Language of document : ECLI:EU:T:2024:222

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

10 avril 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative MH Cuisines – Enregistrement international de la marque figurative antérieure MM CUISINES – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑42/23,

Häcker Küchen GmbH & Co. KG, établie à Rödinghausen (Allemagne), représentée par Mes F. Dehn, L. Maritzen, C. Krafft et K. Blükle, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. A. Bosse et T. Klee, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Moura & Moura Fabricação e Comercialização de Mobiliário Lda, établie à Sanfins de Ferreira (Portugal),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira (rapporteure), présidente, M. Kancheva et M. U. Öberg, juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 8 novembre 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Häcker Küchen GmbH & Co. KG, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 24 novembre 2022 (affaire R 1078/2022‑1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 1er mai 2020, la requérante a déposé auprès de l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les services relevant des classes 35, 36, 43 et 45 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, en ce qui concerne la classe 35, notamment à la description suivante : « Services de vente au détail et en gros, également via des boutiques en ligne, concernant l’achat et la vente de meubles, d’équipements, de cuisines, d’équipements de cuisine, d’article[s] de décoration intérieur[e], de textiles ménagers ».

4        Le 8 février 2021, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, Moura & Moura Fabricação e Comercialização de Mobiliário Lda, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur l’enregistrement international désignant l’Union européenne antérieur no 1417720 de la marque figurative, reproduite ci-après :

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6        Les produits couverts par la marque antérieure relevaient de la classe 20 et correspondaient à la description suivante : « Moulures pour miroirs ; cadres ; oreillers ; coussins de décoration ; cadres de lit ; bases pour matelas ; lits superposés ; têtes de lits ; lits ; lits incorporant un châssis de canapé ; lits équipés de matelas à ressorts intérieurs ; sommiers à ressorts ; ridelles de lits ; matelas portables ; literie à l’exception du linge de lit ; pentures non métalliques pour la fixation de stores plissés ; accessoires de suspension de rideaux ; accessoires pour rideaux ; stores d’intérieur pour fenêtres [meubles] ; portemanteaux ; finitions en matières plastiques pour meubles ; garnitures d’affichage métalliques [meubles] ; garnitures de meubles, non métalliques ; éléments muraux [meubles] ; garnitures non métalliques pour placards ; commodes murales ; coiffeuses (meubles) ; buffets ; coffres à outils [meubles] ; garnitures de meubles, non métalliques ; moulures pour meubles ; cadres non métalliques d’étagères [meubles] ; armoires ; armoires à glace ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

8        Par décision du 26 avril 2022, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition et a rejeté l’enregistrement de la marque demandée pour les services compris dans la classe 35, visés au point 3 ci-dessus, en raison de l’existence d’un risque de confusion avec la marque antérieure.

9        Le 20 juin 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et a rejeté le recours dans son intégralité.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter l’opposition ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens, y compris ceux exposés devant la chambre de recours.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens dans l’hypothèse où une audience serait organisée.

 En droit

 Sur la recevabilité de certains éléments de preuve présentés par la requérante

13      Au soutien de ses allégations relatives au faible caractère distinctif de la marque antérieure et au caractère purement descriptif de l’élément verbal « cuisines » faisant partie des signes en conflit, la requérante a présenté, notamment, deux documents contenant des captures d’écran correspondant à des résultats de recherche sur le moteur de recherche Google, annexés à la requête sous les numéros A.9 et A.11.

14      L’EUIPO excipe de l’irrecevabilité de ces éléments de preuve au motif qu’ils n’ont pas été produits devant ses instances.

15      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le recours porté devant le Tribunal en vertu de l’article 72 du règlement 2017/1001 vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée].

16      Par ailleurs, conformément aux termes de l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires déposés par les parties dans le cadre de la procédure devant le Tribunal ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. Les parties à la procédure devant le Tribunal n’ont donc pas le pouvoir de modifier devant celui-ci les termes du litige, tels qu’ils résultaient des prétentions et des allégations avancées par les parties à la procédure devant la chambre de recours. Partant, les preuves produites pour la première fois devant le Tribunal doivent être déclarées irrecevables, sans qu’il soit nécessaire de les examiner [voir arrêt du 14 mai 2009, Fiorucci/OHMI – Edwin (ELIO FIORUCCI), T‑165/06, EU:T:2009:157, point 22 et jurisprudence citée].

17      Dans le cas d’espèce, il est constant entre les parties que les éléments de preuve annexés à la requête sous les numéros A.9 et A.11 ont été présentés pour la première fois devant le Tribunal. Par conséquent, ces annexes sont irrecevables.

