Language of document : ECLI:EU:T:2022:419

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

6 juillet 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne verbale BALLON D’OR – Usage sérieux de la marque – Déchéance partielle – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001] – Preuve de l’usage sérieux – Appréciation des preuves – Qualification des services »

Dans l’affaire T‑478/21,

Les Éditions P. Amaury, établies à Boulogne-Billancourt (France), représentées par Mes T. de Haan et M. Laborde, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme M. Chylińska et M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Golden Balls Ltd, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par M. M. Hawkins, solicitor, Mes T. Dolde et V. Pati, avocats,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. G. De Baere, président, Mmes G. Steinfatt et S. Kingston (rapporteure), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Les Éditions P. Amaury, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 7 juin 2021 (affaire R 1073/2020‑4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 24 décembre 2004, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal BALLON D’OR.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 14, 16, 38 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 14 : « Métaux précieux et leurs alliages autres qu’à usage dentaire ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques, montres, horloges, réveille-matin, chronomètres, broches (bijouterie), cadrans solaires, médailles, figurines (statuettes) en métaux précieux, étuis à cigares, à cigarettes et briquets en métaux précieux, cendriers (en métaux précieux), porte-cigarettes (en métaux précieux), porte-clefs fantaisie » ;

–        classe 16 : « Papier et carton (brut, mi-ouvré ou pour la papeterie) ; produits de l’imprimerie ; articles pour reliures ; photographies ; papeterie ; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; matériel pour les artistes ; pinceaux ; machines à écrire et articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) ; papier d’emballage ; sacs, sachets et feuilles d’emballage en papier ou en matières plastiques ; caractères d’imprimerie ; clichés, journaux, livres, revues, magazines » ;

–        classe 38 : « Télécommunications ; transmission d’images, de sons et de données par voie téléphonique, par terminaux d’ordinateurs, par un réseau global de communication mondial (Internet) ou local (Intranet), par satellite, messagerie électronique ; traitement, surveillance, émission et réception de données, de signaux, d’images et d’informations traitées par ordinateurs ou appareils et instruments de télécommunications ; transmission d’informations contenues dans des banques de données et des banques d’images ; services de diffusion d’informations par voie électronique, agences de presse et d’informations (nouvelles) ; communications par réseau de fibres optiques ; communications radiophoniques, télégraphiques, téléphoniques ; diffusion de programmes de télévision ; émissions radiophoniques ; émissions télévisées, expédition de dépêches ; radiodiffusion ; transmission par satellite ; télématique ; télévision par câbles » ;

–        classe 41 : « Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; chronométrage de manifestations sportives, organisation de compétitions sportives et de remises de trophées, services de clubs de divertissements et de clubs sportifs, divertissement radiophonique et télévisé, exploitation d’installations sportives, exploitation de parcs de divertissement et de loisirs ; publication de livres, magazines revues et journaux, montage de programmes radiophoniques et de télévision, location d’équipements pour le sport (à l’exception des véhicules) ; organisation et conduite de conférences, forums et colloques ; enseignement de la gymnastique, parcs d’attractions, organisation et concours (éducation ou divertissement), production de spectacles, stages (camps) de perfectionnement sportif, production de films, location de stades ».

4        Le 26 septembre 2017, l’intervenante, Golden Balls Ltd, a présenté à l’EUIPO une demande en déchéance de la marque en question pour non-usage. La cause invoquée à l’appui de la demande en déchéance était celle visée à l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

5        Le 24 avril 2020, la division d’annulation a prononcé la déchéance de la marque contestée pour l’ensemble des produits et des services pour lesquels celle-ci avait été enregistrée, à l’exception des « activités sportives, à savoir [l’]organisation de compétitions sportives et de remises de trophées », relevant de la classe 41.

6        Le 23 juin 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation dans la mesure où elle prononçait la déchéance de la marque contestée pour les produits et les services visés au point 4 ci-dessus.

7        Par la décision attaquée, la chambre de recours a partiellement accueilli le recours, à savoir en ce qui concerne les « produits de l’imprimerie ; livres, magazines », relevant de la classe 16, et a rejeté le recours pour le surplus. En substance, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve fournis par la requérante démontraient l’usage sérieux de la marque contestée pour les « livres », « magazines » et « produits de l’imprimerie », relevant de la classe 16, mais pas pour les autres produits et services pour lesquels la division d’annulation avait prononcé la déchéance de la marque contestée.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens, y compris ceux exposés devant la chambre de recours.

