Language of document : ECLI:EU:T:2024:189

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

20 mars 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale CEFA Certified European Financial Analyst – Marque de l’Union européenne verbale antérieure CFA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Coexistence des marques »

Dans l’affaire T‑213/23,

European Federation of Financial Analysts’ Societies (EFFAS), établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Me E. Manresa Medina, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

CFA Institute, établi à Charlottesville, Virginie (États-Unis), représenté par Me W. May, avocat,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes A. Marcoulli, présidente, V. Tomljenović (rapporteure) et M. R. Norkus, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, European Federation of Financial Analysts’ Societies (EFFAS), demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 21 février 2023 (affaire R 1418/2022-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 14 décembre 2015, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal CEFA Certified European Financial Analyst en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

3        La marque demandée désignait les produits et les services relevant des classes 9 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Publications électroniques éducatives dans le domaine de l’analyse financière » ;

–        classe 41 : « Services d’éducation et de formation ; services de formation liés à la finance, à l’assurance, aux services bancaires, à la comptabilité, au droit, à la gestion ; coaching [formation] ; services d’éducation en formation commerciale ; cours (de formation) liés à la finance, à l’assurance, aux services bancaires, à la comptabilité, au droit, à la gestion ; conduite de séminaires de formation et d’éducation liés à la finance, à l’assurance, aux services bancaires, à la comptabilité, au droit, à la gestion ; information et conseils en matière de carrière professionnelle [conseils en formation et éducation] ; services de conseil en matière d’éducation ; examens pédagogiques ; services d’examens universitaires, organisation de tests mesurant le rendement ; tests éducatifs ; services de présentation audiovisuelle à des fins éducatives ; organisation d’expositions, conférences et symposiums éducatifs ; ateliers à des fins éducatives ; publication de textes éducatifs, contenus, contenus éducatifs ; tous les services précités se rapportant au domaine de l’analyse financière ».

4        Compte tenu du caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001], la demande a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 105/2017, du 6 juin 2017.

5        Le 6 septembre 2017, l’intervenante, CFA Institute, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée notamment sur la marque de l’Union européenne verbale CFA désignant les produits et les services relevant des classes 16, 41 et 42 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 16 : « Publications imprimées dans le domaine de l’analyse financière et destinées à la promotion des intérêts des analystes financiers » ;

–        classe 41 : « Services éducatifs, à savoir organisation, traitement et mise à disposition de cours, réunions de discussion, séminaires et conférences dans le domaine de l’analyse financière et diffusion de matériel de cours y afférent » ;

–        classe 42 : « Services associatifs, plus particulièrement destinés à la promotion des intérêts des analystes financiers ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement 2017/1001].

8        Par décision du 21 mars 2019, la division d’opposition a accueilli l’opposition dans son intégralité en retenant qu’il y avait un risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure visée au point 6 ci-dessus.

9        Le 16 mai 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 31 mars 2020, la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours de la requérante sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, en confirmant qu’il existait un risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure.

11      Le 13 juin 2020, la requérante a introduit un recours en annulation devant le Tribunal à l’encontre de la décision de la cinquième chambre de recours mentionnée au point 10 ci-dessus.

12      Par arrêt du 21 décembre 2021, EFFAS/EUIPO – CFA Institute (CEFA Certified European Financial Analyst) (T‑369/20, non publié, EU:T:2021:921), le Tribunal a annulé la décision de la cinquième chambre de recours et a fait droit au recours en raison d’erreurs de droit tirées de ce que la chambre de recours a, d’une part, erronément considéré que le niveau d’attention du grand public était moyen dans le cadre de l’examen du risque de confusion et, d’autre part, erronément omis d’apprécier l’existence d’une série de marques invoquées par l’intervenante pour établir un risque d’association.

13      Par décision du 30 mars 2022, la première chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition mentionnée au point 8 ci-dessus et a renvoyé l’affaire à la division d’opposition afin que cette dernière se prononce sur le caractère distinctif accru de la marque antérieure et sur l’existence d’une famille de marques.

