Language of document : ECLI:EU:T:2015:528

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA HUITIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

25 juin 2015(*)

« Intervention – Confidentialité »

Dans l’affaire T‑475/14,

Prysmian SpA, établie à Milan (Italie),

Prysmian Cavi e Sistemi Srl, établie à Milan,

représentées par Mes C. Tesauro, F. Russo et L. Armati, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. C. Giolito, L. Malferrari, P. Rossi et H. Van Vliet, en qualité d’agents, assistés de Me S. Kingston, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours en annulation de la décision attaquée C(2014) 2139 final de la Commission, du 2 avril 2014, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39610 – Câbles électriques),

LE PRÉSIDENT DE LA HUITIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents

1        Par la décision C(2014) 2139 final, du 2 avril 2014, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39610 – Câbles électriques) (ci-après la « décision attaquée »), la Commission a constaté qu’un certain nombre d’entreprises dont, notamment, les requérantes, Prysmian SpA et Prysmian Cavi e Sistemi Srl, ainsi que la société Pirelli & C. SpA (ci-après « Pirelli »), avaient enfreint l’article 101 TFUE et l’article 53 EEE en participant à une entente sur le secteur des câbles électriques souterrains et sous-marins à (très) haute tension (article 1er de la décision attaquée).

2        Par ailleurs, dans cette décision, la Commission a infligé, à raison de cette infraction, diverses amendes aux entreprises visées par l’article 1er de cette décision, dont, à titre conjoint et solidaire, une amende de 67 310 000 euros à Prysmian Cavi e Sistemi Srl et à Pirelli [article 2, sous g), de la décision attaquée]. En outre, la Commission a ordonné aux entreprises visées par l’article 1er de la décision attaquée, notamment les requérantes et Pirelli, de mettre immédiatement fin à l’infraction, pour autant qu’elles ne l’aient pas encore fait, ainsi que de s’abstenir de tout acte ou de toute conduite décrite à l’article 1er, et de tout acte ou toute conduite ayant un objet ou un effet similaire ou identique à celui‑ci (article 3 de la décision attaquée). Cette décision attaquée a été notamment adressée aux requérantes et à Pirelli (article 4 de la décision attaquée).

3        En effet, il ressort des motifs de la décision attaquée que la Commission a constaté la participation directe de Prysmian Cavi e Sistemi Srl à l’entente susvisée entre le 18 février 1999 et le 28 janvier 2009 (considérant 729 de la décision attaquée). Par ailleurs, s’agissant de Pirelli, la Commission a considéré que celle-ci devait être tenue pour responsable du comportement anticoncurrentiel de Prysmian Cavi e Sistemi Srl pendant la période comprise entre le 18 février 1999 et le 28 juillet 2005, aux motifs, d’une part, qu’elle avait été la société mère de cette entreprise et, d’autre part, qu’elle avait succédé aux droits de son ancienne société mère (considérants 735 à 738 de la décision attaquée).

 Procédure

4        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 juin 2014, les requérantes ont introduit un recours ayant pour objet, à titre principal, l’annulation de la décision attaquée, et, à titre subsidiaire, premièrement, l’annulation de l’article 1er, paragraphe 5, de la décision attaquée, en ce que la Commission constate la participation de Prysmian Cavi e Sistemi Srl à l’infraction susvisée pendant la période comprise entre le 18 février 1999 et le 27 novembre 2001, deuxièmement, l’annulation de l’article 2, sous f) et sous g), de la décision attaquée, en ce qui concerne la détermination du montant des amendes infligées, à titre conjoint et solidaire, d’une part, à Goldman Sachs et aux requérantes et, d’autre part, à Prysmian Cavi e Sistemi Srl et à Pirelli & C. SpA, troisièmement, la réduction des amendes infligées et, quatrièmement, l’annulation des annexes I et II de la décision attaquée en tant qu’elles concernent un cadre dirigeant de Prysmian SpA, M. F. Romeo.

5        La Commission a conclu au rejet du recours et à la condamnation des requérantes aux dépens.

6        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 27 octobre 2014, Pirelli a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la Commission. Cette demande a été rédigée en une langue autre que la langue de la procédure, à savoir en italien.

7        Par lettre du 30 octobre 2014, le greffier a invité Pirelli à procéder à la régularisation de la demande en intervention par le dépôt d’un nouveau original de celle-ci traduit dans la langue de la procédure, à savoir l’anglais. Pirelli a déféré à cette demande le 17 novembre 2014.

8        Par lettre du 3 décembre 2014, la demande d’intervention régularisée a été signifiée aux parties conformément à l’article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

9        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 23 décembre 2014, la Commission n’a pas soulevé d’objections sur la demande d’intervention.

