Language of document : ECLI:EU:T:2015:648

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

18 septembre 2015 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Avis du service juridique du Conseil sur des propositions de directive et de règlement du Parlement européen et du Conseil relatives aux sanctions pénales applicables aux opérations d’initiés et aux manipulations de marché – Refus partiel d’accès – Exception relative à la protection des avis juridiques – Exception relative à la protection du processus décisionnel »

Dans l’affaire T‑395/13,

Samuli Miettinen, demeurant à Espoo (Finlande), représenté par Mes O. Brouwer et E. Raedts, avocats,

partie requérante,

soutenu par

Royaume de Suède, représenté initialement par Mmes A. Falk, C. Meyer-Seitz, U. Persson, MM. E. Karlsson, L. Swedenborg et C. Hagerman, puis par Mmes Falk, Meyer-Seitz, Persson, N. Otte Widgren, K. Sparrman, MM. Karlsson, Swedenborg et F. Sjövall, en qualité d’agents,

et par

République d’Estonie, représentée par Mme N. Grünberg, en qualité d’agent,

parties intervenantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté initialement par Mmes K. Pellinghelli, P. Plaza García et K. Toomus, puis par Mmes Plaza García, A. Jensen et M. M. Bauer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision du Conseil du 13 mai 2013 refusant l’accès intégral au document n° 12979/12, du 27 juillet 2012, contenant l’avis du service juridique du Conseil concernant des propositions de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux sanctions pénales applicables aux opérations d’initiés et aux manipulations de marché, de règlement sur les opérations d’initiés et les manipulations de marché et d’autres instruments concernant l’harmonisation des sanctions administratives dans le cadre des services financiers,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur) et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. L. Grzegorczyk, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 octobre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par lettre du 18 février 2013, le requérant, M. Samuli Miettinen, a demandé au Conseil de l’Union européenne, en application du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), à avoir accès à l’intégralité du document n° 12979/12, du 27 juillet 2012, contenant l’avis du service juridique du Conseil (ci-après le « document demandé »), concernant des propositions de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux sanctions pénales applicables aux opérations d’initiés et aux manipulations de marché, de règlement sur les opérations d’initiés et les manipulations de marché (ci-après les « propositions en cause ») et d’autres instruments concernant l’harmonisation des sanctions administratives dans le secteur des services financiers.

2        Par courrier électronique du 3 avril 2013, le Conseil a refusé d’accorder au requérant l’accès à l’intégralité du document demandé (à l’exception de son point 1), sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001, relatif à la protection des avis juridiques et de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du même règlement, relatif à la protection du processus décisionnel en cours du Conseil.

3        Par courrier électronique du 3 avril 2013, le requérant a adressé au Conseil une demande confirmative, conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001.

4        Par décision du 13 mai 2013 (ci-après la « décision attaquée »), le Conseil a indiqué que le document demandé était un avis de son service juridique contenant un examen juridique du caractère approprié de la base juridique envisagée pour la proposition de directive (article 83, paragraphe 2, TFUE) et vérifiant si les propositions en cause respectaient le principe ne bis in idem. Le Conseil a confirmé son refus d’accorder au requérant l’accès à l’intégralité du document demandé, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001 et de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du même règlement.

5        Le Conseil a cependant accordé au requérant l’accès aux points 4 et 5 du document demandé, au motif qu’ils portaient uniquement sur la description d’éléments des propositions en cause et qu’ils ne contenaient pas d’avis juridique, ni d’éléments justifiant l’application de l’exception relative à la protection du processus décisionnel.

6        Par lettre du 16 juillet 2013, le requérant a informé le Conseil que le document demandé avait été publié dans deux États membres et lui a demandé, pour cette raison, de revenir sur sa décision.

7        Par lettre du 23 juillet 2013, le Conseil a, d’une part, indiqué que la publication du document demandé dont le requérant l’a informé dans sa lettre du 16 juillet 2013 n’était pas conforme aux dispositions pertinentes des articles 7 et 8 du règlement n° 1049/2001 et de l’annexe II de la décision 2009/937/UE du Conseil, du 1er décembre 2009, portant adoption de son règlement intérieur (JO L 325, p. 35). D’autre part, il a souligné que les motifs qu’il avait invoqués dans la décision attaquée pour refuser l’accès à l’intégralité du document demandé étaient toujours valables.

