause en l’espèce ayant fait l’objet d’une réouverture, le délai de neuf mois prévu pour la procédure initiale ne saurait lui être applicable (voir, par analogie, arrêt du 28 janvier 2016, CM Eurologistik et GLS, C‑283/14 et C‑284/14, EU:C:2016:57, points 57 à 61). Il convient donc de rejeter l’argument de la requérante selon lequel la Commission a nié l’effet ex tunc de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), en considérant qu’elle disposait d’un délai raisonnable pour remédier à l’illégalité constatée dans cet arrêt et non d’un délai de cinq jours pour se conformer au délai initial de neuf mois visé à l’article 907 du règlement no 2454/93.

64      S’agissant enfin de l’argument selon lequel, en substance, les demandes répétées de la Commission aux autorités belges étaient totalement superflues et servaient uniquement à suspendre injustement le délai prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93, il doit être rejeté. En effet, il ne peut être valablement soutenu que la Commission ait envoyé les demandes aux autorités belges dans le seul but de suspendre ledit délai, dès lors que ce délai n’était, en tout état de cause, pas applicable.

65      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter les premier, deuxième et quatrième moyens.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe de bonne administration

66      Par ce moyen, la requérante fait, en substance, grief à la Commission d’avoir estimé, au considérant 32 de la décision attaquée, que le délai raisonnable prévu par l’article 266 TFUE pouvait, sans aucune limitation, être plus long que le délai de neuf mois prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93 et que, de surcroît, le bénéfice de l’expiration de ce délai prévu à l’article 909 du même règlement cessait, lui aussi, d’être applicable. Selon elle, à supposer que la Commission ait disposé d’un délai raisonnable pour exécuter l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), ce délai ne pouvait en aucun cas dépasser un nouveau délai de forclusion de neuf mois prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93. Elle considère donc que, même si la Commission disposait d’un nouveau délai de neuf mois pour adopter une décision à compter de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), ce délai expirait, compte tenu des différentes suspensions dues aux demandes d’informations de la Commission, le 11 juin 2015.

67      Par ailleurs, la requérante reproche à la Commission d’avoir violé le principe de sécurité juridique en ce qu’elle s’est constamment référée, dans un premier temps et au cours de la procédure décisionnelle ayant précédé l’adoption de la décision attaquée, à l’application du délai prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93, lu en combinaison avec l’article 909 de ce règlement, pour ensuite, lorsque ce nouveau délai, prétendument inexistant et prolongé à tort, a expiré, affirmer que le seul délai applicable était le délai raisonnable résultant de l’article 266 TFUE.

68      La Commission conteste le bien-fondé de ce moyen.

69      Premièrement, elle soutient qu’il est inutile de se référer à l’article 907 du règlement no 2454/93 pour calculer le délai dont elle disposait pour adopter une nouvelle décision à compter de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), dès lors que ni cette disposition ni l’article 909 du règlement no 2454/93 n’étaient applicables dans le cadre d’une procédure au titre de l’article 266 TFUE. Deuxièmement, elle affirme qu’il ne saurait être exclu que le délai raisonnable puisse durer plus longtemps que le délai prévu aux articles 907 et 909 du règlement no 2454/93. Troisièmement, elle considère que la décision attaquée était la mesure appropriée pour supprimer dans un délai raisonnable l’illégalité constatée par le Tribunal quant à la première décision eu égard aux circonstances propres à cette affaire. Elle fait valoir à cet égard que la majeure partie du temps qui s’est avéré nécessaire pour adopter la décision attaquée est due au fait que les autorités douanières belges n’ont pas répondu à la demande de la Commission, en dépit de plusieurs rappels, ainsi qu’au fait que ces dernières disposaient de la compétence exclusive pour se prononcer sur la dette douanière. En outre, la Commission ajoute avoir entendu, avant d’arrêter sa décision, la requérante ainsi qu’un groupe d’experts, composé de représentants de tous les États membres, qui s’est réuni le 21 septembre 2015 pour examiner l’affaire.

70      Quatrièmement, elle souligne que, en tout état de cause, même s’il avait été établi qu’elle avait agi en dehors d’un délai raisonnable, cela n’aurait pas pour autant entraîné l’annulation de la décision attaquée. En effet, d’une part, la requérante n’affirme pas que le délai qui s’est écoulé lui a porté préjudice et qu’il a nui à ses droits de la défense. La Commission rappelle qu’une partie du retard a été provoquée notamment par le fait qu’elle estimait devoir entendre la requérante avant d’arrêter sa décision, dans le but de préserver totalement les droits de la défense de cette dernière. D’autre part, elle considère que le non-respect d’une règle procédurale telle que celle du délai raisonnable ne peut pas constituer en l’espèce une violation d’une disposition procédurale substantielle, étant donné que, même s’il n’y avait pas eu une telle violation, le contenu de la décision attaquée n’aurait pas été différent.