10      Par acte séparé, déposé au greffe le même jour, la Commission a demandé, au titre de l’article 116, paragraphe 2, du règlement de procédure, que certaines informations contenues dans l’annexe B.5 de la défense soient exclues du dossier communiqué à Pirelli, si son intervention était admise. Elle a produit à cette fin une version non-confidentielle de l’ensemble de la défense, y compris la version non-confidentielle de l’annexe B.5.

11      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 7 janvier 2015, les requérantes ont demandé au Tribunal de rejeter la demande d’intervention de Pirelli et de la condamner aux dépens relatifs à cette demande.

12      Par acte séparé, déposé au greffe le même jour, les requérantes ont demandé, au titre de l’article 116, paragraphe 2, du règlement de procédure, que certaines pièces et informations contenues dans la requête et ses annexes soient exclues du dossier communiqué à Pirelli, si son intervention était admise. Elle produit à cette fin une version non confidentielle des pièces concernées.

 En droit

 Arguments des parties

13      Pour justifier d’un intérêt à la solution du litige, Pirelli, après avoir rappelé l’objet du présent recours, fait valoir, pour l’essentiel, que cet intérêt est lié au quatrième et au cinquième moyen invoqués à l’appui de ce recours. À cet égard, d’une part, Pirelli relève, en substance, que, dans le cadre de leur quatrième moyen, les requérantes font valoir que seule Pirelli devrait être tenue responsable des pratiques d’ententes imputées à Prysmian Cavi e Sistemi Srl pendant la période antérieure au 27 novembre 2001. D’autre part, Pirelli relève que, dans le cadre de leur cinquième moyen, les requérantes reprennent en substance le grief selon lequel l’amende qui a été infligée à Prysmian Cavi e Sistemi Srl et Pirelli devrait être répartie de manière moins favorable à cette dernière. Pirelli en conclut en substance qu’elle dispose d’un intérêt évident à intervenir au soutien des thèses, la Commission tendant au rejet de ces moyens. Elle ajoute que, dans la mesure où, dans le cadre du sixième moyen qu’elle fait valoir au soutien de son propre recours, elle précise que les arguments de son ancienne filiale Prysmian doivent être considérés comme repris dans cette requête à l’exclusion de ceux qui lui seraient défavorables, l’objet et le contenu de ce sixième moyen ne contredit en rien son intérêt à intervenir dans la présente affaire.

14      Les requérantes font valoir, en premier lieu, que, dans l’hypothèse où un intérêt pourrait être constaté dans le chef de Pirelli, son intervention devrait se limiter à la formulation d’observations lors de la procédure orale, dans la mesure où la version en langue de procédure de sa demande a été introduite en dehors du délai de six semaines prévu à l’article 115, paragraphe 1, du règlement de procédure. En second lieu, elles soutiennent que Pirelli ne peut pas être considérée comme ayant un intérêt direct et effectif à intervenir dans la présente affaire. En substance, elles estiment que l’intérêt que Pirelli prétend avoir à intervenir au soutien des conclusions de la Commission est en contradiction avec son propre intérêt au succès de leur recours, comme le confirmerait le fait que Pirelli a également introduit un recours en annulation à l’encontre de la décision attaquée (affaire T‑455/14).

 Appréciation du Président

15      La demande en intervention a été introduite en vertu de l’article 115 du règlement de procédure.

16      En vertu de l’article 40, deuxième alinéa, du statut, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, dudit statut, toute personne justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige, à l’exclusion des litiges entre États membres, entre institutions de l’Union, ou entre États membres, d’une part, et institutions de l’Union, d’autre part, a le droit d’intervenir. Les conclusions de la demande d’intervention ne peuvent avoir d’autre objet que le soutien des conclusions de l’une des parties.

17      La notion d’intérêt à la solution du litige doit se définir au regard de l’objet même du litige et s’entendre comme un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme un intérêt par rapport aux moyens soulevés. En effet, par « solution » du litige, il faut entendre la décision attaquée finale demandée au juge saisi, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de l’arrêt. Il convient, notamment, de vérifier que l’intervenant est touché directement par l’acte attaqué et que son intérêt à la solution du litige est certain (ordonnance du 25 février 2003, BASF/Commission, T‑15/02, Rec, EU:T:2003:38, point 26).

18      Dans la présente affaire, il résulte de la décision attaquée que Prysmian Cavi e Sistemi Srl a été considérée comme responsable de l’infraction visée au point 1 de cette décision, en raison de sa participation directe à cette infraction et s’est vu, notamment, infliger, à titre conjoint et solidaire avec Pirelli, une amende de 67 310 000 euros [article 2, sous g), de la décision attaquée]. Il s’avère également que, dans leur recours, à titre subsidiaire, les requérantes demandent notamment, en substance, l’annulation de la décision attaquée pour ce qui les concerne, et notamment l’annulation de l’article 2, sous g), de cette décision, en tant qu’il a infligé à Prysmian Cavi e Sistemi Srl, à titre conjoint et solidaire avec Pirelli, l’amende susvisée.

19      Or, dans l’hypothèse où le Tribunal ferait droit aux conclusions des requérantes à fin d’annulation de la décision attaquée en tant qu’elle les concerne, Pirelli pourrait être la seule débitrice de l’amende de 67 310 000 euros due à la Commission. Dans ces circonstances, Pirelli justifie d’un intérêt à la solution du litige et peut intervenir au soutien des conclusions de la Commission, dès lors qu’elle limite son intervention au rejet des conclusions susvisées des requérantes, dont le succès aurait pour conséquence d’éliminer la contribution de Prysmian Cavi e Sistemi Srl au paiement de l’amende précitée (voir, en ce sens, ordonnance du 28 février 2011, HIT Groep/Commission, T‑436/10, EU:T:2011:62, point 11).

20      Comme le souligne Pirelli dans sa demande en intervention, son intérêt à intervenir n’est pas remis en cause par la circonstance que, dans le cadre de son propre recours contre la décision attaquée dans l’affaire T‑455/14, elle ait demandé notamment à bénéficier du succès éventuel des conclusions du présent recours à fin d’annulation de la décision attaquée ou à fin de réduction de l’amende. En effet, dans la mesure où son intervention au soutien des conclusions de la Commission est limitée, comme indiqué au point 19 ci-dessus, au rejet des conclusions à fin d’annulation de la décision attaquée en tant qu’elle concerne les requérantes, lesquelles lui sont défavorables, cette intervention ne saurait préjuger de sa position s’agissant des conclusions de la requête susceptibles de lui être favorables.

21      Il résulte de ce qui précède que Pirelli a établi son intérêt à la solution du litige et doit, en conséquence, être admise à intervenir.

22      Par ailleurs, s’agissant de l’argument des requérantes selon lequel, en tout état de cause, l’intervention de Pirelli doit se limiter à présenter des observations lors de la phase orale de la procédure, en raison du caractère tardif de la demande d’intervention, il y a lieu de considérer, au contraire, que ladite demande a été introduite dans le délai prévu à l’article 115, paragraphe 1, du règlement de procédure.

23      En effet, d’une part, la communication au Journal officiel de l’Union européenne visée à l’article 24, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal a été publiée le 15 septembre 2014 et, d’autre part, la demande d’intervention a été présentée initialement le 30 octobre 2014, c’est-à-dire, dans le cadre du délai des six semaines prévu à cette fin. Même si cette demande a été initialement introduite en langue italienne, et non dans la langue de la procédure, à savoir l’anglais, il y a lieu de relever que, conformément à l’article 7, paragraphe 5, des instructions au greffier, lorsqu’une demande d’intervention, émanant d’un tiers autre qu’un État membre, n’est pas rédigée dans la langue de procédure, le greffier en demande la régularisation, avant de la signifier aux parties. Si une version de cette demande rédigée dans la langue de procédure est déposée dans le délai fixé à cette fin par le greffier, la date de dépôt de la première version dans une autre langue est prise en considération comme date de dépôt de l’acte. Tel est le cas en l’espèce, puisque la version en langue de procédure de la demande d’intervention de Pirelli a été déposée au greffe du Tribunal le 17 novembre 2014, soit le dernier jour du délai fixé par le greffier pour procéder à cette régularisation.

24      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que l’intervention de Pirelli dans la présente affaire ne doit pas se limiter, comme les requérantes le prétendent, à présenter des observations lors de la procédure orale.

25      Enfin, la demande d’intervention devant être admise dans les conditions prévues par l’article 116, paragraphes 2 à 4, du règlement de procédure, la communication à Pirelli des actes de procédure signifiés aux parties doit, à ce stade, être limitée à la version non confidentielle produite par les requérantes et la Commission. Une décision sur le bien-fondé de la demande de traitement confidentiel sera, le cas échéant, prise ultérieurement au vu des observations qui pourraient être présentées à ce sujet.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA HUITIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      Pirelli & C. SpA est admise à intervenir dans l’affaire T‑475/14 au soutien des conclusions de la Commission européenne.

2)      Le greffier communiquera à Pirelli & C. SpA une version non confidentielle de tout acte de procédure signifié aux parties.

3)      Un délai sera fixé à la partie intervenante pour présenter ses observations éventuelles sur les demandes de traitement confidentiel. La décision sur le bien-fondé de cette demande est réservée.

4)      Un délai sera fixé à la partie intervenante pour présenter un mémoire en intervention, sans préjudice de la possibilité de le compléter, le cas échéant, compte tenu de la décision à prendre sur la demande de traitement confidentiel.

5)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 25 juin 2015.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       D. Gratsias


* Langue de procédure : l'anglais.