Language of document : ECLI:EU:T:2018:34

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

26 janvier 2018 (*)

« Aides d’État – Réductions d’impôts et de cotisations dus par les entreprises situées dans les zones touchées par les calamités naturelles survenues en Italie – Décision déclarant les aides incompatibles avec le marché intérieur et ordonnant leur récupération – Recours en annulation – Bénéficiaire potentiel titulaire d’un droit acquis – Affectation directe et individuelle – Recevabilité – Égalité de traitement – Confiance légitime »

Dans l’affaire T‑172/16,

Centro Clinico e Diagnostico G. B. Morgagni Srl, établie à Catane (Italie), représentée par Me E. Castorina, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. P. Stancanelli et V. Bottka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, à titre principal, une demande tendant à l’« interprétation conciliatrice » de la décision (UE) 2016/195 de la Commission, du 14 août 2015, concernant la mesure SA.33083 (12/C) (ex 12/NN) mise à exécution par l’Italie et relative à des réductions d’impôts et de cotisations liées à des calamités naturelles (tous les secteurs à l’exception du secteur agricole) et la mesure SA.35083 (12/C) (ex 12/NN) mise à exécution par l’Italie et relative à des réductions d’impôts et de cotisations liées au tremblement de terre de 2009 dans les Abruzzes (tous les secteurs à l’exception du secteur agricole) (JO 2016, L 43, p. 1), et, à titre subsidiaire, une demande fondée sur l’article 263TFUE et tendant à l’annulation de cette décision,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 21 juin 2017,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige

1        À la suite du tremblement de terre qui a frappé l’est de la Sicile (Italie) du 13 au 16 décembre 1990, les autorités italiennes ont adopté, au cours des années 1990 à 2002, plusieurs décisions et lois, en vertu desquelles toutes les entreprises situées sur le territoire touché par le séisme pouvaient bénéficier d’une suspension et d’un report de paiement de leurs impôts et de leurs cotisations obligatoires de sécurité sociale et d’assurance professionnelle ou d’un paiement échelonné.

A.      Cadre juridique national

2        Par la loi de finances rectificative pour l’année 2001 du 28 septembre 2001, les autorités italiennes ont permis aux entreprises qui n’avaient pas encore versé les sommes dues au titre des impôts et des cotisations de régulariser leur situation, en versant le montant dû, majoré de 15 %, pour le 28 décembre 2001 au plus tard.

3        Toutefois, par la loi de finances pour l’année 2003 du 27 décembre 2002 (ci-après la « loi de finances de 2003 » ou la « mesure en cause »), les autorités italiennes ont permis aux entreprises qui n’avaient pas encore acquitté leurs impôts pour les exercices 1990 à 1992 de régulariser automatiquement leur situation en ne versant que 10 % du montant toujours dû pour le 16 mars 2003 au plus tard, impliquant, par ce biais, une réduction de 90 % des sommes dues à l’État au titre de l’impôt.

4        Par différentes lois postérieures adoptées le 24 décembre 2003 et le 27 février 2004, les autorités italiennes ont prorogé la possibilité de régularisation jusqu’au 16 avril 2004.

5        Par la loi de finances pour l’année 2006 du 23 décembre 2005, les autorités italiennes ont étendu le bénéfice de la loi de finances de 2003 aux versements des cotisations de sécurité sociale et d’assurance professionnelle.

6        Par une loi du 26 février 2007, les autorités italiennes ont prorogé le bénéfice de la loi de finances de 2003 et de la loi de finances pour l’année 2006 du 23 décembre 2005 jusqu’au 31 décembre 2007, en exigeant toutefois un versement de 30 % du montant restant dû pour les impôts, avant de rétablir, par une loi du 31 décembre 2007, le taux de 10 %.

7        Par différents arrêts prononcés les 1er octobre 2007, 7 mai 2010et 10 mai 2010, la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie) a précisé que cet avantage fiscal devait être étendu à tous les contribuables qui auraient pu théoriquement bénéficier de la suspension de paiement dès le début, y compris ceux qui avaient effectivement payé les sommes dues sans recourir à la possibilité de suspension de paiement.

B.      Procédure contentieuse nationale

8        Les 30 et 31 décembre 2004, la requérante, Centro Clinico e Diagnostico G. B. Morgagni Srl, a demandé, sur le fondement de la loi de finances de 2003, à l’Agenzia delle Entrate (administration fiscale, Italie, ci-après l’« agence fiscale italienne »), la récupération du trop-versé par rapport à la part forfaitaire de 10 %, concernant la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour l’année 1992 et l’impôt sur le revenu des personnes physiques pour les années 1991 et 1992.

