Language of document : ECLI:EU:T:2022:518

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

7 septembre 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative Völkl – Marque de l’Union européenne verbale antérieure VÖLKL – Cause de nullité relative – Absence de risque de confusion – Absence de similitude des produits – Article 8, paragraphe 1, sous b), et article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 40/94 [devenus article 8, paragraphe 1, sous b), et article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑155/21,

Völkl GmbH & Co. KG, établie à Erding (Allemagne), représentée par Mes C. Raßmann, M. Suether et F. Adinolfi, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Marker Dalbello Völkl (International) GmbH, établie à Baar (Suisse), représentée par Me J. Bauer, avocat,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, U. Öberg et Mme M. Brkan (rapporteure), juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 19 janvier 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Völkl GmbH & Co. KG, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 11 janvier 2021 (affaire R 568/2020-4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 5 mars 2018, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande en nullité de la marque de l’Union européenne ayant été enregistrée le 12 avril 2007 à la suite d’une demande déposée le 2 juin 2005 pour le signe figuratif suivant (ci-après « la marque figurative contestée ») :

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3        Les produits couverts par la marque figurative contestée pour lesquels la nullité était demandée relevaient notamment, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’EUIPO, des classes 18, 25 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Sacs de sport et de voyage, sacs à dos, à l’exclusion des sacs à dos en cuir ou en imitations du cuir » ;

–        classe 25 : « Articles d’habillement et chapellerie » ;

–        classe 28 : « Appareils et articles de sport et leurs pièces, accessoires pour appareils et articles de sport (tous les articles précités compris dans la classe 28) ».

4        Les causes invoquées à l’appui de la demande en nullité étaient celles visées à l’article 60, paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, de ce règlement.

5        La demande en nullité était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque de l’Union européenne verbale VÖLKL (ci-après la « marque verbale antérieure »), enregistrée le 11 octobre 2013 sous le numéro 4403705, désignant les produits relevant des classes 3, 9 et 18 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits de soin des chaussures » ;

–        classe 9 : « Chaussures spéciales (chaussures de pompiers) » ;

–        classe 18 : « Cuir et articles en cuir, excepté sacs de sport et de voyage ».

–        la marque figurative allemande, enregistrée le 21 avril 1971 sous le numéro 880383, reproduite ci-après et désignant les produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Chaussures, notamment chaussures de ski, chaussures d’après-ski, chaussures de montagne, bottes fourrées, chaussures d’escalade, chaussures de marche » :

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–        la dénomination commerciale allemande VÖLKL pour des « chaussures ».

6        Le 31 janvier 2020, la division d’annulation a partiellement fait droit à la demande en nullité sur le fondement de l’article 60, paragraphe 2, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

7        Le 18 mars 2020, l’intervenante, Marker Dalbello Völkl (International) GmbH, titulaire de la marque figurative contestée, a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

8        Le 14 mai 2020, l’intervenante a déposé auprès de l’EUIPO, au titre de de l’article 57, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, une demande d’inscription d’une renonciation à une partie des produits relevant de la classe 25 pour lesquels la marque est enregistrée. Plus particulièrement, elle proposait de redéfinir la liste des produits initialement visés dans cette classe de la manière suivante : « Vêtements de ski et de snowboard, à savoir anoraks, pantalons, vestes polaires, chandails, sweat-shirts, sweat-shirts à capuche, bas, sous-vêtements, gants ; chapeaux de ski et de snowboard ; bonnets de ski et de snowboard ; pantalons de tennis, chaussettes de tennis, polos de tennis, casquettes de tennis » (ci-après, les vêtements de ski et de snowboard ») .

