Language of document : ECLI:EU:T:2001:160

Document de travail

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

14 juin 2001 (1)

«FEOGA - Suppression d'un concours financier - Article 24 du règlement (CEE) n° 4253/88»

Dans l'affaire T-143/99,

Hortiplant SAT, établie à Amposta (Espagne), représentée par Mes C. Fernández Vicién et M. Iglesias Roa, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. L. Visaggio, en qualité d'agent, assisté de Me J. Guerra Fernández, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission du 4 mars 1999 supprimant le concours octroyé à Hortiplant SAT, par décision C(92) 3125 de la Commission, du 3 décembre 1992, relative à l'octroi du concours du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, section «orientation», au titre du règlement (CEE) n° 4256/88 du Conseil, dans le cadre du projet intitulé «Initiative sous forme d'un projet pilote et de démonstration d'une nouvelle méthode hautement efficace de production de pépinières: application aux espèces ornementales et forestières»,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. P. Mengozzi, président, Mme V. Tiili et M. R. M. Moura Ramos, juges,

greffier: M. H. Jung,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 12 décembre 2000,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    Le 24 juin 1988, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n° 2052/88, du 24 juin 1988, concernant les missions des fonds à finalité structurelle, leur efficacité ainsi que la coordination de leurs interventions entre elles et celles de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants (JO L 185, p. 9).

2.
    L'article 5 de ce règlement, consacré aux formes d'intervention, prévoit en son paragraphe 2 les formes d'intervention financière qui peuvent être réalisées dans le domaine des fonds structurels. Il dispose, au paragraphe 2, sous e), que ces interventions peuvent prendre la forme d'un «soutien à l'assistance technique et aux études préparatoires à l'élaboration des actions».

3.
    L'article 8 du règlement (CEE) n° 4256/88 du Conseil, du 19 décembre 1988, portant dispositions d'application du règlement n° 2052/88, en ce qui concerne le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «orientation» (JO L 374, p. 25), énonce que la contribution du FEOGA à la réalisation de l'interventionvisée à l'article 5, paragraphe 2, sous e), du règlement n° 2052/88 peut porter, notamment, sur la réalisation de projets pilotes relatifs à la promotion du développement des zones rurales, y compris le développement et la valorisation des forêts (premier tiret) et la réalisation de projets de démonstration destinés à démontrer aux agriculteurs les possibilités réelles des systèmes, méthodes et techniques de production correspondant aux objectifs de la réforme de la politique agricole commune (quatrième tiret).

4.
    Le règlement (CEE) n° 4253/88 du Conseil, du 19 décembre 1988, portant dispositions d'application du règlement n° 2052/88 en ce qui concerne la coordination entre les interventions des différents fonds structurels, d'une part, et entre celles-ci et celles de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants, d'autre part (JO L 374, p. 1), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 2082/93 du Conseil, du 20 juillet 1993 (JO L 193, p. 20), contient au point IV (articles 14 à 16) les dispositions relatives au traitement des demandes de concours financier au titre des fonds structurels, les conditions d'accès au financement et certaines dispositions spécifiques.

5.
    Il découle du douzième considérant du règlement n° 4253/88 que l'intervention de la Communauté dans le cadre des fonds structurels doit se faire, de façon prépondérante, sous forme de cofinancement de programmes opérationnels. Les conditions de cette intervention sont déterminées à l'article 17 du même règlement, tel que modifié.

6.
    Le règlement n° 4253/88, tel que modifié, arrête également les dispositions relatives au paiement du concours financier (article 21), au contrôle des actions financées (article 23) et à la réduction, à la suspension et à la suppression dudit concours (article 24).

7.
    En vertu, notamment, de l'article 23, paragraphe 1, du même règlement, les États membres sont tenus d'adopter, afin de garantir le succès des actions réalisées par les promoteurs publics ou privés, les mesures nécessaires pour, premièrement, vérifier régulièrement la correcte exécution des actions financées par la Communauté, deuxièmement, prévenir et poursuivre les irrégularités et, troisièmement, récupérer les fonds perdus à la suite d'un abus ou d'une négligence.

8.
    Aux termes du paragraphe 2 de ce même article, sans préjudice des contrôles effectués par les États membres, des fonctionnaires ou agents de la Commission peuvent contrôler sur place, notamment par sondage, les actions financées par les fonds structurels et les systèmes de gestion et de contrôle. Les fonctionnaires ou agents de l'État membre concerné sont autorisés à participer à la vérification.

9.
    L'article 24, paragraphe 1, du règlement n° 4253/88 dispose que, lorsque l'exécution d'une action ou d'une mesure semble ne justifier ni une partie ni la totalité du concours financier qui a été alloué, la Commission est tenue de procéder à un examen approprié du cas dans le cadre du partenariat avec l'État membre concerné, en demandantnotamment à ce dernier ou aux autorités désignées par celui-ci, en vue de la mise en oeuvre de l'action, de présenter leurs observations dans un délai déterminé.

10.
    Aux termes de l'article 24, paragraphe 2, du même règlement, à la suite de cet examen, la Commission peut réduire ou suspendre le concours financier pour l'action ou la mesure en cause si l'examen a confirmé l'existence d'une irrégularité ou d'une modification importante affectant la nature ou les conditions d'exécution de l'action ou de la mesure, et pour laquelle son approbation n'avait pas été demandée.

Faits à l'origine du litige

11.
    Le 3 décembre 1992, la Commission, conformément à l'article 8, premier et quatrième tirets, du règlement n° 4256/88, a octroyé un concours du FEOGA, section «orientation», à l'entreprise Hortiplant SAT (ci-après «Hortiplant» ou la «requérante») par décision C(92) 3125 (ci-après la «décision d'octroi»). Ce concours était attribué dans le cadre du projet intitulé «Initiative sous forme de projet pilote et de démonstration d'une nouvelle méthode hautement efficace de production de pépinière: application aux variétés ornementales et forestières» (ci-après le «projet»).

12.
    En 1992, l'entreprise Azienda agricola Resteya (ci-après «Resteya») avait constaté une amélioration du «comportement végétatif et productif» des pépinières grâce à l'utilisation d'un nouveau type de conteneur, appelé «Fitton Plant». Il s'agissait d'un cylindre en cellulose biodégradable, à fond ouvert, rempli d'un substrat comprimé, qui s'adaptait aisément à la production d'espèces d'arbres et d'arbustes ornementaux et forestiers dans des conditions spécifiques de profondeur de sol pour permettre un enracinement et un développement corrects. Des prototypes de machines avaient été élaborés en vue de la réalisation de ce nouveau conteneur et de la mécanisation de la technique d'obtention de pépinières commerciales utilisant ce conteneur.

13.
    La requérante avait été désignée comme responsable de la réalisation des adaptations nécessaires à la production industrielle de ce nouveau système.

14.
    La durée du projet a d'abord été fixée à 25 mois à compter du mois de novembre 1992, puis a été prolongée jusqu'au 31 décembre 1995.

15.
    Le coût total du projet était de 1 227 875 écus et le coût éligible de 1 184 624 écus, la contribution financière de la Communauté étant limitée à un montant maximal de 731 992 écus et le solde devant être financé par Hortiplant, à raison de 247 942 écus, et par Resteya, à raison de 247 941 écus. La Commission a versé des avances sur ce concours d'un montant total de 512 393 écus.

