Language of document : ECLI:EU:T:2021:431

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

14 juillet 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale NOVA – Marque nationale non enregistrée antérieure NOVA – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 4, et article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) no 207/2009 [devenus, respectivement, article 8, paragraphe 4, et article 60, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001] – Renvoi au droit national régissant la marque antérieure – Motif absolu de refus – Absence de mauvaise foi – Article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑75/20,

Abitron Germany GmbH, établie à Langquaid (Allemagne), représentée par Mes T. Dolde et K. Lüder, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Hanf, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Hetronic International, Inc., établie à Oklahoma City, Oklahoma (États-Unis), représentée par Me A. Wehlau, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 10 décembre 2019 (affaire R 521/2019-4), relative à une procédure de nullité entre Abitron Germany et Hetronic International,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins (rapporteur), président, Z. Csehi et Mme G. Steinfatt, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 février 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 11 mai 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 24 avril 2020,

vu la lettre par laquelle la requérante a renoncé à sa demande d’être entendue lors d’une audience de plaidoiries et, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Heckl Electronics, établie en Allemagne, a été fondée en 1982. Son objet social était la conception, la fabrication et la distribution de systèmes de télécommande radio et de dispositifs d’utilisation desdits systèmes destinés aux engins de construction, aux machines industrielles, aux grues et aux engins de levage. En 1990, cette société est devenue Hetronic Steuersysteme GmbH.

2        Au fil des ans, un groupe d’entreprises (ci-après le « groupe Hetronic ») a été créé, détenu par Hetronic Holding LLC, une société établie au titre du droit de l’État de l’Oklahoma (États-Unis). Hetronic Steuersysteme faisait partie de ce groupe d’entreprises.

3        Les produits du groupe Hetronic étaient commercialisés sous la marque verbale HETRONIC, enregistrée, notamment, en Chine, aux États-Unis, au Japon, à Malte, en Allemagne et dans l’Union européenne. Au cours des années 1990, Hetronic Steuersysteme a mis sur le marché une ligne particulière de télécommandes radio pour grues. Les produits de cette ligne comptaient parmi les mieux vendus par le groupe Hetronic au niveau mondial. Ils étaient commercialisés en utilisant le signe NOVA et la marque HETRONIC.

4        En 2000, le fondateur de l’entreprise a décidé de délocaliser le siège mondial du groupe Hetronic de l’Allemagne vers les États-Unis. Dans ce contexte a été fondée Hetronic International, Inc (ci-après l’« ancienne Hetronic International »).

5        Le 13 août 2007, Hetronic Steuersysteme a été renommée Hetronic Deutschland GmbH. Celle-ci a conclu un accord de partenariat en matière de distribution et d’assemblage de produits du groupe Hetronic avec l’ancienne Hetronic International, devenant ainsi distributeur de ces produits en Allemagne.

6        Entre 2006 et 2008, Hetronic Deutschland (ou son prédécesseur en droit, Hetronic Steuersysteme) et l’ancienne Hetronic International ont conclu plusieurs accords de cession des marques verbales HETRONIC, par lesquels ces marques ont été cédées à l’ancienne Hetronic International.

7        Le 30 septembre 2008, à la suite d’un accord d’achat d’actifs et d’actions conclu entre Methode Electronics, Inc., une société de droit de l’État du Delaware (États‑Unis), filiale de Methode H-International, Inc, en tant qu’acheteur, et Hetronic Holding, l’ancienne Hetronic International, Hetronic USA, Inc., Hetronic West GmbH, Hetronic Europe GmbH et Hetronic Malta Ltd ainsi que l’actionnaire majoritaire de Hetronic Holding, en tant que vendeurs, les actifs et actions de ces dernières sociétés, ainsi que ceux de Hetronic Asia Manufacturing & Trading Corp, ont été vendus à Methode Electronics. Toutefois, les actifs de Hetronic Deutschland (auparavant Hetronic Steuersysteme) ont été expressément exclus de cette transaction. Hetronic Deutschland et Methode Electronics ont conclu un accord de partenariat en matière de distribution et d’assemblage et un accord de licence pour l’utilisation de la marque HETRONIC. Par le biais de ces accords, Hetronic Deutschland est devenue distributeur de produits du groupe Hetronic en Allemagne.

8        Methode H-International a changé sa dénomination sociale en Hetronic International, Inc., avec effet au 1er octobre 2008.

9        En 2010, les actifs de Hetronic Deutschland ont été cédés à Hetronic Germany, créée en mars 2010. Cette dernière a conclu, le 2 avril 2010, un accord de licence ainsi qu’un accord de partenariat en matière de distribution et d’assemblage avec l’intervenante, Hetronic International, aux fins de la vente de produits du groupe Hetronic en Allemagne.