9        La chambre de recours a accueilli le recours de l’intervenante en annulant la décision de la division d’annulation et en rejetant la demande en nullité dans son intégralité et en ordonnant le maintien de l’enregistrement de la marque figurative contestée. En particulier, elle a pris acte de la renonciation partielle à la marque figurative contestée en cours d’instance et a ainsi conclu à l’absence de risque de confusion en raison de l’absence de similitude entre les produits de la marque figurative contestée et les produits couverts par la marque verbale antérieure. La chambre de recours a également confirmé les constatations de la division d’annulation afférentes à l’absence de preuve de l’usage sérieux de la marque allemande antérieure et de la dénomination commerciale.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens, y compris ceux exposés devant la chambre de recours.

11      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement de la marque figurative contestée, à savoir le 2 juin 2005, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement 2017/1001] (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40, et arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée). Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

13      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée, par la requérante dans l’argumentation soulevée, par l’intervenante et par l’EUIPO dans ses écritures à l’article 60, paragraphes 1 et 2, à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, comme visant respectivement l’article 52, paragraphes 1 et 2, l’article 8, paragraphe 1, sous b) et l’article 8, paragraphe 4, d’une teneur identique du règlement no 40/94.

 Sur l’étendue de la protection revendiquée par la marque verbale antérieure

14      La requérante soutient que la protection de la marque verbale antérieure relative aux produits relevant de la classe 9 concernant les « chaussures spéciales (chaussures de pompiers) » s’étend en réalité à l’ensemble de la catégorie des « chaussures spéciales » et non pas uniquement aux chaussures de pompiers en tant qu’un type, parmi d’autres, de chaussures spéciales.

15      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

16      Il ressort d’une jurisprudence constante que la liste des produits pour lesquels l’enregistrement d’une marque est demandé doit être établie de manière à faire apparaître clairement leur nature. Ainsi, il incombe à tout demandeur d’une marque de l’Union européenne de fournir une description visant à satisfaire aux exigences de précision et de la clarté afin de permettre aux autorités compétentes et aux opérateurs économiques de déterminer l’étendue de la protection demandée [voir, en ce sens, arrêts du 3 juin 2015, Lithomex/OHMI – Glaubrecht Stingel (LITHOFIX), T‑273/14, non publié, EU:T:2015:352, point 27 et jurisprudence citée, et du 25 juin 2020, Pavel/EUIPO – bugatti (B), T‑114/19, non publié, EU:T:2020:286, point 48 et jurisprudence citée].

17      Par ailleurs, il a déjà été jugé, en pareilles circonstances, que l’utilisation de parenthèses a pour effet de restreindre le champ de la protection demandée aux seuls produits placés entre lesdites parenthèses, qui sont englobés dans la catégorie plus générale indiquée avant ceux-ci [voir, en ce sens, arrêt du 28 mai 2020, Korporaciya « Masternet »/EUIPO – Stayer Ibérica (STAYER), T‑681/18, non publié, EU:T:2020:222, point 26 et jurisprudence citée].

18      En l’espèce, la marque verbale antérieure a été enregistrée, s’agissant des produits relevant de la classe 9, pour des « chaussures spéciales (chaussures de pompiers) ». La catégorie « chaussures spéciales » est donc restreinte par l’ajout de l’expression « (chaussures de pompiers) ». Cette mention, déterminant clairement la catégorie d’utilisateurs spécifiques des produits concernés, constitue, dès lors, une sous-catégorie de chaussures spéciales. En effet, eu égard à la jurisprudence citée au point 17 ci-dessus, cette inscription au registre désigne une sous-catégorie de chaussures spéciales, en visant directement et sans équivoque le public professionnel concerné et répondant à leurs besoins spécifiques, qui ne saurait être confondu avec d’autres catégories d’utilisateurs d’autres types de chaussures spéciales.

19      Partant, il n’y a pas lieu de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle la marque verbale antérieure couvre, s’agissant des produits relevant de la classe 9, uniquement les chaussures de pompiers.

20      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le moyen soulevé par la requérante.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement

21      À l’appui de son recours, la requérante doit, nonobstant la mention de l’article 60, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, être regardée comme soutenant, en substance, que la chambre de recours a méconnu l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, en ce qu’elle a erronément analysé les facteurs pertinents à prendre en compte pour l’appréciation globale du risque de confusion, notamment ceux relatifs au public pertinent et ceux relatifs à la similitude des produits concernés.