9        L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Observations liminaires

 Sur l’objet du litige

10      Au point 1 de la requête, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée « au moins » en ce qu’elle a rejeté le recours quant aux services suivants :

–        classe 38 : « diffusion de programmes de télévision », « émissions télévisées », « transmission par satellite », « télématique » et « télévision par câbles » ;

–        classe 41 : « divertissement », « divertissement télévisé », « publication de livres, magazines, revues et journaux », « montage de programmes de télévision », « organisation et concours (divertissement) », « production de spectacles » et « production de films ».

11      L’EUIPO fait valoir que le recours pourrait être considéré comme irrecevable en ce qui concerne les autres produits et services que ceux explicitement énumérés au point 10 ci-dessus, pour lesquels la déchéance de la marque contestée a été prononcée, en raison de l’absence d’identification claire de l’objet du recours.

12      À cet égard, il convient de relever que, au point 29 de la requête, la requérante a précisé que le recours était limité aux services relevant des classes 38 et 41, visés au point 10 ci-dessus. Par ailleurs, à l’appui de son recours, la requérante soulève uniquement des griefs concernant l’appréciation par la chambre de recours de l’usage sérieux de la marque contestée pour les services visés au point 10 ci-dessus.

13      En conséquence, le recours doit être regardé comme étant uniquement dirigé contre la décision attaquée en tant qu’elle a prononcé la déchéance de la marque contestée pour les services relevant des classes 38 et 41 tels qu’ils sont visés au point 10 ci-dessus.

 Sur le droit applicable ratione temporis

14      Compte tenu de la date d’introduction de la demande en déchéance en cause, en l’occurrence le 26 septembre 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, le présent litige est régi par les dispositions matérielles du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1) (voir, en ce sens, arrêts du 6 juin 2019, Deichmann/EUIPO, C‑223/18 P, non publié, EU:C:2019:471, point 2, et du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 3).

15      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références, faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties dans leurs mémoires respectifs, aux articles 18 et 58 du règlement 2017/1001 comme visant les articles 15 et 51, d’une teneur identique, du règlement no 207/2009.

16      Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001. Il y a lieu de relever toutefois que, en ce qui concerne la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée, en application notamment de l’article 82, paragraphe 2, sous d), f) et i), du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), le litige est régi par les dispositions du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1).

 Sur le fond

17      À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009. La requérante conteste l’appréciation effectuée par la chambre de recours des faits et des éléments de preuve pertinents l’ayant amenée à conclure que la marque contestée n’avait fait l’objet d’un usage sérieux ni pour les services relevant de la classe 38 (première branche), ni pour ceux relevant de la classe 41 (seconde branche).

18      Il convient de relever que, en vertu de l’article 15, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 207/2009 (devenu article 18, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement 2017/1001) et de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du même règlement, le titulaire d’une marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qu’il n’existe pas de justes motifs pour son non-usage.

19      En l’espèce, tant la division d’annulation que la chambre de recours ont considéré la période comprise entre le 26 septembre 2012 et le 25 septembre 2017 comme étant la période de cinq ans pour laquelle il incombait à la requérante de démontrer un usage sérieux de la marque contestée, ce que les parties ne contestent pas.

20      Selon l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 58, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), si la cause de déchéance n’existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, le titulaire n’est déclaré déchu de ses droits que pour les produits ou les services concernés.

21      La ratio legis de l’exigence selon laquelle une marque doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être protégée au titre du droit de l’Union réside dans le fait que le registre de l’EUIPO ne saurait être assimilé à un dépôt stratégique et statique conférant à un détenteur inactif un monopole légal d’une durée indéterminée. Au contraire, ledit registre devrait refléter fidèlement les indications que les entreprises utilisent effectivement sur le marché pour distinguer leurs produits et services dans la vie économique [voir arrêt du 11 avril 2019, Fomanu/EUIPO – Fujifilm Imaging Germany (Représentation d’un papillon), T‑323/18, non publié, EU:T:2019:243, point 22 et jurisprudence citée].

22      Selon une jurisprudence constante, une marque fait l’objet d’un usage sérieux, au sens de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lorsqu’elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle, qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir arrêt du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 38 et jurisprudence citée). De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 4 avril 2019, Hesse et Wedl & Hofmann/EUIPO (TESTA ROSSA), T‑910/16 et T‑911/16, EU:T:2019:221, point 29 et jurisprudence citée].

23      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [voir arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 et jurisprudence citée].

24      Par ailleurs, l’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [arrêts du 12 décembre 2002, Kabushiki Kaisha Fernandes/OHMI – Harrison (HIWATT), T‑39/01, EU:T:2002:316, point 47, et du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 28].

25      À cet égard, en vertu de la règle 22 du règlement no 2868/95 (devenue article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2018/625), applicable aux procédures de déchéance conformément à la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 (devenue article 19, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625), la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque et se limite, en principe, à la production de pièces justificatives, comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1) [devenu article 78, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009, lui-même devenu article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001].

