Language of document : ECLI:EU:T:2022:554

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre élargie)

14 septembre 2022 (*)

« Aides d’État – Transport par autobus – Crédit d’équipement et crédits d’exploitation accordés par la ville d’Helsinki – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et illégale et ordonnant sa récupération – Aide existante – Avantage – Application du critère du créancier privé en économie de marché – Statut public du débiteur – Prise en compte d’un régime d’aides existant – Application du critère de l’investisseur privé en économie de marché – Continuité économique – Droits procéduraux des parties intéressées – Article 108, paragraphe 2, TFUE – Obligation de motivation – Principes généraux du droit de l’Union »

Dans l’affaire T‑597/19,

Helsingin kaupunki, établie à Helsinki (Finlande), représentée par Mes I. Aalto-Setälä et H. Koivuniemi, avocats,

partie requérante,

soutenue par

République de Finlande, représentée par M. J. Heliskoski et Mme H. Leppo, en qualité d’agents,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par M. M. Huttunen et Mme F. Tomat, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Nobina Oy, établie à Espoo (Finlande),

Nobina AB, établie à Solna (Suède),

représentées par Mes J. Åkermarck et T. Kalliokoski, avocats,

parties intervenantes,

LE TRIBUNAL (sixième chambre élargie),

composé de M. S. Papasavvas, président, Mme A. Marcoulli (rapporteure), MM. J. Schwarcz, C. Iliopoulos et R. Norkus, juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 24 mars 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Helsingin kaupunki (ville d’Helsinki, Finlande), demande l’annulation de la décision (UE) 2020/1814 de la Commission, du 28 juin 2019, relative à l’aide d’État SA.33846 – (2015/C) (ex 2014/NN) (ex 2011/CP) mise en œuvre par la Finlande en faveur d’Helsingin Bussiliikenne Oy (JO 2020, L 404, p. 10, ci-après la « décision attaquée »).

I.      Antécédents du litige

2        Au cours des années 2002 à 2012, la requérante a accordé différentes mesures en faveur, successivement, de HKL-Bussiliikenne Oy et de Helsingin Bussiliikenne Oy (ci-après l’« ancienne HelB »). Ces mesures consistaient en un crédit d’équipement, octroyé à HKL-Bussiliikenne en 2002 et endossé en 2005 par l’ancienne HelB, et trois crédits d’exploitation, octroyés à l’ancienne HelB en 2005, 2011 et 2012 (ci-après, prises ensemble, les « mesures litigieuses »).

A.      Sur HKL-Bussiliikenne et l’ancienne HelB

3        HKL-Bussiliikenne était une entité commerciale distincte de la requérante créée par elle en 1995, issue du département des services de transport de cette dernière.

4        Le 1er janvier 2005, Suomen Turistiauto Oy (ci-après « STA ») – société privée de transport détenue par la requérante – a repris les activités de HKL-Bussiliikenne. À la suite de cette reprise, HKL-Bussiliikenne a été renommée Helsingin Bussiliikenne Oy. L’ancienne HelB exploitait des lignes d’autobus dans la région d’Helsinki (Finlande) et proposait des services de transport par affrètement et de location d’autobus. Elle était détenue à 100 % par la requérante.

5        Le 14 décembre 2015, l’ancienne HelB a été vendue à une compagnie privée d’autobus, Viikin Linja Oy, qui, conformément aux conditions de l’acte de vente, a repris la dénomination sociale de l’ancienne HelB (ci-après la « nouvelle HelB »).

6        Les actes relatifs à l’opération incluaient notamment une clause garantissant une indemnisation totale de l’acquéreur de l’ancienne HelB en cas de demande de récupération d’une aide d’État (ci-après la « clause d’indemnisation »). À cette fin, une partie du montant de la vente a été placée sur un compte de garantie bloqué jusqu’à l’adoption d’une décision définitive concernant l’aide d’État ou, au plus tard, jusqu’au 31 décembre 2022. Ces actes comportaient également un mécanisme de retour à une meilleure fortune sur la base duquel l’acquéreur s’engageait à verser au vendeur, sur le même compte de garantie bloqué, une prime si les niveaux de bénéfices convenus au préalable étaient dépassés.

7        L’ancienne HelB, détenue par la requérante, a été renommée Helsingin kaupungin Linja-autotoiminta. La cession au profit de Viikin Linja portait sur l’ensemble des activités commerciales de l’ancienne HelB. L’ancienne HelB n’exerçait plus aucune activité commerciale et ne conservait plus aucun actif, à l’exception des sommes inscrites ou à inscrire au crédit du compte de garantie bloqué. Le crédit d’équipement de 2002 ainsi que les crédits d’exploitation de 2005, de 2011 et de 2012 obtenus par l’ancienne HelB n’ont pas été transférés vers la nouvelle HelB.

B.      Sur les mesures litigieuses

1.      Sur le crédit d’équipement de 2002

8        Le 6 mai 2002, la requérante a octroyé à HKL-Bussiliikenne un crédit d’équipement de 14 500 000 euros afin de financer l’acquisition de matériel de transport par autobus.

9        Le crédit avait une durée de douze ans et un délai de grâce de deux ans. Le taux d’intérêt était le taux Euribor douze mois assorti d’une marge de 0,05 %. Ce taux pouvait être revu par la requérante tous les cinq ans à compter du premier décaissement du crédit, à savoir le 24 mai 2007 et le 24 mai 2012. L’intérêt était dû le 31 décembre de chaque année, à partir de 2002. Le principal devait être remboursé annuellement en douze tranches égales à partir du 31 décembre 2004. Le crédit n’était assorti d’aucune garantie.

10      Le 1er janvier 2005, à la suite de l’acquisition des activités de HKL-Bussiliikenne, l’ancienne HelB a repris le crédit d’équipement de 2002 aux mêmes conditions que celles auxquelles il avait été octroyé à HKL-Bussiliikenne. Toutefois, aucune tranche ne devait être remboursée au cours des années 2005 et 2006.

11      Le 1er octobre 2007, la requérante a prolongé le remboursement du crédit d’équipement de 2002 jusqu’au 31 décembre 2023.

12      L’ancienne HelB a remboursé les intérêts ainsi que 3 800 000 euros du principal du crédit d’équipement. Le 13 janvier 2016, à la suite de la vente des activités de l’ancienne HelB à la nouvelle HelB, la requérante a dispensé l’ancienne HelB de l’obligation de rembourser le restant du principal du crédit, soit 10 700 000 euros.

2.      Sur le crédit d’exploitation de 2005

13      Le 1er janvier 2005, au moment de sa création, l’ancienne HelB a repris un « crédit de démarrage » accordé par la requérante à HKL-Bussiliikenne en 1994, d’un montant de 16 300 000 euros, dont 12 255 223,50 euros constituaient des encours dans le bilan de HKL-Bussiliikenne au 31 décembre 2004. L’ancienne HelB a également repris, à cette date, un passif de STA provenant d’un investissement préalable en capital effectué par la requérante dans HKL-Bussiliikenne, dont il restait 3 638 476,87 euros au 31 décembre 2004. La requérante a refinancé ces passifs en les convertissant en un crédit d’exploitation d’un montant total de 15 893 700,37 euros.

14      Le taux d’intérêt du crédit d’exploitation de 2005 était de 6 %. Ce crédit n’était remboursable que si et dans la mesure où le capital social et d’autres éléments non distribuables du bilan étaient entièrement couverts. Les intérêts non payés ont été capitalisés. Le crédit, d’une durée illimitée, était subordonné à toutes les autres dettes et n’était assorti d’aucune garantie.

15      Le crédit d’exploitation de 2005 n’a pas été remboursé et a été converti par la requérante le 11 décembre 2015 en fonds propres de l’ancienne HelB.

3.      Sur le crédit d’exploitation de 2011

16      Le 31 janvier 2011, la requérante a accordé à l’ancienne HelB un deuxième crédit d’exploitation d’un montant de 5 800 000 euros. Ce crédit était octroyé aux mêmes conditions que le crédit d’exploitation de 2005 (voir point 14 ci-dessus).

17      Le crédit d’exploitation de 2011 n’a pas été remboursé et a été converti par la requérante le 11 décembre 2015 en fonds propres de l’ancienne HelB.

4.      Sur le crédit d’exploitation de 2012

18      Le 23 mai 2012, la requérante a octroyé à l’ancienne HelB un troisième crédit d’exploitation, d’un montant de 8 000 000 euros. Ce crédit était octroyé aux mêmes conditions que les crédits d’exploitation de 2005 et de 2011 (voir points 14 et 16 ci-dessus).

19      Le crédit d’exploitation de 2012 n’a pas été remboursé et a été converti par la requérante le 11 décembre 2015 en fonds propres de l’ancienne HelB.

C.      Sur la procédure administrative et la décision attaquée

20      Le 31 octobre 2011, les entreprises de transport public Nobina Sverige AB et Nobina Finland Oy ont déposé une plainte auprès de la Commission européenne, à laquelle leur société mère, Nobina AB, s’est jointe le 15 novembre 2011. Par cette plainte, elles alléguaient que la République de Finlande avait accordé une aide illégale à l’ancienne HelB. Le 22 novembre 2011, la Commission a transmis cette plainte à la République de Finlande.

21      Par la décision C(2015) 80 final, du 16 janvier 2015, relative à la mesure SA.33846 (2015/C) (ex 2014/NN) (ex 2011/CP) – Finlande – Helsingin Bussiliikenne Oy (JO 2015, C 116, p. 22, ci-après la « décision d’ouverture »), la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen prévue par l’article 108, paragraphe 2, TFUE concernant notamment les mesures litigieuses. Cette décision a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 10 avril 2015 et les parties intéressées ont été invitées à présenter leurs observations dans un délai d’un mois.

22      Le 28 juin 2019, la Commission a adopté la décision attaquée. Le dispositif de la décision attaquée est ainsi libellé :

« Article premier

L’aide d’État d’un montant de 54 231 850 EUR accordée illégalement par la [République de] Finlande au titre des mesures [litigieuses], en violation de l’article 108, paragraphe 3, [TFUE], en faveur d’Helsingin Bussiliikenne Oy, est incompatible avec le marché intérieur.

Article 2

1. La [République de] Finlande est tenue de récupérer auprès du bénéficiaire l’aide visée à l’article 1er.

2. Compte tenu de la continuité économique entre l’ancienne HelB (désormais Helsingin kaupungin Linja-autotoiminta Oy) et la nouvelle HelB (nom complet : Helsingin Bussiliikenne Oy, anciennement Viikin Linja Oy), l’obligation de rembourser l’aide est étendue à la nouvelle HelB (nom complet : Helsingin Bussiliikenne Oy).

3. Les sommes à récupérer produisent des intérêts qui courent à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition du bénéficiaire jusqu’à leur récupération effective.

[…]

Article 4

1. Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, la [République de] Finlande communique à la Commission les informations suivantes :

a)      le montant total (principal et intérêts) à récupérer auprès du bénéficiaire ;

[…] »

II.    Conclusions des parties

23      La requérante, soutenue par la République de Finlande, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler en totalité ou en partie la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens, majorés des intérêts légaux.

24      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

25      Nobina soutient les conclusions de la Commission et conclut à ce que la requérante soit condamnée aux dépens.

III. En droit

26      À l’appui de son recours, la requérante soulève, en substance, quatre moyens, tirés, le premier, d’une application erronée de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, le deuxième, d’une violation de l’obligation de motivation au sens de l’article 296 TFUE, le troisième, d’une erreur manifeste d’appréciation quant à l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, en particulier s’agissant du critère du prix du transfert et de l’objectif poursuivi, et, le quatrième, d’une violation des principes généraux du droit de l’Union européenne, en particulier du principe de protection de la confiance légitime et du principe de proportionnalité, ainsi que d’une violation des droits de la défense.

A.      Sur le premier moyen, tiré d’une application erronée de l’article 107, paragraphe 1, TFUE

27      Par son premier moyen, la requérante, soutenue par la République de Finlande, conteste la qualification des mesures litigieuses, au regard de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’aides d’État. Ce moyen se divise en quatre branches, relatives, premièrement, au crédit d’équipement de 2002, deuxièmement, au crédit d’exploitation de 2005, troisièmement, au crédit d’exploitation de 2011 et, quatrièmement, au crédit d’exploitation de 2012.

28      La Commission, soutenue par Nobina, conteste les arguments de la requérante.

29      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, sont déclarées incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État, sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Ainsi, la qualification d’aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE suppose la réunion de quatre conditions, à savoir l’existence d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État, que cette intervention soit susceptible d’affecter les échanges entre les États membres, qu’elle accorde un avantage sélectif à son bénéficiaire et qu’elle fausse ou menace de fausser la concurrence (voir arrêt du 13 septembre 2017, ENEA, C‑329/15, EU:C:2017:671, point 17 et jurisprudence citée).

30      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante ne conteste pas les conclusions de la Commission selon lesquelles les mesures litigieuses, pour chacune d’entre elles, impliquaient l’utilisation de ressources d’État et étaient imputables à l’État. Elle ne conteste pas non plus que ces mesures étaient sélectives.

1.      Sur la première branche, relative au crédit d’équipement de 2002

31      Dans la décision attaquée, aux considérants 89 et 90, la Commission a constaté que la requérante n’avait procédé à aucune évaluation ex ante du risque lié à l’octroi du crédit d’équipement de 2002, contrairement à ce qu’aurait fait un hypothétique créancier privé. Aux considérants 101 à 110, en l’absence de données de marché spécifiques à l’opération et de valeurs de référence appropriées, la Commission a apprécié la conformité au marché du crédit d’équipement de 2002 au regard de sa communication concernant la méthode de fixation des taux de référence et d’actualisation (JO 1997, C 273, p. 3, ci-après la « communication sur les taux de référence de 1997 »). Pour la période entre le 24 mai 2002 et le 23 mai 2012, la Commission a constaté que ledit crédit avait été octroyé à HKL-Bussiliikenne et cédé à l’ancienne HelB dans une situation présentant un risque particulier, et ce au regard de l’absence de garantie assortissant ce crédit, de la situation financière de ces entités ainsi que de la décision de reporter de huit ans le remboursement dudit crédit sans prévoir une prime supplémentaire. Pour cette période, la Commission a considéré que le taux du marché correspondait à l’Euribor douze mois majoré de 400 points de base. S’agissant de la période allant du 24 mai 2012 au 13 janvier 2016, date à laquelle l’ancienne HelB avait bénéficié d’une dispense de remboursement du restant du principal du crédit d’équipement de 2002, la Commission a constaté, au considérant 113 de la décision attaquée, qu’un créancier privé aurait eu recours à la possibilité dont il disposait de refixer tous les cinq ans le taux d’intérêt afin de prendre en compte la détérioration financière de l’ancienne HelB qui remplissait, depuis 2009, les critères d’une entreprise en difficulté. Par conséquent, pour cette période, la Commission a estimé que le taux du marché correspondait à l’Euribor douze mois majoré de 1 000 points. Au considérant 115, la Commission a ajouté que l’ancienne HelB avait encore bénéficié du fait de ne pas devoir rembourser le montant du restant du principal du crédit d’équipement de 2002. Sur la base de ces éléments, la Commission a conclu, au considérant 116, que le crédit d’équipement de 2002 n’avait pas été octroyé à des conditions conformes aux conditions du marché et que, en conséquence, la requérante n’avait pas agi comme un créancier sur le marché. Dès lors, le crédit d’équipement de 2002 avait procuré un avantage économique indu à HKL-Bussiliikenne et à l’ancienne HelB. Au considérant 118, s’agissant du montant de l’aide d’État, la Commission a indiqué qu’il correspondait à la différence entre, d’une part, les intérêts dus calculés sur la base des taux du marché identifiés et, d’autre part, les intérêts versés calculés sur la base du taux d’intérêt réel, à laquelle s’ajoutait le montant restant du principal du crédit d’équipement de 2002. Le montant de l’aide d’État ainsi calculé s’élève à 20 190 595 euros.

32      La requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur en constatant que le crédit d’équipement de 2002, octroyé à HKL-Bussiliikenne et endossé par l’ancienne HelB, comportait un élément d’aide d’État et invoque quatre griefs.

a)      Sur le premier grief, tiré de la notion d’« entreprise » au sens du droit de la concurrence

33      La requérante avance que la Commission a confondu la notion de « société » au sens du droit des sociétés et celle d’« entreprise » au sens du droit de la concurrence et qu’elle n’aurait pas saisi la nature du lien structurel qui l’unissait à HKL-Bussiliikenne, ce qui se répercuterait partiellement sur le dispositif de la décision attaquée. La Commission aurait également interprété erronément les arguments de la République de Finlande.

34      La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas étayés.

35      À cet égard, il suffit de relever qu’il est constant entre les parties que HKL-Bussiliikenne est une entreprise au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et que les règles en matière d’aides d’États lui sont applicables. La circonstance alléguée par la requérante que la Commission aurait considéré à tort que la République de Finlande contestait devant elle le fait que HKL-Bussiliikenne soit une entreprise au sens du droit de la concurrence est ainsi dépourvu d’incidence. S’agissant des arguments selon lesquels la Commission n’aurait pas perçu le lien structurel unissant HKL-Bussiliikenne à la requérante et ses implications sur les conditions du crédit d’équipement de 2002, ceux-ci seront examinés dans le contexte du grief tiré de l’application erronée du critère du créancier privé.

36      Partant, dans cette mesure, il y a lieu d’écarter le premier grief comme étant inopérant.

b)      Sur le deuxième grief, tiré de l’application erronée du critère du créancier privé

37      La requérante avance que la Commission a appliqué erronément le critère du créancier privé.

38      Le présent grief se divise en cinq sous-griefs. Le premier est tiré du fait que HKL-Bussiliikenne ne disposait pas d’une personnalité juridique distincte de celle de la requérante. Le deuxième porte sur l’exigence supposée d’assortir de garanties le crédit d’équipement de 2002. Le troisième est tiré du droit d’imposition et de l’affiliation à un fonds municipal de la requérante. Le quatrième est tiré de la protection contre la faillite dont disposait HKL-Bussiliikenne. Le cinquième porte sur le report de l’échéance de remboursement du crédit d’équipement de 2002.

39      Les premier et deuxième sous-griefs, d’une part, et les troisième et quatrième sous-griefs, d’autre part, seront examinés ensemble.

40      Il convient de rappeler que sont considérées comme des aides d’État les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises ou qui doivent être considérées comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pu obtenir dans des conditions normales de marché (arrêt du 6 mars 2018, Commission/FIH Holding et FIH Erhvervsbank, C‑579/16 P, EU:C:2018:159, point 44).

41      Ainsi, compte tenu de l’objectif de l’article 107, paragraphe 1, TFUE d’assurer une concurrence non faussée, y compris entre les entreprises publiques et les entreprises privées, la notion d’« aide », au sens de cette disposition, ne saurait recouvrir une mesure accordée en faveur d’une entreprise au moyen de ressources d’État lorsque celle-ci aurait pu obtenir le même avantage dans des circonstances correspondant aux conditions normales du marché (voir arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 103 et jurisprudence citée). L’appréciation des conditions dans lesquelles un tel avantage a été accordé s’effectue, lorsqu’un créancier public octroie des facilités de paiement pour une dette qui lui est due par une entreprise, par application, en principe, du critère du créancier privé (voir arrêt du 20 septembre 2017, Commission/Frucona Košice, C‑300/16 P, EU:C:2017:706, point 22 et jurisprudence citée).

42      Le critère du créancier privé tend à examiner si l’entreprise bénéficiaire n’aurait manifestement pas obtenu des facilités comparables d’un créancier privé se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle du créancier public qui chercherait à obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par un débiteur connaissant des difficultés financières et, partant, si cette entreprise aurait pu obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition au moyen de ressources d’État dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché (voir, en ce sens, arrêt du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission, C‑73/11 P, EU:C:2013:32, points 70 et 72).

43      Le critère du créancier privé, lorsqu’il est applicable, figure parmi les éléments que la Commission est tenue de prendre en compte pour établir l’existence d’une telle aide (voir arrêt du 20 septembre 2017, Commission/Frucona Košice, C‑300/16 P, EU:C:2017:706, point 23 et jurisprudence citée).

44      Par conséquent, lorsqu’il apparaît que le critère du créancier privé pourrait être applicable, il incombe à la Commission de demander à l’État membre concerné de lui fournir toutes les informations pertinentes lui permettant de vérifier si les conditions d’application de ce principe sont remplies (voir arrêt du 20 septembre 2017, Commission/Frucona Košice, C‑300/16 P, EU:C:2017:706, point 24 et jurisprudence citée).