10      En juin 2014, l’intervenante a procédé à une résiliation extraordinaire de ces accords en raison de violations de ceux-ci ayant pris la forme d’utilisation de pièces falsifiées pour l’assemblage des télécommandes radio.

11      En août 2014, Hetronic Germany a vendu tous ses actifs à la requérante, Abitron Germany GmbH, fondée en juin 2014.

12      Depuis la résiliation de ces accords, l’intervenante et la requérante, ainsi que Hetronic Germany, sont en litige s’agissant de leur interprétation. En juin 2014, l’intervenante a introduit une demande en référé devant le Landgericht München (tribunal régional de Munich, Allemagne) dans le but d’interdire à Hetronic Germany d’utiliser la marque HETRONIC dans le commerce, ainsi qu’un recours pour contrefaçon et usurpation de présentations commerciales contre cette même société devant la United States District Court for the Western District of Oklahoma (cour de district des États-Unis pour le district ouest d’Oklahoma). Les droits revendiqués par l’intervenante dans ce contexte englobaient les droits sur le signe NOVA.

13      Le 5 février 2015, l’intervenante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

14      La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal NOVA.

15      Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Appareils sans fils télécommandés régissant le fonctionnement de machines, grues, et mécanismes de levage motorisés ».

16      La marque verbale NOVA a été enregistrée le 1er juin 2015 sous le numéro 13711718 pour les produits visés au point 15 ci-dessus.

17      Le 20 juillet 2015, la requérante a présenté une demande en nullité de la marque verbale NOVA, fondée, d’une part, sur l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001] et, d’autre part, sur l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 [devenu article 60, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001], lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001) et l’article 4, point 2, du Gesetz über den Schutz von Marken und sonstigen Kennzeichen (Markengesetz) (loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs), du 25 octobre 1994 (BGBl. 1994 I, p. 3082). Les deux motifs de nullité étaient fondés sur l’existence de la marque allemande non enregistrée antérieure NOVA pour les mêmes produits que ceux visés par la marque contestée.

18      La demande en nullité a été rejetée par une décision de la division d’annulation du 28 février 2019.

19      Le 5 mars 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001. Elle a fondé le recours sur les mêmes motifs de nullité que ceux qu’elle avait déjà évoqués devant la division d’annulation.

20      Par décision du 10 décembre 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours a rejeté le recours.

21      La chambre de recours a observé, à titre liminaire, que la requérante avait invoqué, en ce qui concerne les deux motifs de nullité, des droits sur le signe antérieur NOVA. Elle a considéré, ensuite, que l’article 27, paragraphe 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs était pertinent selon le droit allemand pour le transfert de droits sur le signe antérieur NOVA. Selon cette disposition, un droit fondé sur l’enregistrement, l’usage ou la notoriété de la marque est, en cas de doute, inclus dans le transfert ou la cession de l’entreprise ou de la partie de l’entreprise à laquelle la marque appartient. La question décisive aurait donc été de savoir si l’« entreprise Hetronic » était restée entre les mains du prédécesseur en droit de la requérante. La chambre de recours a décidé qu’il convenait de répondre négativement à cette question (point 24 de la décision attaquée). En outre, elle a considéré qu’il ressortait clairement de l’ensemble des contrats présentés à l’EUIPO que le prédécesseur en droit de la requérante n’avait, déjà en 2008, aucun droit sur la dénomination sociale de l’entreprise d’origine, ni sur les marques allemandes de cette dernière (points 26 à 28 de la décision attaquée). Elle en a conclu que, étant donné qu’une marque d’usage pouvait être cédée accessoirement à une entreprise et non de façon indépendante, ni la requérante ni ses prédécesseurs en droit n’avaient pu acquérir de droits sur le signe NOVA (point 29 de la décision attaquée).

22      S’agissant du motif de nullité visé à l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement, elle a considéré que la requérante n’avait produit aucun document qui ferait apparaître les conditions d’acquisition d’une marque en vertu de l’article 4, point 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs. Comme la requérante n’aurait pas motivé le bien-fondé des droits dont elle aurait disposé en propre sur le signe NOVA, la chambre de recours a rejeté la demande reposant sur ce motif de nullité (points 24 et 30 de la décision attaquée).

