Language of document : ECLI:EU:T:2007:370

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

11 décembre 2007 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaire – Recours en annulation – Prime de fonctions – Fonction de ‘chef d’unité’ – Égalité de traitement – Obligation de motivation – Régime linguistique »

Dans l’affaire T‑66/05,

Jörn Sack, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Berlin (Allemagne), représenté par Mes U. Lehmann‑Brauns et D. Mahlo, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. V. Joris et H. Krämer, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation des décisions relatives à la fixation du traitement mensuel du requérant pour les mois de mai 2004 à février 2005, une demande de procéder à un nouveau calcul de ce traitement et une demande d’annulation de la décision explicite de rejet de la réclamation du requérant, notifiée à celui-ci le 26 novembre 2004,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. M. Vilaras, président, F. Dehousse et D. Šváby, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 décembre 2006,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique du litige

1        L’article 44, deuxième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable dans la présente espèce (ci‑après le « statut »), dispose :

« Le fonctionnaire nommé chef d’unité, directeur ou directeur général dans le même grade, bénéficie, pour autant qu’il se soit acquitté de ses nouvelles fonctions d’une manière satisfaisante durant les neuf premiers mois, d’un avancement d’échelon dans ce grade avec effet à la date de sa nomination. Cet avancement entraîne une augmentation du traitement mensuel de base égale au pourcentage de progression du premier au deuxième échelon de chaque grade. Si le montant de l’augmentation est inférieur à ce pourcentage de progression ou si le fonctionnaire a déjà atteint le dernier échelon de son grade, il reçoit une majoration du traitement de base lui permettant de bénéficier de l’augmentation du premier au deuxième échelon jusqu’à ce que sa prochaine promotion prenne effet. »

2        L’article 46 du statut dispose :

« Le fonctionnaire nommé à un grade supérieur conformément à l’article 45 est classé au premier échelon de ce grade. Toutefois, le fonctionnaire des grades AD 9 à AD 13 exerçant les fonctions de chef d’unité qui est nommé à un grade supérieur conformément à l’article 45 est classé au deuxième échelon de son nouveau grade. La même dérogation s’applique au fonctionnaire :

a)       promu sur un emploi de directeur ou de directeur général ou

b)       occupant un emploi de directeur ou de directeur général et auquel s’applique la dernière phrase de l’article 44, deuxième alinéa. »

3        L’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut dispose que :

« Les fonctionnaires des grades A* 10 à A* 16 et AD 10 à AD 16 qui, en date du 30 avril 2004, occupent un poste de chef d’unité, directeur ou directeur général ou sont nommés par la suite chef d’unité, directeur ou directeur général, et qui se sont acquittés de leurs nouvelles fonctions de manière satisfaisante durant les neuf premiers mois, bénéficient d’une augmentation du traitement mensuel de base correspondant à la différence en pourcentage entre le premier et le deuxième échelon de chacun des grades indiqués dans le tableau de l’article 2, paragraphe 1, et dans le tableau de l’article 8, paragraphe 1. »

4        La décision de la Commission du 28 avril 2004 relative au personnel d’encadrement intermédiaire, publiée aux Informations administratives n° 73-2004, du 23 juin 2004 (ci‑après la « décision du 28 avril 2004 ») dispose ce qui suit :

« […]

Article 2 : Définitions

1. Fonctions et personnel d’encadrement intermédiaire

Une fonction d’encadrement intermédiaire se définit suivant deux critères cumulatifs :

–        elle consiste en la direction permanente et continue d’une unité administrative ;

–        elle figure dans l’organigramme officiel de la Commission.

Appartient au personnel d’encadrement intermédiaire une personne qui remplit en même temps ces deux critères.

Par conséquent, les fonctions de chef d’unité, chef de délégation [note en bas de page n° 7 : les chefs de délégation relevant du poste de directeur ou de directeur général ne sont pas visés par la présente décision], chef de bureau ou de représentation dans les États membres ainsi que celles de chef adjoint de délégation de niveau AD 13 [à] AD 14 [note en bas de page n° 8 : lorsqu’il est fait référence dans la présente décision à un grade du groupe de fonctions AD, cette référence vaut également pour le grade correspondant de la catégorie A* durant la période du 1er mai 2004 au 30 avril 2006] sont des fonctions d’encadrement intermédiaire [note en bas de page n° 9 : pour la clarté du reste de la présente décision, le terme ‘chef d’unité’ comprend toutes les fonctions mentionnées dans cet article ; les conseillers n’exercent pas de fonctions d’encadrement et ne font pas partie du personnel d’encadrement intermédiaire ; ils figurent dans l’organigramme officiel de la Commission] et sont couvertes par la présente décision.

Ces fonctions sont pourvues soit aux grades AD 9 [à] AD 12, soit aux grades AD 13 [à] AD 14.

2. Tâches de gestion hors organigramme

Les chefs d’unité adjoints et les chefs de secteur assurent dans certains cas des tâches de gestion (‘management tasks’) déléguées par le chef d’unité. Ils n’apparaissent pas dans l’organigramme officiel de la Commission. Ils ne font pas partie du personnel d’encadrement intermédiaire.

[…]

Article 4 : Rôle des chefs d’unités

Le rôle dévolu aux chefs d’unité revêt une importance particulière. Ils doivent posséder des compétences spécifiques de gestion (gestion des ressources humaines et, le cas échéant, des ressources financières) ainsi qu’un degré approprié de connaissances spécialisées et d’expertise technique.

Sans que cette liste soit exhaustive et limitative, le rôle et la responsabilité du chef d’unité couvrent essentiellement trois aspects :

–        Le chef d’unité donne à l’unité les orientations en matière de politiques et d’actions sur la base de la lettre de mission et du programme de travail annuel de la direction générale/direction. Il définit le programme de travail de l’unité, coordonne les activités au sein de l’unité ainsi qu’avec les autres unités et la représente dans les réunions importantes.

–        Il est l’intermédiaire principal dans les échanges d’informations entre les cadres supérieurs et les membres de l’unité.

–        Il est directement responsable de la gestion des ressources humaines et, souvent, des ressources financières relevant de son unité.

[…] »

5        La décision de la Commission du 26 mai 2004 relative à l’application de l’article 44, paragraphe 2, de l’article 46 du statut et de l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut (ci‑après la « décision du 26 mai 2004 ») dispose ce qui suit :

« 1. [L’article] 44, paragraphe 2, et [l’article] 46 du statut ainsi que l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut prévoient des augmentations spécifiques des salaires de base des chefs d’unité, des directeurs et des directeurs généraux.

2. Cet avantage vise à récompenser les obligations et responsabilités particulières liées aux fonctions d’encadrement. Ainsi, la communication de la Commission du 11 décembre 2001 [note en bas de page : SEC (2001) 1990/6 du 11 décembre 2001] prévoit que tout le personnel d’encadrement intermédiaire en bénéficie. Cependant, la notion d’encadrement intermédiaire étant spécifique à la Commission, les articles du statut mentionnés ci-dessus font référence à cette catégorie de personnel sous la dénomination de chefs d’unité. L’application de ces dispositions au sein de la Commission doit tenir compte de l’objectif de ces articles afin de garantir que l’idée se trouvant derrière ces dispositions devienne effective, cette idée ayant pour origine le livre blanc de la Commission.

3. Les différences organisationnelles entre les institutions, et même au sein de la Commission, entre ses différents services doivent donc être prises en compte dans le cadre de l’interprétation de la terminologie utilisée dans [l’article] 44, paragraphe 2, [dans l’article] 46 du statut et dans l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut.

4. Dans la décision [du] 28 avril 2004, la Commission a énuméré un certain nombre de fonctions qu’elle consid[érait] comme appartenant à la catégorie des fonctions d’encadrement intermédiaire. Ces fonctions sont celles de chef d’unité, chef de délégation (exception faite des personnes occupant un emploi type de directeur ou de directeur général), chef de bureau ou de représentation dans les États membres ainsi que celles de chef adjoint de délégation de niveau AD 13/AD 14 [note en bas de page : la référence à un grade dans le groupe de fonctions ‘AD’ renvoie également au grade correspondant dans la catégorie A* durant la période allant du 1er mai 2004 [jusqu’]au 30 avril 2006].

Le fait que ces fonctions aient une dénomination différente de celle de chef d’unité est dû aux structures organisationnelles spécifiques dans le cadre desquelles elles sont exercées (par exemple, dans le cadre de services spécifiques tels que la [direction générale de la traduction], les délégations, les représentations, etc.). Par conséquent, cette différence est purement terminologique et non pas substantielle. Les personnes occupant ces fonctions au sein de la Commission sont donc considérées comme étant des chefs d’unité au sens des dispositions du statut susmentionnées.

En outre, dans [l]a décision du 28 avril 2004, la Commission a défini les deux critères constituant les éléments essentiels des fonctions d’encadrement intermédiaire. En application de ces deux critères (direction permanente et continue d’une unité administrative et présence dans l’organigramme officiel de la Commission) et compte tenu de l’objectif des articles pertinents du statut, la Commission considère également les superviseurs d’audit du service d’audit interne, les chefs de service de la direction générale de la traduction et du service commun interprétation-conférences et les présidents du comité central du personnel et du ‘groupe ad hoc’ comme étant des chefs d’unité au sens de ces dispositions.

5. L’objectif de récompense pour les obligations et responsabilités particulières liées aux fonctions d’encadrement a également été pris en compte dans le cadre de l’interprétation des termes ‘directeur’ et ‘directeur général’.

C’est pourquoi, aux fins de l’application [de l’article] 44, paragraphe 2, [de l’article 46] du statut et de l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut, la Commission considère que, au sein de la Commission, ces termes couvrent également les fonctions exercées par :

–        le secrétaire général ;

–        les chefs de délégation occupant des emplois types de directeur ou de directeur général ;

–        les conseillers juridiques principaux.

[…] »

6        Les Informations administratives n° 83-2001, du 20 septembre 2001, portant sur les « nouvelles modalités pour l’introduction et le traitement des demandes et réclamations au titre de l’article 90, paragraphe 1, et de l’article 90, paragraphe 2, du statut », disposent au troisième alinéa du point 5.4, intitulé « Délai d’introduction », ce qui suit :

« Le cachet d’enregistrement de l’unité ‘[S]tatut’ [de la direction  ‘Droits et obligations ; politique et actions sociales’ de la direction générale ‘Personnel et administration’] fera foi en ce qui concerne la date de l’introduction de la réclamation à partir de laquelle les délais courent. Les délais d’acheminement tant par la poste ordinaire que par la voie interne ne seront pas pris en considération. »

 Faits à l’origine du litige

7        Le requérant est devenu fonctionnaire de la Commission en 1977 et a été affecté au service juridique. Au moment de son départ à la retraite, le 1er mars 2005, le requérant se trouvait classé au grade A* 14, échelon 7.