71      À titre liminaire, il convient de rappeler que, à la suite de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), ayant partiellement annulé la première décision, l’article 907 du règlement no 2454/93 n’était plus applicable dans le cadre de la procédure rouverte aux fins de l’adoption de la décision attaquée, destinée à remplacer la première décision, seul le délai raisonnable étant applicable d’après la jurisprudence (voir point 63 ci-dessus).

72      Or, à l’instar de ce que soutient la requérante, il apparaît que les circonstances de la présente affaire révèlent que le délai raisonnable a été dépassé.

73      Le délai pertinent en l’espèce, aux fins de l’examen du respect du délai raisonnable, est celui qui s’est écoulé entre le prononcé de l’arrêt d’annulation, le 19 mars 2013, et la date d’adoption de la décision attaquée, le 20 janvier 2016, à savoir un délai de 34 mois, soit plus de deux ans et demi. Plus précisément, c’est cinq mois après le prononcé de l’arrêt d’annulation, à savoir le 21 août 2013, date à laquelle la première demande d’informations complémentaires a été envoyée par la Commission aux autorités belges, que la Commission a commencé la reconstitution et le réexamen du dossier, qui, après la réception des informations sollicitées auprès des autorités douanières belges, ont abouti 29 mois plus tard à la décision attaquée.

74      Pour justifier ce délai, la Commission fait valoir, d’une part, que la majeure partie du temps qui s’est avéré nécessaire pour adopter la décision attaquée est due au fait que les autorités douanières belges n’ont pas répondu à la demande de la Commission, en dépit de plusieurs rappels, et, d’autre part, que, avant d’arrêter sa décision, elle a, le 21 septembre 2015, entendu la requérante ainsi qu’un groupe d’experts composé de représentants de tous les États membres qui s’est réuni afin d’examiner l’affaire.

75      À cet égard, il suffit de constater que, à supposer même que les demandes d’informations adressées par la Commission aux autorités douanières belges aient été de nature à suspendre le délai de neuf mois, ce qui ne peut pas être le cas, puisque le mécanisme prévu à l’article 907 du règlement no 2454/93 ne pouvait pas être à nouveau applicable, plus de dix mois se seraient écoulés entre la réponse de ces autorités et l’adoption de la décision attaquée.

76      En l’espèce, il y a lieu de considérer qu’aucune mesure à prendre par la Commission ou prise par cette dernière ne peut justifier l’écoulement d’un tel délai. Il est vrai que l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), a obligé la Commission à réexaminer les éléments du dossier (voir point 55 ci-dessus). Toutefois, force est de constater, à l’instar de la requérante, qu’il n’apparaît nullement que, à la suite de cet arrêt, la Commission ait établi un nouveau dossier ni, a fortiori, apporté ou découvert de nouveaux éléments factuels.

77      Au demeurant, il y a lieu de souligner que la Commission avait déjà une bonne connaissance du dossier. Ainsi que cela ressort notamment d’une comparaison de la première décision avec la décision attaquée, dont les exposés des faits sont totalement identiques, le travail de la Commission a consisté, d’une part, à fonder la négligence de la requérante non sur la manière dont elle s’est vu délivrer les certificats d’importation, mais sur son utilisation de certificats destinés aux opérateurs nouveaux arrivés, ce qui serait clairement interdit en vertu de l’article 21, paragraphe 2, du règlement no 2362/98, et, d’autre part, à calculer la ventilation entre les montants correspondant aux certificats des opérateurs traditionnels et ceux correspondant aux certificats des opérateurs nouveaux arrivés. La Commission a soutenu, lors de l’audience, que le point essentiel de son réexamen du dossier avait consisté à effectuer cette ventilation, qui ne lui avait pas été communiquée avant l’adoption de la décision attaquée et qu’elle n’avait pas pu déterminer sur la base des informations qui lui avaient été communiquées par les autorités douanières belges.

78      Toutefois, il n’apparaît pas, et la Commission ne l’a d’ailleurs nullement soutenu, qu’elle ait repris intégralement l’examen du dossier. Elle a notamment indiqué dans ses écritures, d’une part, que, après l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), « elle pouvait se limiter à vérifier si l’opérateur ne s’était pas rendu coupable de manœuvre ou de négligence manifeste conformément à la deuxième condition de l’article 239 CDC » et, d’autre part, que, « [p]uisqu’il n’a pas été contesté [dans ce même arrêt] qu’il [était] question d’une situation particulière, il s’agissait uniquement de savoir si la requérante s’était rendue coupable ou non de manœuvre ou de négligence manifeste ».

