Language of document : ECLI:EU:F:2007:217

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

11 décembre 2007 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Pensions – Droits à pension acquis avant l’entrée au service des Communautés – Transfert au régime communautaire – Calcul des annuités – Article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut – Abrogation de dispositions relatives à la conversion monétaire du montant transféré »

Dans l’affaire F‑117/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Nicolas Kolountzios, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.-N. Louis et É. Marchal, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. D. Martin et Mme L. Lozano Palacios, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. H. Kreppel, président, H. Tagaras et S. Gervasoni (rapporteur), juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 25 octobre 2007 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 27 octobre suivant), M. Kolountzios demande l’annulation de la décision du 11 mai 2007 par laquelle la Commission des Communautés européennes a refusé de procéder à un nouveau calcul de la bonification d’annuités de pension communautaire résultant du transfert des droits à pension qu’il avait acquis avant d’entrer au service des Communautés.

 Cadre juridique

 Règlements du Conseil relatifs à l’introduction de l’euro

2        Aux termes de l’article 3 du règlement (CE) n° 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro (JO L 162, p. 1, ci-après le « règlement sur l’introduction de l’euro ») :

« L’introduction de l’euro n’a pas pour effet de modifier les termes d’un instrument juridique ou de libérer ou de dispenser de son exécution, et elle ne donne pas à une partie le droit de modifier un tel instrument ou d’y mettre fin unilatéralement. La présente disposition s’applique sans préjudice de ce dont les parties sont convenues. »

3        L’article 14 du règlement (CE) n° 974/98 du Conseil, du 3 mai 1998, concernant l’introduction de l’euro (JO L 139, p. 1), dispose :

« Les références aux unités monétaires nationales qui figurent dans des instruments juridiques existant à la fin de la période transitoire doivent être lues comme des références à l’unité euro en appliquant les taux de conversion respectifs. Les règles relatives à l’arrondissage des sommes d’argent arrêtées par le règlement [sur l’introduction de l’euro] s’appliquent. »

4        Selon l’article 13 du règlement n° 974/98, l’article 14 précité s’applique « à compter de la fin de la période transitoire », période qui est définie, à l’article 1er de ce règlement, comme « la période commençant le 1er janvier 1999 et prenant fin le 31 décembre 2001 ».

 Statut des fonctionnaires et dispositions générales d’exécution

5        L’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes disposait, dans sa rédaction en vigueur antérieurement au 1er mai 2004 (ci-après l’« ancien statut ») :

« Le fonctionnaire qui entre au service des Communautés après avoir :

–        cessé ses activités auprès d’une administration, d’une organisation nationale ou internationale

ou

–        exercé une activité salariée ou non salariée,

a la faculté, au moment de sa titularisation, de faire verser aux Communautés, soit l’équivalent actuariel, soit le forfait de rachat des droits à pension d’ancienneté qu’il a acquis au titre des activités visées ci-dessus.

En pareil cas, l’institution où le fonctionnaire est en service détermine, compte tenu du grade de titularisation, le nombre des annuités qu’elle prend en compte d’après son propre régime au titre de la période de service antérieur sur la base du montant de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat. »

6        Par décision du 2 juillet 1969, la Commission avait adopté les dispositions générales d’exécution de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII de l’ancien statut, modifiées ultérieurement par décisions de la Commission du 4 février 1972 et du 16 mars 1977 (Informations administratives n° 789 du 16 avril 1993, ci-après les « anciennes DGE »).

7        En vertu de l’article 4, paragraphe 4, des anciennes DGE, le montant transféré au compte des Communautés, en application de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII de l’ancien statut, dans une monnaie autre que le franc belge, était – pour la détermination du nombre d’annuités pour la période du 1er janvier 1972 jusqu’à la date de la titularisation du fonctionnaire – converti en francs belges sur la base du taux actualisé moyen fixé par la Commission (ci-après le « mécanisme du taux actualisé moyen »).

8        Ce taux actualisé reflétait le taux de change moyen entre la monnaie nationale concernée et le franc belge sur l’ensemble de la période de paiement des cotisations au niveau national.

9        L’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, prévoit désormais, dans sa rédaction issue du règlement n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1), entré en vigueur le 1er mai 2004 (ci-après le « statut ») :

« Le fonctionnaire qui entre au service des Communautés après avoir :

–        cessé ses activités auprès d’une administration, d’une organisation nationale ou internationale

ou

–        exercé une activité salariée ou non salariée,

a la faculté, entre le moment de sa titularisation et le moment où il obtient le droit à une pension d’ancienneté au sens de l’article 77 du statut, de faire verser aux Communautés le capital, actualisé jusqu’à la date du transfert effectif, représentant les droits à pension qu’il a acquis au titre des activités visées ci-dessus.

