Language of document : ECLI:EU:T:2016:335

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

2 juin 2016 (*) (1)

« Concurrence – Ententes – Marché européen de l’acier de précontrainte – Fixation des prix, partage du marché et échange d’informations commerciales sensibles – Décision constatant une infraction à l’article 101 TFUE – Unité économique – Participation directe à l’infraction – Responsabilité dérivée des sociétés mères – Succession d’entreprises – Infraction complexe – Infraction unique et continue – Lignes directrices de 2006 pour le calcul du montant des amendes – Principes de non-rétroactivité et de légalité des peines – Circonstances atténuantes – Capacité contributive – Droits de la défense – Obligation de motivation – Demande de réappréciation – Absence d’évolution des circonstances de fait – Lettre de rejet – Irrecevabilité »

Dans les affaires jointes T‑426/10 à T‑429/10, T‑438/12 à T‑441/12,

Moreda-Riviere Trefilerías, SA, établie à Gijón (Espagne), représentée, dans l’affaire T‑426/10, par Mes F. González Díaz et A. Tresandi Blanco et, dans l’affaire T‑440/12, initialement par Mes González Díaz et P. Herrero Prieto, puis par Mes González Díaz et Tresandi Blanco, avocats,

partie requérante dans les affaires T‑426/10 et T‑440/12,

Trefilerías Quijano, SA, établie à Los Corrales de Buelna (Espagne), représentée, dans l’affaire T‑427/10, par Mes González Díaz et Tresandi Blanco et, dans l’affaire T‑439/12, initialement par Mes González Díaz et Herrero Prieto, puis par Mes González Díaz et Tresandi Blanco,

partie requérante dans les affaires T‑427/10 et T‑439/12,

Trenzas y Cables de Acero PSC, SL, établie à Santander (Espagne), représentée, dans l’affaire T‑428/10, par Mes González Díaz et Tresandi Blanco et, dans l’affaire T‑441/12, initialement par Mes González Díaz et Herrero Prieto, puis par Mes González Díaz et Tresandi Blanco,

partie requérante dans les affaires T‑428/10 et T‑441/12,

Global Steel Wire, SA, établie à Cerdanyola del Vallés (Espagne), représentée, dans l’affaire T‑429/10, par Mes González Díaz et Tresandi Blanco et, dans l’affaire T‑438/12, initialement par Mes González Díaz et Herrero Prieto, puis par Mes González Díaz et Tresandi Blanco,

partie requérante dans les affaires T‑429/10 et T‑438/12,

contre

Commission européenne, représentée dans les affaires T‑426/10, T‑427/10, T‑429/10, T‑438/12 à T‑441/12 par MM. V. Bottka, F. Castillo de la Torre et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents, assistés de Mes L. Ortiz Blanco et A. Lamadrid de Pablo, avocats, et, dans l’affaire T‑428/10, par MM. Bottka et Castillo de la Torre, assistés de Mes Ortiz Blanco et Lamadrid de Pablo,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation et de réformation de la décision C (2010) 4387 final de la Commission, du 30 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38344 – Acier de précontrainte), modifiée par la décision C (2010) 6676 final de la Commission, du 30 septembre 2010, et par la décision C (2011) 2269 final de la Commission, du 4 avril 2011, ainsi que de la lettre du directeur général de la direction générale de la concurrence de la Commission du 25 juillet 2012,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), président, F. Dehousse et A. M. Collins, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 9 juillet 2015,

rend le présent

Arrêt

 Objet du litige

1        Les présents recours sont intentés, d’une part, à l’encontre de la décision C (2010) 4387 final de la Commission, du 30 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38344 – Acier de précontrainte) (ci-après la « décision initiale »), sanctionnant une entente entre des fournisseurs d’acier de précontrainte (ci-après l’« APC ») qui ont pris part à des opérations de fixation de quotas, de partage de clientèle, de fixation des prix et d’échange d’informations commerciales sensibles portant sur le prix, le volume et les clients aux niveaux européen, régional et national.

2        La décision initiale a été adressée par la Commission européenne aux sociétés ci-après :

–        ArcelorMittal SA,

–        ArcelorMittal Wire France SA,

–        ArcelorMittal Fontaine SA,

–        ArcelorMittal Verderio Srl,

–        Emesa-Trefilería, SA (ci-après « Emesa »),

–        Industrias Galycas, SA (ci-après « Galycas »),

–        ArcelorMittal España, SA,

–        Trenzas y Cables de Acero PSC, SL (ci-après « Tycsa PSC »), la requérante dans les affaires jointes T‑428/10 et T‑441/12,

–        Trefilerías Quijano, SA (ci-après « TQ »), la requérante dans les affaires jointes T‑427/10 et T‑439/12,

–        Moreda-Riviere Trefilerías, SA (ci-après « MRT »), la requérante dans les affaires jointes T‑426/10 et T‑440/12,

–        Global Steel Wire, SA (ci-après « GSW »), la requérante dans les affaires jointes T‑429/10 et T‑438/12,

–        Socitrel – Sociedade Industrial de Trefilaria, SA (ci-après « Socitrel »),

–        Companhia Previdente – Sociedade de Controle de Participações Financeiras, SA (ci-après « Companhia Previdente »),

–        voestalpine Austria Draht GmbH (ci-après « Austria Draht »),

–        voestalpine AG,

–        Fapricela Indústria de Trefilaria, SA (ci-après « Fapricela »),

–        Proderac – Productos Derivados del Acero SA (ci-après « Proderac »),

–        Westfälische Drahtindustrie GmbH (ci-après « WDI »),

–        Westfälische Drahtindustrie Verwaltungsgesellschaft GmbH & Co. KG (ci-après « WDV »),

–        Pampus Industriebeteiligungen GmbH & Co. KG (ci-après « Pampus »),

–        Nedri Spanstaal BV (ci-après « Nedri »),

–        Hit Groep BV,

–        DWK Drahtwerk Köln GmbH, Saarstahl AG (ci-après, prises ensemble, « DWK »),

–        Ovako Hjulsbro AB,

–        Ovako Dalwire Oy Ab,

–        Ovako Bright Bar AB,

–        Rautaruukki Oyj,

–        Italcables SpA (ci-après « ITC »),

–        Antonini SpA,

–        Redaelli Tecna SpA (ci-après « Redaelli »),

–        CB Trafilati Acciai SpA (ci-après « CB »),

–        ITAS – Industria Trafileria Applicazioni Speciali SpA (ci-après « Itas »),

–        Siderurgica Latina Martin SpA (ci-après « SLM »),

–        Ori Martin SA,

–        Emme Holding SpA, anciennement puis de nouveau dénommée Trafilerie Meridionali SpA (ci-après « Trame »).

3        La décision initiale a été modifiée à deux reprises par la Commission.

4        Premièrement, la Commission a adopté, le 30 septembre 2010, la décision C (2010) 6676 final amendant la décision initiale (ci-après la « première décision modificative »). En substance, la première décision modificative a eu pour effet de diminuer le montant des amendes imposées aux sociétés suivantes : ArcelorMittal Verderio, ArcelorMittal Fontaine et ArcelorMittal Wire France, ArcelorMittal España, WDI et WDV.

5        La première décision modificative a été adressée à l’ensemble des destinataires de la décision initiale.

6        Deuxièmement, la Commission a adopté, le 4 avril 2011, la décision C (2011) 2269 final modifiant la décision initiale (ci-après la « seconde décision modificative »). En substance, la seconde décision modificative a, notamment, eu pour effet de diminuer le montant des amendes imposées aux sociétés suivantes : d’une part, ArcelorMittal, ArcelorMittal Verderio, ArcelorMittal Fontaine et ArcelorMittal Wire France et, d’autre part, SLM et Ori Martin. Seules ces sociétés étaient destinataires de la seconde décision modificative.

7        Le cas échéant à l’initiative du Tribunal, toutes les sociétés ayant introduit un recours contre la décision initiale ont reçu communication de la seconde décision modificative.

8        Les requérantes ont été interrogées par le Tribunal sur les conséquences susceptibles d’être tirées de ces modifications de la seconde décision modificative sur le contenu de leur argumentation et ont eu la possibilité d’adapter leurs conclusions pour tenir compte de ces éventuelles conséquences.

9        Ainsi, la décision initiale, telle que modifiée par la première et la seconde décision modificative, constitue, aux fins des présents recours, la « décision attaquée ».

10      Dans la décision attaquée, les quatre requérantes, prises ensemble ou séparément, sont indifféremment dénommées « Tycsa » ou « entreprises Tycsa » (décision attaquée, considérant 34).

11      Les présents recours sont dirigés, d’autre part, contre la lettre en date du 25 juillet 2012 (ci-après la « lettre du 25 juillet 2012 »), dans laquelle le directeur général de la direction générale (DG) de la concurrence de la Commission (ci-après le « directeur général ») a de nouveau rejeté la demande de réduction du montant de l’amende infligée aux requérantes en raison de la prise en considération de leur capacité contributive.

12      Vingt-huit recours ont été introduits contre la décision initiale, la première décision modificative, la seconde décision modificative et les lettres adressées par la Commission à la suite de demandes formées par certains des destinataires de la décision initiale visant à la réappréciation de leur capacité contributive (affaires T‑385/10, ArcelorMittal Wire France e.a./Commission, T‑388/10, Productos Derivados del Acero/Commission, T‑389/10, SLM/Commission, T‑391/10, Nedri Spanstaal/Commission, T‑393/10, Westfälische Drahtindustrie e.a./Commission, T‑398/10, Fapricela/Commission, T‑399/10, ArcelorMittal España/Commission, T‑406/10, Emesa-Trefilería et Industrias Galycas/Commission, T‑413/10, Socitrel/Commission, T‑414/10, Companhia Previdente/Commission, T‑418/10, voestalpine et voestalpine Wire Rod Austria/Commission, T‑419/10, Ori Martin/Commission, T‑422/10, Trafilerie Meridionali/Commission, T‑423/10, Redaelli Tecna/Commission, T‑426/10, Moreda-Riviere Trefilerías/Commission, T‑427/10, Trefilerías Quijano/Commission, T‑428/10, Trenzas y Cables de Acero/Commission, T‑429/10, Global Steel Wire/Commission, T‑436/10, Hit Groep/Commission, T‑575/10, Moreda-Riviere Trefilerías/Commission, T‑576/10, Trefilerías Quijano/Commission, T‑577/10, Trenzas y Cables de Acero/Commission, T‑578/10, Global Steel Wire/Commission, T‑438/12, Global Steel Wire/Commission, T‑439/12, Trefilerías Quijano/Commission, T‑440/12, Moreda-Riviere Trefilerías/Commission, T‑441/12, Trenzas y Cables de Acero/Commission, et T‑409/13, Companhia Previdente et Socitrel/Commission).

 Antécédents du litige

I –  Secteur faisant l’objet de la procédure

A –  Produit

13      L’entente sanctionnée par la Commission concernait l’APC. Cette expression désigne des câbles métalliques et des torons en fil machine et, notamment, l’acier pour béton prétensionné, qui sert d’éléments de balcon, de pieux de fondation ou de conduits, et l’acier pour béton postcontraint, qui sert en architecture industrielle, en architecture souterraine ou pour la construction de ponts (décision attaquée, considérant 2).