 Procédure

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 31 juillet 2013, le requérant a introduit le présent recours.

9        Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement, les 28 octobre et 8 novembre 2013, le Royaume de Suède et la République d’Estonie ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions du requérant. Par ordonnance du 21 janvier 2014, le président de la septième chambre du Tribunal a admis ces interventions. Le Royaume de Suède et la République d’Estonie ont déposé leurs mémoires en intervention le 7 avril 2014 et les parties ont déposé leurs observations sur ceux-ci dans le délai imparti.

10      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (septième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure au titre de l’article 64 de son règlement de procédure du 2 mai 1991, a posé des questions aux parties. Le requérant, le Conseil et le Royaume de Suède ont répondu dans le délai imparti.

11      Par ordonnance du 22 septembre 2014, le Tribunal a ordonné au Conseil de produire une copie du document demandé, au titre de l’article 67, paragraphe 3, troisième alinéa, du règlement de procédure du 2 mai 1991, et a indiqué que ce document ne serait pas communiqué au requérant et aux parties intervenantes. Le Conseil a déféré à cette ordonnance dans le délai imparti.

12      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 22 octobre 2014.

 Conclusions des parties

13      Le requérant, soutenu par le Royaume de Suède et par la République d’Estonie, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, ainsi que la lettre du Conseil du 23 juillet 2013 ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

14      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        retirer du dossier les points 46, 70 et 84 à 87 de la requête ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

15      Au soutien de sa demande en annulation, le requérant soulève quatre moyens, tirés, premièrement, de la violation de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001, deuxièmement, de la violation de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001, troisièmement, du défaut d’application du critère de l’intérêt public supérieur contenu dans l’article 4, paragraphes 2 et 3, du même règlement et, quatrièmement, de la violation de l’obligation de motivation.

 Observations liminaires

16      Il y a lieu de rappeler que le règlement n° 1049/2001 vise, comme l’indiquent son considérant 4 et son article 1er, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions de l’Union européenne qui soit le plus large possible (voir arrêt du 17 octobre 2013, Conseil/Access Info Europe, C‑280/11 P, Rec, EU:C:2013:671, point 28 et jurisprudence citée ; arrêt du 3 juillet 2014, Conseil/in ‘t Veld, C‑350/12 P, Rec, EU:C:2014:2039, point 46).

17      Certes, ce droit n’en est pas moins soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. Plus spécifiquement, et en conformité avec son considérant 11, ledit règlement prévoit, à son article 4, un régime d’exceptions autorisant les institutions à refuser l’accès à un document dans le cas où la divulgation de ce dernier porterait atteinte à l’un des intérêts protégés par cet article. Néanmoins, dès lors que de telles exceptions dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (voir arrêt Conseil/Access Info Europe, point 16 supra, EU:C:2013:671, points 29 et 30 et jurisprudence citée ; arrêt Conseil/in ‘t Veld, point 16 supra, EU:C:2014:2039, points 47 et 48).

18      Cependant, la seule circonstance qu’un document concerne un intérêt protégé par une exception au droit d’accès prévue à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 ne saurait suffire à justifier l’application de cette dernière (arrêt Conseil/in ‘t Veld, point 16 supra, EU:C:2014:2039, point 51).

19      En effet, d’une part, lorsque l’institution concernée décide de refuser l’accès à un document dont la communication lui a été demandée, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant aux questions de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 que cette institution invoque. En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir arrêt Conseil/Access Info Europe, point 16 supra, EU:C:2013:671, point 31 et jurisprudence citée ; arrêt Conseil/in ‘t Veld, point 16 supra, EU:C:2014:2039, point 52).

20      D’autre part, lorsqu’une institution applique l’une des exceptions prévue à l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1049/2001, il lui incombe de mettre en balance l’intérêt spécifique devant être protégé par la non-divulgation du document concerné et, notamment, l’intérêt général à ce que ce document soit rendu accessible, eu égard aux avantages découlant, ainsi que le relève le considérant 2 du règlement n° 1049/2001, d’une transparence accrue, à savoir une meilleure participation des citoyens au processus décisionnel ainsi qu’une plus grande légitimité, efficacité et responsabilité de l’administration à l’égard des citoyens dans un système démocratique (arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, Rec, EU:C:2008:374, point 45 ; Conseil/Access Info Europe, point 16 supra, EU:C:2013:671, point 32, et Conseil/in ‘t Veld, point 16 supra, EU:C:2014:2039, point 53).