14      Par décision du 9 juin 2022, la division d’opposition a accueilli l’opposition en concluant au risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure et en considérant, également, que la marque antérieure jouissait d’un caractère distinctif accru acquis par l’usage. Elle a précisé que, dans ces conditions, il n’était pas nécessaire de se prononcer sur l’existence d’une famille de marques.

15      Le 1er août 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition visée au point 14 ci-dessus.

16      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours de la requérante sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 en considérant qu’il existait un risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure. En substance, compte tenu du caractère identique ou similaire des produits et des services en cause, du degré élevé de similitude visuelle, du faible degré de similitude phonétique et de l’absence de similarité sur le plan conceptuel entre les marques en cause ainsi que du caractère distinctif accru de la marque antérieure, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion, y compris d’un risque d’association, pour la partie anglophone du public pertinent dans le secteur de l’analyse financière en Allemagne et en Espagne faisant preuve d’un niveau d’attention élevé pour les produits et les services en cause, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

 Conclusions des parties 

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

18      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de convocation à une audience.

19      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit 

 Sur le droit matériel applicable

20      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 14 décembre 2015, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

21      Par suite, en l’espèce, il convient d’entendre les références faites par la requérante dans l’argumentation soulevée à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, d’une teneur identique.

 Sur le fond

22      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. En substance, elle conteste, d’une part, la similitude des signes en conflit en se prévalant de différences visuelles, phonétiques et conceptuelles et, d’autre part, elle conteste l’appréciation globale du risque de confusion en soulignant que la chambre de recours n’a pas apprécié la coexistence paisible dans l’Union européenne entre la marque demandée et la marque antérieure, et ce alors que l’EUIPO avait constaté le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée.

23      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

24      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

25      Enfin, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

26      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner les différents griefs de la requérante.

 Sur le territoire pertinent, le public pertinent et son niveau d’attention

27      S’agissant du public pertinent, la chambre de recours a considéré que ce dernier était composé du grand public, intéressé par l’éducation et la formation à l’analyse financière, et du public professionnel possédant des connaissances et une expertise spécifique dans le domaine de la finance.

28      S’agissant du niveau d’attention du public pertinent, la chambre de recours a indiqué, en se conformant à l’arrêt du 21 décembre 2021, EFFAS/EUIPO – CFA Institute (CEFA Certified European Financial Analyst) (T‑369/20, non publié, EU:T:2021:921), que celui-ci était élevé vis-à-vis de tous les produits et les services en cause. À cet égard, l’affirmation de la requérante selon laquelle, pour les services de la classe 41, le niveau d’attention du grand public serait élevé est sans influence sur l’appréciation du niveau d’attention du public pertinent, dès lors qu’elle ne remet pas en cause l’appréciation de la chambre de recours, celle-ci ayant déjà retenu que le niveau d’attention du grand public pour les services en cause était élevé.

29      S’agissant du territoire pertinent, la chambre de recours a retenu le territoire de l’Union européenne. Néanmoins, étant donné que la marque demandée contenait des termes anglais, la chambre de recours a choisi de concentrer son examen sur la partie anglophone du public pertinent, qui comprendrait l’expression anglaise « Certified European Financial Analyst ». En outre, compte tenu de la conclusion tirée par la division d’opposition et non contestée par la requérante, sur le caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure en Allemagne et en Espagne, la chambre de recours a décidé de fonder son appréciation sur la partie anglophone du public pertinent dans le secteur de l’analyse financière en Allemagne et en Espagne. À cet égard, la chambre de recours a indiqué que l’usage de l’anglais était courant dans le secteur financier, en se fondant sur l’arrêt du 26 septembre 2012, IG Communications/OHMI – Citigroup et Citibank (CITIGATE) (T‑301/09, non publié, EU:T:2012:473, point 41). Dans ces conditions, la partie du public pertinent dans le secteur de l’analyse financière en Allemagne et en Espagne, familiarisée avec le jargon du secteur financier et l’anglais, aurait compris les termes anglais composant la marque demandée.

30      Aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause ces appréciations de la chambre de recours, lesquelles ne sont, au demeurant, pas contestées par la requérante.