14      La gamme de produits en APC comprend plusieurs sortes de câbles unifilaires (par exemple, des câbles lisses, brillants ou galvanisés, à empreinte, nervurés, etc.) ainsi que plusieurs sortes de torons (par exemple, brillants, à empreinte, revêtus de polyéthylène ou métalliques, etc.). Les torons en APC se composent de trois ou sept fils. L’APC se vend en plusieurs diamètres. Les torons spéciaux, c’est-à-dire les torons galvanisés ou gainés – graissés ou cirés –, et les haubans, c’est-à-dire les torons galvanisés enduits et les câbles galvanisés utilisés dans la construction des ponts, n’ont toutefois pas été pris en considération par la Commission (décision attaquée, considérants 3 et 4).

15      Il est également indiqué dans la décision attaquée que, dans de nombreux pays, un agrément technique délivré par les autorités nationales est requis. Les procédures de certification nécessitent environ six mois (décision attaquée, considérant 5).

B –  Structure de l’offre

16      Pris dans leur ensemble et selon la décision attaquée, les membres de l’entente contrôlaient environ 80 % des ventes au sein de l’Espace économique européen (EEE). Dans la plupart des pays, plusieurs des plus grands producteurs étaient présents à côté de quelques producteurs locaux. La plupart de ces plus grands producteurs faisaient partie de groupes métallurgiques produisant également du fil machine, une matière première de l’APC qui en constitue le principal élément de coût. Si les entreprises non intégrées étaient obligées d’acheter leurs propres matières premières sur le marché, les entreprises intégrées comptaient généralement sur des approvisionnements existant au sein de leur groupe. Durant toute la période de l’entente constatée dans la décision attaquée, l’industrie a déclaré des surcapacités substantielles et durables d’APC (décision attaquée, considérants 98 et 99).

17      En 2001, la valeur des ventes d’APC au sein de l’EEE s’est élevée à quelque 365 millions d’euros pour un volume total approchant les 600 000 tonnes. Ces ventes portaient, pour 20 à 25 %, sur du fil d’APC et, pour 75 à 80 %, sur du toron d’APC, ces moyennes présentant quelques différences par pays. L’Italie est le pays où la consommation d’APC était la plus importante (environ 28 % des ventes d’APC au sein de l’EEE). D’autres grands pays consommateurs étaient l’Espagne (16 %) ainsi que les Pays-Bas, la France, l’Allemagne et le Portugal (8 à 10 % chacun) (décision attaquée, considérant 100).

C –  Structure de la demande

18      Selon la décision attaquée, la structure de la demande en APC était très hétérogène. Les fabricants de matériaux de construction préfabriqués et les entreprises d’ingénierie spécialisées utilisaient de l’APC, par exemple dans des constructions visant à stabiliser les bâtiments ou les ponts. La clientèle se composait d’un très petit nombre de grands clients – par exemple, Addtek International Oy AB (ci-après « Addtek »), devenue, depuis, Consolis Oy AB, qui représentait entre 5 et 10 % de la consommation en APC au sein de l’UE – et d’un grand nombre de plus petits clients (décision attaquée, considérants 101 et 102).

19      Les habitudes commerciales variaient d’un État membre à l’autre. Les producteurs d’APC et leurs clients concluaient souvent des contrats-cadres de six ou de douze mois. Dès lors, en fonction de la demande, les clients commandaient des tonnages s’inscrivant dans la plage du volume convenu au prix convenu. Les contrats étaient régulièrement prolongés à la suite d’autres négociations (décision attaquée, considérant 103).

D –  Échanges au sein de l’UE et de l’EEE

20      Selon ce qui est rapporté dans la décision attaquée, les volumes de ventes d’APC au cours de la période concernée par l’entente montrent que les échanges entre les États membres de l’UE étaient intensifs. De l’APC a été produit et commercialisé dans l’ensemble de l’EEE (décision attaquée, considérant 104).

II –  Sociétés appartenant au groupe Celsa

21      Les requérantes, quatre sociétés appartenant au groupe Celsa, ont introduit chacune plusieurs recours, à l’encontre de la décision initiale, de la première décision modificative et de la lettre du 25 juillet 2012. Les considérants 34 à 43 de la décision attaquée sont consacrés à leur présentation.

A –  GSW

22      Trenzas y Cables de Acero, SA, était une société de droit espagnol fondée le 17 juillet 1951 (décision attaquée, considérant 34).

23      Le 22 juin 1996, Trenzas y Cables de Acero a fusionné avec la société Nueva Montaña Quijano Siderúrgica, SL, une filiale de la société Nueva Montaña Quijano, SA, appartenant au groupe Celsa. La société issue de cette fusion a pris la dénomination de GSW le 19 octobre 1996 (décision attaquée, considérants 34 et 35).

24      À la date de l’adoption de la décision attaquée, les actionnaires majoritaires de GSW étaient, outre Nueva Montaña Quijano, devenue, en 2005, Inversiones Picos de Europa, SA, d’une part, deux autres sociétés du groupe Celsa, Compañía Española de Laminación, SL et Nervacero, SA, ainsi que, d’autre part, Coal Trade, SL. Le groupe Celsa est contrôlé par les membres de la famille Rub. (décision attaquée, considérant 36).

25      Durant la période examinée dans la décision attaquée, GSW vendait, à un prix de transfert convenu, du fil machine à TQ et à Tycsa PSC (décision attaquée, considérant 42).

B –  Tycsa PSC et MRT

26      Le 10 juin 1993, Trenzas y Cables de Acero a constitué Trenzas y Cables, SL, dont l’activité a consisté en la production et en la vente d’APC jusqu’au 26 mars 1998. À cette date, cette société a créé Tycsa PSC, à laquelle elle a transféré ses activités de production. Trenzas y Cables a également transféré ses activités de vente d’APC à Tycsa PSC en mars 2002. Selon la décision attaquée, Tycsa PSC est demeurée sous le contrôle de Trenzas y Cables, elle-même contrôlée par GSW jusqu’à la fin de l’infraction sanctionnée dans la décision attaquée (décision attaquée, considérant 34).

27      Le 27 décembre 2002, Trefilerías Moreda, SA, une compagnie du groupe Celsa, a absorbé Trenzas y Cables ainsi que Riviere, SA, une autre société du groupe Celsa. L’entité ainsi formée a pris la dénomination de MRT (décision attaquée, considérant 37).

28      En 2001, les ventes d’APC réalisées par GSW, Tycsa PSC et Trenzas y Cables ont atteint 51 569 000 euros. En 2009, le chiffre d’affaires mondial consolidé de GSW était au moins de 543 895 000 euros (décision attaquée, considérant 43).

C –  TQ

29      TQ est une société fondée le 29 décembre 1986, dont l’activité consiste en la production d’APC et en la vente de ce produit en Espagne et au Portugal (décision attaquée, considérant 41).

30      Entre le 19 octobre 1996 et le 16 juin 1997, GSW détenait 90,61 % du capital de TQ. Du 16 juin 1997 au 25 décembre 2000, TQ était directement détenue par GSW à 100 %. Depuis cette date et jusqu’au 29 juillet 2004, TQ était détenue à 33 % par Celsa, à 45 % par GSW et à 22 % par Nervacero, une autre société du groupe Celsa. Dans la décision attaquée, la Commission a, en outre, estimé qu’elle disposait de suffisamment de preuves documentaires pour lui permettre de considérer que TQ faisait partie du groupe Celsa depuis au moins le 15 décembre 1992 (décision attaquée, considérant 41).

31      En 2001, les ventes d’APC réalisées par TQ ont atteint 6 257 146 euros. En 2009, le chiffre d’affaires mondial consolidé de TQ était de l’ordre de 41 906 000 euros (décision attaquée, considérant 43).

III –  Procédure administrative

32      Le 9 janvier 2002, le Bundeskartellamt, l’autorité nationale allemande chargée des questions de concurrence, a transmis à la Commission des documents portant sur une affaire en instance devant un tribunal du travail local allemand concernant le licenciement d’un ancien employé de WDI. Cet employé affirmait avoir été impliqué dans une infraction à l’article 101 TFUE concernant l’APC. Dans ce contexte, il a fait un relevé des entreprises impliquées et a fourni de premières informations sur l’infraction (décision attaquée, considérant 105).

A –  Première demande de clémence et immunité accordée à DWK

33      Le 18 juin 2002, DWK a soumis à la Commission un « mémorandum » relatif à une infraction à l’article 101 TFUE concernant l’APC, qui l’impliquait elle-même ainsi que d’autres entreprises. Dans ce contexte, DWK a précisé qu’elle espérait bénéficier de la communication de la Commission, du 19 février 2002, sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO C 45, p. 3, ci-après la « communication sur la clémence de 2002 ») (décision attaquée, considérant 106).

34      Le 3 juillet 2002, les représentants de DWK ont rencontré la Commission et ont discuté de la procédure de clémence. Le 19 juillet 2002, la Commission a accordé à DWK l’immunité conditionnelle d’amendes en vertu du paragraphe 8, sous b), de la communication sur la clémence de 2002, étant donné qu’elle était la première à fournir des éléments de preuve qui allaient permettre à la Commission de constater une infraction à l’article 81 CE, devenu article 101 TFUE, relative à une entente présumée entre producteurs d’APC dans l’ensemble de l’Union européenne (décision attaquée, considérant 107).

B –  Inspections et demandes de renseignements

35      Les 19 et 20 septembre 2002, la Commission a procédé à des vérifications dans les locaux, notamment, de DWK, de WDI, de Nedri, de Tréfileurope SA, de « Tycsa », de Redaelli, de CB, d’Itas, d’ITC, de SLM et d’Edilsider (la société appartenant à un agent de vente de Tréfileurope Italia Srl, devenue ArcelorMittal Verderio), ainsi qu’auprès de leurs filiales respectives, conformément à l’article 14, paragraphe 3, ou à l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [101 TFUE et 102 TFUE] (JO 1962, 13, p. 204) (décision attaquée, considérant 108).

36      À partir du 19 septembre 2002, la Commission a adressé plusieurs demandes de renseignements conformément à l’article 11 du règlement n° 17 et à l’article 18 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 TFUE et 102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), aux sociétés impliquées dans la présente décision, à leurs sociétés mères, à d’autres sociétés, à certaines personnes (un salarié retraité de Redaelli et par la suite conseiller commercial, et un agent de vente de Tréfileurope Italia, par l’intermédiaire d’Edilsider) et à certaines associations professionnelles (décision attaquée, considérant 109).

37      Les 7 et 8 juin 2006, la Commission a mené une inspection conformément à l’article 20 du règlement n° 1/2003 dans les locaux (« studio ») d’un membre de la famille d’un ancien salarié de Redaelli (décision attaquée, considérant 114).

C –  Autres demandes de clémence et réponses apportées par la Commission

38      Parmi les destinataires de la décision attaquée, certaines sociétés, telles ITC, Nedri, SLM, Redaelli et WDI, ont introduit des demandes officielles de clémence au titre de la communication sur la clémence de 2002. Tycsa PSC a confirmé l’existence des arrangements anticoncurrentiels, mais n’a pas demandé la clémence (décision attaquée, considérant 110).