21      Par ailleurs, la Cour a également jugé que ces considérations étaient, à l’évidence, d’une pertinence toute particulière lorsque le Conseil agissait en sa qualité de législateur, ainsi qu’il résulte du considérant 6 du règlement n° 1049/2001, selon lequel un accès plus large aux documents doit être autorisé précisément dans un tel cas. La transparence contribue à renforcer la démocratie en permettant aux citoyens de contrôler l’ensemble des informations qui ont constitué le fondement d’un acte législatif. En effet, la possibilité, pour les citoyens, de connaître les fondements des actions législatives est une condition de l’exercice effectif, par ces derniers, de leurs droits démocratiques (arrêts Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, point 46, et Conseil/Access Info Europe, point 16 supra, EU:C:2013:671, point 33).

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001

22      Le requérant, soutenu par le Royaume de Suède et par la République d’Estonie, fait valoir que le Conseil n’a pas démontré qu’il existait un risque réel, raisonnablement prévisible et non purement hypothétique, que la divulgation de l’intégralité du document demandé porterait atteinte à la protection des avis juridiques au sens de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001. Le Conseil se serait fondé sur des présomptions générales.

23      Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001, les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection des avis juridiques, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation dudit document.

24      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, s’agissant de l’exception afférente aux avis juridiques prévue à l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001, l’examen à effectuer par le Conseil lorsque la divulgation d’un document lui est demandée doit nécessairement se dérouler en trois temps, correspondant aux trois critères figurant à cette disposition (arrêts Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, point 37, et Conseil/in ‘t Veld, point 16 supra, EU:C:2014:2039, point 95).

25      Ainsi, le Conseil, dans un premier temps, doit s’assurer que le document dont la divulgation est demandée concerne bien un avis juridique. Dans un deuxième temps, il doit examiner si la divulgation des parties du document en question identifiées comme concernant des avis juridiques porterait atteinte à la protection dont doivent bénéficier ces derniers, dans le sens qu’elle porterait préjudice à l’intérêt d’une institution à demander des avis juridiques et à recevoir des avis francs, objectifs et complets. Le risque d’atteinte à cet intérêt doit, pour pouvoir être invoqué, être raisonnablement prévisible, et non purement hypothétique. Dans un troisième et dernier temps, si le Conseil considère que la divulgation d’un document porterait atteinte à la protection due aux avis juridiques telle qu’elle vient d’être définie, il lui incombe de vérifier qu’il n’existe pas un intérêt public supérieur justifiant cette divulgation, nonobstant l’atteinte qui en résulterait à son aptitude à demander des avis juridiques et à recevoir des avis francs, objectifs et complets (voir, en ce sens, arrêts Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, points 38 à 44, et Conseil/in ‘t Veld, point 16 supra, EU:C:2014:2039, point 96).

26      La Cour a également jugé que, dans la mesure où la divulgation des avis du service juridique du Conseil émis dans le cadre de procédures législatives serait susceptible de porter atteinte à l’intérêt à la protection de l’indépendance du service juridique du Conseil, ce risque devrait être pondéré par les intérêts publics supérieurs qui sous-tendent le règlement n° 1049/2001. Constitue un tel intérêt public supérieur le fait que la divulgation des documents contenant l’avis du service juridique d’une institution sur des questions juridiques surgissant lors du débat sur des initiatives législatives est de nature à augmenter la transparence et l’ouverture du processus législatif et à renforcer le droit démocratique des citoyens européens de contrôler les informations qui ont constitué le fondement d’un acte législatif, tel que visé, en particulier, aux considérants 2 et 6 dudit règlement. Il ressort des considérations susvisées que le règlement n° 1049/2001 impose, en principe, une obligation de divulguer les avis du service juridique du Conseil relatifs à un processus législatif (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, points 67 et 68).

27      Ce constat ne fait néanmoins pas obstacle à ce que la divulgation d’un avis juridique spécifique, rendu dans le contexte d’un processus législatif, mais ayant un caractère particulièrement sensible ou une portée particulièrement large allant au-delà du cadre du processus législatif en cause, puisse être refusée au titre de la protection des avis juridiques. Dans un tel cas, il incomberait à l’institution concernée de motiver le refus de façon circonstanciée (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, point 69).

