Language of document : ECLI:EU:T:2004:46

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

18 février 2004

Langue de procédure: le français.Marque communautaire Demande de marque communautaire verbale CONFORFLEX Marques nationales antérieures verbales et figuratives FLEX Risque de confusion Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94Dans l'affaire T-10/03,

Jean-Pierre Koubi, demeurant à Marseille (France), représenté par Me K. Manhaeve, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mmes S. Laitinen et S. Pétrequin, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

l'intervenant devant le Tribunal étant

Fabricas Lucia Antonio Betere, SA (Flabesa), établie à Madrid (Espagne), représentée par Me I. Valdelomar, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 16 octobre 2002 (affaire R 542/2001-4), relative à une procédure d'opposition entre M. Koubi et Fabricas Lucia Antonio Betere, SA (Flabesa),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre)composé de M. H. Legal, président, Mme V. Tiili et M. M. Vilaras, juges, greffier: Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du

20 novembre 2003,

rend le présentArrêt

 Antécédents du litige

1        Le 13 mai 1999, le requérant a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal CONFORFLEX.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent de la classe 20 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante: «meubles de literie».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 93/99 du 22 novembre 1999.

5        Le 21 février 2000, Fabricas Lucia Antonio Betere, SA (ci-après l’«intervenante»), a formé une opposition en vertu de l’article 42, paragraphe 1, du règlement n° 40/94. Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était le risque de confusion visé par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 entre la marque demandée et quatre marques antérieures dont l’intervenante est titulaire.

6        Dans sa décision du 23 mars 2001, la division d’opposition a, tout d’abord, considéré que la preuve de l’usage sérieux n’avait pas été rapportée pour deux des quatre marques antérieures et, dès lors, pris en compte les deux seules marques suivantes:

–        la marque figurative, telle que représentée ci-dessous, enregistrée en Espagne sous le n° 1 951 681

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–        la marque figurative, telle que représentée ci-dessous, enregistrée en Espagne sous le n° 2 147 672

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7        Les produits pour lesquels les marques antérieures sont enregistrées relèvent de la classe 20 au sens de l’arrangement de Nice et correspondent à la description suivante: «Lits, matelas et oreillers à base de laine, bourre de laine et chaume, crins de cheval et matières similaires, matelas mixtes avec ressorts élastiques, oreillers et matelas en caoutchouc, mousse et tous types de mousse polyuréthane; berceaux, divans; matelas de paille avec bois et ressorts à charpente en fer; lits superposés, tables de nuit, berceaux, meubles de camping et de plage, meubles en tout genre, y compris meubles métalliques, meubles convertibles, bureaux, matelas à ressorts métalliques et tubulaires, matelas pneumatiques à usage non médical, matelas et matelas à ressorts pour literie, cadres de lit (en bois); articles de literie à l’exception des couvertures de lits; installations de literie (non métalliques), roulettes de lits, non métalliques; matelas à ressorts pour lits, lits d’hôpital; lits hydrostatiques, à usage non médical, meubles, miroirs, cadres, produits, non compris dans d’autres classes, en bois, liège, roseau, jonc, osier, corne, os, ivoire, baleine, écaille, ambre, nacre, écume de mer, succédanés de toutes ces matières ou en matières plastiques».

8        La division d’opposition a ensuite rejeté l’opposition au motif que, les marques en cause n’étant pas similaires, il n’existait pas de risque de confusion entre elles.

9        Le 18 mai 2001, l’intervenante a formé un recours au titre de l’article 59 du règlement n° 40/94 visant à annuler la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 16 octobre 2002 (ci-après la «décision attaquée»), notifiée au requérant le 7 novembre suivant, la quatrième chambre de recours de l’OHMI a fait droit au recours et a, conséquemment, annulé la décision de la division d’opposition et rejeté la demande de marque communautaire. En substance, la chambre de recours a considéré que les signes en cause partagent la même référence à la flexibilité et présentent de fortes similitudes conceptuelles, lesquelles n’avaient pas été analysées par la division d’opposition. En outre, la chambre de recours a également indiqué que, s’il se peut que le terme «flex» soit évocateur, le requérant n’a pas prouvé qu’il est souvent utilisé, sur le marché espagnol, par d’autres entreprises pour désigner des meubles de literie. Dans ces conditions, et compte tenu également de l’identité des produits concernés, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée et les marques antérieures.

 Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 janvier 2003, le requérant a introduit le présent recours.