45      C’est donc sur la Commission que pèse la charge de la preuve de ce que les conditions d’application du critère du créancier privé sont ou non remplies (voir, par analogie, arrêt du 26 mars 2020, Larko/Commission, C‑244/18 P, EU:C:2020:238, point 65 et jurisprudence citée).

46      La Cour a encore précisé que, lors de l’application du critère du créancier privé, il appartenait à la Commission d’effectuer une appréciation globale prenant en compte tout élément pertinent en l’espèce lui permettant de déterminer si l’entreprise bénéficiaire n’aurait manifestement pas obtenu des facilités comparables d’un créancier privé. À cet égard, d’une part, doit être considérée comme étant pertinente toute information susceptible d’influencer de manière non négligeable le processus décisionnel d’un créancier privé normalement prudent et diligent, se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle du créancier public et cherchant à obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par un débiteur aux prises avec des difficultés de paiement. D’autre part, sont seuls pertinents, aux fins de l’application du critère du créancier privé, les éléments disponibles et les évolutions prévisibles au moment où cette décision a été prise (voir arrêt du 20 septembre 2017, Commission/Frucona Košice, C‑300/16 P, EU:C:2017:706, points 59 à 61 et jurisprudence citée).

47      Il convient encore de relever que l’examen qu’il appartient à la Commission d’effectuer, lors de l’application du critère du créancier privé, requiert de procéder à une appréciation économique complexe et que, dans le cadre du contrôle que les juridictions de l’Union exercent sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission dans le domaine des aides d’État, il n’appartient pas au juge de l’Union de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Larko/Commission, C‑244/18 P, EU:C:2020:238, point 39).

48      C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu d’examiner si la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a conclu que le taux d’intérêt auquel le crédit d’équipement de 2002 avait été octroyé, à savoir le taux Euribor douze mois majoré d’une prime de risque de 0,05 %, n’était pas conforme aux conditions du marché et que, partant, la requérante n’avait pas agi comme un créancier privé.

1)      Sur les premier et deuxième sous-griefs, en tant qu’ils sont fondés sur les liens entre HKL-Bussiliikenne et la requérante

49      La requérante fait, en substance, valoir que le mécanisme de financement a été déployé, en l’espèce, au sein d’une seule et même personne morale, HKL-Bussiliikenne n’étant pas une société distincte, mais un centre de profit d’un établissement public municipal à caractère commercial intégré à la requérante. Dès lors, la Commission n’aurait pu faire référence, dans la décision attaquée, à sa décision (UE) 2016/788, du 1er octobre 2014, relative à l’aide d’État SA.32833 (11/C) (ex 11/NN) mise à exécution par l’Allemagne concernant les modalités de financement de l’aéroport de Francfort-Hahn mises en place de 2009 à 2011 (JO 2016, L 134, p. 1), ni exiger de la requérante qu’elle assortisse le crédit d’équipement de 2002 de garanties, alors qu’une telle démarche n’aurait été ni nécessaire ni utile puisque la requérante aurait été à la fois le donneur et le preneur de cette garantie.

50      La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas fondés.

51      Premièrement, ayant constaté au point 35 ci-dessus que HKL-Bussiliikenne était une entreprise au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, il convient de rappeler que l’existence ou non d’une personnalité juridique distincte de celle de l’État, attribuée par le droit national à un organe exerçant des activités économiques, est sans influence sur l’existence de relations financières entre l’État et cet organe et, partant, sur la possibilité pour ledit organe de bénéficier d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117, points 128 et 129 et jurisprudence citée).

52      D’une part, il est constant que HKL-Bussiliikenne exerçait une activité économique sur le marché des transports par autobus en tant qu’entreprise au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. D’autre part, la requérante ne prétend pas que l’organisation financière de HKL-Bussiliikenne empêchait qu’il existe des relations financières, et donc un transfert de ressources étatiques, entre elle et HKL-Bussilikenne. Il n’y a donc rien qui empêchait la requérante et HKL-Bussiliikenne d’établir des relations financières. Partant, il y a lieu de rejeter les arguments de la requérante comme non fondés.

53      En tout état de cause, la décision mentionnée au point 49 ci-dessus est visée au considérant 94 de la décision attaquée pour démontrer que la requérante aurait dû évaluer la qualité de crédit de HKL-Bussiliikenne de manière autonome. La Commission ne se fonde nullement sur la personnalité juridique des entités qui étaient en cause dans cette affaire aux fins de cette conclusion.

54      Deuxièmement, l’argument tiré du fait que la Commission ne pouvait exiger qu’elle assortisse le crédit de garanties dès lors qu’elle aurait été le donneur, mais également le preneur de garantie en raison de l’absence de personnalité juridique d’HKL-Bussiliikenne procède d’une lecture erronée de la décision attaquée. Au considérant 104 de la décision attaquée, la Commission constate uniquement que le fait que le crédit d’équipement de 2002 n’était pas assorti de garanties constituait, en substance, un élément qu’un créancier privé aurait pris en compte dans la détermination du taux d’intérêt qu’il aurait appliqué. Il suffit de relever que le constat factuel ainsi opéré par la Commission n’est pas contesté par la requérante.

55      Par ailleurs, lors de l’audience, la requérante a semblé faire valoir que l’absence de garanties ne pouvait être prise en compte afin de déterminer le taux de marché de référence et que la communication sur les taux de référence de 1997 n’était pas applicable, puisqu’il aurait été impossible d’assortir le crédit d’équipement de 2002 de garanties en raison du lien l’unissant à HKL-Bussiliikenne et de la législation finlandaise. Outre que cet argument n’est nullement étayé, il a été présenté pour la première fois lors de l’audience et, de ce fait, il est irrecevable en vertu de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

56      Partant, les premier et deuxième sous-griefs doivent être écartés comme étant inopérants et, en tout état de cause, non fondés.

2)      Sur les troisième et quatrième sous-griefs, tirés du droit d’imposition et de l’affiliation à un fonds municipal de la requérante ainsi que de la protection contre la faillite dont bénéficiait HKL-Bussiliikenne

57      Au considérant 93 de la décision attaquée, la Commission a rejeté l’argument de la République de Finlande selon lequel HKL-Bussiliikenne aurait probablement été en mesure d’obtenir un crédit avec une marge similaire auprès d’un établissement financier privé étant donné que, en sa qualité d’entité interne, elle possédait le même degré de solvabilité – à savoir un bon degré – que la requérante elle-même. Premièrement, la Commission a considéré que la République de Finlande n’avait fourni aucun élément de preuve à l’appui de son affirmation selon laquelle HKL-Bussiliikenne aurait été en mesure d’obtenir un crédit avec une marge similaire auprès d’un établissement financier privé. Deuxièmement, elle a indiqué que, du point de vue d’un créancier privé, un crédit accordé à la requérante en tant que pouvoir public aurait toujours impliqué un risque plus faible qu’un crédit accordé à HKL-Bussiliikenne, un opérateur de transport par autobus opérant sur un marché ouvert à la concurrence, même si cette dernière était une entité faisant partie de la structure organisationnelle de la requérante. Elle a également précisé qu’un crédit accordé à la requérante ne saurait être considéré comme une référence de marché appropriée, parce que les conditions qui y sont liées tiennent compte du fait que ces dettes publiques sont garanties en dernier ressort par l’État et qu’un débiteur sur le marché ne bénéficie pas d’un tel soutien.

58      La requérante fait en substance valoir que la Commission aurait, à tort, fait abstraction du fait que HKL-Bussiliikenne, en raison de son statut public, bénéficiait de certains avantages lui permettant de disposer d’une très bonne qualité de crédit. D’une part, la requérante avance qu’elle dispose du droit d’imposition et est membre d’un fonds de garantie des municipalités, ce qui lui confère une très bonne qualité de crédit. HKL-Bussiliikenne, en raison du fait qu’elle serait partie intégrante de la requérante, disposerait de la même qualité de crédit. D’autre part, elle soutient que, lors de l’octroi du crédit d’équipement de 2002, HKL-Bussiliikenne disposait, en vertu de la législation nationale et en raison de son statut d’entreprise municipale, d’une protection contre la faillite, de sorte qu’un créancier privé avisé aurait considéré que le risque lié au crédit d’équipement de 2002 octroyé à HKL-Bussiliikenne était identique à celui de la requérante, à savoir particulièrement réduit et équivalant à une prime de risque de 0,05 %.

59      La Commission conteste les arguments de la requérante. La Commission indique que les arguments de la requérante fondés sur sa propre qualité de crédit sont inopérants. Dans ses réponses écrites aux questions posées par le Tribunal, elle a précisé que, durant la procédure administrative, la requérante s’était référée de manière marginale à la protection contre la faillite accordée aux organismes municipaux et que, par conséquent, cet argument devait être écarté comme irrecevable. En tout état de cause, ces arguments ne seraient pas fondés.

60      À titre liminaire, en ce qui concerne la protection contre la faillite invoquée par la requérante, à la suite des réponses fournies par les parties aux mesures d’organisation de la procédure et des débats qui ont eu lieu lors de l’audience devant le Tribunal, il doit être constaté que la Commission et la requérante s’accordent sur le fait que HKL-Bussiliikenne, en tant qu’entreprise municipale, bénéficiait, lors de l’octroi du crédit d’équipement de 2002, d’une protection contre la faillite en vertu de laquelle la requérante répondait, en dernier ressort, des dettes de cette entreprise, le cas échéant via l’imposition locale. Par ailleurs, ainsi que cela est soutenu par la requérante dans ses écrits et confirmé par la Commission lors de l’audience, ladite protection contre la faillite relevait d’un régime d’aides existant. Ces faits sont également établis par les pièces du dossier de l’affaire et, en particulier, par la lettre datée du 14 avril 2010 et adressée par la Commission à la République de Finlande dans le cadre de l’examen de la compatibilité d’un régime d’aides existant comportant notamment la protection contre la faillite, jointe en annexe A.2 de la requête. La République de Finlande a, depuis, modifié sa législation, de sorte que les organismes municipaux exerçant une activité économique ne bénéficient plus, à l’heure actuelle, d’une telle aide.

61      En premier lieu, en ce que la requérante se fonde sur sa propre qualité de crédit ainsi que sur le fait qu’elle bénéficie elle-même d’une protection contre la faillite afin de démontrer que HKL-Bussiliikenne, qui lui est intégrée, bénéficie nécessairement d’une très bonne qualité de crédit, force est de constater que la requérante n’établit pas qu’elle disposait d’une bonne qualité de crédit et qu’elle aurait obtenu ou, à tout le moins, aurait pu obtenir un crédit aux mêmes conditions que celles assortissant le crédit d’équipement de 2002. En outre, il y a lieu de relever que c’est à juste titre que la Commission a estimé qu’un créancier privé, qui évalue le risque associé à l’octroi d’un crédit, prendra en considération la circonstance que, à la différence de la requérante, HKL-Bussiliikenne opère sur un marché ouvert à la concurrence et que, par son activité, elle est exposée à des risques qui ne relèvent pas forcément du fonctionnement et du rôle d’une autorité publique, statut que revêt quant à elle la requérante. Il en découle que la qualité de crédit de HKL-Bussiliikenne doit s’apprécier de manière autonome. Cette conclusion permet également d’écarter l’argument de la requérante selon lequel il n’aurait pas été nécessaire qu’elle réalise une évaluation de la qualité de crédit de HKL-Bussiliikenne préalablement à l’octroi du crédit d’équipement de 2002, dès lors qu’elle aurait, selon elle, examiné en réalité sa propre qualité de crédit.

62      En second lieu, en ce que la requérante fait valoir que la prime de risque de 0,05 % dont était assorti le crédit d’équipement de 2002 correspond, en raison de la protection contre la faillite dont bénéficiait HKL-Bussiliikenne, à la prime de risque qu’aurait prévue un créancier privé si cette mesure lui avait été octroyée directement, il convient de relever que la requérante n’apporte pas d’éléments démontrant qu’elle bénéficiait d’une prime de risque de 0,05 %. Par ailleurs, elle n’apporte aucun élément permettant de considérer qu’il lui aurait été impossible d’apporter une telle preuve. Partant, cette affirmation doit être écartée comme étant non étayée.

63      En tout état de cause, afin d’examiner dans le cadre du critère du créancier privé si une entreprise en difficulté aurait pu obtenir auprès d’un créancier privé, dans des conditions normales du marché, des facilités comparables à celles obtenues par HKL-Bussiliikenne, il convient, ainsi que cela ressort du point 42 ci-dessus, de prendre en considération un créancier privé se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle du créancier public, en faisant abstraction, en raison de son statut privé, de tout bénéfice et de toute obligation liés à la qualité de puissance publique du créancier public et en tenant exclusivement compte des bénéfices et des obligations dont un créancier privé pourrait se prévaloir (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 6 mars 2018, Commission/FIH Holding et FIH Erhvervsbank, C‑579/16 P, EU:C:2018:159, points 55 à 59).

64      En l’espèce, la requérante indique qu’elle disposait d’un droit d’imposition et qu’elle était membre d’un fonds de garantie des municipalités. Elle ajoute que la protection contre la faillite, mise en œuvre le cas échéant par la levée d’un impôt local, dont disposait HKL-Bussiliikenne au moment de l’octroi du crédit d’équipement de 2002, était octroyée par la législation nationale en raison de son statut d’entreprise municipale. Or, un créancier privé ne dispose pas d’un droit d’imposition ni de la possibilité de faire partie d’un fonds de garantie municipale. Il ne dispose pas non plus de la possibilité d’offrir une protection contre la faillite, par la levée d’un impôt local, à une entreprise en difficulté qui lui serait liée. En effet, ces privilèges, invoqués par la requérante aux fins de démontrer le degré de solvabilité de HKL-Bussiliikenne, résultent exclusivement de son statut d’autorité publique. Un créancier privé ne saurait donc se prévaloir de pareils privilèges. Même à considérer qu’un créancier privé aurait pu accorder une protection similaire contre la faillite à une entreprise qui lui serait liée, cette protection serait financée par des fonds provenant d’activités opérées dans des conditions normales du marché et non de sources de financement liées à un privilège résultant d’un statut de puissance publique. Partant, la protection contre la faillite dont bénéficiait HKL-Bussiliikenne, en ce qu’elle résultait du lien l’unissant à la requérante, ne peut être prise en considération dans l’application du critère du créancier privé.

65      En particulier, dans l’arrêt du 6 mars 2018, Commission/FIH Holding et FIH Erhvervsbank (C‑579/16 P, EU:C:2018:159), dans lequel la Cour a examiné la question de la prise en compte d’une aide d’État antérieure dans l’appréciation d’une nouvelle aide qui avait été adoptée afin d’éviter les risques liés à la mise en œuvre de l’aide antérieure, justification qui n’est certes pas avancée par la requérante dans la présente affaire, la Cour a considéré que les obligations découlant pour l’État de prêts et de garanties accordés antérieurement à une entreprise et constitutifs d’aides d’État ne relèvent pas des éléments qu’un opérateur privé aurait, dans des conditions normales de marché, pris en compte dans ses calculs économiques. Leur prise en compte lors de l’appréciation de mesures étatiques adoptées en faveur de la même entreprise serait susceptible de soustraire ces dernières mesures à la qualification d’aide d’État, alors même qu’elles ne répondent pas non plus aux conditions normales du marché, au seul motif qu’elles s’avèrent plus avantageuses pour l’État, sur le plan économique, que si elles n’avaient pas été adoptées. Une telle conséquence compromettrait l’objectif de l’article 107, paragraphe 1, TFUE d’assurer une concurrence non faussée, y compris entre les entreprises publiques et privées (voir, par analogie, arrêt du 6 mars 2018, Commission/FIH Holding et FIH Erhvervsbank, C‑579/16 P, EU:C:2018:159, points 58 et 59 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, il est constant entre les parties, comme cela a été constaté au point 60 ci-dessus, que la protection contre la faillite dont bénéficiait HKL-Bussiliikenne au moment de l’octroi du crédit d’équipement de 2002 relevait d’un régime d’aides existant, de sorte que cette protection ne pouvait quoi qu’il en soit être prise en compte dans l’application du critère du créancier privé.

66      De même, l’examen du critère du créancier privé implique de faire abstraction des avantages dont pourrait se prévaloir un débiteur en raison de son statut public. En effet, les avantages que pourrait faire valoir HKL-Bussiliikenne en raison de ses liens avec la requérante ne sauraient non plus correspondre aux conditions normales du marché au sens de la jurisprudence rappelée au point 42 ci-dessus, un débiteur privé ne pouvant en principe disposer de tels avantages. Or, la protection contre la faillite dont disposait HKL-Bussiliikenne en vertu de la législation nationale lui était accordée en raison de son statut d’entreprise municipale. Le fait que HKL-Bussiliikenne exerce son activité sur un marché ouvert à la concurrence ne serait alors plus déterminant aux fins de l’évaluation des risques encourus par son créancier privé, ces risques ne pouvant plus être reflétés de manière réelle. Partant, une application du critère du créancier privé conforme à la jurisprudence rappelée au point 42 ci-dessus afin d’établir si le prêt reçu par HKL-Bussiliikenne était susceptible de constituer une mesure d’aide ne saurait prendre en considération un avantage découlant de ses liens avec la requérante.

67      Dès lors, en l’espèce, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la Commission aurait irrégulièrement omis de tenir compte, pour l’examen du critère du créancier privé, d’une part, de ses prérogatives liées au droit d’imposition et de son affiliation à un fonds de garantie des municipalités et, d’autre part, de la protection contre la faillite dont bénéficiait HKL-Bussiliikenne en tant qu’entreprise municipale.

68      Partant, les troisième et quatrième sous-griefs doivent être écartés comme étant non fondés, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la Commission.

3)      Sur le cinquième sous-grief, relatif au report de l’échéance de remboursement

69      Au considérant 109 de la décision attaquée, la Commission a estimé que le report de l’échéance de remboursement du crédit d’équipement de 2002 de huit ans au total, décidé le 1er octobre 2007 en faveur de l’ancienne HelB, aurait dû être assorti d’une prime de risque supplémentaire afin de tenir compte du fait qu’un tel report augmentait le risque de non-remboursement dudit crédit.

70      La requérante estime que rien ne permettait de considérer, en 2007, qu’il n’aurait pas été opportun de prolonger le délai de remboursement du crédit d’équipement de 2002. Par ailleurs, elle indique que, dans le contexte de la situation du marché de transport par autobus, la situation économique délicate de l’ancienne HelB n’était pas atypique au point qu’un créancier privé aurait, en 2007, exigé une révision spécifique de la prime de risque propre à l’entreprise à l’occasion de la modification de l’échéancier de paiement, et ce d’autant plus que, durant l’année 2007, les taux avaient augmenté.

71      La Commission considère que les arguments présentés par la requérante sont ambigus et, en tout état de cause, ne sont pas fondés.

72      En premier lieu, contrairement à ce que semble soutenir la requérante, il ressort du point 69 ci-dessus que la Commission ne critique pas l’opportunité de la décision de la requérante de prolonger le délai de remboursement du crédit d’équipement de 2002, mais uniquement le fait que cette décision n’a été assortie d’aucune prime supplémentaire malgré les risques qu’elle comportait.

73      En deuxième lieu, la requérante soutient, en substance et ainsi que cela a été précisé lors de l’audience, que l’accroissement du risque de non-remboursement du crédit d’équipement de 2002 qu’emporterait le report de remboursement dudit crédit serait pris en compte dans l’augmentation, en 2007, du taux Euribor.

74      À cet égard, indépendamment du caractère non étayé de cet argument, il convient de relever que le taux Euribor est le taux moyen du marché interbancaire européen. Il s’agit d’un taux plancher, qui concerne donc tout débiteur, indépendamment de sa situation financière. Ce taux peut être augmenté d’une prime correspondant au risque de l’opération envisagée. Dès lors, compte tenu du risque de non-remboursement que comportait le report de remboursement du crédit d’équipement de 2002, ce qui n’est pas contesté par la requérante, il ne paraît pas manifestement erroné de considérer qu’un créancier privé se trouvant dans une situation la plus proche possible de la requérante aurait assorti ledit report d’une prime supplémentaire reflétant ce risque, et ce quand bien même la tendance ascendante du taux Euribor lui garantissait une augmentation des intérêts perçus.

75      En troisième lieu, la requérante soutient que, ainsi que cela ressortirait de différents documents transmis à la Commission lors de la procédure formelle d’examen, la situation économique délicate de l’ancienne HelB n’était pas atypique. Même à supposer une telle allégation établie, celle-ci est sans incidence dans le cadre de l’application du critère du créancier privé.