16.
    En décembre 1995, le projet se trouvant en cours d'achèvement, Hortiplant a communiqué à la Commission toutes les pièces justificatives des dépenses, afin d'obtenir la partie non encore versée de la subvention. Cette communication a été réalisée par l'intermédiaire de M. Tasias qui, selon la requérante, est un ingénieuragronome qui l'a mise en relation avec Resteya, puis qui a assuré la direction technique du projet ainsi que tous les contacts avec la Commission.

17.
    À la suite d'une vérification de la Cour des comptes des Communautés européennes, effectuée le 10 février 1997, la Commission a décidé de procéder à une série de contrôles portant sur un certain nombre de projets pilotes bénéficiant de concours financiers au titre de l'article 8 du règlement n° 4256/88, parce qu'elle soupçonnait l'existence d'un réseau organisé dans le but d'obtenir frauduleusement des subventions communautaires. Le projet s'est trouvé soumis à ces contrôles.

18.
    Au cours du mois d'août 1997, Hortiplant a été invitée à remettre à la Commission toutes les pièces justificatives relatives à l'exécution du projet. La documentation requise a été communiquée le 17 septembre 1997.

19.
    Les 29 et 30 septembre 1997 a eu lieu, conformément à l'article 23 du règlement n° 4253/88, un contrôle sur place de l'exécution du projet, effectué par des fonctionnaires des directions générales «Agriculture» et «Contrôle financier» de la Commission et de l'unité de coordination de la lutte antifraude (UCLAF). Les fonctionnaires des deux derniers services ont ultérieurement rédigé des rapports faisant état de leurs conclusions. Un fonctionnaire de l'Intervención General del Estado (division du ministère des Finances espagnol) a assisté aux vérifications des fonctionnaires communautaires.

20.
    Par lettre du 10 octobre 1997, Hortiplant a demandé à la Commission de retirer du dossier des factures émanant de la société Genforsa, pour un montant de 13 563 828 pesetas espagnoles (ESP), et de ses partenaires, pour un montant de 13 563 828 ESP, qui avaient été erronément transmises.

21.
    À l'issue de l'inspection susvisée, la Commission a transmis le dossier au parquet espagnol.

22.
    Par lettre du 3 avril 1998, la Commission a informé Hortiplant que, conformément au règlement n° 4253/88, elle avait procédé à un examen de l'exécution du projet et que les vérifications effectuées faisaient ressortir l'existence de faits qui pouvaient constituer des irrégularités.

23.
    La Commission a accordé à Hortiplant un délai de six semaines pour lui faire parvenir des explications et des pièces comptables et administratives justifiant de l'exécution correcte du projet, sous peine de remboursement des sommes déjà payées et de suppression du concours en cause. Parallèlement, elle a envoyé au royaume d'Espagne une demande d'observations.

24.
    Par lettre du 26 mai 1998, Hortiplant a présenté une série d'observations en réponse aux allégations de la Commission.

25.
    Le 26 octobre 1998, le parquet espagnol a engagé des poursuites contre les partenaires d'Hortiplant ainsi que contre M. Tasias et deux directeurs de Resteya au motif qu'ils auraient procédé à la falsification de documents commerciaux.

26.
    Par décision du 4 mars 1999, la Commission a, en vertu de l'article 24, paragraphe 2, du règlement n° 4253/88, supprimé le concours financier octroyé à Hortiplant (ci-après la «décision attaquée»).

27.
    Dans la décision attaquée, la Commission affirme que l'examen conduit en vertu de l'article 24, paragraphe 1, du règlement n° 4253/88 a confirmé l'existence des irrégularités suivantes:

« -    la [décision d'octroi] prévoit dans son annexe I que la part des dépenses éligibles au titre du projet et non couverte par la contribution financière de la Communauté, soit 495 883 écus, soit financée pour la moitié par [Hortiplant] et pour l'autre moitié par la société Resteya; les constatations effectuées lors de la visite de contrôle susmentionnée ont fait naître des doutes sérieux sur la mise en oeuvre d'un cofinancement de la part de ces deux sociétés;

-    [Hortiplant] a présenté comme justificatif lors des contrôles des factures de la société Genforsa pour un montant de 5 836 310 [ESP] (environ 37 800 écus), au titre de la production de plantes sylvicoles, ainsi que de leur transport et des travaux de plantations; lors de la visite de contrôle il a été constaté que les plantes utilisées dans le cadre du projet ont été produites par [Hortiplant] et plantées par l'entreprise Poblador, dont la facture avait été imputée au projet; [Hortiplant] a présenté d'autres factures de cette société Genforsa pour un montant de 7 727 608 [ESP] (environ 50 100 écus) au titre de travaux d'évaluation du système Fitton Plant; aucune convention entre ces deux sociétés ni aucun rapport technique sur les prestations fournies n'ont cependant été présentés aux contrôleurs de la Commission; par conséquent, il n'y a aucune assurance que les factures de la société Genforsa présentées par [Hortiplant] reflètent la réalité;

-    [Hortiplant] a également payé, via l'entreprise Codema, une facture de 29 280 écus, datée du 11.01.1993, de la société Cedarcliff pour son intervention en faveur du projet auprès des services de la Commission: l'intervention de Cedarcliff ne correspond à aucune des actions prévues par la [décision d'octroi] et ne constitue pas une dépense éligible;

-    les frais de personnel [d'Hortiplant] ont été imputés au projet à hauteur d'environ un tiers des frais totaux pour 1993 et 1994, soit avant l'installation des machines réalisée en octobre 1994, et à hauteur de près de 95 % des frais totaux pour 1995; la part de ces frais de personnel imputés n'est assortie d'aucune justification qui permette de s'assurer que les frais portés en compte sont uniquement liés à la réalisation des actions du projet».

Procédure et conclusions des parties

28.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 juin 1999, la requérante a introduit le présent recours.

29.
    Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, elle a introduit une demande en référé tendant à obtenir la suspension de l'exécution de la décision attaquée. Cette demande a été rejetée par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 16 juillet 1999, Hortiplant/Commission (T-143/99 R, Rec. p. II-2451).

30.
    La procédure écrite a été close le 21 janvier 2000.

31.
    Par télécopie du 5 décembre 2000, adressée au greffe du Tribunal, la requérante a demandé à être autorisée à produire quatre documents nouveaux. Sur la base de l'article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal a décidé de faire droit à la demande de la requérante.

32.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience du 12 décembre 2000.

    

33.
     La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    constater que le recours est recevable et fondé;

-    constater la nullité de la décision attaquée;

-    subsidiairement, annuler partiellement la décision attaquée et réduire le concours financier qui lui a été alloué;

-    condamner la Commission à la totalité des dépens de la présente procédure.

34.
    La défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme non fondé;

-    condamner la requérante aux dépens.

En droit

35.
    La requérante fonde sa demande principale sur cinq moyens, tirés respectivement d'une application erronée de l'article 24 du règlement n° 4253/88, d'une erreur d'appréciation des faits, de l'absence de fondement juridique de la suppression du concours financier, d'une violation des droits de la défense, découlant du fait que laCommission n'a pas respecté les formes substantielles au cours de la procédure administrative, et d'un défaut de motivation. À l'appui de sa demande subsidiaire, elle invoque un sixième moyen, tiré d'une violation du principe de proportionnalité.