8        En janvier 1996, le requérant a été promu au grade A 3. En février 2002, il a pris en charge la fonction de coordinateur pour toutes les questions juridiques relatives à l’élargissement de l’Union européenne dans l’équipe du service juridique compétente pour les relations extérieures de l’Union européenne, dirigée par un conseiller juridique principal de grade A* 15 (anciennement grade A 2)

9        Le 21 juin 2004, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, le requérant a remis à l’assistant du directeur général du service juridique une réclamation (ci‑après la « réclamation personnelle »), transmise le 13 août 2004 à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’« AIPN ») par voie interne. Dans cette réclamation, le requérant a, en substance, décrit sa fonction spécifique au sein du service juridique et en a déduit un droit à une prime de fonctions au sens de l’article 44, deuxième alinéa, du statut (ci‑après la « prime de fonctions »).

10      Le 9 août 2004, le requérant et seize autres conseillers juridiques du service juridique ont introduit une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, concernant, également, le droit à la prime de fonctions (ci‑après la « réclamation collective »).

11      Le 27 août 2004, le requérant a adressé une note à l’AIPN, dans laquelle il a fourni des informations complémentaires au sujet des responsabilités qu’il exerçait.

12      Le 26 novembre 2004, le requérant s’est vu notifier la décision du 24 novembre 2004 intitulée « Décision de l’[AIPN] faisant suite à la réclamation introduite par M. Jörn Sack (R/765/04) » (ci‑après la « décision de rejet »). Dans cette décision, l’AIPN informe le requérant, en substance, de ce que la décision implicite l’excluant du bénéfice de la prime de fonctions prévue à l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut, qui découle de ses fiches de rémunération des mois de mai et de juin 2004, résulte d’une application correcte des dispositions pertinentes. Le requérant ne serait pas éligible en ce qui concerne la prime de fonctions, n’étant pas chef d’unité. L’AIPN met en exergue que la fonction du requérant n’est pas mentionnée parmi celles définies comme étant des fonctions d’encadrement intermédiaire dans la décision du 28 avril 2004 ni parmi celles assimilées à la fonction de chef d’unité dans la décision du 26 mai 2004. Les conseillers juridiques de grade A 3 ne rempliraient pas les deux critères qui définissent, à l’article 2 de la décision du 28 avril 2004, les fonctions d’encadrement intermédiaire. Le requérant n’aurait pas affirmé qu’un conseiller juridique A 3 du service juridique assumait l’une des trois responsabilités essentielles qui caractérisent le travail d’un chef d’unité, auxquelles renvoie l’article 4 de la décision du 28 avril 2004. Selon l’AIPN, bien qu’il puisse y avoir une certaine subdélégation de facto des tâches de coordination vers les conseillers juridiques de grade A 3, il s’agit d’une subdélégation informelle et ad hoc. Les conseillers juridiques de grade A 3 n’exerceraient donc pas de fonctions d’encadrement, mais des fonctions de coordination horizontale et n’auraient pas de responsabilités dans l’établissement des rapports de notation, dans le déroulement de l’exercice de promotion annuel ni de responsabilités budgétaires. Ils n’exerceraient pas non plus de responsabilités dans le contrôle et l’autorisation des congés, des missions, de l’horaire flexible, du travail à temps partiel et de la formation. Enfin, ils ne participeraient pas aux procédures administratives relatives aux réclamations et aux mesures disciplinaires.

13      Le 30 novembre 2004, le requérant a envoyé à Mme S. de l’unité « Recours » de la direction « Statut : politique, gestion et conseil » de la direction générale (DG) « Personnel et administration », un courrier électronique, dans lequel il affirmait qu’il ne retrouvait dans la décision de rejet aucun argument relatif à sa réclamation personnelle, et il s’interrogeait sur la suite qui y était réservée.

14      Mme S. lui a répondu, le même jour, par un courrier électronique libellé comme suit :

« […]

Le formulaire que vous avez envoyé le 9 août 2004 avec, en annexe, la réclamation ‘standard’ introduite par les autres A* 14 du service juridique a été reçu et enregistré ici le 11 août, sous l[a référence] R/765/04. Votre demande rédigée en allemand (non datée) a été transmise (par e-mail) par M. [O’L.] à M. [Re.] et à M. [Ra.] le 13 août et elle a été ajoutée au dossier R/765/04 déjà existant le 17 août. Elle a été traduite en anglais à ma demande et j’ai reçu la traduction le 20 septembre. J’ai également ajouté au même dossier la note que vous m’avez adressée le 27 août et à laquelle était annexé un extrait de l’organigramme de l’équipe [‘Relations extérieures’] du [service juridique].

En d’autres termes, toutes les pièces que vous avez fournies ont été mises dans le même dossier, puisqu’elles concernent toutes la même question et elles ont toutes été prises en considération lorsque la réponse a été rédigée, y compris les arguments que vous avez avancés en plus de ceux qui figurent dans la réclamation standard.

Nous estimons que la décision qui a été adoptée est suffisamment motivée, même si elle n’examine pas forcément de manière spécifique chaque argument avancé individuellement.

[…] »

 Procédure et conclusions des parties

15      Le 17 février 2005, le requérant a introduit le présent recours.

16      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, a invité les parties à déposer certains documents. Les parties ont déféré à cette demande dans les délais impartis.

17      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 14 décembre 2006.

18      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions relatives à la fixation de son traitement pour les mois allant de mai 2004 jusqu’à février 2005 et recalculer le traitement correspondant à ces mois ;

–        annuler la décision de rejet ;

–        condamner la Commission aux dépens.

19      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Arguments des parties

20      La Commission déduit de l’affirmation contenue dans la requête, selon laquelle le requérant poursuit, par le présent recours, « uniquement sa réclamation personnelle introduite en juin 2004 », que le requérant ne vise pas, dans ce recours, la réclamation collective.

21      La Commission s’interroge sur le fait de savoir si le délai de quatre mois pour répondre à la réclamation personnelle a commencé à courir à partir de la réception, le 21 juin 2004, de cette réclamation par l’assistant du directeur général du service juridique, ou à partir de sa transmission, de manière interne, le 13 août 2004, à l’AIPN.

22      Selon la Commission, dans la première hypothèse, la réclamation personnelle devrait être considérée comme rejetée implicitement le 21 octobre 2004. Le délai de dépôt de la requête aurait expiré, en tenant compte du délai de distance de dix jours, le 11 février 2005, c’est-à-dire avant la date d’introduction du présent recours, à condition que le Tribunal établisse qu’aucune décision explicite n’est intervenue après le rejet implicite de la réclamation et avant l’écoulement du délai de recours. Le fait que l’AIPN ne se serait référée, dans sa décision du 24 novembre 2004, qu’à la réclamation collective et n’aurait pris position que sur celle-ci, et non sur la réclamation personnelle, irait, selon la Commission, en ce sens.

23      Dans la deuxième hypothèse, le recours aurait été introduit dans les délais. Il conviendrait alors de vérifier, selon la Commission, si les griefs invoqués dans la requête correspondent aux observations formulées dans la réclamation personnelle. La Commission se demande si la volonté du requérant de donner suite, dans son recours, uniquement à la réclamation personnelle oblige le Tribunal à ne pas tenir compte de la réclamation collective. Cela serait important tant du point de vue des délais qu’en ce qui concerne la correspondance entre les griefs soulevés au stade précontentieux et ceux exposés dans la requête.

24      La Commission fait observer que le requérant conclut, dans son premier chef de conclusion, à l’annulation de la décision relative à la fixation de son traitement pour les mois allant de mai 2004 jusqu’à février 2005, alors que la réclamation personnelle et la réclamation collective ne concerneraient que les décisions relatives aux mois de mai 2004 et de juin 2004. Les décisions relatives au traitement des mois allant de juillet 2004 jusqu’à février 2005 n’ayant pas fait l’objet d’une procédure de réclamation, la première conclusion du recours doit être considérée, selon la Commission, comme étant irrecevable.

25      Le requérant fait valoir que la Commission n’évoque pas la clarification de la DG « Personnel et administration » du 30 novembre 2004, aux termes de laquelle la décision de rejet porterait tant sur la réclamation personnelle que sur la réclamation collective. Sous cet angle, la question de recevabilité du recours ne se poserait donc pas.

26      Dans l’hypothèse où un autre point de vue s’imposerait, le requérant soutient que, du fait de la clarification susmentionnée, la Commission serait elle-même à l’origine de l’irrecevabilité du recours. Des conséquences devraient en être tirées quant à la possibilité d’exciper de l’irrecevabilité et quant aux dépens. Le requérant prétend s’être adressé à la DG « Personnel et administration » pour obtenir une clarification, précisément en vue d’un éventuel recours.

27      La question de la période pour laquelle l’annulation des décisions relatives au traitement est demandée n’aurait aucune importance pour la solution des questions juridiques. Ce serait uniquement pour des raisons de présentation que le requérant aurait étendu sa demande à toutes les décisions pertinentes relatives au traitement.

 Appréciation du Tribunal

28      Il convient, en premier lieu, d’identifier le ou les acte(s) attaqué(s) en l’espèce. À cet égard, il y a lieu de rappeler que le requérant vise, dans ses conclusions, d’une part, l’annulation des décisions relatives à la fixation de son traitement pour les mois allant de mai 2004 jusqu’à février 2005 et, d’autre part, l’annulation de la décision de rejet.

29      Toutefois, s’agissant de cette dernière décision, il convient de relever que, selon la jurisprudence, la réclamation administrative et son rejet explicite ou implicite par l’AIPN font partie d’une procédure complexe. Dans ces conditions, le recours au Tribunal, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation du fonctionnaire, a pour effet de saisir le Tribunal de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée (voir arrêt du Tribunal du 4 juillet 2006, Tzirani/Commission, T‑88/04, non encore publié au Recueil, point 27, et la jurisprudence citée).

30      La réclamation collective, à laquelle fait explicitement référence la décision de rejet, visait « la décision implicite de la Commission de […] priver [les réclamants] du bénéfice de l’augmentation du traitement qui résulte de leurs fiches de rémunération respectives des mois de mai et de juin [2004] ». Par conséquent et selon la jurisprudence précitée, le recours, pour autant qu’il est dirigé contre la décision de rejet, a pour effet de saisir le Tribunal des fiches de rémunération du requérant des mois de mai et de juin 2004.