En pareil cas, l’institution où le fonctionnaire est en service détermine, par voie de dispositions générales d’exécution, compte tenu du traitement de base, de l’âge et du taux de change à la date de la demande de transfert, le nombre d’annuités qu’elle prend en compte d’après le régime de pension communautaire au titre de la période de service antérieur sur la base du capital transféré, déduction faite du montant qui représente la revalorisation du capital entre la date de la demande de transfert et celle du transfert effectif.

[…] »

10      Par décision du 28 avril 2004, la Commission a abrogé les anciennes DGE et adopté de nouvelles dispositions générales d’exécution des articles 11 et 12 de l’annexe VIII du statut (Informations administratives n° 60‑2004 du 9 juin 2004), entrées en vigueur le 1er mai 2004 (ci-après les « DGE »).

11      L’article 7, paragraphe 3, de ces DGE prévoit que le montant transféré aux Communautés dans une monnaie autre que l’euro est, pour la détermination du nombre d’annuités, converti en euros sur la base du taux mensuel fixé par la Commission pour l’exécution du budget pour le mois d’enregistrement de la demande. Il résulte ainsi de ces DGE que lorsque le montant transféré aux Communautés est libellé en euros, aucun mécanisme de conversion monétaire de ce montant ne doit être utilisé dans le calcul du nombre d’annuités à prendre en compte dans le régime communautaire de pensions. Le mécanisme du taux actualisé moyen a donc été supprimé, à compter du 1er mai 2004, pour les demandes de transfert de droits à pension acquis au titre d’activités effectuées dans des États membres ayant adopté l’euro.

 Faits à l’origine du litige

12      Le requérant est entré au service de la Commission le 1er décembre 1982 en qualité d’agent temporaire. Le 1er décembre 1984, il a été nommé fonctionnaire stagiaire et titularisé le 1er septembre 1985.

13      Le 2 septembre 2004, le requérant a demandé le transfert des droits à pension qu’il avait acquis en Grèce avant son entrée au service des Communautés.

14      Par notes du 19 décembre 2006 et du 13 février 2007, portant respectivement sur les droits à pension acquis auprès de deux caisses nationales de retraite, la Commission a transmis au requérant deux propositions de bonification de pension statutaire résultant du transfert des droits qu’il avait acquis auprès de ces organismes.

15      Constatant que la Commission n’avait, dans ces notes, appliqué aucun mécanisme de conversion monétaire des montants transférés, le requérant n’a pas accepté ces propositions.

16      Par lettre du 20 mars 2007, que la Commission a analysée comme une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, le requérant a sollicité un nouveau calcul de la bonification résultant du transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service des Communautés. Dans cette lettre, le requérant, en se prévalant de l’arrêt du Tribunal du 14 novembre 2006, Chatziioannidou/Commission (F‑100/05, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt Chatziioannidou »), a demandé que le mécanisme du taux actualisé moyen soit appliqué au calcul de ses droits transférés.

17      Par lettre du 11 mai 2007, la Commission a rejeté cette demande (ci-après la « décision attaquée »).

18      La réclamation formée le 16 juillet 2007 par le requérant à l’encontre de la décision attaquée a été rejetée par décision du 18 septembre 2007 de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »).

 Procédure et conclusions

19      Par lettre parvenue au greffe du Tribunal le 15 novembre 2007 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 19 novembre suivant), le Conseil de l’Union européenne a demandé à intervenir dans la présente procédure à l’appui des conclusions de la Commission.

20      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

 En droit

21      En vertu de l’article 76 du règlement de procédure, adopté le 25 juillet 2007 (JO L 225, p. 1) et entré en vigueur le 1er novembre 2007, lorsqu’un recours est, en tout ou partie, manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

22      Selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur (voir arrêt de la Cour du 12 novembre 1981, Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9 ; arrêts du Tribunal de première instance du 19 février 1998, Eyckeler & Malt/Commission, T‑42/96, Rec. p. II‑401, point 55, et du 12 septembre 2007, González y Díez/Commission, T‑25/04, non encore publié au Recueil, point 58). Néanmoins, il est de jurisprudence bien établie que la recevabilité d’un recours s’apprécie au moment de son introduction (arrêt de la Cour du 27 novembre 1984, Bensider e.a./Commission, 50/84, Rec. p. 3991, point 8 ; ordonnance du président du Tribunal de première instance du 8 octobre 2001, Stauner e.a./Parlement et Commission, T‑236/00 R II, Rec. p. II‑2943, point 49).