39      ITC a demandé la clémence le 21 septembre 2002, soumettant des éléments de preuve contemporains concernant les réunions qui se sont tenues entre les producteurs d’APC entre 1979 et 2002. Le 11 novembre 2002, elle a également soumis une déclaration d’entreprise. Le 10 janvier 2003, la Commission a accordé à ITC une réduction provisoire du montant des amendes de l’ordre de 30 à 50 %, à la condition qu’elle continue de respecter les conditions prévues au paragraphe 21 de la communication sur la clémence de 2002 (décision attaquée, considérant 111).

40      Le 17 octobre 2002, « Tycsa » a répondu à une demande de renseignements, reconnaissant les faits et fournissant des preuves qui l’incriminaient. Le 21 octobre 2002, répondant à une demande de renseignements, Redaelli a soumis des preuves qui l’incriminaient et, le 20 mars 2003, elle a officiellement demandé à bénéficier de la communication sur la clémence de 2002. Le 23 octobre 2002, répondant à une demande de renseignements, Nedri a soumis des preuves, tout en demandant à bénéficier de l’application de la communication sur la clémence. Le 30 octobre 2002, tout en répondant à une demande de renseignements, SLM a demandé une réduction du montant des amendes (décision attaquée, considérant 112).

41      Faisant suite aux demandes de clémence, la Commission a adressé à Nedri et à WDI une lettre datée du 19 septembre 2008, par laquelle elle les a informées de l’indisponibilité de l’immunité d’amendes et de son intention, en vertu du paragraphe 26 de la communication sur la clémence de 2002, d’appliquer une réduction du montant de l’amende dans les limites prévues au point 23, sous b), de cette communication. Ce même jour, la Commission a également adressé une lettre à Redaelli et à SLM, rejetant leur demande de clémence (décision attaquée, considérant 113).

D –  Ouverture de la procédure et communication des griefs

42      Le 30 septembre 2008, la Commission a adopté une communication des griefs visant plusieurs sociétés, dont les requérantes.

43      Tous les destinataires de la communication des griefs ont soumis des remarques écrites en réponse aux griefs formulés par la Commission.

E –  Accès au dossier, audition et prise en compte de la capacité contributive

44      Les destinataires de la communication des griefs ont pu obtenir l’accès au dossier de la Commission sous la forme d’une copie sur un DVD. Parallèlement, ces sociétés ont également reçu une liste énumérant les documents contenus dans le dossier d’enquête et indiquant le degré d’accessibilité de chaque document. Elles ont été informées que le DVD leur donnait un accès total à tous les documents que la Commission avait pu obtenir en cours d’enquête, à l’exception des documents ou parties de document qui contenaient des secrets d’affaires et d’autres informations confidentielles. L’accès aux documents afférents à la clémence a été accordé dans les locaux de la Commission.

45      Une audition a eu lieu les 11 et 12 février 2009. Toutes les entreprises destinataires de la communication des griefs, à l’exception de HIT Groep, d’Emesa et de Galycas, y ont pris part.

46      Quatorze entreprises, dont les requérantes, ont également invoqué une incapacité à payer au sens du paragraphe 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après « les lignes directrices de 2006 »). Les requérantes ont fourni des justifications à l’appui de cette demande et ont répondu aux demandes de renseignements qui leur ont été adressées à six reprises par la Commission.

F –  Demandes complémentaires de renseignements

47      Par la suite, la Commission a adressé des demandes de renseignements aux quatre requérantes, à Companhia Previdente et à Socitrel, afin de clarifier certains points concernant, notamment, leur structure d’entreprise. Ces sociétés ont répondu entre le 6 mars et le 15 avril 2009.

48      La Commission a également adressé des demandes de renseignements à tous les destinataires de la décision initiale, afin d’établir la valeur des ventes des produits pertinents ainsi que le chiffre d’affaires des groupes. Tous les destinataires ont répondu à ces demandes.

IV –  Décision attaquée

49      La décision attaquée concerne une entente entre des fournisseurs d’APC qui ont pris part à des opérations de fixation de quotas, de partage de clientèle, de fixation des prix et d’échange d’informations commerciales sensibles portant sur le prix, le volume et les clients aux niveaux européen, national et régional. Selon le considérant 1 de la décision attaquée, ces entreprises ont ainsi commis une infraction unique et continue à l’article 101, paragraphe 1, TFUE et, à partir du 1er janvier 1994, à l’article 53, paragraphe 1, de l’accord sur l’EEE. Les agissements illégaux se sont déroulés au moins à partir du début de l’année 1984 et se sont poursuivis jusqu’au 19 septembre 2002.

50      L’enquête a impliqué 18 entreprises. Aux considérants 122 à 133 de la décision attaquée, les arrangements d’entente faisant l’objet de la procédure sont décrits dans des termes généraux. Ces considérants sont résumés ci-après dans la mesure où les faits qui y sont décrits permettent une meilleure compréhension du cadre du litige.

51      Depuis au moins 1984 et jusqu’au moment des inspections de la Commission, les 19 et 20 septembre 2002, plusieurs entreprises actives dans le secteur de l’APC ont été partiellement ou constamment impliquées dans des arrangements paneuropéens consistant en une phase dite de Zurich et une phase dite européenne ou dans des arrangements nationaux ou régionaux selon le cas. Les arrangements paneuropéens et les arrangements nationaux ou régionaux poursuivaient le même objectif global de maintenir l’équilibre afin d’éviter la chute des prix sur un marché européen changeant, caractérisé par des capacités de production excessives. Les entreprises ont par conséquent tenté en permanence d’éviter une concurrence féroce sur leur marché national ou sur les marchés d’exportation, en passant des accords en termes de quotas, de prix ou d’attribution de clientèle.

A –  Club Zurich et accords régionaux

52      La première phase de l’accord paneuropéen est dénommée « club Zurich ». Ainsi, du 1er janvier 1984 au 9 janvier 1996, à la suite d’une forte pression exercée sur les prix à l’époque, Tréfileurope, Nedri, WDI, DWK – ou leurs prédécesseurs – et Redaelli – cette dernière représentant plusieurs autres entreprises italiennes (au moins en 1993 et en 1995) – ont fixé des quotas par pays (Allemagne, Espagne, France, Italie, Autriche et Benelux), se sont partagé des clients, ont arrêté des prix et échangé des informations commerciales sensibles. Elles ont été rejointes par les producteurs espagnols Emesa, en 1992, et « Tycsa », en 1993 – lesquels, vers la même époque, ont également commencé à se réunir, en ce qui concerne le marché ibérique, avec d’autres producteurs espagnols, dans un premier temps, puis également avec des producteurs portugais, au sein du « club España ». Au cours des années 80, les réunions du club Zurich ont essentiellement eu lieu à Zurich (Suisse) et, dans les années 90, à Düsseldorf (Allemagne).

53      Au plus tard à partir du 23 janvier 1995 et durant tout le reste de l’année 1995, les entreprises italiennes Redaelli, ITC, CB et Itas (les trois dernières étant souvent représentées par Redaelli) ont négocié un accord (révisé) de quotas avec les autres producteurs du club Zurich qui devait régir les ventes des producteurs italiens et des autres producteurs du club Zurich en Italie et dans le reste de l’Europe. Aucun accord n’a finalement pu être conclu en raison du fait que les quotas à l’exportation revendiqués par les producteurs italiens ont été jugés trop élevés. Cela a contribué à la dissolution du club Zurich, dont la dernière réunion attestée a eu lieu le 9 janvier 1996.

54      Le 5 décembre 1995, les entreprises italiennes Redaelli, ITC, CB et Itas ont néanmoins passé entre elles un accord fixant des quotas à la fois au sein du marché italien et concernant les exportations de l’Italie vers le reste de l’Europe (ci-après le « club Italia »). Par la suite, ces entreprises italiennes ont été (de nouveau) rejointes par Tréfileurope et Tréfileurope Italia, SLM, Trame, « Tycsa », DWK et Austria Draht. Les rencontres avaient lieu régulièrement pour surveiller l’exécution de l’arrangement sur les quotas, fixer les prix (y compris une surtaxe dénommée « supplément »), se répartir la clientèle et échanger des informations commercialement sensibles, et ce jusqu’à l’inspection par la Commission. Ces sociétés ont recouru à un système de surveillance sophistiqué par l’intermédiaire de tiers indépendants qui contrôlaient régulièrement les prix et le volume réel vendu aux clients en Italie.

55      Une coordination spécifique existait entre le club Zurich et le club Italia. Redaelli, et par la suite Tréfileurope, tenait les membres de l’arrangement paneuropéen informés. De leur côté, les participants du club Italia étaient aussi informés des développements pertinents de l’arrangement paneuropéen par l’intermédiaire de Redaelli, puis de Tréfileurope, de DWK et de « Tycsa », qui participaient aux deux clubs.

56      Parallèlement, pendant toute l’année 1996, les entreprises italiennes (du moins Redaelli, CB, ITC et Itas), « Tycsa » et Tréfileurope ont négocié et sont parvenues à la fin de 1996 à un accord spécifique intitulé « accord du Sud », qui arrêtait le taux de pénétration de chacun des participants dans les pays du Sud (Belgique, Espagne, France, Italie et Luxembourg) et contenait un engagement de leur part à négocier ensemble les quotas avec les autres producteurs d’Europe (du Nord).

B –  Club Europe et accords régionaux

57      Afin de surmonter la crise du club Zurich, les anciens participants à celui-ci (avec une participation moins régulière cependant des producteurs italiens, en particulier Redaelli) ont également continué à se réunir régulièrement entre janvier 1996 et mai 1997. Tréfileurope, Nedri, WDI, DWK, « Tycsa » et Emesa (ci-après les « membres permanents ») ont finalement adopté, en mai 1997, un arrangement paneuropéen révisé, par lequel elles partageaient des quotas qui étaient calculés sur la base d’une région de référence et d’une période de référence spécifiques (du quatrième trimestre de 1995 au premier trimestre de 1997). Cette deuxième phase de l’arrangement paneuropéen est dénommée « club Europe ».

58      Les membres permanents se sont en outre réparti la clientèle et ont fixé les prix des produits (de façon spécifique à la fois par pays et par client). Ils sont convenus de règles de coordination incluant la nomination de coordonnateurs responsables de la mise en œuvre des arrangements par pays et de la coordination avec d’autres entreprises intéressées, actives dans ces mêmes pays ou concernant les mêmes clients. De plus, leurs représentants se sont réunis régulièrement à différents niveaux (directeurs et représentants des ventes), afin de surveiller la mise en œuvre des arrangements. Ils ont échangé des informations commerciales sensibles. En cas d’écart par rapport au comportement commercial convenu, un système de compensation adéquat était appliqué.

59      Dans le cadre de cet arrangement paneuropéen, les membres permanents, rejoints occasionnellement par les producteurs italiens et Fundia Hjulsbro AB (ci-après « Fundia »), entretenaient également des contacts bilatéraux (ou multilatéraux) et participaient à la fixation des prix et à l’attribution de clientèle sur une base ad hoc, s’ils y avaient un intérêt (en fonction de leur présence sur le marché discuté).