26      C’est à l’aune de ces principes qu’il convient d’examiner les deux branches du moyen unique soulevé par la requérante.

 Sur la première branche du moyen unique, concernant les services relevant de la classe 38

27      Dans le cadre de la première branche, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir procédé à une appréciation concrète des faits et éléments de preuve produits lorsqu’elle a conclu que la marque contestée ne faisait pas l’objet d’un usage sérieux pour les services suivants, relevant de la classe 38 : « diffusion de programmes de télévision », « émissions télévisées », « transmission par satellite », « télématique » et « télévision par câbles ».

28      En particulier, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en affirmant que, dès lors qu’elle n’entretenait pas un réseau de télécommunications utilisable par des tiers, l’usage sérieux de la marque contestée n’avait pas été établi pour l’ensemble des services compris dans la classe 38.

29      En effet, dès lors que la note explicative concernant la classe 38 de la classification de Nice préciserait que les services relevant de cette classe comprennent essentiellement les services qui permettent à un tiers au moins de communiquer avec un autre « ainsi que » les services de diffusion et de transmission de données, l’affirmation de la chambre de recours, selon laquelle les services relevant de la classe 38 doivent permettre à un tiers au moins de communiquer avec un autre, n’aurait pas dû être appliquée aux services, distincts, de la diffusion et de la transmission de données.

30      Selon la requérante, l’utilisation de la marque contestée pour la diffusion, dans tous les États membres, à la télévision et sur Internet du concours « Ballon d’or » démontre l’usage sérieux de cette marque pour les services relevant de la classe 38, visés au point 12 ci-dessus.

31      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

32      À cet égard, il convient de relever que, au point 42 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, selon la note explicative concernant la classe 38 de la classification de Nice, les services compris dans cette classe comprennent essentiellement les services qui permettent à un tiers au moins de communiquer avec un autre ainsi que les services de diffusion et de transmission de données. La chambre de recours a ajouté que, selon ladite note explicative, ces services ne comprennent ni le contenu ni la matière pouvant être compris dans la communication, ni les services réalisés à l’aide de raccordements par télécommunication, ni la production d’émissions de radio et de télévision. Au point 43 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté qu’aucun élément du dossier ne permettait de conclure que la requérante entretenait un réseau de télécommunications utilisable par des tiers. Au point 44 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que l’usage sérieux de la marque contestée n’avait pas été établi pour les services compris dans la classe 38.

33      Pour répondre à la première branche du moyen unique soulevé par la requérante, en premier lieu, il convient de préciser ce que recouvrent les services relevant de la classe 38 au sens de l’arrangement de Nice.

34      Selon la jurisprudence, il y a lieu d’interpréter la liste des produits et des services pour lesquels une marque est enregistrée et dont la preuve de l’usage sérieux a été demandée, afin de déterminer l’étendue de la protection de ladite marque et de régler la question de son usage sérieux, de la manière la plus cohérente qui soit, compte tenu de sa signification littérale et de sa construction grammaticale, mais également, en cas de risque de résultat absurde, de son contexte et de la volonté effective du titulaire de cette marque quant à sa portée [arrêts du 17 octobre 2019, Alliance Pharmaceuticals/EUIPO – AxiCorp (AXICORP ALLIANCE), T‑279/18, EU:T:2019:752, point 50, et du 1er septembre 2021, Bimbo Donuts Iberia/EUIPO – Hijos de Antonio Juan (DONAS DULCESOL), T‑697/20, non publié, EU:T:2021:526, point 28].

35      Dans ce sens, il convient de rappeler que l’étendue de la protection d’une marque de l’Union européenne est toujours déterminée en fonction du sens propre et usuel des termes choisis (voir arrêt du 1er septembre 2021, DONAS DULCESOL, T‑697/20, non publié, EU:T:2021:526, point 29 et jurisprudence citée).

36      Par ailleurs, s’il est vrai que la classification de Nice n’a qu’un caractère administratif, il y a toutefois lieu d’y recourir pour déterminer, si besoin est, la portée, voire la signification des produits et des services pour lesquels une marque a été enregistrée [arrêt du 10 septembre 2014, DTM Ricambi/OHMI – STAR (STAR), T‑199/13, non publié, EU:T:2014:761, point 35].

37      En l’espèce, il ressort de l’intitulé de la classe 38 de la classification de Nice dans sa huitième édition, datant de 2001, en vigueur à la date de la demande d’enregistrement de la marque contestée, que cette classe regroupe les services de « télécommunications ».

