Language of document : ECLI:EU:T:2011:745

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

14 décembre 2011 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale Vorfront – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009  »

Dans l’affaire T‑531/10,

Häfele GmbH & Co. KG, établie à Nagold (Allemagne), représentée par Mes M. Eck et J. Dönch, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. S. Schäffner, puis par Mme R. Manea, et enfin par M. A. Pohlmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 14 septembre 2010 (affaire R 570/2010-1), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal Vorfront comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, V. Vadapalas et K. O’Higgins, juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 novembre 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 19 janvier 2011,

vu la décision du 18 février 2011 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

vu l’ordonnance du 16 septembre 2011 portant jonction des affaires T‑425/10, T‑531/10 et T‑166/11 aux fins de la procédure orale,

à la suite de l’audience du 11 octobre 2011,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 4 mai 2009, la requérante, Häfele GmbH & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Vorfront.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 6, 7, 19 et 20 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 6 : « Matériaux de construction, garnitures pour meubles, bâtiment, construction, raccordement, portes et portes coulissantes ainsi que charnières de meubles, leurs pièces et matériel de fixation en métaux communs ; guides, mécanismes d’entraînement, amortisseurs, visserie, chevilles, vis, crochets et baguettes de suspension, lattes profilées, moulées, décoratives ; serrures, olives pour serrures et barillets et boîtiers à serrures » ;

–        classe 7 : « Entraîneurs » ;

–        classe 19 : « Matériaux de construction, ferrures de meubles, de bâtiments, de constructions, de portes, de portes coulissantes ainsi que charnières de meubles, leurs pièces et matériaux de fixation » ;

–        classe 20 : « Guides, mécanismes d’entraînement, appareils à vapeur, visserie, chevilles, vis, crochets et baguettes de suspension, lattes profilées, moulées, décoratives ; tous les articles précités non métalliques et compris dans la classe 20 ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 43/2009, du 9 novembre 2009.

5        Par décision du 9 février 2010, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement pour les produits en cause en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009.

6        Le 31 mars 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

7        Par décision du 14 septembre 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré que le signe verbal Vorfront est une indication descriptive des produits concernés, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Elle a également estimé que ce signe est dépourvu de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

9        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

10      À l’appui de son recours, la requérante soulève trois moyens, tirés d’une violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de l’article 7, paragraphe 1, sous c), et de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009.

11      Lors de l’audience, la requérante s’est désistée de son troisième moyen, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

12      Le Tribunal estime opportun, en l’espèce, d’examiner en premier lieu le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

13      Par ce second moyen, la requérante fait valoir que le signe Vorfront n’est pas descriptif des produits concernés ou de leurs caractéristiques, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, faute de lien suffisamment direct et concret entre ce signe et ces produits.

14      À cet égard, il convient d’emblée de rejeter l’allégation selon laquelle la chambre de recours aurait considéré que les conditions d’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 étaient remplies en partant de la prémisse erronée que celles de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement étaient remplies et ne se serait pas penchée plus avant sur celles de la première disposition. Il ressort en effet de la décision attaquée que la chambre de recours a procédé à l’examen du caractère descriptif du signe Vorfront, d’une part, par rapport à la compréhension qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits concernés, sans se fonder, à cet égard, sur l’absence de caractère distinctif dudit signe. L’examen du caractère distinctif de ce signe a d’ailleurs eu lieu à la suite de celui de son caractère descriptif.

15      Ensuite, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». Selon le paragraphe 2 du même article, « [l]e paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

16      Selon une jurisprudence constante, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les indications ou les signes descriptifs des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous [voir arrêt du Tribunal du 12 juin 2007, MacLean-Fogg/OHMI (LOKTHREAD), T‑339/05, non publié au Recueil, point 27, et la jurisprudence citée].

17      En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative (voir arrêt LOKTHREAD, précité, point 28, et la jurisprudence citée).