60      Au cours de la période allant, au moins, de septembre 2000 jusqu’aux inspections de la Commission, en septembre 2002, les membres permanents ainsi qu’ITC, CB, Redaelli, Itas et SLM se sont réunis régulièrement dans le but d’intégrer les entreprises italiennes dans le club Europe en tant que membres permanents.

61      Au cours de la même période, en plus de la fixation de quotas généraux par zone géographique, la répartition des quotas par client a été discutée. L’entreprise qui coordonnait habituellement le marché d’un pays donné devait également gérer les négociations pour une attribution détaillée des quotas par client installé dans ce pays.

62      Les membres du club Europe ont également tenté d’accueillir en tant que membres permanents non seulement les producteurs italiens, mais aussi tous les autres producteurs importants d’APC avec lesquels ils avaient eu des arrangements ou avaient entretenu des contacts bilatéraux ou multilatéraux par le passé, et de redistribuer les quotas européens par pays, comme cela se faisait dans le cadre du club Zurich.

63      En parallèle à l’arrangement paneuropéen et au club Italia, des entreprises espagnoles – TQ, « Tycsa », Emesa, Galycas et Proderac (cette dernière à partir de mai 1994) – et portugaises – Socitrel à partir d’avril 1994 et Fapricela à partir de décembre 1998 – sont convenues, pour l’Espagne et le Portugal, de maintenir leur part de marché stable ainsi que de fixer des quotas, de s’attribuer des clients, y compris pour les marchés publics de travaux, et de fixer les prix et les conditions de paiement. Elles ont en outre échangé des informations commerciales sensibles (club España). En dehors du fait que « Tycsa » participait à la fois aux réunions du club Europe et du club España, des discussions et des arrangements fréquents ont également eu lieu entre d’autres participants des deux clubs.

64      Les arrangements paneuropéens et régionaux (club Italia/club España/accord du Sud) sont restés en vigueur jusqu’au moment des inspections qui ont été menées par la Commission en septembre 2002.

C –  Participation des requérantes à l’entente et sanctions infligées

65      Selon la Commission, TQ a participé au club España du 15 décembre 1992 au 19 septembre 2002. TQ s’est vu infliger une amende de 4 190 000 euros solidairement avec GSW, MRT et Tycsa PSC (considérant 734, article 1er, point 3, et article 2, point 3, de la décision attaquée).

66      Selon la Commission, Tycsa PSC a participé directement à tous les éléments du cartel, y compris le club Zurich, le club Europe, la coordination des ventes à Addtek, le club España, le club Italia et l’accord du Sud, du 26 mars 1998 au 19 septembre 2002. Tycsa PSC s’est vu infliger une amende totale de 40 000 000 euros, dont 4 190 000 euros solidairement avec TQ, GSW et MRT et 35 810 000 euros solidairement avec GSW et MRT (considérant 734, article 1er, point 3, et article 2, point 3, de la décision attaquée).

67      Selon la Commission, MRT succède à Trenzas y Cables, laquelle a directement participé à tous les éléments du cartel, y compris le club Zurich, le club Europe, la coordination des ventes à Addtek, le club España, le club Italia et l’accord du Sud, du 10 juin 1993 au 19 septembre 2002. MRT s’est vu infliger une amende totale de 54 389 000 euros, dont 4 190 000 euros solidairement avec TQ, GSW et Tycsa PSC, 35 810 000 euros solidairement avec GSW et Tycsa PSC et 14 389 000 euros solidairement avec GSW (considérant 734, article 1er, point 3, et article 2, point 3, de la décision attaquée).

68      La Commission a considéré que GSW, antérieurement dénommée Trenzas y Cables de Acero, ainsi que TQ, MRT et Tycsa PSC constituaient une seule entité économique. En conséquence, la Commission a retenu la participation de GSW à l’entente pour la période allant du 15 décembre 1992 au 19 septembre 2002 et infligé à celle-ci une amende totale de 54 389 000 euros, dont 4 190 000 euros solidairement avec TQ, MRT et Tycsa PSC, 35 810 000 solidairement avec MRT et Tycsa PSC et 14 389 000 euros solidairement avec MRT (considérants 748 à 762, article 1er, point 3, et article 2, point 3, de la décision attaquée).

69      Dans le cas des requérantes, la Commission a appliqué à la valeur des ventes réalisées en 2001 un coefficient de 19 % au titre de la gravité, a multiplié le montant ainsi obtenu par la durée de l’infraction, a ajouté un montant additionnel représentant 19 % de la valeur des ventes et n’a retenu aucune circonstance aggravante ni aucune circonstance atténuante.

70      Dans la décision attaquée, la Commission a, par ailleurs, rejeté la demande des requérantes tendant à ce qu’une réduction du montant de l’amende leur soit accordée en raison de la prise en compte de leur capacité contributive, au sens du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 (considérants 1173 à 1175 de la décision attaquée).

71      À cet égard, la Commission a estimé que les requérantes avaient la possibilité d’augmenter leurs facilités bancaires à court terme et elle a de plus tenu compte de l’importance des ressources financières à la disposition des actionnaires du groupe dont les requérantes faisaient partie. Ainsi, au considérant 1175 de la décision attaquée, elle a indiqué ce qui suit :

« Premièrement, les facilités bancaires à court terme et à la disposition de GSW peuvent encore être augmentées au vu de la solvabilité du groupe. Deuxièmement, l’ensemble du groupe et ses propriétaires familiaux ont d’importants moyens financiers. Le groupe GSW est détenu par la famille [Rub.], qui détient une série d’autres entreprises sidérurgiques, incluant notamment le groupe Celsa dont les actifs sont plusieurs fois plus importants que ceux du groupe GSW. En outre, la richesse nette de la famille [Rub.] en dehors de l’industrie sidérurgique est estimée à plus de deux fois le montant de l’amende. Ces éléments de richesse des actionnaires (dans les autres entreprises et dans les entreprises extérieures) leur permettent d’aider l’entreprise en cas de besoin. Les deux raisons ci-dessus (la possibilité de voir augmenter les facilités bancaires à court terme et l’aide possible des actionnaires) constituent chacune en elle-même une raison suffisante pour rejeter les demandes de GSW, [Tycsa PSC], MRT et [TQ] invoquant leur absence de capacité contributive. Combinées, elles mènent a fortiori au rejet des demandes invoquant l’absence de capacité contributive. »

V –  Lettre du 25 juillet 2012

72      À la suite de la décision initiale, les requérantes ont considéré être dans l’impossibilité d’obtenir une garantie bancaire et ne pas être en mesure de payer l’amende sans compromettre leur viabilité.

73      Le 12 août 2010, les requérantes ont présenté à la Commission une demande tendant à la réappréciation de leur capacité contributive et sollicité de nouveau une réduction du montant de l’amende en application du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006. À l’appui de cette demande, entre le 12 août 2010 et le 1er juin 2012, les requérantes ont présenté de nouveaux documents à la Commission et répondu aux questions de cette institution.

74      Cette nouvelle demande a été rejetée par la lettre du 25 juillet 2012, laquelle est fondée sur les deux motifs suivants.

75      Premièrement, le directeur général a estimé que la situation financière de GSW ne s’était pas détériorée de manière significative par rapport à l’évaluation effectuée antérieurement. Même s’il reconnaissait que la conclusion d’accords de refinancement pouvait être à l’origine de difficultés en termes de liquidités, il considérait néanmoins que la situation des requérantes s’était améliorée par rapport aux données dont la Commission disposait lorsqu’elle a adopté la décision attaquée. Le directeur général a donc estimé que GSW disposait de ressources suffisantes (actuelles et futures) pour faire face au paiement de l’amende, relevant à cet égard que l’amende représentait moins de 2 % du total de la dette renégociée.

76      Deuxièmement, le directeur général évoquait la possibilité que les actionnaires des requérantes, qu’il s’agisse des personnes morales ou physiques, contribuent au paiement de l’amende. Concernant les premiers, les entreprises participant au périmètre espagnol (Tycsa PSC, ses actionnaires personnes morales et plusieurs autres entreprises liées) seraient, selon lui, en mesure de contribuer à ce paiement, compte tenu de la faible proportion de l’amende par rapport à leur taille. Concernant les actionnaires personnes physiques, la Commission estimait que les ayants droit du fondateur du groupe Celsa seraient en mesure de fournir une aide financière suffisante.

 Procédure et conclusions des parties

I –  Procédure devant le Tribunal

77      Par requêtes enregistrées au greffe du Tribunal le 16 septembre 2010, les quatre requérantes ont chacune introduit un premier recours, dirigé contre la décision initiale (affaires T‑426/10 à T‑429/10, ci-après la « première série d’affaires »).

78      Par mémoires enregistrés au greffe du Tribunal le 14 décembre 2010 dans les affaires T‑426/10 à T‑429/10, les requérantes ont demandé à être autorisées à adapter leurs moyens et leurs conclusions à la suite de l’adoption de la première décision modificative.

79      Par requêtes enregistrées au greffe du Tribunal le même jour, les requérantes ont chacune introduit un deuxième recours, dirigé contre la première décision modificative (affaires T‑575/10 à T‑578/10, ci-après la « deuxième série d’affaires »).

80      Par ordonnances du président de la première chambre du Tribunal du 3 mars 2011, les affaires introduites par chaque requérante ont été jointes deux à deux (affaires T‑426/10 et T‑575/10, MRT/Commission, affaires T‑427/10 et T‑576/10, TQ/Commission, affaires T‑428/10 et T‑577/10, Tycsa PSC/Commission, et affaires T‑429/10 et T‑578/10, GSW/Commission) aux fins de la phase écrite de la procédure, de la phase orale de la procédure et de l’arrêt, conformément à l’article 50 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991.

81      Par requêtes enregistrées au greffe du Tribunal le 5 octobre 2012, les requérantes ont chacune introduit un troisième recours, dirigé contre la lettre du 25 juillet 2012 (affaires T‑438/12 à T‑441/12, ci-après la « troisième série d’affaires »).

82      Par ordonnances du président de la sixième chambre du Tribunal du 19 mars 2014, les trois affaires introduites par chaque requérante (affaires jointes T‑426/10 et T‑575/10 et affaire T‑440/12, MRT/Commission, affaires jointes T‑427/10 et T‑576/10 et affaire T‑439/12, TQ/Commission, affaires jointes T‑428/10 et T‑577/10 et affaire T‑441/12, Tycsa PSC/Commission, et affaires jointes T‑429/10 et T‑578/10 et affaire T‑438/12, GSW/Commission) ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt, conformément à l’article 50 du règlement de procédure du 2 mai 1991.

83      Par ordonnances du 25 novembre 2014, la deuxième série d’affaires ainsi que les conclusions identiques présentées par les requérantes dans la première série d’affaires ont été rejetées comme manifestement irrecevables par le Tribunal (ordonnances du 25 novembre 2014, Moreda-Riviere Trefilerías/Commission, T‑426/10 et T‑575/10, non publiée, EU:T:2014:1005, Trefilerías Quijano/Commission, T‑427/10 et T‑576/10, non publiée, EU:T:2014:1003, Trenzas y Cables de Acero/Commission, T‑428/10 et T‑577/10, non publiée, EU:T:2014:1006, et Global Steel Wire/Commission, T‑429/10 et T‑578/10, non publiée, EU:T:2014:1008). Les pourvois formés par les requérantes contre ces ordonnances ont été rejetés par la Cour comme manifestement non fondés (ordonnance du 17 décembre 2015, Moreda-Riviere Trefilerías e.a./Commission, C‑53/15 P à C‑56/15 P, non publiée, EU:C:2015:839).