9        En l’absence de réponse de la part de l’agence fiscale italienne, la requérante a formé un recours devant la Commissione tributaria provinciale (commission fiscale provinciale, Italie) contre le rejet tacite de sa demande.

10      Le 11 juillet 2011, la commission fiscale provinciale a accueilli le recours formé par la requérante contre le rejet tacite de sa demande et ordonné le remboursement de 90 % des impôts versés, en ce compris les intérêts échus.

11      À la suite d’un appel interjeté par l’agence fiscale italienne, la Commissione tributaria regionale di Palermo (commission fiscale régionale de Palerme, Italie) a confirmé, par un arrêt du 4 avril 2013, la décision de la commission fiscale provinciale.

12      En l’absence de pourvoi formé contre l’arrêt de la commission fiscale régionale de Palerme, la requérante a tenté, en vain, d’obtenir le remboursement des sommes auprès de l’agence fiscale italienne.

13      Pour ce faire, la requérante a introduit une action en exécution auprès de la commission fiscale régionale de Palerme en lui demandant, d’une part, de constater le refus de l’agence fiscale italienne d’exécuter l’arrêt de la commission fiscale régionale de Palerme et, d’autre part, d’ordonner toutes les mesures nécessaires, y compris la désignation d’un commissaire ad acta pouvant se substituer à l’administration.

14      Par arrêt du 15 décembre 2015, notifié à l’agence fiscale italienne le 29 décembre 2015, la commission fiscale régionale de Palerme, faisant fonction de juge saisi de l’action en exécution, a fait droit à la demande de la requérante et a désigné, aux fins de l’exécution de l’arrêt du 4 avril 2013 de la commission fiscale régionale de Palerme, un commissaire ad acta,en lui donnant un délai de 60 jours pour exécuter ledit arrêt.

15      L’agence fiscale italienne a formé un pourvoi devant la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation) contre l’arrêt de la commission fiscale régionale de Palerme du 15 décembre 2015, en excipant de l’impossibilité d’exécuter l’arrêt, en raison, d’une part, de la décision C(2012) 7128, du 17 octobre 2012, par laquelle la Commission européenne a, dans le cadre de l’ouverture de la procédure formelle d’examen, au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, ordonné aux autorités italiennes de suspendre la mesure en cause, et, d’autre part, de la décision C(2015) 5549, du 14 août 2015, par laquelle la Commission a considéré la mesure en cause comme une aide d’État illégale et incompatible avec le marché intérieur.

C.      Procédure administrative devant la Commission

16      Parallèlement à la procédure contentieuse nationale, la Commission a reçu, le 21 février 2011, une demande d’information, adressée par un juge du travail du Tribunale di Cuneo (tribunal de Coni, Italie), dans le cadre de laquelle ce dernier a attiré l’attention de la Commission sur les lois de finances de 2003 à 2006.

17      Le 25 juillet 2011, la Commission a transmis une demande de renseignements aux autorités italiennes, lesquelles ont répondu par lettre du 6 octobre 2011, puis, à la suite d’une demande d’information complémentaire de la Commission en date du 14 octobre 2011, par lettre du 7 décembre 2011.

18      Par décision C(2012) 7128, du 17 octobre 2012, la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen, conformément à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, et enjoint aux autorités italiennes de suspendre la mesure en cause jusqu’au prononcé de la décision finale, conformément à l’article 11, paragraphe 1, du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1) (ci-après la « décision d’ouverture »).

19      Par lettre du 19 juin 2012, la Commission a transmis une nouvelle demande de renseignements tout en invitant les autorités italiennes à présenter leurs observations sur la qualification de la mesure en cause d’aide d’État illégale et incompatible avec le marché intérieur.

20      Les autorités italiennes ont répondu par lettre du 25 juillet 2012.

21      Par sa décision (UE) 2016/195, du 14 août 2015, concernant la mesure SA.33083 (12/C) (ex 12/NN) mise à exécution par l’Italie et relative à des réductions d’impôts et de cotisations liées à des calamités naturelles (tous les secteurs à l’exception du secteur agricole) et la mesure SA.35083 (12/C) (ex 12/NN) mise à exécution par l’Italie et relative à des réductions d’impôts et de cotisations liées au tremblement de terre de 2009 dans les Abruzzes (tous les secteurs à l’exception du secteur agricole) (JO 2016, L 43, p. 1, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a considéré que la mesure en cause constituait un régime d’aides mis en œuvre illégalement et incompatible avec le marché intérieur.

