Language of document : ECLI:EU:T:2012:623

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

26 novembre 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Déchéance des marques nationales antérieures – Non-lieu à statuer »

Dans l’affaire T‑548/11,

MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co. KG, établie à Düsseldorf (Allemagne), représentée par Mes J.-C. Plate et R. Kaase, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Real Seguros, SA, établie à Porto (Portugal),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 17 août 2011 (affaire R 114/2011‑4), relative à une procédure d’opposition entre Real Seguros, SA et MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co. KG,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 octobre 2011,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 2 février 2012,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige, procédure et conclusions des parties

1        En application des dispositions de l’article 144 du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1) [devenu article 149 du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)], la requérante, MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co. KG, a présenté, le 4 décembre 2008, par l’intermédiaire de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), une demande en extension territoriale de la protection conférée au signe figuratif reproduit ci-après bénéficiant de l’enregistrement international W983683 (ci-après la « marque en cause ») :

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2        Les services désignés par la marque en cause relevaient, en particulier, de la classe 36 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient à la description suivante : « Souscription d’assurance ; assurances incendie ; évaluations financières (assurances), souscription d’assurances santé ; souscription d’assurances-vie ; assurances maritimes ; assurances accidents ; assurances ; conseils en assurances, souscription d’assurance ».

3        La demande en extension territoriale a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 49/2008, du 9 décembre 2008.

4        Le 9 septembre 2009, Real Seguros, SA a formé opposition au titre de l’article 41 et de l’article 156, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, à l’extension territoriale de la marque en cause pour les services visés au point 2 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée, en premier lieu, sur la marque portugaise verbale REAL, enregistrée sous le numéro 249791, en deuxième lieu, sur la marque portugaise verbale REAL SEGUROS, enregistrée sous le numéro 249793, en troisième lieu, sur une marque portugaise figurative, enregistrée sous le numéro 254390, et, en quatrième lieu, sur divers droits non enregistrés, correspondant aux signes verbaux REAL SEGUROS, SA et REAL, ainsi qu’à deux signes figuratifs comprenant, l’un, le terme « real », l’autre, la suite de mots « real seguros ».

6        Les marques mentionnées au point précédent (ci-après les « marques nationales antérieures ») désignaient des services compris dans la classe 36 et correspondant à la description suivante : « Assurances et affaires financières ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés, d’une part, à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009, s’agissant des marques nationales antérieures et, d’autre part, à l’article 8, paragraphe 4, du même règlement, s’agissant des droits non enregistrés susévoqués.

8        Par décision du 16 novembre 2010, la division d’opposition a estimé qu’il existait un risque de confusion entre la marque en cause et la marque portugaise verbale REAL. Par conséquent, elle a accueilli l’opposition, sans se prononcer sur le risque de confusion susceptible d’exister entre, d’une part, la marque en cause et, d’autre part, les autres marques nationales antérieures ainsi que les droits non enregistrés dont se prévalait Real Seguros.

9        Le 11 janvier 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 17 août 2011 (ci‑après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours formé par la requérante. Elle a considéré qu’il existait un risque de confusion entre la marque en cause et la marque portugaise verbale REAL et qu’il n’était, dès lors, pas nécessaire d’examiner « les autres droits antérieurs et motifs de l’opposition ».

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 octobre 2011, la requérante a introduit le présent recours. Elle y a conclu à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens, y compris ceux exposés au cours de la procédure menée devant la chambre de recours.

12      Par ailleurs, dans la requête, la requérante a demandé au Tribunal de suspendre la présente procédure au titre de l’article 77, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, étant donné que « des demandes de déchéance [des marques nationales antérieures] ont été déposées auprès de l’Office portugais des marques le 17 octobre 2011 ».

13      Par acte enregistré au greffe du Tribunal le 9 décembre 2011, l’OHMI a présenté ses observations sur la demande de suspension de la procédure. Il a indiqué qu’il convenait, selon lui, de la rejeter.

14      Par ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 1er février 2012, la procédure devant le Tribunal a été suspendue jusqu’à la fin de la procédure devant l’autorité portugaise compétente, à savoir l’Instituto Nacional da Propriedade Industrial (Institut national de la propriété industrielle, ci-après l’« INPI »), et, au plus tard, jusqu’au 30 septembre 2012.

15      Le 2 février 2012, l’OHMI a déposé au greffe du Tribunal un mémoire en réponse. Il y a conclu à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

16      Par acte enregistré au greffe du Tribunal le 24 août 2012, la requérante a transmis au Tribunal copie de trois décisions de l’INPI, datées du 30 décembre 2011, qui, selon elle, constataient qu’il n’avait pas été fait usage des marques nationales antérieures et prononçaient, en conséquence, leur déchéance. Elle a, par ailleurs, communiqué au Tribunal copie de trois certificats indiquant, selon elle, que ces décisions étaient devenues définitives. Enfin, elle a fait valoir que lesdites décisions rendaient le recours sans objet, de sorte qu’il n’y avait plus lieu d’y statuer.