84      Par actes séparés présentés dans les affaires T‑438/12 à T‑441/12, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure du 2 mai 1991. Ces exceptions ont été jointes au fond.

85      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale dans l’ensemble des affaires et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du 2 mai 1991, a posé aux parties des questions écrites, en les invitant à y répondre avant l’audience et au cours de celle-ci.

86      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions écrites et orales posées par le Tribunal lors des audiences qui se sont tenues les 8 (affaires jointes T‑429/10 et T‑438/12 et affaires jointes T‑427/10 et T‑439/12) et 9 juillet 2015 (affaires jointes T‑428/10 et T‑441/12 et affaires jointes T‑426/10 et T‑440/12).

II –  Jonction des présentes affaires aux fins de l’arrêt

87      Lors des audiences, les parties ont été interrogées, conformément à l’article 68 du règlement de procédure du Tribunal, sur l’éventualité d’une jonction des présentes affaires aux fins de la décision mettant fin à l’instance. Les requérantes ont indiqué qu’elles ne s’opposaient pas à une telle jonction et la Commission a rappelé qu’elle y était favorable.

88      Par décision du président de la sixième chambre du Tribunal du 16 octobre 2015, prise en application de l’article 68, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure, les présentes affaires ont été jointes aux fins du présent arrêt.

III –  Conclusions des parties

89      Dans la première série d’affaires (affaires T‑426/10 à T‑429/10), les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler la décision attaquée ;

–        à titre subsidiaire, annuler ou réduire le montant des amendes infligées dans la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

90      Dans la troisième série d’affaires (affaires T‑438/12 à T‑441/12), les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la lettre du 25 juillet 2012 ;

–        ordonner à la Commission de produire certains documents ;

–        condamner la Commission aux dépens.

91      Dans toutes les affaires, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

I –  Sur la première série d’affaires

A –  Moyens relatifs à la participation des requérantes à l’infraction (affaires T‑426/10 à T‑429/10)

92      Le premier moyen présenté dans la première série d’affaires ainsi que le deuxième moyen présenté dans l’affaire T‑427/10 sont relatifs à la contestation par les requérantes des conditions dans lesquelles la Commission a considéré que leur responsabilité devait être engagée en raison de leur participation à l’infraction unique et continue caractérisée dans la décision attaquée.

93      Ces moyens sont présentés à titre principal et tendent à l’annulation de la décision attaquée.

1.     Observations liminaires

a)     Résumé des arguments des parties

94      Dans l’affaire T‑426/10, MRT conteste toute imputation de responsabilité. Elle estime en effet ne devoir répondre ni du comportement de Trenzas y Cables ni de celui de Tycsa PSC. Par ailleurs, selon elle, la Commission a considéré à tort qu’elle constituait une entité économique unique avec GSW, Trenzas y Cables et Tycsa PSC.

95      Dans l’affaire T‑427/10, TQ conteste également sa responsabilité. Dans le cadre du premier moyen, elle fait valoir qu’elle n’a pas participé au club Espan͂a. Par son deuxième moyen, elle conteste faire partie d’une entité économique comprenant les autres requérantes.

96      Dans l’affaire T‑428/10, Tycsa PSC conteste seulement que GSW ait pu exercer une influence déterminante sur la conduite de ses propres affaires.

97      Dans l’affaire T‑429/10, GSW conteste, d’une part, avoir exercé une influence déterminante sur la conduite des affaires des autres requérantes et, d’autre part, pouvoir être considérée comme le successeur de Trenzas y Cables de Acero.

98      La Commission soutient que l’ensemble de ces arguments doit être rejeté.

b)     Historique de la constitution des requérantes et rappel des motifs retenus dans la décision attaquée pour leur imputer leur participation à l’infraction

99      Il est constant entre les parties et il ressort également des considérants 38 à 40 et 734 à 762 de la décision attaquée ainsi que de la lettre du 25 juillet 2012 que les quatre requérantes sont des sociétés du groupe Celsa, détenu, à la date de l’adoption de la décision attaquée, par M. Rub. M. Rub. est décédé le 17 novembre 2011, soit postérieurement à l’introduction de la première série d’affaires et pendant l’examen par la Commission de la deuxième demande d’appréciation de leur capacité contributive présentée par les requérantes. Le patrimoine de M. Rub. a été transmis par héritage à ses quatre enfants à parts égales.

100    Le groupe Celsa comprend des entreprises actives en Espagne dans le domaine de la sidérurgie, en particulier mais non exclusivement dans la production et la vente d’APC. Ces sociétés constituent le « périmètre espagnol » de ce groupe (ou « Celsa Spain »). Le périmètre espagnol du groupe Celsa comprend dès lors les quatre requérantes ainsi que plusieurs autres sociétés, dont des actionnaires personnes morales des quatre requérantes. Le groupe Celsa comprend par ailleurs des entreprises actives dans les pays nordiques (« Celsa Nordic »), au Royaume-Uni (« Celsa UK ») et en Pologne (« Celsa Huta Ostrowiec »).

101    Trenzas y Cables de Acero est la société historique du groupe et sa constitution remonte au 17 juillet 1951.

102    Le 29 décembre 1986, Trenzas y Cables de Acero a fondé TQ. La Commission reproche à TQ d’avoir participé directement au club Espan͂a à partir du 15 décembre 1992.

103    Les requérantes n’ayant pas été en mesure de fournir de renseignements à la Commission en ce qui concerne la propriété du capital de TQ avant le 19 octobre 1996 (date à laquelle Trenzas y Cables de Acero, qui avait fusionné, le 22 juin 1996, avec Nueva Montaña Quijano Siderúrgica, une autre société du groupe Celsa, a donné naissance à GSW) et les requérantes ayant indiqué que, à la date de sa création, GSW détenait 90,61 % du capital social de TQ, la Commission a présumé que Trenzas y Cables de Acero contrôlait également TQ entre le 15 décembre 1992 et le 19 octobre 1996.

104    Le 13 juin 1993, Trenzas y Cables de Acero a créé Trenzas y Cables. Cette dernière a produit et a commercialisé de l’APC jusqu’au 26 mars 1998. À cette date, Trenzas y Cables a créé Tycsa PSC, à laquelle elle a transféré ses activités de production d’APC. En mars 2002, Trenzas y Cables a également transféré ses activités de vente d’APC à Tycsa PSC. Enfin, le 27 décembre 2002, Trenzas y Cables a fusionné avec Riviere, une autre société du groupe Celsa, l’ensemble issu de la fusion étant absorbé par Trefilerías Moreda, appartenant elle aussi au groupe Celsa. L’entité issue de cette fusion-absorption a pris la dénomination de MRT.

105    La Commission reproche également à Tycsa PSC d’avoir participé à l’infraction, en ce qu’elle produisait l’APC commercialisé par Trenzas y Cables, puis en assumant les activités de production et de vente d’APC, du 26 mars 1998 au 19 septembre 2002. Selon la Commission, Tycsa PSC doit donc répondre de l’infraction pour toute cette période.

106    Enfin, la Commission considère que Trenzas y Cables de Acero, puis GSW, ont exercé une influence déterminante sur leurs filiales depuis le début de leur participation à l’infraction. La Commission considérant également que GSW a succédé à Trenzas y Cables de Acero, elle estime que GSW doit répondre de l’infraction pour la période allant du 15 décembre 1992 au 19 septembre 2002.

107    La Commission considère par ailleurs que les quatre requérantes constituent une entité économique unique.

2.     Principes applicables à l’établissement des infractions ainsi qu’à la charge et à l’administration de la preuve

108    Selon une jurisprudence constante en matière de charge de la preuve, d’une part, il incombe à la partie ou à l’autorité qui allègue une violation du droit de la concurrence d’en apporter la preuve en établissant, à suffisance de droit, les faits constitutifs d’une infraction et, d’autre part, il appartient à l’entreprise invoquant le bénéfice d’un moyen de défense contre une constatation d’infraction d’apporter la preuve que les conditions d’application de ce moyen de défense sont remplies, de sorte que ladite autorité devra alors recourir à d’autres éléments de preuve (arrêt du 16 novembre 2006, Peróxidos Orgánicos/Commission, T‑120/04, EU:T:2006:350, point 50 ; voir également, en ce sens, arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C‑185/95 P, EU:C:1998:608, point 58, et du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 78). La durée de l’infraction est un élément constitutif de la notion d’infraction au titre de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, élément dont la charge de la preuve incombe, à titre principal, à la Commission (arrêts du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T‑43/92, EU:T:1994:79, point 79, et du 16 novembre 2006, Peróxidos Orgánicos/Commission, T‑120/04, EU:T:2006:350, point 51).

109    Cette répartition de la charge de la preuve est toutefois susceptible de varier dans la mesure où les éléments factuels qu’une partie invoque peuvent être de nature à obliger l’autre partie à fournir une explication ou une justification, faute de quoi il est permis de conclure que la preuve a été apportée (voir, en ce sens, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 79, et du 16 novembre 2006, Peróxidos Orgánicos/Commission, T‑120/04, EU:T:2006:350, point 53).

110    S’agissant des moyens de preuve pouvant être retenus par la Commission, le principe qui prévaut en droit de la concurrence est celui de la libre administration des preuves (arrêts du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C‑407/04 P, EU:C:2007:53, point 63, et du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, EU:T:2004:221, point 273). L’interdiction de participer à des pratiques et à des accords anticoncurrentiels ainsi que les sanctions que les contrevenants peuvent encourir étant notoires, il est en effet usuel que les activités que ces pratiques et ces accords comportent se déroulent de manière clandestine, que les réunions se tiennent secrètement, le plus souvent dans un pays tiers, et que la documentation qui y est afférente soit réduite au minimum. Même si la Commission découvre des pièces attestant de manière explicite une prise de contact illégitime entre des opérateurs, telles que les comptes rendus d’une réunion, celles-ci ne seront normalement que fragmentaires et éparses, de sorte qu’il se révèle souvent nécessaire de reconstituer certains détails par des déductions. Dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation du droit de la concurrence (arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, points 55 à 57). De tels indices et coïncidences permettent de révéler non seulement l’existence de comportements ou d’accords anticoncurrentiels, mais également la durée d’un comportement anticoncurrentiel continu et la période d’application d’un accord conclu en violation du droit de la concurrence (arrêt du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C‑113/04 P, EU:C:2006:593, point 166).