31      S’agissant des fiches de rémunération, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, elles constituent, en règle générale, des actes faisant grief, susceptibles de faire l’objet d’un recours (arrêts de la Cour du 19 janvier 1984, Andersen e.a./Parlement, 262/80, Rec. p. 195, point 4, et du Tribunal du 6 mars 2001, Dunnett e.a./BEI, T‑192/99, Rec. p. II‑813, point 66). Cependant, pour ce qui est, plus particulièrement, d’une fiche de rémunération dont ressort une décision de l’AIPN de refuser un avantage financier au fonctionnaire ou de lui retirer un avantage financier précédemment accordé, ce n’est que la première fiche de rémunération faisant apparaître cette décision qui constitue un acte attaquable. Les fiches de rémunération des mois suivants ne font que confirmer cette décision et, pour cette raison, constituent des actes purement confirmatifs de la première fiche de rémunération (voir, en ce sens, arrêt Dunnett e.a./BEI, précité, point 69), et ne peuvent faire l’objet d’un recours en annulation.

32      En l’espèce, il est constant que la première fiche de rémunération faisant apparaître la décision de l’AIPN de ne pas accorder au requérant la prime de fonctions est celle du mois de mai 2004. Par conséquent, le recours n’est recevable que pour autant qu’il vise l’annulation de cette fiche de rémunération. En revanche, dans la mesure où il vise l’annulation des fiches de rémunération des mois postérieurs, il est irrecevable, ces dernières ne constituant que des actes purement confirmatifs.

33      Le recours est également irrecevable dans la mesure où le requérant demande au Tribunal de recalculer son traitement correspondant aux mois de mai 2004 à février 2005. En effet, selon une jurisprudence constante, il n’appartient pas au juge communautaire d’adresser, dans le cadre du contrôle de légalité qu’il exerce, des injonctions aux institutions ou de se substituer à ces dernières, mais il incombe à l’administration concernée de prendre les mesures que comporte l’exécution d’un arrêt rendu dans le cadre d’un recours en annulation (voir arrêt du Tribunal du 27 janvier 1998, Ladbroke Racing/Commission, T‑67/94, Rec. p. II‑1, point 200, et la jurisprudence citée).

34      Il convient, en deuxième lieu, de contrôler si la procédure précontentieuse prévue par le statut ainsi que le délai pour l’introduction du recours ont été respectés en l’espèce, s’agissant de la fiche de rémunération du requérant du mois de mai 2004, seul acte attaqué contre lequel le recours est recevable.

35      À cet égard, il importe de relever, premièrement, que les conditions de recevabilité d’un recours fixées par les articles 90 et 91 du statut étant d’ordre public, le juge communautaire peut les examiner d’office (ordonnance du Tribunal du 16 mai 1994, Stagakis/Parlement, T‑37/93, RecFP p. I‑A‑137 et II‑451, point 17). Les délais de réclamation et de recours sont destinés à assurer la sécurité juridique et ne sauraient être laissés à la disposition des parties ou du juge (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 septembre 1991, Lacroix/Commission, T‑54/90, Rec. p. II‑749, point 24).

36      Deuxièmement, il incombe au Tribunal de procéder à la qualification juridique exacte des écrits adressés par le fonctionnaire à l’AIPN préalablement à l’introduction du recours et d’identifier, parmi ceux-ci, celui qui constitue la réclamation requise par le statut, sans être lié par la qualification de ces écrits par les parties (voir, en ce sens, ordonnances du Tribunal du 7 juin 1991, Weyrich/Commission, T‑14/91, Rec. p. II‑235, point 39, et du 25 février 1992, Torre/Commission, T‑67/91, Rec. p. II‑261, point 28).

37      Troisièmement, un acte de l’AIPN faisant grief ne peut faire l’objet que d’une seule réclamation, introduite à son égard par le fonctionnaire concerné. D’autres écrits éventuellement adressés par lui à l’AIPN après l’introduction de la réclamation, même qualifiés de « réclamations », ne peuvent constituer ni des demandes ni des réclamations, mais doivent être regardés comme étant simplement réitératives de la réclamation et ne peuvent avoir pour effet de prolonger la procédure précontentieuse (ordonnances Weyrich/Commission, point 36 supra, point 41, et Torre/Commission, point 36 supra, point 32).

38      Quatrièmement, enfin, s’agissant de la question de la date d’introduction d’une réclamation, il y a lieu de rappeler la jurisprudence selon laquelle le fonctionnaire ne saurait pâtir de facteurs indépendants de sa volonté, susceptibles de retarder la transmission de sa lettre de réclamation et il ne saurait donc être rendu responsable des défauts ou des lenteurs de transmission de service en service à l’intérieur de l’institution destinataire (arrêt Lacroix/Commission, point 35 supra, point 30).

39      En l’espèce, il est constant que le requérant a introduit deux réclamations à l’encontre de sa fiche de rémunération du mois de mai 2004, l’une personnelle, l’autre collective. Dans sa requête, le requérant déclare donner suite, par son recours, uniquement à la réclamation personnelle. Cependant, eu égard à la jurisprudence citée aux points 35 et 36 ci‑dessus, cette déclaration du requérant ne saurait empêcher le Tribunal de prendre en considération, pour l’appréciation de la recevabilité du recours, tous les écrits adressés par celui‑ci à l’AIPN antérieurement à l’introduction du recours, y compris la réclamation collective.

40      Les réclamations en question tendaient, toutes les deux, à l’annulation de la fiche de rémunération du requérant du mois de mai 2004, seul acte pouvant valablement être attaqué par le requérant. Il est certes vrai que la réclamation collective vise également la fiche de rémunération du mois de juin 2004 mais, ainsi qu’il a été relevé ci‑dessus, celle‑ci ne constitue qu’un acte confirmatif et la réclamation collective, dans la mesure où elle vise l’annulation de ce dernier bulletin, est irrecevable.

41      Par conséquent, dès lors que les deux réclamations ont le même objet, seule l’une d’entre elles, à savoir celle ayant été introduite en premier, constitue la réclamation au sens de l’article 90 du statut, tandis que l’autre, introduite ultérieurement, doit, selon la jurisprudence citée au point 37 ci‑dessus, être considérée comme étant une simple note réitérative de la réclamation.

42      À cet égard, il y a lieu de constater que la réclamation personnelle a été remise à l’assistant du directeur général du service juridique le 21 juin 2004. Celui‑ci ne l’a cependant transmise à l’AIPN que le 13 août 2004. La réclamation collective, quant à elle, a été introduite auprès de l’AIPN le 9 août 2004.

43      La question sur laquelle le Tribunal est amené à statuer est celle de savoir quelle est, parmi les deux dates du 21 juin ou du 13 août 2004, celle qu’il convient de considérer comme étant la date d’introduction de la réclamation personnelle et, par conséquent, quelle est, des deux réclamations, celle qui a été introduite en premier.

44      Selon la jurisprudence issue de l’arrêt Lacroix/Commission, point 35 supra, point 29, il convient de prendre en considération comme date d’introduction de la réclamation celle à laquelle l’administration est en mesure d’en prendre connaissance. En l’espèce, c’est le 21 juin 2004 que la réclamation personnelle a été portée à la connaissance de l’administration. Comme cela ressort de la jurisprudence citée au point 38 supra, le requérant ne saurait pâtir du fait que la réclamation personnelle n’a ensuite été transmise à l’AIPN, par la voie interne, que le 13 août 2004.

45      Le fait que les Informations administratives n° 83-2001, du 20 septembre 2001, prévoient au troisième alinéa du point 5.4 que « [l]e cachet d’enregistrement de l’unité ‘[S]tatut’ [de la direction ‘Droits et obligations ; politique et actions sociales’ de la DG ‘Personnel et administration’] fera foi en ce qui concerne la date de l’introduction de la réclamation à partir de laquelle les délais courent » et que « [l]es délais d’acheminement tant par la poste ordinaire que par la voie interne ne seront pas pris en considération » ne saurait invalider la conclusion que la date du 21 juin 2004 doit être considérée comme étant celle d’introduction de la réclamation personnelle. En effet, pour autant que ces Informations administratives s’écartent de la jurisprudence issue de l’arrêt Lacroix/Commission susvisée et fassent peser sur le fonctionnaire les conséquences de retards de transmission des documents internes à l’institution, elles ne reposent pas sur un fondement juridique correct et ne sauraient, partant, être prises en compte.

46      Ensuite, en ce qui concerne le fait que les Informations administratives susvisées prévoient l’utilisation d’un formulaire servant de feuille de couverture et d’accompagnement de chaque exemplaire d’une réclamation, il convient de noter qu’il s’agit, selon ces Informations administratives, d’une mesure visant à « faciliter la procédure ». Il ne saurait en être déduit qu’une réclamation non accompagnée d’un tel formulaire doive être déclarée irrecevable. Il en est d’autant plus ainsi que le statut ne soumet l’introduction d’une réclamation à aucune condition de forme particulière. D’ailleurs, la Commission elle‑même a soutenu à l’audience que le formulaire en question devait être considéré comme une aide pour ceux qui avaient l’intention d’introduire une réclamation.

47      La réclamation personnelle introduite le 21 juin 2004 l’a été dans le délai de trois mois prévu à l’article 90, paragraphe 2, du statut. En effet, ce délai a commencé à courir, en l’espèce, à partir de la date de la notification au requérant de sa fiche de rémunération du mois de mai 2004, visé dans la réclamation personnelle. Comme l’a affirmé la Commission à l’audience, en réponse à une question du Tribunal, le requérant avait dû recevoir cette fiche de rémunération le 15 ou le 16 mai 2004, par courrier interne, ce qu’il n’a pas contesté.

48      La réclamation personnelle a d’abord fait l’objet d’une décision implicite de rejet le 21 octobre 2004, confirmée avant l’expiration du délai pour l’introduction du recours, par la décision explicite de rejet du 24 novembre 2004 qui a fait courir de nouveau le délai de recours.

49      En effet, à ce dernier égard, il ressort, d’une part, du courrier électronique de Mme S. du 30 novembre 2004, invoqué par le requérant et non contesté par la Commission, que les services de cette dernière ont versé la réclamation personnelle et la réclamation collective dans le même dossier et les ont prises, toutes les deux, en considération, lors de la rédaction de la décision de rejet du 24 novembre 2004.

50      D’autre part, dans la décision de rejet, l’AIPN se réfère explicitement, au premier alinéa, aux « informations complémentaires » fournies par le requérant le 27 août 2004 « au sujet de ses responsabilités qui, selon lui, vont bien au‑delà de celles d’un chef d’unité ». Dans ces informations complémentaires, le requérant indique qu’il transmet « pour complément à [s]a [réclamation] un extrait de l’organigramme de l’équipe [‘Relations extérieures’] du service juridique qui démontre bien l’envergure de [s]es attributions au service juridique et en particulier [qu’il doit] suivre sur le plan juridique, l’ensemble des activités de l’Union [européenne] dans le cadre des négociations d’adhésion – ce qui exige des connaissances générales et spécifiques extrêmement larges et une responsabilité particulière qui va bien au‑delà des attributions d’un chef d’unité ».