12      L’intervenante et l’OHMI ont déposé leur mémoire en réponse au greffe du Tribunal, respectivement, les 16 avril et 12 mai 2003.

13      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

–        annuler la décision attaquée;

–        condamner l’OHMI aux entiers dépens.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

–        rejeter le recours;

–        condamner le requérant aux dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

–        rejeter le recours;

–        rejeter la marque demandée;

–        rendre une décision qui lui est favorable sur les dépens.

 En droit

16      Le requérant invoque, en substance, un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Arguments des parties

17      Le requérant fait observer, à titre liminaire et en se référant à l’arrêt de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL (C‑251/95, Rec. p. I‑6191), que le risque de confusion dans l’esprit du public doit être apprécié globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et, notamment, de la similarité phonétique, visuelle et conceptuelle des marques en cause ainsi que du caractère distinctif de celles-ci.

18      Il prétend, en premier lieu, que les signes en cause ne sont pas similaires.

19      Sur le plan visuel, il relève que les marques antérieures sont composées d’un ou de plusieurs éléments figuratifs ainsi que d’un élément verbal, alors que la marque demandée est purement verbale, le terme «flex» n’étant pas, en outre, spécifiquement mis en valeur.

20      Sur le plan phonétique, il soutient que le fait que l’unique syllabe des marques antérieures soit identique à la troisième syllabe de la marque communautaire demandée est insuffisant pour considérer que les marques en cause présentent des ressemblances phonétiques. Il fait valoir que, d’une manière générale, et ainsi que cela a été relevé par une chambre de recours dans une affaire opposant les marques INCEL et LINZEL (Vertex Pharmaceuticals Inc. ci Almirall-Prodespharma SA, décision R 793/2001‑2 du 16 octobre 2002), le consommateur prête une plus grande attention au début de la marque qu’à la fin. Par ailleurs, le signe verbal revendiqué, prononcé en espagnol, fera ressortir la première syllabe, l’accent étant nettement plus appuyé sur la première syllabe que sur les deuxième et troisième syllabes.

21      Sur le plan conceptuel, le concept des marques antérieures reposerait aussi bien sur le symbole du cygne que sur l’évocation de la notion de flexibilité, alors que le concept de la marque demandée consisterait à «mettre en perspective» les notions de confort et de flexibilité, l’accent étant cependant mis sur la notion de confort, évoquée par la première syllabe de la marque.

22      En deuxième lieu, le requérant fait observer que la chambre de recours n’a pu relever une similitude que concernant le terme «flex», commun aux deux marques en cause et considéré par la chambre de recours comme l’élément dominant des marques antérieures. À supposer que cette dernière affirmation puisse être considérée comme exacte, le requérant prétend que cet élément dominant doit être distinctif afin d’influencer l’appréciation du risque de confusion. En effet, conformément à l’arrêt SABEL, précité, le risque de confusion serait d’autant plus grand que le caractère distinctif de la marque antérieure est important.

23      Se référant à l’arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer (C‑342/97, Rec. p. I‑3819), le requérant indique que, lors de l’appréciation du caractère distinctif d’une marque, il convient de prendre en compte tous les éléments pertinents et notamment les qualités intrinsèques de la marque, y compris le fait qu’elle est ou non dénuée de tout élément descriptif des produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée.

24      Or, le terme «flex» évoquerait clairement et spontanément la notion ou la qualité de flexibilité. Il constituerait d’ailleurs la racine des mots espagnols «flexibilidad» ou «flexible» et serait, en tant que tel, la plus courte expression permettant d’évoquer cette caractéristique.

25      Le requérant fait valoir que la flexibilité étant une qualité essentielle de tout produit de literie, de très nombreuses marques communautaires, internationales ou simplement espagnoles utilisent le terme «flex» pour désigner ce type de produit.

26      Ainsi, le terme «flex», évocateur de la qualité de flexibilité, serait usuel en ce qu’il apparaît dans de nombreuses marques. Le requérant affirme que le caractère distinctif des marques antérieures ne peut résider dans un élément usuel, même si ce dernier est dominant. Il souligne qu’il ne peut être raisonnablement conclu à un risque de confusion entre deux marques lorsque la similitude entre ces marques se limite à la présence d’un élément commun usuel. Il conclut que, étant donné que la chambre de recours n’a pu relever une similitude entre les marques qu’eu égard à la présence commune du signe verbal «flex», terme usuel pour désigner des produits de literie, aucun risque de confusion n’existe entre les marques antérieures et la marque demandée.