 Sur la comparaison des produits et des services en cause

31      La chambre de recours a considéré, en substance, que les produits et les services désignés par les marques en conflit étaient identiques ou à tout le moins similaires. Aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause cette appréciation, au demeurant non contestée par la requérante.

 Sur la comparaison des signes

32      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

33      En l’espèce, les signes verbaux à comparer sont, d’une part, la marque demandée, composée des éléments « CEFA » et « Certified European Financial Analyst » et, d’autre part, la marque antérieure, composée de l’élément « CFA ».

34      Avant toute chose, s’agissant des éléments distinctifs des signes en conflit, il y a lieu de relever que la chambre de recours a considéré, d’une part, que la marque antérieure était composée uniquement de la séquence de lettres majuscules « C », « F », « A », qui était dépourvue de sens. D’autre part, s’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a exposé que la séquence de lettres majuscules « C », « E », « F » et « A » serait perçue comme étant l’acronyme des termes anglais « Certified European Financial Analyst » et que cet élément était le plus distinctif de ladite marque. Aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause ces appréciations, au demeurant non contestées par la requérante.

–       Sur la comparaison visuelle

35      La chambre de recours a considéré, au point 45 de la décision attaquée, que les marques en conflit présentaient un degré de similitude élevé sur le plan visuel.

36      La requérante soutient que les marques en conflit sont différentes sur le plan visuel dès lors que, d’une part, la marque demandée comporte plus de mots et de lettres que la marque antérieure et, d’autre part, la légère coïncidence de certaines lettres entre les marques en conflit n’engendre pas une confusion sur le marché.

37      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

38      Premièrement, la chambre de recours a considéré que l’élément « CEFA » serait clairement perçu comme un acronyme et que l’élément « CFA » le serait très probablement. Aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause ces appréciations, au demeurant non contestées par la requérante.

39      Deuxièmement, il est constant que l’unique élément « CFA » de la marque antérieure est inclus entièrement dans l’élément « CEFA », le plus distinctif de la marque demandée. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a correctement relevé, les éléments « CFA » et « CEFA » partagent dans leur composition trois lettres majuscules communes, à savoir « C », « F » et « A » et diffèrent par la seule présence de la lettre majuscule supplémentaire « E », qui n’a pas d’équivalent dans la marque antérieure. À cet égard, il y a lieu de constater, d’une part, que le début et la fin des acronymes en cause sont identiques. D’autre part, les lettres majuscules « C », « F » et « A » appartenant aux séquences de lettres des signes en conflit sont placées dans le même ordre, la lettre majuscule « E » dans la marque demandée étant seulement intercalée entre la première et les deux dernières lettres de la marque antérieure. Ainsi, la lettre majuscule « E » n’a, quant à elle, que pour effet d’exclure l’identité entre la marque antérieure et l’élément « CEFA » de la marque demandée et ne compense pas la similitude visuelle élevée qui ressort de l’identité du début et de la fin des signes en conflit [voir, en ce sens, arrêts du 9 décembre 2014, DTL Corporación/OHMI – Vallejo Rosell (Generia), T‑176/13, non publié, EU:T:2014:1028, point 82, et du 2 février 2017, Mengozzi/EUIPO – Consorzio per la tutela dell’olio extravergine di oliva toscano (TOSCORO), T‑510/15, EU:T:2017:54, point 37]. Partant, les groupes de lettres majuscules « CFA » et « CEFA » possèdent, contrairement à ce qu’avance la requérante, une similitude visuelle élevée par la présence et l’ordre des lettres concernées.

40      Troisièmement, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a correctement considéré que la différence résultant des éléments verbaux supplémentaires, composant la marque demandée, n’aurait qu’une incidence très limitée dans l’impression visuelle globale de la marque demandée et partant, sur la comparaison visuelle des signes en conflit. En effet, ainsi qu’il ressort du point 34 ci-dessus, l’élément « CEFA » de la marque demandée sera perçu comme l’élément le plus distinctif et comme l’acronyme de l’expression anglaise « Certified European Financial Analyst ». Il pourra ainsi être mémorisé de manière autonome. Dans ces conditions, la présence des éléments « Certified European Financial Analyst » n’est pas de nature à annihiler la similitude visuelle élevée résultant des éléments « CEFA » et « CFA » [voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2019, IAK - Forum International/EUIPO – Schwalb (IAK), T‑497/18, non publié, EU:T:2019:689, point 78].