79      À la lumière de ce qui précède, il convient donc de considérer que, eu égard à la nature des mesures à prendre ainsi que des circonstances contingentes de l’espèce, la Commission n’a pas observé un délai raisonnable dans la conduite de la procédure ayant précédé l’adoption de la décision attaquée.

80      La Commission a cependant fait valoir, au cours de la procédure écrite et de la procédure orale, que cette circonstance ne saurait entraîner l’annulation de la décision attaquée au motif que la requérante n’avait pas démontré qu’un délai plus court aurait conduit à une décision différente de celle qui a été adoptée, pas plus qu’elle n’avait démontré l’existence d’une atteinte à ses droits de la défense résultant de la durée excessive de la procédure administrative (voir point 70 ci-dessus).

81      À cet égard, il y a lieu d’observer qu’il ressort effectivement d’une jurisprudence constante que la violation du principe du délai raisonnable ne justifie l’annulation d’une décision prise à l’issue d’une procédure administrative qu’en tant qu’elle emporte également une violation des droits de la défense de l’intéressé. En effet, lorsqu’il n’est pas établi que l’écoulement excessif du temps a affecté la capacité des personnes concernées à se défendre effectivement, le non-respect du principe du délai raisonnable est sans incidence sur la validité de la procédure administrative (voir arrêt du 13 décembre 2016, Al-Ghabra/Commission, T‑248/13, EU:T:2016:721, point 62 et jurisprudence citée).

82      De même, il convient de rappeler que la violation du principe du respect du délai raisonnable ne justifie pas, en règle générale, l’annulation de la décision prise à l’issue d’une procédure administrative. En effet, ce n’est que lorsque l’écoulement excessif du temps est susceptible d’avoir une incidence sur le contenu même de la décision adoptée à l’issue de la procédure administrative que le non-respect du principe du délai raisonnable affecte la validité de la procédure administrative (voir arrêt du 7 juin 2013, Italie/Commission, T‑267/07, EU:T:2013:305, point 80 et jurisprudence citée).

83      En l’espèce, afin de se prononcer sur la question de savoir si le dépassement du délai raisonnable est susceptible d’entraîner l’annulation de la décision attaquée, il convient notamment de se référer aux dispositions procédurales en matière de remise des droits de douane pertinentes dans le présent cas d’espèce, à savoir les articles 235 à 239 du CDC et les articles 878 à 909 du règlement no 2454/93.

84      Selon ces dispositions, toute remise des droits à l’importation doit faire l’objet d’une demande spécifique de la part de l’intéressé (article 878, paragraphe 1, du règlement no 2454/93). Cette demande doit être déposée auprès de l’autorité douanière compétente (article 879, paragraphe 1, du règlement no 2454/93). Lorsqu’elle est en possession de tous les éléments nécessaires, l’autorité douanière compétente statue par écrit sur la demande de remise (article 886, paragraphe 1, du règlement no 2454/93).

85      Toutefois, lorsque l’autorité douanière n’est pas en mesure de prendre une décision sur la base des articles 899 et suivants du règlement no 2454/93, lesquels définissent un certain nombre de situations dans lesquelles la remise peut ou ne peut pas être accordée, et que « la demande est assortie de justifications susceptibles de constituer une situation particulière qui résulte de circonstances n’impliquant ni manœuvre ni négligence manifeste de la part de l’intéressé », l’État membre dont relève cette autorité transmet le cas à la Commission (article 905, paragraphe 1, du règlement no 2454/93). Le dossier transmis à la Commission doit comporter tous les éléments nécessaires à un examen complet du cas présenté (article 905, paragraphe 3, du règlement no 2454/93). Dans les quinze jours suivant la date de réception du dossier, la Commission en communique copie aux États membres (article 906, premier alinéa, du règlement no 2454/93). L’article 906 bis du règlement no 2454/93 précise que, lorsque la Commission a l’intention de prendre une décision défavorable au demandeur du remboursement ou de la remise, elle doit lui communiquer ses objections par écrit, ainsi que tous les documents sur la base desquels elle a émis lesdites objections, le demandeur ayant alors un mois pour exprimer son point de vue.