22      Par la décision attaquée, la Commission indique que la mesure en cause n’établit aucun lien entre les aides accordées et les dommages effectivement subis à la suite des calamités naturelles, au sens de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE, et ne limite pas le montant de la compensation à ce qui était nécessaire pour remédier aux dommages subis par les bénéficiaires de la mesure en cause.

23      Toutefois, d’une part, au considérant 136 de la décision attaquée, la Commission a considéré que les aides individuelles versées avant la date d’adoption de la décision d’ouverture et de l’injonction de suspension pouvaient être compatibles, pour autant qu’un lien clair pût être établi entre le dommage subi et l’aide accordée.

24      D’autre part, au considérant 156 et à l’article 4, paragraphe 1, de la décision attaquée, la Commission a également décidé de ne pas ordonner aux autorités italiennes de récupérer, auprès des bénéficiaires qui avaient leur siège d’exploitation dans les zones touchées par ces calamités naturelles, les aides déjà versées pour les calamités ayant eu lieu plus de dix ans avant la date d’adoption de la décision attaquée, dans la mesure où ces derniers n’étaient tenus de conserver les documents administratifs que pendant une période de dix ans.

25      Par ailleurs, à l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée, la Commission a ordonné l’« annulation » de tous les paiements en cours des aides non encore versées depuis l’adoption de la décision d’ouverture.

II.    Procédure et conclusions des parties

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 avril 2016, la requérante a formé le présent recours.

27      Par courrier du 14 novembre 2016, la requérante a informé le Tribunal de son souhait d’être entendue dans le cadre d’une audience de plaidoirie, en application de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.

28      Par décision du 27 avril 2017, le Tribunal a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

29      Lors de l’audience du 21 juin 2017, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal.

30      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, procéder à une « interprétation conciliatrice » de l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée, « en adéquation avec les principes et les valeurs phares de l’ordre juridique européen » ;

–        à titre subsidiaire, en ce qui la concerne, annuler la décision attaquée ou prononcer la nullité de l’article 4, paragraphe 5, de ladite décision.

31      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable et, en tout état de cause, comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

III. En droit

32      Dans le premier chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal, à titre principal, d’interpréter la décision attaquée, alors que, dans le second, elle lui demande, à titre subsidiaire, de l’annuler.

A.      Sur le chef de conclusions présenté à titre principal

33      Dans le mémoire en défense, la Commission excipe de l’incompétence du Tribunal pour statuer sur le premier chef de conclusions de la requérante.

34      La Commission soutient que le Tribunal n’est pas compétent pour procéder à une interprétation « conciliatrice » de l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée en adéquation avec « les principes et les valeurs phares de l’ordre juridique européen ».

35      Elle souligne, en substance, que le Tribunal est compétent pour annuler la décision attaquée, mais pas pour la réformer ni pour l’interpréter dans le sens escompté par la requérante.

36      Pour sa part, la requérante maintient ses conclusions dans le cadre de la réplique en sollicitant du Tribunal, à titre principal, l’interprétation « conciliatrice » de l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée.

37      À cet égard, indépendamment de la question du bien-fondé du premier chef de conclusions de la requérante, il convient de rappeler que le Tribunal n’est pas compétent pour interpréter les décisions de la Commission, mais uniquement pour en contrôler la légalité.

38      En effet, aux termes de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, « le Tribunal est compétent pour connaître en première instance des recours visés aux articles 263, 265, 268, 270 et 272 [TFUE], à l’exception de ceux qui sont attribués à un tribunal spécialisé créé en application de l’article 257 [TFUE] et de ceux que le statut réserve à la Cour de justice ».

39      Par ailleurs, si, aux termes de l’article 256, paragraphe 3, TFUE, « le Tribunal est compétent pour connaître des questions préjudicielles, soumises en vertu de l’article 267 [TFUE], dans des matières spécifiques déterminées par le statut », force est de constater que le statut n’a pas à ce stade conféré une telle compétence au Tribunal.

40      Ainsi, le Tribunal ne saurait, s’agissant du premier chef de conclusions de la requérante, interpréter de manière « conciliatrice » l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée.

41      Par conséquent, il y a lieu de rejeter le premier chef de conclusions de la requérante.

B.      Sur le chef de conclusions présenté à titre subsidiaire

42      Dans le mémoire en défense, la Commission excipe de l’irrecevabilité du recours.

1.      Sur la recevabilité

a)      Arguments des parties

43      La Commission fait valoir que la requérante ne dispose pas de la qualité pour agir en vertu de l’article 263 TFUE.