38      Selon la note explicative de ladite édition, la classe 38 comprend « essentiellement les services qui permettent à une personne au moins de communiquer avec une autre par un moyen sensoriel ». La note explicative précise que « [d]e tels services comprennent ceux qui : 1) permettent à une personne de converser avec une autre, 2) transmettent des messages d’une personne à une autre et 3) placent une personne en communication orale ou visuelle avec une autre (radio et télévision) ». Il est ajouté que « [c]ette classe comprend notamment : – les services qui consistent essentiellement en la diffusion de programmes de radio ou de télévision » et qu’elle « ne comprend pas notamment : – les services de publicité par radio (cl. 35) ».

39      Au vu de la description des services relevant de la classe 38 fournie dans la note explicative de la huitième édition de la classification de Nice, il apparaît que l’essentiel de ces services doit permettre à une personne au moins de communiquer avec une autre par un moyen sensoriel, et que la diffusion de programmes de radio ou de télévision est appréhendée comme un service plaçant une personne en communication orale ou visuelle avec une autre. Ainsi, l’argument de la requérante, selon lequel la chambre de recours aurait considéré à tort que tous les services relevant de la classe 38 sont des services qui permettent à un tiers au moins de communiquer avec un autre, doit être rejeté. En effet, les services de « diffusion de programmes de télévision », d’« émissions télévisées », de « transmission par satellite », de « télématique » et de « télévision par câbles » cités par la requérante ne sauraient être considérés comme étant distincts des autres services de télécommunications relevant de la classe 38. La chambre de recours pouvait donc valablement se fonder sur la circonstance que la requérante n’avait pas démontré entretenir un réseau de télécommunications utilisable par des tiers pour constater l’absence de preuve de l’usage sérieux des services susvisés.

40      En second lieu, pour établir l’usage sérieux de la marque contestée pour les services concernés compris dans la classe 38, la requérante soutient avoir produit de nombreux documents démontrant l’utilisation de la marque contestée pour la diffusion dans l’Union, à la télévision (par satellite) et sur Internet, du concours « Ballon d’or » (pièces nos 3.2.1 à 3.2.5). Elle indique que le nom du programme diffusé est BALLON D’OR, ce qui garantit la qualité du spectacle et l’origine du producteur. Le logo BALLON D’OR serait également utilisé pour les émissions spéciales diffusées avant ou après la cérémonie de remise de prix du concours. Les programmes télévisés BALLON D’OR seraient ainsi immédiatement reconnaissables grâce au signe BALLON D’OR qui apparaît toujours dans le coin inférieur gauche de l’écran (pièce no 3.8). S’agissant de la diffusion télévisée, la requérante précise qu’elle reçoit d’importantes redevances pour la diffusion dans l’Union du concours « Ballon d’or » (pièce no 3.1 bis). S’agissant de la diffusion sur Internet, elle soutient avoir démontré devant la chambre de recours que le concours « Ballon d’or » a été diffusé chaque année sur le site www.lequipe.fr, géré par son licencié. Selon la requérante, la mise à disposition de programmes télévisés en ligne devrait également être considérée comme un service de diffusion relevant de la classe 38.

41      À cet égard, il convient de relever que, selon la jurisprudence, le fait qu’une entreprise soit responsable du contenu de ses chaînes de télévision, de la manière dont son logotype et ses marques apparaissent sur ces chaînes ainsi que de la publicité qui y est diffusée ne permet pas de conclure qu’elle fournit des services de télédiffusion et de radiodiffusion relevant de la classe 38, dès lors qu’elle n’apporte aucun élément de nature à établir qu’elle fournit effectivement des services lui permettant de diffuser par ses propres moyens les chaînes en question pendant la période pertinente et, au contraire, qu’elle reconnaît que ce sont des sociétés tierces qui retransmettent lesdits contenus à leurs abonnés [voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2018, Star Television Productions/EUIPO – Marc Dorcel (STAR), T‑797/17, non publié, EU:T:2018:469, point 49].

42      Ainsi, les éléments de preuve apportés par la requérante devant la chambre de recours, faisant apparaître que le concours « Ballon d’or » est diffusé à la télévision au sein de l’Union sur différentes chaînes et que la requérante perçoit d’importantes redevances pour la diffusion du concours sur ces chaînes, ne permettent pas d’établir que la requérante fournit effectivement des services lui permettant de diffuser à la télévision le concours « Ballon d’or » par ses propres moyens et, a fortiori, utilise la marque contestée pour fournir de tels services. Au contraire, il ressort du dossier que ce sont des sociétés de télédiffusion tierces qui diffusent le concours « Ballon d’or » en payant à la requérante des redevances pour obtenir le droit de diffuser l’évènement.