I - Sur la demande principale

36.
    Il convient d'examiner, en premier lieu, le troisième moyen.

Sur le troisième moyen, tiré de l'absence de fondement juridique de la suppression du concours financier

Arguments des parties

37.
    Par ce moyen, la requérante vise à démontrer que, en vertu de l'article 24, paragraphe 2, du règlement n° 4253/88, la Commission peut réduire ou suspendre un concours financier, mais non le supprimer. Cela résulterait de la teneur de cet article, qui prévoirait exclusivement ces deux premières possibilités. Par ailleurs, si les rédacteurs de cet article avaient voulu conférer à la Commission le pouvoir de supprimer les concours financiers accordés au titre des fonds structurels, ils l'auraient prévu expressément.

38.
    La Commission considère que, s'il est vrai que l'article 24, paragraphe 2, du règlement n° 4253/88 prévoit uniquement les possibilités de réduire ou de suspendre un concours financier, elle peut néanmoins, compte tenu de la logique du système, le supprimer dans sa totalité.

Appréciation du Tribunal

    

39.
    Si le libellé de l'article 24, paragraphe 2, du règlement n° 4253/88 ne prévoit pas explicitement la possibilité pour la Commission de prendre une mesure de suppression d'un concours financier, il n'en demeure pas moins que le paragraphe 1 de cet article commence par les mots: «si la réalisation d'une action ou d'une mesure semble ne justifier ni une partie ni la totalité du concours financier». Dans le paragraphe 1 est donc admis implicitement le pouvoir de la Commission de supprimer la totalité dudit concours. Or, étant donné que l'article en question doit être compris à la lumière de l'ensemble de ses dispositions, il y a lieu d'interpréter son paragraphe 2 comme incluant également la possibilité de supprimer un concours financier dans sa totalité.

40.
    Par ailleurs, l'article 24 est intitulé «Réduction, suspension et suppression du concours». Il est de jurisprudence constante que, lorsqu'il existe une divergence entre le libellé d'une disposition et son intitulé, il y a lieu d'interpréter l'un et l'autre de manière à ce que tous les termes employés aient une utilité. En conséquence, il convient d'interpréter l'article 24, paragraphe 2, du règlement n° 4253/88 en ce sensqu'il permet à la Commission de supprimer un concours financier accordé dans le cadre du FEOGA en cas d'irrégularité.

41.
    Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'absence de base juridique habilitant la Commission à supprimer le concours financier en question doit être rejeté.

Sur le premier moyen, tiré d'une application erronée de l'article 24 du règlement n° 4253/88, et sur le deuxième moyen, tiré d'une erreur d'appréciation des faits

Arguments des parties

42.
    Par son premier moyen, la requérante vise à démontrer l'inexistence de trois des quatre irrégularités relevées par la Commission dans la décision attaquée, à savoir l'inexécution de l'obligation de cofinancement ainsi que l'imputation au projet de dépenses non éligibles et de frais de personnel non liés à sa réalisation (voir point 27 ci-dessus). En ce qui concerne la quatrième irrégularité, à savoir l'imputation au projet des factures de la société Genforsa, la requérante, tout en reconnaissant avoir présenté ces factures à la Commission, vise, par son deuxième moyen, à démontrer que cette dernière a commis une erreur d'appréciation des faits en omettant de tenir compte de sa demande tendant à ce que lesdites factures soient retirées du dossier.

43.
    À titre liminaire, la requérante soutient que l'article 24 du règlement n° 4253/88, qui prévoit les mesures que la Commission peut adopter dans le cas où les conditions d'octroi du concours financier ne sont pas respectées par le bénéficiaire, est applicable uniquement lorsque l'action financée par la Communauté n'a pas été réalisée en tout ou en partie. À cet égard, elle souligne que le projet a été réalisé intégralement et que toute irrégularité éventuellement constatée ne relèverait que d'un problème de gestion, dû probablement à sa petite taille et à son manque d'expérience. Toutefois, elle conteste l'existence des irrégularités invoquées par la Commission.

- En ce qui concerne le respect par Hortiplant et Resteya de l'obligation de cofinancement du projet

44.
    La requérante soutient que, bien que la Commission mette en doute la réalité du cofinancement du projet par les deux sociétés, celle-ci n'a jamais pu justifier ses soupçons. En revanche, les justificatifs de ce cofinancement ont été mis à la disposition de la Commission.

45.
    Par ailleurs, la requérante souligne que tous les investissements dans le projet n'étaient pas seulement des contributions en argent. À cet égard, elle mentionne, notamment, le fait que M. Poblador, un agriculteur qui a contribué au projet, n'a émis qu'une facture de nature symbolique, étant donné l'intérêt qu'il portait à celui-ci. De la mêmemanière, les sous-traitants établis en Aragon n'auraient fait payer ni la location des terres ni leurs travaux, tout en conservant, en contrepartie, les espèces plantées. Les quatre partenaires de la requérante, en tant qu'ingénieurs agronomes, auraient contribué au projet par leur travail personnel. Il en irait de même pour Resteya qui aurait mis à disposition des matériaux coûteux ainsi que toutes ses connaissances techniques.

46.
    La requérante fait valoir que l'examen de sa comptabilité pour les années 1993 à 1995 a prouvé sa capacité financière à assumer les coûts du projet. Ainsi, elle aurait réduit son endettement de plus de 31 millions de ESP et reçu des versements en liquide de la part de ses associés de plus de quatre millions et demi de ESP.

47.
    Enfin, la requérante conteste le fait que la Commission lui reproche de ne pas avoir établi une comptabilité séparée pour le projet, obligation qui n'est pas indiquée dans les conditions de réalisation de celui-ci.

48.
    La Commission rétorque que la requérante, en tant que responsable du projet, avait l'obligation de démontrer la réalité du cofinancement. À cet égard, la tenue d'une comptabilité séparée serait indispensable, parce que ce serait le seul moyen de justifier irréfutablement les dépenses exposées dans le cadre du projet, même si cela n'est pas expressément prévu par la législation ou par la décision d'octroi.

49.
    Par ailleurs, les justificatifs présentés ne démontreraient pas la réalité du cofinancement par les deux sociétés qui y étaient tenues. En effet, une simple analyse des comptes de la requérante suffirait pour constater qu'elle se trouvait dans l'impossibilité de satisfaire à cette obligation.

50.
    La Commission admet que la part correspondant au financement incombant à la requérante ait pu être apportée en industrie, c'est-à-dire par la réalisation de prestations. Elle souligne cependant que la requérante a présenté des justificatifs de frais d'un montant total de 84 928 079 ESP (510 000 écus environ), correspondant théoriquement à des dépenses exposées pour la réalisation du projet, et qu'aucun apport en industrie n'a été justifié. Compte tenu du fait que la requérante n'avait pas la capacité financière d'acquitter ces frais, puisqu'elle ne disposait pas de fonds propres, il y aurait lieu de déduire que ces dépenses ont été réglées intégralement au moyen du concours communautaire.