41      Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient un degré élevé de similitude visuelle.

–       Sur la comparaison phonétique

42      Au point 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient similaires à un faible degré sur le plan phonétique.

43      Si la requérante admet qu’il existe une certaine similitude phonétique entre les signes en conflit, elle allègue que l’élément « CEFA » de la marque demandée sera « toujours » prononcé syllabe par syllabe (soit, en l’espèce, en deux syllabes), tandis que l’élément « CFA » de la marque antérieure, qui est une combinaison de lettres ne formant pas un mot lisible, sera épelé lettre par lettre. À ce titre, elle s’appuie sur des exemples d’acronymes célèbres illustrant cette différence de prononciation. En outre, la requérante soutient, en substance, que, compte tenu de la présence de la lettre majuscule « E » dans la marque demandée, les signes en conflit ont un rythme et une prononciation qui sont différents et que, dès lors, ils diffèrent significativement sur le plan phonétique.

44      L’EUIPO et l’intervenante remettent en cause le bien-fondé de ces arguments.

45      Premièrement, d’une part, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que seul l’élément « CEFA » de la marque demandée serait prononcé par le public pertinent et non les éléments « Certified European Financial Analyst ». En effet, le consommateur moyen aura tendance à omettre certains éléments verbaux d’une marque comprenant plusieurs éléments afin de la rendre plus facile à prononcer, notamment, pour des raisons d’économie de langage, si ces éléments sont aisément séparables [voir ordonnance du 21 décembre 2022, Suicha/EUIPO – Michael Kors (Switzerland) International (MK MARKTOMI MARKTOMI), T‑264/22, non publiée, EU:T:2022:861, points 56 et 57 et jurisprudence citée]. En l’espèce, si la marque demandée contient également les éléments « Certified European Financial Analyst », il n’est pas exclu, compte tenu de la longueur desdits éléments, de leur caractère séparable ainsi que du fait que l’élément « CEFA » correspond à l’acronyme des termes « Certified European Financial Analyst », que le consommateur moyen se référera à la marque demandée uniquement par l’élément « CEFA », sans prononcer les autres éléments verbaux de la marque demandée.

46      D’autre part, s’agissant de la prononciation de l’élément « CEFA », contenu dans la marque demandée, il pourra soit être épelé lettre par lettre, à savoir « c », « e », « f », « a », soit, comme le fait valoir la requérante, être prononcé en un seul mot composé de deux syllabes, à savoir « ce » et « fa ». Néanmoins, contrairement à ce que soutient la requérante, les consommateurs ne prononceront pas toujours l’élément « CEFA » en un mot de deux syllabes. Il ne s’agit que de l’une des possibilités de prononciation possible, ainsi que le fait valoir, à juste titre, l’EUIPO.

47      Les arguments de la requérante relatifs à la prononciation des acronymes tels que SEAT, ASICS, IKEA, FIFA, FIAT, UEFA ou UNICEF ne permettent pas de remettre en cause les appréciations contenues au point 46 ci-dessus. En effet, s’il est d’usage de prononcer certaines marques consistant en un acronyme, comme cela pourrait être le cas des marques SEAT, IKEA, FIFA, FIAT, il ne s’agit pas pour autant d’une règle absolue applicable aux marques consistant en des acronymes. Au contraire, il y a lieu de relever, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, que certains acronymes connus, tels que HIV, UPS, WHO, USA, EU, ASAP ou encore WIPO, peuvent être prononcés par les consommateurs lettre par lettre alors qu’ils seraient lisibles comme un mot. Dans ces conditions, même si une partie du public pourrait prononcer l’élément « CEFA » en deux syllabes, il ne peut être exclu que ledit élément, perçu comme un acronyme, soit épelé lettre par lettre par une partie non négligeable du public pertinent.