22      L’EUIPO et l’intervenante concluent au rejet du présent moyen.

23      Aux termes de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94 et de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement, une marque de l’Union européenne est déclarée nulle, sur demande du titulaire d’une marque antérieure visée à l’article 8, paragraphe 2, de ce règlement, lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec ladite marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel cette marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend également le risque d’association avec la marque antérieure.

24      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion, le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

25      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n40/94, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

26      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits ou de services concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

27      Le public pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est constitué des utilisateurs susceptibles d’utiliser tant les produits ou les services visés par la marque antérieure, que ceux visés par la marque figurative contestée. Ainsi, en règle générale, lorsque les produits ou services de l’une des marques en conflit sont inclus dans la désignation plus large visée par l’autre marque, le public pertinent est défini par référence au libellé le plus spécifique [voir arrêt du 24 mai 2011, ancotel/OHMI – Acotel (ancotel.), T‑408/09, non publié, EU:T:2011:241, points 38 et 39 et jurisprudence citée].

28      Par « consommateur moyen », il n’y a pas lieu d’entendre le seul consommateur faisant partie du « grand public », mais le consommateur faisant partie du public typiquement ciblé par les produits et les services en cause. Ainsi, le « consommateur moyen » peut être un professionnel, si les produits et les services en cause s’adressent typiquement à un tel public [voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2017, Steiniger/EUIPO – ista Deutschland (IST), T‑80/17, non publié, EU:T:2017:784, point 25].

29      La requérante estime qu’un client achetant des chaussures spéciales est un consommateur de produits relevant de la classe 25 couverts par la marque figurative contestée. Elle en déduit que le public pertinent que ce soit pour les « chaussures spéciales » ou pour les vêtements de ski et de snowboard couverts par la marque figurative contestée, est le grand public.

30      À cet égard, il y a lieu de constater que les arguments développés par la requérante se fondent sur la prémisse erronée selon laquelle la marque verbale antérieure était enregistrée pour les chaussures spéciales en général, alors que, ainsi qu’il ressort du point 19 ci-dessus, sa protection, s’agissant des produits relevant de la classe 9, est limitée aux chaussures de pompiers.

31      En outre, la requérante relève que l’EUIPO a déjà considéré, par exemple, dans le cadre de deux décisions antérieures, que le public auquel s’adressent les chaussures comprises dans la classe 9 fait également partie des consommateurs ciblés par les produits relevant de la classe 25.

32      Or, il y a lieu de relever que l’EUIPO est appelé à décider en fonction des circonstances de chaque cas d’espèce et qu’il n’est pas lié par des décisions antérieures prises dans d’autres affaires. En effet, la légalité des décisions de la chambre de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement no 40/94 et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci. En outre, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal n’est pas lié par la pratique décisionnelle de l’EUIPO [voir arrêt du 15 décembre 2015, LTJ Diffusion/OHMI – Arthur et Aston (ARTHUR & ASTON), T‑83/14, EU:T:2015:974, point 39 et jurisprudence citée].

33      Par ailleurs, bien que les affaires citées par la requérante concernaient effectivement des produits relevant de la classe 9, il ne s’agissait cependant pas spécifiquement des chaussures de pompiers. De même, bien que lesdites affaires citées par la requérante concernaient effectivement des produits relevant de la classe 25, il ne s’agissait cependant pas spécifiquement des vêtements de ski et de snowboard. Dès lors, l’argument de la requérante selon lequel l’EUIPO a déjà décidé que le public pertinent des produits visés relevant de la classe 9 et celui des produits visés relevant de la classe 25 est le même, doit, en tout état de cause, être rejeté comme non fondé.

34      En l’espèce, la chambre de recours a relevé à juste titre, au point 30 de la décision attaquée, que les produits couverts par la marque figurative contestée étaient des articles spéciaux d’habillement et de chapellerie pour le ski et le snowboard, utilisés par le groupe de consommateurs qui pratique ces activités, à savoir le grand public.