- En ce qui concerne la facture de la société Cedarcliff

51.
    La requérante conteste que l'irrégularité du paiement par une société d'une facture établie par une autre société lui soit imputée alors que ces deux entreprises échappent à son contrôle. Si la Commission estime que ladite facture correspond à une dépense non éligible, elle devrait imputer l'irrégularité à la société Codema, qui l'a payée. En tout état de cause, l'affirmation selon laquelle Hortiplant aurait payé la facture établie par la société Cedarcliff par l'intermédiaire de la société Codema serait dénuée de tout fondement. Comme il aurait été établi devant les inspecteurs de la Communauté au cours de leurs vérifications, Hortiplant aurait ignoré non seulement l'existence de ladite facture, mais également l'existence de la société Cedarcliff et de ses activités.

52.
    En tout état de cause, la requérante est d'avis que la prestation de la société Cedarcliff est prévue par la décision d'octroi. Cette prestation, qualifiée d'«intervention en faveur du projet auprès des services de la Commission», entrerait dans le cadre des dépenses de «Gestion du projet», budgétisées au point 8 de l'annexe 1 de la décision d'octroi pour un montant total de 215 340 écus. Cette dépense figurerait même dans la demande de concours financier présentée par la requérante.

53.
    La défenderesse affirme, tout d'abord, qu'il est constant qu'Hortiplant a payé à la société Codema certaines sommes pour des prestations qui incluaient l'intervention d'une entreprise tierce (Cedarcliff) en faveur du projet auprès de ses services. Dès lors, elle considère qu'Hortiplant, en tant que responsable du projet, était tenue de vérifier à quoi correspondait chacun des paiements effectués. Si la requérante avait effectué le contrôle nécessaire, elle aurait constaté que la facture de la société Codema correspondait, du moins partiellement, à une prestation non éligible selon la décision d'octroi.

54.
    Quant à la mention de l'engagement d'un professionnel dans la demande de concours financier présentée par Hortiplant, elle ne signifierait pas que la Commission ait implicitement admis une telle participation au projet comme dépense éligible. Le seul élément de référence valable serait la décision d'octroi et ses annexes, et aucun de ces documents ne ferait mention de l'engagement d'une entreprise ou d'un professionnel comme intermédiaire vis-à-vis de la Commission, alors que les différentes phases du projet seraient pourtant exposées dans le détail. En ce qui concerne les dépenses de gestion prévues au point 8 de l'annexe 1 de la décision d'octroi, la Commission estime que ces dernières n'incluent pas le coût d'une intervention comme celle effectuée par la société Cedarcliff.

55.
    La Commission expose cependant qu'il s'agit d'une irrégularité qui, dans des circonstances normales, aurait pu être attribuée à une erreur et n'entraîner qu'une réduction du concours financier d'un montant équivalent à celui de la facture litigieuse.Néanmoins, la gravité des autres irrégularités constatées en l'espèce n'aurait laissé, comme seule solution, que la suppression totale dudit concours.

- En ce qui concerne les frais de personnel

56.
    La requérante soutient que, en raison de l'impossibilité d'établir par des preuves littérales les frais de personnel véritablement imputables au projet, à cause de la nature rurale et spécifique de ce dernier, il faut appliquer le critère du caractère raisonnable. C'est ainsi que, pour les exercices 1993 et 1994, l'imputation au projet d'un tiers de ses frais de personnel, nonobstant le fait que les machines n'avaient pas encore été mises en place, devrait être considérée comme raisonnable, compte tenu de la réalisation des travaux de préparation en vue de la bonne exécution du projet. En ce qui concerne l'exercice 1995, il faudrait tenir compte du fait que les machines ont été mises en place au cours de cet exercice et qu'Hortiplant a consacré la quasi-totalité de son activité au projet, s'agissant précisément de la dernière phase de celui-ci, compte tenu de la nécessité de le mener à bien jusqu'à son terme.

57.
    La requérante ajoute que le chiffre d'affaires élevé réalisé en 1995 n'était pas imputable à une plus grande utilisation de son personnel pour son activité ordinaire, mais à une amélioration générale des ventes grâce au travail effectué au cours des exercices antérieurs, à une réduction nette des retours de produits vendus et à la régularisation des stocks.

58.
    La Commission rétorque que, même en employant le critère du caractère raisonnable, il résulte des données fournies par la requérante que, en 1995, celle-ci a réalisé un chiffre d'affaires supérieur de 60 % à celui qu'elle avait réalisé en 1994 avec des frais de personnel, pour son activité ordinaire, sept fois inférieurs à ceux de 1994 et en mobilisant plus de 95 % de son personnel pour le projet. La Commission en conclut qu'Hortiplant a imputé au projet des frais de personnel qui correspondaient en réalité à son activité ordinaire, ce qui constitue une irrégularité grave.

- Sur la présentation des factures de la société Genforsa

59.
    La requérante conteste le reproche de la Commission selon lequel elle a présenté à celle-ci les factures de la société Genforsa. Elle expose que, à deux reprises, elle a demandé à la Commission de ne pas en tenir compte et que celle-ci a écarté les factures des partenaires de l'entreprise, transmises également par erreur.

60.
    Selon la requérante, la conclusion de la Commission selon laquelle l'irrégularité des factures de la société Genforsa justifie la suppression du concours financier est également erronée. Elle soutient, en premier lieu, que sa demande de retrait de ces factures du dossier ne constitue pas un aveu de leur irrégularité mais est due au faitqu'elle s'était rendu compte, peu après leur envoi, qu'elle ne pouvait ni juger ni attester avec certitude que les prestations facturées par la société Genforsa correspondaient au projet. Cette incertitude aurait été la conséquence du temps écoulé et de la circonstance que le comptable responsable pendant la période en cause n'était plus dans l'entreprise. En second lieu, contrairement aux affirmations de la Commission, une série de factures, intitulées «la production d'essences forestières, transport et travaux dans ses installations de diverses parcelles de démonstration», ne feraient pas allusion au système Fitton Plant. De même, l'argument de la Commission, selon lequel les factures de la société Genforsa seraient irrégulières parce que celle-ci n'aurait pas disposé des équipements nécessaires pour la réalisation des prestations facturées, serait erroné. La requérante fait valoir que lesdits équipements ne sont nécessaires que pour la production massive de Fitton Plant et pour la mécanisation de la technique d'obtention de plants sur une grande échelle, mais non pour des essais de croissance sur une petite échelle. Enfin, en ce qui concerne l'absence de convention entre la société Genforsa et Hortiplant pour la fourniture des prestations en cause et l'absence de rapports techniques relatifs à ces prestations, une telle absence ne serait pas, en elle-même, une raison suffisante pour mettre en doute la réalité des travaux effectués.

61.
    La défenderesse rétorque que, s'il est vrai qu'Hortiplant a demandé le retrait des factures de la société Genforsa en affirmant qu'elles avaient été envoyées erronément, elle l'a fait seulement après l'inspection communautaire, alors que les irrégularités avaient déjà été constatées. En outre, par sa demande de retrait de ces factures, Hortiplant reconnaîtrait que les travaux correspondants n'ont pas été réalisés. En effet, sur la quasi-totalité des factures, il serait indiqué textuellement qu'elles ont été émises dans le cadre du projet, ce qui démontrerait qu'il ne s'agit pas d'une erreur mais d'une tentative de faire croire à la Commission que certains travaux avaient été réalisés alors qu'ils ne l'ont pas été.