 Sur le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

18      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, en reprochant à la chambre de recours d’avoir commis une série d’erreurs dans l’appréciation des faits de l’espèce et du risque de confusion qui résulterait de l’enregistrement de la marque demandée. Les erreurs alléguées concernent le niveau d’attention du public pertinent à l’égard des articles d’ameublement, la similitude entre les produits et les services concernés, la comparaison entre le signe demandé et le signe antérieur, ainsi que le caractère distinctif intrinsèque de ce dernier.

19      Aux termes de de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

20      Aux fins de l’application de ladite disposition, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

21      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, comme le soutient la requérante, la chambre de recours a violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Sur le public pertinent et son niveau d’attention

22      Eu égard à la nature des services en cause, la chambre de recours a estimé que le public pertinent était constitué du grand public. Elle a également considéré que le territoire pertinent était, au regard de la marque antérieure, l’Union européenne dans son ensemble, tout en précisant que son analyse serait basée sur le public anglophone. Ces appréciations ne sont pas contestées par la requérante et doivent être approuvées.

23      S’agissant du niveau d’attention du public pertinent, la division d’opposition avait considéré que celui-ci variait de moyen à élevé, en fonction du prix, de la sophistication, de la nature spécialisée ou des conditions générales des produits et des services achetés. Pour sa part, la chambre de recours a considéré que le consommateur pertinent ferait preuve d’un niveau d’attention supérieur à la moyenne à l’égard des meubles de cuisine, étant donné que ceux-ci ne sont pas achetés quotidiennement et requièrent un investissement relativement élevé, sans prendre position à l’égard des autres produits et services concernés. Interrogé sur ce point lors de l’audience, l’EUIPO a confirmé l’appréciation de la division d’opposition concernant les produits et les services restants.

24      La requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir sous-évalué le niveau d’attention du consommateur pertinent, en considérant que ce dernier ne serait que moyennement avisé et qu’il n’aurait pas la possibilité d’effectuer une comparaison côte à côte des marques en conflit.

25      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante, en faisant valoir que les produits et les services concernés ne correspondent pas exclusivement à des meubles de cuisine onéreux, mais également à des articles de moindre valeur, qui ne requièrent aucune attention particulière de la part du public pertinent.

26      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 20 septembre 2018, Kwizda Holding/EUIPO – Dermapharm (UROAKUT), T‑266/17, EU:T:2018:569, point 21 et jurisprudence citée].

27      À cet égard, d’une part, il y a lieu de relever que la catégorie de produits concernés dans le cadre de la présente procédure comprend de nombreux articles qui, au regard de leur prix et de la fréquence d’achats, ne sont pas de nature à susciter une attention particulière de la part du public pertinent. Il en va ainsi, notamment, de cadres, d’oreillers, de coussins de décoration, ou encore de garnitures et d’accessoires pour meubles et rideaux. Il s’ensuit que les caractéristiques telles que l’esthétique, la qualité ou les dimensions de certains produits relevant de la classe 20 ne sauraient justifier un niveau d’attention élevé pour l’ensemble de ces produits [arrêt du 10 mars 2021, Hauz 1929/EUIPO – Houzz (HAUZ LONDON), T‑66/20, non publié, EU:T:2021:125, point 23].

28      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que le niveau d’attention du consommateur pertinent à l’égard des produits autres que les meubles de cuisine devait être qualifié de moyen.

29      D’autre part, en ce qui concerne le niveau d’attention du public pertinent à l’égard des meubles, y compris les lits, les meubles de cuisine et leurs éléments fixes (en anglais, « kitchen fixtures »), il est constant entre les parties que l’achat de pareils articles ne s’effectue que rarement et représente une dépense conséquente dans le budget d’un consommateur moyen. Or, le seul fait qu’un produit ne soit pas régulièrement acheté par le consommateur tend à démontrer que le niveau d’attention de celui-ci sera plutôt élevé, et ce indépendamment de son prix [voir arrêt du 13 juillet 2017, Migros-Genossenschafts-Bund/EUIPO – Luigi Lavazza (CReMESPRESSO), T‑189/16, non publié, EU:T:2017:488, points 31 et 35 et jurisprudence citée]. En effet, lors de l’achat de biens durables acquis de manière occasionnelle, les consommateurs font preuve d’un niveau d’attention plus élevé que pour l’acquisition de produits de consommation courante [voir arrêt du 16 novembre 2011, Dorma/OHMI – Puertas Doorsa (doorsa FÁBRICA DE PUERTAS AUTOMÁTICAS), T‑500/10, non publié, EU:T:2011:679, point 65 et jurisprudence citée].