23      S’agissant du motif de nullité visé à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, elle a considéré, en substance, qu’il n’y avait pas eu de comportement de mauvaise foi, puisque la requérante ne disposait pas de droits sur le signe NOVA et que le titulaire de la marque contestée n’avait qu’interprété un contrat d’acquisition d’entreprise en sa faveur (points 31 à 34 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

24      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        déclarer nulle la marque contestée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

25      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

26      L’intervenante fait valoir que l’annexe K.15 de la requête doit être déclarée irrecevable dans la mesure où elle a été produite pour la première fois devant le Tribunal.

27      Il convient de rappeler que, puisque le recours porté devant le Tribunal vise le contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des éléments présentés pour la première fois devant lui [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FÉLICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée].

28      Toutefois, l’annexe K.15 ne fait que présenter de manière graphique l’interprétation par la requérante des relations de propriété relatives au signe NOVA. Cette information n’est pas nouvelle. Cette annexe peut dès lors être prise en considération aux fins de l’appréciation par le Tribunal de la validité de la décision attaquée.

29      L’EUIPO excipe de l’irrecevabilité de l’intégralité du premier moyen, fondé sur l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement, en ce que la requérante n’aurait pas prouvé sa qualité de titulaire ou ses droits sur le signe NOVA et n’avait donc pas d’intérêt à agir. Toutefois, dans le cas où l’absence de bien-fondé de ce moyen découlerait de l’absence d’un droit sur le signe NOVA, elle ne le rendrait pas pour autant irrecevable et la fin de non-recevoir opposée en défense à cet égard doit être écartée.

 Sur le fond

30      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 5 février 2015, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40, et arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée). Au demeurant, l’article 53, paragraphe 1, point c), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, et l’article 52, paragraphe 1, sous b), du même règlement n’ont subi aucune modification dans le règlement 2017/1001. Par suite, en l’espèce, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée, ainsi que par les parties dans leurs écritures, aux dispositions du règlement 2017/1001 comme visant les dispositions d’une teneur identique du règlement no 207/2009.

31      La requérante invoque deux moyens à l’appui du recours. Le premier est tiré d’une violation de l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement et l’article 4, point 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs. Elle affirme, en substance, que la chambre de recours a erronément conclu que, depuis 2008, elle ne disposait pas de droits sur le signe NOVA. Le second est tiré d’une violation de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du même règlement. Elle fait valoir que la chambre de recours a erronément conclu que l’intervenante n’était pas de mauvaise foi lorsqu’elle a déposé une demande auprès de l’EUIPO visant à faire enregistrer la marque contestée.

32      À l’appui de ces deux moyens, la requérante évoque une série de griefs concernant l’analyse, par la chambre de recours, des accords soumis en l’espèce et la valeur probante d’un nombre d’éléments de preuve que l’intervenante a présentés à l’appui de ces arguments.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 53, paragraphe 1, sousc),du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement etl’article 4, point 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs

33      La requérante affirme, en substance, que l’intervenante n’a pas démontré sa qualité de titulaire de la marque non enregistrée et que la chambre de recours a erronément considéré que, depuis 2008, elle ne disposait pas elle-même de droits sur le signe NOVA.

34      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

35      En vertu de l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, une marque de l’Union est déclarée nulle, sur demande présentée auprès de l’EUIPO, lorsqu’il existe un droit antérieur visé à l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement et que les conditions énoncées dans ce dernier paragraphe sont remplies. Conformément à ces dispositions, le titulaire d’un signe autre qu’une marque peut demander la nullité d’une marque de l’Union européenne lorsque ce signe remplit cumulativement les quatre conditions suivantes : il doit être utilisé dans la vie des affaires d’une manière suffisamment significative ; il doit avoir une portée qui n’est pas seulement locale ; le droit à ce signe doit avoir été acquis conformément au droit de l’État membre où le signe était utilisé avant la date de dépôt de la demande de marque de l’Union européenne et, enfin, ce signe doit reconnaître à son titulaire la faculté d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente. Ainsi, lorsqu’un signe ne remplit pas l’une de ces conditions, la demande en nullité fondée sur l’existence d’un signe autre qu’une marque utilisée dans la vie des affaires, au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, ne peut aboutir [arrêts du 29 mars 2011, Anheuser-Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, EU:C:2011:189, point 159, et du 24 mars 2009, Moreira da Fonseca/OHMI – General Óptica (GENERAL OPTICA), T‑318/06 à T‑321/06, EU:T:2009:77, points 32 et 47].