23      Il résulte de ces considérations que si la règle énoncée à l’article 76 du règlement de procédure, selon laquelle le Tribunal peut, par ordonnance, rejeter un recours qui apparaît manifestement voué au rejet, est une règle de procédure, qui s’applique dès la date de son entrée en vigueur à tous les litiges pendants devant le Tribunal, il n’en va pas de même des règles sur la base desquelles le Tribunal peut, en application de cet article, regarder un recours comme manifestement irrecevable. En effet, s’agissant, comme en l’espèce, des règles fixant les conditions de recevabilité de la requête, elles sont nécessairement celles qui, ainsi qu’il a été dit, étaient applicables à la date d’introduction de celle-ci.

24      Dans le présent litige, à la date à laquelle le recours a été introduit, le 25 octobre 2007, lesdites règles étaient celles auxquelles renvoyait l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes, applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier. En effet, ledit article 111 est la disposition qui, dans le règlement de procédure du Tribunal de première instance, correspondait à l’article 76 du règlement de procédure.

25      Par conséquent, il y a lieu d’appliquer, d’une part, la règle de procédure visée par l’article 76 du règlement de procédure, et, d’autre part, les règles de recevabilité auxquelles renvoyait l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal de première instance.

26      Par ailleurs, en vertu de l’article 76 du règlement de procédure, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée lorsqu’un recours est manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

27      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application des dispositions de cet article comme de celles de l’article 111 susmentionné, de statuer sans poursuivre la procédure.

28      À l’appui de son recours, le requérant invoque deux griefs, tirés respectivement de l’illégalité de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut et d’une exception d’illégalité des DGE.

29      D’emblée, il convient de relever que le premier grief n’est assorti d’aucun argument et est dépourvu de toute précision. Le requérant se borne à demander la constatation, « pour autant que de besoin », de l’illégalité de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, sans indiquer quel vice affecterait cette disposition, en particulier en n’expliquant pas de quelle manière l’illégalité des DGE, alléguée par ailleurs, serait susceptible d’entacher la légalité dudit article. Ce premier grief ne répond donc pas aux exigences de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance et doit, dès lors, être rejeté comme manifestement irrecevable (voir ordonnance du Tribunal du 11 décembre 2007, Martin Bermejo/Commission, F‑60/07, non encore publiée au Recueil, point 30).

30      Le second grief se décompose en deux moyens : d’une part, les DGE seraient illégales au motif qu’elles auraient été adoptées en violation de l’article 3 du règlement sur l’introduction de l’euro et du principe de sécurité juridique ; d’autre part, elles méconnaîtraient le principe d’égalité de traitement et de non-discrimination.

 Sur le moyen tiré de ce que les DGE violeraient l’article 3 du règlement sur l’introduction de l’euro et le principe de sécurité juridique

31      Le requérant soutient, en se référant à l’arrêt Chatziioannidou, que les DGE, en abrogeant le mécanisme du taux actualisé moyen prévu par l’article 4, paragraphe 4, des anciennes DGE, ont méconnu les dispositions du règlement sur l’introduction de l’euro qui visent à garantir que l’adoption de la nouvelle monnaie s’effectue, au nom du principe de sécurité juridique, dans la plus grande neutralité possible.

 Appréciation du Tribunal

32      En premier lieu, il convient de relever que le Tribunal ne s’est prononcé, dans l’arrêt Chatziioannidou, que sur la portée juridique des anciennes DGE et sur une demande de transfert antérieure au 1er mai 2004. En effet, le Tribunal n’a, dans cet arrêt, censuré que l’illégalité de la décision de la Commission constatant, à compter du 1er janvier 2002, en raison de l’introduction de l’euro, la caducité implicite du mécanisme du taux actualisé moyen, au motif qu’une telle décision méconnaissait les dispositions visant à garantir que l’introduction de l’euro soit le plus neutre possible. Le Tribunal n’a nullement entendu se prononcer sur la légalité de l’abrogation expresse, par les DGE, à compter du 1er mai 2004, pour des raisons autres que l’introduction de l’euro, du mécanisme de taux actualisé moyen ni sur les conséquences d’une telle abrogation pour des demandes de transfert introduites, comme en l’espèce, après cette même date.