51      Or, dans la mesure où ces informations complémentaires visent à compléter « [l]a [réclamation] [du requérant] » sur l’envergure de ses attributions, notamment dans le cadre des négociations d’adhésion, et sur sa responsabilité qui irait bien au‑delà de celle d’un chef d’unité, il convient de relever que ces éléments constituent également le fil conducteur de la réclamation personnelle. De même, les informations complémentaires contiennent l’annexe II de l’organigramme de l’équipe « Relations extérieures » qui est également mentionné dans la réclamation personnelle, et ce dans le même contexte, c’est-à-dire pour démontrer l’étendue du domaine suivi par le requérant.

52      Il ressort de ce qui précède que la décision de rejet constitue bien une réponse non seulement à la réclamation collective, mais également à la réclamation personnelle.

53      Dès lors que la décision de rejet, notifiée au requérant le 26 novembre 2004, a fait à nouveau courir le délai de recours de trois mois, conformément à l’article 91, paragraphe 3, du statut, il convient de conclure que le présent recours, introduit le 17 février 2005, l’a été dans le délai prévu par le statut.

54      Il s’ensuit que le recours est recevable.

 Sur le fond

55      Le requérant invoque trois moyens :

–        Premièrement, l’AIPN aurait commis une erreur de droit en répondant conjointement, dans une seule décision, à la réclamation personnelle et à la réclamation collective. Dans le cadre de la décision de rejet, l’AIPN aurait manqué à ses obligations en matière de régime linguistique et enfreint l’obligation de motivation.

–        Deuxièmement, l’AIPN aurait violé le principe général d’égalité de traitement lors de l’évaluation et de la classification du travail du requérant.

–        Troisièmement, l’AIPN aurait violé le principe général d’égalité, car, en particulier, le successeur du requérant bénéficierait de la prime de fonctions.

 Sur le premier moyen, tiré, d’une part, de l’erreur de droit qu’aurait prétendument commise l’AIPN en répondant conjointement, dans une seule décision, à la réclamation personnelle et à la réclamation collective, et, d’autre part, de ce que l’AIPN aurait, dans le cadre de la décision de rejet, manqué à ses obligations en matière de régime linguistique et enfreint l’obligation de motivation

 Arguments des parties

56      Le requérant affirme que, par le présent recours, il ne donne suite qu’à la réclamation personnelle.

57      Il fait valoir qu’il ressort de l’échange de courriers électroniques qu’il a eu le 30 novembre 2004 avec Mme S. de la DG « Personnel et administration » que cette direction générale a joint la réclamation personnelle et la réclamation collective et a traité celles-ci de manière conjointe. En conséquence, la décision de rejet serait entachée d’une erreur de droit et devrait être annulée.

58      Le requérant se réfère aux articles 2 et 3 du règlement n° 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), et soutient que la décision de l’administration relative à sa réclamation personnelle aurait dû être rédigée dans la même langue que celle‑ci. Le requérant affirme n’avoir cependant pas reçu de décision séparée en allemand, mais seulement la même décision de rejet, rédigée en anglais, que celle adressée à ses collègues.

59      Dans la décision de rejet, le directeur général de la DG « Personnel et administration » n’aurait pas répondu aux moyens spécifiques à la réclamation personnelle et l’aurait rejetée au même titre que celle des autres réclamants. Aucune position n’aurait été prise en ce qui concerne la réclamation personnelle. Le requérant prétend, en se fondant sur l’article 253 CE et l’article 90, paragraphe 2, dernier alinéa, du statut, que, dans cette mesure, la décision de rejet n’est pas motivée et qu’elle est erronée.

60      Selon le requérant, si l’administration souhaitait statuer conjointement sur les deux réclamations en question, elle aurait dû tenir compte du fait qu’elles présentaient des spécificités d’ordre procédural. Dans la réclamation personnelle, la question de savoir si la prime de fonctions devait être reconnue à tous les fonctionnaires A* 14 du service juridique aurait expressément été laissée en suspens. La réclamation collective qui traitait cette question n’aurait pas privé d’objet la réclamation personnelle.

61      Le requérant affirme, dans le mémoire en réplique, que, si la jurisprudence du Tribunal, citée par la Commission, portant sur la version linguistique des décisions adressées par l’institution à ses fonctionnaires, est complète et correcte, il ne maintiendra pas le grief soulevé à cet égard.

62      La Commission conteste les arguments du requérant.

 Appréciation du Tribunal

63      Le requérant, tout en relevant que l’AIPN a répondu conjointement à la réclamation collective et à la réclamation personnelle dans la décision de rejet, ce qui constituerait une erreur de droit, prétend qu’elle n’a pas pris position sur les moyens spécifiques invoqués dans la réclamation personnelle. Dans cette mesure, la décision de rejet ne serait pas motivée. Il conteste également le fait de ne pas avoir reçu de réponse en allemand à sa réclamation personnelle, ce qui constituerait une violation, par l’AIPN, de ses obligations en matière de régime linguistique.

64      En premier lieu, il convient de relever que contrairement à ce que soutient le requérant, il n’y a rien d’irrégulier dans le fait, pour la Commission, de répondre conjointement, dans la décision de rejet, tant à la réclamation personnelle qu’à la réclamation collective. En effet, cette façon de procéder a été approuvée par le Tribunal dans l’arrêt du 17 mai 1995, Kratz/Commission (T‑10/94, Rec. p. II‑1455, point 20), selon lequel trois réclamations introduites successivement dans les délais contre le même acte faisant grief doivent être considérées comme constituant une seule réclamation.

65      En deuxième lieu, en ce qui concerne l’obligation de motivation, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêt du Tribunal du 8 mars 2005, Vlachaki/Commission, T‑277/03, RecFP p. I‑A‑57 et II‑243, point 83, et la jurisprudence citée).

66      En cas d’absence totale de motivation avant l’introduction d’un recours, il est de jurisprudence constante que ladite absence ne peut être couverte par des explications fournies par l’AIPN après l’introduction du recours. À ce stade, de telles explications ne rempliraient plus leur fonction. L’introduction d’un recours met donc un terme à la possibilité pour l’AIPN de régulariser sa décision par une réponse portant rejet de la réclamation (arrêts du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T‑52/90, Rec. p. II‑121, point 40, et du 20 février 2002, Roman Parra/Commission, T‑117/01, RecFP p. I‑A‑27 et II‑121, point 32).

67      En revanche, le Tribunal a admis qu’il pouvait être remédié à une insuffisance initiale de motivation dans certaines circonstances exceptionnelles, par des précisions complémentaires apportées même en cours d’instance, lorsque l’intéressé disposait avant l’introduction de son recours d’éléments constituant un début de motivation (arrêt du Tribunal du 15 septembre 2005, Casini/Commission, T‑132/03, RecFP p. I‑A‑253 et II‑1169, point 36 ; voir, en ce sens, arrêt du Tribunal Roman Parra/Commission, point 66 supra, point 30).

68      En l’espèce, la fiche de rémunération du requérant du mois de mai 2004 qui constitue, comme cela a déjà été relevé, le seul acte pouvant valablement être attaqué par le requérant fait apparaître la décision de l’AIPN de ne pas lui accorder la prime de fonctions, sans toutefois contenir une quelconque motivation à cet égard.

69      Il est cependant constant que le requérant s’est vu communiquer, avant l’introduction de son recours, la décision de rejet. Celle‑ci contenait les raisons essentielles du refus d’accorder la prime de fonctions aux conseillers juridiques de grade A 3, dont faisait partie le requérant. Elle spécifiait les éléments pertinents fondant ce refus.

70      L’AIPN affirme, en substance, dans sa décision de rejet, premièrement, que la décision implicite excluant le requérant du bénéfice de la prime de fonctions prévue à l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut, qui découle des fiches de rémunération du requérant des mois de mai et de juin 2004, résulte d’une application correcte des dispositions pertinentes. En effet, n’étant pas chef d’unité, le requérant ne remplirait pas les conditions d’octroi de la prime de fonctions. À cet égard, l’AIPN met en exergue que la fonction du requérant n’est pas mentionnée parmi celles assimilées à la fonction de chef d’unité, qui sont énumérées dans la décision du 28 avril 2004 et dans la décision du 26 mai 2004.

71      Deuxièmement, l’AIPN soutient que les conseillers juridiques de grade A 3 ne remplissent pas les deux critères qui définissent, dans la décision du 28 avril 2004, les fonctions d’encadrement intermédiaire, c’est-à-dire la direction permanente et continue d’une unité administrative et le fait de figurer dans l’organigramme officiel de la Commission. Elle met en exergue ce que seraient les trois responsabilités essentielles qui caractérisent le travail d’un chef d’unité, à savoir la définition du programme de travail de l’unité, le rôle d’intermédiaire entre les cadres supérieurs et les membres de l’équipe et la gestion des ressources humaines (et financières), et soutient que le requérant n’a pas affirmé qu’un conseiller juridique de grade A 3 du service juridique assumait l’une de ces tâches. Selon l’AIPN, s’il pouvait y avoir une certaine subdélégation de facto des tâches de coordination vers les conseillers juridiques de grade A 3, il s’agissait d’une subdélégation informelle et « ad hoc ». Les conseillers juridiques de grade A 3 n’exerceraient pas de fonctions d’encadrement, mais des fonctions de coordination horizontale.

72      Troisièmement, l’AIPN met en exergue d’autres responsabilités que les conseillers juridiques de grade A 3 n’exercent pas, à la différence des chefs d’unité. Il s’agirait notamment des responsabilités exercées dans le cadre des rapports de notation, de l’exercice de promotion annuel, du budget et de la responsabilité du contrôle et de l’autorisation des congés, des missions, de l’horaire flexible, du travail à temps partiel et de la formation. Les conseillers juridiques de grade A 3 ne participeraient pas non plus aux procédures administratives relatives aux réclamations et aux mesures disciplinaires.

73      Il a déjà été jugé, aux points 49 à 52 ci-dessus, qu’il convenait de considérer que la décision de rejet constituait également une réponse à la réclamation personnelle. En effet, l’AIPN n’y a pas omis de tenir compte de la situation particulière du requérant, bien qu’elle n’ait pas réagi spécifiquement à toutes les allégations contenues dans la réclamation personnelle. Outre la référence aux « informations additionnelles du 27 août 2004 » qui indique clairement que l’AIPN a bien pris en compte l’argumentation du requérant concernant l’envergure de ses attributions, responsabilités et compétences spécifiques, notamment dans le cadre de l’équipe « Relations extérieures » (points 50 et 51 ci-dessus), il ressort également d’autres parties de la décision de rejet que l’AIPN réagissait à la situation individuelle du requérant et pas seulement, comme le prétend ce dernier, à la situation globale des conseillers juridiques de grade A 3 du service juridique. Notamment, dans la partie intitulée « Description du poste », l’AIPN prend comme exemple l’équipe « Relations extérieures », tout en notant qu’il s’agit de l’équipe « dont le [requérant] est membre ».

