Language of document : ECLI:EU:C:2021:391

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

12 mai 2021 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑67/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 2 février 2021,

BSH Hausgeräte GmbH, établie à Munich (Allemagne), représentée par Me S. Biagosch, Rechtsanwalt,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice-présidente de la Cour, MM. M. Ilešič et E. Juhász (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. M. Szpunar, entendu, rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, BSH Hausgeräte GmbH demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 2 décembre 2020, BSH Hausgeräte/EUIPO (Home Connect) (T‑152/20, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:584), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 10 janvier 2020 (affaire R 1751/2019‑5), concernant une demande d’enregistrement du signe figuratif Home Connect comme marque de l’Union européenne.

 Sur l’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, de ce règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement de procédure, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante invoque deux arguments par lesquels elle fait valoir que les questions soulevées par son pourvoi, ayant trait, pour la première, à la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), et, pour la seconde, à la violation de l’article 95 du même règlement, sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

7        En particulier, par son premier argument, la requérante reproche au Tribunal, en substance, d’avoir violé l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, en appliquant, au point 66 de l’arrêt attaqué, un critère tiré de la capacité de l’élément figuratif du signe en cause à détourner l’attention du public pertinent du message descriptif transmis par l’élément verbal du même signe, lors de l’appréciation du caractère descriptif de la marque demandée. Selon la requérante, dans le cas où l’élément verbal d’un signe est descriptif, l’enregistrement de la marque ne pourra être refusé qu’à la condition que l’élément figuratif du même signe, considéré isolément, soit lui-même descriptif, indépendamment du point de savoir s’il détourne le sens de l’élément verbal.

8        La requérante fait valoir que cette question est importante pour la cohérence et le développement du droit de l’Union, car une telle question, sur laquelle la Cour ne s’est jamais prononcée, ferait l’objet de la communication commune sur la pratique commune du caractère distinctif – marques figuratives contenant des termes descriptifs/non distinctifs, adoptée par le réseau européen des marques, dessins et modèles le 2 octobre 2015 (ci-après la « communication commune sur la pratique commune du caractère distinctif ») et des directives de l’EUIPO.

9        Par son second argument, la requérante reproche au Tribunal, en substance, d’avoir violé les principes généraux en matière de charge de la preuve, qui découleraient de l’obligation faite à l’EUIPO d’examiner d’office les faits, conformément à l’article 95 du règlement 2017/1001, en faisant peser sur elle la charge de la preuve de l’absence de caractère descriptif de la marque demandée, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement. Elle fait valoir que cette question est importante pour la cohérence et le développement du droit de l’Union, car elle permettrait à la Cour de préciser la répartition de la charge de l’allégation et de la charge de la preuve dans la procédure d’enregistrement d’une marque.

10      À titre liminaire, il convient de relever que c’est à la requérante qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 13 et jurisprudence citée).

11      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. Étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut vise à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnance du 3 septembre 2020, Gamma-A/EUIPO, C‑199/20 P, non publiée, EU:C:2020:662, point 10 et jurisprudence citée).

12      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été violée par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi (ordonnance du 17 décembre 2020, Brands Up/EUIPO, C‑404/20 P, non publiée, EU:C:2020:1058, point 16 et jurisprudence citée).

13      Dès lors, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait, d’emblée, être susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

14      En l’occurrence, s’agissant, en premier lieu, de l’argumentation évoquée aux points 7 et 8 de la présente ordonnance, il y a lieu de rappeler que le fait qu’une question de droit n’a pas fait l’objet d’un examen par la Cour ne signifie pas pour autant que cette question revêt nécessairement une importance pour la cohérence ou le développement du droit de l’Union, la requérante étant toujours tenue de démontrer une telle importance en fournissant des indications précises non seulement sur le caractère de nouveauté de cette question, mais également sur les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard d’un telle cohérence ou d’un tel développement (voir, en ce sens, ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑614/19 P, EU:C:2019:904, point 21 et jurisprudence citée).

15      La requérante au pourvoi doit également démontrer que, indépendamment des questions de droit qu’elle invoque dans son pourvoi, ce dernier soulève une ou plusieurs questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, la portée de ce critère dépassant le cadre de l’arrêt sous pourvoi et, en définitive, celui de son pourvoi. Par ailleurs, cette démonstration implique elle-même d’établir tant l’existence que l’importance de telles questions, au moyen d’éléments concrets et propres au cas d’espèce, et non pas simplement des arguments d’ordre général (ordonnance du 12 mars 2020, Roxtec/EUIPO, C‑893/19 P, non publiée, EU:C:2020:209, point 19).

16      Or, la requérante se borne à affirmer que l’intérêt de la question invoquée dans le cadre de cette argumentation réside dans l’absence de jurisprudence de la Cour, ainsi que dans la mention de cette question dans la communication commune sur la pratique commune du caractère distinctif et les directives de l’EUIPO, sans toutefois fournir d’autre indication. Une telle argumentation ne satisfait pas aux exigences indiquées aux points 12, 14 et 15 de la présente ordonnance.

17      À titre surabondant, il convient de rappeler que, pour qu’une marque soit considérée comme descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, l’analyse préalable de chacun des éléments qui la composent ne constitue pas une étape obligatoire. En revanche, les chambres de recours de l’EUIPO et, sur recours, le Tribunal sont tenus de procéder à l’appréciation du caractère descriptif de la marque, considérée dans son ensemble (arrêt du 19 avril 2007, OHMI/Celltech, C‑273/05 P, EU:C:2007:224, point 80). À cet égard, la requérante ne démontre pas, à suffisance de droit, en quoi le fait que le Tribunal n’a pas analysé isolément le caractère descriptif de l’élément figuratif de la marque demandée constituerait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

18      S’agissant, en second lieu, de l’argumentation mentionnée au point 9 de la présente ordonnance, selon laquelle le Tribunal a, à tort, fait peser sur la requérante la charge de la preuve de l’absence de caractère descriptif de la marque demandée, il y a lieu de constater que la requérante n’indique pas concrètement dans quelle mesure cette erreur, à la supposer avérée, aurait influencé la conclusion relative au caractère descriptif de cette marque. Par ailleurs, il convient de souligner que, dans la mesure où une partie requérante se prévaut de l’absence de caractère descriptif d’une marque demandée, en dépit de l’analyse de l’EUIPO, c’est à elle qu’il appartient de fournir des indications concrètes et étayées établissant que la marque demandée n’est pas dotée d’un tel caractère (voir, par analogie, arrêt du 15 mai 2014, Louis Vuitton Malletier/OHMI, C‑97/12 P, non publié, EU:C:2014:324, points 70 à 72 ainsi que jurisprudence citée).

19      Dès lors, la requérante ne démontre pas, à suffisance de droit, en quoi le fait que le Tribunal aurait fait peser sur elle la charge de la preuve de l’absence de caractère descriptif de la marque demandée constituerait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

20      Dans ces conditions, il convient de conclure que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

21      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

22      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

23      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié à l’autre partie à la procédure et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      BSH Hausgeräte GmbH supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.