43      Par ailleurs, s’agissant de la diffusion du concours « Ballon d’or » en ligne sur le site Internet www.lequipe.fr, géré par L’équipe 24/24, une société appartenant au même groupe de sociétés que la requérante et à laquelle une licence pour l’utilisation de la marque contestée a été octroyée, il convient de relever que si la diffusion de programmes de télévision par Internet est devenue courante aujourd’hui et qu’une marque pourrait par exemple être utilisée comme nom de domaine Internet pour offrir un accès à différents contenus télévisés sur Internet, au titre d’un service relevant de la classe 38 [voir, en ce sens, arrêt du 22 mai 2008, Radio Regenbogen Hörfunk in Baden/OHMI (RadioCom), T‑254/06, non publié, EU:T:2008:165, point 50], le dossier ne contient aucune preuve étayant la fourniture d’un tel service par la requérante sous la marque contestée. Ainsi, il apparaît plutôt que le signe BALLON D’OR est utilisé en tant que nom du programme de télévision diffusé sur Internet, à l’aide d’un service de diffusion fourni non pas par la requérante mais par un tiers.

44      Partant, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que la requérante n’avait pas établi l’usage sérieux de la marque contestée pour les services concernés compris dans la classe 38.

45      La première branche doit ainsi être rejetée.

 Sur la seconde branche du moyen unique, concernant les services relevant de la classe 41

46      Dans le cadre de la seconde branche, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié les faits et les éléments présentés afin de prouver l’usage sérieux de la marque contestée pour les services suivants, relevant de la classe 41 : « divertissement », « divertissement télévisé », « publication de livres, magazines revues et journaux », « montage de programmes de télévision », « organisation et concours (divertissement) », « production de spectacles » et « production de films ».

47      La seconde branche est divisée en trois griefs.

48      S’agissant du premier grief, portant sur les services de « divertissement », de « divertissement télévisé » et d’« organisation et concours (divertissement) », relevant de la classe 41, la requérante fait valoir que la chambre de recours a conclu à tort que l’usage sérieux de la marque contestée n’était pas établi pour ces services, considérant qu’une cérémonie de remise de prix telle que celle organisée par elle-même ne relèverait pas du « divertissement ».

49      Pour établir l’usage sérieux de la marque contestée pour les services relevant de la classe 41, la requérante a fait valoir qu’elle organisait chaque année un évènement destiné à récompenser le meilleur footballeur professionnel de la saison. Elle a indiqué qu’elle avait réalisé d’importants investissements financiers pour l’organisation ainsi que la production du concours « Ballon d’or » en vue de sa diffusion à la télévision et sur Internet (pièce no 3.1). La requérante a également indiqué avoir produit les montants qu’elle avait perçus à titre de redevances pour la diffusion du concours « Ballon d’or » sur des chaînes de télévision au sein de l’Union (pièce no 3.1 bis), des articles de presse établissant que le concours « Ballon d’or » recevait une couverture médiatique (pièces nos 3.5.1 à 3.5.3) et, enfin, les chiffres relatifs à l’audience du concours à la télévision (pièces nos 3.2.1 à 3.2.5) ainsi que sur Internet.

50      L’EUIPO et l’intervenante contestent le premier grief.

51      À cet égard, il convient de relever que la division d’annulation a considéré que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage sérieux pour les « activités sportives, à savoir [l’]organisation de compétitions sportives et de remises de trophées », mais pas pour les autres services enregistrés dans la classe 41. La chambre de recours a confirmé cette appréciation en rejetant le recours à cet égard.

52      Conformément à la jurisprudence citée au point 37 ci-dessus, la chambre de recours a déterminé l’étendue de la protection de la marque contestée en s’appuyant sur le sens propre et usuel des termes choisis pour désigner les services pour lesquels l’enregistrement avait été demandé.

53      Ainsi, au point 50 de la décision attaquée, elle s’est fondée sur le sens usuel du terme « divertissement » donné par le dictionnaire Collins, à savoir comme « consist[ant] en des représentations de pièces de théâtre et de films et des activités telles que la lecture et la télévision, qui donnent du plaisir aux gens ».

54      Il y a lieu de relever, par ailleurs, que, conformément à la jurisprudence, les services de divertissement s’adressent au grand public [voir, dans le contexte de la comparaison des produits et des services effectuée dans le cadre d’une procédure d’opposition, arrêt du 13 juin 2012, Hotel Reservation Service Robert Ragge/OHMI – Promotora Imperial (iHotel), T‑277/11, non publié, EU:T:2012:295, point 54].

55      Enfin, il ressort de la note explicative de la huitième édition de la classification de Nice, invoquée par l’EUIPO, que la classe 41 comprend notamment « les services dont le but essentiel est le divertissement, l’amusement ou la récréation d’individus ».