76      Partant, le cinquième sous-grief doit être écarté comme non fondé, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur son caractère prétendument ambigu.

77      Il résulte de l’ensemble des raisonnements qui précèdent que le deuxième grief doit être écarté dans son ensemble.

c)      Sur le troisième grief, relatif à la qualification d’« aide existante »

78      La requérante fait valoir que la Commission a erronément considéré que le crédit d’équipement de 2002 ne pouvait pas être qualifié d’aide existante. La Commission aurait, dans le passé, constaté que la protection contre la faillite dont bénéficiaient tous les établissements publics municipaux à caractère commercial relevait d’un régime d’aides existant. Or, un régime d’aides inclurait toutes les mesures d’aides individuelles octroyées dans le cadre dudit régime et aux conditions définies par celui-ci, telles que le crédit d’équipement de 2002. La requérante ajoute que la Commission aurait, par cette erreur, également violé le principe de protection de la confiance légitime.

79      La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas suffisamment précis et que, en tout état de cause, ils ne sont pas fondés.

80      Au considérant 84 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que le crédit d’équipement de 2002 avait été octroyé le 6 mai 2002, soit plus de sept ans après l’adhésion de la République de Finlande à l’Union. Elle a donc conclu qu’il ne s’agissait pas d’une aide existante.

81      À cet égard, constitue une « aide existante », sans préjudice des dispositions de l’acte d’adhésion de l’État membre concerné, toute aide existant avant l’entrée en vigueur du traité dans cet État membre, c’est-à-dire les régimes d’aides et les aides individuelles mis à exécution avant, et toujours applicables après, ladite entrée en vigueur (voir, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2013, P, C‑6/12, EU:C:2013:525, point 42).

82      Par ailleurs, il ressort de l’article 1er, sous d), du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), qu’un « régime d’aides » s’entend de toute disposition sur la base de laquelle, sans qu’il soit besoin de mesures d’application supplémentaires, des aides peuvent être octroyées individuellement à des entreprises, définies d’une manière générale et abstraite dans ladite disposition, et de toute disposition sur la base de laquelle une aide non liée à un projet spécifique peut être octroyée à une ou plusieurs entreprises pour une période indéterminée ou pour un montant indéterminé.

83      En l’occurrence, il est constant que la protection contre la faillite dont bénéficiaient les établissements publics municipaux à caractère commercial finlandais relevait d’un régime d’aides existant (voir point 60 ci-dessus) et que ce régime comprenait également l’exonération de l’impôt sur les sociétés, l’exonération de l’impôt sur la fortune et sur le capital ainsi que le remboursement de la TVA. Cependant, toute mesure ultérieure concernant un établissement public municipal ne peut relever de ce régime d’aides existant. Or, les arguments de la requérante et de la République de Finlande ne démontrent aucunement que le crédit d’équipement de 2002 relèverait de ce régime d’aides existant ou constituerait la mise en œuvre de la protection contre la faillite dont bénéficiaient les établissements publics municipaux.

84      Premièrement, le crédit d’équipement de 2002 ne constitue pas la mise en œuvre de la protection contre la faillite dont bénéficiaient les établissements publics municipaux à caractère commercial. En effet, un crédit d’équipement vise à permettre à son bénéficiaire d’acquérir de nouveaux biens et non à lui permettre de rembourser des dettes antérieures dans une situation où, à défaut, il serait confronté à un risque de faillite.

85      Deuxièmement, il convient de constater que le crédit d’équipement de 2002 ne fait nullement partie des mesures qui composent le régime d’aides existant visé au point 83 ci-dessus. Plus particulièrement, une protection contre la faillite est une promesse unilatérale d’aide en cas de défaut de paiement et ne consiste donc pas en l’octroi d’un crédit.

86      Troisièmement, contrairement à ce que soutient la République de Finlande, il ne ressort pas de la communication de la Commission sur l’application des articles [107] et [108 TFUE] aux aides d’État sous forme de garanties (JO 2008, C 155, p. 10) – et plus précisément du passage selon lequel « constituent également une aide sous forme de garantie les conditions de crédit plus favorables obtenues par les entreprises dont la forme juridique exclut la possibilité d’une procédure de faillite ou d’insolvabilité ou prévoit explicitement une garantie de l’État ou une couverture des pertes par l’État » – que les conditions de crédit plus favorables obtenues par une entreprise qui bénéficierait d’une protection contre la faillite consistent en une mise en œuvre d’un régime d’aides sous forme de garantie. Il en ressort uniquement que les conditions de crédit plus favorables, comme la protection contre la faillite via une garantie illimitée, constituent une aide sous forme de garantie.

87      Il résulte de ce qui précède que le crédit d’équipement de 2002 ne relève pas du régime d’aides existant visé au point 83 ci-dessus, mais constitue une aide d’État nouvelle.

88      Par conséquent, c’est à juste titre que la Commission a conclu que le crédit d’équipement de 2002 constituait une aide nouvelle, de sorte qu’il n’est nécessaire de se prononcer ni à ce stade, ni lors de l’examen du quatrième moyen, tiré d’une violation des principes généraux des droits de l’Union, sur l’argument de la requérante tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime résultant de cette prétendue erreur.

89      Partant, le troisième grief doit être écarté comme étant non fondé.

d)      Sur le quatrième grief, relatif à la décision dispensant l’ancienne HelB de l’obligation de remboursement

90      La requérante conteste la conclusion de la Commission selon laquelle le fait que l’ancienne HelB a bénéficié en 2016 d’une dispense de remboursement du montant restant dû pour le crédit d’équipement de 2002 constituait une aide d’État. Elle considère également que cette conclusion n’est pas suffisamment motivée. Par ailleurs, elle reproche à la Commission de ne pas avoir adopté une décision d’extension de la procédure préalablement à l’examen de la décision de lever l’obligation de remboursement. La Commission n’aurait, en outre, pas laissé la possibilité à la République de Finlande de s’exprimer sur cette question au cours de la procédure formelle d’examen, en violation de l’article 4, paragraphe 3, TUE. Enfin, la requérante considère que rien ne justifie que la nouvelle HelB soit tenue au remboursement du montant correspondant à la dispense de remboursement du restant du principal du crédit d’équipement de 2002, dès lors que celle-ci a été accordée à l’ancienne HelB postérieurement à la cession de son activité.

91      La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas fondés.

92      À titre liminaire, il convient de relever que l’argument de la requérante par lequel elle conteste la décision de la Commission d’étendre à la nouvelle HelB la récupération du montant correspondant à la dispense de remboursement du restant du principal du crédit d’équipement de 2002 accordée à l’ancienne HelB après la cession de son activité se rattache au troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation quant à l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB et sera, dès lors, examiné dans le cadre de celui-ci.

93      Au considérant 115 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que, après la vente de son activité à la nouvelle HelB, l’ancienne HelB avait bénéficié d’une dispense de remboursement du montant restant du principal du crédit d’équipement de 2002. Elle a considéré, au considérant 118 de cette même décision, que l’aide d’État que constituait le crédit d’équipement de 2002 comprenait le restant du principal du crédit non remboursé sur le montant de 10 700 000 euros.

94      En premier lieu, en ce qui concerne le prétendu défaut de motivation, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteure de l’acte incriminé, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 25 juillet 2018, Commission/Espagne e.a., C‑128/16 P, EU:C:2018:591, point 82 et jurisprudence citée).

95      En l’espèce, force est de constater que la motivation contenue au considérant 115 de la décision attaquée, quand bien même elle est succincte, permet de comprendre que la dispense de remboursement du montant restant dû du principal du crédit d’équipement de 2002 présente un avantage pour l’ancienne HelB qui doit être pris en considération dans le cadre du calcul du montant de l’aide d’État que comporte ce crédit.

96      En second lieu, la dispense de remboursement du montant restant dû du principal du crédit d’équipement de 2002 et ledit crédit ne constituent pas deux mesures différentes. En effet, il n’existe qu’un seul crédit. Ladite dispense – à propos de laquelle la République de Finlande a, contrairement à ce que fait valoir la requérante, pu présenter ses observations lors de la procédure formelle d’examen, ainsi que cela ressort du dossier – fait partie intégrante dudit crédit. C’est d’ailleurs uniquement aux fins de la détermination du montant de l’aide que comportait le crédit d’équipement de 2002 que la Commission a pris en considération la dispense de remboursement accordée à l’ancienne HelB, et non aux fins de son appréciation de l’existence d’une aide et de la comptabilité de celle-ci avec le marché intérieur. Il s’ensuit que la requérante n’est pas fondée à reprocher à la Commission d’avoir pris en compte la dispense de remboursement aux fins de la détermination du montant de l’aide, puisque le crédit d’équipement de 2002 – qui seul devait être mentionné dans la décision d’ouverture – a été octroyé à l’ancienne HelB lorsqu’elle exerçait encore des activités économiques, ce qui est constant.

97      Partant, il y a lieu de rejeter le quatrième grief comme étant non fondé et, par conséquent, la première branche dans son intégralité.

2.      Sur la deuxième branche, relative au crédit d’exploitation de 2005

98      Dans la décision attaquée, aux considérants 120 à 123, la Commission a considéré que le crédit d’exploitation de 2005 était un instrument de quasi-fonds propres et qu’il devait être qualifié de mesure nouvelle. Aux considérants 127 à 129, la Commission a constaté que la requérante n’avait procédé à aucune évaluation ex ante du crédit d’exploitation de 2005, contrairement à ce qu’aurait fait un créancier rationnel sur le marché. Aux considérants 135 à 142, en l’absence de données de marché spécifiques à l’opération et de points de référence appropriés, la Commission a apprécié la conformité au marché du crédit d’exploitation de 2005 au regard de la communication sur les taux de référence de 1997. Elle a constaté que ledit crédit avait été octroyé dans une situation de risque particulier et que le taux de référence plancher devait être majoré d’une prime d’au moins 400 points. Elle a indiqué que le taux de référence plancher sous-estimait le risque associé à l’octroi du crédit d’exploitation de 2005 dans la mesure où il reflétait les taux moyens sur des crédits ordinaires et non sur des instruments de quasi-fonds propres comme en l’espèce. Par conséquent, elle a considéré que le taux d’intérêt du crédit d’exploitation de 2005 était inférieur au taux du marché en 2005, lorsque le « crédit de démarrage » a été converti, et au taux de marché en 2006, lorsque les dettes de STA ont été converties. Sur la base de ces éléments, la Commission a conclu que le crédit d’exploitation de 2005 n’avait pas été octroyé à des conditions conformes aux conditions du marché et que la requérante n’avait pas agi comme un créancier sur le marché, de sorte que le crédit d’exploitation de 2005 avait procuré un avantage économique indu à l’ancienne HelB. Au considérant 143, s’agissant du montant de l’aide d’État, la Commission a indiqué qu’il correspondait à la différence entre les intérêts dus calculés sur la base des taux du marché susmentionnés et les intérêts réellement payés, à savoir 0 euro. Le montant de l’aide d’État ainsi calculé s’élève à 20 241 255 euros.

99      La requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur en constatant que le crédit d’exploitation de 2005 octroyé à l’ancienne HelB au moment de la reprise de l’activité de HKL-Bussiliikenne comportait un élément d’aide d’État et invoque cinq griefs.

a)      Sur le premier grief, relatif à la qualification d’aide existante

100    La requérante soutient, en substance, que le crédit d’exploitation de 2005 était une aide existante dans la mesure où il s’agissait d’une simple conversion de dettes existantes, à savoir le « crédit de démarrage » de HKL-Bussiliikenne et les dettes de STA (voir point 13 ci-dessus), sans nouveau financement. Selon elle, il conviendrait également de tenir compte du fait que le « crédit de démarrage » est une aide octroyée avant l’adhésion de la République de Finlande à l’Union.

101    La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas fondés.

102    Il ressort de l’article 1er, sous c), du règlement 2015/1589 que la modification d’une aide existante doit être considérée comme une aide nouvelle soumise à l’obligation de notification (voir, par analogie, arrêt du 9 août 1994, Namur-Les assurances du crédit, C‑44/93, EU:C:1994:311, point 13 et jurisprudence citée). Il est indifférent à cet égard que la qualification d’aide existante découle du fait que l’aide existait avant l’adhésion à l’Union de l’État membre qui en est à l’origine ou résulte de son autorisation préalable par la Commission (arrêt du 26 février 2019, Athletic Club/Commission, T‑679/16, non publié, EU:T:2019:112, point 96).

103    L’article 4 du règlement (CE) no 794/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, concernant la mise en œuvre du règlement 2015/1589 (JO 2004, L 140, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2282 de la Commission, du 27 novembre 2015 (JO 2015, L 325, p. 1), prévoit, à son paragraphe 1, première phrase, que, aux fins de l’article 1er, sous c), du règlement 2015/1589, « on entend par modification d’une aide existante tout changement autre que les modifications de caractère purement formel ou administratif qui ne sont pas de nature à influencer l’évaluation de la compatibilité de la mesure d’aide avec le marché [intérieur] ».

104    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que c’est par référence aux dispositions qui la prévoient, à leurs modalités et à leurs limites qu’une aide peut être qualifiée de nouveauté ou de modification du régime existant (voir arrêt du 16 décembre 2010, Pays-Bas et NOS/Commission, T‑231/06 et T‑237/06, EU:T:2010:525, point 180 et jurisprudence citée).

105    C’est à la lumière de ces principes qu’il faut examiner si les modifications apportées par le crédit d’exploitation de 2005 aux conditions auxquelles étaient initialement soumises les dettes converties font dudit crédit, ainsi que le soutient la Commission, une aide nouvelle.

106    Au considérant 121 de la décision attaquée, la Commission a identifié quatre modifications apportées aux conditions auxquelles les dettes converties étaient initialement soumises. Premièrement, l’ancienne HelB ne devait rembourser le crédit d’exploitation de 2005 que pour autant qu’elle générait des bénéfices suffisants tandis que les dettes converties, avant leur conversion, étaient dues quelle que soit la situation financière des entités bénéficiaires. Deuxièmement, le crédit d’exploitation de 2005 était subordonné à toutes les autres dettes tandis que les dettes converties ne l’étaient pas. Troisièmement, la durée du crédit d’exploitation de 2005 était illimitée tandis que le « crédit de démarrage » avait été accordé pour une durée de 25 ans. Enfin, quatrièmement, le taux d’intérêt du crédit d’exploitation de 2005 (6 %) était plus faible que le taux d’intérêt initial du « crédit de démarrage » (9 %).

107    Il convient de relever que la requérante ne conteste pas les appréciations de la Commission sur les modifications apportées aux conditions auxquelles les dettes converties avaient été initialement octroyées, à l’exception toutefois de celle relative au taux d’intérêt.

108    Or, force est de constater que les modifications apportées aux conditions auxquelles les dettes converties étaient initialement soumises, résumées au point 106 ci-dessus, ne consistent pas en des modifications à caractère purement formel ou administratif et que celles-ci peuvent être de nature à influencer l’évaluation de la compatibilité de la mesure d’aide avec le marché intérieur. En effet, en raison de ces modifications, le crédit d’exploitation de 2005 se distingue substantiellement du régime auquel les dettes étaient initialement soumises et consiste, à présent, en un instrument de quasi-fonds propres. La requérante ne conteste d’ailleurs pas que le crédit d’exploitation de 2005 consiste en un tel instrument.

109    Le fait que la Commission aurait prétendument commis une erreur en considérant que le taux d’intérêt assorti au crédit d’exploitation de 2005 était inférieur au taux d’intérêt auquel était soumis le « crédit de démarrage » est sans pertinence. Les autres modifications apportées aux conditions sous lesquelles étaient initialement soumises les dettes converties – à savoir que le remboursement dépendait à présent de la santé financière du débiteur, qu’il s’agissait d’un crédit subordonné et que, contrairement à ce qui était le cas pour le « crédit de démarrage », la durée de celui-ci était illimitée – ne peuvent s’analyser comme de simples modifications purement formelles ou administratives. De telles conditions peuvent être de nature à influencer l’évaluation de la compatibilité de la mesure d’aide avec le marché et démontrent, à elles seules, que le crédit d’exploitations de 2005 est une nouvelle mesure.

110    S’agissant des arguments de la requérante selon lesquels le crédit d’exploitation de 2005 doit être considéré comme une aide existante, à tout le moins en partie, aux motifs, d’une part, qu’il n’y a pas eu de financement nouveau et, d’autre part, que le « crédit de démarrage » a été octroyé avant l’adhésion de la République de Finlande à l’Union, il suffit de relever que, compte tenu du cadre juridique ainsi que de la jurisprudence rappelés aux points 102 à 104 ci-dessus, ces éléments sont sans pertinence afin de déterminer si le crédit d’exploitation de 2005 constitue une aide nouvelle.

111    Partant, il y a lieu de rejeter le premier grief comme étant non fondé.

b)      Sur le deuxième grief, relatif à la proposition du conseil municipal

112    La requérante reproche à la Commission de ne pas avoir pris en compte, dans son appréciation de la conformité au marché du crédit d’exploitation de 2005, la proposition du conseil municipal à laquelle s’est référée la République de Finlande lors de la procédure formelle d’examen, alors que ce document aurait été susceptible d’influencer de manière non négligeable le processus décisionnel d’un créancier privé.

113    La Commission considère, en substance, que les arguments de la requérante sont irrecevables, dès lors que la proposition du conseil municipal n’est pas jointe à la requête. En tout état de cause, les arguments de la requérante ne seraient pas fondés, ce document ne mentionnant pas le crédit d’exploitation de 2005.

114    Ainsi que cela est rappelé au point 46 ci-dessus, la Commission doit prendre en compte tout élément pertinent lui permettant de déterminer si l’entreprise bénéficiaire n’aurait manifestement pas obtenu des facilités comparables d’un créancier privé dans des conditions normales de marché. Est considérée comme pertinente toute information susceptible d’influencer de manière non négligeable le processus décisionnel d’un tel créancier privé normalement prudent et diligent (voir arrêt du 26 mars 2020, Larko/Commission, C‑244/18 P, EU:C:2020:238, points 29 et 30 et jurisprudence citée).

115    Au considérant 129 de la décision attaquée, la Commission a considéré que la proposition du conseil municipal ne fournissait aucune justification quant à la conformité au marché du crédit d’exploitation de 2005.

116    En l’espèce, il y a lieu de constater que la proposition du conseil municipal, annexée à la réplique, ne mentionne pas expressément le crédit d’exploitation de 2005 et ne semble pas comporter d’analyse portant sur la rationalité économique de la décision de convertir des dettes existantes (le « crédit de démarrage » de HKL-Bussiliikenne et les dettes de STA) en un crédit d’exploitation et sur les conditions de ce crédit. Ainsi que l’indique la Commission, ce document se limite à examiner l’opportunité de procéder à la concentration entre HKL-Bussiliikenne et STA ainsi que la forme que pourrait prendre cette concentration. En outre, si cette fusion y est certes envisagée afin de garantir une meilleure rentabilité de ces deux entreprises dont les résultats étaient alors négatifs, il reste que cette proposition du conseil municipal reconnaît que cette amélioration future de rentabilité serait notamment tributaire des risques commerciaux. En tout état de cause, il ne ressort pas de ce document qu’il aurait pu être raisonnablement envisagé, sur la base de celui-ci, que l’entreprise qui résulterait de la fusion de ces entreprises serait en mesure, en raison d’une éventuelle amélioration de rentabilité, de respecter les obligations résultant du crédit d’exploitation de 2005.

117    Dès lors, la proposition du conseil municipal n’aurait pas été susceptible d’influencer – ou, tout au plus, de manière négligeable – le processus décisionnel d’un créancier privé comparable à la requérante envisageant d’octroyer un crédit d’exploitation à des conditions comparables à celles dont était assorti le crédit d’exploitation de 2005 et, par conséquent, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en n’accordant pas d’importance à ladite proposition.

118    Enfin, dans le cadre du présent grief, la requérante soutient également que le fait que la proposition du conseil municipal n’examine pas si la liquidation de HKL-Bussiliikenne et de STA aurait été une option préférable ne pourrait constituer une circonstance aggravante dans le cadre de l’appréciation du critère du créancier privé, puisqu’aucun financement supplémentaire n’aurait été envisagé en l’espèce. À cet égard, il suffit de relever qu’il ne ressort pas de la décision attaquée que la Commission a pris en considération, dans son appréciation, le fait que la requérante n’avait pas envisagé, préalablement à l’octroi du crédit d’exploitation de 2005, la possibilité de la mise en liquidation de ces entreprises. Dès lors, l’argument de la requérante manque en fait.