27      En troisième et dernier lieu, le requérant, d’une part, relève que la décision attaquée ne remet pas en cause la constatation opérée par la division d’opposition selon laquelle l’intervenante n’a apporté aucune preuve de la renommée des marques antérieures et, d’autre part, affirme que ces dernières ont été cédées à la société de droit espagnol Flex Equipos De Descanso, SA, qui serait donc le titulaire actuel desdites marques.

28      L’OHMIfait valoir que les nouvelles pièces déposées par le requérant devant le Tribunal aux fins de démontrer l’absence de caractère distinctif du terme «flex» ne peuvent être prises en compte par la juridiction conformément à la solution retenue dans l’arrêt du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY) (T‑247/01, Rec. p. II‑5301). En outre, à supposer même que de telles pièces puissent être retenues par le Tribunal, elles ne sauraient suffire à démontrer que le terme «flex» était utilisé à la date de dépôt de la demande de marque communautaire, sur le marché espagnol, par d’autres entreprises en relation avec des meubles, et notamment des meubles de literie, et que, en conséquence, il serait considéré par les consommateurs comme totalement dépourvu de caractère distinctif.

29      L’OHMI prétend également que c’est à juste titre que, tenant compte de l’identité des produits concernés et de la similarité des signes en cause, la chambre de recours a conclu qu’il existe un risque de confusion, incluant le risque d’association, sur le territoire duquel les marques antérieures sont protégées, à savoir l’Espagne.

30      À titre liminaire, l’intervenante demande au Tribunal de ne pas tenir compte des documents annexés à la requête censés établir l’absence de caractère distinctif du terme «flex», lesdits documents étant présentés pour la première fois devant le Tribunal dont la fonction n’est pas de recommencer une procédure d’opposition. En outre, l’intervenante affirme que le signe verbal «flex» est parfaitement distinctif en lui-même.

31      L’intervenante prétend que les signes en cause doivent être considérés comme similaires en raison de l’identité totale visuelle, phonétique et conceptuelle des deux éléments verbaux, communs aux deux signes et pleinement distinctifs, à savoir les termes «flex». Le risque de confusion serait renforcé par l’absence de signification des signes en cause et par la renommée en Espagne des marques antérieures, telle qu’elle résulterait des pièces annexées au mémoire en réponse de l’intervenante.

32      Enfin, la mention, dans le règlement n° 40/94, du risque d’association avec les marques antérieures permet d’affirmer, selon l’intervenante, qu’il est possible d’invoquer un risque de confusion dans des cas où le public ne confond pas nécessairement deux marques, mais seulement des éléments constitutifs de celles-ci. Ainsi, il y aurait un risque d’association lorsque le public perçoit l’élément constitutif commun à deux signes comme une référence au propriétaire de la marque la plus ancienne. L’intervenante prétend que le public est enclin à croire que l’élément ajouté à l’élément constitutif principal, commun aux deux signes en cause, a pour fonction de différencier un produit donné de la ligne des produits identifiés par cet élément principal et que tous les produits proviennent de la même société. En l’espèce, le public serait amené à percevoir CONFORFLEX comme étant une autre marque de la société qui distribue les produits identifiés par la marque FLEX.

 Appréciation du Tribunal

 Observations liminaires

33      Tant dans sa requête que lors de l’audience, le requérant a affirmé que l’intervenante n’est plus le titulaire des marques antérieures, lesquelles auraient été cédées à une autre société de droit espagnol. Outre le fait que cette affirmation n’est étayée par aucune pièce et n’est pas confirmée par l’OHMI, qui ne s’est pas vu notifier une cession des marques antérieures, il y a lieu de relever que l’intervenante se décrit comme le titulaire desdites marques dans son mémoire en réponse et que sa dénomination sociale figure expressément dans la décision attaquée. Dans ces conditions et eu égard aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la société Fabricas Lucia Antonio Betere doit être considérée comme partie intervenante à la présente procédure.

 Sur la demande visant au rejet de la marque demandée

34      Par son deuxième chef de conclusions, l’intervenante tend, en substance, à demander au Tribunal d’enjoindre à l’OHMI de refuser l’enregistrement de la marque demandée.