56      En l’espèce, il ne saurait être valablement contesté que l’organisation d’une cérémonie de remise de prix telle que celle du concours « Ballon d’or » a comme objectif principal le divertissement. En effet, le public du concours « Ballon d’or » assiste, dans la salle où se tient la cérémonie, à la télévision ou sur Internet, à un moment de célébration au cours duquel les performances sportives d’une personne sont récompensées. Le concours « Ballon d’or » ne se limite pas à la remise du trophée en tant que telle. Comme l’a fait valoir la requérante, tout au long de la cérémonie, des discours sont prononcés par des personnalités du monde du football et des séquences vidéos de moments forts de football sont présentées. La requérante a également souligné, à juste titre, qu’elle investissait des sommes importantes pour l’organisation du concours ainsi que pour l’enregistrement (filmage) de la cérémonie en vue de sa diffusion à la télévision et sur Internet, laquelle vise à toucher une audience large. Ainsi, comme le soutient la requérante, un spectacle tel que celui que celle-ci offre, sur le marché, sous la marque contestée relève du divertissement.

57      L’argumentation de l’EUIPO, selon laquelle, dès lors que le concours « Ballon d’or » concerne le domaine du sport, car l’un des objectifs de l’évènement est de récompenser les performances footballistiques d’une personne en lui décernant le trophée du meilleur joueur de l’année, ce concours ne pourrait avoir comme but essentiel le divertissement, l’amusement ou la récréation d’individus, doit ainsi être rejetée.

58      En effet, le fait qu’un service ayant pour objectif de divertir le public soit fourni sous la forme d’un concours, y compris la remise d’un trophée afin de récompenser les performances sportives d’une personne, ne lui ôte pas sa nature essentiellement récréative et divertissante.

59      Partant, la chambre de recours a commis une erreur en considérant qu’une cérémonie de prix telle que celle du concours « Ballon d’or » ne relevait pas de la définition du divertissement.

60      Dans ces conditions, il convient d’accueillir le premier grief.

61      Dans le cadre du deuxième grief, portant sur les services de « montage de programmes de télévision », de « production de spectacles » et de « production de films », relevant de la classe 41, et dans le cadre du troisième grief, portant sur les services de « publication de livres, magazines revues et journaux »,  relevant de cette même classe, qu’il convient d’analyser conjointement, la requérante soutient que la chambre de recours a considéré à tort que ces services devaient nécessairement être fournis à des tiers, et non pour elle-même.

62      En effet, selon la requérante, le fait qu’elle investit et prend des risques financiers pour la réalisation de programmes télévisés portant la marque contestée suffit pour maintenir une protection au titre du droit des marques pour les services de « montage de programmes de télévision », de « production de spectacles » et de « production de films ». De même, le fait que la requérante a publié des livres et des magazines, comme l’aurait d’ailleurs admis la chambre de recours, aurait dû suffire pour maintenir la protection conférée par la marque de l’Union européenne pour les services de « publication de livres, magazines, revues et journaux », relevant également de la classe 41.

63      L’EUIPO et l’intervenante concluent au rejet des deuxième et troisième griefs.

64      Au point 52 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que les services concernés relevant de la classe 41 devaient être fournis à des tiers, qui devraient payer une rémunération pour ces services. Cela signifie, a précisé la chambre de recours, qu’un tiers doit solliciter la requérante afin que cette dernière fournisse les services concernés. Au point 53 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que, en l’espèce, si des livres ont été publiés sur les lauréats du trophée du concours « Ballon d’or », il s’agit de livres portant sur l’évènement lui-même et que rien dans le dossier ne permettait de conclure que la requérante avait publié des livres pour le compte de tiers. La chambre de recours a ajouté qu’il en allait de même pour les services de « montage de programmes radiophoniques et de télévision », la requérante ayant établi qu’elle montait certes un spectacle, mais qu’elle le montait pour elle-même et non pour des tiers.

65      À cet égard, il convient de relever que, conformément à la jurisprudence citée au point 24 ci-dessus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci soit utilisée pour créer ou conserver des débouchés sur le marché et qu’elle soit utilisée publiquement et vers l’extérieur. Dans ce sens, il a été relevé, dans la jurisprudence, que les services pour lesquels une protection au titre du droit des marques peut être sollicitée sont généralement proposés de manière indépendante aux tiers et fournis moyennant une contre-prestation économique [voir, en ce sens, arrêt du 30 septembre 2016, Alpex Pharma/EUIPO – Astex Pharmaceuticals (ASTEX), T‑355/15, non publié, EU:T:2016:591, point 37].