119    Partant, il y a lieu de rejeter le deuxième grief comme étant non fondé, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité de l’annexe C.1 qui contient la proposition du conseil municipal.

c)      Sur le troisième grief, relatif aux exemples de crédits d’exploitation de 2004 et 2006 communiqués par la République de Finlande

120    La requérante avance que la Commission a écarté à tort les exemples de crédits d’exploitation octroyés en 2004 et 2006 (ci-après les « exemples de crédits d’exploitation ») que lui avait communiqués la République de Finlande, pour lesquels le taux d’intérêt se situait entre 4,7 % et 7,539 %.

121    La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas fondés.

122    Au considérant 134 de la décision attaquée, la Commission a considéré que les exemples communiqués par la République de Finlande n’étaient pas suffisamment comparables à l’intervention de l’État en cause. Premièrement, il n’était pas précisé si les créanciers étaient similaires à la requérante, c’est-à-dire s’ils étaient des sociétés mères d’un groupe avec une exposition économique antérieure à leurs débiteurs, à la fois en tant que créanciers et en tant qu’actionnaires. Deuxièmement, les bénéficiaires étaient présents sur des marchés différents de celui de l’ancienne HelB. Troisièmement, les bénéficiaires étaient des entreprises en place alors que l’ancienne HelB était une société nouvellement établie. Quatrièmement, les situations financières des débiteurs n’étaient pas connues et ceux-ci n’étaient donc peut-être pas dans une situation comparable à celle de l’ancienne HelB.

123    En premier lieu, il convient d’écarter l’argument selon lequel la Commission aurait fait peser sur la République de Finlande la charge d’une preuve exagérément élevée, puisqu’il serait impossible de trouver des exemples de crédits d’exploitation identiques au cas d’espèce.

124    Il ne ressort pas de la décision attaquée que, afin que des exemples de crédits d’exploitation puissent être pris en compte dans son appréciation en tant que points de référence appropriés, la Commission ait exigé une identité parfaite entre lesdits exemples et la situation analysée.

125    D’une part, au considérant 133 de la décision attaquée, la Commission a précisé qu’un point de référence approprié doit être « suffisamment comparable » à l’intervention de l’État.

126    D’autre part, les critères de comparaison résumés au point 122 ci-dessus doivent être considérés dans leur ensemble et ne sont pas cumulatifs. Ils ne doivent donc pas être obligatoirement tous remplis pour qu’un exemple de crédit d’exploitation soit considéré comme un point de référence approprié. Au considérant 134 de la décision attaquée, la Commission indique d’ailleurs que certains de ces critères, à savoir celui portant sur les marchés en cause et celui relatif à la situation des bénéficiaires, sont plus importants que les autres.

127    Dès lors, contrairement à ce que prétend la requérante, la Commission n’a pas exigé une preuve impossible.

128    En second lieu, il convient également de rejeter l’argument selon lequel la Commission aurait omis de tenir compte du fait que les prédécesseurs de l’ancienne HelB avaient une activité bien établie lorsqu’elle a considéré que les exemples de crédits d’exploitation concernaient des entreprises établies alors que l’ancienne HelB venait juste d’être créée.

129    À cet égard, il est constant que l’ancienne HelB a succédé à deux sociétés, à savoir HKL-Bussiliikenne et STA, ce qui a été expressément pris en compte par la Commission au considérant 107 de la décision attaquée, auquel le considérant 134 de ladite décision opère un renvoi. Par ailleurs, il n’est pas contesté que l’ancienne HelB n’avait pas son propre bilan financier en 2005, lors de l’octroi du crédit d’exploitation de 2005 (considérant 107 de la décision attaquée ; voir également considérant 137 de la décision attaquée). Or, cet élément permet de considérer que l’ancienne HelB présentait un risque supplémentaire pour un créancier, ses résultats financiers futurs étant moins prévisibles que ceux d’une société ayant son propre bilan.

130    En tout état de cause, par cet argument, la requérante ne conteste qu’une des quatre différences fondant la conclusion de la Commission selon laquelle les exemples de crédits d’exploitation qui lui ont été communiqués ne sont pas des points de référence appropriés. Or, quand bien même la Commission aurait accordé trop d’importance au fait que l’ancienne HelB ne disposait pas de son propre bilan lors de l’octroi du crédit d’exploitation de 2005, le raisonnement de la Commission, fondé également sur d’autres éléments non cumulatifs qui, pour certains, revêtent une importance prépondérante dans son appréciation, ne saurait être mis en cause.

131    Partant, il y a lieu de rejeter le troisième grief comme étant non fondé.

d)      Sur le quatrième grief, relatif aux crédits accordés par les banques privées

132    La requérante reproche à la Commission d’avoir constaté qu’il était impossible d’identifier des preuves indiquant qu’une banque privée aurait été disposée à accorder un prêt subordonné aux mêmes conditions que celles prévues pour le crédit d’exploitation de 2005. Selon elle, les crédits accordés par les banques privées ne sauraient être un critère de référence approprié aux fins de l’appréciation de la conformité au marché des conditions du crédit d’exploitation de 2005, puisque ce crédit ne contenait pas de financement nouveau, mais consistait en une réorganisation d’expositions octroyées antérieurement.

133    La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas fondés.

134    Au considérant 139 de la décision attaquée, la Commission a indiqué ne pas avoir trouvé de preuve et estimé peu probable qu’une banque privée aurait accepté d’octroyer le crédit d’exploitation de 2005 aux mêmes conditions que celles prévues par la requérante. Elle a relevé que, en vertu de la communication sur les taux de référence de 1997, le fait qu’aucune banque privée n’aurait accepté d’octroyer le prêt en question était un élément supplémentaire pouvant être pris en compte afin de déterminer la conformité du taux d’intérêt du crédit d’exploitation de 2005 avec le taux d’intérêt du marché. Cependant, en l’absence de règles claires sur le poids à accorder à cet élément dans cette appréciation, la Commission a décidé, par souci de prudence, de ne pas le prendre en considération.

135    Dès lors, en réponse à l’argument de la requérante, il suffit de relever que la Commission n’a, en l’espèce, tiré aucune conséquence de son constat selon lequel aucune banque privée n’aurait vraisemblablement octroyé un crédit d’exploitation aux mêmes conditions que celui accordé par la requérante. Par conséquent, quand bien même la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en prenant pour comparaison le comportement de banques privées, il reste que celle-ci n’emporterait aucune conséquence sur la légalité de la décision attaquée.

136    Partant, il y a lieu de rejeter le quatrième grief comme étant inopérant.

e)      Sur le cinquième grief, relatif à la portée de l’aide et au calcul de son montant

137    La requérante considère, en substance, que la Commission a commis une erreur quant à la portée de l’aide et remet en cause le calcul effectué par la Commission afin de déterminer le montant de l’aide que comportait le crédit d’exploitation de 2005. Selon elle, la Commission aurait dû comparer le taux du marché identifié dans la décision attaquée au taux d’intérêt de 6 % appliqué au crédit d’exploitation de 2005 et pas, comme elle l’a fait, aux intérêts réellement payés. Ce faisant, la Commission aurait dû conclure que le montant de l’aide s’élevait à 3 700 000 euros.

138    La Commission considère que les arguments de la requérante ne sont pas fondés.

139    Au considérant 143 de la décision attaquée, la Commission a comparé les taux de marché qu’elle avait identifiés – à savoir, d’une part, 8,08 % sur le « crédit de démarrage » entre le 1er janvier 2005 et le 11 décembre 2015 et, d’autre part, 7,70 % sur les dettes de STA entre le 18 avril 2006 et le 11 décembre 2015 – avec les intérêts réellement payés, à savoir 0 euro. Sur la base de ce calcul, la Commission a considéré que le montant de l’aide s’élevait à 20 241 255 euros.

140    L’argument de la requérante tendant à remettre en cause cette conclusion est fondé sur le fait que les intérêts non payés du crédit d’exploitation de 2005 ont été capitalisés et se sont ajoutés au principal dudit crédit.

141    À cet égard, il ressort du considérant 32 de la décision attaquée, non contesté par la requérante, que ni le principal ni les intérêts du crédit d’exploitation de 2005 n’ont été remboursés et que ledit crédit a été converti en fonds propres de l’ancienne HelB après l’ouverture de la procédure formelle d’examen, de sorte qu’il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte du fait que les intérêts non payés avaient été capitalisés.

142    Par conséquent, c’est à juste titre que la Commission a considéré que, pour déterminer le montant de l’aide que comprenait le crédit d’exploitation de 2005, il convenait de comparer, d’une part, les intérêts dus, calculés sur la base des taux d’intérêt conformes au marché et, d’autre part, les intérêts réellement payés, soit 0 euro.

143    Partant, il y a lieu de rejeter le cinquième grief et, par conséquent, la deuxième branche dans son intégralité.

3.      Sur la troisième branche, relative au crédit d’exploitation de 2011

144    Dans la décision attaquée, la Commission a constaté que le crédit d’exploitation de 2011 devait être considéré comme un investissement en fonds propres. Aux considérants 146 et 147, la Commission a relevé que, malgré la situation financière médiocre de l’ancienne HelB et contrairement au comportement qu’aurait adopté un investisseur privé, la requérante n’avait procédé à aucune analyse du rendement des investissements ni à aucun autre type d’analyse ex ante afin d’estimer le résultat financier de l’investissement avant de prendre la décision d’octroyer le crédit d’exploitation de 2011 à l’ancienne HelB. Aux considérants 150 à 163, après une analyse du flux de trésorerie futur attendu grâce au prêt, actualisé selon un rendement exigé, la Commission a considéré qu’un investisseur rationnel n’aurait pas octroyé le crédit d’exploitation de 2011 à l’ancienne HelB. Aux considérants 164 à 175, la Commission a pris en compte les expositions économiques antérieures de la requérante dans l’activité de l’ancienne HelB. Elle a relevé que la requérante n’avait pas comparé le rendement du crédit d’exploitation de 2011 avec le rendement d’autres scénarios, contrairement à ce qu’aurait fait un investisseur rationnel compte tenu des expositions économiques antérieures. La Commission a donc procédé à sa propre appréciation et a constaté que le crédit d’exploitation de 2011 n’aurait pas constitué la meilleure option pour la requérante, puisqu’elle aurait pu s’attendre à un rendement plus élevé si elle avait opté pour la vente de l’activité de l’ancienne HelB, de sorte que ledit crédit n’était pas conforme aux conditions du marché. La Commission a ajouté que, même à supposer que l’octroi du crédit d’exploitation de 2011 ait été la meilleure option pour la requérante, ledit crédit n’aurait pas été octroyé aux conditions du marché, le taux d’intérêt du marché étant nettement supérieur au taux d’intérêt effectivement appliqué. Enfin, aux considérants 176 et 177, la Commission a conclu que le crédit d’exploitation de 2011 avait conféré un avantage économique indu à l’ancienne HelB et que cet avantage équivalait au montant total du prêt, soit 5,8 millions d’euros.

145    La requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur en constatant que le crédit d’exploitation de 2011 octroyé à l’ancienne HelB constituait une aide d’État.

146    Cette branche comporte, en substance, quatre griefs. Premièrement, la Commission aurait omis de prendre en considération certaines données dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé. Deuxièmement, la décision attaquée contiendrait une contradiction, la Commission se fondant, au sein de son appréciation du critère de l’investisseur privé, sur une estimation du prix de l’activité de l’ancienne HelB présentée par la République de Finlande, qu’elle considère pourtant viciée dans le cadre de son examen de la continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB. Troisièmement, la Commission aurait conclu à tort que le taux appliqué au crédit d’exploitation de 2011 n’était pas conforme au taux du marché. Quatrièmement, la Commission aurait commis un détournement de pouvoir.

147    À titre liminaire, il convient de relever que la Commission a appréhendé le crédit d’exploitation de 2011 sous le critère de l’investisseur privé, ce qui n’est pas contesté par la requérante.

148    L’application du critère de l’investisseur privé vise à déterminer si l’avantage économique accordé, sous quelque forme que ce soit, au moyen de ressources de l’État à une entreprise est, en raison de ses effets, de nature à fausser ou à menacer de fausser la concurrence et à affecter les échanges entre États membres. En conséquence, il convient de vérifier non si un investisseur privé aurait agi exactement de la même manière que l’investisseur public, mais s’il aurait apporté, à des conditions similaires, un montant égal à celui apporté par l’investisseur public (voir arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 105 et jurisprudence citée).

149    Aux fins de l’appréciation de la question de savoir si la même mesure aurait été adoptée dans les conditions normales du marché par un investisseur privé se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle de l’État, seuls les bénéfices et les obligations liés à la situation de ce dernier en qualité d’actionnaire, à l’exclusion de ceux qui sont liés à sa qualité de puissance publique, sont à prendre en compte (arrêt du 5 juin 2012, Commission/EDF, C‑124/10 P, EU:C:2012:318, point 79).

150    Comme cela est le cas pour le critère du créancier privé, c’est sur la Commission que pèse la charge de prouver, en tenant compte, notamment, des informations fournies par l’État membre concerné, que les conditions d’application du principe de l’investisseur privé ne sont pas remplies, de sorte que l’intervention étatique en cause renferme un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 110 et jurisprudence citée). Sont seuls pertinents, aux fins de cette application du critère de l’investisseur privé, les éléments disponibles et les évolutions prévisibles au moment où la décision de procéder à l’investissement a été prise (voir arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 112 et jurisprudence citée).

151    Toujours à titre liminaire, il convient de relever que, ainsi que cela ressort du point 144 ci-dessus, la Commission a fondé sa conclusion selon laquelle un investisseur privé n’aurait pas octroyé le crédit d’exploitation de 2011 à l’ancienne HelB sur différents constats, à savoir l’absence d’évaluation préalable, l’analyse du flux de trésorerie futur attendu grâce au prêt et l’examen d’un scénario contrefactuel.

152    S’agissant de l’absence d’évaluation préalable, la Commission a constaté, au considérant 147 de la décision attaquée, que, malgré la situation financière médiocre de l’ancienne HelB, la requérante n’avait procédé à aucune analyse du rendement des investissements ni à aucun autre type d’analyse ex ante afin d’estimer le résultat financier de l’investissement avant de prendre la décision d’octroyer le crédit d’exploitation de 2011 à l’ancienne HelB. Elle a également constaté, au considérant 166 de la décision attaquée, que la requérante n’avait nullement comparé le rendement du crédit d’exploitation de 2011 avec le rendement d’autres scénarios possibles. La requérante ne remet en cause aucun de ces constats de la Commission.

153    Or, eu égard à la situation financière médiocre de l’ancienne HelB et aux conditions auxquelles le crédit d’exploitation de 2011 a été octroyé (voir point 16 ci-dessus), l’absence de toute évaluation préalable appropriée de la rentabilité ou de la rationalité économique de ce troisième crédit peut constituer un élément essentiel tendant à établir qu’un investisseur privé n’aurait pas apporté, à des conditions similaires, un montant égal à celui apporté par l’investisseur public (voir, en ce sens, arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 113).

154    C’est à la lumière de ces considérations liminaires qu’il convient d’apprécier les arguments de la requérante tendant à remettre en cause les autres appréciations fondant la conclusion de la Commission selon laquelle un investisseur privé n’aurait pas octroyé le crédit d’exploitation de 2011 à l’ancienne HelB.

a)      Sur le premier grief, tiré des lacunes dont serait entachée l’appréciation de la Commission portant sur le critère de l’investisseur privé

155    La requérante avance que la Commission a omis de prendre en considération certaines données dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé.

156    Le présent grief se divise, en substance, en quatre sous-griefs, tirés du fait que la Commission n’aurait pas accordé un poids suffisant, premièrement, aux mesures de restructuration et d’assainissement prises entre 2008 et 2010 (ci-après les « mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 »), deuxièmement, aux expositions économiques antérieures de la requérante dans l’activité de l’ancienne HelB, troisièmement, aux responsabilités sociales de la requérante et, quatrièmement, à l’image de marque de son groupe de sociétés.

157    Les troisième et quatrième sous-griefs seront examinés ensemble.

1)      Sur le premier sous-grief, relatif aux mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010

158    Aux considérants 156 et 157 de la décision attaquée, la Commission a examiné si un investisseur rationnel, conscient de la mauvaise situation financière et du mauvais bilan de l’ancienne HelB, aurait néanmoins estimé qu’il valait la peine d’examiner si un nouveau crédit d’exploitation pouvait rendre l’entreprise rentable. Pour ce faire, la Commission a pris en considération les mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 qui visaient à améliorer sa rentabilité. Elle a estimé que, avant de prendre la décision d’investissement en question, un tel investisseur aurait déjà eu connaissance des résultats financiers réels de ces mesures. Selon elle, il aurait constaté que, après la mise en œuvre de ces mesures, l’ancienne HelB non seulement n’était pas devenue rentable, mais avait en plus généré des pertes encore plus importantes qu’auparavant. La Commission a également noté que, un an plus tard, malgré l’obtention du crédit d’exploitation de 2011, l’ancienne HelB avait encore vu ses pertes augmenter, pour atteindre – 6,1 millions d’euros.

159    La requérante soutient que la Commission aurait commis des erreurs dans son appréciation des effets des mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 prises afin d’améliorer l’activité de l’ancienne HelB.

160    La Commission considère que l’argument de la requérante n’est pas fondé.

161    À cet égard, il importe de rappeler que le comportement de l’investisseur privé avec lequel doit être comparé celui de l’investisseur public n’est pas nécessairement celui de l’investisseur ordinaire plaçant des capitaux en vue de leur rentabilisation à plus ou moins court terme, mais doit, au moins, être celui d’un holding privé ou d’un groupe privé d’entreprises poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle, et être guidé par des perspectives de rentabilité à plus long terme (arrêts du 21 mars 1991, Italie/Commission, C‑305/89, EU:C:1991:142, point 20, et du 24 septembre 2008, Kahla/Thüringen Porzellan/Commission, T‑20/03, EU:T:2008:395, point 238). Ainsi, lorsque les apports de capitaux d’un investisseur public font abstraction de toute perspective de rentabilité, même à long terme, de tels apports doivent être considérés comme des aides au sens de l’article 107 TFUE et leur compatibilité avec le marché intérieur doit être appréciée au regard des seuls critères prévus par cette disposition (voir arrêt du 4 septembre 2014, SNCM et France/Corsica Ferries France, C‑533/12 P et C‑536/12 P, EU:C:2014:2142, point 39 et jurisprudence citée).

162    En particulier, la Cour a jugé qu’un associé privé pouvait raisonnablement apporter le capital nécessaire pour assurer la survie d’une entreprise qui connaissait des difficultés passagères, mais qui, le cas échéant, après une restructuration, serait en mesure de retrouver sa rentabilité (arrêts du 21 mars 1991, Italie/Commission, C‑303/88, EU:C:1991:136, points 21 et 22 ; du 18 décembre 2008, Componenta/Commission, T‑455/05, non publié, EU:T:2008:597, point 87, et du 28 janvier 2016, Slovénie/Commission, T‑507/12, non publié, EU:T:2016:35, point 221).

163    En l’occurrence, les mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 consistent en une réduction des coûts de l’entreprise, en une modification de la structure tarifaire, en une modification de la convention collective applicable, en une réduction des effectifs, en la fermeture d’un dépôt ainsi qu’en cinq projets de développement.

164    En premier lieu, la requérante fait valoir que la Commission aurait, dans son évaluation, adopté une approche à court terme des mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 alors qu’elle aurait dû, compte tenu des conditions du marché du transport par autobus et eu égard à ses explications, adopter une approche sur le long terme. Elle fait en particulier référence au fait que les contrats sur le marché des transports sont conclus pour une longue durée et sont assortis de conditions de prix fixes.

165    À cet égard, la requérante se contente d’invoquer les particularités contractuelles relatives au marché des transports sans établir de liens concrets entre celles-ci et les mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 ni prouver qu’elles empêchaient effectivement lesdites mesures de produire leurs effets sur la période examinée par la Commission. En outre, elle ne démontre pas non plus que, au moment où le crédit d’exploitation de 2011 a été octroyé, les effets des mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010, bien que devant se matérialiser sur le long terme, demeuraient prévisibles pour un investisseur privé, conformément à la jurisprudence rappelée au point 150 ci-dessus.

166    En deuxième lieu, la requérante indique que la République de Finlande avait transmis, au cours de la procédure formelle d’examen, aux pages 3 et 4 de ses observations du 12 août 2015 (annexe A.10), des éléments de preuve démontrant que les mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 avaient produit des résultats positifs sur le long terme et laissant présager que l’activité de l’ancienne HelB deviendrait rentable à partir de 2016. La requérante renvoie, en tant qu’élément de preuve, à la page 7 de l’annexe A.9, intitulée « Project Viima – Divestment of business operations of Helsingin Bussiliikenne Oy ; Confidential Information Memorandum ; Unique investment opportunity in growing public transportation ; April 2015 » (ci-après le « mémorandum d’avril 2015 »).