111    Il est nécessaire que la Commission fasse état de preuves précises et concordantes pour fonder la ferme conviction que l’infraction a été commise (voir arrêt du 6 juillet 2000, Volkswagen/Commission, T‑62/98, EU:T:2000:180, points 43 et 72 et jurisprudence citée ; arrêt du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, EU:T:2005:367, point 217). Toutefois, chacune des preuves apportées par la Commission ne doit pas nécessairement répondre à ces critères par rapport à chaque élément de l’infraction. Il suffit, en effet, que le faisceau d’indices invoqué par l’institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence (arrêts du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, EU:T:2004:221, point 180, et du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, EU:T:2005:367, point 218 ; voir également, en ce sens, arrêt du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, dit « PVC II », T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, EU:T:1999:80, points 768 à 778). En ce qui concerne la durée de l’infraction, la jurisprudence exige que, en l’absence d’éléments de preuve susceptibles d’établir directement la durée d’une infraction, la Commission se fonde, au moins, sur des éléments de preuve se rapportant à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon qu’il puisse être raisonnablement admis que cette infraction s’est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises (arrêts du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C‑113/04 P, EU:C:2006:593, point 169 ; du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T‑43/92, EU:T:1994:79, point 79, et du 16 novembre 2006, Peróxidos Orgánicos/Commission, T‑120/04, EU:T:2006:350, point 51).

112    S’agissant de la valeur probante qu’il convient d’accorder aux différents éléments de preuve, il convient de souligner que le seul critère pertinent pour apprécier les preuves librement produites réside dans leur crédibilité (arrêt du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C‑407/04 P, EU:C:2007:53, point 63 ; voir, également, arrêts du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, EU:T:2004:218, point 84 et jurisprudence citée, et du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, EU:T:2004:221, point 273 et jurisprudence citée). Selon les règles généralement applicables en matière de preuve, la crédibilité et, partant, la valeur probante d’un document, dépend de son origine, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et de son contenu (arrêt du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, EU:T:2000:77, point 1053 ; conclusions du juge Vesterdorf faisant fonction d’avocat général dans l’affaire Rhône-Poulenc/Commission, T‑1/89, EU:T:1991:38). Il convient, notamment, d’accorder une grande importance à la circonstance qu’un document a été établi en liaison immédiate avec les faits (arrêt du 11 mars 1999, Ensidesa/Commission, T‑157/94, EU:T:1999:54, point 312) ou par un témoin direct de ces faits (voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, EU:T:2004:221, point 207). Les documents dont il résulte que des contacts ont eu lieu entre plusieurs entreprises et que celles-ci ont précisément poursuivi le but d’éliminer par avance l’incertitude relative au comportement futur de leurs concurrents démontrent, à suffisance de droit, l’existence d’une pratique concertée (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission, 40/73 à 48/73, 50/73, 54/73 à 56/73, 111/73, 113/73 et 114/73, EU:C:1975:174, points 175 et 179). En outre, les déclarations allant à l’encontre des intérêts du déclarant doivent, en principe, être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables (voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, EU:T:2004:221, points 207, 211 et 212).

113    Par ailleurs, il a été jugé de manière constante que le fait de communiquer des renseignements à ses concurrents en vue de préparer un accord anticoncurrentiel suffisait à prouver l’existence d’une pratique concertée au sens de l’article 101 TFUE (arrêts du 5 décembre 2013, Solvay/Commission, C‑455/11 P, non publié, EU:C:2013:796, point 40 ; du 6 avril 1995, Trefilunion/Commission, T‑148/89, EU:T:1995:68, point 82, et du 8 juillet 2008, BPB/Commission, T‑53/03, EU:T:2008:254, point 178 ).

114    Enfin, il importe de rappeler que le rôle du juge saisi d’un recours dirigé contre une décision de la Commission constatant l’existence d’une infraction au droit de la concurrence et infligeant des amendes à ses destinataires consiste à apprécier si les éléments de preuve dont la Commission fait état dans sa décision sont suffisants pour établir l’existence de l’infraction (arrêt du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, EU:T:2004:221, points 174 et 175 ; voir également, en ce sens, arrêt du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, dit « PVC II », T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, EU:T:1999:80, point 891). L’existence d’un doute dans l’esprit du juge doit profiter aux destinataires de la décision, de sorte que le juge ne peut pas conclure que la Commission a établi l’existence de l’infraction en cause à suffisance de droit si un doute subsiste encore dans son esprit sur cette question (arrêts du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, EU:T:2004:221, point 177, et du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, EU:T:2005:367, point 215). En effet, dans cette dernière situation, il est nécessaire de tenir compte du principe de la présomption d’innocence, tel qu’il résulte notamment de l’article 6, paragraphe 2, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), lequel fait partie des droits fondamentaux qui, selon la jurisprudence de la Cour, par ailleurs réaffirmée par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, sont protégés dans l’ordre juridique de l’Union. Eu égard à la nature des infractions en cause ainsi qu’à la nature et au degré de sévérité des sanctions qui s’y rattachent, le principe de la présomption d’innocence s’applique, notamment, aux procédures relatives à des violations du droit de la concurrence susceptibles d’aboutir à la prononciation d’amendes ou d’astreintes (arrêts du 8 juillet 1999, Hüls/Commission, C‑199/92 P, EU:C:1999:358, points 149 et 150 ; Montecatini/Commission, C‑235/92 P, EU:C:1999:362, points 175 et 176, et du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, EU:T:2005:367, point 216).

3.     En ce qui concerne la question de savoir dans quelle mesure les quatre requérantes peuvent être considérées comme une unité économique

a)     Observations liminaires

115    Dans la décision attaquée, la Commission a indiqué, à plusieurs reprises, que les quatre requérantes constituaient une seule et même entité économique, c’est-à-dire une seule entreprise au sens du droit de la concurrence. Ainsi, au considérant 746 de la décision attaquée, la Commission a relevé que TQ, durant toute la durée de l’infraction, avait fait partie du « groupe GSW » et que les entités « GSW/Tycsa/Celsa », d’une part, et TQ, d’autre part, avaient été perçues comme une unique entreprise par les autres participants au club Espan͂a, à laquelle des quotas globaux avaient été attribués. Quant au terme « Tycsa », il est employé dans la décision attaquée et dans ses annexes pour désigner indifféremment GSW, Trenzas y Cables de Acero, c’est-à-dire le prédécesseur de GSW, Trenzas y Cables, c’est-à-dire le prédécesseur de MRT, ou encore Tycsa PSC ainsi que TQ. Enfin, les raisons pour lesquelles la Commission considère que GSW, Trenzas y Cables (devenue MRT), Tycsa PSC et TQ constituaient une unité économique sont indiquées plus en détail aux considérants 748, 751, 752 et 755 à 760 de la décision attaquée.

116    En premier lieu, il convient d’observer d’emblée que la Commission n’a pas tiré toutes les conséquences qu’elle aurait pu déduire de sa constatation selon laquelle les quatre requérantes constituaient une unique entité économique ayant participé à l’infraction. En effet, ainsi qu’il a été rappelé aux points 99 à 106 ci-dessus, chacune des requérantes a été sanctionnée de façon distincte en fonction de sa participation propre à l’infraction. Les quatre requérantes, en revanche, contestent chacune l’existence d’une unité économique entre elles.

117    En deuxième lieu, il convient également de relever que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas toujours distingué entre les quatre sociétés requérantes, lesquelles peuvent être collectivement ou chacune indifféremment désignées par le terme « Tycsa » tant dans la décision attaquée que dans les annexes de celle-ci (voir considérant 34 de la décision attaquée).

118    En troisième lieu, les requérantes soutiennent que la participation de chacune d’entre elles n’est pas suffisamment établie. Elles ont ainsi présenté quatre recours distincts, dans lesquels elles indiquent poursuivre des intérêts propres, sinon divergents.

119    Ainsi, la critique des arguments avancés par la Commission dans la décision attaquée pour caractériser l’existence d’une unité économique entre les quatre requérantes fait l’objet de la troisième branche du premier moyen et des quatre premières branches du deuxième moyen de TQ (affaire T‑427/10), du premier moyen de Tycsa PSC (affaire T‑428/10), de la seconde branche du premier moyen de MRT (affaire T‑426/10) ainsi que de la première branche du premier moyen de GSW (affaire T‑429/10).

120    Il convient de préciser que les requérantes contestent leur appartenance à une unité économique par deux séries d’arguments. La première série d’arguments est relative à des « considérations supplémentaires » mises en avant par la Commission dans la décision attaquée. Ces arguments sont présentés à l’identique par TQ (affaire T‑427/10), Tycsa PSC (affaire T‑428/10) et GSW (affaire T‑429/10). Le Tribunal estime opportun d’examiner d’abord ces arguments transversaux, relatifs aux « considérations supplémentaires » qui figurent dans la décision attaquée.

121    La seconde série d’arguments présentés par les quatre requérantes relatifs à l’existence d’une unité économique vise à renverser la présomption d’influence déterminante exercée par GSW sur Trenzas y Cables (devenue MRT), Tycsa PSC et TQ et par Trenzas y Cables (devenue MRT) sur Tycsa PSC. Ces derniers arguments, qui ne sont pas sans incidence sur la caractérisation d’une unité économique entre les sociétés requérantes, seront examinés ci-après, dans les parties du présent arrêt consacrées à la situation particulière de chaque requérante.

b)     Arguments des parties

 En ce qui concerne la perception des concurrents selon laquelle les quatre requérantes constituaient une seule entité économique

122    Dans la troisième branche du premier moyen et la quatrième branche du deuxième moyen qu’elle soulève, TQ soutient que l’éventualité de la perception par les concurrents d’elle-même et de « Tycsa » comme constituant un groupe unique est sans incidence sur la question de savoir si elle a personnellement participé à l’infraction. Dans la troisième branche du premier moyen qu’elle soulève, Tycsa PSC estime également que la Commission ne pouvait se fonder sur la perception des autres participants au cartel. GSW présente la même argumentation dans la première branche du premier moyen qu’elle soulève.

123    Ainsi, TQ, Tycsa PSC et GSW estiment que la perception par les autres participants au cartel selon laquelle certaines sociétés constituaient un groupe unique, désigné, le cas échéant, sous les noms de « Tycsa », « Celsa » ou « GSW », ne saurait suffire à établir l’existence d’une unité économique entre ces sociétés. D’une part, chacune des sociétés détenues par GSW aurait eu ses propres clients et aurait mené sa politique commerciale en toute indépendance. D’autre part, la simple impression d’un tiers, tel M. Par., qui a agrégé les parts des différentes entreprises appartenant à GSW, ne saurait tenir lieu de faits concrets dont la Commission doit rapporter la preuve.

124    La Commission conteste cette argumentation.

 En ce qui concerne le chevauchement du personnel employé par les requérantes

125    Dans la première branche du deuxième moyen qu’elle soulève, TQ conteste les appréciations de la Commission selon lesquelles le chevauchement du personnel des sociétés du groupe (GSW, Tycsa PSC et elle-même) démontre l’existence d’une entité économique constituée par ces sociétés. Une argumentation identique est développée par Tycsa PSC dans la troisième branche du premier moyen qu’elle soulève. GSW reprend ces mêmes arguments dans la première branche du premier moyen qu’elle soulève.

126    Premièrement, selon la Commission, M. Gra. aurait été transféré de TQ, où il aurait travaillé depuis le 30 avril 2000, à Tycsa PSC en mars 2002, tout en continuant d’exercer des fonctions au sein de TQ. À cet égard, TQ, Tycsa PSC et GSW contestent que M. Gra. ait continué à travailler pour TQ, son transfert coïncidant avec la reprise par Tycsa PSC des activités de commercialisation exercées jusque-là par Trenzas y Cables.