66      En l’espèce, en premier lieu, pour ce qui concerne les services de « montage de programmes de télévision », de « production de spectacles » et de « production de films », relevant de la classe 41, la jurisprudence a précisé que les services de montage et de production de programmes télévisés ainsi que les services de production de spectacles s’adressaient aux professionnels du secteur de l’audiovisuel [voir, dans le contexte de la définition du public pertinent dans le cadre d’une procédure d’opposition, arrêt du 24 mai 2011, Space Beach Club/OHMI – Flores Gómez (SpS space of sound), T‑144/10, non publié, EU:T:2011:243, point 34 ; voir également ordonnance du 19 juin 2014, Cartoon Network/OHMI, C‑670/13 P, non publiée, EU:C:2014:2024, point 39, et arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, EU:T:2005:156, point 29] et, s’agissant en particulier des services de production, qu’ils s’adressaient notamment aux auteurs ou aux réalisateurs de films [voir, dans le contexte de la comparaison des produits et des services effectuée dans le cadre d’une procédure d’opposition, arrêt du 2 octobre 2013, Cartoon Network/OHMI – Boomerang TV (BOOMERANG), T‑285/12, non publié, EU:T:2013:520, point 32].

67      Or, les éléments de preuve déposés par la requérante ne démontrent pas qu’elle a fourni ou proposé de tels services de montage et de production sur le marché sous la marque contestée.

68      En effet, le montage et la production du concours « Ballon d’or » par la requérante en vue de sa diffusion à la télévision et sur Internet n’impliquent pas en tant que tels que l’usage sérieux de la marque a été établi pour des services de « montage de programmes de télévision », de « production de spectacles » et de « production de films » fournis sur le marché desdits services. Contrairement à ce que requiert la jurisprudence visée au point 24 ci-dessus, la marque contestée n’a pas été proposée à des tiers sur ce marché de services, afin de créer des débouchés dans le cadre d’une utilisation publique et extérieure de ladite marque. Comme l’a relevé l’EUIPO, le montage et la production du concours « Ballon d’or » constituent plutôt des actes d’exploitation du service fourni par la requérante, qui consiste en l’organisation dudit concours.

69      Il convient, à cet égard, de rejeter l’argumentation de la requérante selon laquelle la chambre de recours aurait considéré à tort qu’elle produisait la cérémonie de remise de prix du concours « Ballon d’or » pour elle‑même, car cette appréciation serait en contradiction, notamment, avec la circonstance que ladite cérémonie est rendue accessible au grand public à la télévision et sur Internet.

70      En effet, cette argumentation procède d’une interprétation erronée de la décision attaquée. En indiquant que la requérante monte un spectacle pour elle-même, la chambre de recours n’a pas considéré que ce spectacle était destiné à une diffusion interne à l’entreprise de la requérante, mais que la requérante effectuait le montage de son spectacle elle-même et n’offrait pas un service de montage de spectacles sous la marque contestée pour le compte de tiers.

71      Doivent également être rejetées l’argumentation de la requérante selon laquelle la chambre de recours aurait ajouté une exigence supplémentaire à la définition des services concernés relevant de la classe 41, en indiquant que les tiers doivent payer une rémunération pour ces services, de même que l’affirmation de la requérante selon laquelle, en tout état de cause, même si une telle exigence existait, on la rencontrerait en l’espèce, dès lors que les diffuseurs de programmes télévisés achètent chaque année à la requérante les droits de diffusion relatifs au concours « Ballon d’or ».

72      En effet, l’affirmation de la chambre de recours en cause, selon laquelle les services sont fournis à des tiers qui payent une rémunération, visait avant tout à expliquer qu’un tiers devait solliciter la titulaire de la marque en tant que prestataire de ces services, ce qui est conforme à la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus selon laquelle la marque contestée doit faire l’objet d’un usage public et extérieur visant à créer des débouchés sur le marché. En tout état de cause, comme l’a relevé l’EUIPO, même s’il devait être considéré que la chambre de recours avait ajouté une exigence de rémunération en contradiction avec la jurisprudence, l’argumentation de la requérante n’en demeurerait pas moins inopérante, dès lors que, en l’espèce, elle n’a pas établi que la marque contestée était utilisée pour des services de montage ou de production fournis à des tiers, qu’ils aient ou non été fournis moyennant rémunération.

73      Au vu des considérations qui précèdent, il convient de conclure que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que l’usage sérieux de la marque contestée n’était pas établi pour les services de « montage de programmes de télévision », de « production de spectacles » et de « production de films », relevant de la classe 41.

74      En second lieu, s’agissant des services de « publication de livres, magazines, revues et journaux », relevant de la classe 41, il convient de relever que, comme l’EUIPO l’a indiqué, une marque utilisée pour ces services ne désigne pas le contenu de la publication, mais la production et la promotion de tout livre ou de tout contenu en vue de créer ou de conserver des débouchés sur le marché desdits services, conformément à la jurisprudence citée au point 24 ci-dessus. Dans ce cadre, les destinataires de ces services sont les auteurs ou les agents qui souhaitent que leur œuvre soit publiée.

