Language of document : ECLI:EU:T:2014:916

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

21 octobre 2014 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑162/09 DEP,

Adolf Würth GmbH & Co. KG, établie à Künzelsau (Allemagne), représentée par Mes M. Karl et M. Mayer, avocats,

Arnold Fasteners (Shenyang) Co. Ltd, établie à Shenyang (Chine),

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne,

European Industrial Fasteners Institute AISBL (EIFI), représenté par Me J. Bourgeois, avocat,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à rembourser par Adolf Würth GmbH & Co. KG à l’European Industrial Fasteners Institute (EIFI) à la suite de l’arrêt du 19 avril 2012, Würth et Fasteners (Shenyang)/Conseil (T‑162/09, EU:T:2012:187),

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek, président (rapporteur), Mme I. Labucka et M. V. Kreuschitz, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 avril 2009, les requérantes, Adolf Würth GmbH & Co. KG (ci-après Adolf Würth) et Arnold Fasteners (Shenyang) Co. Ltd (ci-après Arnold Fasteners) ont introduit un recours ayant pour objet une demande d’annulation du règlement (CE) nº 91/2009 du Conseil, du 26 janvier 2009, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine (JO L 29, p. 1).

2        Les intervenantes, la Commission européenne et l’European Industrial Fasterners Institute AISBL (EIFI), sont intervenues dans le litige pour demander le rejet du recours et la condamnation des requérantes aux dépens.

3        Par arrêt du 19 avril 2012, Würth et Fasteners (Shenyang)/Conseil (T‑162/09, EU:T:2012:187), le Tribunal a rejeté comme irrecevable le recours et a condamné Adolf Würth et Arnold Fasteners à supporter, outre leurs propres dépens, ceux exposés, notamment, par l’EIFI.

4        L’EIFI a demandé à Adolf Würth de lui régler le montant des dépens récupérables afférents à la procédure devant le Tribunal, qu’elle a chiffré à 20 208,18 euros, et lui a fourni un tableau explicatif des honoraires d’avocat, indiquant le taux horaire et les heures consacrées aux quatre affaires connexes dont la présente. Après un échange de correspondance, aucun accord n’a été trouvé entre les parties quant au montant des dépens récupérables.

5        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 24 janvier 2014, en application de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, l’EIFI a introduit la présente demande de taxation de dépens par laquelle il conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de condamner Adolf Würth à lui verser, d’une part, au titre des dépens exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal, la somme de 20 208,18 euros et, d’autre part, les dépens exposés aux fins de la présente procédure.

6        Par télécopie 29 janvier 2014, le greffe du Tribunal a informé Adolf Würth que le délai pour le dépôt de ses observations sur la demande de taxation des dépens avait été fixé au 11 mars 2014. Cependant, cette dernière n’a pas déposé d’observations dans le délai qui lui était imparti.

 En droit

7        Selon l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat.

8        Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (voir ordonnance du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec, EU:T:2004:192, point 13 et jurisprudence citée).

9        Selon une jurisprudence constante, le Tribunal n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces émoluments peuvent être récupérés auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (voir ordonnance Airtours/Commission, EU:T:2004:192, point 17 et jurisprudence citée).

10      Il est également de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions communautaires de nature tarifaire applicables, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit communautaire ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (voir ordonnance Airtours/Commission, EU:T:2004:192, point 18 et jurisprudence citée).

11      Enfin, afin d’apprécier, sur la base des critères énumérés au point 10 ci‑dessus, le caractère indispensable des frais effectivement exposés aux fins de la procédure, des indications précises doivent être fournies par le demandeur. Si l’absence de telles informations ne fait pas obstacle à la fixation par le Tribunal, sur la base d’une appréciation équitable, du montant des dépens récupérables, elle le place cependant dans une situation d’appréciation nécessairement stricte en ce qui concerne les revendications du demandeur (voir ordonnance du 28 mai 2013, Marcuccio/Commission, T‑278/07 P‑DEP, Rec, EU:T:2013:269, point 16 et jurisprudence citée).

12      C’est en fonction de ces éléments qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.

13      L’EIFI réclame à Adolf Würth le paiement de 20 208,18 euros, mais n’avance aucune argumentation quant aux différents critères à prendre en compte lors de la taxation des dépens par le Tribunal, tels que rappelés par la jurisprudence citée au point 10 ci-dessus.

14      À cet égard, et en premier lieu, concernant l’objet et la nature du litige et son importance sous l’angle du droit communautaire, il y a lieu de relever que l’affaire au principal faisait partie de quatre affaires connexes concernant l’institution des droits antidumping sur les importations d’éléments de fixation. Or, si les affaires en matière d’antidumping portent en général sur des questions économiques complexes et souvent très techniques, le degré de difficulté juridique des questions de droit soulevées par la présente affaire ne saurait être qualifié d’exceptionnel.