28      En l’espèce, il est constant que le document demandé est un avis du service juridique du Conseil rendu dans le cadre d’un processus législatif.

29      S’agissant de l’exception relative à la protection des avis juridiques prévue à l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001, le Conseil a indiqué, dans la décision attaquée, que le document demandé « concerna[i]t un sujet nouveau intéressant un vaste éventail de dossiers actuels et futurs » et qu’il « se rapport[ait] à des choix politiques visant à garantir des sanctions pénales applicables aux opérations d’initiés et aux manipulations de marché et en matière d’harmonisation des sanctions administratives dans le cadre des services financiers, faisant ainsi courir un risque réel et concret de recours ultérieurs dans le cadre desquels ces choix et orientations seraient examinés à la loupe ». Il a ajouté que, « [s]’il venait à être publié, [le document demandé] pourrait être invoqué dans le cadre de procédures juridictionnelles à venir » et que « [d]ans une telle hypothèse, la publication du document demandé [était] susceptible de nuire à la capacité du Conseil de défendre sa position devant une juridiction, ce qui porterait atteinte au principe d’égalité des armes et rendrait impossible tout examen juridictionnel impartial des mesures en cause ».

30      En outre, le Conseil a indiqué que la divulgation du document demandé « poserait également un risque particulier que les États membres et le Conseil soient dissuadés de demander, à l’avenir, des avis juridiques relatifs à des questions d’un caractère aussi sensible » et « pourrait avoir une incidence sur l’intérêt des institutions à recevoir des avis juridiques francs, objectifs et complets dans des situations similaires à l’avenir ». Prenant en compte l’arrêt Suède et Turco/Conseil, point 20 supra (EU:C:2008:374), le Conseil a conclu que le document demandé « d[eva]it être préservé d’une divulgation au public, compte tenu aussi bien de sa nature particulièrement sensible que de sa large portée ». Le Conseil a ajouté, concernant l’existence d’un intérêt public supérieur, que la nécessité de protéger les avis juridiques, compte tenu de leur caractère sensible et litigieux, l’emportait sur l’ensemble des facteurs qui étaient susceptibles de plaider en faveur de la divulgation de l’intégralité du document demandé.

 Sur le risque d’atteinte à la capacité du Conseil de défendre sa position lors de procédures juridictionnelles

31      S’agissant de l’existence d’un risque d’atteinte à la capacité du Conseil de défendre sa position lors de procédures juridictionnelles, il convient de relever que, ainsi que la Cour l’a indiqué à maintes reprises, un argument d’ordre aussi général ne peut justifier une exception à la transparence prévue par le règlement n° 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêts Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, point 65 ; du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, Rec, EU:C:2011:496, point 116, et du 4 mai 2012, In ‘t Veld/Conseil, T‑529/09, Rec, EU:T:2012:215, point 78).

32      En outre, il ressort de la décision attaquée, mentionnée au point 29 ci-dessus, que le Conseil s’est contenté d’indiquer que la divulgation du document demandé présentait un risque d’atteinte à la capacité de défendre sa position, lors de procédures juridictionnelles, parce qu’il concernait un sujet nouveau, intéressant un vaste éventail de dossiers actuels et futurs et qu’il se rapportait à des choix politiques visant à garantir des sanctions applicables aux délits financiers. Le Conseil s’est limité à mentionner de manière générale d’hypothétiques recours juridictionnels et n’a pas justifié l’existence de ce risque par des éléments concrets expliquant en quoi la divulgation du document demandé pourrait nuire à sa capacité de se défendre.

33      Il y a donc lieu de rejeter l’argument avancé par le Conseil dans le mémoire en défense selon lequel le renvoi au contenu et à la nature de l’avis juridique, c’est-à-dire à la nouveauté et au caractère controversé des questions juridiques, ainsi que le fait qu’elles concernent un sujet faisant traditionnellement l’objet de procédures judiciaires suffisaient pour démontrer qu’il existait un risque raisonnablement prévisible que les questions abordées dans le document demandé fassent l’objet de procédures judiciaires.

34      Partant, les affirmations générales contenues dans la décision attaquée ne sauraient être considérées comme une argumentation circonstanciée permettant d’établir l’existence d’un risque non purement hypothétique d’atteinte à la capacité du Conseil de se défendre lors de procédures juridictionnelles.