74      Le Tribunal considère que les motifs de la décision de rejet répondent aux griefs essentiels du requérant, même ceux contenus dans la réclamation personnelle. L’AIPN n’était pas obligée de reprendre de manière exhaustive l’ensemble des éléments constituant l’activité professionnelle du requérant ni de réagir à chacun des domaines abordés dans l’exercice de ses fonctions. La décision de rejet a, en tout état de cause, permis au requérant de présenter utilement ses moyens et arguments devant le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 mai 2006, R/Commission, T‑331/04, non publié au Recueil, point 113).

75      Au vu de l’ensemble de ces éléments, il n’existe pas, en l’espèce, de raison justifiant de conclure à l’absence ou même à l’insuffisance de motivation. Les éléments d’information dont le requérant a pris connaissance par le biais de la décision de rejet reflètent de manière non équivoque le raisonnement de l’AIPN. Ils ont permis, d’une part, au requérant d’apprécier le bien‑fondé de la décision prise par l’administration ainsi que l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal, et, d’autre part, à celui‑ci d’exercer son contrôle. La circonstance que l’AIPN n’a pas répondu de façon spécifique à tous les arguments contenus dans la réclamation personnelle ne révèle pas à elle seule une insuffisance de motivation justifiant l’annulation de la fiche de rémunération du requérant du mois de mai 2004 [voir, par analogie, ordonnance du président de la Cour du 8 avril 2003, Gómez-Reino/Commission, C‑471/02 P(R), Rec. p. I‑3207, point 34], d’autant moins qu’il est clair que l’argumentation individualisée du requérant a bien été prise en compte lors de la rédaction de la décision de rejet. Il convient d’ajouter que, de surcroît, la Commission a apporté des précisions complémentaires au cours de la présente instance.

76      En troisième lieu, s’agissant du fait que la décision de rejet est rédigée en anglais, il convient de constater, d’une part, que, comme l’a soulevé à bon droit la Commission, le règlement n° 1 ne régit pas les langues qui doivent être utilisées dans les relations internes, c’est-à-dire entre une institution et ses fonctionnaires ou agents (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 février 2001, Bonaiti Brighina/Commission, T‑118/99, RecFP p. I‑A‑25 et II‑97, points 12 et 13). D’autre part, il est constant que le requérant a introduit deux réclamations, l’une personnelle en allemand et l’autre collective en anglais, et qu’il a reçu la réponse uniquement en anglais. Dans ces circonstances, on ne saurait reprocher à l’AIPN d’avoir répondu au requérant en anglais, ce dernier lui ayant laissé le choix entre les deux langues qu’il avait utilisées lors de la rédaction des réclamations. Enfin, il ne ressort pas de la requête que le fait que la décision de rejet est rédigée en anglais ait empêché le requérant de prendre utilement connaissance de la décision et des motifs par lesquels l’administration entendait la justifier.

77      L’argument du requérant tiré de la prétendue violation du régime linguistique n’est donc pas fondé.

78      Il ressort de ce qui précède que le premier moyen du requérant doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation par l’AIPN du principe général d’égalité de traitement lors de l’évaluation et de la classification du travail du requérant

 Arguments des parties

79      Le requérant soutient que la Commission, lorsqu’elle introduit une prime de fonctions telle que celle en cause en l’espèce, est liée par le principe général d’égalité de traitement et est tenue de traiter de la même manière des situations identiques ou analogues. Le requérant se réfère, à cet égard, aux arrêts de la Cour du 4 octobre 1979, Ireks-Arkady/Conseil et Commission (238/78, Rec. p. 2955), DGV e.a./Conseil et Commission (241/78, 242/78, 245/78 à 250/78, Rec. p. 3017), et du 11 janvier 2001, Martínez del Peral Cagigal/Commission (C‑459/98 P, Rec. p. I‑135).

80      Le requérant fait valoir que c’est à bon droit que la Commission a pris en compte, dans la décision du 28 avril 2004 et dans la décision du 26 mai 2004, le sens et la finalité du texte pour déterminer l’octroi de la prime de fonctions. Elle n’aurait cependant pas poursuivi cette approche de manière conséquente. Le directeur général du service juridique aurait omis de tenir compte du rôle spécial de certains conseillers juridiques au sein du service juridique et d’inclure ceux-ci dans l’organigramme de la Commission ou dans les décisions susvisées.

81      Selon le requérant, la Commission a procédé, à l’article 2, paragraphe 1, de la décision du 28 avril 2004, à une définition des fonctions et du personnel d’encadrement intermédiaire en appliquant des critères purement formels, mais en omettant de prendre en considération la nature de l’activité. Ces critères formels ne peuvent pas être décisifs selon le requérant, dès lors que la Commission pouvait, compte tenu de son pouvoir d’organisation, décider elle‑même s’ils étaient remplis. La Commission devait, selon lui, décider de l’octroi de la prime de fonctions selon que son organigramme faisait ou non apparaître les tâches d’encadrement intermédiaire définies selon les critères qu’elle avait déterminés ou selon des critères équivalents. Si tel n’était pas le cas, elle devait prévoir, à titre d’exception, une réglementation différente en faveur des membres concernés de l’encadrement intermédiaire qui ne correspondaient pas à la définition formelle.

82      Le requérant prétend que, dans la décision de rejet, la Commission a appliqué principalement des critères purement formels. Il n’y serait examiné qu’accessoirement si une discrimination existe, et ce sans que les tâches spécifiques que le requérant exécutait ne soient prises en considération.

83      Le requérant fait valoir que la décision du 28 avril 2004 et la décision du 26 mai 2004 avaient prévu, dans les définitions relatives aux fonctions et au personnel d’encadrement intermédiaire, certaines exceptions à la règle générale, sans toutefois en prévoir en sa faveur ou en faveur des autres conseillers juridiques de grade A* 14 du service juridique. De l’avis du requérant, il aurait été facile d’adapter l’organigramme du service juridique de manière à ce que les fonctions exercées par lui-même apparaissent en tant qu’unité administrative spéciale ou en tant que mission de coordination. À défaut, une réglementation d’exception aurait dû, à son avis, constater l’équivalence de ses fonctions avec celles d’un chef d’unité, comme la Commission l’aurait fait dans d’autres cas.

84      Le requérant soutient que la première exception à la règle est prévue à l’article 2, paragraphe 1, de la décision du 28 avril 2004. Elle contiendrait une déduction logique qui ne serait pas valable pour l’un des cas mentionnés, à savoir celui des chefs adjoints de délégation. Il prétend que ceux‑ci ne sont pas chargés de la « direction permanente et continue d’une unité administrative ». La Commission aurait adopté cette exception en raison de l’importance du travail des chefs adjoints de certaines délégations. Il demande un même traitement particulier en raison de la nature et de l’importance de son travail, qui serait au moins de même importance et de même difficulté que le leur.

85      Le requérant soutient que la décision du 26 mai 2004 contient d’autres exceptions à la description standard des fonctions d’encadrement intermédiaire.

86      Il estime que la Commission aurait dû procéder à un traitement spécial approprié à sa situation et à celle de quelques autres conseillers juridiques de grade A* 14 du service juridique. Le requérant fonde ses prétentions sur l’organisation spécifique du service juridique de la Commission ainsi que sur son rôle au sein de ce service.

87      Il soutient que l’organisation du service juridique présente certaines particularités. Notamment, il ne serait composé ni de directions ni d’unités, mais d’équipes compétentes dans des domaines spécifiques.

88      Le requérant soutient que, après l’entrée en vigueur de la réforme du statut, l’organigramme du service juridique a été modifié afin de l’adapter à la réglementation relative à la prime de fonctions. Il met en exergue que le directeur général du service juridique a retiré les conseillers juridiques de grade A* 14 de l’organigramme, exception faite de deux cas – le chef du groupe des juristes réviseurs (juristes linguistes) et le chef du groupe de codification. Le requérant prétend que cette distinction conduit à une discrimination des conseillers juridiques de grade A* 14 qui, comme lui‑même, exerçaient des fonctions horizontales d’encadrement. Sa fonction serait plus importante que celle du chef de l’unité « Codification » et nécessiterait plus de capacités d’encadrement et de persuasion.

89      Le requérant soutient que les conseillers juridiques de grade A* 14 se voient attribuer des domaines et des procédures particulièrement complexes et, le cas échéant, remplacent le conseiller juridique principal en tant que chef d’équipe. Quelques conseillers juridiques exerceraient une fonction de coordination ou une fonction spécifique très vaste au sein de leur équipe, de manière largement indépendante, avec des fonctionnaires qui sont affectés à leur groupe dans le cadre de l’équipe.

90      Le requérant soutient que lui-même exerçait une telle fonction spécifique, car il dirigeait le domaine de l’élargissement de l’Union européenne au sein du service juridique. Ce domaine serait l’un des plus importants à la Commission. Sa fonction de coordination aurait été exercée au-delà des équipes et aurait concerné l’ensemble du service juridique. Le requérant mentionne que hormis trois collaborateurs directs dans l’équipe « Relations extérieures » du service juridique elle‑même, un groupe de travail qu’il dirigeait et qui était composé d’un juriste de chaque équipe du service juridique lui avait été adjoint.

91      Le requérant prétend qu’il exerçait une activité comparable à celle d’un chef d’unité ou à d’autres fonctions assimilées par la Commission à celles d’un chef d’unité, mais de valeur sensiblement plus élevée. Il soutient qu’il aurait dû être, ainsi que quelques autres fonctionnaires de grade A* 14 du service juridique, classé dans l’encadrement intermédiaire de la Commission. Il prétend que dans l’équipe « Relations extérieures » du service juridique, il existait une responsabilité partagée entre le chef de l’équipe et les conseillers juridiques de grade A* 14, membres de son équipe. Il met notamment en exergue l’existence, dans cette équipe, de coordinateurs dans les différents domaines d’activité.

92      Le requérant prétend que ses fonctions remplissaient toutes les conditions posées à l’article 4 de la décision du 28 avril 2004 et que son profil était celui d’un chef d’unité. Sur le fondement des décisions relatives à l’ouverture et à la clôture de négociations sur l’adhésion de nouveaux États membres, il aurait déterminé les grandes lignes des orientations et activités du groupe de travail « Élargissement » et des fonctionnaires qui y avaient été affectés. Il aurait représenté le service juridique à l’extérieur et l’équipe « Relations extérieures », en ce qui concerne l’élargissement, au sein du service juridique. Il aurait géré, dans son domaine, la communication des informations entre l’encadrement supérieur, les collaborateurs directs qui lui étaient affectés et les correspondants du groupe de travail « Élargissement ». Il aurait eu pour mission d’employer les fonctionnaires affectés le plus efficacement possible, de les motiver et de les guider dans leur travail.