62.
    Selon la Commission, l'incapacité totale de la requérante à justifier la réalisation des travaux facturés suffit à constituer une irrégularité grave. Si, en outre, comme en l'espèce, les factures ne correspondent pas à la réalité des travaux effectués, l'irrégularité serait d'une telle gravité, qu'elle justifierait d'ordonner la suppression du concours financier, conformément à l'article 24 du règlement n° 4253/88, et ce même dans l'hypothèse où les autres irrégularités n'auraient pas été constatées.

Appréciation du Tribunal

63.
    Il ressort de l'article 24 du règlement n° 4253/88 que la Commission peut décider de prendre des mesures de restitution du concours financier si, aux termes du paragraphe 2 de cet article, «l'examen confirme l'existence d'une irrégularité ou d'une modification importante qui affecte la nature ou les conditions de mise en oeuvre de l'action ou de la mesure et pour laquelle l'approbation de la Commission n'a pas été demandée».

64.
    Ainsi, cette disposition se réfère, également, de façon expresse à des irrégularités concernant les conditions de mise en oeuvre de l'action financée, ce qui inclut des irrégularités dans la gestion de celle-ci. Il s'ensuit qu'il ne saurait être soutenu, comme le fait la requérante à titre préliminaire, que les sanctions prévues par l'article 24 du règlement n° 4253/88 ne trouveraient à s'appliquer que dans le seul cas où l'action financée n'aurait pas été réalisée en tout ou en partie.

65.
    Par ailleurs, le système de subventions élaboré par la réglementation communautaire repose notamment sur l'exécution par le bénéficiaire d'une série d'obligations lui donnant droit à la perception du concours financier prévu. Si le bénéficiaire n'accomplit pas toutes ces obligations, l'article 24, paragraphe 2, du règlement n° 4253/88 autorise la Commission à reconsidérer l'étendue des obligations qu'elle assume en vertu de la décision octroyant ledit concours (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 24 avril 1996, Industrias Pesqueras Campos e.a./Commission, T-551/93 et T-231/94 à T-234/94, Rec. p. II-247, point 161).

66.
    Les demandeurs et les bénéficiaires de concours communautaires sont, notamment, tenus de s'assurer qu'ils fournissent à la Commission des informations fiables non susceptibles de l'induire en erreur, sans quoi le système de contrôle et de preuve mis en place pour vérifier si les conditions d'octroi du concours sont remplies ne saurait fonctionner correctement. En effet, à défaut d'informations fiables, des projets ne remplissant pas les conditions requises pourraient faire l'objet d'un concours. Il en découle que l'obligation d'information et de loyauté qui pèse sur les demandeurs et bénéficiaires de concours est inhérente au système de concours du FEOGA et essentielle pour son bon fonctionnement.

67.
    Or, la production de factures et l'imputation de frais ne correspondant pas à la réalité ainsi que l'inexécution de l'obligation de cofinancement, si elles sont établies, constituent une violation grave des conditions d'octroi du concours financier en cause ainsi que de l'obligation d'information et de loyauté qui pèse sur le bénéficiaire d'un tel concours et, par conséquent, sont à considérer comme des irrégularités au sens de l'article 24 du règlement n° 4253/88.

- En ce qui concerne le respect par Hortiplant et Resteya de l'obligation de cofinancement du projet

68.
    Il ressort de l'article 17 du règlement n° 4253/88, tel que modifié, que le cofinancement de l'action en cause par le bénéficiaire d'un concours communautaire est l'une des conditions essentielles de l'octroi de celui-ci.

69.
    En l'espèce, l'article 3 de la décision d'octroi indique clairement que le coût éligible du projet était de 1 184 624 écus et que la contribution financière de la Communauté était fixée à un montant maximal de 731 992 écus. En outre, il est prévu au point 7 de l'annexe 1 de la décision d'octroi que le solde devait être financé par la requérante, àraison de 247 942 écus, et par Resteya, à raison de 247 941 écus. Le cofinancement du projet par la requérante et Resteya était, par conséquent, aussi expressément prévu en tant que condition de l'octroi du concours financier.

70.
    Or, il faut tout d'abord noter qu'il est constant qu'Hortiplant n'a pas établi une comptabilité séparée pour le projet. Certes, une telle comptabilité n'était requise ni par la réglementation communautaire ni par la décision d'octroi et, par conséquent, ce fait ne peut, en soi, constituer une irrégularité. Il n'en reste pas moins que, en l'absence de documentation spécifique attestant les coûts du projet, la Commission n'a pu se baser que sur la comptabilité générale de l'entreprise pour vérifier le respect des conditions énoncées dans la décision d'octroi et, notamment, si le projet avait été effectivement financé par Hortiplant dans la mesure prévue dans ladite décision.

71.
    À cet égard, la thèse de la Commission selon laquelle une simple analyse des comptes d'Hortiplant suffit à démontrer que cette dernière se trouvait dans une quasi-impossibilité de satisfaire à l'obligation de cofinancement est bien fondée. Il ressort, en effet, du dossier que la requérante disposait de fonds propres, insuffisants pour couvrir des dépenses en espèces du montant d'environ 500 000 écus, et qu'elle avait subi de fortes pertes au cours des dernières années de la mise en oeuvre du projet. Or, même en admettant, conformément à la thèse de la requérante, que ses partenaires aient réalisé des apports en industrie, il n'en reste pas moins que les dépenses de celle-ci pour la réalisation du projet ont été couvertes exclusivement par les subventions communautaires.

72.
    Enfin, l'argument de la requérante selon lequel la réduction de son endettement de 31 millions de ESP et l'existence d'apports de ses associés de plus de 4 millions de ESP démontreraient qu'elle était en mesure de financer le projet ne peut pas être retenu. D'une part, cette réduction de l'endettement, si elle démontre que la requérante avait amélioré sa situation financière, ne justifie pas de la disponibilité du capital nécessaire pour financer le projet et, d'autre part, des apports de 4 millions de ESP étaient largement insuffisants à cette fin.

- En ce qui concerne la facture de la société Cedarcliff

73.
    L'irrégularité constatée par la Commission en relation avec la facture de la société Cedarcliff ne porte pas, comme les autres irrégularités, sur la réalité des prestations facturées mais sur leur éligibilité.

74.
    À cet égard, il faut noter, en premier lieu, que les dépenses éligibles dans une action financée par la Communauté sont seulement celles qui sont expressément indiquées dans la décision octroyant le concours financier (voir article 14, paragraphe 4, du règlement n° 4253/88). Dès lors, la thèse de la défenderesse, selon laquelle le fait que l'engagement d'un professionnel figurait dans la demande de concours présentée parHortiplant ne signifierait pas que la participation de ce professionnel ait été implicitement admise comme dépense éligible, doit être retenue.

75.
    En second lieu, en ce qui concerne les dépenses de gestion du projet, prévues au point 8 de l'annexe 1 de la décision d'octroi, qui selon la requérante incluraient l'activité d'intervention contestée, il convient de relever que cette catégorie de dépenses est prévue à la phase B du projet, intitulée «Démonstration et diffusion des résultats». Il s'ensuit que cette catégorie de dépenses ne couvre que les coûts de gestion du projet sur place et de diffusion des résultats. Une activité d'intervention comme celle facturée par la société Cedarcliff ne saurait donc entrer dans cette catégorie.