48      Deuxièmement, s’agissant de la prononciation de l’élément « CFA », la chambre de recours a considéré, à juste titre, que la marque antérieure serait prononcée lettre par lettre, ce qui n’est pas contesté par la requérante.

49      Troisièmement, s’agissant de la comparaison phonétique en tant que telle, l’allégation de la requérante selon laquelle la lettre « e » modifie le rythme et différencie suffisamment les signes en conflit sur le plan phonétique, doit être écartée. En effet, lorsque les lettres « c », « e », « f » et « a » sont prononcées individuellement, il n’est pas exclu que la voyelle « e », prononcée à la suite de la consonne « c », soit quasiment imperceptible. Dans ce cas, la séquence de lettres « c », « e », « f », « a », présente dans la marque demandée, est phonétiquement similaire à la séquence de lettres « c », « f » et « a », constituant la marque antérieure. Ainsi, pour la partie du public pertinent qui prononce l’élément « CEFA » lettre par lettre, compte tenu du fait que trois des sons utilisés dans les deux marques sont identiques (ceux correspondant aux lettres « c », « f » et « a ») et que les différences phonétiques n’ont pas une incidence significative sur leur prononciation, le degré de similitude phonétique est élevé. Néanmoins, pour la partie du public qui prononce l’élément « CEFA » comme s’il s’agissait d’un mot en deux syllabes, la similitude phonétique est moindre.

50      Dans ces conditions, contrairement à ce qu’a conclu la chambre de recours, au point 47 de la décision attaquée, il y a lieu de considérer que le degré de similitude phonétique est, en ce qui concerne une partie du public pertinent, élevé.

–       Sur la comparaison conceptuelle

51      La chambre de recours a considéré, au point 49 de la décision attaquée, que les marques en conflit n’étaient pas similaires sur le plan conceptuel.

52      La requérante fait valoir que dès lors que le niveau d’attention du public pertinent est élevé, il connaîtra la signification de l’acronyme « CFA » comme étant la contraction des termes anglais « Chartered Financial Analyst ».

53      L’EUIPO et l’intervenante remettent en cause le bien-fondé de ces arguments.

54      Premièrement, s’agissant de la signification de la marque demandée, il est constant entre les parties que l’élément « Certified European Financial Analyst » véhicule un concept clair se rapportant à un prestataire de certains services, un expert qualifié en matière financière.

55      Deuxièmement, s’agissant de la marque antérieure, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, que la séquence de lettres majuscules « C », « F » et « A » n’a aucun contenu sémantique, de sorte que ladite marque est dépourvue de signification.

56      Les arguments de la requérante ne permettent pas de remettre en cause ce constat. D’une part, l’argument de la requérante selon lequel la marque antérieure CFA a une signification claire pour le public pertinent, doté d’un niveau d’attention élevé, lequel sait que la séquence de lettres majuscules « C », « F » et « A » est l’acronyme correspondant à l’expression anglaise « Chartered Financial Analyst », doit être écarté. En effet, selon une jurisprudence constante, la comparaison doit être effectuée entre les signes tels qu’ils ont été enregistrés ou tels qu’ils apparaissent dans la demande de marque, qu’ils soient utilisés seuls ou en combinaison avec d’autres marques ou mentions [voir ordonnance du 18 octobre 2016, Laboratoire de la mer/EUIPO – Boehringer Ingelheim Pharma (RESPIMER), T‑109/16, non publiée, EU:T:2016:627, point 46 et jurisprudence citée]. À cet égard, la marque antérieure étant enregistrée seulement pour l’élément « CFA », l’appréciation de la comparaison conceptuelle ne peut se réaliser qu’au regard dudit élément verbal. Pour les mêmes motifs, l’allégation de la requérante selon laquelle l’intervenante s’est prévalue du fait que l’élément « CFA » correspond à l’acronyme de l’expression anglaise « Chartered Financial Analyst » n’est pas pertinente aux fins de l’analyse conceptuelle de la marque antérieure.

57      D’autre part, les références, aux points 26 et 27 de la requête, à deux arrêts de la Cour et à une décision de l’EUIPO sont relatives à l’appréciation globale du risque de confusion et ne sont pas pertinentes aux fins de l’appréciation de la similitude conceptuelle des marques en conflit.