127    Deuxièmement, selon la Commission, Tycsa PSC et TQ auraient eu le même directeur général, M. Pue., de la fin de l’année 2001 jusqu’au début de l’année 2003, et le même directeur des ventes, M. dLM., de février 2002 au début de l’année 2003. À cet égard, TQ, Tycsa PSC et GSW soutiennent que ce chevauchement n’a duré qu’une année sur les dix retenues comme période infractionnelle et qu’il s’expliquait par une baisse de l’activité de TQ ayant conduit MM. Pue. et dLM. à chercher de nouveaux horizons professionnels.

128    Troisièmement, selon la Commission, M. dCo. aurait représenté GSW, unique actionnaire de TQ, au sein de cette dernière entre 2001 et 2004. À cet égard, TQ, Tycsa PSC et GSW font valoir que M. dCo. n’a pas exercé de fonction exécutive ni représenté TQ à l’égard de tiers et que, à compter de l’année 2000, GSW était devenue un actionnaire minoritaire de TQ.

129    Quatrièmement, selon la Commission, certains employés de Trenzas y Cables, dont Mme VGy., MM. Dem., Cub. et dLH., auraient été transférés à Tycsa PSC à la fin du mois de février 2002. À cet égard, Tycsa PSC et GSW indiquent qu’il s’agit du personnel des ventes de Trenzas y Cables, lequel a été transféré de cette dernière à Tycsa PSC en même temps que l’activité correspondante. Ce transfert, toutefois, ne démontrerait pas l’existence de personnel commun à ces sociétés, puisque ces employés n’y auraient pas simultanément exercé leurs activités.

130    La Commission conteste cette argumentation.

 Sur la pertinence du fait que GSW était l’administrateur unique de TQ, de Trenzas y Cables et de Tycsa PSC

131    Dans le cadre de la deuxième branche du deuxième moyen qu’elle soulève, TQ conteste la pertinence du fait que GSW a été son administrateur unique. Dans la première branche du premier moyen qu’elle soulève, Tycsa PSC présente le même argument en ce qui la concerne. Dans la première branche du premier moyen qu’elle soulève, GSW présente les mêmes arguments.

132    Ainsi, le fait que GSW ait été administrateur unique de Trenzas y Cables (entre 1997 et 2002), de Tycsa PSC (entre 1998 et 2002) et de TQ (entre 1997 et 2002) serait dépourvu de pertinence. En effet, cette situation résulterait de la composition du capital de ces sociétés et les pouvoirs de décision détenus par GSW auraient été délégués aux directeurs généraux de chacune d’entre elles, ce qui serait établi par des déclarations sous serment rédigées par lesdits directeurs généraux.

133    La Commission conteste cette argumentation.

 Sur les conséquences de la répartition de la production et des ventes d’APC entre TQ et Tycsa PSC

134    Dans le cadre de la troisième branche du deuxième moyen qu’elle soulève, TQ soutient que c’est à tort que, au considérant 42 de la décision attaquée, la Commission a estimé que le fait que, entre 1998 et 2003, d’une part, elle avait concentré ses ventes d’APC sur le marché national et, d’autre part, elle s’était spécialisée dans la production de câble et avait acheté le toron nécessaire à Tycsa PSC suffisait à prouver son appartenance à une entité économique.

135    La Commission conteste cette argumentation.

 En ce qui concerne l’argument tiré par la Commission de ce qu’une réunion serait intervenue à Barcelone entre Trenzas y Cables et Nedri dans les locaux de GSW

136    S’agissant d’une réunion intervenue à Barcelone entre Trenzas y Cables et Nedri dans les locaux de GSW, Tycsa PSC, dans la troisième branche du premier moyen qu’elle soulève, soutient que GSW n’avait pas de locaux à Barcelone et qu’aucun représentant de GSW n’a assisté à cette réunion.

137    GSW, dans la première branche du premier moyen qu’elle soulève, s’agissant de cette même réunion, soutient également qu’elle n’avait pas de locaux à Barcelone et qu’aucun de ses représentants n’a assisté à cette réunion. Il s’agirait donc d’une réunion intervenue entre Trenzas y Cables et Nedri au siège social de Tycsa PSC.

138    La Commission conteste cette argumentation.

c)     Appréciation du Tribunal

 Existence de liens structurels entre les quatre requérantes

139    Sans qu’à ce stade il soit encore nécessaire de se prononcer sur la question de savoir s’ils permettent de considérer que les conditions d’application de la présomption d’exercice d’une influence déterminante sont réunies en l’espèce, il convient tout d’abord de rappeler qu’il existe des liens de propriété entre les quatre requérantes, lesquels ne sont pas contestés entre les parties.

140    À cet égard, TQ a été créée par Trenzas y Cables de Acero. Si TQ a déclaré ne pas être en mesure de fournir d’informations en ce qui concerne la propriété de son capital avant la constitution de GSW, et sans qu’il soit nécessaire, à ce stade, de se prononcer sur les arguments relatifs à la succession entre Trenzas y Cables de Acero et GSW, il est en revanche constant que le capital de TQ a été détenu à 90,61 % par GSW entre le 16 octobre 1996 et le 16 octobre 1997, puis à 100 % entre le 16 octobre 1997 et le 25 décembre 2000. Pour la période allant du 25 décembre 2000 jusqu’à la fin de l’infraction, il est constant que GSW est devenue un actionnaire minoritaire de TQ, dont elle ne détenait plus que 45 % du capital social. Toutefois, les deux autres actionnaires de TQ étaient alors deux autres sociétés du groupe Celsa (voir point 30 ci-dessus) et il est constant que GSW a exercé le rôle d’administrateur unique de TQ, même si les parties s’opposent sur les conséquences qu’il convient de tirer de cette circonstance. Ainsi, TQ n’a cessé de faire partie du groupe Celsa durant la totalité de la période infractionnelle et, à tout le moins à compter du 16 octobre 1996, date de la constitution de GSW, elle a été contrôlée à plus de 90 % par des sociétés appartenant au groupe Celsa.

141    Trenzas y Cables a été créée le 10 juin 1996 par Trenzas y Cables de Acero, qui en détenait la totalité du capital. Durant toute la période infractionnelle, Trenzas y Cables a été détenue à 100 % par Trenzas y Cables de Acero, puis, à compter de l’absorption de celle-ci, le 16 octobre 1996, ayant donné lieu à la création de GSW, par cette dernière. MRT, elle-même toujours détenue à 100 % par GSW, est considérée par la Commission comme le successeur de Trenzas y Cables.

142    Tycsa PSC a été détenue à 100 % par Trenzas y Cables (devenue MRT) depuis sa création par cette dernière, le 26 mars 1998, jusqu’à la fin de l’infraction. Elle a donc également été indirectement détenue à 100 % par GSW durant toute cette période.

143    Ainsi, force est de constater, et sans qu’il soit besoin à ce stade de se prononcer sur les arguments des parties relatives à la succession de GSW à Trenzas y Cables de Acero, d’une part, et à celle de MRT à Trenzas y Cables, d’autre part, que les quatre requérantes ont ainsi été unies par des liens structurels stables et étroits durant toute la période de l’infraction, ce qui est de nature à constituer un indice de leur intégration économique.

144    Cette intégration est encore renforcée par la circonstance, non contestée par les requérantes, que GSW a été administrateur unique de Trenzas y Cables (entre 1997 et 2002), de Tycsa PSC (entre 1998 et 2002) et de TQ (entre 1997 et 2002). Les requérantes, en effet, se bornent à contester la pertinence de cette circonstance, en faisant valoir que chaque société s’est comportée de façon autonome, mais non la réalité de ce pouvoir de contrôle détenu par GSW sur les trois autres sociétés.

145    En ce qui concerne l’argument présenté par les requérantes selon lequel, en dépit de la structure de leur actionnariat et de l’identité de leur administrateur unique, Trenzas y Cables, Tycsa PSC et TQ auraient adopté un comportement autonome sur le marché, force est de constater que cet argument est insuffisamment étayé, les requérantes se bornant à produire à cet effet des attestations de leurs directeurs généraux selon lesquelles les pouvoirs exécutifs au sein de leur société leur auraient été délégués par GSW. Cet argument, même en admettant la crédibilité de telles attestations, au demeurant contestée par la Commission, démontre néanmoins que la compétence de principe, puisqu’elle a pu être déléguée, appartenait à GSW, ce qui est un indice supplémentaire de l’intégration économique des quatre requérantes.

 Perception des requérantes par les autres participants comme constituant une seule entité économique

146    Les requérantes estiment que la perception par les autres participants au cartel selon laquelle elles constituaient un groupe unique, désigné, le cas échéant, sous les noms de « Tycsa », « Celsa » ou « GSW », ne saurait suffire à établir l’existence d’une unité économique entre ces sociétés. D’une part, chacune des sociétés détenues par GSW aurait eu ses propres clients et aurait mené sa politique commerciale en toute indépendance. D’autre part, la simple impression d’un tiers, tel M. Par., qui a agrégé les parts des différentes entreprises appartenant à GSW, ne saurait tenir lieu de faits concrets, dont la Commission doit rapporter la preuve.

147    Au contraire de ce que soutiennent les requérantes, il convient de prendre en compte la perception commune de leurs concurrents selon laquelle elles constituaient une entité économique et un seul et même participant au cartel.

148    En effet, en premier lieu, cette perception commune n’est pas sérieusement contestée par les requérantes et elle est suffisamment établie dans les annexes de la décision attaquée, lesquelles reproduisent le contenu des éléments de preuve recueillis par la Commission auprès de plusieurs participants au cartel.

149    Premièrement, à titre d’exemples non exhaustifs, il ressort des annexes de la décision attaquée qu’il est fait référence de manière usuelle aux requérantes sous la dénomination commune de « Tycsa » ou de « Celsa » (par exemple, réunion du club Espan͂a du 16 mars 1993), ou encore de « G[SW] » (par exemple, réunions du club Espan͂a des 15 mai 1998, 12 novembre 1999 et 1er juin 2000), dans les notes établies par M. Par. pour Emesa, produites par ArcelorMittal España à l’appui de sa demande de clémence. ITC fait elle aussi référence à « Tycsa » dans sa demande de clémence et dans sa déclaration d’entreprise. Des documents saisis dans les locaux de Nedri font également référence à « Tycsa » pour les années 1993, 1997, 1999 et 2001. Nedri fait référence à « Tycsa » dans sa déclaration du 23 octobre 2002. La présence de « Tycsa » est également mentionnée dans les notes de DWK et dans les notes d’ITC du 12 mars 1996. Les principaux membres du cartel faisaient donc, de manière usuelle, référence aux requérantes sous des désignations générales, « Tycsa » étant la plus courante d’entre elles.

150    Deuxièmement, il suit de ce qui précède que les discussions sur les quotas avaient lieu, dans le cadre des différents accords nationaux, régionaux ou européens, entre « Tycsa » ou GSW, d’une part, et ses concurrents, d’autre part, les requérantes n’étant pas mentionnées spécifiquement, à l’exception de quelques documents relatifs au club Espan͂a, dans lesquels TQ est mentionnée de manière distincte. Toutefois, dans les cas dans lesquels TQ est distinguée de « Tycsa », les données qui les concernent sont le plus souvent consolidées (taken together). Il en est ainsi, à titre non exhaustif, des données échangées lors des réunions du club Espan͂a des 15 décembre 1992 et de novembre 1995 (annexe 3 de la décision attaquée).