35      À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l’article 63, paragraphe 6, du règlement n° 40/94, l’OHMI est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge communautaire. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser à l’OHMI une injonction. Il incombe à celui-ci de tirer les conséquences du dispositif et des motifs de l’arrêt prononcé par le Tribunal. Le deuxième chef de conclusions de l’intervenante est donc irrecevable [arrêts du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II‑433, point 33, et du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 12].

 Sur la demande visant à l’annulation de la décision attaquée

36      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement «lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure». Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 40/94, on entend par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

37      Il importe de souligner que le risque de confusion dans l’esprit du public, qui conditionne l’application de l’article précité et qui se définit comme le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 29; arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 17, et arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI − Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, Rec. p. II‑4359, point 25], doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (arrêts Canon, précité, point 16; Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 18, et Fifties, précité, point 26).

38      Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts Canon, précité, point 17; Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 19, et Fifties, précité, point 27).

39      En outre, la perception des marques qu’a le consommateur des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion. En l’espèce, étant donné la nature des produits concernés, à savoir des articles de literie, qui sont des biens de consommation courante, et le fait que les marques antérieures sont enregistrées et protégées en Espagne, le public concerné par rapport auquel l’analyse du risque de confusion doit s’effectuer est constitué par le consommateur moyen de cet État membre. Or, le consommateur moyen, qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêts SABEL, précité, point 23; Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 25, et Fifties, précité, point 28). Par ailleurs, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire et que son niveau d’attention est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause (arrêts Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 26, et Fifties, précité, point 28).

40      À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu de procéder à la comparaison, d’une part, des produits concernés et, d’autre part, des signes en conflit.

41      En premier lieu, en ce qui concerne la comparaison des produits, force est de constater que les produits visés par la marque demandée, à savoir les «meubles de literie», relevant de la classe 20, font partie de la catégorie très large des produits couverts par les marques antérieures et relevant de la même classe. Cette dernière famille de produits couvre toutes sortes de meubles, y compris des articles de literie.

42      Dès lors, il convient de conclure, tout comme la chambre de recours (point 14 de la décision attaquée), que les produits visés par la marque demandée et ceux couverts par les marques antérieures sont identiques. Il convient, en outre, d’observer que le requérant ne soulève aucun argument dans la requête à l’encontre de cette constatation de la chambre de recours.

43      En deuxième lieu, s’agissant de la comparaison des signes, il ressort de la jurisprudence que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, en particulier, de leurs éléments distinctifs et dominants (arrêts SABEL, précité, point 23, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 25).

44      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a souligné le caractère prépondérant de l’élément verbal des marques antérieures (point 13) et considéré que les signes en conflit présentent de fortes similitudes conceptuelles, lesquelles l’emportent sur les différences, visuelle et phonétique, mentionnées dans la décision de la division d’opposition (point 19).

45      À cet égard, il convient de relever que le terme «flex» apparaît bien, en l’espèce, comme l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par les marques antérieures. À l’évidence, le composant verbal, élément identificateur par excellence des marques dans l’esprit du public, domine la partie figurative, négligeable et même insignifiante s’agissant de la marque enregistrée sous le n° 1 951 681. Il convient, en outre, de rappeler que le consommateur moyen ne garde en mémoire qu’une image imparfaite de la marque, ce qui renforce le poids des éléments particulièrement visibles et simples à appréhender comme le terme «flex» dans le cas présent, lequel constitue la racine des mots espagnols «flexibilidad» et «flexible».

46      La comparaison entre l’élément verbal dominant des marques antérieures et la marque verbale demandée fait apparaître une certaine similitude visuelle entre elles (arrêt Fifties, précité, point 37). En effet, la différence provoquée par l’ajout de l’élément verbal «confor» dans la marque demandée n’est pas suffisamment importante pour écarter toute similitude créée par la coïncidence de la partie essentielle, à savoir le terme «flex». Néanmoins, la présence d’éléments figuratifs dans les marques antérieures, même peu importants, fait apparaître, dans le cadre de l’appréciation visuelle d’ensemble des signes en conflit, une dissemblance de ceux-ci.

47      S’agissant de la comparaison phonétique, eu égard aux considérations évoquées ci-dessus concernant la coïncidence entre l’élément dominant des marques antérieures et la marque demandée, les signes en conflit présentent une certaine similitude sur le plan phonétique. L’ajout du terme «confor» à celui de «flex» dans la marque demandée révèle, toutefois, dans le cadre d’une appréciation globale des signes en conflit, une dissemblance de ceux-ci.