44      Elle rappelle, tout d’abord, que la République italienne est la seule destinataire de la décision attaquée, de sorte que la requérante doit démontrer que la décision attaquée la concerne individuellement en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle du destinataire.

45      En outre, elle précise que, dans cette hypothèse, ne sont susceptibles de disposer de la qualité à agir que les bénéficiaires effectifs d’aides individuelles octroyées au titre d’un régime d’aides dont la Commission a ordonné la récupération. La simple possibilité d’accéder au régime d’aides ne saurait suffire à cette fin.

46      Or, selon la Commission, la requérante n’est qu’un bénéficiaire potentiel de la mesure en cause, n’ayant jamais matériellement bénéficié de la réduction de 90 % des sommes dues au titre des impôts et des cotisations pour les années 1990 à 1992, telle que prévue par la loi de finances de 2003.

47      Partant, la requérante ne disposerait d’aucun droit acquis reconnu par les autorités fiscales compétentes.

48      En tout état de cause, la Commission rappelle que le simple fait qu’il soit possible de déterminer le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels s’applique un régime d’aides n’implique nullement que ces sujets doivent être considérés comme individuellement concernés par une décision d’incompatibilité, dès lors que cette application est effectuée en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause.

49      Ensuite, la Commission ajoute que la requérante ne saurait se fonder sur les décisions des juridictions fiscales nationales pour justifier sa qualité de bénéficiaire effectif de la mesure en cause, dans la mesure où ces juridictions ne sont ni les autorités responsables de l’octroi de l’aide ni les autorités compétentes pour se prononcer sur la compatibilité de la mesure en cause avec l’article 107 TFUE.

50      En tout état de cause, le prononcé de l’arrêt de la commission fiscale régionale de Palerme, ayant acquis force de chose jugée, est intervenu postérieurement à l’adoption par la Commission de la décision d’ouverture, de sorte que les autorités italiennes n’auraient pas été en mesure de faire droit à la demande de la requérante sans violer précisément l’injonction de suspension et, plus largement, le principe de primauté du droit de l’Union européenne.

51      Enfin, elle souligne que la requérante ne saurait se limiter à démontrer qu’elle est directement concernée par la décision attaquée, dans la mesure où cette dernière ne constitue pas un acte réglementaire, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, dernière phrase, TFUE.

52      Pour sa part, la requérante objecte qu’elle satisfait aux conditions pour bénéficier du droit prévu par la loi de finances de 2003, droit qu’elle souligne comme étant acquis, justifiant son intérêt distinct, concret et individuel à l’exercice du présent recours.

53      Elle ajoute que ce droit a été formellement reconnu par la décision de la commission fiscale provinciale du 11 juillet 2011, prononcée antérieurement à l’adoption, par la Commission, de la décision d’ouverture et confirmée en appel par la commission fiscale régionale de Palerme par un arrêt du 4 avril 2013.

b)      Appréciation du Tribunal

54      Aux termes de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas, un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.

55      En l’espèce, il convient de souligner que la requérante n’est pas la destinataire de la décision attaquée, laquelle a pour unique destinataire la République italienne.

56      Partant, il y a lieu de vérifier si la requérante est directement et individuellement affectée par la décision attaquée.

57      En premier lieu, s’agissant de l’affectation directe, deux critères doivent être remplis. Premièrement, l’acte en cause doit produire directement des effets sur la situation juridique de la partie requérante et, deuxièmement, ledit acte ne doit laisser aucun pouvoir d’appréciation à ses destinataires chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires (arrêt du 17 septembre 2009, Commission/Koninklijke FrieslandCampina, C‑519/07 P, EU:C:2009:556, point 48).

58      Or, en l’espèce, par l’adoption de la décision attaquée, déclarant la mesure en cause incompatible avec le marché intérieur, l’agence fiscale italienne ne saurait faire droit en toute hypothèse à la demande de la requérante, et ce quand bien même son droit à en bénéficier a été juridiquement constaté par la commission fiscale régionale de Palerme.

59      En effet, en application de l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée, la République italienne est tenue d’« annuler » tous les paiements en cours de l’aide versée sur le fondement de la mesure en cause.

60      Partant, les deux critères de l’affectation directe sont remplis.

61      En second lieu, il y a lieu de vérifier si la requérante est individuellement concernée par la décision attaquée, sans qu’il soit nécessaire, le cas échéant, de vérifier si la décision attaquée constitue un acte réglementaire qui ne comporte pas de mesures d’exécution.

62      Selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être concernés individuellement par celle-ci que si elle les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle du destinataire (arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, EU:C:1963:17, p. 223 ; du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, EU:C:2011:368, point 52, et du 19 décembre 2013, Telefónica/Commission, C‑274/12 P, EU:C:2013:852, point 46).