17      Le 12 septembre 2012, les autres parties à la présente instance ont été invitées par le Tribunal à présenter leurs observations sur un éventuel non-lieu à statuer.

18      Par acte enregistré au greffe du Tribunal le 14 septembre 2012, l’OHMI a indiqué qu’il estimait qu’il y avait lieu de statuer sur le présent recours. Real Seguros n’a, quant à elle, pas présenté d’observation sur cette demande de non-lieu à statuer.

 En droit

19      En vertu de l’article 113 du règlement de procédure, le Tribunal peut à tout moment, d’office, les parties entendues, constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer. Sauf décision contraire du Tribunal, la suite de la procédure est orale.

20      Les parties ayant été entendues, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour statuer sur le présent recours par voie d’ordonnance motivée.

21      La requérante a indiqué au Tribunal, d’une part, que, par décision de l’INPI datée du 30 décembre 2011, l’INPI avait constaté la déchéance de la marque portugaise verbale REAL et, d’autre part, que cette décision était, à ce jour, devenue définitive. L’OHMI n’a pas contesté l’exactitude de ces indications.

22      Dans ces conditions, le Tribunal constate que le présent recours est devenu sans objet à la suite de la déchéance de la marque portugaise verbale REAL, celle-ci constituant, en effet, le seul fondement de la décision d’opposition et de la décision attaquée [voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 27 février 2012, MIP Metro/OHMI – Jacinto (My Little Bear), T‑183/11, non publiée au Recueil, point 5 ; voir, en ce sens et par analogie, ordonnances du Tribunal du 11 septembre 2007, Lancôme/OHMI – Baudon (AROMACOSMETIQUE), T‑185/04, non publiée au Recueil, point 21, et du 26 juin 2008, Pfizer/OHMI – Isdin (FOTOPROTECTOR ISDIN), T‑354/07 à T‑356/07, non publiée au Recueil, points 5 et 6]. Il n’y a donc plus lieu de statuer sur le présent recours.

23      Le Tribunal constate à cet égard que la décision de la division d’opposition n’a pas pris effet. Il y a lieu de relever en effet que, en vertu de l’article 58, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009, un recours formé auprès de l’OHMI a un effet suspensif. Dès lors, une décision susceptible de faire l’objet d’un tel recours, comme celle d’une division d’opposition, ne prend effet que si aucun recours n’a été formé auprès de l’OHMI dans les formes et délais prescrits à l’article 60 du règlement n° 207/2009 ou si un tel recours a été rejeté par une décision définitive de la chambre de recours. Or, en l’espèce, aucune de ces hypothèses ne se présente, étant donné que la décision attaquée n’a pas non plus pris effet. À cet égard, il ressort de l’article 64, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 que les décisions des chambres de recours ne prennent effet qu’à compter de l’expiration du délai visé à l’article 65, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 ou, lorsqu’un recours devant le juge de l’Union a été introduit dans ce délai, à compter du rejet de celui‑ci. Or, en l’espèce, aucune de ces deux hypothèses ne se présente étant donné que le Tribunal a constaté le non‑lieu à statuer sur le présent recours (voir ordonnance AROMACOSMETIQUE, point 22 supra, point 22, et la jurisprudence citée).

24      Au demeurant, aucun argument soulevé par l’OHMI, ni aucun élément du dossier soumis au Tribunal, n’est de nature à remettre en cause la solution dégagée au point 22 ci-dessus.

25      En effet, en premier lieu, dans son mémoire du 14 septembre 2012, l’OHMI a, en particulier, fait remarquer, sans pour autant préciser les conclusions qu’il convenait d’en tirer, que la décision de l’INPI constatant la déchéance de la marque portugaise verbale REAL, que la requérante a transmise au Tribunal le 24 août 2012, était rédigée en portugais et n’avait pas été traduite dans la langue de procédure.

26      Toutefois, s’il est vrai que cette décision n’a fait l’objet, de la part de la requérante, d’aucune traduction, alors même que l’article 35, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure prévoit que « [t]oute pièce et tout document produits ou annexés et rédigés dans une langue autre que la langue de procédure sont accompagnés d’une traduction dans la langue de procédure », force est de constater que l’OHMI n’a remis en cause ni le sens ni la portée que la requérante avait conférés à ladite décision de l’INPI (voir point 21 ci‑dessus).