 Sur le risque d’atteinte à la protection de l’indépendance du service juridique du Conseil

35      S’agissant de l’existence d’un risque que le Conseil et les États membres soient dissuadés de demander des avis juridiques à l’avenir et de l’incidence que pourrait avoir la divulgation du document demandé sur l’intérêt des institutions à recevoir des avis juridiques, francs, objectifs et complets dans des situations similaires à l’avenir, il y a lieu de relever que, selon la jurisprudence, la crainte que l’indépendance du service juridique du Conseil soit remise en cause par une possible divulgation des avis juridiques émis par ce dernier dans le cadre de procédures législatives est au cœur même des intérêts protégés par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001. En effet, cette exception vise précisément à protéger l’intérêt d’une institution à demander des avis juridiques et à recevoir des avis francs, objectifs et complets (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, point 62).

36       Cependant, il y a lieu de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence citée aux points 24 à 27 ci-dessus que, dans la mesure où la divulgation des avis du service juridique du Conseil émis dans le cadre de procédures législatives serait susceptible de porter atteinte à l’intérêt à la protection de l’indépendance du service juridique du Conseil, ce risque doit être pondéré par l’intérêt public supérieur consistant dans le renforcement de la transparence du processus législatif et du droit démocratique des citoyens. En application de cette jurisprudence, le Conseil a l’obligation de divulguer les avis de son service juridique relatifs à un processus législatif, sauf s’il démontre de façon circonstanciée que l’avis juridique demandé a un caractère particulièrement sensible ou une portée particulièrement large allant au-delà du cadre du processus législatif en cause.

37      À cet égard, le requérant, soutenu par le Royaume de Suède et par la République d’Estonie, fait valoir que le Conseil n’a pas établi de manière circonstanciée que le document demandé était particulièrement sensible ou d’une portée particulièrement large. Quant au caractère sensible du document demandé, dans la décision attaquée, le Conseil se serait contenté d’indiquer le sujet du dossier sur lequel portait l’avis juridique en cause. Or, la nouveauté et le caractère litigieux du dossier seraient des éléments qui plaideraient en faveur de la divulgation du document demandé. Quant à la large portée du document demandé, le fait que l’avis juridique examine la base juridique des propositions en cause au regard du principe non bis in idem ne justifierait pas l’affirmation du Conseil selon laquelle cet avis a une portée particulièrement large qui va au-delà de la procédure législative en cause, dans la mesure où un examen de ce principe serait lié à la légitimité de la procédure législative. De même, l’affirmation que le document demandé a de l’importance pour un « large éventail de dossiers actuels et à venir » ne constituerait pas une motivation circonstanciée.

38      Il y a lieu de rappeler que le document demandé est un avis du service juridique du Conseil qui contient un examen du caractère approprié de la base juridique envisagée pour la proposition de directive (article 83, paragraphe 2, TFUE) et qui vérifie si les propositions en cause respectent le principe non bis in idem.

–       Sur le caractère particulièrement sensible du document demandé

39      S’agissant du caractère particulièrement sensible du document demandé, il y a lieu de relever que, dans la décision attaquée, le Conseil reprend l’appréciation figurant dans sa décision de refus du 3 avril 2013, à laquelle il renvoie expressément. Le Conseil avait estimé que l’avis juridique en cause était particulièrement sensible, aux motifs que les questions examinées étaient nouvelles et pertinentes pour un vaste éventail de dossiers actuels et futurs et que, compte tenu du caractère sensible et controversé de l’avis juridique, il existait un risque réel que ces questions soient portées devant les tribunaux.

40      Il y a lieu d’examiner si ces affirmations sont suffisantes pour établir, de manière circonstanciée, le caractère particulièrement sensible du document demandé.

41      Tout d’abord, eu égard à son contenu, le document demandé examine la question de la base juridique envisagée pour la proposition de directive en cause et le respect d’un principe général du droit par les propositions en cause, qui constituent des questions juridiques qui ne vont pas au-delà du cadre normal de l’examen d’une proposition législative.