63      Aussi une entreprise ne saurait-elle, en principe, être recevable à introduire un recours en annulation contre une décision de la Commission interdisant un régime d’aides si cette décision se présente, à l’égard de cette entreprise, comme une mesure de portée générale qui s’applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’égard d’une catégorie de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir arrêts du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑298/00 P, EU:C:2004:240, point 37 et jurisprudence citée, et du 11 juin 2009, Acegas/Commission, T‑309/02, EU:T:2009:192, point 47 et jurisprudence citée).

64      Plus particulièrement, la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets auxquels s’applique une mesure n’implique nullement que ces sujets doivent être considérés comme étant concernés individuellement par cette mesure dès lors que cette application est effectuée en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (arrêt du 19 décembre 2013, Telefónica/Commission, C‑274/12 P, EU:C:2013:852, point 47).

65      En revanche, lorsqu’une décision affecte un groupe de personnes qui étaient identifiées ou identifiables au moment où cet acte a été pris et en fonction de critères propres aux membres de ce groupe, ces personnes peuvent être individuellement concernées par cet acte en tant qu’elles font partie d’un cercle restreint d’opérateurs économiques (arrêts du 17 janvier 1985, Piraiki–Patraiki e.a./Commission, 11/82, EU:C:1985:18, point 31 ; du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission, C‑182/03 et C‑217/03, EU:C:2006:416, point 60, et du 17 septembre 2009, Commission/Koninklijke FrieslandCampina, C‑519/07 P, EU:C:2009:556, point 54).

66      Il en va ainsi d’un bénéficiaire effectif d’un régime d’aides, concerné par une décision de la Commission interdisant ledit régime et ordonnant la récupération de l’aide, à la différence d’un simple bénéficiaire potentiel, concerné par la décision en raison de sa seule appartenance au secteur en question (voir, en ce sens, arrêts du 19 octobre 2000, Italie et Sardegna Lines/Commission, C‑15/98 et C‑105/99, EU:C:2000:570, points 34 et 35, et du 19 décembre 2013, Telefónica/Commission, C‑274/12 P, EU:C:2013:852, point 49).

67      C’est à la lumière de l’ensemble de ces considérations qu’il y a lieu de vérifier si, eu égard à sa situation factuelle et juridique, la requérante doit être considérée comme individuellement concernée par la décision attaquée.

68      En l’espèce, la requérante n’a, de fait, jamais bénéficié de l’allégement d’impôt résultant de la loi de finances de 2003, de sorte qu’elle ne saurait être assimilée à un bénéficiaire effectif de la mesure en cause.

69      Il n’en reste pas moins que, d’une part, la requérante a introduit plusieurs demandes à cette fin.

70      En effet, antérieurement à l’adoption par la Commission de la décision d’ouverture et de la décision attaquée, la requérante a introduit, les 30 et 31 décembre 2004, plusieurs demandes aux fins du remboursement du trop-versé d’impôt par rapport à la part forfaitaire de 10 %.

71      Aussi la requérante fait-elle partie d’un cercle fermé d’entreprises, parfaitement identifiables au moment de l’adoption de la décision attaquée, à savoir les entreprises ayant déjà fait une demande en vue de bénéficier de la mesure en cause (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 17 septembre 2009, Commission/Koninklijke FrieslandCampina, C‑519 P, EU:C:2009:556, points 54 à 57).

72      D’autre part, bien que l’agence fiscale italienne ait rejeté tacitement lesdites demandes, la requérante avait obtenu, antérieurement à l’adoption de la décision attaquée, de la commission fiscale provinciale et, en appel, de la commission fiscale régionale de Palerme, l’annulation de la décision de rejet tacite et la reconnaissance de son droit à bénéficier de la mesure en cause.

73      En outre, en l’absence de pourvoi formé par l’agence fiscale italienne contre l’arrêt de la commission fiscale régionale de Palerme, ce dernier a acquis force de chose jugée, conférant à la requérante un droit acquis à bénéficier de la mesure en cause.

74      Partant, la requérante ne saurait être assimilée, aux fins de l’appréciation de la recevabilité du recours, à un simple bénéficiaire potentiel, mais, à tout le moins, à un bénéficiaire reconnu de la mesure en cause par les commissions fiscales provinciale et régionale de Palerme.

75      Au surplus, le fait que le prononcé de l’arrêt confirmatif de la commission fiscale régionale de Palerme soit intervenu postérieurement à l’adoption par la Commission de la décision d’ouverture ne saurait remettre en cause cette appréciation.