36      En ce qui concerne la répartition des rôles entre le demandeur en nullité, les instances compétentes de l’EUIPO et le Tribunal, il incombe au demandeur de fournir des éléments démontrant qu’il est habilité, en vertu de la législation nationale applicable, à savoir, en l’espèce, la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs, à faire valoir un droit antérieur, protégé dans le cadre juridique national. Cette règle fait peser sur le demandeur la charge de présenter à l’EUIPO non seulement les éléments démontrant qu’il remplit les conditions requises, conformément à la législation nationale dont il demande l’application, afin de pouvoir faire interdire l’usage d’une marque de l’Union européenne en vertu d’un droit antérieur, mais aussi les éléments établissant le contenu de cette législation (voir, en ce sens, arrêts du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, points 49 et 50 ; du 27 mars 2014, OHMI/National Lottery Commission, C‑530/12 P, EU:C:2014:186, point 34, et du 5 avril 2017, EUIPO/Szajner, C‑598/14 P, EU:C:2017:265, point 35).

37      La requérante a fondé le présent moyen sur une argumentation selon laquelle, d’une part, la chambre de recours aurait erronément considéré que, depuis 2008, elle ne disposait pas elle‑même de droits sur le signe NOVA et, d’autre part, l’intervenante n’aurait pas démontré sa propre qualité de titulaire de la marque non enregistrée antérieure. Toutefois, elle ne conteste pas la conclusion de la chambre de recours selon laquelle elle ne remplissait pas les conditions de l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement, notamment en ce qu’elle n’avait produit aucun document qui aurait fait apparaître les conditions d’acquisition d’une marque en vertu de l’article 4, point 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs.

38      Même si l’argumentation de la requérante concernant la qualité de titulaire de la marque non enregistrée aboutissait, cela ne suffirait pas pour démontrer que les conditions imposées par les dispositions nationales étaient remplies, notamment que la requérante pouvait interdire l’usage de la marque contestée en vertu des droits qu’elle avait retenus ou acquis sur le signe NOVA conformément à ce qu’exige l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement.

39      Il s’ensuit que les arguments de la requérante évoqués dans le cadre du présent moyen selon lesquels la chambre de recours aurait erronément considéré qu’elle ne disposait pas elle-même de droits sur le signe NOVA et l’intervenante n’aurait pas démontré sa qualité de titulaire de la marque non enregistrée doivent être rejetés comme inopérants.

40      En conséquence, le premier moyen doit être écarté comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 52, paragraphe 1, sousb), du règlement no 207/2009

41      Ce second moyen, par lequel la requérante fait valoir que la chambre de recours a erronément conclu que l’intervenante n’était pas de mauvaise foi lorsqu’elle a déposé la demande d’enregistrement, se divise en deux branches. Dans le cadre de la première branche, la requérante réitère les arguments, évoqués également dans le cadre du premier moyen, selon lesquels l’intervenante n’aurait pas démontré sa qualité de titulaire de la marque non enregistrée antérieure et la chambre de recours aurait erronément considéré que, depuis 2008, elle ne disposait pas elle‑même de droits sur le signe NOVA. Dans le cadre de la seconde branche, elle fait valoir que la mauvaise foi de l’intervenante est établie en l’espèce, même si elle-même ne disposait pas de droits précédents sur le signe NOVA.

 Sur la première branche du second moyen

42      En premier lieu, la requérante évoque les arguments suivants à l’appui du grief selon lequel la chambre de recours aurait erronément conclu qu’elle ne disposait pas de droits sur le signe NOVA. Elle fait valoir, tout d’abord, que l’intervenante n’a présenté aucun document qui démontrerait un transfert de droits liés à la marque non enregistrée antérieure à son bénéfice. Notamment, l’intervenante n’aurait pas démontré que, dans le cadre de la délocalisation vers les États-Unis, les droits sur le signe NOVA auraient été transférés de Hetronic Steuersysteme à l’ancienne Hetronic International. Or, un accord de recherche et de développement du 18 juillet 2000 entre, d’une part, Hetronic Steuersysteme, Hetronic Malta et Hetronic USA, en tant que développeurs, et, d’autre part, l’ancienne Hetronic International, en tant que contracteur, prouverait le contraire. En outre, la déclaration sous serment présentée par l’intervenante afin de démontrer le transfert de droits sur la marque non enregistrée antérieure à l’ancienne Hetronic International serait dépourvue de valeur probante, puisqu’elle aurait été établie par son président et n’aurait pas été accompagnée de preuves complémentaires. Puisque la marque non enregistrée antérieure n’aurait pas été transférée à l’ancienne Hetronic International, l’intervenante n’aurait pas pu prouver que ladite marque avait été transférée par cette dernière à Methode Electronics en 2008.