93      Le requérant soutient que, dans le domaine de l’élargissement, il répartissait les tâches entre les juristes employés, suivait et coordonnait leurs travaux, discutait avec eux de questions de principe sans intervention du chef d’équipe et donnait des instructions. Il soutient qu’il décidait dans quelle mesure les correspondants du groupe de travail « Élargissement » devaient intervenir, dans quelle mesure des circulaires destinées à ceux-ci devaient être rédigées et il rédigeait ces circulaires.

94      Le requérant prétend qu’il devait assurer en permanence des tâches de planification et d’encadrement ; il fournit, à cet égard, plusieurs exemples. Le requérant soutient que son activité ne pouvait pas être comparée à la tâche d’un chef d’unité adjoint ou à celle d’un chef de secteur.

95      Le requérant fait valoir qu’il devait avoir une vue d’ensemble de tous les domaines de compétence de l’Union européenne, les maîtriser du point de vue terminologique et juridique. Ses fonctions auraient exigé des connaissances étendues diverses, une longue expérience de la pratique institutionnelle de l’Union européenne ainsi qu’une parfaite organisation et une rapidité dans l’exécution des tâches qui lui étaient confiées.

96      Il fait valoir que son activité ne saurait être considérée uniquement comme étant une activité typique de conseil. Il souligne qu’il devait prendre contact avec ses collègues pour obtenir des conseils ou, le cas échéant, leur accord, ainsi qu’organiser diverses réunions. Il met en exergue qu’il exerçait des fonctions d’encadrement, bien qu’il n’ait pas pu se fonder sur des compétences hiérarchiques. Il prétend que ce défaut formel aurait plutôt exigé un surcroît de compétence dans ses capacités d’encadrement. Il soutient qu’il devait s’appuyer sur la persuasion, ce qui serait plus difficile que de s’appuyer sur le pouvoir hiérarchique. Il ajoute qu’il décidait de l’opportunité de la saisine du directeur général du service juridique.

97      Le requérant soutient que les facultés d’encadrement se révélaient indispensables en particulier lors de la rédaction des rapports annuels réguliers de la Commission sur la situation des préparations des pays candidats à l’adhésion (ci‑après les « rapports annuels »). Il fait valoir qu’il était l’un des deux fonctionnaires de la Commission qui devaient revoir l’intégralité des projets de rapports annuels avant qu’ils ne soient présentés au collège des commissaires. Il souligne également les responsabilités qui lui incombaient lors des consultations d’organisations spécialisées gouvernementales et non gouvernementales.

98      Le requérant soutient qu’il agissait souvent de sa propre initiative. Ses supérieurs ne lui auraient donné que très rarement des instructions. Il propose d’en apporter la preuve par l’audition du directeur général du service juridique et du conseiller principal M. P. J. K. L’intervention d’un supérieur aurait été plus rare que celle d’un directeur dans le cas d’un chef d’unité.

99      Le requérant fait valoir qu’il a dû, constamment, former de nouveaux collaborateurs (quatre en particulier) au travail relatif aux négociations sur l’élargissement, dont une fonctionnaire qui n’avait auparavant jamais travaillé au sein de la Commission. Il aurait signé tous les écrits de celle‑ci, ainsi que des notes fondamentales d’autres collaborateurs. Il soutient que, dans le cadre de l’appréciation des fonctionnaires qui étaient affectés au groupe qu’il coordonnait, il remettait un « vote » au chef d’équipe.

100    Il soutient que son successeur était un chef d’unité du secrétariat général qui avait eu un rôle important dans l’élaboration de la Constitution pour l’Europe. Selon le requérant, on recherchait donc pour son poste un fonctionnaire particulièrement qualifié. Il prétend que, alors qu’il formait son successeur à ses nouvelles tâches, celui-ci continuait à percevoir la prime de fonctions qu’il avait perçu en tant que chef d’unité auprès du secrétariat général de mai à septembre 2004, alors que le requérant en était toujours privé. Il se serait agi d’un traitement manifestement arbitraire d’un fonctionnaire qui exerçait des fonctions identiques à un autre, alors que celui qui était financièrement désavantagé restait chargé de la fonction de coordination.

101    Selon le requérant, la Commission le traite comme un membre de l’encadrement, mais n’est pas disposée à en tirer les conséquences financières. Il soutient, à cet égard, qu’il recevait les « Management Letters » de la Commission s’adressant à lui en tant que « manager ». Il serait régulièrement invité à des cours de management et aurait participé à de tels cours.

102    Le requérant soutient qu’il a poursuivi simultanément d’autres activités, notamment, en tant que représentant de la Commission, jusqu’au cours de l’année 2005, une douzaine de procédures dans les domaines du droit du travail et de la protection des consommateurs. Il met en exergue qu’il a été vice‑président d’un jury de sélection de candidats au recrutement ou au classement en tant que fonctionnaires des grades A 4 et A 5. Il soutient avoir participé à la description des postes du service juridique à la demande de la DG « Personnel et administration ».

103    Le requérant prétend que, dans la décision de rejet, l’AIPN opère une évaluation erronée de son travail sur de nombreux points. Il soutient qu’il s’agit, en l’espèce, d’une situation de venire contra factum proprium. La Commission aurait agi de manière arbitraire en traitant de manière inégale et discriminatoire des activités comparables. Compte tenu des fonctions qu’il a exercées, il considère qu’il s’agit d’un traitement dépréciateur, constituant une violation du devoir de sollicitude de l’employeur.

104    Le requérant ne conteste pas la décision de rejet dans la mesure où elle renvoie au rôle accru des chefs d’unité en ce qui concerne la notation, la promotion et, dans certains cas, la gestion des fonds budgétaires. Cependant, selon lui, la Commission ne se serait pas fondée, dans la décision du 28 avril 2004 et dans la décision du 26 mai 2004, de manière principale, sur ces tâches. Certaines des fonctions assimilées à l’encadrement intermédiaire ne seraient pas liées à de telles tâches.

105    Selon le requérant, la décision de rejet méconnaît l’importance du service juridique dans le cadre de l’administration des moyens financiers. Ce service interviendrait au niveau du contrôle de la légalité de l’allocation de fonds et de l’utilisation concrète de ceux-ci.

106    Le requérant prétend avoir agi, dans le domaine budgétaire, à plusieurs niveaux. Premièrement, il aurait participé à la rédaction des dispositions budgétaires et financières des deux derniers traités d’adhésion ainsi qu’à l’élaboration des nouveaux instruments et règlements financiers adoptés en matière de politique de voisinage.

107    Deuxièmement, il serait intervenu en matière d’utilisation concrète des moyens financiers dans le cadre de l’administration courante. Il serait intervenu dans le développement et le contrôle des dépenses des instruments prévus (en plus des moyens déjà en cours de versement du fait des aides financières antérieures à l’adhésion, accordées dans le cadre des programmes PHARE, Sapard, et ISPA). Il se serait occupé du contrôle de l’utilisation correcte des fonds et du remboursement des aides financières et des subventions indûment versées. Il serait intervenu en matière de décisions relatives à l’administration décentralisée dans les pays en voie d’adhésion ou dans les nouveaux États membres, ainsi que pour les adaptations nécessaires des décisions de la Commission relatives à l’utilisation des moyens financiers accordés au titre du programme PHARE. Le requérant soutient qu’il devait veiller à ce que les règles applicables dans les domaines couverts par les programmes PHARE, ISPA et Sapard ne conduisent pas à un désordre lors de leur transposition administrative. Il aurait collaboré à des décisions importantes relatives à l’affectation et à l’utilisation de moyens financiers. Il se réfère à un litige avec la République de Hongrie, relatif à l’utilisation correcte de moyens financiers accordés au titre du programme PHARE. Ce type d’activité ferait partie de sa mission permanente.

108    Troisièmement, le requérant soutient qu’il agissait dans le cadre des procédures contentieuses ou d’arbitrage relatives aux moyens financiers attribués aux candidats à l’adhésion. Il prétend avoir été chargé du suivi de procédures judiciaires ayant eu des conséquences financières importantes pour la Commission. Il aurait eu pour mission permanente de recouvrer les créances impayées de la Commission. Il aurait dû coordonner ses activités avec celles de la DG « Budget » et des directions générales spécialisées.

109    Le requérant prétend qu’il serait donc faux de soutenir qu’il n’a pas eu de rôle important et de responsabilité dans le cadre de l’utilisation des fonds budgétaires. Il soutient que l’affectation et le contrôle, y compris le recouvrement, sont aussi importants que la décision initiale sur l’utilisation des moyens financiers. Considérer uniquement cette décision initiale d’utilisation comme pertinente constituerait une erreur de droit. Le requérant soutient que sa responsabilité dans ce domaine devait être appréciée comme relevant de la gestion ou du contrôle direct de moyens budgétaires, d’autant plus qu’au moins la moitié des unités au sein de la Commission ne disposerait pas d’un budget ni ne participerait à l’attribution de moyens budgétaires.

110    Selon le requérant, la Commission reconnaît les faits présentés dans la requête, mais essaie de minimiser l’importance de ses capacités d’encadrement. Il prétend que, contrairement à ce qu’elle soutient, les capacités d’encadrement techniques n’existent pas. Il convient, à son avis, de distinguer, d’une part, le savoir technique et, d’autre part, l’encadrement.

111    Le requérant soutient, à l’égard du fait qu’il n’avait pas de compétences hiérarchiques et ne dirigeait pas formellement une unité administrative, que, dans la décision du 26 mai 2004, la Commission s’est fondée sur le sens et l’objectif de la réglementation et non sur les désignations du poste ou d’autres éléments formels.

112    Il prétend que le directeur général du service juridique lui a confirmé, lors d’un entretien, qu’il y avait dans ce service trois postes de conseiller juridique qui méritaient un traitement particulier, dont le sien. Il soutient en avoir tiré les conséquences en ayant introduit le présent recours. Il propose, à cet égard, d’auditionner le directeur général M. P.

113    Le requérant fait valoir que la Commission a violé, en l’espèce, le principe d’égalité de traitement qui est un principe de droit, voire un droit fondamental. Ce principe constituerait un élément du droit communautaire primaire, liant la Commission dans toutes ses décisions. L’argument, selon lequel une décision est définitive et donc irrévocable, serait dénué de pertinence et devrait être rejeté.

114    Le requérant affirme que, en l’espèce, ses griefs ne visent pas le contenu de la décision du 28 avril 2004 et de la décision du 26 mai 2004, mais le fait que la Commission a omis de prendre en compte la particularité de sa situation dans ces décisions, conformément aux critères applicables. Il ne conteste « en aucune manière » la légalité et la validité des décisions en question. Au contraire, il soutient que, si les principes qui y sont visés avaient été appliqués, il aurait dû bénéficier de la prime de fonctions. Il prétend que seuls l’objectif visé par la Commission et les critères matériels appliqués par celle‑ci peuvent être utilisés dans le cadre de l’appréciation juridique, et non des critères purement formels, comme le fait de figurer dans un plan d’organisation et dans la direction d’une unité administrative, étant donné que cela pourrait être décidé librement par la Commission.