58      Troisièmement, lorsque l’une des marques en conflit présente une signification aux yeux du public pertinent et que l’autre marque en est dépourvue, il doit être constaté que lesdites marques présentent des différences sur le plan conceptuel [voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2017, RP Technik/EUIPO – Tecnomarmi (RP ROYAL PALLADIUM), T‑768/15, non publié, EU:T:2017:630, points 88 et 89]. Dans ces conditions, c’est à juste titre que de la chambre de recours a constaté que les signes en conflit n’étaient pas similaires sur le plan conceptuel.

59      Il résulte de tout ce qui précède que les marques en conflit, considérées dans leur globalité, présentent un degré élevé de similitude visuelle et de similitude phonétique et ne sont pas similaires sur le plan conceptuel.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

60      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast‑Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

61      Au nombre des facteurs pertinents mentionnés au point 60 ci-dessus, figure le caractère distinctif de la marque antérieure. En effet, comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de ladite marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24, et du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18).

62      De plus, le risque de confusion varie en fonction du niveau d’attention dont fait preuve le public pertinent. Ainsi, selon la jurisprudence, si le public pertinent n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe entre les différentes marques, mais doit se fier à « l’image imparfaite qu’il a gardée en mémoire », un niveau d’attention élevé du public pertinent peut amener à conclure qu’il ne confondra pas les marques en conflit malgré l’absence de comparaison directe entre les différentes marques [voir arrêt du 13 juillet 2017, Migros‑Genossenschafts-Bund/EUIPO – Luigi Lavazza (CReMESPRESSO), T‑189/16, non publié, EU:T:2017:488, point 86 et jurisprudence citée].

63      Enfin, peut éventuellement être prise en compte la coexistence de deux marques sur un marché, dès lors qu’il est admis en jurisprudence qu’elle peut, conjointement à d’autres éléments, aboutir à amoindrir le risque de confusion entre ces marques dans l’esprit du public pertinent. L’absence de risque de confusion peut ainsi être déduite du caractère paisible de la coexistence des marques en conflit sur le marché en cause (voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, EU:C:2009:503, point 82). Néanmoins, l’éventualité qu’une coexistence des marques sur le marché puisse amoindrir le risque de confusion constaté ne saurait aboutir que si, à tout le moins, au cours de la procédure devant l’EUIPO, la partie qui se prévaut de la coexistence a dûment démontré, ne fût-ce qu’au moyen d’un faisceau d’indices concordants, d’une part, que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent et, d’autre part, que la coexistence en question reposait sur un usage effectif suffisamment long pour qu’elle pût influer sur la perception du consommateur pertinent. De surcroît, s’agissant de la portée géographique d’une coexistence, lorsque l’opposition est fondée sur une marque de l’Union européenne antérieure et la coexistence des marques en conflit est invoquée à l’appui de l’absence de risque de confusion, il incombe à la partie invoquant cette coexistence de la prouver sur l’ensemble du territoire de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 27 janvier 2021, Turk Hava Yollari/EUIPO – Sky (skylife), T‑382/19, non publié, EU:T:2021:45, point 46 et jurisprudence citée].

64      En l’espèce, la chambre de recours a pris en considération, au point 59 de la décision attaquée, le fait que les produits et les services étaient identiques ou à tout le moins similaires, que la marque antérieure possédait un caractère distinctif accru et que les marques en conflit présentaient un degré élevé de similitude visuelle, un faible degré de similitude phonétique et une absence de similarité sur le plan conceptuel, pour conclure, au point 63 de la décision attaquée, à un risque de confusion, y compris un risque d’association, entre les marques en conflit pour le public pertinent, même en prenant en considération le degré d’attention élevé de ce public, et ce pour les produits et les services concernés.