42      De plus, il y a lieu de rejeter l’argument du Conseil selon lequel l’avis juridique porte sur une question nouvelle et controversée dans les domaines du droit pénal et des droits fondamentaux qui sont des domaines sensibles par leur nature même. En effet, quand bien même il devrait être considéré que le domaine des sanctions en matière de délits financiers constitue un domaine sensible, cela ne suffit pas à établir que le document demandé, par son contenu, a un caractère particulièrement sensible.

43      Ensuite, le fait que le document traite de questions nouvelles et susceptibles de controverses ne saurait lui conférer un caractère sensible. Le Conseil n’explique pas en quoi le fait que la proposition de directive soit le premier instrument fondé sur l’article 83, paragraphe 2, TFUE serait susceptible de conférer un caractère sensible au document demandé. En outre, conférer un caractère particulièrement sensible à tous les avis juridiques abordant une question nouvelle aurait pour effet d’empêcher en pratique la divulgation d’une grande partie de ceux-ci. En effet, c’est justement lorsqu’elles sont confrontées à des questions nouvelles que les institutions demandent un avis à leur service juridique.

44      De même, l’affirmation relative au caractère controversé de l’avis juridique contenu dans le document demandé n’est pas étayée de manière circonstanciée et, du fait de sa généralité, est susceptible de s’appliquer à un grand nombre d’avis juridiques.

45      Enfin, il y a lieu de rejeter l’affirmation du Conseil selon laquelle le caractère sensible du document demandé résultait également du risque que les questions qui étaient abordées dans l’avis juridique soient portées devant les tribunaux. En effet, l’existence d’un risque hypothétique de recours juridictionnels, dont le Conseil ne précise ni l’objet ni la nature, ne saurait constituer un argument de nature à conférer un caractère sensible au document demandé.

46      En outre, si, par cette affirmation relative à l’existence d’un risque contentieux sur les questions analysées dans le document demandé, le Conseil entend faire valoir que la divulgation de l’avis juridique relatif à des propositions législatives puisse engendrer des doutes concernant la légalité de ces actes législatifs, la Cour a relevé que c’était précisément la transparence à cet égard qui, en permettant que les divergences entre plusieurs points de vue soient ouvertement débattues, contribuait à conférer aux institutions une plus grande légitimité aux yeux des citoyens européens et à augmenter la confiance de ceux-ci (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, point 59).

47      Il en résulte que le Conseil n’a pas démontré que le document demandé avait un caractère particulièrement sensible.

–       Sur la portée particulièrement large du document demandé

48      S’agissant de la portée particulièrement large du document demandé, le Conseil s’est contenté d’indiquer dans la décision attaquée que ce document concernait un vaste éventail de dossiers actuels et futurs et qu’il « se rapport[ait] à des choix politiques visant à garantir des sanctions pénales applicables aux opérations d’initiés et aux manipulations de marché et en matière d’harmonisation des sanctions administratives dans le cadre des services financiers ».

49      Le fait que le document demandé concerne les sanctions applicables aux opérations d’initiés et aux manipulations de marché ne fait que renvoyer au contenu même des propositions en cause. De même, le fait que le document demandé examine le caractère approprié de la base juridique de la proposition de directive et si les propositions en cause respectent le principe non bis in idem ne saurait être considéré comme lui conférant une portée allant au-delà du processus législatif en cause.

50      Dans la décision attaquée, le Conseil affirme également que le document demandé concerne un sujet intéressant un vaste éventail de dossiers actuels et futurs et qu’il se rapporte à des choix politiques en matière d’harmonisation des sanctions administratives dans le cadre des services financiers.

51      Il y a lieu de considérer qu’une telle affirmation ne saurait conférer une portée particulièrement large au document demandé. En effet, il ressort de ce document qu’il concerne essentiellement les propositions en cause. Il ne mentionne d’autres propositions de directives relatives aux sanctions administratives dans le cadre des services financiers qu’en fin de document et dans des termes très généraux. En outre, ces autres propositions de directives concernant, comme les propositions en cause, la question des sanctions dans le domaine financier, les parties du document demandé qui y sont relatives ne sauraient être considérées comme ayant une portée allant au-delà de cette question.

52      Il en résulte que le Conseil n’a pas démontré que le document demandé avait une portée particulièrement large.

53      Partant, le Conseil n’a pas établi de façon circonstanciée que le document demandé avait un caractère particulièrement sensible ou une portée particulièrement large et n’a donc pas justifié son refus de divulguer le document demandé.