115    Le requérant mentionne, à cet égard, la tâche de codification d’actes juridiques. Celle-ci pourrait être exécutée soit par quelques fonctionnaires dans le cadre de la répartition interne des tâches et, après nomination d’un coordinateur, par l’équipe « Institutions », soit dans le cadre d’une unité autonome, sans que cela ne change la nature de la fonction. La différence formelle, consistant en ce que la personne dirigeant l’unité administrative acquière une fonction de supérieur hiérarchique, n’exigerait pas d’elle des qualités d’encadrement plus importantes, mais simplifierait son travail en lui permettant de donner des ordres. Le requérant estime que la direction du personnel ne consiste pas, pour l’essentiel, à donner des ordres, mais à motiver les collaborateurs. C’est la responsabilité d’un domaine clairement délimité ainsi que l’attribution de collaborateurs qui doivent être initiés à leurs tâches et dirigés lors de l’exécution de celles-ci qui seraient les éléments déterminants pour caractériser l’exercice de fonctions d’encadrement.

116    La Commission conteste les arguments du requérant.

 Appréciation du Tribunal

117    À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort des dispositions combinées de l’article 44, paragraphe 1, sous c), et de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure que la requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués et que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et présentant un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (arrêt du Tribunal du 20 septembre 1990, Hanning/Parlement, T‑37/89, Rec. p. II‑463, point 38). Une solution analogue s’impose pour un grief invoqué au soutien d’un moyen (arrêt du Tribunal du 21 mars 2002, Joynson/Commission, T‑231/99, Rec. p. II‑2085, point 156).

118    En l’espèce, selon le requérant, l’appréciation des fonctions comme appartenant à la catégorie des fonctions d’encadrement intermédiaire ou à celles assimilables à la fonction de chef d’unité devait uniquement se fonder sur des critères matériels et sur l’objectif visé par la Commission, et non sur des critères formels. La Commission se demande si ce grief n’est pas irrecevable étant donné qu’il est, selon elle, invoqué seulement dans le mémoire en réplique et donc tardivement.

119    Le Tribunal considère qu’il s’agit d’une précision portant sur un grief déjà avancé dans la requête, et non d’un grief nouveau, comme le prétend la Commission. En effet, il ressort de la requête que, selon le requérant, la Commission doit se fonder sur la nature de l’activité et envisager les tâches relevant de l’encadrement intermédiaire du point de vue matériel.

120    Il convient, ensuite, de relever que l’article 44 du statut et l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut prévoient l’octroi de la prime de fonctions aux fonctionnaires nommés chef d’unité, directeur ou directeur général. Le requérant n’a pas soulevé d’exception d’illégalité à l’encontre de ces dispositions du statut.

121    Dès lors, le principe général de l’égalité de traitement, qui veut que les situations comparables ne soient pas traitées de manière différente à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée (voir arrêt Martínez del Peral Cagigal/Commission, point 79 supra, point 50, et la jurisprudence citée), n’est nullement pertinent en l’espèce et c’est à tort que le requérant l’invoque.

122    En effet, selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement n’ouvre pas au fonctionnaire le droit de demander un avantage financier illégalement accordé à un autre fonctionnaire (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 9 octobre 1984, Witte/Parlement, 188/83, Rec. p. 3465, point 15, et du Tribunal du 22 février 2000, Rose/Commission, T‑22/99, RecFP p. I‑A‑27 et II‑115, point 39). Par conséquent, à supposer que les catégories de fonctionnaires invoquées par le requérant, tels les chefs adjoints de délégation ou les superviseurs d’audit du contrôle financier interne et les présidents du groupe « ad hoc » et du comité central du personnel n’entrent pas dans la notion de chef d’unité, le fait de leur octroyer la prime de fonctions constituerait, de la part de la Commission, une violation des dispositions précitées du statut, mais n’ouvrerait pas au requérant le droit de réclamer une telle prime.

123    Il s’ensuit qu’il n’est pas nécessaire d’examiner si les fonctions exercées par ces fonctionnaires sont comparables à celles du requérant.

124    Compte tenu de ce qui précède, il convient de comprendre l’argumentation avancée par le requérant dans le cadre du présent moyen en ce sens qu’il exerçait, lui aussi, les fonctions d’un chef d’unité au sens du statut et que, partant, il avait droit à la prime de fonctions.

125    À cet égard, il y a lieu de rappeler que la Commission a adopté la décision du 26 mai 2004, indiquant les fonctions qui, selon elle, devaient être comprises comme étant visées par les dispositions du statut qui prévoient l’octroi de la prime de fonctions. Cette décision fait, à son tour, référence à la décision du 28 avril 2004, dans la mesure où, selon la décision du 26 mai 2004, les personnes occupant des fonctions d’encadrement intermédiaire au sein de la Commission sont considérées comme étant des chefs d’unité au sens des dispositions du statut susmentionnées.

126    Conformément à l’article 2 de la décision du 28 avril 2004, une fonction d’encadrement intermédiaire se définit suivant deux critères cumulatifs. Le premier critère se réfère à la nature des fonctions exercées et prévoit qu’une fonction d’encadrement intermédiaire « consiste en la direction permanente et continue d’une unité administrative ». Le second critère est de nature formelle et exige que la fonction en question « figure dans l’organigramme officiel de la Commission ».

127    En l’espèce, le requérant fait valoir qu’il remplissait le premier critère susvisé, relatif à la nature de fonctions exercées et que cette circonstance serait suffisante pour lui ouvrir le droit à la prime de fonctions, en dépit de la circonstance que le critère formel n’était pas rempli.

128    Il convient, donc, dans un premier temps, d’examiner le bien-fondé de l’affirmation du requérant, selon laquelle il exerçait des fonctions d’un chef d’unité.

129    À cet égard, il y a lieu d’abord de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les dispositions ouvrant droit à des prestations financières doivent être interprétées strictement (voir arrêt du Tribunal du 16 décembre 2004, Pappas/Commission, T‑11/02, RecFP p. I‑A‑381 et II‑1773, point 53, et la jurisprudence citée).

130    Il convient, ensuite, de relever que la notion d’« unité », dirigée par un « chef d’unité », n’est pas définie dans le statut. Le Tribunal estime qu’il convient de considérer que la notion d’« unité » doit être définie comme une structure administrative distincte, dotée de ressources humaines et, souvent, financières, qui lui sont propres, et intégrée dans l’organisation administrative d’une institution.

131    Le rôle d’un chef d’unité, tel que décrit à l’article 4 de la décision du 28 avril 2004, corrobore cette interprétation. Aux termes de cette disposition, le chef d’unité est directement responsable de la gestion des ressources humaines et, souvent, des ressources financières relevant de son unité, donne à celle-ci les orientations en matière de politiques et d’actions, définit son programme de travail, coordonne les activités au sein de son unité ainsi qu’avec les autres unités, représente son unité dans les réunions et est l’intermédiaire principal dans les échanges d’informations entre les cadres supérieurs et les membres de son unité.

132    En l’espèce, il n’est pas contesté que le requérant assumait la coordination du groupe III « Groupe de travail Élargissement », au sein de l’équipe « Relations extérieures » du service juridique de la Commission, dirigée par M. P. J. K., conseiller juridique principal. Partant, afin de déterminer si le requérant exerçait la fonction d’un chef d’unité, il convient d’examiner si le groupe en question constituait une « unité » au sens susvisé, dont le requérant aurait été le chef.

133    Le Tribunal considère que tel n’est pas le cas pour les raisons suivantes.

134    S’agissant de la question de savoir si ledit groupe disposait de ses propres ressources humaines, il est, certes, vrai que deux autres fonctionnaires de l’équipe « Relations extérieures » du service juridique, à laquelle appartenait également le requérant, MM. W. et B. faisaient partie du groupe susvisé.

135    Cependant, il ressort de l’organigramme de l’équipe en question, annexé à la requête, que celle-ci était divisée en plusieurs groupes remplissant chacun des missions dans des domaines spécifiques. Les fonctionnaires de l’équipe n’étaient pas exclusivement affectés à un seul de ces groupes, mais faisaient partie de plusieurs groupes à la fois.

136    Ainsi, M. W. appartenait, outre au groupe III susvisé, également au groupe IV « EEE, autres pays européens, Méditerranée, Moyen/Proche-Orient » et au groupe VII « Politiques sectorielles et Politique commerciale (sauf OMC) ». De même, M. B., le deuxième fonctionnaire de cette équipe faisant partie du groupe III coordonné par le requérant, appartenait, en même temps, au groupe V « Partenaires non européens industrialisés » et au groupe VII « Politiques sectorielles et Politique commerciale (sauf OMC) » et était, au demeurant, mentionné dans la partie « Coordination GICE et suivi des activités extérieures des [directions générales] » de l’organigramme susvisé.

137    Dans ces conditions, il ne saurait être soutenu que les deux fonctionnaires précités étaient affectés à une unité au sens précité, dirigée par le requérant en qualité de supérieur hiérarchique direct.

138    En effet, il convient de constater que le requérant n’a pas soutenu avoir été l’évaluateur des deux fonctionnaires en question dans le cadre des procédures d’évaluation de la carrière de ceux‑ci, et ce bien que la décision du 24 novembre 2004 évoque ce point en tant qu’une des responsabilités des chefs d’unité, que le requérant ne remplissait pas. Il indique lui‑même ne pas avoir eu à fournir d’appréciation à l’égard des fonctionnaires affectés au groupe qu’il coordonnait. Le seul élément qu’il ait apporté à cet égard est qu’il remettait un « vote » au chef d’équipe dans le cadre de l’appréciation de ces fonctionnaires. Or, un tel « vote », terme qui n’a pas été davantage spécifié, ne saurait, en tout état de cause, être compris comme étant l’équivalent des responsabilités administratives dans le cadre de l’évaluation des fonctionnaires en question.

139    Il convient encore d’ajouter que le requérant n’a pas non plus contesté le fait, mentionné dans la décision du 24 novembre 2004, qu’il n’avait pas les responsabilités administratives d’un chef d’unité telles que le contrôle et l’autorisation des congés, des missions, de l’horaire flexible, du travail à temps partiel, de la formation et qu’il n’avait pas participé aux procédures administratives relatives aux réclamations et aux mesures disciplinaires.

140    Au vu de ces éléments, il convient de constater que le requérant n’a pas démontré qu’il avait exercé envers les deux collaborateurs directs de son équipe des responsabilités administratives comparables à celles d’un chef d’unité.