43      La requérante affirme, en outre, que les droits sur la marque non enregistrée antérieure ont été gardés par Hetronic Deutschland, puisque les actifs de cette dernière étaient expressément exclus de l’accord d’achat conclu avec Methode Electronics en 2008. Ensuite, les actifs de Hetronic Deutschland, y compris la marque non enregistrée antérieure, auraient été transférés à Hetronic Germany. À cet égard, la requérante remet en cause la valeur probante de la lettre d’information du 26 avril 2010 adressée aux employés de Hetronic Germany, portant sur la cession des contrats de travail en raison de la cession d’entreprise, présentée par l’intervenante en tant qu’élément de preuve dont il ressortirait que son prédécesseur en droit détenait tous les droits sur les produits et pièces de rechange du groupe Hetronic et avait octroyé des licences à Hetronic Germany. L’auteur de la lettre n’aurait pas participé personnellement aux négociations, aux discussions ou à la conclusion des accords avec Methode Electronics et la lettre ne ferait pas mention du signe NOVA.

44      En outre, la requérante fait valoir qu’elle et ses prédécesseurs en droit étaient distributeurs exclusifs des produits commercialisés sous la marque HETRONIC en Allemagne. Logiquement, la marque non enregistrée antérieure serait restée entre ses mains. Cela expliquerait pourquoi les accords de licence et de partenariat en matière de distribution et d’assemblage ne portaient expressément que sur la marque HETRONIC et ne faisaient pas mention de la marque non enregistrée antérieure.

45      En second lieu, la requérante fait valoir que, pour établir la mauvaise foi, la question clé n’est pas celle de déterminer si l’intervenante savait que la requérante avait obtenu des droits sur le signe NOVA en vertu de l’article 4, point 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs. Selon la requérante, l’élément décisif serait que l’intervenante savait, lors de la demande d’enregistrement de la marque contestée, qu’elle avait bénéficié, pendant plusieurs décennies, de l’usage exclusif du signe NOVA en Allemagne. À la lumière de ce qui précède et étant donné que l’intervenante aurait prétexté, de manière manifestement fausse, qu’elle n’avait découvert l’usage du signe NOVA par la requérante que « récemment », il serait démontré que l’intervenante ne souhaitait pas utiliser la marque contestée dans les affaires, mais compromettre les activités de la requérante. La mauvaise foi de l’intervenante serait donc établie.

46      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

47      Aux termes de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, la nullité de la marque de l’Union est déclarée, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande de marque. Il découle de cet article que le moment pertinent aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi du demandeur est celui du dépôt, par l’intéressé, de la demande d’enregistrement (arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 35).

48      En outre, la Cour a jugé que, aux fins d’apprécier l’existence de la mauvaise foi, il convient de prendre en considération l’intention du demandeur au moment du dépôt de la demande d’enregistrement, élément subjectif qui doit être déterminé par référence aux circonstances objectives du cas d’espèce (arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, points 41 et 42).

49      Il ressort de la jurisprudence que, conformément à son sens habituel dans le langage courant, la notion de « mauvaise foi » suppose la présence d’un état d’esprit ou d’une intention malhonnête et doit en outre être comprise dans le contexte du droit des marques, qui est celui de la vie des affaires. À cet égard, le règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), le règlement nos 207/2009 et le règlement 2017/1001, adoptés successivement, s’inscrivent dans un même objectif, à savoir l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur. Les règles sur la marque de l’Union européenne visent, en particulier, à contribuer au système de concurrence non faussée dans l’Union, dans lequel chaque entreprise doit, afin de s’attacher la clientèle par la qualité de ses produits ou de ses services, être en mesure de faire enregistrer en tant que marques des signes permettant au consommateur de distinguer sans confusion possible ces produits ou ces services de ceux qui ont une autre provenance (voir arrêts du 12 septembre 2019, Koton Mağazacilik Tekstil Sanayi ve Ticaret/EUIPO, C‑104/18 P, EU:C:2019:724, point 45 et jurisprudence citée, et du 29 janvier 2020, Sky e.a., C‑371/18, EU:C:2020:45, point 74).