30      À plus forte raison, il en va ainsi lorsque les produits en question se caractérisent par un prix relativement élevé. Les meubles constituent le plus souvent un achat coûteux et la majorité des consommateurs ne les achèteront qu’au terme d’un processus de comparaison et de réflexion relativement long. Le consommateur moyen effectue son choix sur la base d’une série de considérations fonctionnelles et esthétiques, afin de créer une harmonie avec les autres éléments d’ameublement dont il dispose déjà. Si l’acte d’achat au sens strict peut être rapidement effectué dans le cas de certaines pièces de mobilier, le processus de comparaison et de réflexion précédant le choix requiert, par définition, un niveau d’attention élevé [arrêt du 16 janvier 2008, Inter-Ikea/OHMI – Waibel (idea), T‑112/06, non publié, EU:T:2008:10, points 35, 37 et 38].

31      Il s’ensuit que le niveau d’attention du public pertinent à l’égard des achats de meubles, y compris les lits, les meubles de cuisine et leurs éléments fixes, doit être qualifié d’élevé (arrêt du 10 mars 2021, HAUZ LONDON, T‑66/20, non publié, EU:T:2021:125, point 24), et que c’est à tort que la chambre de recours a considéré qu’il ne serait que supérieur à la moyenne.

 Sur la comparaison des produits et des services

32      La chambre de recours a considéré que la marque antérieure jouissait d’une protection pour des produits faisant l’objet des services de vente au détail pour lesquels une protection avait été sollicitée au titre de la marque demandée, en relevant que les magasins de meubles vendaient toute sorte de meubles, y compris ceux figurant dans la « spécification » de la marque antérieure. Elle en a conclu à l’existence d’une similitude d’un degré moyen entre les produits et les services concernés.

33      La requérante estime que cette similitude ne peut être qualifiée que d’éloignée, voire qu’elle est inexistante. Indépendamment des différences conceptuelles manifestes qu’elle relève entre les produits et les services concernés, elle soutient que son activité a pour objet la vente de systèmes complets de cuisines, comprenant des meubles de cuisine, des appareils électriques et autres appareils ou modules de cuisine encastrables, et que ce type d’activité est différent de la vente des produits visés par la marque antérieure, qui porte sur des pièces de mobilier vendues séparément.

34      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

35      À titre liminaire, il y a lieu de souligner que la manière dont les produits sont ou peuvent être commercialisés sur le marché n’est pas pertinente pour les besoins de l’appréciation de la similitude entre les produits couverts par la marque antérieure et les services concernés par la marque demandée. Dès lors, sauf en cas de limitation, seule la situation au registre doit être prise en compte [voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2004, M+M/OHMI – Mediametrie (M+M EUROdATA), T‑317/01, EU:T:2004:195, point 58].

36      Il s’ensuit que l’argumentation relative aux prétendues pratiques commerciales de la requérante, qui se limiteraient à la vente de systèmes complets de cuisines, ne saurait être prise en compte, dès lors que la demande d’enregistrement de sa marque ne comporte aucune limitation en ce sens.

37      Ensuite, en vue d’apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

38      La marque demandée désigne des services de vente au détail et en gros de meubles, d’équipements (en anglais, « furnishings »), de cuisines, d’équipements de cuisine, d’articles de décoration intérieure et de textiles ménagers. La marque antérieure couvre les produits spécifiques relevant de la classe 20 visés au point 6 ci-dessus, dont certains peuvent être destinés à être placés dans une cuisine, comme c’est le cas des commodes murales, des stores d’intérieur ou des accessoires pour rideaux, et présentent de ce point de vue un degré de similitude moyen avec les services désignés par la marque demandée. Il en va de même pour les articles de linge de lit couverts par la marque antérieure qui peuvent être considérés étant inclus dans les textiles ménagers.

39      En revanche, compte tenu de leur destination et de l’absence de caractère complémentaire, nonobstant l’existence de canaux de distribution communs, les autres produits couverts par la marque antérieure relevant de la classe 20, tels que les portemanteaux, les lits, les sommiers à ressorts ou les matelas portables, ne présentent qu’une similitude éloignée avec les services visés par la marque demandée.

40      Il s’ensuit que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que les produits et les services concernés présentaient, dans l’ensemble, un degré moyen de similitude, celui-ci variant, en réalité, de faible à moyen.

 Sur la comparaison des signes

41      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir commis des erreurs dans l’interprétation de l’élément verbal « cuisines », ainsi que dans l’appréciation des similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle entre les signes en conflit.