35      De même, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué au point 29 de la décision attaquée, les chaussures de pompiers visées par la marque verbale antérieure s’adressent spécifiquement aux pompiers, qui sont des consommateurs professionnels qui doivent porter des vêtements de travail spécifiques.

36      La requérante soutient que les chaussures de pompiers, visées par la marque verbale antérieure, sont également achetées par des clients issus du secteur du motocyclisme ou effectuant des travaux forestiers, ou que les pompiers peuvent pratiquer le ski et le snowboard.

37      À cet égard, il y a lieu de constater que, s’il ne peut être exclu que, dans certaines circonstances, les publics auxquels s’adressent les produits désignés par les marques en conflit puissent se chevaucher, notamment en ce que le grand public puisse utiliser, dans certaines circonstances, des produits destinés à des professionnels, cela ne peut suffire pour démontrer que le grand public est le public pertinent des produits destinés à un usage spécifique par des professionnels, tels que les pompiers \/. Ainsi, les circonstances que les chaussures de pompiers, visées par la marque verbale antérieure, puissent être occasionnellement achetées par des clients issus du secteur du motocyclisme ou effectuant des travaux forestiers, ou que les pompiers puissent pratiquer le ski et le snowboard sont sans conséquence sur la constatation de la chambre de recours qui a distingué, à juste titre, les publics respectifs des produits visés par chacune des marques en conflit.

38      S’agissant du niveau d’attention du public pertinent, la requérante considère que les clients achetant les « chaussures spéciales (chaussures de pompiers) » ne se préoccuperaient que de la protection qu’elles confèrent, en ce qu’elles protègent leurs utilisateurs contre les éléments, tels que le froid ou la chaleur. Elle relève également que le public pertinent consommant les produits relevant de la classe 25 couverts par la marque figurative contestée, ne ferait pas preuve d’une attention élevée dans la mesure où ces produits sont des produits de consommation courante.

39      Il convient de souligner que selon une jurisprudence constante, le seul fait qu’un type de produits n’est pas régulièrement acheté par le consommateur tend à démontrer que le niveau d’attention de celui-ci sera plutôt élevé [voir, en ce sens, arrêt du 13 octobre 2009, Deutsche Rockwool Mineralwoll/OHMI – Redrock Construction (REDROCK), T‑146/08, non publié, EU:T:2009:398, point 45 et jurisprudence citée].

40      Il convient de souligner que tant les produits visés par la marque verbale antérieure, à savoir les chaussures de pompiers, que ceux visés par la marque figurative contestée, à savoir les vêtements de ski et de snowboard, n’ont pas vocation à être utilisés en toutes circonstances par les consommateurs moyens. Leur nature spécialisée nécessite un choix précis et avisé. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que le niveau d’attention du public pertinent était élevé.

41      Partant, il y a lieu de conclure que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, aux points 29 et 30 de la décision attaquée, que le public pertinent était composé, s’agissant des produits visés par la marque figurative contestée, du grand public faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, et, s’agissant des produits visés par la marque verbale antérieure, des pompiers faisant également preuve d’un niveau d’attention élevé.

 Sur la comparaison des produits

42      La requérante estime que les produits couverts par la marque verbale antérieure et ceux couverts par la marque figurative contestée sont similaires. À cet égard, elle considère, tant dans sa requête que lors de l’audience, qu’il existe des similitudes entre les produits concernés, au regard de leur nature, destination, utilisation, caractère complémentaire et voie de commercialisation.

43      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

44      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 8 ci-dessus, l’intervenante a, au cours de la procédure devant la chambre de recours, renoncé à la marque figurative contestée pour une partie des produits relevant de la classe 25. Ainsi qu’il ressort du point 9 ci-dessus, la chambre de recours a, par conséquent, ordonné le maintien de l’enregistrement de ladite marque pour les produits relevant de la classe 25 non concernés par la renonciation. En réponse à une question posée dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, l’EUIPO a indiqué que la chambre de recours avait informé l’instance chargée de la tenue du registre de la renonciation partielle le 16 novembre 2021. Lors de l’audience, l’EUIPO a confirmé au Tribunal que la renonciation partielle avait été inscrite au registre le 30 novembre 2021 et publiée le 2 décembre 2021.