76      Si un bénéficiaire effectif est recevable à agir contre une décision de la Commission déclarant un régime d’aides incompatible avec le marché intérieur, en ce que ce dernier est, en principe, concerné par l’obligation de récupération, il en va de même d’une entreprise n’ayant pas bénéficié de fait de la mesure, mais dont le droit à en bénéficier a été juridiquement reconnu au niveau national (voir, en ce sens, arrêt du 4 février 2016, GFKL Financial Services/Commission, T‑620/11, sous pourvoi, EU:T:2016:59, points 68 à 71).

77      Or, en l’espèce, la requérante est bel et bien titulaire d’un droit acquis au bénéfice de la mesure en cause.

78      Aussi y a-t-il lieu, en l’espèce, d’opérer une distinction entre, d’une part, le droit à bénéficier de la mesure en cause, reconnu au niveau national, droit dont est titulaire la requérante, et, d’autre part, l’absence d’exécution, au niveau national, dudit droit, lequel ne saurait constituer un obstacle à la recevabilité du recours.

79      Par conséquent, il y a lieu de considérer que la requérante est, dans les circonstances de l’espèce, individuellement concernée par la décision attaquée et, partant, que le recours est recevable en ce qui concerne le chef de conclusions présenté à titre subsidiaire.

2.      Sur le fond

80      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la requérante demande l’annulation de la décision attaquée dans son ensemble. À titre subsidiaire, elle demande que soit prononcée la nullité de l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée, en application duquel la Commission a enjoint à la République italienne d’annuler tous les paiements en cours de l’aide en vertu des régimes visés à l’article 1er de cette décision, avec effet à la date d’adoption de ladite décision.

a)      Sur le premier moyen, tiré d’une violation des principes d’égalité de traitement, de protection de la confiance légitime, de sécurité juridique, de légalité et de libre concurrence, des droits de la défense et de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999

81      Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait état de la violation par la Commission des principes d’égalité de traitement, de protection de la confiance légitime, de sécurité juridique, de légalité et de libre concurrence, des droits de la défense et de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999.

1)      Sur la violation des principes de sécurité juridique, de légalité et de libre concurrence ainsi que des droits de la défense et de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999

82      S’agissant de la violation des principes de sécurité juridique, de légalité et de libre concurrence, des droits de la défense et de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, force est de constater que la requérante se contente d’invoquer de telles violations sans nullement les étayer.

83      Or, en application de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête doit contenir, outre l’objet du litige, les moyens et les arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens, ce qui, en l’espèce, fait défaut.

84      Partant, il y a lieu de rejeter l’argumentation tirée de la violation des principes de sécurité juridique, de légalité et de libre concurrence ainsi que des droits de la défense et de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999 comme étant irrecevable.

2)      Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime

85      La requérante fait valoir qu’elle avait, dès l’entrée en vigueur de la loi de finances de 2003, une « entière et légitime confiance » quant à son droit au remboursement des sommes versées à l’administration fiscale.

86      Pour sa part, la Commission fait observer que le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, aient été fournies à l’intéressée par les autorités compétentes de l’Union, ce qui ferait nécessairement défaut en l’espèce.

87      Elle ajoute, tout en se fondant sur les écrits de la requérante, que cette dernière semble fonder sa confiance légitime sur la tardiveté de l’action de la Commission, qui aurait eu lieu plusieurs années après l’adoption et la mise à exécution du régime d’aides en cause.

88      En l’espèce, à supposer, d’une part, que la requérante fonde sa confiance légitime sur la tardiveté de l’action de la Commission, il y a lieu de relever, premièrement, que le régime d’aides en cause n’a pas été notifié à la Commission et, deuxièmement, que cette dernière n’en a pris connaissance qu’à la suite d’une demande de renseignements transmise en février 2011.

89      La Commission a, par la suite, interrogé les autorités italiennes concernées, puis adopté, le 17 octobre 2012, la décision d’ouverture en suspendant le régime d’aides en question.

90      Ainsi, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir agi tardivement, à la différence des autorités italiennes, et, a fortiori, d’avoir fait naître chez la requérante une confiance légitime quant à son droit au remboursement des sommes versées à l’administration fiscale.

91      À supposer, d’autre part, que la requérante invoque une violation du principe de protection de la confiance légitime en raison de l’assurance, conférée tant par la mesure en cause que par les arrêts des commissions fiscales provinciale et régionale de Palerme, de bénéficier de ladite mesure, force est de constater qu’une telle assurance n’émane aucunement de la Commission.