42      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

43      En l’espèce, les marques à comparer se présentent comme suit : 

–        la marque demandée est le signe figuratif suivant :

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–        la marque antérieure correspond au signe figuratif suivant :

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–       Sur les éléments dominants et distinctifs des signes en conflit

44      La chambre de recours a considéré que les éléments verbaux « mm » et « mh » étaient dominants au sein des signes en conflit. Concernant l’élément commun verbal « cuisines », elle a considéré que ce dernier renvoyait à un mode ou un style de cuisine particulier, et non pas à un espace de préparation alimentaire, et revêtait de ce fait un certain caractère distinctif pour les produits et les services concernés. En tout état de cause, même si l’élément « cuisines » était purement descriptif, il ne saurait être négligé dans la comparaison des signes en conflit.

45      La requérante conteste l’appréciation concernant l’élément verbal « cuisines », en avançant que ce dernier est descriptif et peut être ignoré dans la comparaison des signes en conflit.

46      L’EUIPO soutient que la contestation de la requérante repose sur une prémisse erronée et non étayée, le terme « cuisines » n’étant pas descriptif pour l’ensemble du public pertinent. À l’instar des constatations de la division d’opposition relatives aux publics estonien, polonais et bulgare, l’EUIPO fait valoir que l’élément « cuisines » demeure inconnu d’une partie non négligeable du public pertinent.

47      À titre liminaire, il y a lieu de relever que le caractère dominant des éléments verbaux « mm » et « mh » au sein des signes en conflit n’est pas contesté par les parties et doit être confirmé. En effet, si la requérante soutient que les lettres composant le premier élément verbal du signe demandé ne sont pas, les lettres « mh », mais les lettres « ivh », elle ne conteste néanmoins pas que, en tout état de cause, cet élément verbal a un caractère dominant au sein de son signe.

48      Ensuite, en ce qui concerne la qualification de l’élément verbal « cuisines » retenue au point 36 de la décision attaquée, il y a lieu de constater que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en excluant que cet élément puisse revêtir une signification descriptive dans l’esprit du public anglophone. Il ressort en effet de la définition même du terme anglais « cuisine » citée audit point de la décision attaquée (en anglais « culinary department or establishment ; manner or style of cooking ; kitchen arrangements »), que sa signification ne se limite pas à celle retenue par la chambre de recours, en ce que le terme en cause ne désigne pas exclusivement un style particulier de cuisine (en anglais « manner or style of cooking »), mais également un espace physique de préparation alimentaire (en anglais « culinary department or establishment ») et les modalités de son agencement (en anglais « kitchen arrangements »).

49      Quant à la circonstance que le terme « cuisines » serait totalement inconnu d’une partie non négligeable du public pertinent non anglophone, comme le soutient l’EUIPO dans son mémoire en défense, en se référant aux appréciations de la division d’opposition relatives aux publics bulgare, estonien et polonais, il y a lieu de relever qu’elle ne ressort d’aucune manière de la décision attaquée et demeure non étayée. Même à la supposer établie, cette circonstance ne serait ainsi pas de nature à se substituer à l’appréciation erronée de la chambre de recours déniant tout caractère descriptif de l’élément verbal « cuisines » dans l’esprit du public anglophone.

50      Il s’ensuit que l’élément verbal « cuisines » n’est pas dépourvu de caractère descriptif pour les produits et les services concernés.

51      À cet égard, conformément à une jurisprudence constante, lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif des produits et des services pour lesquels la marque est protégée ou des produits et des services désignés par la demande d’enregistrement, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible, voire très faible. Cela ne signifie toutefois pas que les éléments descriptifs d’une marque sont nécessairement négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [voir arrêt du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 49 et jurisprudence citée].

52      Si l’élément verbal « cuisines » est perçu comme étant descriptif du type de produits et de services en cause par le consommateur moyen, il conserve, en tout état de cause, un caractère autonome par rapport à l’élément « mm » de la marque antérieure ou à l’élément « mh » de la marque demandée, ainsi qu’un caractère distinctif résiduel, résultant de son association avec ledit élément « mm » ou « mh », de sa position, ainsi que de sa taille.

53      Il s’ensuit que, en dépit de son faible caractère distinctif à l’égard du public anglophone, l’élément verbal « cuisines » ne saurait être complètement négligé dans la comparaison des signes en conflit, comme le soutient à juste titre l’EUIPO.