167    Certes, il ressort de la jurisprudence qu’il est possible pour l’entité publique concernée, lors de la procédure administrative, de produire des éléments de preuve complémentaires, qui sont constitués après l’adoption de la mesure, mais qui se fondent sur les éléments qui étaient disponibles et sur les évolutions qui étaient prévisibles au moment de cette adoption (arrêt du 25 juin 2015, SACE et Sace BT/Commission, T‑305/13, EU:T:2015:435, point 186).

168    Toutefois, premièrement, à la page 7 du mémorandum d’avril 2015, les experts ayant rédigé ce document se fondent sur un « programme d’amélioration des performances de l’entreprise lancé en 2013 » pour considérer qu’il est possible de présager une amélioration de la rentabilité de l’activité de l’ancienne HelB et que cette rentabilité est attendue pour 2016. Cette conclusion n’est donc pas fondée sur les mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010, et rien ne permet de considérer que le programme lancé en 2013, postérieur à l’adoption du crédit d’exploitation de 2011, était un élément disponible ou prévisible lors de l’octroi dudit crédit.

169    Deuxièmement, aux pages 3 et 4 de ses observations du 12 août 2015, auxquelles la requérante fait référence, la République de Finlande fait valoir, de manière vague, que les comptes annuels de l’ancienne HelB pour 2014 présentaient une prévision selon laquelle la rentabilité de l’ancienne HelB devait s’améliorer en 2016, et ce en raison de mesures d’assainissement coûteuses prises durant plusieurs années. Outre que les comptes annuels de l’ancienne HelB pour 2014 ne figurent pas au dossier, il n’est pas possible d’établir sur quelles mesures la République de Finlande se fonde et donc si celles-ci étaient disponibles ou prévisibles lors de l’octroi du crédit d’exploitation de 2011.

170    Dès lors, ni le mémorandum d’avril 2015 ni les observations de la République de Finlande du 12 août 2015 ne démontrent qu’un investisseur privé aurait octroyé le crédit d’exploitation de 2011 à l’ancienne HelB.

171    Enfin, en troisième lieu, la requérante soutient que les prévisions de la République de Finlande selon lesquelles l’activité de l’ancienne HelB deviendrait rentable en 2016 ont été confirmées, cette activité étant effectivement devenue rentable en 2016.

172    Toutefois, il n’est pas démontré que l’amélioration de la rentabilité de l’ancienne HelB résultait exclusivement des mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010. Or, en 2016, l’activité de l’ancienne HelB – qui avait entre-temps encore bénéficié du crédit d’exploitation de 2012 – avait été reprise par la nouvelle HelB et les dettes relatives aux mesures litigieuses avaient été laissées au passif de l’ancienne HelB. Les calculs de la requérante, présentés dans la réplique, tendant à démontrer que l’amélioration de la rentabilité de la nouvelle HelB ne découlait pas du fait que celle-ci n’avait pas repris les dettes liées aux mesures litigieuses, ne permettent aucunement d’établir que cette amélioration de rentabilité résulterait des mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010. En tout état de cause, quand bien même l’activité de la nouvelle HelB serait devenue rentable en 2016 en raison des mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010, la requérante est restée en défaut de démontrer que cet évènement était prévisible au moment de l’octroi du crédit d’exploitation de 2011.

173    Partant, le premier sous-grief doit être écarté comme étant non fondé.

2)      Sur le deuxième sous-grief, relatif aux expositions économiques antérieures

174    La requérante soutient que la Commission aurait dû prendre en compte, dans son examen du critère de l’investisseur privé, le fait qu’elle entendait protéger ses expositions économiques antérieures dans l’activité de l’ancienne HelB.

175    La Commission conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

176    À cet égard, premièrement, il ressort des considérants 164 à 172 de la décision attaquée que la Commission a pris en considération les expositions économiques antérieures de la requérante dans l’activité de l’ancienne HelB, lorsqu’elle a comparé le rendement attendu de l’investissement concerné au rendement attendu dans le scénario contrefactuel, à savoir la vente de l’activité de l’ancienne HelB. Toutefois, elle a considéré que le rendement escompté était plus élevé selon le scénario de vente que selon le scénario prévoyant l’octroi du crédit d’exploitation de 2011 et que, par conséquent, le crédit d’exploitation de 2011 n’était pas conforme au marché, même en tenant compte des expositions économiques antérieures de la requérante (voir considérant 172 de la décision attaquée). Dès lors, à supposer que, par son argument, la requérante se limite à contester l’absence de prise en compte par la Commission de ses expositions économiques antérieures dans l’activité de l’ancienne HelB, celui-ci procède d’une lecture erronée de la décision attaquée.

177    Deuxièmement, si la requérante entend en réalité faire valoir que la Commission n’aurait pas suffisamment pris en compte ses expositions économiques antérieures dans l’activité de l’ancienne HelB lors de son appréciation du critère de l’investisseur privé, cette allégation ne saurait prospérer au motif que la requérante ne procède à aucune démonstration concrète au soutien de celle-ci. En outre, ainsi que le constate la Commission au considérant 168 de la décision attaquée, malgré le fait que la requérante avait investi précédemment au moins 30,8 millions d’euros (à savoir le crédit de démarrage et le crédit d’équipement de 2002) dans l’activité de l’ancienne HelB, le capital de celle-ci s’appauvrissait chaque année (‑ 21,7 millions d’euros en 2010), de sorte que, dans ces conditions, il était peu probable qu’un actionnaire rationnel continue à financer sa filiale. En tout état de cause, il a été constaté que le crédit d’équipement de 2002 et le crédit d’exploitation de 2005 constituaient des aides d’État. Dès lors, conformément à la jurisprudence rappelée au point 65 ci-dessus, il convient de faire abstraction de ces expositions économiques antérieures dans le cadre de l’appréciation du critère de l’investisseur privé. Partant, bien qu’elle ait pris en considération ces crédits dans son examen du critère de l’investisseur privé (considérant 168 de la décision attaquée), il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas leur avoir accordé un poids suffisant dans l’appréciation de ce critère.

178    Au surplus, s’agissant de la décision C(2013) 6561 final de la Commission, du 9 octobre 2013, déclarant une concentration compatible avec le marché intérieur et avec le fonctionnement de l’accord EEE (JO 2015, C 25, p. 7, ci-après la « décision Olympic/Aegean Airlines II »), rendue en matière de concentration et invoquée par la requérante afin de démontrer qu’un associé privé a un intérêt à soutenir, par des injections de capitaux, une entreprise depuis longtemps déficitaire, celle-ci est sans pertinence. Outre que cette affaire relève du droit des concentrations et non du droit des aides d’État, il doit être rappelé que, selon une jurisprudence constante, le bénéficiaire d’une aide illégale ne peut utilement tirer argument de la pratique décisionnelle antérieure de la Commission, celle-ci ne pouvant affecter la validité d’une décision ultérieure (voir arrêt du 16 octobre 2014, Eurallumina/Commission, T‑308/11, non publié, EU:T:2014:894, point 80 et jurisprudence citée).

179    Partant, le deuxième sous-grief doit être écarté comme étant non fondé.

3)      Sur les troisième et quatrième sous-griefs, relatifs aux responsabilités sociales de la requérante et à l’image de marque de son groupe de sociétés

180    La requérante soutient que la Commission aurait dû prendre en compte, dans son examen du critère de l’investisseur privé, les préoccupations légitimes liées à la responsabilité sociale d’un investisseur avisé ainsi que celles liées à la préservation de l’image d’entreprise du groupement municipal lui appartenant. Selon elle, une mise en liquidation soudaine de l’activité de l’ancienne HelB aurait eu de graves répercussions sur le bon fonctionnement de ses transports en commun et aurait également détérioré les conditions de financements offertes au groupement municipal.

181    La Commission conteste les arguments de la requérante et considère qu’ils ne sont pas fondés.

182    En premier lieu, s’agissant des enjeux sociaux invoqués par la requérante, le Tribunal a jugé que, dans une économie sociale de marché, un investisseur privé avisé ne saurait faire abstraction, d’une part, de sa responsabilité envers l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise et, d’autre part, de l’évolution du contexte social, économique et environnemental dans lequel il poursuit son développement. Les enjeux tirés de la responsabilité sociale et du contexte entrepreneurial sont en effet susceptibles d’avoir une influence majeure sur les décisions concrètes et les orientations stratégiques d’un entrepreneur privé avisé. La rationalité économique à long terme du comportement d’un entrepreneur privé avisé ne saurait donc être appréciée sans prise en considération de telles préoccupations (arrêt du 11 septembre 2012, Corsica Ferries France/Commission, T‑565/08, EU:T:2012:415, point 82).

183    Toutefois, outre que, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 149 ci-dessus, la préservation du bon fonctionnement des services de transports publics ne paraît pas pouvoir être prise en considération dans le cadre du critère de l’investisseur privé, force est de constater que la requérante s’appuie sur des allégations hypothétiques. De plus, la requérante fonde son argument sur le scénario d’une mise en liquidation soudaine. Or, comme le constate la Commission dans la décision attaquée, d’autres scénarios étaient possibles et, notamment, la mise en vente de l’activité de l’ancienne HelB.

184    En second lieu, s’agissant de l’image de marque sur le marché financier du groupement municipal lui appartenant, la requérante n’apporte aucun élément de preuve afin de corroborer son allégation selon laquelle ledit groupement regroupait 116 sociétés qui disposaient, au total, d’environ 3,2 milliards d’euros de capitaux externes et qui bénéficiaient de conditions particulièrement avantageuses lorsqu’elles avaient recours à un financement externe.

185    En tout état de cause, la protection de l’image de marque d’un État membre – et, partant, des entités publiques qui le composent – en tant qu’investisseur global dans l’économie de marché ne saurait constituer, hors de circonstances particulières et sans une motivation particulièrement convaincante, une justification suffisante pour démontrer la rationalité économique à long terme de la prise en charge de coûts additionnels (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2012, Corsica Ferries France/Commission, T‑565/08, EU:T:2012:415, point 85). Or, au soutien de son argumentation, la requérante ne présente ni de circonstances particulières ni une motivation particulièrement convaincante au sens de cette jurisprudence. En effet, compte tenu de l’importance du groupement municipal, la situation de l’ancienne HelB paraît marginale et, par conséquent, négligeable pour un investisseur privé souhaitant octroyer un crédit à l’une des sociétés composant ce groupement.

186    Enfin, en ce que la requérante fait une nouvelle fois référence à la décision Olympic/Aegean Airlines II dans laquelle la Commission aurait admis que le risque d’un préjudice sur l’image de marque d’un groupement économique serait une raison supplémentaire pour un actionnaire d’aider une entreprise déficitaire, il y a lieu d’écarter cet argument pour les motifs relevés au point 178 ci-dessus. En tout état de cause, dans la décision Olympic/Aegean Airlines II, la préservation de l’image de marque n’était pas la seule raison économique ayant conduit l’investisseur privé à injecter du capital dans sa société. Or, en l’espèce, la requérante n’est pas parvenue à démontrer que son comportement était justifié par d’autres raisons économiques.

187    C’est donc à juste titre que la Commission n’a pas pris en considération, dans l’application du critère de l’investisseur privé, la prétendue responsabilité sociale de la requérante ainsi que la prétendue image de marque de son groupement municipal.

188    Partant, les troisième et quatrième sous-griefs doivent être écartés comme étant non fondés.

189    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que doit être écarté le premier grief dans son ensemble.

b)      Sur le deuxième grief, tiré d’une contradiction dans la décision attaquée s’agissant du rapport sur le prix de vente

190    Aux considérants 167 à 172 de la décision attaquée, la Commission a comparé le rendement du crédit d’exploitation de 2011 avec le rendement d’un autre scénario, la vente de l’activité de l’ancienne HelB, pour déterminer le choix qu’un investisseur privé aurait effectué. S’agissant du produit escompté de la vente de l’activité de l’ancienne HelB en janvier 2011 (date de l’octroi du crédit d’exploitation de 2011), la Commission a pris en considération les estimations du prix du transfert de l’activité de l’ancienne HelB présentées dans le rapport commandé par la requérante à une société indépendante préalablement à la vente de cette activité (ci-après le « rapport sur le prix de vente »). Sur cette base, elle a constaté que le rendement escompté était plus élevé dans un scénario de vente que dans celui de l’octroi du crédit d’exploitation de 2011.

191    La requérante considère que la Commission s’est contredite en s’appuyant sur le rapport sur le prix de vente, dès lors qu’elle a considéré, dans le cadre de l’appréciation de la continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, que les estimations présentées dans ledit rapport ne reflétaient pas le prix du marché de l’activité de l’ancienne HelB.

192    La Commission considère que l’argument de la requérante n’est pas fondé.

193    Il est vrai que la Commission a considéré, dans le cadre de l’appréciation de la continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, que les estimations présentées au sein du rapport sur le prix de vente ne reflétaient pas le prix du marché de l’activité de l’ancienne HelB. Il est également vrai que la Commission a pris en compte ces estimations afin d’identifier si le produit escompté d’une vente de l’activité de l’ancienne HelB aurait été plus élevé que le rendement obtenu selon le scénario de l’octroi du crédit d’exploitation de 2011.

194    Toutefois, dans le cadre de son appréciation sur la continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, la Commission a émis des doutes sur les estimations relatives à la valeur de marché de l’activité de l’ancienne HelB présentées dans le rapport sur le prix de vente, en ce qu’elles sous-estimaient, selon elle, la valeur de marché de l’activité de cette entreprise. Or, en prenant en compte, malgré ses doutes, ces estimations dans l’appréciation des profits attendus d’une vente de l’activité de l’ancienne HelB en 2011, la Commission a retenu les estimations de la valeur du marché de l’activité de l’ancienne HelB qui sont en réalité les plus favorables pour la requérante, à savoir les estimations les plus basses que contient le dossier. En effet, plus le prix de vente d’une activité est bas, moins le profit retiré de cette vente est important. Le scénario de vente devient alors moins intéressant pour un investisseur privé devant opérer un choix entre, d’une part, une vente et, d’autre part, un investissement. Partant, dans un tel cas, il est plus facile de justifier que l’investisseur privé décide, comme la requérante, non de vendre ses parts dans l’entreprise, mais d’y réinvestir. En revanche, si la Commission avait pris en considération des estimations supérieures à celles présentées dans le rapport sur le prix de vente, qui lui paraissent plus vraisemblables, l’hypothèse de départ de cette institution aurait été moins favorable pour la requérante, puisque ces estimations plus élevées auraient permis de conclure plus facilement au fait qu’un investisseur privé avisé aurait procédé à la vente de l’activité et non à de nouveaux investissements comme l’a fait la requérante.

195    Partant, il n’est pas contradictoire, d’une part, de considérer que les estimations présentées dans le rapport sur le prix de vente sous-évaluent la valeur de prix du marché de l’activité de l’ancienne HelB et, d’autre part, de prendre en considération celles-ci afin de présenter le scénario le plus favorable pour la requérante. La Commission précise d’ailleurs, au considérant 172 de la décision attaquée, que le prix de vente que la requérante aurait obtenu en janvier 2011 aurait pu être supérieur aux estimations présentées dans le rapport sur le prix de vente, puisque, en 2011, la situation financière de l’ancienne HelB était meilleure qu’en 2015, ce que la requérante ne conteste pas.

196    Dès lors, la décision attaquée ne contient pas de contradiction s’agissant du rapport sur le prix de vente et, ce faisant, l’arrêt du 18 décembre 2008, Componenta/Commission (T‑455/05, non publié, EU:T:2008:597), invoqué par la requérante, est sans pertinence puisque, dans cet arrêt, le Tribunal a constaté une contradiction au sein du raisonnement de la Commission en ce qu’elle quantifiait le montant de l’aide d’État en cause sur le fondement d’un rapport qu’elle avait pourtant décidé d’écarter.

197    Partant, le deuxième grief doit être écarté comme étant non fondé.

c)      Sur le troisième grief, relatif à l’appréciation de la Commission quant à la conformité au taux du marché du taux auquel était assorti le crédit d’exploitation de 2011, et sur le quatrième grief, tiré d’un détournement de pouvoir

198    Au considérant 173 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que, même si le crédit d’exploitation de 2011 avait constitué la meilleure option pour la requérante, celui-ci n’aurait pas été octroyé aux conditions du marché. En application de sa communication relative à la révision de la méthode de calcul des taux de référence et d’actualisation (JO 2008, C 14, p. 6), elle a indiqué que le taux d’intérêt du marché servant de valeur de référence pour un crédit standard accordé en janvier 2011 à une entreprise connaissant des difficultés financières, telle que l’ancienne HelB, et n’ayant pas d’actifs affectés en garantie était de 11,49 %. Elle a constaté que ce taux était nettement supérieur au taux d’intérêt effectivement appliqué, qui était de 6 %.

199    La requérante considère que la Commission n’a pas tenu compte des particularités du crédit d’exploitation de 2011 en appliquant, en l’espèce, la communication sur les taux de référence visée au point précédent. En outre, la Commission fixerait un niveau de preuve trop élevé en écartant l’exemple que la République de Finlande lui avait fourni d’un prêt subordonné dont le taux d’intérêt était d’environ 5 %.

200    La Commission conteste les arguments de la requérante.

201    À cet égard, ainsi que le soutient la Commission, il suffit de relever que son raisonnement portant sur la conformité du taux appliqué au crédit d’exploitation de 2011 au taux du marché est une analyse subsidiaire. En effet, ainsi que cela ressort des considérants 173 et 177 de la décision attaquée, la Commission a conclu, à titre principal, qu’un investisseur privé n’aurait pas octroyé le crédit d’exploitation de 2011 à l’ancienne HelB, quelles qu’en soient les conditions. L’aide équivaut d’ailleurs au montant total du crédit d’exploitation de 2011.

202    Dès lors que la conclusion de la Commission selon laquelle le taux appliqué au crédit d’exploitation de 2011 ne serait pas conforme au taux du marché est tirée à titre subsidiaire et étant donné que la requérante n’est pas parvenue à démontrer que la Commission avait commis une erreur manifeste dans son appréciation principale, les arguments relatifs à l’appréciation subsidiaire sont inopérants.

203    Partant, le troisième grief doit être écarté comme étant inopérant.

204    Quant au quatrième et dernier grief de la requérante, tiré du prétendu détournement de pouvoir dont se serait rendue coupable la Commission, il convient de rappeler qu’un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir arrêt du 25 novembre 2014, Safa Nicu Sepahan/Conseil, T‑384/11, EU:T:2014:986, point 30 et jurisprudence citée).

205    En l’espèce, la requérante n’apporte aucun élément susceptible de constituer un indice permettant, conformément à la jurisprudence rappelée au point 204 ci-dessus, de considérer que la décision attaquée aurait été adoptée afin d’atteindre des fins autres que celles excipées. Il y a lieu de constater que la Commission a utilisé ses pouvoirs dans le but d’examiner si le crédit d’exploitation de 2011 avait conféré un avantage à l’ancienne HelB, en examinant, dans le cadre du critère de l’investisseur privé, si un tel investisseur aurait octroyé un crédit comparable à sa filiale en prenant en considération, notamment, ses expositions économiques antérieures et le rendement escompté si l’investisseur avait opté pour la vente de l’activité de sa filiale. Ce quatrième grief doit donc également être écarté comme étant non fondé.

206    Partant, eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la troisième branche du premier moyen dans son intégralité, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la fin de non-recevoir présentée par la Commission et tirée du fait que la présente branche traite tant de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE que d’un détournement de pouvoir.

4.      Sur la quatrième branche, relative au crédit d’exploitation de 2012

207    Dans la décision attaquée, la Commission a constaté que le crédit d’exploitation de 2012 avait été octroyé aux mêmes conditions que celui de 2011. Au considérant 182, la Commission a relevé que la requérante n’avait procédé à aucune analyse des investissements ni à aucune autre analyse équivalente du rendement financier escompté des investissements. Aux considérants 183 à 187, la Commission a relevé que la situation financière de l’ancienne HelB était encore plus mauvaise que lorsque l’entreprise avait obtenu le crédit d’exploitation de 2011. Après une analyse des flux de trésorerie futurs attendus grâce au prêt, actualisés selon un rendement exigé, la Commission a indiqué qu’un investisseur rationnel n’aurait pas octroyé le crédit d’exploitation de 2012 à l’ancienne HelB. Aux considérants 188 à 194, la Commission a pris en compte les expositions économiques antérieures de la requérante. Elle a constaté que le crédit d’exploitation de 2012 n’aurait pas constitué la meilleure option pour la requérante, puisqu’elle aurait pu s’attendre à un rendement plus élevé si elle avait opté pour la vente de l’activité de l’ancienne HelB, de sorte que ledit crédit n’était pas conforme aux conditions du marché. La Commission a ajouté que, même à supposer que l’octroi du crédit d’exploitation de 2012 ait été la meilleure option pour la requérante, ledit crédit n’aurait pas été octroyé aux conditions du marché, le taux d’intérêt dudit crédit étant nettement inférieur au taux du marché. Enfin, au considérant 196, la Commission a conclu que le crédit d’exploitation de 2012 avait conféré un avantage économique indu à l’ancienne HelB et que cet avantage équivalait au montant total du prêt, soit 8 millions d’euros.