92      Partant, il ne saurait être fait grief à la Commission d’avoir fait naître chez la requérante une confiance légitime quant à la possibilité de bénéficier de la mesure en cause.

93      Par conséquent, il y a lieu de rejeter l’argumentation tirée de la violation du principe de protection de la confiance légitime comme étant non fondée.

3)      Sur la violation du principe d’égalité de traitement

i)      Arguments des parties

94      La requérante soutient que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement en ne tenant pas compte de la particularité de sa situation par rapport à celles des bénéficiaires effectifs de la mesure en cause.

95      Elle se trouverait dans une situation comparable à ces derniers en ce qu’elle serait également, d’une part, un bénéficiaire effectif de la mesure en cause et, d’autre part, dans l’impossibilité de rapporter la preuve du préjudice subi par le séisme ayant frappé la région de Catane (Italie) en 1990.

96      Aussi, en imposant à la République italienne de ne récupérer auprès des bénéficiaires effectifs que les aides versées pour un événement survenu moins de dix ans antérieurement à l’adoption de la décision attaquée et de suspendre parallèlement tous les paiements en cours de l’aide, la Commission aurait-elle violé le principe d’égalité de traitement.

97      Par ailleurs, la requérante affirme que la Commission favorise les contribuables ayant été négligents par rapport à ceux s’étant, avant 2003, acquittés du paiement de leurs impôts.

98      Pour sa part, la Commission souligne, tout d’abord, que la requérante ne conteste ni la qualification de la mesure en cause d’aide d’État illégale et incompatible avec le marché intérieur, ni l’obligation faite, en principe, à la République italienne de récupérer les aides déclarées incompatibles, ni la validité de l’injonction de suspension des versements d’aides, telle qu’elle ressort de la décision d’ouverture.

99      Ensuite, la Commission précise que les bénéficiaires effectifs d’un régime d’aides ne sont pas dans des situations comparables à celles de bénéficiaires potentiels et invoque à ce titre la jurisprudence relative à leur qualité pour agir.

100    Ces deux catégories se distingueraient davantage en l’espèce, dans la mesure où les premiers auraient pu bénéficier du régime de la loi de finances de 2003, avant l’adoption de la décision d’ouverture.

101    Au surplus, les conséquences juridiques de la décision attaquée différeraient selon les catégories de bénéficiaires. Selon la Commission, la République italienne se doit, d’une part, de récupérer les aides déjà versées et, d’autre part, de s’abstenir de verser les aides non encore versées, versements d’ores et déjà suspendus par la décision d’ouverture, ce qui demeurerait pleinement conforme aux objectifs fondamentaux des règles de l’Union en matière d’aides d’État.

102    Enfin, si la Commission a, certes, prévu une exception à l’obligation de récupération des aides déjà versées, justifiée par l’expiration du délai de dix ans durant lequel doivent être conservés les documents comptables, cette exception devrait en tout état cause s’apprécier de manière restrictive.

103    Ainsi, il ne pourrait être possible, par analogie, de permettre, postérieurement à l’adoption de la décision attaquée, le versement d’aide déclarées incompatibles, sauf à priver d’effet utile non seulement ladite décision, mais aussi le système de contrôle des aides d’État dans son ensemble.

104    En tout état de cause, le fait que des aides illégales et incompatibles aient été versées ne saurait justifier le versement à la requérante de ces mêmes aides, dans la mesure où, en substance, le principe d’égalité de traitement doit être concilié avec le principe selon lequel nul ne peut invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui.

ii)    Appréciation du Tribunal

105    En premier lieu, la requérante reproche à la Commission d’avoir violé le principe d’égalité de traitement en interdisant aux autorités italiennes, à l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée, d’exécuter la mesure en cause, tout en prévoyant parallèlement une dispense à l’obligation de récupération des aides déjà versées pour ceux qui en auraient bénéficié de manière effective avant le 17 octobre 2012.

106    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 14 avril 2005, Belgique/Commission, C‑110/03, EU:C:2005:223, point 71 et jurisprudence citée).

107    Or, en l’espèce, la requérante ne saurait être considérée comme étant dans une situation comparable aux entreprises ayant bénéficié de manière effective de la mesure en cause avant le 17 octobre 2012.

108    En effet, si la requérante est, à l’instar des entreprises concernées par la dispense de l’obligation de récupération, dans l’impossibilité de rapporter la preuve du préjudice subi, ainsi qu’elle l’a fait valoir tant dans ses écrits que lors de l’audience, elle ne saurait, en revanche, être concernée par l’obligation de récupération.