75      Or, la requérante s’est fondée devant la chambre de recours sur le fait qu’elle était l’auteur de 60 ans de Ballon d’or et de 50 ans de Ballon d’or et qu’elle avait collaboré avec Les Éditions Solar pour la publication de ces livres (pièces nos 5.1 à 5.4). Elle a également produit des éditions spéciales de la revue France Football consacrée au concours « Ballon d’or » (pièces nos 3.6.1 à 3.6.6). En revanche, elle n’a fourni aucun élément démontrant que des services de publication avaient été fournis ou proposés par elle-même à des tiers sur le marché.

76      Ainsi, bien que ces éléments de preuve aient pu être suffisants pour démontrer l’usage de la marque pour les « livres », « magazines » et « produits de l’imprimerie », relevant de la classe 16, comme l’a décidé la chambre de recours, cette dernière a pu considérer à bon droit que ces mêmes éléments ne permettaient pas de démontrer que la requérante proposait des services de « publication de livres, magazines, revues et journaux » sous la marque contestée.

77      À cet égard, il y a lieu de relever que, conformément à la jurisprudence citée au point 36 ci-dessus, la liste des produits et des services pour lesquels une marque est enregistrée et dont la preuve de l’usage sérieux a été demandée doit être interprétée de la manière la plus cohérente qui soit, compte tenu de sa signification littérale et de sa construction grammaticale, mais également, en cas de risque de résultat absurde, de son contexte et de la volonté effective du titulaire de cette marque quant à sa portée. Or, comme l’a relevé l’EUIPO, s’il était fait droit à l’argumentation de la requérante, la classification de Nice n’établirait pas de distinction entre les services de publication de livres, compris dans la classe 41, et les livres ou magazines, compris dans la classe 16.

78      Au vu des considérations qui précèdent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que l’usage sérieux de la marque contestée n’était pas établi pour les services de « publication de livres, magazines, revues et journaux », relevant de la classe 41.

79      Partant, il convient de rejeter les deuxième et troisième griefs de la seconde branche du moyen unique.

80      Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu d’accueillir le premier grief de la seconde branche du moyen unique et, partant, d’annuler la décision attaquée en ce qu’elle a confirmé la décision de la division d’annulation déclarant la déchéance de la marque contestée s’agissant des services suivants, relevant de la classe 41 : « divertissement », « divertissement télévisé » et « organisation et concours (divertissement) ».

81      Le recours est rejeté pour le surplus.

 Sur les dépens

82      Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

83      En l’espèce, la requérante ayant succombé en ses conclusions s’agissant des services de « diffusion de programmes de télévision », d’« émissions télévisées », de « transmission par satellite », de « télématique » et de « télévision par câbles », relevant de la classe 38, et des services de « publication de livres, magazines revues et journaux », de « montage de programmes de télévision », de « production de spectacles » et de « production de films », relevant de la classe 41, et l’EUIPO ainsi que l’intervenante ayant succombé en leurs conclusions s’agissant des services de « divertissement », de « divertissement télévisé » et d’« organisation et concours (divertissement) », relevant de la classe 41, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

84      Par ailleurs, dans la mesure où la requérante a conclu à ce que l’EUIPO et l’intervenante soient également condamnés aux dépens afférents à la procédure devant la chambre de recours, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables.

85      À cet égard, il appartiendra à la chambre de recours de statuer, à la lumière du présent arrêt, sur les frais afférents à cette procédure [voir arrêt du 4 octobre 2017, Gappol Marzena Porczyńska/EUIPO – Gap (ITM) (GAPPOL), T‑411/15, non publié, EU:T:2017:689, point 209 et jurisprudence citée].

86      En effet, dès lors que la chambre de recours s’est limitée, dans la décision attaquée, à analyser les éléments de preuve en ce qui concerne le critère relatif à la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure pour les services liés au divertissement relevant de la classe 41 et qu’elle a commis une erreur dans ce cadre en considérant qu’une cérémonie de prix ne relevait pas de la définition du divertissement, comme cela a été constaté par le Tribunal en réponse au premier grief de la seconde branche du moyen unique, il appartiendra à la chambre de recours d’apprécier les éléments de preuve en ce qui concerne les critères relatifs au lieu, à la durée et à l’importance de l’usage qui a été fait de la marque antérieure en tirant les conséquences du présent arrêt.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

2)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 7 juin 2021 (affaire R 1073/2020-4) est annulée en tant qu’elle a confirmé la décision de la division d’annulation déclarant la déchéance de la marque s’agissant des services de « divertissement », de « divertissement télévisé » et d’« organisation et concours (divertissement) », compris dans la classe 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

De Baere

Steinfatt

Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 juillet 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.