–       Sur la comparaison visuelle des signes en conflit

54      La chambre de recours a considéré que le signe demandé serait perçu comme étant composé des éléments verbaux « mh » et « cuisines », conformément à la description de la marque contenue dans la demande d’enregistrement présenté à l’EUIPO. Elle en a déduit que les signes en conflit possédaient la même structure, à savoir une combinaison de deux lettres, commençant par la lettre « m », et l’élément « cuisines » situé en dessous. Bien que les signes différaient par la combinaison de couleurs, ainsi que par la seconde lettre de la combinaison de lettres et par les polices de caractères utilisées, ces différences n’étaient pas suffisantes pour créer une impression visuelle différente, les éléments communs l’emportant en l’espèce sur les différences. En conclusion, la chambre de recours a estimé que les signes en conflit présentaient sur le plan visuel un degré de similitude au moins moyen.

55      À titre principal, la requérante soutient que le signe demandé correspond dans son aspect visuel à la séquence de lettres « ivh », créant une impression différente de la séquence de lettres « mm » présente au sein du signe antérieur. Selon elle, il n’existe donc aucune similitude visuelle entre les signes en conflit.

56      À titre subsidiaire, à supposer que le premier élément verbal du signe demandé serait interprété comme étant composé des lettres « mh », la requérante fait valoir que les signes en conflit ne présenteraient qu’une faible similitude en raison de nombreuses différences qu’elle relève sur le plan visuel.

57      L’EUIPO souligne le caractère contradictoire des prises de position de la requérante relatives à la composition verbale du signe demandé, tout en confirmant les appréciations de la chambre de recours relatives à la structure visuelle similaire des signes en conflit.

58      En premier lieu, il importe de rappeler que la possibilité pour un demandeur de marque de l’Union européenne d’adjoindre à sa demande une description de sa marque donne une information sur la perception, par le demandeur de marque, de celle-ci, mais nullement sur sa perception par le public pertinent. Or, le risque de confusion entre des marques doit s’apprécier par rapport à la perception desdites marques par le public pertinent [voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2011, Ford Motor/OHMI – Alkar Automotive (CA), T‑486/07, non publié, EU:T:2011:104, points 58 et 59]. Il s’ensuit que la description de la marque figurant dans la demande d’enregistrement dont se prévaut l’EUIPO est sans incidence sur la perception visuelle du signe demandé..

59      En outre, il y a lieu de rappeler que le public visé perçoit la marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, à moins qu’il n’identifie en son sein des éléments verbaux qui lui suggèrent une signification concrète ou ressemblent à des mots qu’il connaît [ voir, par analogie, arrêts du 18 juillet 2013, Specsavers International Healthcare e.a., C‑252/12, EU:C:2013:497, point 35, et du 28 novembre 2019, Runnebaum Invest/EUIPO – Berg Toys Beheer (Bergsteiger), T‑736/18, non publié, EU:T:2019:826, point 111 ].

60      À la lumière de la jurisprudence rappelée au point 59 ci-dessus, il y a lieu de rejeter l’interprétation selon laquelle l’élément verbal du signe demandé serait composé de la séquence de lettres « ivh », qui ne repose sur aucune clé de lecture cohérente des éléments visuels du signe demandé.

61      En effet, si les incisions noires visibles en son sein devaient servir de marqueur de séparation entre les lettres « v » et « h », une telle séparation serait pourtant absente entre les lettres « i » et « v », ce qui rendrait difficile l’identification claire du groupe de lettres « ivh ». Par ailleurs, l’incision figurant dans le corps de la lettre « h » empêcherait d’interpréter la fonction de cet élément graphique comme marqueur de séparation entre les lettres composant le signe.

62      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a fondé son appréciation sur une impression globale et immédiate du signe demandé, pour en déduire que ce dernier serait interprété par le public pertinent comme étant composé des éléments « mh » et « cuisines ».

63      En second lieu, en ce qui concerne les éléments de la comparaison visuelle entre les signes en conflit, il y a lieu de relever que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en sous-estimant les dissemblances notables tenant, d’une part, à la différence visuelle entre les séquences des lettres « mm » et « mh », dont la brièveté rend cette différence d’autant plus perceptible [voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2018, Maico Holding/EUIPO – Eico (Eico), T‑668/17, non publié, EU:T:2018:567, point 31 et jurisprudence citée], et d’autre part, à la représentation graphique manifestement différente du signe demandé, à savoir la présence d’un encadré noir ainsi que la stylisation et le contraste fort caractérisant ses éléments graphiques, qui s’éloignent nettement des formes souples et des couleurs nuancées présentes au sein du signe antérieur sur un fond blanc.