208    La requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur en constatant que le crédit d’exploitation de 2012 octroyé à l’ancienne HelB constituait une aide d’État. Premièrement, la Commission aurait omis de prendre en considération certaines données dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé. Deuxièmement, la décision attaquée contiendrait une contradiction, la Commission se fondant, au sein de son appréciation du critère de l’investisseur privé, sur le rapport sur le prix de vente, qu’elle considère pourtant vicié dans le cadre de son examen de la continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB. Troisièmement, la Commission aurait conclu à tort que le taux appliqué au crédit d’exploitation de 2012 n’était pas conforme au taux du marché.

209    À l’appui de ces différentes allégations, la requérante présente brièvement ses arguments et opère un renvoi aux développements présentés au soutien de la troisième branche du premier moyen, relative au crédit d’exploitation de 2011.

210    La Commission considère que les arguments de la requérante sont irrecevables en ce qu’ils consistent en de brèves références aux arguments exposés dans le cadre de la troisième branche du premier moyen, relative au crédit d’exploitation de 2011. En tout état de cause, ils ne seraient pas non fondés.

211    À cet égard, premièrement, si la situation financière et les perspectives financières de l’ancienne HelB étaient médiocres en 2011, la Commission a constaté que, lors de l’octroi du crédit d’exploitation de 2012, celles-ci s’étaient encore détériorées (considérant 185 de la décision attaquée). Ce constat de la Commission n’est pas remis en cause par la requérante. Plus précisément, à la fin de l’année 2011, malgré la mise en œuvre des mesures de restructuration et d’assainissement 2008-2010 et malgré l’octroi du crédit d’exploitation de 2011, l’ancienne HelB avait fait état d’une perte de 6,1 millions d’euros (contre – 3,3 millions d’euros en 2010) et de fonds propres négatifs de 12,7 millions d’euros (contre – 6,6 millions d’euros en 2010). Tout comme en 2011, elle était donc une entreprise en difficulté au sens des lignes directrices communautaires concernant les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté (JO 2004, C 244, p. 2) et il s’agissait de la treizième année consécutive durant laquelle l’ancienne HelB et ses prédécesseurs avaient enregistré des pertes (considérant 184 de la décision attaquée ; voir également considérant 157 de la décision attaquée). En outre, lors de l’octroi du crédit d’exploitation de 2012, la requérante n’avait toujours pas perçu de rémunération sur le crédit d’exploitation de 2005, mais elle n’en avait pas perçu non plus sur le crédit d’exploitation de 2011, de sorte que l’encours de ces crédits s’élevait, à la fin de l’année 2011, à 28,4 millions d’euros (considérant 186 de la décision attaquée). Les pertes de capital cumulées de la requérante qui étaient liées aux investissements en faveur de l’ancienne HelB et de ses prédécesseurs atteignaient – 27,8 millions d’euros (contre – 21,7 millions d’euros en 2010) (considérant 189 de la décision attaquée).

212    Deuxièmement, le raisonnement de la Commission et la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne le crédit d’exploitation de 2012 sont, en substance, identiques au raisonnement de la Commission et à la motivation de la décision attaquée portant sur le crédit d’exploitation de 2011, résumés au point 144 ci-dessus.

213    Troisièmement, la requérante ne fait pas valoir, dans le cadre de la présente branche, d’arguments nouveaux par rapport aux arguments invoqués au soutien de la troisième branche, relative au crédit d’exploitation de 2011. Pour le surplus, la requérante n’allègue ni ne démontre que, en raison de sa situation en 2012, le raisonnement adopté dans le cadre de la présente branche devrait être différent de celui suivi dans le cadre de la troisième branche, relative au crédit d’exploitation de 2011.

214    Il s’ensuit que les constats effectués aux points 151 à 153 ci-dessus (s’agissant de l’absence d’évaluation préalable), aux points 161 à 172, 176 à 178 et 182 à 187 ci-dessus (s’agissant des prétendues lacunes dans l’appréciation du critère de l’investisseur privé), aux points 193 à 196 ci-dessus (s’agissant de la prétendue contradiction que contiendrait la décision attaquée en ce qui concerne le rapport sur le prix de vente) et aux points 201 et 202 ci-dessus (s’agissant de l’appréciation de la Commission quant au taux auquel était octroyé le crédit d’exploitation de 2011) valent, a fortiori, s’agissant des arguments invoqués au soutien de la quatrième branche, relative au crédit d’exploitation de 2012.

215    En outre, en ce qui concerne plus particulièrement l’argument de la requérante selon lequel la Commission aurait dû prendre en considération ses expositions économiques antérieures dans l’activité de l’ancienne HelB, ainsi que le constate la Commission au considérant 189 de la décision attaquée, malgré le fait que la requérante avait investi précédemment au moins 36,6 millions d’euros (à savoir le crédit de démarrage, le crédit d’équipement de 2002 et le crédit d’exploitation de 2011) dans l’activité de l’ancienne HelB, le capital de celle-ci s’était encore appauvri en 2011 (– 27,8 millions d’euros), de sorte que, dans ces conditions, il était peu probable qu’un actionnaire rationnel continue à financer sa filiale. En tout état de cause, il convient de rappeler que le crédit d’équipement de 2002 ainsi que les crédits d’exploitation de 2005 et de 2011 constituent des aides d’État. Partant, de la même manière qu’il a été considéré au point 177 ci-dessus que le crédit d’équipement de 2002 et le crédit d’exploitation de 2005 ne pouvaient être pris en considération dans le cadre de l’appréciation du critère de l’investisseur privé en ce qui concerne le crédit d’exploitation de 2011, ce dernier ne peut pas être pris en compte dans le cadre de l’appréciation de ce critère s’agissant du crédit d’exploitation de 2012 conformément à la jurisprudence rappelée au point 65 ci-dessus. Dès lors, bien qu’elle ait pris en considération le crédit d’équipement de 2002 et les crédits d’exploitation de 2005 et de 2011 dans son examen du critère de l’investisseur privé (considérant 189 de la décision attaquée), il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas leur avoir accordé un poids suffisant dans l’appréciation du critère de l’investisseur privé.

216    Partant, il y a lieu de conclure que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que le critère de l’investisseur privé n’était pas respecté s’agissant du crédit d’exploitation de 2012.

217    Par conséquent, il y a lieu de rejeter la quatrième branche comme étant non fondée, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la fin de non-recevoir présentée par la Commission et tirée de son caractère imprécis, et, par voie de conséquence, le premier moyen dans son intégralité.

B.      Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation au sens de l’article 296 TFUE

218    Par son deuxième moyen, la requérante, soutenue par la République de Finlande, avance en substance que la décision attaquée, en sa partie relative à la continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB au regard des critères liés au prix du transfert de l’activité de l’ancienne HelB et à l’objectif visé par la vente de cette activité, est insuffisamment motivée.

219    La Commission, soutenue par Nobina, conclut au rejet du deuxième moyen, en partie comme inopérant et en partie comme non fondé. La Commission semble également faire valoir que les arguments avancés ne sont pas recevables au motif qu’ils ne concernent pas la situation de la requérante, mais celle de la nouvelle HelB.

220    D’emblée, il y a lieu de rappeler que l’obligation de motivation prévue à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’une décision consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cette décision. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci affectent la légalité au fond de la décision, mais non sa motivation, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés. Il s’ensuit que les griefs et les arguments visant à contester le bien-fondé d’un acte sont dénués de pertinence dans le cadre d’un moyen tiré du défaut ou de l’insuffisance de motivation (voir arrêt du 18 juin 2015, Ipatau/Conseil, C‑535/14 P, EU:C:2015:407, point 37 et jurisprudence citée).

221    En l’espèce, il convient de relever que, à l’appui du deuxième moyen, la requérante a développé des arguments dont la plupart portent sur le bien-fondé de l’appréciation de la Commission concernant l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB au regard du prix payé pour l’acquisition de l’activité de l’ancienne HelB et de l’objectif visé par la vente de cette activité. Ces arguments sont inopérants en tant qu’ils viennent au soutien du deuxième moyen, mais ils seront examinés dans le cadre du troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation quant à l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB.

222    Par ailleurs, la République de Finlande soutient que la Commission n’a pas examiné dans quelle mesure l’aide d’État en cause aurait été transférée à la nouvelle HelB. Cet argument, inopérant dans le cadre du présent moyen, se rattache au grief tiré d’une violation du principe de proportionnalité et c’est dans ce cadre qu’il sera examiné.

223    Ces observations liminaires étant faites, il convient d’examiner les arguments de la requérante tendant à remettre en cause la motivation de la décision attaquée.

224    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution auteure de l’acte incriminé de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir point 94 ci-dessus).

225    Il s’ensuit qu’une motivation ne doit pas être exhaustive, mais au contraire doit être considérée comme suffisante dès lors qu’elle expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169, et du 3 mars 2010, Freistaat Sachsen/Commission, T‑102/07 et T‑120/07, EU:T:2010:62, point 180).

226    En premier lieu, la requérante fait valoir que l’analyse de la Commission concernant le prix du transfert de l’activité de l’ancienne HelB se fonderait sur des hypothèses et des expressions floues. En particulier, la Commission remettrait en cause certaines données utilisées dans le cadre du rapport sur le prix de vente, sans assortir son analyse d’une motivation suffisante. Le fait qu’elle conclut que le prix du transfert ne reflétait pas correctement le prix du marché sans présenter sa propre appréciation de la juste valeur marchande de l’activité de l’ancienne HelB constituerait également un défaut de motivation.

227    À cet égard, il convient de relever que, dans le cadre de son appréciation quant à l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, la Commission a constaté, dans la décision attaquée, qu’il ne pouvait être garanti que le prix payé pour l’acquisition de l’activité de l’ancienne HelB corresponde au prix du marché et que la motivation à cet égard permet à la requérante de connaître les motifs sur lesquels elle a fondé son constat, à savoir l’absence d’appel d’offres public pour la vente de cette activité et les doutes exprimés à l’encontre du rapport sur le prix de vente. La motivation de la décision attaquée permet également au Tribunal de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle dans le cadre du présent recours.

228    En réalité, il convient de constater que, par son argument, la requérante conteste l’absence d’établissement par la Commission de sa propre estimation, claire et non équivoque, du prix de marché de l’activité de l’ancienne HelB et, en particulier, des taux qui auraient dû, selon elle, être utilisés dans les différentes méthodes d’évaluation du prix de marché de l’activité de l’ancienne HelB. Un tel argument se rapporte au bien-fondé de la décision attaquée. Partant, en application de la jurisprudence citée au point 220 ci-dessus, il est inopérant aux fins d’établir une violation de l’article 296 TFUE et il sera examiné dans le cadre de l’appréciation de la première branche du troisième moyen.

229    Par ailleurs, le raisonnement de la Commission visait à démontrer que le prix payé par la nouvelle HelB pour l’acquisition de l’activité de l’ancienne HelB ne reflétait pas correctement le prix du marché, sans chercher à établir quel aurait été précisément le prix du marché de cette activité. En cela, la présente affaire se distingue de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 18 décembre 2008, Componenta/Commission (T‑455/05, non publié, EU:T:2008:597), dont la requérante se prévaut. En effet, dans cette affaire, l’insuffisante motivation constatée résultait de ce que la Commission, qui employait des formulations hypothétiques, n’avait pas précisé clairement la base sur laquelle elle s’était fondée pour conclure au montant précis de la surévaluation du prix de terrains acquis auprès d’une société immobilière par les autorités nationales, cette surévaluation étant déterminante pour établir l’existence même d’une aide et identifier son montant.

230    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que la motivation de la décision attaquée serait lacunaire en ce qu’elle ne ferait pas apparaître la manière dont le mécanisme de retour à une meilleure fortune a été pris en compte dans le cadre de l’analyse du prix du transfert.

231    À cet égard, comme cela a été constaté au point 229 ci-dessus, le raisonnement de la Commission visait uniquement à démontrer que le prix payé par la nouvelle HelB pour l’acquisition de l’activité de l’ancienne HelB ne reflétait pas correctement le prix du marché, sans chercher à établir précisément le prix du marché de cette activité. Pour ce faire, la Commission s’est fondée, d’une part, sur le processus de vente de ladite activité réalisé sans appel d’offres et, d’autre part, sur les erreurs commises dans le rapport sur le prix de vente. Dès lors, il ressort clairement du raisonnement suivi par la Commission que le mécanisme de retour à meilleure fortune était sans incidence sur son analyse. Par conséquent, le mécanisme de retour à meilleure fortune ne revêtait pas, pour celle-ci, une importance essentielle au sens de la jurisprudence rappelée au point 225 ci-dessus et il n’était donc pas nécessaire pour elle d’expliquer les raisons pour lesquelles elle n’avait pas pris en considération, dans son appréciation, ce mécanisme.

232    En troisième lieu, en ce que la requérante fait valoir que la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne l’objectif visé par la vente de l’activité de l’ancienne HelB ne répondrait pas aux exigences posées par l’article 296 TFUE, il y a lieu de constater que la motivation de la décision attaquée permet de connaître les motifs sur lesquels la Commission s’est fondée pour conclure que la vente de l’activité de l’ancienne HelB visait à contourner une éventuelle décision négative de la Commission, à savoir que cette vente avait été lancée presque immédiatement après la publication de la décision d’ouverture et qu’elle laissait l’ancienne HelB comme une « coquille vide », avec le passif issu des mesures litigieuses, sans actif suffisant pour le couvrir (considérants 225 et 248 de la décision attaquée).

233    Enfin, en quatrième lieu, s’agissant de l’argument de la République de Finlande selon lequel la Commission n’aurait pas expliqué à suffisance de droit les raisons pour lesquelles elle a considéré que l’avantage procuré à l’ancienne HelB du fait des mesures litigieuses aurait été transféré à la nouvelle HelB, il suffit de relever que, au considérant 257 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que c’est en raison de sa présence opérationnelle ininterrompue sur le marché que la nouvelle HelB profite toujours de l’aide d’État accordée aux activités économiques de l’ancienne HelB. Il y a donc lieu de constater que la motivation fait apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de la Commission.

234    Partant, le deuxième moyen doit être rejeté, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur la fin de non-recevoir que semble présenter la Commission.

C.      Sur le troisième moyen, tiré en substance d’une erreur manifeste d’appréciation quant à l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, en particulier s’agissant du critère du prix du transfert et de l’objectif poursuivi

235    Par son argumentation, présentée dans le cadre de ses autres moyens, la requérante, soutenue par la République de Finlande, entend remettre en cause la conclusion de la Commission selon laquelle il existe une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB. Selon elle, la Commission a commis une erreur manifeste en considérant que le prix payé pour l’activité de l’ancienne HelB ne reflétait pas correctement le prix du marché et que la vente de cette activité visait à contourner une éventuelle récupération de l’aide en cause.

236    D’emblée, il convient de relever que, au soutien de son argument tendant à remettre en cause le constat de la Commission selon lequel la vente de l’activité de l’ancienne HelB a été conçue de manière à éviter les conséquences d’une éventuelle décision négative de la Commission, la requérante se contente d’opérer sur ce point un renvoi général aux éléments exposés par la nouvelle HelB dans le cadre de l’affaire connexe T‑603/19, Helsingin Bussiliikenne/Commission. Or, conformément à l’article 76 du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige, les conclusions et un exposé sommaire des moyens invoqués. L’objectif poursuivi par cette exigence est d’obtenir des indications suffisamment claires et précises pour permettre à la partie défenderesse de se défendre utilement et au juge de l’Union d’exercer son contrôle juridictionnel, le cas échéant sans autre information à l’appui (arrêts du 29 juin 1995, ICI/Commission, T‑37/91, EU:T:1995:119, point 42 ; du 24 février 2000, ADT Projekt/Commission, T‑145/98, EU:T:2000:54, point 66, et du 16 mars 2004, Danske Busvognmænd/Commission, T‑157/01, EU:T:2004:76, point 45). Ainsi, un renvoi général, dans une requête, aux moyens et aux arguments invoqués au soutien d’un recours formé dans le cadre d’une affaire connexe ne répond pas à cette exigence (arrêt du 24 mars 2011, Legris Industries/Commission, T‑376/06, non publié, EU:T:2011:107, point 32).

237    Pour le reste, ce moyen se divise en trois branches, tirées, la première, de la prétendue obligation pour la Commission de présenter une estimation, claire et non équivoque, du prix du marché de l’activité de l’ancienne HelB, la deuxième, d’une erreur manifeste d’appréciation quant au processus de vente de ladite activité et, la troisième, d’une erreur manifeste d’appréciation quant au rapport sur le prix de vente.

238    La Commission, soutenue par Nobina, conteste les arguments de la requérante. Elle considère que les arguments présentés par la requérante ne concernent pas sa situation, mais concernent, en réalité, celle de la nouvelle HelB. En tout état de cause, ils ne seraient pas fondés.

239    À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principal objectif visé par le remboursement d’une aide d’État versée illégalement est d’éliminer la distorsion de concurrence causée par l’avantage concurrentiel procuré par l’aide illégale. Le rétablissement de la situation antérieure au versement d’une aide illégale ou incompatible avec le marché intérieur constitue une exigence nécessaire à la préservation de l’effet utile des dispositions des traités relatives aux aides d’État (voir arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 104 et jurisprudence citée).

240    Si le règlement 2015/1589 ne prévoit pas expressément l’hypothèse d’une décision de la Commission constatant l’existence d’une continuité économique entre le bénéficiaire initial de l’aide en cause et une autre entité, ce principe a été développé par le juge de l’Union afin de permettre à la Commission d’étendre l’obligation de récupération d’une aide au repreneur des actifs du bénéficiaire initial de l’aide en cause et de garantir l’effet utile des décisions de récupération.

241    Ainsi, les aides illégales doivent être récupérées auprès de la société qui poursuit l’activité économique de l’entreprise ayant bénéficié de ces aides lorsqu’il est établi que cette société conserve la jouissance effective de l’avantage concurrentiel lié au bénéfice desdites aides (voir arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 106 et jurisprudence citée).

242    Une telle continuité entre les sociétés parties à un transfert d’actifs s’apprécie en fonction de l’objet du transfert, à savoir les actifs et les passifs, le maintien de la force de travail et les actifs groupés, du prix du transfert, de l’identité des actionnaires ou des propriétaires de l’entreprise repreneuse et de l’entreprise de départ, du moment où le transfert a lieu, à savoir après le début de l’enquête, l’ouverture de la procédure ou la décision finale, ou encore de la logique économique de l’opération (voir arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 108 et jurisprudence citée). La Commission n’a toutefois pas l’obligation de prendre en compte l’ensemble de ces éléments (voir arrêt du 17 décembre 2015, SNCF/Commission, T‑242/12, EU:T:2015:1003, point 235 et jurisprudence citée).

243    Selon une jurisprudence constante de la Cour, lorsqu’une entreprise ayant bénéficié d’une aide d’État illégale est rachetée au prix du marché, c’est-à-dire au prix le plus élevé qu’un investisseur privé agissant dans des conditions normales de concurrence était prêt à payer pour cette société dans la situation où elle se trouvait, notamment après avoir bénéficié d’aides d’État, l’élément d’aide est évalué au prix du marché et inclus dans le prix d’achat. Dans de telles conditions, l’acheteur ne saurait être considéré comme ayant bénéficié d’un avantage par rapport aux autres opérateurs sur le marché (voir arrêts du 13 novembre 2008, Commission/France, C‑214/07, EU:C:2008:619, point 57 et jurisprudence citée, et du 29 avril 2021, Fortischem/Commission, C‑890/19 P, non publié, EU:C:2021:345, point 60 et jurisprudence citée).