15      En deuxième lieu, le Tribunal constate que même si l’EIFI n’a pas avancé de données chiffrées, il ne saurait être nié que l’affaire présente des intérêts économiques non négligeables pour lui.

16      En troisième lieu, en ce qui concerne la charge de travail que la procédure a pu engendrer pour le conseil de l’EIFI, il convient de rappeler qu’il appartient au juge de l’Union de prendre en considération le travail objectivement indispensable à l’ensemble de la procédure judiciaire (ordonnance du 31 mars 2011, Tetra Laval/Commission, T‑5/02 DEP et T‑80/02 DEP, EU:T:2011:129, point 67 et jurisprudence citée). Par ailleurs, il importe de souligner que la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (ordonnance Tetra Laval/Commission, EU:T:2011:129, point 68 et jurisprudence citée).

17      En l’espèce, s’agissant des dépens afférents à la procédure principale devant le Tribunal, il y a lieu de relever que, pour l’EIFI, la procédure écrite a consisté en un mémoire en intervention de 11 pages. Quant à la procédure orale, les avocats de l’EIFI ont notamment préparé une plaidoirie d’audience et assuré la représentation de leur client lors de celle-ci.

18      Or, le tableau récapitulatif des heures travaillées et des taux horaires communiqué à Adolf Würth et joint en annexe à la présente demande de taxation des dépens ne détaille pas les prestations accomplies à ce titre par les avocats mandatés par l’EIFI, et n’est accompagné d’aucune pièce justificative.

19      Notamment, aucune indication n’est fournie par l’EIFI quant au temps consacré par les différents avocats concrètement à la présente affaire et encore moins au temps consacré aux différentes étapes de la procédure au principal. En effet, pour arriver aux 20 208,18 euros réclamés, l’EIFI a simplement calculé les honoraires et frais engendrés par le traitement des quatre affaires connexes et divisé ladite somme par quatre.

20      Quant au taux horaire pratiqué par les dix collaborateurs du cabinet d’avocats représentant l’EIFI, celui-ci s’échelonne, selon le tableau présenté, entre 105 et 581 euros, les taux pratiqués par les trois collaborateurs principaux ayant passé le plus d’heures à travailler sur l’affaire se situant au-dessus de 290 euros.

21      Le Tribunal estime que, en l’espèce, les rétributions horaires des conseils de l’EIFI dont la récupération est demandée apparaissent excessifs et rappelle que, selon la jurisprudence, un taux situé aux alentours de 300 euros par heure ne saurait être considéré comme approprié que pour rémunérer les services d’un professionnel particulièrement expérimenté, capable de travailler de façon très efficace et rapide. La prise en compte d’une rémunération d’un tel niveau doit par ailleurs avoir pour contrepartie une évaluation nécessairement stricte du nombre total d’heures de travail indispensables aux fins de la procédure contentieuse (voir, en ce sens, ordonnance du 15 janvier 2008, Organisation des Modjahedines du peuple d'Iran/Conseil, T‑228/02 DEP, EU:T:2008:7, point 64 et jurisprudence citée).

22      Eu égard à tout ce qui précède, il convient de considérer, aux fins du calcul des honoraires indispensables exposés par l’EIFI, aux fins de la procédure principale devant le Tribunal ainsi que de ceux afférents à la procédure de taxation des dépens, et compte tenu de l’absence de décompte détaillé et de pièces justificatives ainsi que de la brièveté du mémoire en intervention et de la demande de taxation des dépens, que le litige a objectivement nécessité une activité d’une durée de 12 heures, dont la rémunération, à raison du taux horaire de 300 euros que le Tribunal estime approprié en l’espèce, doit être évaluée à 3 600 euros.

23      En quatrième lieu, concernant les frais de l’avocat mandaté par l’intervenante pour lesquels l’EIFI ne présente aucune explication ni justificatif, il sera fait une juste appréciation de leur montant en le fixant à 500 euros.

24      En cinquième lieu, et étant donné que le Tribunal, en fixant les dépens récupérables, a tenu compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment où il statue, il n’y a pas non plus lieu de statuer séparément sur les frais exposés par les parties aux fins de la présente procédure (voir ordonnance du 20 novembre 2012, Al Shanfari/Conseil et Commission, T‑121/09 DEP, EU:T:2012:607, points 45 et 46).

25      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par l’intervenante au titre de la procédure devant le Tribunal en fixant leur montant à 4 100 euros, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par Adolf Würth GmbH & Co. KG et Arnold Fasteners (Shenyang) Co. Ltd au titre de la procédure devant le Tribunal est fixé à 4 100 euros.

Fait à Luxembourg, le 21 octobre 2014.

Le greffier

 

       Le président

E.  Coulon

 

       M. Prek


* Langue de procédure : l'allemand.