18      Il en résulte que, pour qu’un signe relève de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou de l’une de leurs caractéristiques (voir arrêt LOKTHREAD, précité, point 29, et la jurisprudence citée). À cet égard, il doit être précisé que le choix par le législateur du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés par ladite disposition ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une desdites caractéristiques (voir arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, non encore publié au Recueil, point 50, et la jurisprudence citée).

19      Pour qu’une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot résultant d’une combinaison d’éléments soit considérée comme descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il ne suffit pas qu’un éventuel caractère descriptif soit constaté pour chacun de ces éléments. Un tel caractère doit également être constaté pour le néologisme ou le mot lui-même (voir arrêt LOKTHREAD, précité, point 30, et la jurisprudence citée).

20      Une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits ou de ces services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sauf s’il existe un écart perceptible entre le néologisme ou le mot et la simple somme des éléments qui le composent. Cela suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le néologisme ou le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, de sorte qu’il prime la somme desdits éléments. À cet égard, l’analyse du terme en cause au vu des règles lexicales et grammaticales appropriées est également pertinente (voir arrêt LOKTHREAD, précité, point 31, et la jurisprudence citée).

21      Il importe enfin de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la compréhension qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés (voir arrêt LOKTHREAD, précité, point 32, et la jurisprudence citée).

22      En l’espèce, les produits concernés relèvent, de manière générale, du domaine de la construction, de la menuiserie ou de l’ameublement, étant donné qu’il s’agit, notamment, de matériaux de construction, de garnitures notamment pour meubles, portes et portes coulissantes, de charnières de meubles, d’accessoires s’y rapportant ainsi que de divers matériaux et accessoires de quincaillerie et de serrurerie.

23      S’agissant du public par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus en cause, la requérante n’a pas contesté l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle il était constitué du public spécialisé, tel que les fabricants de meubles ou les menuisiers, ainsi que du grand public intéressé par le bricolage. Cette appréciation doit en tout état de cause être avalisée, dès lors que les produits concernés visent, compte tenu de leur nature, non seulement un public composé de professionnels, notamment de la construction, de la menuiserie ou de l’ameublement, mais également le consommateur moyen en général, constitué notamment des bricoleurs amateurs.

24      En outre, étant donné que le signe verbal en cause est composé d’éléments provenant de la langue allemande, il y a lieu de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que le public par rapport auquel il convient d’apprécier l’existence d’un motif absolu de refus est un public germanophone. La requérante ne conteste pas cette appréciation. Cependant, elle relève, dans le cadre de son premier moyen, que le signe Vorfront peut également être considéré comme composé d’un terme de la langue allemande (« vor ») et d’un terme de la langue anglaise (« front »). Sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur le bien-fondé de cet argument et nonobstant le fait que le terme « vorfront » n’a, en tant que tel, aucune signification en langue anglaise, force est de constater que ledit argument est en tout état de cause sans influence en l’espèce, étant donné que l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 énonce que le paragraphe 1 dudit article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté et que, en l’espèce, tel est le cas, ainsi qu’il ressort des considérations suivantes, pour la partie de la Communauté composée des pays germanophones.

25      Il y a dès lors lieu d’examiner s’il existe, du point de vue dudit public, un rapport suffisamment direct et concret entre le signe Vorfront et les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé.