64      Les différences visuelles dont se prévaut à cet égard la requérante sont d’autant plus notables qu’elles concernent les éléments dominants des signes en conflit, ce qui n’est pas contesté. Quant à l’élément commun « cuisines », dont la stylisation et les couleurs sont d’ailleurs différentes, il y a lieu de rappeler que, sans qu’il soit complètement négligeable, le caractère distinctif de cet élément demeure limité, comme cela ressort des points 48 à 53 ci-dessus.

65      Il s’ensuit que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que les similitudes graphiques l’emportaient en l’espèce sur les différences.

66      Ainsi, au regard des différences relevées entre les signes en conflit et du faible caractère distinctif de l’élément commun « cuisines », la similitude visuelle entre les signes en conflit revêt tout au plus un faible degré, comme le soutient à juste titre la requérante.

–       Sur la comparaison phonétique des signes en conflit

67      À titre principal, la requérante soutient que le signe demandé comporte une séquence des lettres « ivh ». À titre subsidiaire, elle fait valoir que les différences phonétiques entre les éléments « mm » et « mh » sont décisives, l’élément commun « cuisines » étant négligeable au regard de son caractère descriptif, de telle sorte que la similitude phonétique entre les signes en conflit ne pourrait qu’être qualifiée de faible.

68      L’EUIPO confirme l’appréciation de la chambre de recours relative à l’existence d’une similitude phonétique d’un degré supérieur à la moyenne.

69      En premier lieu, comme cela ressort des points 60 à 62  ci-dessus, le signe demandé doit être compris comme comportant le groupe de lettres « mh » et non pas le groupe de lettres « ivh ». Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours s’est fondée dans son analyse sur une comparaison phonétique des éléments verbaux « mh cuisines » et « mm cuisines ».

70      En second lieu, il est certes vrai que, pris dans leur ensemble, les signes en conflit comptent tous les deux un groupe de deux lettres et trois syllabes et ne diffèrent que par une seule lettre du groupe de deux lettres, l’élément « cuisines » n’étant pas négligeable. Il n’en reste pas moins que les différences évidentes de prononciation entre les lettres « m » et « h », invoquées par la requérante, doivent également être prises en compte, dès lors qu’elles portent sur les éléments dominants des signes en conflit.

71      Par conséquent, il y a lieu de conclure que les signes en conflit présentent, sur le plan phonétique, une similitude d’un degré moyen et non pas d’un degré supérieur à la moyenne comme l’avait conclu la chambre de recours.

–       Sur la comparaison conceptuelle des signes en conflit

72      En raison de la présence de l’élément commun « cuisines », la chambre de recours a considéré que les signes en conflit revêtiraient dans l’esprit du public anglophone la même signification conceptuelle, d’autant que les séquences des lettres « mh » et « mm » étaient dépourvues de toute signification spécifique. Par conséquent, elle a estimé que les signes en conflit présentaient un degré de similitude conceptuelle au moins supérieur à la moyenne, voire qu’ils étaient identiques.

73      La requérante conteste la décision attaquée, en soulignant le caractère purement descriptif de l’élément « cuisines », qui serait de ce fait négligeable dans le cadre de la comparaison conceptuelle. En ce qui concerne les éléments verbaux dominants « mm » et « mh », elle fait valoir que la chambre de recours n’a pas suffisamment tenu compte de leur signification. Selon elle, la combinaison de lettres « mm » sera reconnue par le consommateur comme renvoyant à la dénomination « Moura & Moura ». De ce fait, les signes en conflit ne pourront pas être confondus.

74      L’EUIPO rejette l’interprétation descriptive du terme « cuisines », en confirmant les appréciations contenues dans la décision attaquée.

75      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’une similitude conceptuelle découle du fait que deux marques utilisent des images qui concordent dans leur contenu sémantique, en ce sens que ces images véhiculent la même idée ou le même concept [arrêt du 8 novembre 2017, Oakley/EUIPO – Xuebo Ye (Représentation d’une ellipse discontinue), T‑754/16, non publié, EU:T:2017:786, point 62]. Inversement, lorsqu’aucun des signes en cause n’a de signification pris dans son ensemble, il doit être constaté que la comparaison sur le plan conceptuel n’est pas possible [voir, en ce sens, arrêts du 21 septembre 2017, Novartis/EUIPO – Meda (Zymara), T‑214/15, non publié, EU:T:2017:637, point 149, et du 5 octobre 2017, Forest Pharma/EUIPO – Ipsen Pharma (COLINEB), T‑36/17, non publié, EU:T:2017:690, point 96].