    

- En ce qui concerne les frais de personnel

76.
    Il ressort du dossier que, en 1993, la requérante a réalisé, dans le cadre de son activité ordinaire, c'est-à-dire sans prendre en compte la réalisation du projet, un chiffre d'affaires d'environ 29 millions de ESP avec des frais de personnel de 5,4 millions de ESP et, en 1994, un chiffre d'affaires d'environ 32 millions de ESP avec des frais de personnel de 6,5 millions de ESP. Or, en 1995, la requérante aurait réalisé un chiffre d'affaires de plus de 54 millions de ESP avec des frais de personnel de moins de 900 000 ESP, c'est-à-dire sept fois inférieurs à ceux de l'année 1994, et en employant plus de 95 % de son personnel pour le projet.

77.
    L'explication donnée par la requérante, selon laquelle cette augmentation du chiffre d'affaires pour l'année 1995 ne serait pas due à une plus grande utilisation de son personnel pour son activité ordinaire mais à une amélioration générale des ventes, à une réduction nette des retours des produits vendus et à une régularisation des stocks, ne justifie pas des écarts aussi élevés entre le chiffre d'affaires réalisé et les frais de personnel. Par ailleurs, il convient de remarquer que, au cours de l'année 1996, le chiffre d'affaires de la requérante a subi une diminution (42 millions de ESP) et que les frais de personnel ont, en revanche, augmenté (10 millions de ESP).

78.
    Par conséquent, en l'absence d'une explication convaincante des raisons de cette disproportion, la Commission a, à bon droit, retenu que la réalité des frais de personnel imputés au projet n'était pas prouvée.

- En ce qui concerne la présentation des factures de la société Genforsa

79.
    Il est constant qu'Hortiplant a présenté à la Commission des factures de la société Genforsa ne correspondant pas à des prestations exécutées en relation avec le projet. La requérante objecte seulement que ces factures auraient été présentées par erreur et que, par conséquent, la Commission ne saurait lui imputer l'irrégularité tenant au faitque les factures de Genforsa ont été versées au dossier, alors que, à deux reprises, elle aurait demandé à la Commission de ne pas en tenir compte.

80.
    Il y a également lieu de constater que les prestations décrites dans lesdites factures ont été réalisées par une autre entreprise qui les a régulièrement facturées et que les dépenses correspondantes ont été imputées au projet.

81.
    La requérante n'ayant produit aucun élément de preuve susceptible de justifier que les factures de la société Genforsa correspondaient à des prestations réellement exécutées par cette dernière et qu'elles avaient été présentées par erreur à la Commission, celle-ci a considéré à bon droit que la transmission desdites factures constituait une irrégularité au sens de l'article 24 du règlement n° 4253/88.

82.
    Il ressort de ce qui précède que la requérante n'a pas démontré que la Commission avait constaté à tort l'existence des irrégularités susvisées.

83.
    Cette conclusion n'est pas infirmée par les arguments que la requérante fonde sur les documents déposés au greffe du Tribunal le 5 décembre 2000.

84.
    En effet, il convient de constater que lesdits documents ne sont aucunement pertinents afin d'apprécier la légalité de la décision attaquée.

85.
    En premier lieu, par la production de l'ordonnance de non-lieu à statuer provisoire rendue par le Juzgado de Primeira Instancia de Amposta et du mémoire qu'elle a présenté dans le cadre de la procédure de faillite la concernant, la requérante vise à étayer la thèse de l'absence de fraude de sa part dans ses relations financières avec la Commission. À cet égard, il suffit de constater que la notion d'irrégularité au sens de l'article 24 du règlement n° 4253/88 n'implique pas qu'une quelconque intention frauduleuse de la part du bénéficiaire du concours communautaire soit démontrée par la Commission. En outre, cette dernière ne se fonde pas, dans la décision attaquée, sur l'existence d'une fraude de la part de la requérante pour justifier la suppression du concours en question.

86.
    En second lieu, la requérante produit le rapport dressé par le commissaire judiciaire à la procédure de faillite et le procès-verbal de l'assemblée des créanciers, parmi lesquels figure la Commission. Ces documents attestent, selon la requérante, l'absence d'irrégularités dans la tenue de sa comptabilité. À cet égard, il suffit de constater que lesdits documents ne portent que sur le respect par la requérante des «règles et procédures comptables» dans l'exercice de son activité d'entreprise. Ces documents n'ont donc aucune pertinence afin d'examiner si et dans quelle mesure la requérante a satisfait aux obligations découlant de l'octroi du concours en cause et d'apprécier si elle a commis des irrégularités aux sens de l'article 24 du règlement n° 4253/88. De surcroît, dans le rapport rédigé par le commissaire judiciaire, il est affirmé que la gestion des subventions versées par la Commission a «fait partie du déroulement normal de l'activité de l'entreprise», ce qui est précisément l'une des anomalies dansla gestion du concours en cause que la Commission a reprochées à la requérante, tant dans la décison attaquée que pendant la procédure administrative.

87.
    À la lumière de ce qui précède, les premier et deuxième moyens doivent être rejetés comme non fondés.

Sur le quatrième moyen, tiré d'une violation des droits de la défense

Arguments des parties

88.
    De l'avis de la requérante, ses droits de la défense ont été violés au cours de la procédure administrative, certaines garanties de procédure minimales n'ayant pas été respectées, en particulier s'il est tenu compte du fait qu'elle était exposée à des poursuites pénales de la part du parquet espagnol. En effet, la requérante estime que la lettre de la Commission du 3 avril 1998 n'était pas claire dans l'exposé des faits qui lui étaient imputés et qui étaient susceptibles de constituer des irrégularités. Cela constituerait une atteinte aux droits dont la requérante pouvait se prévaloir pour défendre correctement ses intérêts.

89.
    En premier lieu, en ce qui concerne le cofinancement, la Commission aurait estimé que le résultat des vérifications faisait naître des doutes sérieux à cet égard. À aucun moment, la Commission n'expliquerait l'origine de ces doutes, et la requérante n'aurait jamais pu vérifier dans quelle mesure les pièces qu'elle avait remises à la Commission le 17 septembre 1997 avaient été prises en compte par cette dernière.

90.
    En second lieu, la requérante rappelle que la Commission lui a reproché de n'avoir pu procéder à la vérification de ses livres comptables. Cependant, dans sa lettre du 26 mai 1998, Hortiplant aurait précisé que ces mêmes livres avaient été mis à la disposition de la Commission au cours de l'inspection. Même si, dans la décision attaquée, il n'est pas fait état des livres comptables, l'imputation initiale de la Commission ferait soupçonner que ladite décision a été arrêtée sans qu'il ait été aucunement tenu compte de la vérification de ces livres à laquelle les inspecteurs de la Commission ont néanmoins procédé au cours de l'inspection du 29 septembre 1997.