27      En deuxième lieu, l’OHMI fait valoir, sans qu’aucun élément du dossier ne le contredise, que la décision de l’INPI constatant la déchéance de la marque portugaise verbale REAL n’a pu avoir qu’un effet ex nunc, et non ex tunc. Or, cette décision a, selon lui, été prononcée postérieurement à la décision attaquée. Par conséquent, ne déployant pas d’effet dans le passé, elle ne pourrait pas en affecter la légalité. Dans ces conditions, le recours conserverait son objet. Tel ne serait pas le cas, en revanche, si la marque dont il s’agit avait été déclarée nulle. En effet, une telle déclaration présente un effet ex tunc. Elle serait ainsi susceptible d’affecter la légalité de la décision attaquée, bien que celle‑ci lui soit antérieure.

28      À cet égard, il est certes, parfaitement exact que le juge de l’Union ne peut annuler ou réformer une décision d’une chambre de recours pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement au prononcé de celle‑ci (ordonnance de la Cour du 30 juin 2010, Royal Appliance International/OHMI et Bosch und Siemens Hausgeräte, C‑448/09 P, non publiée au Recueil, point 44). Toutefois, précisément, par la présente ordonnance, le Tribunal ne procède pas à un contrôle de la légalité de la décision attaquée, mais se contente de constater que l’objet du litige a disparu.

29      Il convient, en outre, de relever que l’OHMI se prévaut, dans le cadre de l’argumentation rappelée au point 27 ci-dessus, de l’arrêt du Tribunal du 4 novembre 2008, Group Lottuss/OHMI – Ugly (COYOTE UGLY) (T‑161/07, non publié au Recueil, points 49 et 50). Dans cet arrêt, le Tribunal a statué au fond sur un recours dirigé contre une décision d’une chambre de recours, alors même qu’avait été prononcée en cours d’instance la déchéance de la marque sur laquelle reposait l’opposition. Toutefois, force est de constater que cet arrêt traitait d’un cas distinct de la présente espèce. Tout d’abord, il ressort du point 50 dudit arrêt que la décision constatant la déchéance de la marque antérieure n’était pas définitive. Ainsi, au regard de la jurisprudence citée au point 22 ci-dessus, il y avait toujours lieu de statuer sur le recours. Ensuite, dans l’affaire dont il s’agit, la requérante n’avait pas même demandé au Tribunal de prononcer un non-lieu à statuer en conséquence de la déchéance de la marque antérieure, de sorte que le Tribunal n’était pas tenu de rejeter explicitement une telle demande. Or, au cas présent, il est au contraire constant que la décision de l’INPI datée du 30 décembre 2011 et constatant la déchéance de la marque portugaise verbale REAL a obtenu un caractère définitif, si bien que le Tribunal ne peut que faire droit à la demande de la requérante tendant à ce qu’un non-lieu à statuer soit constaté (voir point 22 ci-dessus).

30      En troisième lieu, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il a été relevé au point 16 ci‑dessus, la requérante a produit deux autres décisions de l’INPI, datées, elles aussi, du 30 décembre 2011, et a fait valoir que, par ces décisions, lesquelles seraient également devenues définitives, l’INPI avait constaté la déchéance des autres marques nationales antérieures invoquées par Real Seguros à l’appui de son opposition. Ces considérations sont toutefois dépourvues d’influence sur la solution du présent litige, dès lors que la décision attaquée n’a trait qu’au risque de confusion susceptible d’exister entre la marque en cause et la marque portugaise verbale REAL. À la suite de la déchéance de cette dernière marque, il appartient à l’OHMI d’examiner si, et dans quelle mesure, l’opposition peut être utilement fondée sur les autres marques antérieures et les droits non enregistrés dont s’était initialement prévalu Real Seguros.

 Sur les dépens

31      En vertu de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens. Aux termes de l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure : « Les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours […] sont considérés comme dépens récupérables. »

32      En demandant au Tribunal de condamner l’OHMI aux dépens exposés devant la chambre de recours, la requérante a, implicitement mais nécessairement, requis du Tribunal qu’il se prononce sur le bien-fondé de l’article 2 de la décision attaquée, lequel prévoit que la requérante est condamnée « à supporter les frais de la procédure de recours ». Toutefois, ainsi qu’il a été dit au point 22 ci-dessus, il n’y a plus lieu d’examiner le bien-fondé de la décision attaquée. Par voie de conséquence, il n’y a également plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à ce que l’OHMI soit condamné aux dépens exposés devant la chambre de recours.

33      Pour le reste, dans les circonstances de l’espèce, et en application de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, il y a lieu d’ordonner que chaque partie supporte ses propres dépens exposés devant le Tribunal.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Il n’y a plus lieu de statuer sur le recours.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens exposés devant le Tribunal.

Fait à Luxembourg, le 26 novembre 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       O. Czúcz


* Langue de procédure : l’anglais.