45      Pour apprécier la similitude entre les produits en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

46      D’abord, la requérante considère que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation, en constatant que le fait que les produits s’adressent à des groupes de consommateurs différents était suffisant pour les considérer comme n’étant pas similaires. Toutefois, force est de relever, qu’il résulte des points 32 à 39 de la décision attaquée, que la chambre de recours ne s’est pas cantonnée à ce constat pour conclure à l’absence de similitude entre les produits relevant de la classe 25 couverts par la marque figurative contestée et les produits relevant de la classe 9 couverts par la marque verbale antérieure. Elle a également précisé que ces produits différaient par leurs domaines d’application, par leurs circuits de distribution et par leurs fabricants. Partant, l’argument, de la requérante doit, en tout état de cause, être rejeté. 

47      S’agissant de la nature des produits en cause, la requérante, en comparant les chaussures spéciales et les vêtements de ski et de snowboard, estime que tous ces produits participent à la protection du corps contre les éléments.

48      Ainsi qu’il a été relevé aux points 16 à 20 ci-dessus, la requérante fonde son argumentation sur la prémisse erronée que les produits visés par la marque verbale antérieure sont toutes les chaussures spéciales et pas uniquement les chaussures de pompiers. Par ailleurs, il y a lieu de constater que les produits relevant de la classe 9 visés par la marque verbale antérieure et les produits relevant de la classe 25 visés par la marque figurative contestée, ont, certes, en commun le fait qu’ils peuvent servir de protection dans certaines situations, notamment contre la chaleur ou le froid. Toutefois, il y a lieu de constater que les chaussures de pompiers ont vocation à accorder une protection aux pieds, à un niveau qui n’est requis essentiellement que dans certaines situations tenant à un domaine professionnel. En revanche, la marque figurative contestée concerne notamment les vêtements de ski et de snowboard visant à protéger et couvrir toutes les parties du corps pour permettre une activité saisonnière de loisir et répondant à la fois à des besoins techniques mais aussi esthétiques.

49      À ce titre, la requérante relève que l’EUIPO a déjà considéré, par exemple, dans le cadre d’une décision antérieure, que les produits relevant de la classe 9 étaient similaires aux produits relevant de la classe 25. Or, comme indiqué au point 32 ci‑dessus, l’EUIPO n’est pas lié par ses décisions antérieures, prises dans d’autres affaires.

50      En outre, s’agissant de la destination des produits en cause et de leur utilisation, la requérante estime que les « chaussures spéciales » sont utilisées dans des situations qui sortent du cadre du quotidien et relèvent de la notion de vêtement de ski et de snowboard.

51      Or, force est de constater que les vêtements pour le ski et le snowboard ont une finalité très différente de celle des chaussures de pompiers, comprises dans la classe 9 et couvertes par la marque verbale antérieure, car, comme déjà constaté par la chambre de recours aux points 29 et 30 de la décision attaquée, les premiers tendent à protéger de l’humidité et du froid, dans le cadre, en principe, de l’exercice d’une activité de loisir, tandis que les seconds protègent au contraire du feu et de la chaleur, essentiellement dans le cadre de l’exercice d’une activité professionnelle.

52      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, aux points 29 à 33 de la décision attaquée, que les chaussures de pompiers, d’une part, et les vêtements de ski et de snowboard, d’autre part, s’adressaient non seulement à des clientèles différentes, mais étaient également utilisés dans des contextes différents. Ainsi que le relève la chambre de recours au point 33 de la décision attaquée, un pompier ne portera pas de vêtements de ski et de snowboard lors de ses interventions, de même que les skieurs ou snowboardeurs ne porteront pas de chaussures de pompiers lors de la pratique de leur sport.