91.
    En troisième lieu, en ce qui concerne les imputations relatives aux factures de la société Genforsa, la requérante rappelle qu'elle avait envoyé à la Commission une lettre expliquant que l'envoi des factures en cause avait été effectué par erreur et qu'il convenait pour cette raison de ne pas en tenir compte. Le même argument aurait été repris dans la réponse de la requérante à la Commission en date du 26 mai 1998. Néanmoins, la Commission aurait porté atteinte de manière flagrante aux droits de la défense de la requérante du fait qu'elle n'a réservé aucune suite aux lettres qui lui avaient été adressées par cette dernière et qu'elle a poursuivi la procédure sans que la requérante puisse se prononcer à ce sujet.

92.
    En quatrième lieu, la requérante fait valoir que la Commission n'a pas expliqué les raisons pour lesquelles elle lui imputait l'irrégularité du paiement par la société Codema de la facture émise par la société Cedarcliff, alors que ces deux entreprises lui étaient étrangères.

93.
    De plus, en ce qui concerne les frais de personnel, la Commission n'aurait pas précisé si elle avait tenu compte de la documentation envoyée par la requérante, ni même si, et pour quelle raison, elle la jugeait insuffisante. Elle n'aurait pas non plus indiqué au moyen de quelles pièces la requérante aurait pu prouver que les frais en cause correspondaient réellement à la réalisation du projet. Dans l'ignorance des éléments susvisés, la requérante se serait trouvée sans défense et dans l'impossibilité de faire valoir d'autres arguments lui permettant de contester les raisons qui avaient amené la Commission à considérer comme irrégulière l'imputation de ces frais au projet.

94.
    Enfin, la requérante expose que la Commission a arrêté la décision attaquée sans avoir reçu les observations du royaume d'Espagne, en violation de l'article 24, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 4253/88.

95.
    La Commission considère, pour sa part, que toutes les garanties procédurales prévues par la législation ont été respectées. Elle soutient que le dernier point de l'annexe 2 de la décision d'octroi prévoit que le bénéficiaire peut présenter des observations dans un délai fixé par la Commission, avant que le concours financier soit suspendu, réduit ou supprimé. La Commission aurait scrupuleusement respecté cette garantie en communiquant à la requérante les motifs de la suppression du concours en cause et en lui demandant de présenter ses observations. Les observations de la requérante lui étant apparues insatisfaisantes, la Commission aurait procédé, sans délai, à la suppression dudit concours. La Commission conteste, en outre, que la procédure ait une nature répressive. La Commission aurait simplement tiré les conséquences du manquement de la requérante aux obligations préalablement convenues entre les parties.

96.
    En ce qui concerne la nécessité de recevoir les observations de l'État membre concerné, la Commission fait valoir qu'elle a respecté scrupuleusement les dispositions de l'article 24, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 4253/88. En effet, la Commission soutient que le royaume d'Espagne a été invité à présenter ses observations mais qu'il n'a pas répondu à cette demande dans les délais impartis. La Commission en conclut donc que le royaume d'Espagne a choisi de ne pas présenter d'observations.

Appréciation du Tribunal

97.
    Le point 10 de l'annexe 2 de la décision d'octroi prévoit que la Commission, si elle estime que les conditions d'octroi du concours financier n'ont pas été respectées, peut réduire, suspendre ou supprimer ledit concours, après avoir invité le bénéficiaire à présenter ses observations dans un délai fixé. Sur la base de cette disposition, et par lettre du 3 avril 1998, la Commission a invité Hortiplant à présenter ses observations.

98.
    La requérante affirme que ses droits de la défense ont été violés du fait que ladite lettre était particulièrement obscure, ce qui l'aurait empêchée de se défendre de façon appropriée. Cependant, force est de constater que la teneur de cette lettre est parfaitement claire: son contenu est d'ailleurs repris dans la décision attaquée, où les mêmes irrégularités sont confirmées, bien que d'une façon plus détaillée, comme ils doivent l'être dans une décision de suppression d'un concours communautaire. De plus, dans la lettre du 3 avril 1998 sont mentionnés à plusieurs reprises les résultats de l'inspection à laquelle la requérante elle-même a participé. Dans ces circonstances, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'a pas été mise en mesure de présenter ses observations de façon appropriée.

99.
    Cette analyse est corroborée par le fait que, dans sa réponse du 26 mai 1998, la requérante se prononce sur toutes les affirmations faites par la Commission dans la lettre du 3 avril 1998, à l'exception de la question du cofinancement, à propos de laquelle elle indique ne pas comprendre la motivation de l'institution.

100.
    En ce qui concerne le cofinancement, il convient de relever que, dans la lettre du 3 avril 1998, la Commission se limite à constater qu'elle avait des doutes sérieux sur sa mise en oeuvre, mais elle se réfère néanmoins aux résultats des vérifications, desquels il ressortait qu'Hortiplant n'avait pas la capacité financière nécessaire pour cofinancer le projet. La requérante avait, dès lors, connaissance des griefs et des arguments que la Commission entendait faire valoir sur ce point.

101.
    S'agissant de l'argument selon lequel la Commission n'aurait pas tenu compte des lettres de la requérante lui demandant de retirer du dossier les factures de la société Genforsa, il n'a aucune pertinence en ce qui concerne l'éventuelle violation des droits de la défense de la requérante, qui a pu réaffirmer son point de vue dans sa réponse du 26 mai 1998 et, par conséquent, se défendre contre les allégations de la Commission au sujet desdites factures.

102.
    De même, le fait que la Commission ait arrêté la décision attaquée à la suite des observations d'Hortiplant, sans ultérieurement lui demander des clarifications en ce qui concerne, notamment, les frais de personnel, ne constitue pas non plus une violation des droits de la défense. En effet, à la suite de ses vérifications et au vu des observations de la requérante, la Commission disposait de tous les éléments nécessaires à son appréciation, la requérante ayant eu l'occasion de se prononcer au sujet des irrégularités constatées.

103.
    Enfin, en ce qui concerne la prétendue nécessité pour la Commission de recevoir les observations de l'État membre concerné avant de supprimer un concours financier, il faut noter que l'article 24 du règlement n° 4253/88 prévoit seulement que la Commission procède à un examen approprié du cas, en demandant notamment à l'État membre concerné ou aux autorités désignées par celui-ci pour la mise en oeuvre de l'action de présenter leurs observations dans un délai déterminé et que, à la suite de cet examen, la Commission peut prendre les mesures nécessaires, si l'examen confirme l'existence d'une irrégularité.

104.
    Il ne ressort pas de la formulation de cet article que la Commission doit recevoir les observations de l'État membre concerné avant de supprimer le concours financier, si l'examen auquel elle a procédé a confirmé l'existence d'une irrégularité.

105.
    À la lumière de ce qui précède, le quatrième moyen doit être rejeté.

Sur le cinquième moyen, tiré d'un défaut de motivation

Arguments des parties

106.
    Selon la requérante, la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation parce qu'il est impossible, sur la base de l'analyse qu'elle contient, de vérifier si les circonstances de fait qui ont justifié son adoption sont réunies et si les faits ont été correctement qualifiés en droit. La requérante estime que, dans la décision attaquée, la Commission n'a pas exposé clairement et de manière cohérente les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle s'est fondée, de sorte que ni le destinataire de ladite décision ni le Tribunal ne seraient en mesure de connaître son raisonnement. Cela serait d'autant plus grave que la procédure communautaire a entraîné pour la requérante des poursuites pénales au niveau national.