244    Dans la décision attaquée, aux considérants 253 à 257, la Commission a conclu à l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB. Elle a constaté que le seul changement apporté par la vente de l’activité de l’ancienne HelB concernait l’entité juridique à laquelle appartenait la nouvelle HelB. Pour le reste, selon la Commission, premièrement, la nouvelle HelB poursuit l’activité de l’ancienne HelB et utilise les actifs de cette dernière de la même manière, deuxièmement, la vente de cette activité a été conçue de manière à éviter les conséquences d’une éventuelle décision négative de sa part et, troisièmement, le prix payé pour l’activité de l’ancienne HelB ne reflète pas correctement le prix du marché. S’agissant en particulier du prix du transfert, d’une part, la Commission a relevé, aux considérants 226 et 228, que l’activité de l’ancienne HelB avait été vendue sans appel d’offres, ce qui, selon elle, indiquait généralement que le prix de vente ne correspondait pas au prix du marché. À cet égard, la Commission a considéré que la distribution d’un mémorandum d’investissement à des acheteurs potentiels présélectionnés par le vendeur lui-même ne saurait être assimilée à une procédure de mise en concurrence ouverte par annonce publique. D’autre part, aux considérants 229 à 241, la Commission a indiqué que l’évaluation du prix du marché de l’activité de l’ancienne HelB présentée dans le rapport sur le prix de vente, fondée sur trois méthodes d’évaluation différentes, comportait plusieurs défauts faussant les estimations retenues, qu’elle a ensuite explicités. Elle a constaté également que l’évaluation menée par la société indépendante n’avait pas pris en compte la clause d’indemnisation, qui conférait pourtant un avantage supplémentaire à l’acquéreur. La Commission en a déduit que cette évaluation ne reflétait pas correctement la valeur de marché de l’activité de l’ancienne HelB et que cette circonstance, conjuguée à l’absence d’appel d’offres ouvert, transparent, non discriminatoire et inconditionnel, conduisait à la conclusion que le prix payé par la nouvelle HelB ne reflétait pas correctement le prix du marché.

1.      Sur la première branche, relative à la prétendue obligation pour la Commission d’estimer le prix du marché de l’activité de l’ancienne HelB

245    La requérante reproche à la Commission de s’être contentée d’émettre des doutes à l’encontre des évaluations contenues dans le rapport sur le prix de vente, sans fournir sa propre appréciation, claire et non équivoque, de la juste valeur marchande de l’activité de l’ancienne HelB.

246    À cet égard, ainsi que cela est rappelé au point 242 ci-dessus, l’appréciation par la Commission de l’existence d’une continuité économique entre deux entreprises parties à un transfert d’actifs est fondée sur plusieurs éléments, dont le prix du transfert. Dans le cadre de son appréciation globale des différents éléments examinés, la Commission peut prendre en compte l’absence de garantie que le prix du transfert corresponde au prix du marché pour conclure à une telle continuité économique (voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2019, Fortischem/Commission, T‑121/15, EU:T:2019:684, point 221).

247    Il s’ensuit que, contrairement à ce que prétend la requérante, la Commission n’était tenue ni de déterminer elle-même le prix de vente de l’activité de l’ancienne HelB qui aurait correspondu au prix du marché ni de fournir une estimation fiable de ce prix. Elle pouvait ainsi se limiter à démontrer qu’il n’était pas établi que ce prix de vente reflétait le prix du marché.

248    Partant, l’argument de la requérante tiré de ce que la Commission n’a pas procédé à sa propre évaluation, claire et non équivoque, de la juste valeur marchande de l’activité de l’ancienne HelB est inopérant.

249    Il en va de même de l’argument tiré de ce que la Commission ne pouvait se limiter à émettre des doutes à l’encontre de certains taux définis dans le rapport sur le prix de vente, tels le taux de la prime d’illiquidité ou le taux d’actualisation de la valeur des autobus, sans établir quels auraient été, selon elle, les taux du marché.

250    Dans ce contexte, il y a également lieu de relever que l’argumentation de la requérante tirée de ce que la Commission aurait erronément omis de prendre en compte les versements dus en application du mécanisme de retour à une meilleure fortune lors de son estimation de la juste valeur du prix du transfert de l’activité de l’ancienne HelB procède d’une lecture erronée de la décision attaquée. En effet, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas cherché à estimer le prix de marché de l’activité de l’ancienne HelB, même de manière approximative. Elle a seulement effectué certains calculs à titre illustratif afin de démontrer l’impact potentiel des erreurs méthodologiques qu’elle avait relevées dans le rapport sur le prix de vente.

251    Partant, la première branche doit être rejetée comme étant, en partie, inopérante et, en partie, non fondée.

2.      Sur la deuxième branche, relative au processus de vente

252    La requérante fait valoir que la procédure menée en vue de la vente de l’activité de l’ancienne HelB était de nature à garantir le prix de vente le plus élevé possible et a permis une véritable mise en concurrence entre les candidats potentiels au rachat.

253    Aux fins de la vérification du prix du marché, peut être prise en compte, notamment, la forme utilisée pour la cession d’une société, par exemple celle de l’adjudication publique, censée garantir une vente aux conditions du marché. Il s’ensuit que, lorsqu’il est procédé à la vente d’une entreprise par la voie d’une procédure d’appel d’offres ouverte, transparente et inconditionnelle, il peut être présumé, dans certaines conditions, que le prix du marché correspond à l’offre la plus élevée (voir, en ce sens, arrêts du 24 octobre 2013, Land Burgenland e.a./Commission, C‑214/12 P, C‑215/12 P et C‑223/12 P, EU:C:2013:682, points 93 et 94, et du 16 juillet 2015, BVVG, C‑39/14, EU:C:2015:470, point 32).

254    Selon la jurisprudence, le caractère ouvert et transparent d’une procédure d’appel d’offres s’apprécie en fonction d’un faisceau d’indices propres aux circonstances de chaque affaire (voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C‑277/00, EU:C:2004:238, point 95).

255    En l’espèce, il convient de relever que si la requérante fait valoir que l’activité de l’ancienne HelB a été cédée à l’issue d’une procédure d’« appel d’offres structuré », il est constant que cet appel d’offres n’a pas été lancé par un avis public. Ainsi, quinze entités susceptibles de reprendre l’activité de l’ancienne HelB ont été présélectionnées par une société indépendante et le mémorandum d’investissement a été distribué à neuf entreprises, dont la nouvelle HelB, qui ont été invitées à soumissionner. À cet égard, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la procédure ainsi mise en œuvre répond aux exigences posées au point 90 de la communication de la Commission relative à la notion d’« aide d’État » visée à l’article 107, paragraphe 1, TFUE (JO 2016, C 262, p. 1). En effet, selon cette communication, pour qu’il soit présumé qu’une vente d’actifs est conforme aux conditions du marché, il faut notamment que la vente soit effectuée à l’issue d’une procédure d’appel d’offres concurrentielle et transparente et, partant, que cet appel d’offres fasse l’objet d’une publicité suffisante pour attirer l’attention de tous les soumissionnaires potentiels. Tel n’a pas été le cas en l’espèce, dès lors que la procédure n’a été portée à la connaissance que de certaines entreprises sélectionnées de manière discrétionnaire par la société indépendante et n’a donc pas permis à toute entreprise potentiellement intéressée de soumettre une offre.

256    Par ailleurs, aucun des autres arguments avancés par la requérante n’est de nature à établir que la procédure menée en vue de la vente de l’activité de l’ancienne HelB permettait de présumer que le prix de cette vente correspondait au prix du marché.

257    Ainsi, premièrement, les circonstances que la procédure d’« appel d’offres structuré » est couramment utilisée par les spécialistes de gestion financière et que le processus de cession a été mené par des spécialistes indépendants ne suffisent pas, à elles seules, à établir que le prix payé correspond au prix du marché.

258    Deuxièmement, l’affirmation de la requérante selon laquelle il aurait été impossible, en l’espèce, de vendre l’activité de l’ancienne HelB via un appel d’offres public, si ce n’est au détriment de la valeur de cette activité, n’est pas de nature à remettre en cause l’impossibilité de présumer que le prix payé par la nouvelle HelB correspondait au prix du marché qui découle de l’absence d’un tel appel d’offres.

259    Au surplus, une telle impossibilité n’est nullement établie en l’espèce. Ainsi, la circonstance que le cercle des acheteurs potentiels était réduit compte tenu des exigences tant en termes de gestion des transports en commun dans la région d’Helsinki qu’en termes de ressources financières du repreneur est sans incidence sur la possibilité d’organiser une consultation ouverte et transparente, laquelle ne fait pas obstacle à ce que la qualité des soumissionnaires et leur capacité, y compris financière, à répondre à certaines exigences soient évaluées. Par ailleurs, les conséquences négatives d’une publicité qui aurait été donnée à l’appel d’offres sur le personnel, dans un contexte de pénurie de travailleurs dans le domaine du transport par autobus, ne sont pas établies.

260    Troisièmement, en tant que la requérante soutient que le processus de vente mis en œuvre garantissait le prix le plus élevé possible, force est de constater que, indépendamment de leur pertinence, les critères appliqués par la société indépendante pour identifier les entités présélectionnées puis les neuf entreprises auxquelles le mémorandum d’investissement a été distribué sont nécessairement subjectifs. Ainsi que la Commission l’a relevé au considérant 228 de la décision attaquée, il est probable que l’ensemble des acheteurs potentiels n’aient pas été contactés. Dans ce contexte, les arguments de la requérante tirés de ce que les critères d’identification des entités présélectionnées et sélectionnées correspondraient à ceux utilisés par la Commission dans ses décisions relatives à des engagements en matière de contrôle des concentrations pour déterminer l’acquéreur approprié d’une activité sont inopérants.

261    Quatrièmement, le simple fait que le processus de vente ait été complété par un rapport sur le prix de vente ne permet pas de garantir, à lui seul, que le prix payé pour l’activité de l’ancienne HelB correspondait au prix du marché. En tant que cet argument vise à contester la conclusion de la Commission selon laquelle le rapport sur le prix de vente comporte des erreurs, il sera examiné aux points 264 à 279 ci-après.

262    Dès lors, la deuxième branche doit être écartée comme non fondée.

3.      Sur la troisième branche, relative au rapport sur le prix de vente

263    La requérante conteste les erreurs méthodologiques qui, selon la Commission, affecteraient l’évaluation du prix de l’activité de l’ancienne HelB contenue dans le rapport sur le prix de vente.

a)      Sur la première méthode, fondée sur les flux de trésorerie actualisés

264    Aux considérants 232 à 234 de la décision attaquée, la Commission a constaté que la première méthode d’évaluation de la valeur de l’activité de l’ancienne HelB, fondée sur les flux de trésorerie actualisés, s’appuyait sur deux scénarios et que le second partait de l’hypothèse que l’entreprise ne générerait plus de flux de trésorerie après l’année 2022. Selon la Commission, ce scénario aurait pu être exagérément pessimiste, dès lors que l’acquéreur n’aurait pas repris le passif issu des mesures litigieuses et que des flux de trésorerie positifs auraient pu être générés. Par ailleurs, dans les deux scénarios, le coût moyen pondéré du capital de l’ancienne HelB utilisé comme taux d’actualisation était de 7,3 % et incluait une prime d’illiquidité de 5 % à la composante « capitaux propres » du coût moyen pondéré. Or, la République de Finlande n’aurait pas expliqué pourquoi le taux de cette prime était justifié. Elle aurait même admis que ce taux, alors qu’il était susceptible de fausser l’estimation de la valeur de l’activité de l’ancienne HelB, était arbitraire.

265    À cet égard, la requérante ne conteste pas le caractère potentiellement exagérément pessimiste du second scénario. En revanche, elle soutient que le taux de la prime d’illiquidité retenu pour les deux scénarios n’était pas arbitraire. Une telle prime, en l’absence de modèles théoriques permettant d’en déterminer le montant, ferait partie des éléments d’évaluation pour lesquels les experts pourraient user d’une faculté d’appréciation subjective. La requérante ajoute que, en l’espèce, ladite prime serait un chiffre prudent qui pourrait être relié à des observations faites sur le marché et renvoie, sur ce point, à un ouvrage américain.

266    Il y a lieu de constater que, selon le rapport sur le prix de vente, la méthode des flux de trésorerie actualisés est particulièrement sensible aux hypothèses utilisées, dont le coût moyen pondéré du capital. Or, il est constant que la République de Finlande a admis, lors de la procédure formelle d’examen, que le taux de la prime d’illiquidité retenu dans ce rapport était totalement arbitraire. À cet égard, si la requérante indique que le taux de cette prime a été déterminé sur la base du document produit à l’annexe A.11 de la requête, il ressort au contraire du rapport sur le prix de vente que ce taux est fondé sur la seule évaluation de la société indépendante. En outre, à supposer même qu’elle serait recevable, l’annexe A.11 présente une estimation des taux de prime d’illiquidité pour des sociétés établies aux États-Unis, lesquels varient selon leur taille. Or, la requérante, qui supporte la charge de la preuve, n’établit pas en quoi l’estimation ainsi présentée serait également pertinente pour une société établie en Europe.

267    Partant, les arguments présentés par la requérante concernant la première méthode d’évaluation du prix de l’activité de l’ancienne HelB ne sauraient prospérer.

b)      Sur la troisième méthode, fondée sur la juste valeur des actifs

268    Aux considérants 237 à 239 de la décision attaquée, la Commission a constaté que la troisième méthode d’évaluation de la valeur de l’activité de l’ancienne HelB, fondée sur la juste valeur des actifs, s’appuyait sur la valeur comptable des autobus, lesquels représentaient 95 % du total des actifs immobilisés de l’ancienne HelB, réduite à hauteur d’un taux d’actualisation de 50 % pour les autobus acquis avant 2015 et de 30 % pour les autobus acquis en 2015 et à acquérir à l’automne 2015. La Commission a estimé que le taux de 50 % était arbitraire et trop élevé, car la valeur comptable tenait déjà compte de l’amortissement. Selon elle, le taux de 30 % pouvait également être trop élevé, en particulier en ce qui concerne les autobus non encore acquis.

269    La requérante fait valoir que la Commission utilise à tort l’expression « taux d’actualisation » pour désigner la correction des valeurs comptables des autobus opérée dans le cadre de la troisième méthode d’évaluation. Elle soutient que les taux de correction reposaient tant sur la valeur établie par la société indépendante que sur celle établie par le directeur général de l’ancienne HelB de l’époque et qu’un complément d’information à cet égard aurait été communiqué à la Commission le 12 janvier 2017. Elle confirme que ces taux étaient justifiés au regard de la faiblesse du marché secondaire des autobus ainsi que de l’âge et des normes d’émission de ces derniers.

270    Or, force est de constater que, premièrement, le choix de l’expression « facteur d’actualisation » est dépourvu d’incidence sur le niveau de correction des valeurs comptables. Deuxièmement, il ressort du rapport sur le prix de vente que c’est la faiblesse du marché secondaire des autobus, notamment pour les autobus relativement anciens, qui a conduit la société indépendante à présumer les taux de correction. Dans ce contexte, alors que la valeur comptable tient déjà compte de l’âge des autobus à travers leur amortissement, que l’activité de l’ancienne HelB devait être transférée en continuité d’exploitation, le repreneur lui succédant dans tous les contrats en cours, et que certains des autobus n’avaient pas encore été acquis alors que d’autres avaient moins d’un an, la requérante n’a pas établi que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant que les taux de correction retenus étaient trop élevés. Troisièmement, la requérante ne saurait utilement se fonder sur un avis du directeur général de l’ancienne HelB concernant la valeur marchande des autobus, ni sur un complément d’information qui démontrerait que l’estimation dudit directeur correspondait à celle d’experts externes, qui ne figurent pas au dossier.

271    Partant, les arguments présentés par la requérante concernant la troisième méthode d’évaluation du prix de l’activité de l’ancienne HelB ne sauraient prospérer.

c)      Sur la deuxième méthode, fondée sur les multiples de transactions comparables

272    Aux considérants 235 et 236 de la décision attaquée, la Commission a relevé que la deuxième méthode d’évaluation de la valeur de l’activité de l’ancienne HelB, fondée sur les multiples de transactions comparables, s’appuyait sur son bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement (EBITDA) pour les années 2014 et 2015. Selon elle, dès lors que l’ancienne HelB était en cours de vente, c’est l’EBITDA escompté de la nouvelle HelB, tel qu’utilisé dans la première méthode, et non l’EBITDA historique de l’ancienne HelB, qui aurait dû être pris en compte.

273    Dans la requête, la requérante soutient que la décision attaquée est entachée d’une erreur de fait, dès lors que les experts ont bien pris en compte l’EBITDA escompté pour 2015. Toutefois, il y a lieu de constater que l’erreur méthodologique relevée par la Commission porte sur la prise en compte des EBITDA 2014 et 2015 alors que, selon elle, dès lors que l’ancienne HelB était en cours de vente, la société indépendante aurait dû se fonder sur les résultats escomptés au titre de l’année ou des années postérieures à 2015. Partant, l’argument de la requérante doit être écarté.

274    Dans la réplique, la requérante conteste l’erreur méthodologique relevée aux considérants 235 et 236 de la décision attaquée en affirmant avoir pris en compte, à juste titre, l’EBITDA 2014 et 2015, puisque, en substance, l’EBITDA escompté à partir de 2016 n’était pas un élément à prendre en considération dans le cadre de la deuxième méthode d’évaluation.

275    À cet égard, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité de cet argument, laquelle est contestée par la Commission, d’une part, il y a lieu de relever que la requérante fait valoir que la première et la deuxième méthode sont fondées sur des approches différentes qui justifiaient de prendre en compte, pour la première, les flux de trésorerie pour les années futures et, pour la deuxième, conformément à la pratique des professionnels de l’évaluation des entreprises, les résultats à l’époque de la vente, dès lors que les attentes de l’acquéreur quant aux résultats futurs étaient incluses dans le coefficient de valorisation appliqué à ces résultats. D’autre part, la Commission fait valoir, dans la duplique, que c’est la situation financière précaire de l’ancienne HelB qui justifiait la prise en compte de l’EBITDA escompté, après l’adoption de mesures d’assainissement de sa situation, dès lors que les transactions comparables prises en compte concernaient des entreprises saines.

276    À cet égard, le Tribunal relève que, à supposer même que la deuxième méthode n’ait souffert d’aucune erreur méthodologique, une telle circonstance ne suffirait pas à remettre en cause la conclusion de la Commission figurant au considérant 241 de la décision attaquée, selon laquelle l’évaluation établie par la société indépendante ne reflétait pas fidèlement la valeur de marché de l’ancienne HelB. En effet, il ressort du rapport sur le prix de vente que la société indépendante a établi un calcul approximatif de la valeur de l’activité de l’ancienne HelB, en recourant à trois méthodes d’évaluation, chacune d’elles reposant sur plusieurs éléments discrétionnaires et aboutissant à une évaluation de la valeur de marché comprise entre 11,6 et 25,6 millions d’euros. Ce rapport soulignait également qu’un facteur d’incertitude dans la détermination de la valeur de marché découlait du fait que l’activité de l’ancienne HelB était déficitaire depuis plusieurs années. Partant, envisagée isolément, l’estimation de la valeur de marché de l’activité de l’ancienne HelB, même à la supposer dépourvue d’erreur, n’est pas suffisamment probante.

d)      Sur l’absence de prise en compte de la clause d’indemnisation

277    Au considérant 240 de la décision attaquée, la Commission a relevé que la clause d’indemnisation, qui garantissait l’acquéreur contre toute demande de récupération de l’aide d’État en cause, réduisait le risque économique pour ce dernier et, partant, lui conférait un avantage supplémentaire. Or, celui-ci n’aurait, à tort, pas été pris en compte dans l’évaluation de la valeur marchande de l’activité de l’ancienne HelB par la société indépendante.

278    Dans la réplique, la requérante conteste cette analyse de la Commission et soutient que si la clause d’indemnisation n’a pas été prise en compte dans ledit rapport, c’est parce que les mesures litigieuses ont été expressément exclues de la cession des activités de l’ancienne HelB. Dès lors, le prix de vente aurait été déterminé en partant expressément du principe que l’acquéreur n’endosserait pas la responsabilité des mesures litigieuses.

279    À cet égard, il y a lieu de relever que la clause d’indemnisation garantissait à l’acquéreur de l’activité de l’ancienne HelB que, alors qu’une procédure formelle d’examen à l’égard de mesures susceptibles d’être qualifiées d’aides d’État illégales était en cours, il serait couvert à l’égard de toute demande de récupération. Il n’est guère contestable qu’une telle clause réduisait un risque économique pour l’acquéreur et qu’elle était, à ce titre, susceptible de valoriser l’acquisition en cause. L’argument de la requérante selon lequel l’acquéreur et le vendeur avaient considéré qu’une telle clause ne serait pas mise en œuvre au motif que l’objet de la vente ne portait pas sur les mesures litigieuses, d’une part, n’est nullement étayé et, d’autre part, est en contradiction avec le fait que cette clause a été prévue dans le contrat. Partant, l’argument de la requérante doit être écarté.