48      S’agissant de la comparaison conceptuelle, il convient de rappeler que l’élément verbal commun des signes en conflit, à savoir le terme «flex», constitue la racine des mots espagnols «flexibilidad» et «flexible». Il apparaît ainsi que lesdits signes concordent dans leur contenu sémantique, en ce sens qu’ils suggèrent clairement aux consommateurs espagnols la notion de flexibilité. L’ajout du terme «confor» à celui de «flex» dans la marque demandée ne fait que compléter et renforcer le concept susvisé. En effet, comme le souligne à juste titre l’OHMI, l’élément verbal «confor» fait à l’évidence référence à la notion de confort, laquelle est associée à la notion de flexibilité dans le domaine de la literie. Ce constat permet de conclure à l’existence d’une forte similitude conceptuelle entre les signes en cause.

49      Il résulte des considérations qui précèdent que les produits désignés par les signes en cause sont identiques et que ces derniers présentent une forte similitude conceptuelle.

50      Il convient de relever, à ce stade, que, dans le cadre de l’analyse du risque de confusion, le requérant et l’intervenante ont évoqué dans leurs écritures la question de l’importance du caractère distinctif des marques antérieures en se référant tous deux à l’arrêt SABEL, précité. Il résulte en effet de cet arrêt, ainsi que des arrêts Lloyd Schuhfabrik Meyer et Canon, précités, que le caractère distinctif de la marque antérieure, que celui-ci dérive des qualités intrinsèques de cette marque ou de sa renommée, doit être pris en compte pour apprécier si la similitude entre les produits ou les services désignés par les deux marques est suffisante pour donner lieu à un risque de confusion (arrêts Canon, précité, points 18 et 24, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 20). En outre, la Cour a estimé que, comme le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important (arrêt SABEL, précité, point 24), les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir arrêts Canon, précité, point 18, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 20).

51      En l’espèce, le requérant prétend que la coexistence sur le marché espagnol de nombreuses marques nationales et communautaires, enregistrées pour des produits de literie et comportant le terme «flex», démontrerait que ce dernier est usuel et ne peut donc assurer la fonction d’origine commerciale. La similitude entre les signes en cause se limitant à la présence d’un élément commun usuel, il ne saurait y avoir de risque de confusion entre lesdits signes. L’intervenante affirme, pour sa part, que les marques antérieures jouissent d’une grande renommée en Espagne.

52      À titre de preuves de ses affirmations, le requérant communique un ensemble de pièces faisant état d’enregistrements espagnols ou communautaires relatifs à certains articles de literie et comportant le terme «flex». Il est, toutefois, constant que ces pièces sont produites pour la première fois devant le Tribunal et qu’il convient, dès lors, de les écarter des débats sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probatoire [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 4 novembre 2003, Díaz/OHMI – Granjas Castelló (CASTILLO), T‑85/02, non encore publié au Recueil, point 46; ECOPY, précité, points 45 à 48, et du 5 mars 2003, Alcon/OHMI – Dr. Robert Winzer Pharma (BSS), T‑237/01, non encore publié au Recueil, point 62]. La même solution s’impose à l’égard des pièces déposées pour la première fois devant le Tribunal par l’intervenante pour prouver la renommée de ses marques en Espagne. Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter tant l’argumentation du requérant sur le caractère usuel de l’élément verbal commun aux deux signes en cause que celle de l’intervenante relative à la renommée des marques antérieures.

53      Reste que dans son argumentation relative au degré de distinctivité des marques antérieures, le requérant a, en se référant à l’arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité (points 22 et 23), également soutenu que le terme «flex» est descriptif d’une qualité essentielle de tout produit de literie, à savoir la flexibilité, et qu’il ne peut donc être considéré comme distinctif.

54      En réponse à cet argument du requérant, la chambre de recours a indiqué que, s’il se peut que le terme «flex» soit évocateur, les marques antérieures qui le comprennent ont été valablement enregistrées, en association avec une figure, par les autorités d’un État membre et que, en conséquence, elles jouissent de droits exclusifs opposables à tout tiers (point 17 de la décision attaquée).