26      En ce qui concerne, premièrement, le signe Vorfront, il y a lieu de constater, tout d’abord, qu’il est composé par la simple juxtaposition, sans ajout ni modification, de deux mots courants de la langue allemande, à savoir, d’une part, du terme « vor » et, d’autre part, du terme « front ». À cet égard, il doit être souligné que, ainsi que la chambre de recours l’a relevé, ce signe n’est pas inhabituel dans sa structure, étant donné que celle-ci est conforme aux règles grammaticales allemandes, ce que la requérante ne conteste d’ailleurs pas. En tout état de cause, à supposer que cela ne soit pas le cas, le fait que le signe en cause soit doté d’une structure grammaticalement incorrecte ne serait pas suffisant, en lui‑même, pour conclure à l’absence de caractère descriptif [voir arrêt du Tribunal du 7 juin 2005, Münchener Rückversicherungs‑Gesellschaft/OHMI (MunichFinancialServices), T‑316/03, Rec. p. II‑1951, point 36, et la jurisprudence citée]. Il doit ensuite être relevé que l’élément « vor » sera compris par le public pertinent comme signifiant « devant » et l’élément « front » comme signifiant « partie avant ». Il convient enfin de considérer que, pris dans sa globalité, le signe Vorfront sera compris comme se référant à quelque chose se situant devant la partie avant de quelque chose. En effet, eu égard à sa structure, qui n’est pas inhabituelle, et au fait qu’il est conforme aux règles de la langue allemande, ce signe ne crée pas, auprès du public ciblé, une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple juxtaposition des mots qui le composent pour en modifier le sens ou la portée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 novembre 2008, Duro Sweden/OHMI (EASYCOVER), T‑346/07, non publié au Recueil, point 55, et la jurisprudence citée]. À cet égard, il doit être relevé que l’argumentation de la requérante, avancée dans le cadre du premier moyen, selon laquelle le signe Vorfront n’existerait pas en langue allemande mais aurait été crée comme terme de fantaisie et ne figurerait pas dans les dictionnaires allemands, ne permet pas de considérer, en l’espèce, que celui-ci crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les mots « vor » et « front », de sorte qu’il prime sur la somme de ces deux mots [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 juin 2010, Hoelzer/OHMI (SAFELOAD), T‑315/09, non publié au Recueil, point 28, et la jurisprudence citée]. Le fait que la combinaison des mots « vor » et « front » ne soit pas reprise comme telle dans des dictionnaires est en tout état de cause dénué de pertinence [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 mars 2011, CheckMobile/OHMI (carcheck), T‑14/10, non publié au Recueil, point 21].

27      En ce qui concerne, deuxièmement, la nature du rapport existant entre le signe Vorfront et les produits concernés, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que ce signe pouvait servir à désigner l’espèce et la destination de ces produits.

28      En effet, tout d’abord, eu égard à sa signification, il sera perçu par le public pertinent, dans le contexte des produits concernés, comme une indication selon laquelle lesdits produits sont destinés à être utilisés ou installés sur la partie avant d’une construction ou d’un meuble, devant un autre élément de ladite construction ou dudit meuble, ainsi que la chambre de recours l’a, en substance, relevé. La requérante n’a avancé aucun élément permettant de remettre en cause une telle appréciation.

29      Il doit ensuite être relevé que, ainsi que la requérante le reconnaît, dans le secteur de l’ameublement, le terme « vorfront » est utilisé pour désigner un certain type de montage de front de meuble, permettant, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, l’installation de portes coulissantes devant les éléments inférieurs et supérieurs et devant les parois latérales d’un meuble. Ce système de montage peut d’ailleurs impliquer, voire requérir, l’utilisation desdits produits, ce que la requérante ne conteste pas s’agissant de certains d’entre eux. Aussi, dans le contexte des produits concernés, le signe Vorfront est également susceptible d’être compris par le public pertinent comme une indication que lesdits produits sont destinés à être utilisés dans le cadre d’un montage de portes coulissantes selon ce système ou qu’ils sont spécifiques à celui-ci.