65      La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas correctement procédé à une appréciation globale du risque de confusion, sur la base de l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit, et qu’elle a erronément constaté l’existence d’un risque de confusion. Premièrement, la requérante fait valoir, en substance, que les similitudes entre les marques en conflit sont insuffisantes pour conclure à l’existence d’un risque de confusion. Deuxièmement, elle fait valoir que la chambre de recours a omis d’apprécier la coexistence sur le marché des marques en conflit, aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, alors que ce facteur est d’autant plus pertinent que l’EUIPO a reconnu que la marque demandée disposait d’un caractère distinctif acquis par l’usage. En particulier, la requérante allègue que la chambre de recours a omis d’apprécier les éléments de preuve qu’elle avait apportés, en temps utile, aux fins de démontrer la coexistence des marques en conflit sur le marché. À cet égard, elle soutient, d’une part, que les marques coexistent dans les registres de marques depuis plus de 28 ans et, d’autre part, qu’elles coexistent sur le marché de l’Union depuis plusieurs années, comme en attestent des documents obtenus auprès de l’autorité des services financiers maltais et de l’autorité de régulation des comportements financiers du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.

66      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante. Ils font valoir, en substance, que la conclusion de la chambre de recours relative à l’existence d’un risque de confusion n’est pas entachée d’une erreur d’appréciation. En outre, l’EUIPO fait valoir que, dans la mesure où la coexistence des marques en conflit n’a pas été démontrée avant la date de dépôt de la marque demandée, la chambre de recours n’avait pas à se prononcer explicitement sur cet argument dans la décision attaquée et qu’il y a lieu de considérer qu’elle l’avait nécessairement implicitement rejeté. Il ajoute que, conformément à la jurisprudence, la chambre de recours n’est pas tenue de prendre position sur chacun des arguments ou éléments de preuve invoqués, mais uniquement d’examiner ceux qui revêtent une importance décisive pour l’issue de l’espèce. L’intervenante, quant à elle, allègue que la requérante ne fait qu’affirmer l’existence de cette coexistence sans en fournir la preuve sur l’ensemble du territoire de l’Union.

67      En premier lieu, ainsi qu’il a été constaté au point 59 ci-dessus, les marques en conflit, considérées dans leur globalité, présentent un degré élevé de similitude visuelle et de similitude phonétique et ne sont pas similaires sur le plan conceptuel. En outre, ainsi qu’il a été constaté aux points 28 et 31 ci-dessus, le niveau d’attention du public pertinent est élevé et les produits et les services en cause sont identiques ou à tout le moins similaires. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause le constat de la chambre de recours selon lequel la marque antérieure a un caractère distinctif accru en raison de son usage intensif en Allemagne et en Espagne pour tous les produits et les services visés au point 6, lequel, au demeurant, n’est pas contesté par la requérante.

68      Partant, contrairement à ce que soutient la requérante, compte tenu de l’identité ou de la similitude des produits en cause, des similitudes visuelle et phonétique des signes en conflit, du niveau d’attention élevé du public pertinent ainsi que du caractère distinctif accru de la marque antérieure, un risque de confusion entre les marques en conflit ne peut pas d’emblée être exclu. Toutefois, dès lors que la requérante a également invoqué la coexistence paisible des marques en conflit, telle qu’évoquée au point 65 ci-dessus, une telle coexistence paisible constituait, ainsi qu’il ressort des points 60 à 63 ci-dessus, un facteur potentiellement pertinent pour l’appréciation du risque de confusion.

69      En deuxième lieu, dans la mesure où la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir omis d’examiner la coexistence sur le marché des marques en conflit, il y a lieu de constater, premièrement, qu’elle s’était prévalue d’une coexistence paisible des marques en conflit dans le cadre de son mémoire déposé devant la chambre de recours le 6 octobre 2022. Elle a notamment fait valoir que les marques en conflit coexistaient sur le marché depuis plus de 28 années dans différents pays de l’Union. De plus, il ressort des pièces du dossier que la requérante a invoqué la coexistence des marques en conflit tout au long de la procédure administrative devant l’EUIPO, à savoir tant devant la division d’opposition en 2017 et la cinquième chambre de recours en 2019 et qu’elle avait soumis des éléments de preuve tendant à démontrer une telle coexistence. À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence, il découle de la continuité fonctionnelle entre les différentes instances de l’EUIPO que, dans le champ d’application de l’article 76 du règlement no 207/2009 [devenu article 95 du règlement 2017/1001], la chambre de recours est tenue de fonder sa décision au regard de tous les éléments de fait et de droit présents dans la décision attaquée devant elle et au regard de ceux introduits par la ou les parties, soit dans la procédure devant l’unité ayant statué en première instance, soit, sous réserve des éléments qui n’ont pas été apportés en temps utile, dans la procédure de recours [voir, en ce sens, arrêt du 7 décembre 2017, Coca-Cola/EUIPO – Mitico (Master), T‑61/16, EU:T:2017:877, point 115 et jurisprudence citée].