76      À cet égard, en ce qui concerne les affirmations de la requérante relatives à la signification probable que l’élément verbal « mm » de la marque antérieure revêtirait aux yeux du public pertinent, il y lieu de relever qu’elles ne sont supportées par aucun élément de preuve. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que les éléments verbaux « mm » et « mh » ne revêtent aux yeux du public pertinent aucune signification spécifique.

77      Il s’ensuit que, dans l’hypothèse où le public pertinent ne comprendrait pas le terme « cuisines » et ne pourrait lui attribuer aucune signification, la comparaison conceptuelle entre les signes en conflit ne pourrait pas être effectuée, ainsi que la chambre de recours l’a conclu à titre subsidiaire.

78      En ce qui concerne l’hypothèse dans laquelle le public pertinent comprendrait le terme « cuisines », force est de constater que les signes en conflit concordent dans leur contenu sémantique, et ce indépendamment de son caractère descriptif ou distinctif. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a pu conclure, dans une telle hypothèse, à l’existence d’une similitude conceptuelle d’un degré supérieur à la moyenne.

 Sur le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure

79      La chambre de recours a considéré que la marque antérieure possédait, dans l’ensemble, un caractère distinctif intrinsèque normal, indépendamment du caractère distinctif ou descriptif de l’élément verbal « cuisines ».

80      La requérante affirme que le caractère distinctif intrinsèque moyen de la séquence de lettres « mm » se trouve en l’espèce affaibli par l’existence d’entreprises concurrentes possédant des dénominations semblables à celle de l’entreprise titulaire de la marque antérieure. Il s’ensuit que le caractère distinctif de cette marque aurait dû être qualifié d’inférieur à la moyenne.

81      L’EUIPO excipe de l’irrecevabilité des éléments de preuve présentés devant le Tribunal par la requérante.

82      À cet égard, il y a lieu de constater que la requérante n’a pas démontré ses allégations, étant donné qu’elle n’avait apporté aucune preuve devant la chambre de recours et que la preuve qu’elle a présentée devant le Tribunal dans l’annexe A.9 à la requête est irrecevable (voir point 17  ci-dessus).

83      Les allégations de la requérante n’ayant pas été étayées, il convient d’entériner la conclusion de la chambre de recours tenant au caractère distinctif normal de la marque antérieure, fondée sur le caractère distinctif intrinsèque normal de la séquence de lettres « mm », ce dernier ayant été reconnu par la requérante.

 Sur le risque de confusion 

84      La chambre de recours a considéré que les produits et les services concernés présentaient un degré moyen de similitude, tandis que les signes en conflit se caractérisaient par un degré moyen de similitude visuelle, une similitude phonétique supérieure à la moyenne, et une similitude conceptuelle au moins supérieure à la moyenne. Selon elle, la marque antérieure possédait un caractère distinctif normal. Alors même que le consommateur pertinent ferait preuve, à l’égard de certains produits et services concernés, d’un niveau d’attention supérieur à la moyenne, il en résulterait un risque de confusion entre les marques en conflit.

85      La requérante conteste les éléments de l’appréciation ayant conduit la chambre de recours à cette conclusion, en déniant tout risque de confusion entre les marques en conflit. En ce qui concerne l’appréciation globale de ce risque, elle fait valoir, en particulier, que les éléments de similitude résultant de la présence de l’élément verbal « cuisines » demeurent négligeables en raison de son caractère descriptif. Par ailleurs, la comparaison sur le plan phonétique revêt à ses yeux une importance moindre par rapport à la dissemblance visuelle entre les signes en conflit.

86      L’EUIPO confirme les appréciations contenues dans la décision attaquée.

87      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, et notamment la similitude des marques et celle des produits ou des services visés (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, points 17 à 19). Il est également de jurisprudence constante que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il en a gardée en mémoire [voir arrêt du 19 octobre 2017, Aldi/EUIPO – Sky (SKYLITe), T‑736/15, non publié, EU:T:2017:729, point 119 et jurisprudence citée].

88      Par ailleurs, lorsque les éléments de similitude existant entre deux signes tiennent au fait qu’ils partagent un composant présentant un faible caractère distinctif intrinsèque, l’impact de tels éléments de similitude sur l’appréciation globale du risque de confusion est lui-même faible [voir, en ce sens, arrêt 20 janvier 2021, Foundation for the Protection of the Traditional Cheese of Cyprus named Halloumi/EUIPO – M. J. Dairies (BBQLOUMI), T‑328/17 RENV, non publié, EU:T:2021:16, point 64 et jurisprudence citée]. Lorsque la marque antérieure et le signe dont l’enregistrement est demandé coïncident dans un élément de caractère faiblement distinctif au regard des produits en cause, l’appréciation globale du risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, n’aboutit fréquemment pas au constat de l’existence de ce risque [voir arrêt du 18 janvier 2023, YAplus DBA Yoga Alliance/EUIPO – Vidyanand (YOGA ALLIANCE INDIA INTERNATIONAL), T‑443/21, non publié, EU:T:2023:7, point 121 et jurisprudence citée].