50      Par conséquent, la cause de nullité absolue visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 s’applique lorsqu’il ressort d’indices pertinents et concordants que le titulaire d’une marque de l’Union européenne a introduit la demande d’enregistrement de cette marque non pas dans le but de participer de manière loyale au jeu de la concurrence, mais avec l’intention de porter atteinte, d’une manière non conforme aux usages honnêtes, aux intérêts de tiers, ou avec l’intention d’obtenir, sans même viser un tiers en particulier, un droit exclusif à des fins autres que celles relevant des fonctions d’une marque, notamment de la fonction essentielle d’indication d’origine rappelée au point 49 ci-dessus [arrêts du 12 septembre 2019, Koton Mağazacilik Tekstil Sanayi ve Ticaret/EUIPO, C‑104/18 P, EU:C:2019:724, point 46, et du 29 janvier 2020, Sky e.a., C‑371/18, EU:C:2020:45, point 75 ; voir également, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2020, Target Ventures Group/EUIPO – Target Partners (TARGET VENTURES), T‑273/19, EU:T:2020:510, point 27].

51      C’est au demandeur en nullité qu’il incombe d’établir les circonstances qui permettent de conclure qu’une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union a été déposée de mauvaise foi, la bonne foi du déposant étant présumée jusqu’à preuve du contraire [voir arrêt du 23 mai 2019, Holzer y Cia/EUIPO – Annco (ANN TAYLOR et AT ANN TAYLOR) T‑3/18 et T‑4/18, EU:T:2019:357, point 34 et jurisprudence citée].

52      C’est notamment à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner les griefs de la requérante évoqués dans le cadre du présent moyen.

–       Sur la détermination du moment pertinent aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi, sur la comparaison des signes et produits en cause et sur la connaissance de l’intervenante quant à l’existence et à l’utilisation du signe NOVA par la requérante

53      Il est constant que l’existence de la mauvaise foi alléguée de l’intervenante devait être démontrée lors du dépôt de la demande d’enregistrement du signe NOVA en tant que marque de l’Union européenne, soit le 5 février 2015. Il n’est pas davantage contesté que le signe NOVA et les produits visés par celui-ci sont identiques à l’élément constitutif de la marque contestée et aux produits visés par cette dernière. Enfin, l’intervenante ne conteste pas qu’elle avait, avant le dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, connaissance de l’utilisation du signe NOVA par la requérante, bien qu’elle conteste le fait que cette utilisation ait été exclusive. Toutefois, cette circonstance ne suffit pas, à elle seule, pour que soit établie l’existence de la mauvaise foi du demandeur (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 40).

54      Par ailleurs, le grief tiré de ce que la chambre de recours aurait erronément considéré que la question clé était celle de déterminer si l’intervenante savait que la requérante avait obtenu des droits sur le signe NOVA en vertu de l’article 4, point 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs repose sur une lecture erronée de la décision attaquée. En effet, la chambre de recours ne s’est pas fondée sur une telle considération, mais a observé, aux points 29 et 33 de cette décision, que, d’une part, la requérante ne disposait pas de droits sur le signe NOVA et, d’autre part, la question de savoir si un signe avait acquis une renommée publique au sens de cette disposition n’était pas pertinente en l’espèce.

–       Sur l’intention de l’intervenante

55      Selon la jurisprudence citée au point 53 ci-dessus, il convient de prendre en considération, de manière objective, l’intention du demandeur de la marque contestée. L’analyse de la chambre de recours de la question portant sur la qualité de titulaire des droits sur le signe NOVA s’inscrit dans ce cadre.

56      En l’espèce, la requérante affirme que, pendant la période précédant l’accord d’achat du 30 septembre 2008, les droits sur le signe NOVA sont restés entre les mains de son prédécesseur en droit, Hetronic Steuersysteme, tandis que l’intervenante affirme qu’ils ont été transférés à l’ancienne Hetronic International dans le cadre de la délocalisation du groupe Hetronic vers les États-Unis. Il n’est pas contesté qu’aucun des accords présentés à titre de preuve ne fait expressément mention du signe NOVA.

57      L’intervenante a présenté plusieurs témoignages sous serment à l’appui de son affirmation. La requérante remet en cause la valeur probante de l’un d’entre eux en ce qu’il a été établi par le président de l’intervenante. Dès lors que la décision attaquée n’est pas fondée sur la déclaration sous serment du président de l’intervenante, ce grief ne peut qu’être écarté comme inopérant.

58      En premier lieu, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la réponse à la question de savoir quels étaient les droits de propriété intellectuelle supposés demeurer auprès du prédécesseur en droit de la requérante ne ressort pas de l’accord de recherche et de développement du 18 juillet 2000 et il n’est pas possible d’en déduire que cette dernière disposait, à cette époque ou postérieurement, de droits sur le signe NOVA. En outre, l’accord d’achat du 30 septembre 2008 stipulait que les actifs cédés par cet accord comprenaient tous les droits de propriété intellectuelle, y compris tous les droits de propriété sur les télécommandes radio développées, produites et vendues par les vendeurs. Bien que Hetronic Deutschland et les actifs et biens détenus par celle-ci étaient exclus de l’achat, ainsi que stipulé à sa page 2, paragraphe 4, selon le même contrat, l’acheteur acquérait tous les actifs nécessaires à la bonne marche de l’entreprise telle qu’elle était exploitée le 1er janvier 2007. De plus, contrairement à ce qu’affirme la requérante, il ressort des accords successifs de partenariat que la requérante et ses prédécesseurs en droit étaient distributeurs non exclusifs des produits du groupe Hetronic en Allemagne, en ce que l’intervenante s’était réservé le droit d’exclure certains clients du territoire couvert par l’accord.