109    La requérante n’a jamais, de fait, bénéficié du remboursement du trop-versé par rapport à la part forfaitaire de 10 %, à la différence des bénéficiaires effectifs qui s’étaient acquittés, dès l’adoption de la loi de finances de 2003, de seulement 10 % des impôts dus.

110    Ainsi, la requérante ne saurait être considérée comme un bénéficiaire effectif, à la différence des entreprises qui en ont bénéficié effectivement avant le 17 octobre 2012. Elle ne saurait être tout au plus considérée, à la suite des arrêts de la commission fiscale provinciale et de la commission fiscale régionale de Palerme, que comme le bénéficiaire putatif de l’avantage fiscal, dont le droit au remboursement a été juridiquement constaté, mais non formellement exécuté.

111    Partant, aucune inégalité de traitement ne saurait être constatée à cet endroit.

112    En second lieu, la requérante reproche, en substance, à la Commission d’avoir violé le principe d’égalité de traitement en interdisant aux autorités italiennes, à l’article 4, paragraphe 5, de la décision attaquée, d’exécuter la mesure en cause, tout en prévoyant parallèlement une exception à l’incompatibilité du régime d’aides en cause pour ceux qui, d’une part, en avaient bénéficié de manière effective avant le 17 octobre 2012 et, d’autre part, étaient en mesure de démontrer une concordance entre la mesure en cause et le préjudice subi.

113    Or, en l’espèce, la requérante s’avère dans l’« impossibilité objective », ainsi qu’elle l’a fait valoir à plusieurs reprises tant dans ses écrits, comme aux points 24 et 28 de la requête, que lors de l’audience, de rapporter la preuve du préjudice qu’elle aurait subi, à la différence des entreprises susceptibles d’invoquer à leur profit cette exception.

114    Ainsi, aucune inégalité de traitement ne saurait non plus être constatée à cet endroit.

115    Par conséquent, il convient de rejeter l’argumentation tirée de la violation du principe d’égalité de traitement et, partant, le premier moyen dans son ensemble.

b)      Sur le second moyen, tiré d’un excès de pouvoir en raison, d’une part, du caractère illogique et de l’injustice manifeste dont serait entachée la décision attaquée et, d’autre part, d’un défaut d’instruction

116    Dans le cadre du second moyen du recours, la requérante affirme que la décision attaquée encourt l’annulation, dans la mesure où la Commission aurait commis un excès de pouvoir, en raison, d’une part, du caractère illogique et de l’injustice manifeste dont serait entachée la décision attaquée et, d’autre part, d’un défaut d’instruction.

117    La requérante prétend que la Commission aurait dû prendre en compte sa situation afin d’éviter une discrimination entre les bénéficiaires effectifs du régime d’aides et ceux ayant acquitté leurs impôts de manière diligente.

118    Pour sa part, la Commission relève que la requérante se contente d’affirmer de manière péremptoire un détournement de pouvoir hypothétique de sa part et invite le Tribunal à juger le second moyen irrecevable, conformément à l’article 76, sous d), du règlement de procédure.

119    En tout état de cause, elle souligne que la requérante, en revendiquant le paiement d’une aide d’État illégale et incompatible avec le marché intérieur, demande, en substance, à la Commission d’exercer son pouvoir à des fins autres que celles dont elle est investie.

120    À cet égard, il y a lieu de considérer que, par son second moyen, la requérante reproche, en substance, à la Commission de ne pas avoir prévu dans la décision attaquée une exception à l’interdiction faite à la République italienne, en application de l’article 4, paragraphe 5, de ladite décision, de procéder à l’exécution de la mesure en cause, et ce afin de corriger une inégalité de traitement entre elle et les bénéficiaires effectifs de la mesure en cause.

121    Or, d’une part, ainsi qu’il ressort des points 103 à 113 du présent arrêt, aucune inégalité de traitement ne saurait être constatée entre la requérante et les bénéficiaires effectifs de la mesure en cause.

122    D’autre part, outre l’absence d’inégalité de traitement, la Commission ne saurait prévoir une exception à l’interdiction d’exécution d’un régime d’aides déclaré illégal et incompatible avec le marché intérieur, sauf à priver d’effet utile la décision attaquée.

123    Partant, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir omis d’étendre le bénéfice de la mesure en cause à la requérante.

124    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le second moyen du recours comme étant non fondé et, partant, le recours dans son ensemble.

IV.    Sur les dépens

125    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Centro Clinico e Diagnostico G. B. Morgagni Srl est condamnée aux dépens.

Gratsias

Labucka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 janvier 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.