89      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’existence en l’espèce d’un risque de confusion.

90      Premièrement, comme cela ressort des points 48 à 53  ci-dessus, c’est à tort que la chambre de recours a dénié tout caractère descriptif à l’élément verbal « cuisines », ce qui l’a empêchée d’apprécier dans toute leur ampleur les différences entre les éléments dominants « mm » et « mh » des signes en conflit.

91      Deuxièmement, comme cela ressort des points 54 à 71  ci-dessus, il y a lieu de relever les erreurs qui entachent l’appréciation des similitudes visuelles et phonétiques retenue par la chambre de recours. Contrairement aux constatations contenues dans la décision attaquée, les signes en conflit ne présentent en l’espèce qu’une faible similitude sur le plan visuel et une similitude moyenne sur le plan phonétique, les ressemblances en cause étant d’ailleurs dues, en partie, à la présence commune de l’élément faiblement distinctif « cuisines ».

92      Troisièmement, et ainsi que l’indique la requérante, en faisant valoir que l’achat d’articles d’ameublement ne s’effectue d’habitude pas sur un simple ouï-dire, le degré de similitude phonétique entre deux marques est d’une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés d’une telle manière que, habituellement, le public pertinent, lors de l’achat, perçoit la marque qui les désigne de façon visuelle [arrêts du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, EU:T:2003:264, point 55, et du 21 février 2013, Esge/OHMI – De’Longhi Benelux (KMIX), T‑444/10, non publié, EU:T:2013:89, point 37].

93      Quatrièmement, il y a lieu de constater que la similitude conceptuelle relevée au point 78 ci-dessus repose sur la seule présence de l’élément verbal « cuisines », les séquences des lettres « mm » et « mh » étant dépourvues de toute signification conceptuelle.

94      Or, comme indiqué au point 88 ci-dessus, lorsque les éléments de similitude existant entre deux signes tiennent au fait que, comme en l’espèce, ils partagent un composant présentant un faible caractère distinctif intrinsèque, l’impact de tels éléments de similitude sur l’appréciation globale du risque de confusion est lui-même faible.

95      Tel est le cas, en l’espèce, de l’élément de similitude faiblement distinctif et non dominant « cuisines », dont la présence commune au sein des deux signes n’est pas décisive et ne revêt qu’une faible incidence sur l’appréciation du risque de confusion.

96      De plus, selon la jurisprudence, s’agissant d’une marque présentant un caractère distinctif faible, ayant ainsi une capacité réduite à identifier comme provenant d’une entreprise donnée les produits ou services pour lesquels elle avait été enregistrée, le degré de similitude entre les signes aurait dû être élevé pour justifier d’un risque de confusion, sauf à risquer de conférer à celle-ci et à son titulaire une protection excessive [voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, Eugène Perma France/EUIPO – SPI Investments Group (NATURANOVE), T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 56].

97      Or, en l’espèce, il résulte de ce qui précède que le degré de similitude entre les signes n’est globalement pas élevé.

98      Cinquièmement, comme indiqué au point 40 ci-dessus, c’est à tort que la chambre de recours a considéré que les produits et les services concernés se caractérisent, dans l’ensemble, par une similitude d’un degré moyen, ce degré de similitude variant, en réalité, de faible à moyen.

99      Au vu de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de conclure, au titre de l’appréciation globale du risque de confusion, que, eu égard à la faible similitude visuelle et à la similitude phonétique moyenne, à la faible incidence de la similitude conceptuelle, au caractère distinctif normal de la marque antérieure et au niveau d’attention du public pertinent variant de moyen à élevé ainsi qu’au degré de similitude variant de faible à moyen des produits et services en cause, aucun risque de confusion ne saurait exister pour l’ensemble des services visés par la marque demandée. Partant, le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement 2017/1001 et, par voie de conséquence, le recours doivent être accueillis.

 Sur les dépens

100    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

101    Aux termes de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO.

102    L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, y compris ceux exposés devant la chambre de recours, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 24 novembre 2022 (affaire R 1078/20221) est annulée.

2)      L’EUIPO est condamné aux dépens.

Costeira

Kancheva

Öberg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 avril 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand