Language of document : ECLI:EU:T:2012:329

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

28 juin 2012 (*)

« Marque communautaire – Marque communautaire verbale COOK’S – Absence de demande de renouvellement de la marque – Radiation de la marque à l’expiration de l’enregistrement – Requête en restitutio in integrum – Article 81 du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑314/10,

Constellation Brands, Inc., établie à Fairport, New York (États-Unis), représentée par M. B. Brandreth, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. D. Botis et Mme V. Melgar, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 29 avril 2010 (affaire R 1048/2009-1), en ce qu’elle a rejeté sa demande en restitutio in integrum,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. H. Kanninen (rapporteur), président, N. Wahl et S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : Mme T. Weiler, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 juillet 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 19 octobre 2010,

à la suite de l’audience du 19 avril 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 22 décembre 1999, l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) a procédé à l’enregistrement de la marque verbale COOK’S (ci-après la « marque ») à la suite d’une demande d’enregistrement de marque communautaire, en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)], déposée par la requérante le 22 septembre 1998.

2        Le 25 février 2008, l’OHMI a informé le cabinet Boult Wade Tennant (ci-après « BWT »), représentant de la requérante auprès de l’OHMI, de l’expiration de l’enregistrement de la marque à la date du 22 septembre 2008, en précisant que la demande de renouvellement de la marque ainsi que le paiement de la taxe de renouvellement devaient lui parvenir au plus tard le 30 septembre 2008 et que, sous réserve du paiement d’une surtaxe, ce délai pouvait être prolongé jusqu’au 31 mars 2009.

3        Par courriers des 1er mai, 1er juillet et 1er août 2008, BWT a informé la requérante de l’expiration imminente de l’enregistrement de la marque.

4        Le 12 août 2008, le mandataire américain de la requérante a écrit à BWT pour s’informer des coûts et des documents nécessaires en vue du renouvellement de la marque. BWT a répondu par courriel du 13 août 2008. Le même jour, également par courriel, le mandataire américain de la requérante a demandé à BWT de renouveler la marque.

5        Le 21 avril 2009, l’OHMI a informé BWT de l’expiration du délai imparti et de la radiation subséquente de la marque du registre des marques communautaires avec effet au 22 septembre 2008.

6        Le 27 avril 2009, le mandataire américain de la requérante s’est informé auprès de BWT du renouvellement de la marque.

7        Le 22 juin 2009, BWT a déposé une requête en restitutio in integrum en vertu de l’article 81 du règlement n° 207/2009.

8        Le 8 juillet 2009, le département « Marques et registre » de l’OHMI a rejeté la demande en restitutio in integrum et a confirmé la radiation de la marque, au motif que BWT n’avait pas fait la preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances.

9        Le 7 septembre 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision du département « Marques et registre » du 8 juillet 2009.

10      Par décision du 29 avril 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours, estimant que BWT n’avait pas démontré avoir fait la preuve de « toute la vigilance nécessitée par les circonstances » au sens de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009. Elle a tout d’abord indiqué que les dispositions de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 « sont d’interprétation stricte dans la mesure où le respect d’un délai relève de l’intérêt public ». Partant, selon la chambre de recours, « bien qu’une impossibilité absolue ne soit pas exigée, les difficultés doivent être anormales, indépendantes de la volonté de la personne concernée et apparemment inévitables même en faisant preuve de toute la vigilance requise ». Or, selon la chambre de recours, les circonstances invoquées par BWT, à savoir une erreur humaine et une défaillance du système informatique de sauvegarde, ne sauraient être considérées comme anormales et inévitables au sens de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009. À cet égard, la chambre de recours a relevé, premièrement, que, en dépit de la demande de la requérante, adressée à BWT, de renouveler l’enregistrement de la marque, le directeur du département « Renouvellements » de BWT avait omis d’accuser réception de cette demande et de transmettre les instructions à son personnel administratif en vue dudit renouvellement. La chambre de recours a indiqué, deuxièmement, que la requérante a seulement réagi huit mois plus tard, soit le 27 avril 2009, en découvrant sur le site Internet de l’OHMI que la marque n’avait pas été renouvelée. Étant donné qu’elle avait donné des instructions à BWT pour le renouvellement de l’enregistrement de la marque, qu’elle n’avait reçu ni accusé de réception desdites instructions, ni confirmation du renouvellement, ni facture, la chambre de recours a estimé qu’elle « aurait dû réagir plus tôt ». Elle a constaté, troisièmement, que BWT ne donnait aucune explication sur la gestion, en son sein, des courriels ni quant au fait que personne n’avait remarqué que le courriel du 13 août 2008 du mandataire américain de la requérante était resté sans réponse. La chambre de recours a estimé, quatrièmement, que BWT s’était fié à un seul système informatique, fourni par la société CPA, et qu’il ne s’agissait pas « d’un cas isolé ou inexplicable d’erreurs commises par CPA mais d’un problème interne sérieux ». La chambre de recours a considéré, cinquièmement, que BWT avait ignoré la lettre de l’OHMI du 25 février 2008. Or, selon la chambre de recours, si la date butoir du 30 septembre 2008, prévue dans cette lettre, avait été introduite dans le système informatique, l’omission du directeur du département « Renouvellements » de BWT aurait été remarquée, nonobstant la défaillance du système informatique.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        renvoyer l’affaire devant l’OHMI en l’invitant à faire droit à la requête en restitutio in integrum ;

–        condamner l’OHMI aux dépens encourus par elle devant la chambre de recours ainsi que dans le cadre de la présente instance.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 81 du règlement n° 207/2009. Ce moyen est constitué de deux branches. Dans le cadre de la première branche, la requérante soutient que la chambre de recours a incorrectement interprété les dispositions de l’article 81 du règlement n° 207/2009. Dans le cadre de la seconde branche, la requérante prétend que la chambre de recours a commis une erreur dans l’appréciation des faits de l’espèce, en estimant que la requérante et BWT n’avaient pas fait la preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances au sens de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

 Sur la première branche tirée, d’une erreur d’interprétation de l’article 81 du règlement n° 207/2009

14      La requérante rappelle d’abord que, selon l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, la restitutio in integrum est subordonnée, notamment, à la condition que la partie ait agi avec toute la vigilance nécessaire au regard des circonstances. Or, en invoquant, au point 12 de la décision attaquée, les « difficultés anormales » « indépendantes de la volonté » et « apparemment inévitables », la chambre de recours aurait donné une interprétation rigoureuse des termes « vigilance nécessitée par les circonstances » de l’article 81 du règlement n° 207/2009, que ce texte ne requiert pas. Selon la requérante, une telle interprétation serait incorrecte en ce qu’elle emprunterait aux termes utilisés par la Cour pour définir la notion de force majeure (arrêt de la Cour du 9 février 1984, Acciaierie e Ferriere Busseni/Commission, 284/82, Rec. p. 557).

15      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, « le demandeur ou le titulaire d’une marque communautaire ou toute autre partie à une procédure devant l’[OHMI] qui, bien qu’ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances, n’a pas été en mesure d’observer un délai à l’égard de l’[OHMI] est, sur requête, rétabli dans ses droits si l’empêchement a eu pour conséquence directe, en vertu des dispositions du présent règlement, la perte d’un droit ou celle d’un moyen de recours ».

17      Il ressort de cette disposition que la restitutio in integrum est subordonnée à deux conditions, la première étant que la partie ait agi avec toute la vigilance nécessaire au regard des circonstances et la seconde que l’empêchement de la partie ait eu pour conséquence directe la perte d’un droit ou celle d’un moyen de recours [arrêts du Tribunal du 20 avril 2010, Rodd & Gunn Australia/OHMI (Représentation d’un chien), T‑187/08, non publié au Recueil, point 28, et du 15 septembre 2011, Prinz Sobieski zu Schwarzenberg/OHMI – British-American Tobacco Polska (Romuald Prinz Sobieski zu Schwarzenberg), T‑271/09, non publié au Recueil, point 53].

18      Il ressort également de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 que le devoir de vigilance incombe, au premier chef, au demandeur ou au titulaire d’une marque communautaire ou à toute autre partie à une procédure devant l’OHMI. Toutefois, si ces personnes se font représenter, le représentant est, tout autant que ces personnes, soumis au devoir de vigilance. En effet, celui-ci agissant au nom et pour le compte du demandeur ou du titulaire d’une marque communautaire ou de toute autre partie à une procédure devant l’OHMI, ses actes doivent être considérés comme étant ceux de ces personnes [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 13 mai 2009, Aurelia Finance/OHMI (AURELIA), T‑136/08, Rec. p. II‑1361, points 14 et 15, et Romuald Prinz Sobieski zu Schwarzenberg, point 17 supra, point 54].

19      Il convient ensuite de rappeler que les termes « toute la vigilance nécessitée par les circonstances » requièrent la mise en place d’un système de contrôle et de surveillance interne des délais qui exclut généralement le non-respect involontaire de ceux-ci, ainsi que le prévoient les directives de l’OHMI. Il s’ensuit que seuls des évènements à caractère exceptionnel et partant imprévisibles selon l’expérience peuvent donner lieu à une restitutio in integrum (voir, en ce sens, arrêts AURELIA, point 18 supra, point 26, et Romuald Prinz Sobieski zu Schwarzenberg, point 17 supra, point 61).

20      Partant, la circonstance que la chambre de recours a indiqué, au point 12 de la décision attaquée, que, « bien qu’une impossibilité absolue ne soit pas exigée, les difficultés doivent être anormales, indépendantes de la volonté de la personne concernée et apparemment inévitables même en faisant preuve de toute la vigilance requise », ne permet pas de considérer que la chambre de recours a, en l’espèce, commis une erreur dans l’interprétation des dispositions de l’article 81 du règlement n° 207/2009.

21      À cet égard, ainsi que l’indique à juste titre l’OHMI, le point 12 de la décision attaquée ne saurait être lu indépendamment des autres points de la décision attaquée. Or, il y a lieu de relever notamment que, au point 18 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que « la restitutio in integrum peut être accordée si, en dépit de toute la vigilance requise, le représentant lui-même ou son personnel administratif commet une erreur excusable ou si des évènements imprévisibles surviennent ».

22      Il convient d’observer en outre que la requérante se contente de considérations abstraites sans indiquer en quoi, en l’espèce, la chambre de recours aurait concrètement fait une interprétation rigoureuse des dispositions de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 non conforme à la jurisprudence. La requérante n’indique pas, en particulier, en quoi l’emploi de l’expression « évènements à caractère exceptionnel » au lieu de « difficultés anormales » ou de l’expression « évènements imprévisibles » au lieu de « difficultés indépendantes de la volonté de la personne concernée et apparemment inévitables » démontrerait que la chambre de recours se serait départie de la correcte interprétation de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

23      Compte tenu de ce qui précède, le simple constat établi par la requérante que la chambre de recours a employé dans la décision attaquée les mêmes termes que ceux se trouvant dans l’arrêt de la Cour du 9 février 1984, point 14 supra, dans sa partie relative à la définition de la force majeure, n’est pas pertinent.

24      Il s’ensuit que la première branche du moyen doit être rejetée.

 Sur la seconde branche, tirée d’une appréciation erronée des faits

25      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a commis une erreur dans l’appréciation des faits de l’espèce, en estimant qu’elle et BWT n’avaient pas fait la preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances au sens de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

26      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

27      Il y a d’abord lieu d’indiquer qu’il ressort du dossier que le non-respect du délai pour le renouvellement de l’enregistrement de la marque est imputable, d’une part, à une erreur humaine et, d’autre part, à une défaillance du système informatique Inprotech. Ce constat n’est pas litigieux entre les parties.

28      S’agissant d’abord de l’erreur commise par le responsable en charge des renouvellements de BWT, il y a lieu de rappeler que des erreurs humaines commises lors de la gestion technique des renouvellements ne sauraient être considérées comme étant des évènements à caractère exceptionnel ou imprévisibles selon l’expérience (voir, en ce sens, arrêt AURELIA, point 18 supra, point 28). Dès lors, l’erreur commise par le responsable « Renouvellements » de BWT constitue un manquement au devoir de vigilance qui incombait à BWT. À cet égard, la requérante indique d’ailleurs dans sa requête que « le manquement du responsable des renouvellements à son obligation de communiquer des instructions de renouvellement faisait partie de la chaîne des évènements qui ont débouché sur le manquement à l’obligation de renouvellement ».

29      En ce qui concerne ensuite la défaillance du système informatique Inprotech, le Tribunal a déjà jugé que, dans le cas où le renouvellement des marques est confié à une société spécialisée utilisant un système informatisé de rappel des délais, la vigilance nécessitée par les circonstances requiert, premièrement, que la conception générale dudit système assure le respect des délais, deuxièmement, que ce système permette de détecter et de corriger toute erreur prévisible dans l’exécution des tâches des employés de la société spécialisée ainsi que dans le fonctionnement du système informatisé et, troisièmement, que les employés de la société spécialisée amenés à saisir les données nécessaires et à utiliser ledit système soient, de manière adéquate, formés, tenus de vérifier leurs opérations et supervisés (voir en ce sens, arrêt AURELIA, point 18 supra, point 27).

30      Or, en l’espèce, il y a lieu de relever que, pour toute explication de la défaillance du système informatique utilisé par BWT, la requérante indique, dans la requête, que ce système « s’était détérioré, ce qui avait entraîné une erreur de programmation qui a fait obstacle à la production des courriels de rappels », et qualifie cette détérioration du système informatique d’« imprévisible » et d’« exceptionnelle ». La requérante ne donne pas plus d’explications à cet égard pour apprécier si la défaillance en cause constitue ou non un risque prévisible, inhérent à tout système informatique.

31      En conséquence, il y a lieu de considérer que la requérante n’a pas démontré que BWT avait fait la preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances au sens de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

32      Cette conclusion ne saurait être infirmée par les prétendues erreurs manifestes d’appréciation commises par la chambre de recours aux points 24 à 27 de la décision attaquée.

33      En ce qui concerne, premièrement, le point 24 de la décision attaquée, la requérante conteste le commentaire selon lequel le mandataire américain de la requérante « aurait dû réagir » avant le 27 avril 2009.

34      Il y a d’abord lieu de rappeler que le mandataire américain de la requérante a demandé à BWT, par courriel du 13 août 2008, de renouveler l’enregistrement de la marque et qu’il ne s’est informé auprès de BWT du renouvellement de ladite marque que le 27 avril 2009, soit plus de huit mois plus tard. Il convient de relever ensuite que la requérante n’a, ni dans ses écritures, ni à l’audience, donner d’explications convaincantes sur l’inertie dudit mandataire durant plusieurs mois. Or, n’ayant reçu de la part de BWT, à l’issue de sa demande de renouvellement de la marque, ni accusé de réception de sa demande, ni confirmation du renouvellement de la marque, ainsi que l’indique à juste titre la chambre de recours au point 24 de la décision attaquée, le mandataire américain de la requérante eût pu s’informer plus tôt sur l’état d’avancement de la procédure de renouvellement de la marque.

35      En outre, la requérante soutient qu’elle a fait preuve de toute la vigilance requise en ce que, d’une part, elle a confié à un cabinet renommé et expérimenté d’avoués spécialisés dans le domaine des marques la réalisation des renouvellements de sa marque et en ce que, d’autre part, le mandataire américain a adressé la demande de renouvellement de la marque au responsable « Renouvellements » de BWT. Ces considérations ne sont toutefois pas de nature à expliquer pourquoi elle ou ledit mandataire ont attendu le 27 avril 2009 pour s’informer auprès de BWT du renouvellement de la marque.

36      S’agissant, deuxièmement, du point 25 de la décision attaquée, la requérante conteste l’observation de la chambre de recours selon laquelle les modalités de traitement, au sein de BWT, des courriels, et, en particulier, de celui du 13 août 2008 par lequel le mandataire américain de la requérante a demandé le renouvellement de la marque, n’étaient pas claires. Selon la requérante, une procédure de renouvellement des marques était instituée au sein de BWT, comme il ressortirait du témoignage écrit de M. J. W., membre du cabinet BWT.

37      Il y a d’abord lieu de constater qu’il ne ressort pas du point 25 de la décision attaquée que la chambre de recours fait grief de l’absence de clarté de la procédure de renouvellement instituée au sein de BWT. Il ressort en revanche du point 25 de la décision attaquée que BWT « ne fournit aucune explication sur la gestion des courriels dans son bureau » et que « personne n’a remarqué que le courriel [du mandataire américain de la requérante du 13 août 2008] était resté sans réponse ».

38      Or, sur ce point, la requérante se contente d’indiquer, dans sa requête, que, si elle n’a pas fourni d’explication sur la gestion des courriels par BWT et en particulier sur l’erreur commise par le responsable des renouvellements de BWT qui a passé outre la demande de renouvellement de son mandataire américain, c’est au motif que la cause fondamentale du manquement au renouvellement de la marque n’aurait pas été l’erreur humaine du responsable « Renouvellements » de BWT, mais la défaillance du système informatique. Ce faisant, la requérante n’établit pas que l’affirmation de la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée est erronée.

39      Quant à l’argument de la requérante selon lequel il ne saurait être reproché à BWT de ne pas avoir vérifié auprès de l’OHMI si la marque avait été renouvelée dans la mesure où, pour BWT, il n’était pas prévu que la marque devait faire l’objet d’un renouvellement, il y a lieu de considérer que la requérante ne saurait se prévaloir de l’erreur du responsable des renouvellements au sein de BWT pour inférer que BWT ne savait pas que la marque devait être renouvelée.

40      En ce qui concerne, troisièmement, le point 27 de la décision attaquée, la requérante critique le commentaire de la chambre de recours selon lequel BWT « a ignoré la lettre de l’OHMI, envoyée le 25 février 2008, lui accordant un délai jusqu’au 30 septembre 2008 pour introduire la demande et payer les taxes dues » puisque, « si cette date butoir importante avait été introduite dans le système informatique de [BWT], l’omission du directeur du département ‘renouvellements’ aurait été remarquée, nonobstant la défaillance du système informatique […] ».

41      Selon la requérante, la date du 30 septembre 2008, indiquée dans le courrier de l’OHMI du 25 février 2008, aurait été enregistrée dans le système informatique de BWT, ce dont témoignerait l’envoi, à la requérante, par BWT, des lettres d’avertissement des 1er mai, 1er juillet et 1er août 2008.

42      Or, à supposer même que la chambre de recours ait commis une erreur d’appréciation au point 27 de la décision attaquée en affirmant que la date du 30 septembre 2008 n’avait pas été introduite dans le système informatique de BWT, la constatation, au point 31 ci-dessus, que BWT n’a pas fait la preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances ne saurait être considérée comme remise en cause. En effet, la requérante n’apporte pas d’élément permettant de démontrer en quoi l’introduction de la date du 30 septembre 2008 dans le système informatique de BWT serait de nature à infirmer le manquement au devoir de vigilance du responsable des renouvellements au sein de BWT ou à établir le caractère exceptionnel de la défaillance du système informatique.

43      Enfin, la requérante conteste l’affirmation de la chambre de recours, au point 26 de la décision attaquée, selon laquelle « il semble que BWT se fie à un seul système, Inprotech, adapté en partie par CPA et en partie en interne » et « il ne s’agit pas d’un cas isolé ou inexplicable d’erreurs commises par CPA mais d’un problème interne sérieux ».

44      À titre liminaire, il importe de préciser que BWT utilise un système informatisé de gestion des renouvellements, dénommé Inprotech, fourni par la société CPA.

45      La requérante prétend en substance qu’il ne saurait être déduit des décisions des chambres de recours citées au point 26 de la décision attaquée que la société CPA connaît un « problème interne sérieux ». À cet égard, la requérante invoque plusieurs arguments.

46      D’abord, elle affirme que la défaillance du système informatique ne tient pas à sa conception mais à sa détérioration ultérieure et imprévisible. Elle n’étaye toutefois pas cet argument par des éléments de fait concret de nature à établir la véracité de son affirmation. Ainsi que le relève à juste titre l’OHMI, l’absence d’explications détaillées sur l’erreur informatique en cause ne permet pas d’exclure la possibilité que le système comportait des défauts inhérents à sa conception.

47      Ensuite, la requérante soutient que le simple fait que la société CPA a déposé, dans le passé, des requêtes en restitutio in integrum ne démontre pas l’existence d’un « problème interne sérieux ». D’ailleurs, la requérante précise que, dans les décisions des chambres de recours citées dans la décision attaquée, les erreurs commises par la société CPA n’étaient pas liées au système informatique Inprotech.

48      Il convient toutefois de constater que, indépendamment de la question de savoir si, dans les décisions des chambres de recours, il était également question des défaillances du système informatique Inprotech, la requérante ne parvient pas à contredire la constatation de la chambre de recours selon laquelle la requérante n’établit pas en quoi la défaillance du système informatique dans la présente affaire devrait être considérée comme exceptionnelle.

49      De tout ce qui précède, il s’ensuit que la seconde branche du moyen doit être rejetée et, partant, le recours dans son ensemble, sans qu’il soit besoin de statuer sur le deuxième chef de conclusions.

 Sur les dépens

50      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Constellation Brands, Inc. est condamnée aux dépens.

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 juin 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.