141    La précédente conclusion est a fortiori valable pour les onze correspondants du « Groupe de travail Élargissement » provenant d’autres équipes du service juridique. En effet, comme cela ressort de l’organigramme du « Groupe de travail Élargissement », annexé à la requête, ceux-ci continuaient à faire partie de leurs équipes respectives concomitamment à leur engagement dans ledit groupe. Il n’a pas été établi que les correspondants du « Groupe de travail Élargissement » remplissaient uniquement les tâches que leur attribuait le requérant dans le cadre des activités liées à l’élargissement. Ils relevaient toujours, administrativement et hiérarchiquement, du conseiller juridique principal de leur propre équipe, différente de l’équipe « Relations extérieures ».

142    Il ressort de tout ce qui précède que le groupe III « Groupe de travail Élargissement », dont le requérant assurait la coordination, ne disposait pas de ressources humaines qui lui étaient propres.

143    Le même groupe ne disposait pas non plus de ses propres ressources financières. Il y a lieu de relever, à l’instar de ce que soutient la Commission, que les éléments apportés par le requérant afin de démontrer qu’il exerçait une compétence budgétaire ne sauraient être inclus dans la catégorie de la gestion ou du contrôle de ressources budgétaires.

144    En effet, aucun des éléments invoqués par le requérant n’invalide la thèse contenue dans la décision de rejet selon laquelle le requérant – en tant que conseiller juridique de grade A 3 – n’était pas un ordonnateur par voie de délégation ou de subdélégation, au sens de l’article 59 du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1), et n’assumait donc pas, à la différence des chefs d’unités, de responsabilité pécuniaire ou disciplinaire en matière budgétaire, au sens des articles 65 et 66 dudit règlement. Il ne ressort pas des éléments avancés par le requérant que celui‑ci a pris des engagements budgétaires, validé des dépenses, autorisé des paiements ou des créances. Les activités que le requérant a mises en exergue, notamment le contrôle de la légalité de l’allocation des fonds ainsi que de leur utilisation concrète et le recouvrement des créances, sont des activités d’ordre juridique impliquant une responsabilité différente de celle liée à une opération budgétaire.

145    Sur la base de l’ensemble de ces éléments, il convient de conclure que le groupe dont le requérant était coordinateur n’était pas une « unité » au sens des dispositions précitées du statut et que, partant, le requérant n’était pas un chef d’unité au sens de ces mêmes dispositions. C’est donc à juste titre qu’il ne figurait pas comme tel dans l’organigramme officiel de la Commission.

146    Les autres éléments apportés par le requérant ne sont pas de nature à invalider cette conclusion.

147    Plus particulièrement, premièrement, le fait que le requérant signait toutes les notes d’une fonctionnaire et d’autres notes importantes rédigées par d’autres fonctionnaires travaillant sous sa direction ne permet que de confirmer ses fonctions de coordinateur et de conseiller juridique de grade élevé au sein du service juridique, ayant la responsabilité du secteur de l’élargissement. Il en est de même en ce qui concerne le fait qu’il formait de nouveaux collègues en raison de la fluctuation des effectifs dans son équipe, qu’il agissait souvent de sa propre initiative ou qu’il ne recevait, prétendument, que rarement des instructions de ses supérieurs. En effet, il s’agit d’éléments typiques du travail d’un conseiller expérimenté de son grade.

148    Deuxièmement, le fait que la Commission lui communiquait des lettres intitulées « Management Letters », où le titre employé était celui de « manager », et qu’il participait à des formations de management n’indique rien quant à l’étendue des fonctions qu’il exerçait. Il ne saurait en être tiré que la Commission le considérait comme étant un membre de l’encadrement intermédiaire. De même, le fait que le requérant ait été nommé vice‑président d’un jury dont la tâche était, en outre, de sélectionner des personnes dont les fonctions pouvaient relever de l’encadrement intermédiaire, ou qu’il ait décrit les postes du service juridique, est sans rapport avec la question de savoir s’il gérait les ressources humaines ou budgétaires d’une unité administrative propre.

149    Troisièmement, quant au prétendu entretien qu’aurait eu le requérant, à l’occasion de son départ à la retraite, avec le directeur général du service juridique, selon lequel son poste ainsi que deux autres postes de conseillers juridiques « dont l’importance a été soulignée » mériteraient un traitement particulier, entretien dont le requérant aurait tiré les conséquences sous la forme du présent recours, il convient de relever que, à supposer que les déclarations susvisées aient bien été faites, elles n’indiquent en rien que la fonction du requérant devrait être assimilée à celle d’un chef d’unité. La seule importance d’un poste ne constitue pas le facteur déterminant le droit à la prime de fonctions. De surcroît et en tout état de cause, le requérant ne saurait tirer un quelconque droit d’une déclaration du directeur général du service juridique qui, en l’espèce, n’était pas l’AIPN.

150    Tenant compte de l’ensemble de ce qui précède, et indépendamment de l’importance des fonctions que le requérant a exercées, il convient de conclure qu’il n’a pas droit à la prime de fonctions. En effet, comme dispose la décision du 26 mai 2004, celle‑ci vise à récompenser les obligations et responsabilités particulières liées aux fonctions d’encadrement. Les articles pertinents du statut ne prévoient l’octroi de cette prime qu’aux directeurs généraux, aux directeurs et aux chefs d’unité. Le requérant n’ayant pas exercé ces fonctions, en particulier et contrairement à ce qu’il prétend, ni la fonction de chef d’unité ni une fonction assimilable à celle-ci, il n’existe aucun fondement juridique pour lui octroyer la prime en question.

151    Enfin, il convient encore de relever que le requérant mentionne dans sa requête qu’il y a eu, en l’espèce, violation du devoir de sollicitude.

152    Il convient de rappeler à cet égard que la règle de concordance entre la réclamation administrative au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, et le recours subséquent exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un grief soulevé devant le juge communautaire l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’AIPN ait été en mesure de connaître les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée (arrêt du Tribunal du 28 septembre 2004, Tenreiro/Commission, T‑216/03, RecFP p. I‑A‑245 et II‑1087, point 38).

153    En l’espèce, il y a lieu de constater que le requérant n’a pas invoqué la violation du devoir de sollicitude dans la réclamation personnelle ni dans la réclamation collective, ni fourni aucun élément dont la Commission aurait pu déduire qu’il entendait invoquer un tel grief.

154    Il s’ensuit que le grief tiré de la violation du devoir de sollicitude doit être écarté comme étant irrecevable faute d’avoir été présenté préalablement dans les réclamations susvisées.

155    Le deuxième moyen doit donc être rejeté dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen, tiré de ce que l’AIPN a violé le principe général d’égalité au motif que, en particulier, le successeur du requérant bénéficierait de la prime de fonctions

 Arguments des parties

156    Le requérant prétend que la Commission a traité de manière inégale des fonctions identiques, la sienne et celle de son successeur. Celui‑ci, qui aurait encore été initié au travail par le requérant lors de la formation du présent recours, continuerait de percevoir la prime de fonctions, dont il avait bénéficiée auparavant (durant cinq mois sous le nouveau statut) en tant que chef d’unité auprès du secrétariat général, et ce même après son transfert au service juridique.

157    Le requérant y voit une grave inégalité de traitement entre deux fonctionnaires qui exercent la même activité ; ses fonctions auraient été sous-estimées, son poste requérant un fonctionnaire particulièrement qualifié, très expérimenté et possédant des capacités d’encadrement. L’administration aurait donc dû avoir recours à une personne extérieure au service juridique. Il demande au Tribunal de mettre fin à cette inégalité de traitement en faisant droit à son recours.

158    Le requérant soutient que, lorsqu’il a quitté le service de la Commission, son successeur lui a confirmé qu’il continuait à percevoir la prime de fonctions. Une telle inégalité de traitement constituerait une discrimination qui apparaîtrait comme une vexation personnelle. Cela constituerait un élément essentiel justifiant l’introduction du présent recours, dont l’importance financière serait relativement modeste. Ce ne serait que sous la pression de ce recours que la Commission aurait corrigé cette « injustice manifeste ». Le requérant fait valoir que, du fait que son successeur a bénéficié de la prime en question encore durant cinq mois après son transfert au service juridique et que l’administration avait déjà accusé réception de la réclamation collective, il ne s’agirait pas d’une simple inadvertance. Il soutient qu’il était dans l’impossibilité d’obtenir, avant son départ, une information sur la manière dont la situation allait être réglée à l’avenir. Ce facteur devrait, selon lui, être pris en compte par le Tribunal dans sa décision.

159    La Commission conteste les arguments du requérant.

 Appréciation du Tribunal

160    Il est constant que, au moment où le successeur du requérant a été transféré dans sa fonction au sein du service juridique, il bénéficiait de la prime de fonctions litigieuse.

161    Or, force est de constater que cette prime lui avait été accordée déjà avant ce transfert, et ce en raison de sa qualité de chef d’unité au sein du secrétariat général de la Commission. Aucun des éléments présentés par le requérant ne permet d’écarter l’allégation de la Commission, selon laquelle le fait qu’il a continué à percevoir cette prime après son transfert était la conséquence d’une erreur administrative du service compétent. Il est constant que cette erreur a, entre-temps, été rectifiée.

162    Il ressort de ce qui précède que c’est sur le fondement d’une prémisse erronée que le requérant prétend que la Commission a traité de manière inégale des fonctions identiques, la sienne et celle de son successeur. De plus, comme cela a déjà été mentionné, il ne s’agissait que d’une simple erreur et non d’une décision d’attribuer une telle prime.

163    Il y a lieu d’ajouter que le requérant ne saurait tirer bénéfice d’une telle erreur. Il suffit de rappeler, à cet égard, que comme cela ressort de la jurisprudence mentionnée au point 122 ci‑dessus, le principe d’égalité de traitement n’ouvre pas au fonctionnaire le droit de demander un avantage financier illégalement accordé à un autre fonctionnaire.

164    Quant à l’allégation du requérant selon laquelle son poste requérait un fonctionnaire particulièrement qualifié, très expérimenté et possédant des capacités d’encadrement, ce qui constituerait la raison pour laquelle l’administration avait dû avoir recours à une personne extérieure au service juridique, il convient de constater que les caractéristiques de la fonction du requérant ont été analysées dans la partie précédente de cet arrêt, consacrée au deuxième moyen. La fonction en question devant être analysée en sa substance, en tenant compte des activités exercées, cette analyse ne saurait être influencée par la personnalité du fonctionnaire ou de l’agent exerçant cette fonction. L’allégation du requérant n’est donc pas déterminante quant à la question de savoir si le poste en cause est assimilable à celui d’un chef d’unité. Comme le rappelle à bon droit la Commission, après le changement d’affectation au service juridique, le successeur du requérant n’était plus chef d’unité.

165    Le troisième moyen doit, dès lors, être rejeté.

166    Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté en sa totalité.

 Sur les dépens

167    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chacune des parties supportera ses propres dépens.

Vilaras

Dehousse

Šváby

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 décembre 2007.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      M. Vilaras


* Langue de procédure : l’allemand.