55      Si ce n’est la reconnaissance du caractère évocateur du terme «flex», cette motivation apparaît dépourvue de toute pertinence. Il résulte tant de l’article 8 du règlement n° 40/94 que de la jurisprudence de la Cour, selon laquelle la protection d’une marque «enregistrée» dépend de l’existence d’un risque de confusion (arrêt Canon, précité, point 18), que l’enregistrement national préalable permet à son bénéficiaire de former, le cas échéant, une opposition à la demande d’enregistrement d’un signe susceptible d’entraîner un risque de confusion dans l’esprit du public mais n’a pas, en lui-même, d’influence sur l’appréciation de l’existence d’un tel risque. Il convient, au demeurant, de préciser que la présente analyse ne vise pas à remettre en cause l’enregistrement national des marques antérieures mais à vérifier seulement si elles ont un fort ou un faible caractère distinctif.

56      Certes, le terme «flex» peut effectivement être considéré, du point de vue du public concerné, comme évocateur d’une caractéristique, à savoir la flexibilité, des produits concernés, les marques antérieures ne présentant pas, de ce fait, un caractère distinctif élevé, ce que l’OHMI a admis lors de l’audience.

57      Toutefois, l’appréciation erronée de la chambre de recours contenue au point 17 de la décision attaquée est sans incidence sur la solution du litige, la conclusion de l’existence d’un risque de confusion demeurant parfaitement fondée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 janvier 2003, Mystery Drinks/OHMI −- Karlsberg Brauerei (MYSTERY), T‑99/01, Rec. p. II‑43, point 36].

58      En effet, il y a lieu de considérer que, eu égard à l’interdépendance des facteurs pertinents pour l’appréciation du risque de confusion, l’identité des produits désignés associée à la forte similitude conceptuelle des signes en conflit est suffisante pour conclure, en l’espèce, à l’existence d’un tel risque.

59      À cet égard, il importe de souligner que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, le fait que le consommateur moyen ne garde en mémoire qu’une image imparfaite de la marque confère une importance majeure à l’élément prédominant de ladite marque. Ainsi, l’élément verbal dominant «flex» des marques antérieures a une importance majeure dans l’analyse d’ensemble desdites marques, puisque le consommateur observant une étiquette d’un produit de literie prend en considération et retient l’élément dénominatif prédominant des marques qui lui permet, lors d’une acquisition ultérieure, de répéter l’expérience (voir, en ce sens, arrêt Fifties, précité, point 47).

60      Or, étant donné que le consommateur moyen gardera notamment à l’esprit l’élément dénominatif prédominant des marques antérieures, à savoir le terme «flex», lorsqu’il trouvera des produits de literie identiques désignés par la marque CONFORFLEX, il pourra attribuer la même origine commerciale aux produits en question. Outre le fait que les signes en conflit concordent parfaitement dans leur contenu sémantique, il convient surtout de relever que le terme «confor», appliqué à des meubles de literie, peut objectivement être considéré comme descriptif d’une qualité essentielle des produits concernés, en l’occurrence le confort, et donc dépourvu de caractère distinctif. Dans ces circonstances, l’ajout du terme «confor» à celui de «flex» dans la marque demandée ne permettra pas aux consommateurs de distinguer suffisamment les signes en conflit. Par conséquent, même si le consommateur moyen est capable d’appréhender certaines différences visuelles ou phonétiques entre les deux signes en conflit, lesquelles sont, au demeurant, neutralisées dans une large mesure par la forte similitude conceptuelle desdits signes, le risque d’établir un lien entre ces derniers est très réel (voir, en ce sens, arrêt Fifties, précité, point 48).

61      Par ailleurs, il est tout à fait possible qu’une entreprise, active sur le marché des produits de la literie, utilise des sous-marques, à savoir des signes dérivant d’une marque principale et partageant avec elle un élément dominant commun, pour distinguer ses différentes lignes de production, au regard notamment de la qualité des produits concernés. Dans ces conditions, il est concevable, ainsi que l’indique l’OHMI dans ses écritures, que le public ciblé considère les produits désignés par les signes en conflit comme appartenant, certes, à deux gammes de produits distinctes, mais provenant, toutefois, de la même entreprise (voir, en ce sens, arrêt Fifties, précité, point 49).

62      Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu qu’il existe un risque de confusion entre la marque demandée et les marques antérieures au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Le recours doit, dès lors, être rejeté.

Sur les dépens

63      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens exposés par l’OHMI et par la partie intervenante, conformément aux conclusions de ceux-ci.

Par ces motifs, (quatrième chambre)déclare et arrête:

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le requérant est condamné aux dépens.


LegalTiiliVilaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le

18 février 2004.

Le greffierLe présidentH. JungH. Legal