54      Il ressort de ce qui précède qu’il y a lieu d’accueillir le premier moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement n° 1049/2001.

55      Cette constatation ne saurait entraîner l’annulation de la décision attaquée et de la lettre du Conseil du 23 juillet 2013 dans la mesure où le Conseil est susceptible d’avoir justifié, dans la décision attaquée, à laquelle se réfère cette lettre, le refus d’accès à l’intégralité du document demandé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001. Il convient donc d’examiner le deuxième moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001

56      Le requérant, soutenu par le Royaume de Suède et par la République d’Estonie, fait valoir que le Conseil n’a pas démontré que la divulgation de l’intégralité du document demandé porterait gravement atteinte au processus décisionnel, au sens de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001. Le requérant soutient notamment que les motifs invoqués par le Conseil dans la décision attaquée ne sont pas suffisants pour démontrer que le processus décisionnel serait gravement et réellement compromis, ni qu’il existe un risque raisonnablement prévisible et non purement hypothétique que la divulgation du document demandé porterait atteinte au processus décisionnel.

57      Aux termes de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001, l’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

58      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 19 ci-dessus, le principe d’interprétation stricte des exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 impose à l’institution qui invoque l’une desdites exceptions d’expliquer comment l’accès au document demandé pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par celui-ci. De même, conformément à cette jurisprudence, le risque d’atteinte invoqué doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêt du 7 juin 2011, Toland/Parlement, T‑471/08, Rec, EU:T:2011:252, point 70).

59      En outre, pour relever de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001, l’atteinte au processus décisionnel doit être grave. Il en est notamment ainsi lorsque la divulgation des documents visés a un impact substantiel sur le processus décisionnel. Or, l’appréciation de la gravité dépend de l’ensemble des circonstances de la cause, notamment des effets négatifs sur le processus décisionnel, invoqués par l’institution quant à la divulgation des documents visés (arrêts du 18 décembre 2008, Muñiz/Commission, T‑144/05, EU:T:2008:596, point 75, et Toland/Parlement, point 58 supra, EU:T:2011:252, point 71).

60      En l’espèce, dans la décision attaquée, s’agissant de l’exception relative à la protection du processus décisionnel en cours, prévue à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001, le Conseil a indiqué que « la divulgation complète du document demandé pourrait faire obstacle à ce qu’ait lieu un authentique débat sur les questions concernées, en déviant l’axe des discussions sur le contenu d’un élément spécifique du processus décisionnel, ce qui compromettrait gravement le bon déroulement de ce processus ». Il a ajouté que « [l]a divulgation complète du document, qui donn[ait] un avis juridique sur des éléments qui revêt[ai]ent une importance essentielle pour les négociations et qui f[aisaie]nt l’objet de discussions complexes, poserait un risque réel de compromettre la capacité des institutions d’aboutir à un accord sur l’adoption des propositions ».

61      Il est constant que, à la date de l’adoption de la décision attaquée, le processus décisionnel devant aboutir à l’adoption de la directive et du règlement concernés par le document demandé était en cours.

62      Il ressort de la décision attaquée que le Conseil, pour justifier son refus d’accès au document demandé, s’est contenté d’indiquer que la divulgation de ce document « pourrait » faire obstacle à un débat sur les questions concernées en déviant les discussions sur un élément spécifique du processus décisionnel ou « poserait » un risque réel de compromettre la capacité des institutions d’aboutir à un accord.

63      Force est de constater que la décision attaquée ne comporte toutefois aucun élément tangible permettant de conclure que ce risque d’atteinte au processus décisionnel était, à la date de son adoption, raisonnablement prévisible et non purement hypothétique. Notamment, la décision attaquée ne fait aucun état de l’existence, à la date de son adoption, d’atteintes ou de tentatives d’atteinte au processus décisionnel en cours, ni de raisons objectives permettant de raisonnablement prévoir que de telles atteintes surviendraient en cas de divulgation du document demandé.

64      Contrairement à ce que soutient le Conseil dans le mémoire en défense, les indications figurant dans la décision attaquée ne sont pas suffisantes pour établir un risque d’atteinte grave au processus décisionnel qui ne soit pas seulement hypothétique.

65      Partant, il y a lieu de constater que, dans la décision attaquée, le Conseil s’est contenté d’affirmations générales qui ne caractérisent pas un risque suffisamment grave et raisonnablement prévisible permettant de justifier l’application de l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001.