53      Il importe, à ce titre, de relever que le fait que le public professionnel auquel s’adressent les produits désignés par la marque verbale antérieure puisse également comprendre des personnes s’intéressant aux vêtements de ski et de snowboard ne changeait rien au constat qu’un tel public n’établirait aucun lien entre la pratique d’activités sportives et de loisirs, à savoir le ski et le snowboard, et l’exercice de leur activité professionnelle.

54      S’agissant du caractère complémentaire ou concurrent des produits en cause, selon la jurisprudence, les produits complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise. Par définition, des produits adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, points 57 et 58 et jurisprudence citée).

55      À ce titre, la requérante estime les chaussures de ski et les chaussures de snowboard, en tant que chaussures spéciales, sont complémentaires de vêtements de ski et de snowboard. Or, cet argument de la requérante repose sur la prémisse erronée selon laquelle la marque verbale antérieure couvre les chaussures spéciales en général, alors qu’elle ne couvre que les chaussures de pompiers. Dès lors, il y a lieu de rejeter cet argument.

56      S’agissant des conditions de commercialisation des produits en cause, la requérante estime que, à supposer même que les chaussures spéciales couvertes par la marque verbale antérieure ne sont que des chaussures de pompiers, certains fabricants de chaussures de pompiers commercialisent également des vêtements tels que ceux couverts par la marque figurative contestée, à savoir pour la pratique du ski et du snowboard. Selon la requérante, un tel argument démontre que les produits en cause sont similaires.

57      À ce titre, il convient de relever que le fait que ces produits puissent être vendus dans les mêmes établissements ne permet de tirer aucune conclusion s’agissant de leur similitude. En effet, il ressort d’une jurisprudence constante que le fait que des produits puissent être vendus dans les mêmes établissements commerciaux, tels que les plateformes de vente en ligne, n’est pas particulièrement significatif, dès lors qu’il est possible de trouver dans ces points de vente, a fortiori s’il s’agit de plateformes de vente en ligne, des produits de natures très diverses, sans que les consommateurs leur attribuent automatiquement une même origine [voir, en ce sens, arrêts du 2 juillet 2015, BH Stores/OHMI – Alex Toys (ALEX), T‑657/13, EU:T:2015:449, point 83, et du 17 février 2017, Hernández Zamora/EUIPO – Rosen Tantau (Paloma), T‑369/15, non publié, EU:T:2017:106, point 28]. L’argument tiré de la présence de chaussures de pompiers sur certains sites de vente en ligne commercialisant également des vêtements de ski et de snowboard, ne permet donc pas de considérer que lesdites chaussures de pompiers sont des produits nécessairement similaires aux vêtements de ski et de snowboard.

58      Par ailleurs, la requérante estime qu’une même entreprise peut fabriquer à la fois des chaussures spéciales et des vêtements de ski et de snowboard. À cet égard, il convient de constater que, d’une part, cet argument repose sur la prémisse erronée rappelée au point 30 ci-dessus et, d’autre part, la requérante n’a pas établi que les mêmes entreprises fabriquaient habituellement des chaussures de pompiers et des vêtements de ski et de snowboard.

59      En conséquence, les arguments de la requérante ne sauraient remettre en cause la constatation de la chambre de recours relative à la comparaison des produits en cause. Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que c’est à juste titre que cette dernière a conclu à l’absence de similitude entre ces produits.

 Sur le risque de confusion

60      Ainsi qu’il est rappelé au point 25 ci-dessus, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent.

61      En l’espèce, la chambre de recours ayant conclu à juste titre à l’absence de similitude entre les produits en cause, c’est, par conséquent, à bon droit qu’elle a considéré, au point 39 de la décision attaquée, que l’une des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 n’était pas remplie en l’espèce.

62      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement doit être écarté et, partant, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

63      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

64      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Völkl GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.

Spielmann

Öberg

Brkan

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 septembre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.