86      Ensuite, après consultation d’un groupe d’experts composé de représentants de tous les États membres réunis dans le cadre du comité des douanes afin d’examiner le cas d’espèce, la Commission prend une décision établissant soit que la situation particulière examinée justifie l’octroi de la remise, soit qu’elle ne le justifie pas (article 907, premier alinéa, du règlement no 2454/93). Cette décision doit intervenir dans un délai de neuf mois à compter de la date de réception par la Commission du dossier transmis par l’État membre (article 907, deuxième alinéa, du même règlement) et doit être notifiée dans les meilleurs délais à l’État membre concerné (article 908, paragraphe 1, du même règlement). C’est sur la base de cette décision de la Commission que l’autorité de décision devra statuer sur la demande de remise qui lui a été présentée (article 908, paragraphe 2, du règlement no 2454/93).

87      Lorsque la Commission est amenée à demander des éléments d’information complémentaires pour pouvoir statuer, le délai de neuf mois est prolongé du temps qui s’est écoulé entre la date de l’envoi par la Commission de la demande d’éléments d’information complémentaires et la date de réception de ceux-ci. Le demandeur du remboursement ou de la remise est informé de la prolongation (article 907, troisième alinéa, du règlement no 2454/93). Lorsque la Commission communique ses objections au demandeur du remboursement ou de la remise, conformément à l’article 906 bis, le délai de neuf mois est prolongé d’un mois.

88      En vertu de l’article 909 du règlement no 2454/93, si la Commission n’a pas arrêté sa décision dans le délai de neuf mois visé à l’article 907 de ce règlement, l’autorité douanière nationale donne une suite favorable à la demande de remboursement ou de remise.

89      Il découle des dispositions susmentionnées que le règlement no 2454/93 a notamment pour vocation de préciser certaines règles en vue d’une plus grande sécurité juridique lors de leur application, ainsi que cela ressort de ses considérants, et qu’il a prévu des délais stricts à respecter tant par le demandeur que par la Commission aux fins de traiter une demande de remise des droits à l’importation.

90      Il ressort de l’article 907 du règlement no 2454/93 que, si le délai de neuf mois dont dispose la Commission pour adopter sa décision peut être suspendu sous certaines conditions, la décision sur la demande de remise des droits doit être rendue dans le délai fixé par l’article 907, deuxième alinéa, du règlement no 2454/93, étant précisé que l’absence de réponse dans ce délai vaut obligatoirement acceptation de la demande par l’autorité douanière compétente, en vertu de l’article 909 du même règlement.

91      En l’espèce, si la Commission avait agi dans le cadre du règlement no 2454/93, il convient de relever que sa décision rendue au-delà du délai de forclusion de neuf mois, suspensions comprises, prévu par l’article 907 de ce même règlement, aurait valu acceptation de la demande de la requérante par l’autorité douanière.

92      Dans les circonstances de l’espèce, il est certes vrai que le système mis en place, et en particulier le délai de neuf mois prévu par l’article 907 du règlement no 2454/93, ne s’imposait plus à la Commission dans le cadre de la procédure ouverte en vertu de l’article 266 TFUE (voir points 63 et 71 ci-dessus). Toutefois, il n’en demeure pas moins que, en adoptant la décision attaquée sans observer un délai raisonnable, la Commission s’est affranchie des garanties prévues par le règlement no 2454/93 et a privé la requérante de l’effet utile de ce règlement, de la possibilité d’obtenir une décision dans les délais prévus ainsi que de la garantie de bénéficier d’une décision favorable en l’absence de réponse dans ces délais.

93      Partant, il y a lieu de considérer que la Commission, en adoptant la décision attaquée 34 mois après le prononcé de l’arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission (T‑324/10, EU:T:2013:136), a violé le principe du délai raisonnable, ce qui constitue, dans les circonstances propres à la présente affaire, un motif d’annulation de la décision attaquée.

94      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a donc lieu d’accueillir le troisième moyen du recours et d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit besoin d’examiner le cinquième moyen.

 Sur les dépens

95      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

96      En l’espèce, la Commission succombant pour l’essentiel, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens et ceux de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      L’article 1er, paragraphe 4, de la décision C(2016) 95 final de la Commission, du 20 janvier 2016, constatant qu’il est justifié de procéder à la prise en compte a posteriori des droits à l’importation et que la remise des droits est justifiée à l’égard d’un débiteur, mais qu’elle est justifiée pour une partie à l’égard d’un autre débiteur dans un cas particulier et n’est pas justifiée pour une autre partie à l’égard de ce débiteur particulier, et modifiant la décision C(2010) 2858 final de la Commission du 6 mai 2010, est annulé.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission européenne supportera ses dépens ainsi que ceux exposés par la Firma Léon Van Parys NV.

Kanninen

Schwarcz

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 décembre 2017.

Signatures


* Langue de procédure : le néerlandais.