280    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le grief tiré de ce que la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que l’activité de l’ancienne HelB avait été vendue par la requérante à un prix ne reflétant pas correctement le prix du marché doit être écarté. Il en découle que la jurisprudence rappelée au point 243 ci-dessus ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce. Les arguments de la requérante fondés sur cette jurisprudence, selon lesquels la conformité du prix de vente de l’activité de l’ancienne HelB au prix du marché suffirait à exclure l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, doivent donc être écartés comme étant inopérants, y compris en tant qu’ils sont dirigés à l’encontre de la seconde phrase du considérant 255 de la décision attaquée, énoncée à titre surabondant, selon laquelle, même si le prix de vente avait été conforme au prix du marché, un tel élément n’aurait pas suffi pour exclure l’existence d’une continuité économique. Par ailleurs, en ce que la République de Finlande, se fondant sur la prémisse selon laquelle le prix de vente de l’activité de l’ancienne HelB correspondait au prix de marché, fait valoir que la circonstance que la vente de cette activité a été décidée alors qu’une procédure d’examen avait été ouverte par la Commission n’était pas suffisante pour démontrer que l’objectif de la vente était d’éviter les conséquences d’une éventuelle décision négative de la Commission, cet argument doit également être écarté en ce qu’il est fondé sur une prémisse erronée.

281    La requérante n’est donc pas parvenue à démontrer que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant qu’il existait une continuité économique au sens de la jurisprudence rappelée au point 241 ci-dessus entre l’ancienne et la nouvelle HelB.

282    Partant, le troisième moyen doit être écarté comme étant non fondé, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la Commission et tirée du fait que la question de la continuité économique ne concerne pas la requérante, mais la nouvelle HelB, qui n’est pas partie à la présente affaire.

283    Le troisième moyen ayant été rejeté au motif qu’il existait une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB et que cette dernière continuait de profiter de l’aide d’État accordée, par le biais des mesures litigieuses, aux activités économiques de l’ancienne HelB, il convient de constater que c’est également à bon droit que la Commission a étendu l’obligation de remboursement de l’aide en cause à la nouvelle HelB.

284    En outre, dans la mesure où la requérante conteste la décision de la Commission d’étendre à la nouvelle HelB la récupération du montant correspondant à la dispense de remboursement du restant du principal du crédit d’équipement de 2002 accordée à l’ancienne HelB après la cession de son activité et considère que cette décision n’est pas suffisamment explicitée, cet argument ne saurait prospérer.

285    D’une part, c’est à juste titre que l’obligation de récupération de ce montant a été étendue à la nouvelle HelB. En effet, comme cela a été exposé au point 283 ci-dessus, en raison de la continuité économique existant entre la nouvelle HelB et l’ancienne HelB, la première continue de profiter de l’aide d’État accordée, par le biais des mesures litigieuses, aux activités économiques de l’ancienne HelB. Le fait que la dispense de remboursement du restant du principal du crédit d’équipement de 2002 ait été accordée à l’ancienne HelB postérieurement à la cession de son activité est sans incidence sur ce constat, son activité ayant été transférée en continuité d’exploitation à la nouvelle HelB.

286    D’autre part, s’agissant de la motivation de la décision attaquée à cet égard, il ressort des considérants 212 à 252 de la décision attaquée que celle-ci est suffisamment motivée, dès lors que la Commission y expose les raisons pour lesquelles il existe une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB qui justifie que l’obligation de récupération de l’aide en cause, dans sa totalité, soit étendue à la nouvelle HelB.

D.      Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation des principes généraux du droit de l’Union, en particulier du principe de protection de la confiance légitime et du principe de proportionnalité, ainsi que d’une violation des droits de la défense

287    Par son quatrième moyen, la requérante, soutenue par la République de Finlande, soutient que la Commission a violé les principes généraux du droit de l’Union. Ce moyen se divise en trois branches, tirées, premièrement, d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, deuxièmement, d’une violation du principe de proportionnalité et, troisièmement, d’une violation des droits de la défense.

288    La Commission, soutenue par Nobina, conteste les arguments de la requérante.

289    S’agissant de la première branche, tirée d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, il doit être rappelé que celle-ci a déjà été écartée au point 88 ci-dessus.

1.      Sur la deuxième branche, tirée de la violation du principe de proportionnalité

290    La requérante fait valoir que, à supposer que les mesures litigieuses constituent des aides d’État, l’obligation de récupération auprès de la nouvelle HelB doit, en tout état de cause, être considérée comme étant contraire au principe de proportionnalité. Premièrement, l’obligation de récupération de la somme de 54 231 850 euros auprès de la nouvelle HelB serait disproportionnée, dès lors que le prix de vente de l’activité de l’ancienne HelB serait conforme au prix du marché et qu’il inclurait, par conséquent, l’aide d’État en cause. Deuxièmement, à supposer que le prix de vente de l’activité de l’ancienne HelB ne soit pas conforme au prix du marché, l’obligation de récupération serait également disproportionnée dans la mesure où elle dépasserait la différence entre le prix payé par la nouvelle HelB et la juste valeur marchande de l’ancienne HelB. La requérante indique que la Commission n’aurait ni examiné si la nouvelle HelB avait bénéficié d’une aide sous la forme d’un prix d’achat inférieur au prix du marché ni analysé si les mesures litigieuses continuaient de procurer un avantage à la nouvelle HelB, condition pourtant indispensable, selon elle, à l’extension de l’obligation de remboursement.

291    D’emblée, il importe de relever que, tant dans sa réplique que lors de l’audience, la requérante a précisé que ses arguments selon lesquels le principe de proportionnalité aurait été violé concernaient uniquement la récupération de l’aide auprès de la nouvelle HelB.

292    La Commission considère que les arguments de la requérante sont irrecevables, d’une part, parce qu’ils sont ambigus et, d’autre part, parce qu’ils concernent uniquement la situation de la nouvelle HelB, et non celle de la requérante. En tout état de cause, ces arguments ne seraient pas fondés.

293    À titre liminaire, il y a lieu de constater que, au considérant 272 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que l’aide en cause devait être récupérée auprès de la nouvelle HelB. Lors de l’audience, la Commission a affirmé que le considérant 272 de cette décision était erroné. À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’interprétation d’un point spécifique d’une décision doit être effectuée dans le contexte de l’ensemble de cette décision (voir arrêt du 11 novembre 2021, Autostrada Wielkopolska/Commission et Pologne, C‑933/19 P, EU:C:2021:905, point 176 et jurisprudence citée). En l’occurrence, tant l’article 2, paragraphe 2, du dispositif de la décision attaquée que les considérants 257 et 268 des motifs de cette décision précisent que l’obligation de remboursement de l’aide en cause est étendue à la nouvelle HelB. Il y a également lieu de relever que, avant de procéder à l’examen de la continuité économique, la Commission a précisé aux considérants 214 et 216 de la décision attaquée que l’existence d’une telle continuité permettait d’étendre l’obligation de récupération à une nouvelle entreprise et que, si tel était le cas en l’espèce, l’aide pourrait être récupérée au sein de la nouvelle HelB si elle n’avait pas été récupérée auprès de l’ancienne HelB. Ainsi, pour regrettable qu’elle soit, l’erreur affectant le considérant 272 de la décision attaquée n’est pas de nature à remettre en cause le fait que, par cette décision, la Commission a seulement entendu étendre l’obligation de remboursement à la nouvelle HelB et non substituer celle-ci à l’ancienne HelB dans cette obligation.

294    Cette précision liminaire étant faite, il convient de rappeler que le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés [arrêts du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, EU:C:1984:183, point 25, et du 30 avril 2019, Italie/Conseil (Quota de pêche de l’espadon méditerranéen), C‑611/17, EU:C:2019:332, point 55].

295    Selon la jurisprudence, la suppression d’une aide illégale par voie de récupération est la conséquence logique de la constatation de son illégalité et vise au rétablissement de la situation antérieure. Cet objectif est atteint dès que les aides en cause, augmentées le cas échéant des intérêts de retard, ont été restituées par le bénéficiaire ou, en d’autres termes, par les entreprises qui en ont eu la jouissance effective. Par cette restitution, le bénéficiaire perd en effet l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents et la situation antérieure au versement de l’aide est rétablie (voir arrêt du 1er octobre 2015, Electrabel et Dunamenti Erőmű/Commission, C‑357/14 P, EU:C:2015:642, point 110 et jurisprudence citée). La récupération de cette aide, en vue du rétablissement de la situation antérieure, ne saurait en principe être considérée comme étant une mesure disproportionnée par rapport aux objectifs des dispositions du traité FUE en matière d’aides d’État (voir arrêt du 21 décembre 2016, Commission/Aer Lingus et Ryanair Designated Activity, C‑164/15 P et C‑165/15 P, EU:C:2016:990, point 116 et jurisprudence citée).

296    Premièrement, il découle de la jurisprudence rappelée au point 295 ci-dessus que la requérante n’est pas fondée à soutenir que l’obligation de récupération de l’aide d’État découlant des mesures litigieuses devrait, sous peine de méconnaître le principe de proportionnalité, ne porter que sur un montant réduit par rapport au montant de cette aide, majoré des intérêts, tel qu’identifié à l’article 1er du dispositif de la décision attaquée.

297    À cet égard, le lien opéré par la requérante entre le montant à récupérer et le prix de vente de l’activité de l’ancienne HelB ou le prix du marché de cette activité procède d’une confusion concernant la nature de l’aide en cause. En effet, il y a lieu de rappeler que l’aide dont la récupération est ordonnée ne consiste pas en la vente de l’activité de l’ancienne HelB à un prix inférieur à celui du marché, mais en l’octroi de divers crédits à l’ancienne HelB. L’examen par la Commission du prix de vente de l’activité de l’ancienne HelB a été effectué non aux fins d’établir l’existence éventuelle d’une aide d’État, mais aux fins d’apprécier l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB.

298    Au surplus, en tant que l’argumentation de la requérante repose sur la prémisse que l’activité de l’ancienne HelB a été acquise au prix du marché, il y a également lieu de rappeler qu’il a été conclu, au point 280 ci-dessus, que la Commission avait, à juste titre, considéré que le prix de vente ne reflétait pas correctement le prix du marché.

299    Deuxièmement, contrairement à ce que prétendent la requérante et la République de Finlande, la Commission n’était pas tenue de déterminer si les mesures continuaient de procurer un avantage concurrentiel lié au bénéfice des aides à la nouvelle HelB et dans quelle mesure cette dernière conservait la jouissance effective de cet avantage. En effet, comme exposé au point 283 ci-dessus, en raison de la continuité économique qui existe entre l’ancienne et la nouvelle HelB, cette dernière continue de profiter de l’aide d’État accordée, par le biais des mesures litigieuses, aux activités économiques de l’ancienne HelB. Par ailleurs, c’est à la République de Finlande, destinataire de la décision attaquée, dans le cadre des mesures qu’elle est tenue de prendre, en vertu de l’article 288 TFUE, pour parvenir au recouvrement effectif des sommes dues, de récupérer l’aide en cause, si ce n’est auprès de l’ancienne HelB, auprès de la nouvelle HelB.

300    Partant, la deuxième branche doit être rejetée comme étant non fondée, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur les fins de non-recevoir présentées par la Commission.

2.      Sur la troisième branche, tirée de la violation des droits de la défense

301    La requérante avance que les droits de la défense et l’article 108, paragraphe 2, TFUE ont été méconnus, la Commission n’ayant pas donné la possibilité à la nouvelle HelB d’être entendue avant l’adoption de la décision attaquée. Selon elle, la Commission ayant modifié sa conception initiale concernant le bénéficiaire de la prétendue aide d’État en cause, elle aurait dû publier une décision afin d’étendre la procédure d’examen et accorder un délai à la nouvelle HelB pour qu’elle puisse présenter ses observations. À défaut d’avoir agi de la sorte, la Commission aurait commis une violation d’une formalité substantielle.

302    La Commission considère que les arguments de la requérante sont irrecevables, la nouvelle HelB n’étant pas partie à la présente affaire. En tout état de cause, seuls les États membres disposent de droits de la défense et, quoi qu’il en soit, la nouvelle HelB aurait été en mesure de présenter ses observations sur les mesures litigieuses.

303    En premier lieu, il convient d’écarter l’argument de la requérante selon lequel les droits de la défense de la nouvelle HelB auraient été violés, dès lors que seul l’État membre concerné, en tant que destinataire de la décision attaquée, peut se prévaloir de véritables droits de la défense (arrêt du 1er juillet 2009, Operator ARP/Commission, T‑291/06, EU:T:2009:235, point 35).

304    En second lieu, s’agissant de la prétendue violation de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, la requérante soutient, en substance, que le droit d’être associé à la procédure de la nouvelle HelB aurait été méconnu, sans soutenir que son propre droit d’être associée à la procédure aurait été méconnu. La requérante considère que la Commission était tenue d’étendre la décision d’ouverture et de mettre en mesure la nouvelle HelB de présenter ses observations.

305    À cet égard, il est vrai que la requérante dispose d’un intérêt légitime à se prévaloir de toute violation d’une formalité substantielle qui vicierait la décision attaquée et que le juge de l’Union peut examiner d’office la violation des formes substantielles (voir, en ce sens, arrêts du 13 décembre 1999, SGA/Commission, T‑189/95, T‑39/96 et T‑123/96, EU:T:1999:317, points 140 à 143 et jurisprudence citée, et du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, T‑228/99 et T‑233/99, EU:T:2003:57, points 140 à 143). En revanche, la requérante ne dispose d’un intérêt à agir que pour obtenir le respect de ses propres droits procéduraux (voir, en ce sens, arrêt du 12 mai 2011, Région Nord-Pas-de-Calais et Communauté d’agglomération du Douaisis/Commission, T‑267/08 et T‑279/08, EU:T:2011:209, point 77 et jurisprudence citée).

306    Il convient donc d’examiner si la violation alléguée constitue la violation d’une formalité substantielle.

307    Premièrement, il y a lieu de rappeler que l’obligation à la charge de la Commission de mettre les intéressés, au stade de la décision d’ouverture, en mesure de présenter leurs observations revêt le caractère d’une formalité substantielle dont la violation entraîne l’annulation de plein droit de l’acte vicié (voir arrêt du 10 mars 2022, Commission/Freistaat Bayern e.a., C‑167/19 P et C‑171/19 P, EU:C:2022:176, point 94 et jurisprudence citée).

308    Toutefois, la requérante ne conteste pas la régularité de la décision d’ouverture, au jour de sa publication au Journal officiel. Dès lors, les arrêts du 22 février 2006, Le Levant 001 e.a./Commission (T‑34/02, EU:T:2006:59), et du 12 décembre 2018, Freistaat Bayern/Commission (T‑683/15, EU:T:2018:916), dont la requérante se prévaut, qui concernent le non-respect, par la Commission, de ses obligations relatives au contenu de la décision d’ouverture à la date de l’ouverture de la procédure formelle d’examen, sont sans pertinence en l’espèce.

309    Deuxièmement, il y a lieu de relever que si les textes régissant la procédure en matière d’aide d’État ne prévoient pas expressément la possibilité d’adopter une décision de rectification et d’extension d’une procédure pendante (arrêt du 13 juin 2013, HGA e.a./Commission, C‑630/11 P à C‑633/11 P, EU:C:2013:387, point 50), dans l’hypothèse où la Commission s’apercevrait, après l’adoption d’une décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen, que cette dernière est fondée soit sur des faits incomplets, soit sur une qualification juridique erronée de ces faits, elle devrait avoir la possibilité, voire l’obligation d’adapter sa position, en adoptant une décision de rectification ou une nouvelle décision d’ouverture, afin de permettre aux parties intéressées de présenter utilement des observations (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 76 et jurisprudence citée).

310    En particulier, lorsque la Commission modifie son raisonnement, à la suite de la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen, sur des faits ou une qualification juridique de ces faits qui s’avèrent déterminants dans son appréciation quant à l’existence d’une aide ou de sa compatibilité avec le marché intérieur, elle se doit de rectifier la décision d’ouverture de cette procédure ou d’étendre celle-ci, afin de permettre aux parties intéressées de présenter utilement des observations (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 77).

311    À supposer que le défaut d’adoption d’une décision de rectification dans les circonstances rappelées aux points 309 et 310 ci-dessus puisse être considéré comme la violation d’une formalité substantielle, il ressort de la décision attaquée que la Commission n’a pas modifié l’analyse qu’elle avait effectuée dans la décision d’ouverture s’agissant du bénéficiaire des mesures litigieuses, ni, plus généralement, de l’existence d’une aide ou de sa compatibilité avec le marché intérieur. Ainsi, la décision attaquée identifie clairement l’ancienne HelB comme étant l’entreprise à qui les mesures litigieuses ont été octroyées et l’analyse concernant l’existence d’une aide et sa compatibilité avec le marché intérieur est effectuée exclusivement à l’égard de celle-ci.

312    À cet égard, il y a lieu de rappeler que le dispositif d’une décision en matière d’aides d’État est indissociable de la motivation de celle-ci, de sorte qu’elle doit être interprétée, si besoin en est, en tenant compte des motifs qui ont conduit à son adoption [voir, en ce sens, arrêts du 15 mai 1997, TWD/Commission, C‑355/95 P, EU:C:1997:241, point 21, et du 29 avril 2021, Commission/Espagne (TNT en Castille-La Manche), C‑704/19, non publié, EU:C:2021:342, point 74 et jurisprudence citée]. Partant, si, certes, l’article 1er de la décision attaquée identifie le bénéficiaire des mesures litigieuses comme étant « HelB », sans préciser s’il s’agit de l’ancienne HelB ou de la nouvelle HelB, il résulte d’une lecture globale de cette décision que cette dénomination se rapporte nécessairement à l’ancienne HelB.

313    Ainsi, contrairement à ce que prétend la requérante, la circonstance que, dans le dispositif de la décision attaquée, la Commission a estimé que l’obligation de récupération de l’aide découlant des mesures litigieuses devait être étendue à la nouvelle HelB, en raison de la continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB, ne saurait être assimilée à une modification du bénéficiaire des mesures à l’égard duquel la Commission doit apprécier l’existence d’une aide et sa compatibilité avec le marché intérieur.

314    Une telle circonstance ne saurait non plus être assimilée à une extension de l’objet de la procédure, celle-ci étant demeurée limitée aux quatre mesures litigieuses. Ainsi, la cession de l’activité de l’ancienne HelB a été examinée par la Commission uniquement dans le cadre de son analyse de l’existence d’une continuité économique entre l’ancienne et la nouvelle HelB. En particulier, la Commission n’a pas étendu la procédure formelle d’examen à la question de savoir si la cession de l’activité de l’ancienne HelB au profit de la nouvelle HelB pouvait caractériser une aide d’État. De même, ainsi que cela ressort clairement des considérants 269 et 270 de la décision attaquée, la Commission n’a pas apprécié si la clause d’indemnisation et l’accord sur le compte de garantie bloqué constituaient une aide d’État.

315    Il s’ensuit que, en tout état de cause, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la Commission était tenue d’adopter une décision de rectification ou d’extension de la procédure formelle d’examen.

316    Partant, la violation alléguée par la requérante ne constitue pas la violation d’une formalité substantielle, mais constituerait seulement, le cas échéant, une violation des droits procéduraux de la nouvelle HelB, à l’égard de laquelle la requérante ne dispose pas d’un intérêt légitime à agir.

317    Par conséquent, il y a lieu de rejeter la troisième branche comme étant, en partie, non fondée et, en partie, irrecevable.

318    Il résulte des considérations qui précèdent que le quatrième moyen dans son ensemble doit être rejeté, de même que le recours dans son intégralité.

IV.    Sur les dépens

319    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens et ceux exposés par la Commission, y compris ceux afférents à la procédure de référé, ainsi que ceux exposés par Nobina, conformément aux conclusions de celles-ci.

320    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Dès lors, la République de Finlande supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Helsingin kaupunki est condamnée à supporter ses propres dépens et ceux exposés par la Commission européenne, y compris ceux afférents à la procédure de référé, ainsi que ceux exposés par Nobina Oy et Nobina AB.

3)      La République de Finlande supportera ses propres dépens.

Papasavvas

Marcoulli

Schwarcz

Iliopoulos

 

      Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 septembre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : le finnois.