30      Cette appréciation n’est pas remise en cause par l’argumentation de la requérante par laquelle elle fait valoir que le terme « vorfront » est utilisé dans le secteur de l’ameublement pour un certain type de montage, que tous les produits concernés peuvent être utilisés pour d’autres principes de montage, voire à des fins autres que le montage de fronts de meuble, et que certains de ces produits ne seraient pas nécessaires audit montage. En effet, pour que l’OHMI oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il n’est pas nécessaire que le signe en cause soit effectivement utilisé, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives. Il suffit que ledit signe puisse être utilisé à de telles fins (voir arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, point 38, et la jurisprudence citée). En outre, un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de ladite disposition, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 32, et arrêt du Tribunal du 9 mars 2010, Euro-Information/OHMI (EURO AUTOMATIC CASH), T‑15/09, non publié au Recueil, point 39]. De plus, le fait qu’un signe soit descriptif par rapport à une partie seulement des produits ou des services relevant d’une catégorie mentionnée en tant que telle dans la demande d’enregistrement n’empêche pas que ce signe soit refusé à l’enregistrement. En effet, si, dans un tel cas, le signe en question était enregistré en tant que marque communautaire pour la catégorie visée, rien n’empêcherait son titulaire de l’utiliser également pour les produits ou les services de cette catégorie pour lesquels il est descriptif [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec. p. II‑1927, point 92, et la jurisprudence citée]. Enfin, de la même manière que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 n’exige pas que les signes ou les indications pouvant servir à désigner des caractéristiques des produits ou des services concernés soient le mode exclusif de désignation desdites caractéristiques (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619, point 57), cette disposition ne requiert pas que ces signes ou ces indications désignent exclusivement ou spécifiquement les caractéristiques desdits produits, à l’exclusion de celles d’autres produits.

31      En tout état de cause, même à supposer que ces arguments soient pertinents, il n’en demeure pas moins que le signe demandé doit être considéré comme descriptif des caractéristiques des produits concernés sur la base des considérations figurant au point 28 ci-dessus.

32      Par ailleurs, il convient d’écarter l’argument selon lequel le signe Vorfront ne constitue pas une désignation générique pour les produits concernés, étant donné que la chambre de recours n’a pas considéré que tel était le cas. Elle s’est en effet bornée à relever que le concept auquel se réfère ledit signe, en tant que concept générique, doit rester librement à la disposition de tous les concurrents présents sur le marché des matériaux de construction. Au demeurant, la requérante a admis elle-même que, dans le secteur de l’ameublement, il est possible que ledit signe soit une indication matérielle devenue courante d’un certain type de montage.

33      En outre, s’agissant de l’argument selon lequel l’utilisation du signe Vorfront dans le catalogue, en langue anglaise, de la requérante démontrerait que ce signe est utilisé en tant que marque et non en tant que désignation générique des produits concernés, il doit être écarté comme inopérant. En effet, d’une part, il convient de relever qu’il n’est pas exigé, pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, que le signe en cause constitue une désignation générique des produits concernés. D’autre part, il doit être rappelé que l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 énonce que le paragraphe 1 dudit article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté et que, en l’espèce, tel est le cas, ainsi qu’il ressort des considérations précédentes, pour la partie de la Communauté composée des pays germanophones. En tout état de cause, la circonstance que, dans le catalogue en langue anglaise de la requérante, le signe Vorfront n’ait pas été traduit ne saurait impliquer une absence de caractère descriptif auprès du public germanophone.

34      Enfin, l’argument, avancé dans le cadre du premier moyen, selon lequel le signe Vorfront a fait l’objet d’un enregistrement en Allemagne, ce qui constituerait un indice de son aptitude à être enregistré en tant que marque communautaire, doit également être écarté. À cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation de l’Union pertinente. L’OHMI et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés par une décision intervenue au niveau d’un État membre ou d’un pays tiers admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 47, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 37].

35      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le signe Vorfront véhicule un message immédiatement compréhensible pouvant servir, dans le commerce, à désigner l’espèce ou la destination, et donc les caractéristiques, des produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé. Contrairement à ce que prétend la requérante, il présente donc un rapport suffisamment direct et concret avec les produits concernés.

36      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu au caractère descriptif de ce signe, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

37      Il convient donc de rejeter le second moyen.

38      Quant au premier moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés s’applique pour que le signe en cause ne puisse être enregistré comme marque communautaire [voir arrêt du Tribunal du 26 octobre 2000, Community Concepts/OHMI (Investorworld), T‑360/99, Rec. p. II‑3545, point 26, et la jurisprudence citée].

39      Par conséquent, il convient, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le premier moyen, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

40      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Häfele GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 décembre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.