33      En deuxième lieu, le Tribunal de première instance, dans son arrêt rendu sur le pourvoi formé par la Commission à l’encontre de l’arrêt Chatziioannidou (arrêt du 12 septembre 2007, Commission/Chatziioannidou, T‑20/07, non encore publié au Recueil, points 43 et 44), a jugé que le règlement sur l’introduction de l’euro ne faisait pas obstacle à ce que la Commission modifiât sa réglementation relative à la conversion monétaire des montants transférés, à condition de procéder à une modification explicite de ces dispositions. Or, les DGE, à la différence de la décision de la Commission dont l’illégalité avait été constatée par le Tribunal dans l’arrêt Chatziioannidou, ont expressément abrogé les anciennes DGE, en particulier le mécanisme du taux actualisé moyen, et répondent donc clairement à cette condition.

34      En troisième lieu, force est de constater que l’interprétation que le requérant donne des dispositions visant à garantir la neutralité des conditions du passage à l’euro, qui ne s’appuie d’ailleurs sur aucune référence jurisprudentielle pertinente, rendrait excessivement difficile l’adaptation de la législation communautaire, même bien après la date d’introduction de l’euro, et ne saurait, par conséquent, être retenue.

35      Dans ces conditions, le requérant ne peut valablement prétendre que l’abrogation expresse, par les nouvelles DGE, du mécanisme du taux actualisé moyen violerait l’article 3 du règlement sur l’introduction de l’euro et le principe de sécurité juridique.

36      Ce moyen doit, dès lors, être rejeté comme manifestement non fondé.

 Sur le moyen tiré de ce que les DGE méconnaîtraient le principe d’égalité de traitement et de non-discrimination

37      Selon le requérant, le Tribunal aurait jugé, aux points 54 et 55 de l’arrêt Chatziioannidou, que le mécanisme du taux actualisé moyen était appliqué par la Commission aux fins de garantir l’égalité de traitement entre tous les fonctionnaires sollicitant le transfert de leurs droits à pension. Les DGE ne permettraient plus de prendre en compte les fluctuations monétaires entre le franc belge et la drachme grecque ayant eu lieu pendant la période de cotisation du requérant en Grèce et, de ce fait, ne garantiraient plus l’égalité de traitement entre tous les fonctionnaires sollicitant le transfert de leurs droits à pension.

 Appréciation du Tribunal

38      En premier lieu, il convient de préciser la portée de l’arrêt Chatziioannidou, invoqué par le requérant.

39      Au point 55 de l’arrêt Chatziioannidou, le Tribunal a relevé que, avant le 1er janvier 2002, l’application par la Commission du mécanisme du taux actualisé moyen dans tous les cas, y compris lorsque les montants transférés par les caisses nationales de pension étaient libellés en francs belges, permettait de garantir l’égalité de traitement entre tous les fonctionnaires sollicitant le transfert de droits à pension.

40      En statuant ainsi, le Tribunal a considéré que l’application au niveau communautaire, avant la fin de la période transitoire d’introduction de l’euro, du mécanisme du taux actualisé moyen permettait de prémunir l’ensemble des fonctionnaires sollicitant un transfert de leurs droits à pension des conséquences de la dépréciation monétaire des sommes versées aux régimes nationaux de pension.

41      Il ne peut cependant être inféré de cette constatation, par un raisonnement a contrario, que le Tribunal aurait jugé que l’abrogation du mécanisme du taux actualisé moyen serait contraire au principe d’égalité de traitement.

42      En effet, d’abord, le Tribunal n’a fait la constatation rappelée au point 44 du présent arrêt que pour écarter un argument qu’avait soulevé la Commission, selon lequel seules les autorités nationales auraient eu compétence pour déterminer la valeur financière réelle des contributions versées au régime national de pension concerné.

43      Ensuite, il ressort clairement de l’arrêt Chatziioannidou que le Tribunal ne s’est pas prononcé sur la question de savoir si l’abrogation du mécanisme du taux actualisé moyen aurait méconnu le principe de non-discrimination. En effet, cette question était directement posée par le second moyen du recours dont le Tribunal avait été saisi dans cette affaire. Or, le Tribunal n’a pas examiné ce moyen, ainsi que l’indiquent les points 31 et 58 de son arrêt. Le Tribunal n’a censuré, ainsi qu’il a été dit, que l’illégalité de la décision de la Commission constatant, en raison de l’introduction de l’euro, la caducité implicite du mécanisme du taux actualisé moyen.