59      En deuxième lieu, l’intervenante affirme, ainsi que la division d’annulation l’a constaté, sans que cela soit contesté par la requérante devant la chambre de recours, que le signe NOVA était toujours utilisé à proximité de la marque HETRONIC et en association avec celle-ci. La requérante ne conteste pas davantage que les produits portant la marque HETRONIC et le signe NOVA ont été vendus à l’échelle mondiale par des sociétés du groupe Hetronic.

60      En troisième lieu, en ce qui concerne la lettre d’information du 26 avril 2010 adressée aux employés de Hetronic Germany, portant sur la cession des contrats de travail en raison de la cession d’entreprise, la chambre de recours s’est appuyée sur cet élément de preuve au point 28 de la décision attaquée. Selon cette lettre, « Methode H-International […] détient tous les droits sur les produits et pièces détachées Hetronic et est le donneur de licence de Hetronic Germany […] ». Or, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la valeur probante de cette lettre est élevée, étant donné qu’il s’agit d’un document contemporain provenant du prédécesseur en droit de la requérante, qui n’a pas été rédigé aux fins du présent recours ou dans le cadre du litige entre la requérante et l’intervenante.

61      Il s’ensuit que, comme l’a constaté la chambre de recours au point 33 de la décision attaquée, le fait que l’intervenante ait interprété les contrats en sa faveur ne constitue pas un comportement de mauvaise foi. Dans ces circonstances, et à la lumière de l’observation de la division d’annulation, non contestée par la requérante, selon laquelle l’intervenante utilisait le signe NOVA pour la commercialisation des produits en cause lors du dépôt de la demande d’enregistrement, le fait d’étendre la protection d’un signe en le faisant enregistrer en tant que marque de l’Union européenne relève d’une stratégie commerciale normale de cette dernière entreprise.

62      Enfin, la requérante accuse l’intervenante d’être malhonnête en ce que cette dernière a observé, dans une lettre qu’elle lui a adressée, qu’elle n’avait découvert son usage de la marque non enregistrée que récemment. Il convient de constater qu’une telle observation, même si elle était fallacieuse, en ce que l’intervenante avait connaissance de l’utilisation du signe NOVA depuis longtemps, ne peut, en soi, démontrer que l’intervenante a cherché à entraver indûment, en violation de la cause de nullité absolue visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, les activités commerciales de la requérante et établir ainsi sa mauvaise foi.

63      Il ressort de tout ce qui précède que, dans la mesure où la charge de la preuve de la mauvaise foi pèse sur la requérante et où l’existence de la mauvaise foi doit être établie sur la base d’éléments objectifs, la requérante n’a pas apporté d’éléments démontrant que la conduite de l’intervenante était constitutive d’un acte de mauvaise foi au moment de la demande d’enregistrement ou dont il pouvait être déduit de manière objective un tel constat.

64      Partant, la première branche du second moyen doit être écartée comme non fondée.

 Sur la seconde branche du second moyen

65      Dans le cadre de la seconde branche du second moyen, la requérante affirme que la mauvaise foi peut être établie même s’il n’existe pas de droits antérieurs. Ce serait le cas, notamment, si une entité commerciale a obtenu un certain degré de protection juridique en raison de l’usage d’un signe et qu’un concurrent fait ensuite enregistrer le signe dans l’intention de livrer une concurrence déloyale à son utilisateur initial. En outre, elle fait valoir que la mauvaise foi peut être établie lorsque les parties concernées entretiennent ou ont entretenu une relation précontractuelle, contractuelle ou post-contractuelle dont découlent des devoirs réciproques et une obligation de comportement loyal en ce qui concerne les intérêts et les attentes légitimes.