70      Il en découle que la chambre de recours était tenue d’examiner l’argumentation de la requérante relative à la coexistence paisible des marques en conflit, en tant que facteur à prendre en considération dans l’appréciation du risque de confusion (voir, en ce sens, arrêt du 21 juillet 2016, Ogrodnik/EUIPO – Aviário Tropical (Tropical), T‑804/14, non publié, EU:T:2016:431, points 174 et 175), et ainsi d’apprécier si la requérante était parvenue à établir que les conditions pour la prise en compte d’une coexistence paisible, exposées au point 63 ci-dessus, étaient satisfaites en l’espèce.

71      Deuxièmement, il y a lieu de constater que la chambre de recours n’a pas examiné la question de la coexistence des marques en conflit sur le marché en cause, ni répondu aux arguments de la requérante dans la décision attaquée. À cet égard, dans la mesure où l’EUIPO et l’intervenante font valoir que l’argumentation de la requérante relative à la coexistence est infondée, au motif, pour le premier, qu’il n’a pas été démontré que les marques en conflit coexistaient effectivement avant la date de dépôt de la marque demandée et, pour la seconde, qu’elle n’a pas démontré la coexistence sur l’ensemble du territoire de l’Union, il y a lieu de relever qu’aucun élément dans la décision attaquée ne permet de comprendre que la chambre de recours aurait examiné l’argumentation et les éléments de preuve produits par la requérante, ni, encore moins, qu’elle les aurait écartés pour ces motifs.

72      Par ailleurs, l’argument de l’EUIPO tiré de ce qu’il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements invoqués par les parties doit être écarté. En effet, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée au point 63 ci-dessus, la coexistence paisible de deux marques sur un marché déterminé est un facteur pertinent aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, étant donné qu’il ne saurait être exclu que celle-ci puisse éventuellement contribuer, conjointement à d’autres éléments, à amoindrir le risque de confusion entre ces marques dans l’esprit du public pertinent.

73      Dès lors, contrairement à ce que soutient l’EUIPO, il ne saurait être considéré que la chambre de recours a implicitement, mais nécessairement rejeté l’argumentation de la requérante tirée de la coexistence des marques en conflit sur le marché.

74      Partant, la chambre de recours a entaché sa décision d’une erreur de droit en omettant d’apprécier l’argumentation de la requérante relative à la coexistence des marques en conflit et d’examiner les preuves invoquées à l’appui de cette argumentation. Cette erreur implique que la chambre de recours a omis d’examiner un facteur potentiellement pertinent dans l’appréciation du risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure [voir arrêt du 6 juin 2018, Uponor Innovation/EUIPO – Swep International (SMATRIX), T‑264/17, non publié, EU:T:2018:329, point 83 et jurisprudence citée].

75      Dans ces conditions, le Tribunal ne dispose pas de tous les éléments nécessaires pour vérifier le bien-fondé de l’appréciation globale de l’existence du risque de confusion, telle qu’opérée par la chambre de recours dans la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 6 juin 2018, SMATRIX, T‑264/17, non publié, EU:T:2018:329, point 84 et jurisprudence citée).

76      Il s’ensuit qu’il convient d’accueillir le moyen unique et, partant, d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

77      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

78      En l’espèce, l’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

79      En application de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, l’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 21 février 2023 (affaire R 1418/2022-1) est annulée.

2)      L’EUIPO supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par European Federation of Financial Analysts’ Societies (EFFAS).

3)      CFA Institute supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Tomljenović

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 mars 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.