44      Enfin, au point 55 de l’arrêt Chatziioannidou, le Tribunal n’a pris en considération que la situation des fonctionnaires affectés par la décision de la Commission constatant, au 1er janvier 2002, la caducité implicite de ce mécanisme. Le Tribunal ne peut donc avoir intégré à son analyse la différence de traitement résultant ultérieurement de l’abrogation expresse de ce mécanisme par les DGE, à compter du 1er mai 2004.

45      Le requérant, qui a introduit sa demande de transfert après cette dernière date, ne saurait donc tirer argument de l’arrêt Chatziioannidou pour démontrer que les DGE porteraient atteinte au principe d’égalité de traitement et de non-discrimination.

46      En second lieu, il convient de relever que, hormis la référence aux points 54 et 55 de l’arrêt Chatziioannidou, le présent moyen n’est étayé par aucune autre considération ni démonstration.

47      Certes, il peut être déduit des points 38 à 40 de la requête que le requérant critique une différence de traitement entre les fonctionnaires sollicitant un transfert de droits à pension acquis en Grèce. Toutefois, il n’indique pas explicitement par rapport à quel groupe ou quelle catégorie, parmi ces fonctionnaires, il serait victime d’une différence illégale de traitement et n’explique pas en quoi sa situation serait comparable à celle de ce groupe ou de cette catégorie.

48      Tout au plus le moyen peut-il être analysé, au bénéfice d’un effort d’interprétation, comme critiquant la différence de traitement entre les fonctionnaires ayant bénéficié du mécanisme du taux actualisé moyen des anciennes DGE et ceux qui, tel le requérant, auraient été privés dudit mécanisme, après l’entrée en vigueur des DGE.

49      Mais même ainsi analysé, le moyen ne peut prospérer.

50      En effet, la différence de traitement alléguée par le requérant n’est que le résultat de l’application successive de règles différentes : les fonctionnaires du groupe « favorisé » ont introduit une demande de transfert sous l’empire des anciennes DGE, tandis que la demande de transfert du requérant, introduite le 2 septembre 2004, est régie par les seules dispositions des DGE entrées en vigueur le 1er mai 2004.

51      Or, ainsi que le Tribunal l’a déjà jugé, le propre d’une nouvelle règle est d’établir une distinction entre les personnes qui entraient dans le champ d’application de la règle antérieure et les personnes qui entrent dans le champ d’application de cette nouvelle règle à compter de l’entrée en vigueur de celle-ci. Semblable distinction ne viole pas, en tant que telle, le principe de non-discrimination, à peine de rendre impossible toute modification de la loi (arrêt du Tribunal du 16 janvier 2007, Vienne e.a./Parlement, F‑115/05, non encore publié au Recueil, point 59).

52      Dans la mesure où il était loisible à la Commission, sans qu’y fasse obstacle le règlement sur l’introduction de l’euro, de modifier les DGE, notamment pour préciser les modalités d’application des dispositions du statut entrées en vigueur le 1er mai 2004, la différence de traitement alléguée par le requérant ne peut, en tant que telle, en l’absence de toute critique circonstanciée des effets juridiques des règles en cause dans le temps ou sur la situation des fonctionnaires qui y sont soumis, caractériser une atteinte au principe d’égalité.

53      Il n’appartient pas au Tribunal, dans un tel contexte, de procéder lui-même à la recherche des arguments qui permettraient d’établir que la différence de traitement issue de l’entrée en vigueur des DGE n’est pas objectivement justifiée ou qu’elle est disproportionnée par rapport aux finalités de la nouvelle réglementation.

54      Dès lors, le moyen ne peut qu’être rejeté comme manifestement non fondé, en tant qu’il se réfère à l’arrêt Chatziioannidou, et comme manifestement irrecevable pour défaut de précision, pour le surplus (voir, en ce sens, ordonnance Martin Bermejo/Commission, précitée).

55      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté en partie comme manifestement irrecevable et en partie comme manifestement non fondé.

 Sur les dépens

56      En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

57      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

58      Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Par conséquent, le Conseil, qui a demandé à intervenir, supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté en partie comme manifestement irrecevable et en partie comme manifestement non fondé.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 11 décembre 2007.

Le greffier                                                          Le président



W. Hakenberg

 

      H. Kreppel

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : le français.