66      La requérante fait valoir que, en l’espèce, la mauvaise foi de l’intervenante ressort des éléments suivants. Premièrement, l’intervenante savait que le signe NOVA avait été utilisé par elle en Allemagne pendant des décennies et qu’il revêtait une importance économique fondamentale pour elle. Deuxièmement, l’intervenante aurait prétexté, de manière manifestement fausse, qu’elle n’avait découvert l’usage du signe NOVA par la requérante que « récemment », ce qui démontrerait que l’intervenante aurait cherché à entraver ses activités commerciales. Troisièmement, étant donné que l’intervenante ne pouvait pas interpréter les contrats existants en sa faveur et eu égard à des relations d’affaires longues de plusieurs décennies, cette dernière n’aurait pas pu équitablement déposer une demande de marque de l’Union européenne pour un signe développé par la requérante ou ses prédécesseurs en droit sans en informer préalablement la requérante et lui laisser un délai suffisant pour prendre des mesures. Il s’ensuit, selon la requérante, qu’il est manifeste que l’enregistrement de la marque contestée a été effectué dans l’unique but de la gêner et de parvenir à l’évincer du marché.

67      L’EUIPO excipe de l’irrecevabilité de la présente branche du second moyen. Il affirme que la requérante fait valoir, pour la première fois devant le Tribunal, que l’existence d’un droit antérieur n’est pas nécessaire pour qu’existe une demande effectuée de mauvaise foi. En l’espèce, la mauvaise foi de l’intervenante existerait pour d’autres motifs qui soit n’avaient pas du tout été avancés par la requérante au cours de la procédure administrative, soit l’avaient été à titre purement accessoire et de manière non spécifique.

68      L’intervenante conteste l’argumentation de la requérante.

69      Tout d’abord, contrairement à ce qu’affirme l’EUIPO, les arguments figurant dans cette branche du second moyen ont été évoqués, ne fût-ce que brièvement, devant la chambre de recours. Ils sont donc recevables.

70      Ensuite, la requérante affirme, à juste titre, qu’elle pourrait établir la mauvaise foi de l’intervenante même si elle ne disposait pas de droits sur le signe NOVA, puisque l’action fondée sur l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 est une action en nullité absolue, visant à protéger l’intérêt général, pouvant être invoquée par toute personne physique ou morale et pas uniquement par les titulaires de droits antérieurs (voir, en ce sens, arrêt du 23 mai 2019, ANN TAYLOR et AT ANN TAYLOR, T‑3/18 et T‑4/18, EU:T:2019:357, points 55 et 56).

71      Dans la mesure où la requérante réitère, en partie, les arguments qu’elle a déjà soulevés dans le cadre de la première branche du présent moyen, il convient de les rejeter pour les motifs exposés aux points 62et 63 ci-dessus.

72      En outre, la requérante n’a pas expliqué quel aspect de sa relation précontractuelle, contractuelle ou post-contractuelle avec l’intervenante aurait donné lieu à des devoirs réciproques et une obligation de comportement loyal de la part de l’intervenante, de sorte que cette dernière aurait été de mauvaise foi au moment de sa demande d’enregistrement de la marque contestée. Il s’ensuit que, n’ayant pas été étayé, ce grief doit être écarté comme non fondé. Il en va de même en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel la prétendue existence d’une relation contractuelle de longue durée aurait donné lieu à de tels devoirs et obligations.

73      Enfin, la requérante reproche à l’intervenante de ne pas l’avoir informée, au préalable, du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée. L’intervenante l’aurait donc privée d’un droit sans l’en avertir et aurait ainsi été de mauvaise foi. À cet égard, il convient de constater que, si l’intervenante ne conteste pas cette absence de préavis, elle ne permet toutefois pas d’établir sa mauvaise foi. En l’espèce, les accords de licence et de partenariat en matière de distribution et d’assemblage ayant été résiliés et l’interprétation de ces accords ayant été, depuis 2014, l’objet d’un litige devant le Landgericht München (tribunal régional de Munich) et la United States District Court for the Western District of Oklahoma (cour de district des États-Unis pour le district ouest d’Oklahoma), la requérante avait été déjà suffisamment informée, bien avant la demande d’enregistrement de la marque contestée, que l’intervenante contestait son utilisation de ce signe et que cette dernière cherchait à protéger ses intérêts par des moyens légaux disponibles. Il s’ensuit que la demande d’enregistrement ne saurait être considérée comme un acte caché visant à empêcher la requérante de faire usage de ce signe [voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2015, Pangyrus/OHMI – RSVP Design (COLOURBLIND), T‑257/11, non publié, EU:T:2015:115, point 140].

74      Il s’ensuit que la seconde branche du second moyen doit être rejetée.

75      En conséquence, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

76      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Abitron Germany GmbH est condamnée aux dépens.

Collins

Csehi

Steinfatt

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.