107.
    La Commission fait valoir que la décision attaquée est correctement motivée et que la requérante connaissait parfaitement les motifs de la suppression du concours en cause.

Appréciation du Tribunal

108.
    Selon une jurisprudence constante, d'une part, en vertu de l'article 253 CE, la motivation d'un acte doit faire apparaître, d'une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l'autorité communautaire, auteur de l'acte incriminé, de façon à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge communautaire d'exercer son contrôle et, d'autre part, la portée de l'obligation de motivation s'apprécie en fonction de son contexte (arrêt Industrias Pesqueras Campos e.a./Commission, précité, point 140, et la jurisprudence citée).

109.
    En l'espèce, dans la décision attaquée, la Commission se réfère aux différentes étapes de la procédure administrative, notamment aux contrôles effectués par ses services, et indique que les irrégularités constatées justifiaient la suppression du concours en cause, en vertu de l'article 24, paragraphe 2, du règlement n° 4253/88. En outre, elle expose de façon détaillée les quatre irrégularités reprochées à la requérante, à savoir de n'avoir pas respecté l'obligation de financer partiellement le projet et d'avoir imputé à celui-ci des dépenses ne correspondant pas à des prestations réellement exécutées par la société Genforsa, des dépenses non éligibles et des frais de personnel non justifiés. De plus, les éléments invoqués à l'appui de ces constatations n'ont pas un caractère général, la Commission se référant à une série de données comptables et mentionnantles justificatifs présentés par la requérante dont la régularité est contestée. Enfin, il est constant qu'Hortiplant a fait l'objet d'une inspection qui a durée plusieurs jours, au cours de laquelle il lui a été signalé, notamment, quels étaient les justificatifs requis, et la possibilité lui a été offerte de prouver tant le cofinancement que la réalité des dépenses imputées au projet.

110.
    Il y a lieu, dès lors, de conclure que cette motivation fait apparaître d'une façon claire et non équivoque le raisonnement de la défenderesse et a permis à la requérante de défendre ses droits et au juge communautaire d'exercer son contrôle.

111.
    Il ressort, d'ailleurs, de l'argumentation développée par la requérante dans le cadre de ses moyens qu'elle a compris le raisonnement ayant conduit la défenderesse à prendre la décision attaquée.

112.
    Il résulte de ce qui précède que la décision attaquée est suffisamment motivée au sens de l'article 253 CE, de sorte que le moyen doit être rejeté.

II - Sur la demande subsidiaire

Arguments des parties

113.
    La requérante fait valoir, à l'appui de sa demande subsidiaire, que la Commission a violé le principe de proportionnalité au motif que le concours financier a été supprimé dans sa totalité, alors qu'il ressort des pièces qu'elle a communiquées à la Commission que le projet a été réalisé intégralement.

114.
    En tout état de cause, la requérante estime que la Commission ne peut pas agir avec une rigueur telle que les intérêts des particuliers s'avèrent compromis bien au-delà de ce qui serait normalement prévisible, et outrepasser ainsi les limites de sa compétence en affectant ces intérêts dans une mesure plus grave que ce qui apparaîtrait nécessaire après une analyse approfondie des intérêts en jeu.

115.
    La requérante soutient également qu'elle n'a commis aucune fraude à l'encontre de la Commission. Cette dernière aurait conclu à l'existence d'une intention frauduleuse au vu de la participation de M. Tasias au projet, et cela en méconnaissance du fait que, en l'espèce, il n'existait aucune irrégularité de cette nature ni d'indice d'une telle intention. À cet égard, la Commission ne saurait tirer argument des actions engagées par la justice espagnole, alors que c'est elle-même qui les a provoquées.

116.
    La Commission considère que la suppression totale du concours en cause est pleinement justifiée en ce que les irrégularités constatées ont été nombreuses et graves, la requérante ayant non seulement méconnu l'obligation de justifier les dépenses effectuées, mais également imputé au projet des factures correspondant à des prestations non réalisées.

Appréciation du Tribunal

117.
    Le principe de proportionnalité exige, selon une jurisprudence constante, que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché (voir, notamment, arrêts de la Cour du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, Rec. p. 2171, point 25, et du Tribunal du 19 juin 1997, Air Inter/Commission, T-260/94, Rec. p. II-997, point 144).

118.
    En outre, selon la Cour, la violation des obligations dont le respect revêt une importance fondamentale pour le bon fonctionnement d'un système communautaire peut être sanctionnée par la perte d'un droit ouvert par la réglementation communautaire, tel que le droit à une aide (arrêt de la Cour du 12 octobre 1995, Cereol Italia, C-104/94, Rec. p. I-2983, point 24, et la jurisprudence citée).

119.
    Le règlement n° 2052/88 ainsi que les règlements n° 4253/88 et n° 4256/88 portant application de ce règlement n° 2052/88 ont pour objet de promouvoir, par le biais du FEOGA, dans le cadre du soutien de la cohésion économique et sociale et dans la perspective de la réforme de la politique agricole commune, l'adaptation des structures agricoles et le développement des zones rurales. Il découle également du vingtième considérant du règlement n° 4253/88 et de l'article 23 du même règlement que le législateur a entendu mettre en place une procédure de contrôle efficace pour assurer le respect par les bénéficiaires des conditions posées lors de l'octroi du concours du FEOGA, afin de réaliser les objectifs susvisés de façon correcte. Il résulte, enfin, du point 66, ci-dessus, que la fourniture par les demandeurs et bénéficiaires de concours communautaires d'informations fiables est indispensable au bon fonctionnement du système de contrôle et de preuve mis en place pour vérifier si les conditions d'octroi de ces concours sont remplies.

120.
    Or, il résulte de l'examen du premier et du deuxième moyen, ci-dessus, que la production de factures et l'imputation au projet de frais ne correspondant pas à la réalité ainsi que l'inexécution de la condition relative au cofinancement constituent des violations graves d'obligations essentielles pouvant justifier la suppression du concours en cause.

121.
    Ensuite, en l'espèce, la Commission pouvait raisonnablement estimer que toute mesure autre que la suppression totale du concours en cause risquait de constituer un encouragement à la violation des conditions d'octrois du concours. En effet, les bénéficiaires pourraient être tentés de fournir de fausses informations ou d'en occulter certaines, pour augmenter artificiellement le montant de l'investissement susceptible d'être financé, afin d'obtenir un concours financier communautaire plus important si la seule sanction encourue est de voir ce dernier seulement diminué de la part de l'investissement ne remplissant pas une condition d'octroi du concours.

122.
    En conséquence, la requérante n'a pas démontré que la suppression du concours en cause était disproportionnée au regard des manquements reprochés et de l'objectif de la réglementation en cause.

123.
    Il s'ensuit que la violation alléguée du principe de proportionnalité n'est pas établie et que la demande subsidiaire doit être rejetée.

124.
    À la lumière de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

125.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, en ce compris les dépens afférents à la procédure de référé, conformément aux conclusions de la défenderesse.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    La requérante supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission, y inclus ceux afférents à la procédure de référé.

Mengozzi                    Tiili                Moura Ramos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juin 2001.

Le greffier

Le président

H. Jung

P. Mengozzi


1: Langue de procédure: l'espagnol.