66      En outre, il convient de relever que les raisons avancées par le Conseil dans la décision attaquée pour refuser l’accès au document demandé sur le fondement de l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001 ne sont pas convaincantes.

67      À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’accès du public à l’intégralité du contenu des documents du Conseil constitue le principe, surtout dans le cadre d’une procédure où les institutions agissent en qualité de législateur, et que les exceptions doivent être interprétées et appliquées strictement.

68      Premièrement, s’agissant du risque invoqué par le Conseil que la divulgation du document demandé pourrait modifier l’objet des débats en le déplaçant vers un élément spécifique du processus décisionnel, il y a lieu de rappeler que le document demandé examine la question de savoir si la base juridique proposée pour la proposition de directive est appropriée.

69      Or, il suffit de relever, à l’instar de la République d’Estonie, que la question de la base juridique est une question essentielle dans le processus législatif et qui ne modifie pas l’objet des débats, mais en constitue une partie essentielle.

70      Deuxièmement, s’agissant du risque invoqué par le Conseil que la divulgation du document demandé compromettrait ses capacités de négociations et les possibilités d’aboutir à un accord avec le Parlement, le Royaume de Suède fait valoir, à juste titre, qu’une proposition est faite pour être débattue, notamment en ce qui concerne le choix de la base juridique. En outre, comme le relève le requérant, compte tenu de l’importance du choix de la base juridique d’un acte législatif, la transparence sur ce choix n’affaiblit pas le processus décisionnel, mais le renforce.

71      À cet égard, comme l’a relevé la Cour, c’est précisément la transparence en matière d’avis juridique qui, en permettant que les divergences entre plusieurs points de vue soient ouvertement débattues, contribue à conférer aux institutions une plus grande légitimité aux yeux des citoyens de l’Union et à augmenter la confiance de ceux-ci. De fait, c’est plutôt l’absence d’information et de débat qui est susceptible de faire naître des doutes dans l’esprit des citoyens non seulement quant à la légalité d’un acte isolé, mais aussi quant à la légitimité du processus décisionnel dans son entièreté (arrêts Suède et Turco/Conseil, point 20 supra, EU:C:2008:374, point 59, et Suède/MyTravel et Commission, point 31 supra, EU:C:2011:496, point 113).

72      Enfin, s’agissant de l’argument du Conseil selon lequel le fait que l’avis juridique soit particulièrement sensible et d’une large portée a une incidence sur l’évaluation du risque que la divulgation du document porte atteinte au processus décisionnel, il suffit de rappeler qu’il ressort de l’examen du premier moyen que le Conseil n’a pas démontré que le document demandé était particulièrement sensible ou avait une large portée.

73      Il ressort de ce qui précède que le Conseil n’a pas établi que la divulgation de l’intégralité du document demandé porterait gravement atteinte au processus décisionnel et que l’application de l’exception de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001 était justifiée.

74      Partant, il y a lieu d’accueillir le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001.

75      Il ressort de l’ensemble de ce qui précède qu’aucune des justifications invoquées par le Conseil à l’appui de son refus d’accès à l’intégralité du document demandé n’étant fondée, il y a lieu d’annuler la décision attaquée ainsi que la lettre du Conseil du 23 juillet 2013, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens soulevés par le requérant, ni sur la demande du Conseil visant à ce que certains points de la requête soient retirés du dossier.

 Sur les dépens

76      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux du requérant, conformément aux conclusions de ce dernier.

77      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Le Royaume de Suède et la République d’Estonie supporteront donc leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du Conseil de l’Union européenne du 13 mai 2013 refusant l’accès intégral au document n° 12979/12, du 27 juillet 2012, contenant l’avis du service juridique du Conseil concernant des propositions de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux sanctions pénales applicables aux opérations d’initiés et aux manipulations de marché, de règlement sur les opérations d’initiés et les manipulations de marché et d’autres instruments concernant l’harmonisation des sanctions administratives dans le cadre des services financiers, ainsi que la lettre du Conseil du 23 juillet 2013 sont annulées.

2)      Le Conseil est condamné à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de M. Samuli Miettinen.

3)      Le Royaume de Suède et la République d’Estonie supporteront leurs propres dépens.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 septembre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.