151    Troisièmement, il ressort également des annexes de la décision attaquée que M. dCo. représentait « Tycsa » dans de nombreuses réunions des différents éléments géographiques du cartel et, plus précisément, du considérant 39 ainsi que de l’annexe 1 de la décision attaquée que l’intéressé a ainsi représenté les quatre requérantes.

152    En second lieu, cette perception partagée par plusieurs membres du cartel est un indice particulièrement probant de l’intégration économique des requérantes, lesquelles ont ainsi pu revendiquer et bénéficier de quotas de ventes qui leur ont été attribués collectivement. Il convient d’observer, s’agissant des éléments de preuve sur lesquels la Commission s’est fondée pour établir la perception commune des membres du cartel à l’égard des requérantes, qu’il s’agit de documents pour la plupart contemporains des faits dont ils font état, ce qui leur confère une valeur probante élevée (voir, à cet égard, la jurisprudence citée au point 112 ci-dessus).

153    Dès lors, contrairement à ce que prétendent les requérantes, il était tout à fait loisible à la Commission de se fonder sur cette perception subjective des autres participants au cartel, sans pour autant méconnaître les règles relatives à la charge de la preuve. En effet, s’il est vrai que, s’agissant de la question de la réalité de la participation d’une entreprise à une infraction, de simples impressions des concurrents peuvent s’avérer insuffisantes, il ressort, en revanche, de ce qui précède que l’ensemble des concurrents des requérantes les considéraient comme une unité économique et les ont traitées comme telle lors des négociations, ce qui constitue un indice supplémentaire en vue d’établir qu’elles se comportaient effectivement comme une seule entité économique.

 Personnel commun

154    Les requérantes contestent en outre certaines appréciations relatives au chevauchement du personnel employé par les quatre sociétés, faisant essentiellement valoir que ce serait à tort que la Commission a considéré que certains membres de leur personnel étaient simultanément employés par plusieurs d’entre elles, alors que, selon elles, il s’agissait plutôt de personnes successivement employées par l’une ou l’autre d’entre elles, les changements de société s’expliquant par des décisions personnelles des intéressés.

155    Ainsi, premièrement, s’agissant de M. Gra., les requérantes font valoir que l’intéressé a travaillé pour TQ exclusivement du 30 avril 2000 jusqu’au mois de mars 2002, date à partir de laquelle il a travaillé exclusivement pour Tycsa PSC, lorsque celle-ci a repris les activités de vente d’APC précédemment exercées par Trenzas y Cables. Les requérantes contestent ainsi que M. Gra. ait simultanément travaillé pour TQ et pour Tycsa PSC, mais ne nient pas que cette personne ait été employée par ces deux requérantes, son changement d’affectation coïncidant avec une nouvelle division du travail entre les sociétés du groupe. L’explication avancée par les requérantes est ainsi de nature à constituer un indice supplémentaire de l’intégration économique entre TQ, Tycsa PSC et Trenzas y Cables.

156    Deuxièmement, même si elles font valoir que ce chevauchement n’a duré qu’une année et s’expliquait par la baisse de l’activité de TQ, les requérantes ne contestent pas que Tycsa PSC et TQ aient partagé leur directeur général, M. Pue., de la fin de l’année 2001 jusqu’au début de l’année 2003, et leur directeur des ventes, M. dLM., de février 2002 au début de l’année 2003. Une telle communauté de directeurs constitue, à l’évidence, un indice de l’intégration économique entre TQ et Tycsa PSC. De plus, les requérantes expliquent que cette situation résultait d’une réallocation des ressources en personnel au sein du groupe, en fonction de l’activité de chaque société, ce qui constitue un indice supplémentaire de leur intégration économique.

157    Troisièmement, les requérantes ne contestent pas les appréciations relatives aux différentes fonctions assumées dans les diverses sociétés du groupe par M. dCo. décrites par la Commission au considérant 39 de la décision attaquée. Il convient de rappeler, à cet égard, qu’il résulte de la décision attaquée que M. dCo. représentait l’entité « Tycsa » lors de nombreuses réunions des différents éléments géographiques de l’entente (voir point 151 ci-dessus).

158    Quatrièmement, les requérantes ne contestent pas que certains employés de Trenzas y Cables, dont Mme VGy., MM. Dem., Cub. et dLH., aient été transférés à Tycsa PSC à la fin du mois de février 2002. À cet égard, elles reconnaissent qu’il s’agit du personnel des ventes de Trenzas y Cables, lequel a été transféré à Tycsa PSC en même temps que l’activité correspondante. Elles insistent, cependant, sur le fait que ces employés n’ont pas simultanément exercé leurs activités dans les deux sociétés. Toutefois, le fait que Mme VGy., MM. Dem., Cub. et dLH. aient successivement été employés par Trenzas y Cables, puis par Tycsa PSC, constitue un indice supplémentaire de l’intégration économique de Trenzas y Cables et de Tycsa PSC, l’affectation du personnel suivant ainsi la division du travail entre les différentes composantes du même groupe.

159    Ainsi, les requérantes ne contestent pas que certains des membres de leur personnel aient simultanément exercé des fonctions dans plusieurs d’entre elles et qu’une partie de leur personnel ait successivement été employée par elles, les transferts de personnel accompagnant les modifications de la répartition de leurs activités. Une telle circonstance constitue un indice supplémentaire de leur intégration économique.

 Répartition des activités de production et de vente d’APC entre les requérantes

160    Les requérantes font valoir que l’argument tiré par la Commission, au considérant 42 de la décision attaquée, de ce que, entre 1998 et 2003, d’une part, TQ a concentré ses ventes d’APC sur le marché national et, d’autre part, elle s’est spécialisée dans la production de câble et a acheté le toron nécessaire à Tycsa PSC ne suffit pas à prouver son appartenance à une entité économique.

161    Ce faisant, elles ne contestent pas l’existence d’une certaine division du travail entre elles. Ainsi, si elles contestent les conclusions qu’en tire la Commission, elles admettent pourtant que, entre 1998 et 2008, TQ a concentré ses ventes sur le marché national, s’est spécialisée dans la production de câble et a acheté à Tycsa PSC le toron qui lui était nécessaire. De même, il ressort de la décision attaquée et il est admis par les requérantes – qui en tirent argument pour expliquer les transferts de personnel – que, entre 1998 et mars 2002, les activités de production d’APC jusque-là exercées par Trenzas y Cables ont été transférées à Tycsa PSC, laquelle a été créée dans ce but. En mars 2002, les activités de vente de l’APC produit par Tycsa PSC, qui avaient jusque-là été conservées par Trenzas y Cables, ont également été transférées à la première. Enfin, pour tenter d’établir que chacune d’elles poursuivait des intérêts divergents, les requérantes font valoir que GSW produisait le fil machine, c’est-à-dire la matière première dont les autres requérantes avaient besoin pour produire de l’APC.

162    Certes, ainsi que le font valoir les requérantes, la spécialisation des tâches entre TQ et Tycsa PSC décrite au considérant 42 de la décision attaquée serait insuffisante à elle seule pour établir l’existence d’une unité économique entre les quatre requérantes. En revanche, la répartition des tâches entre les quatre requérantes et l’évolution de cette répartition démontre une stratégie cohérente d’optimisation des ressources de production et de vente d’APC de nature à constituer un indice supplémentaire de leur intégration économique.

 En ce qui concerne l’argument tiré par la Commission de ce qu’une réunion serait intervenue à Barcelone entre Trenzas y Cables et Nedri dans les locaux de GSW

163    S’agissant d’une réunion intervenue, selon la Commission, à Barcelone, entre Trenzas y Cables et Nedri dans les locaux de GSW, les requérantes soutiennent que GSW n’avait pas de locaux à Barcelone et qu’aucun représentant de GSW n’a assisté à cette réunion. Il s’agirait, selon elles, d’une réunion intervenue entre Trenzas y Cables et Nedri au siège social de Tycsa PSC.

164    Même en admettant la version des faits avancée par les requérantes, au demeurant non étayée, le fait qu’une réunion ait eu lieu entre des représentants de Trenzas y Cables et de Nedri dans les locaux de Tycsa PSC constitue en l’espèce un indice supplémentaire, bien qu’insuffisant à lui seul, en faveur de l’existence d’une unité économique entre Trenzas y Cables et Tycsa PSC.

 Appréciation globale de l’intégration des requérantes

165    L’examen des arguments présentés par les requérantes contre les « éléments supplémentaires » retenus par la Commission pour justifier son appréciation selon laquelle ces quatre sociétés constituaient une unité économique conduit à constater, tout d’abord, qu’elles admettent pour l’essentiel la matérialité des faits sur lesquels s’est fondée la Commission – à l’exception du « chevauchement du personnel » et de la réunion de Barcelone. Ainsi, elles se bornent, pour l’essentiel, à contester l’interprétation de ces circonstances proposée par la Commission dans la décision attaquée.

166    De plus, même dans les cas dans lesquels les requérantes contestent la réalité des faits retenus par la Commission, les faits alternatifs qu’elles avancent viennent au soutien de la thèse de la Commission, plutôt qu’ils ne l’infirment. En effet, il est de peu d’importance que certains membres du personnel des requérantes aient été employés successivement par plusieurs d’entre elles, dès lors que les requérantes elles-mêmes indiquent que ces transferts accompagnaient des transferts d’activité. De même, la circonstance que la réunion de Barcelone n’ait pas eu lieu dans les locaux de GSW démontre tout de même que les membres du personnel de Trenzas y Cables pouvaient recevoir les représentants de Nedri dans les locaux de Tycsa PSC.

167    Il résulte ainsi de ce qui précède que, durant toute la durée de l’infraction, des liens structurels stables ont existé entre les requérantes. Ainsi, TQ et Trenzas y Cables ont été créées par Trenzas y Cables de Acero et Tycsa PSC a été créée par Trenzas y Cables. Deux des sociétés requérantes détenaient les autres et les quatre requérantes étaient détenues par des sociétés appartenant toutes au groupe Celsa.

168    De plus, les quatre sociétés requérantes ont été perçues par les autres membres du cartel, dans toutes ses composantes géographiques (club Espan͂a, club Europe, club Italia), comme un seul concurrent, en particulier lors des discussions sur les ventes et à l’occasion des allocations de quotas.

169    En outre, le personnel des quatre requérantes leur était en partie commun, certaines personnes physiques étant simultanément employées par l’une des requérantes et exerçant des fonctions au sein des autres requérantes, d’autres personnes physiques travaillant à tour de rôle pour certaines des requérantes, en fonction des évolutions de la répartition entre elles de leurs activités de production et de vente d’APC, les trois filiales de GSW ayant tour à tour fabriqué et vendu de l’APC en fonction des différents marchés géographiques sur lesquels les requérantes opéraient.

170    De tels indices suffisent pour rendre plausibles les allégations de la Commission selon lesquelles les sociétés du groupe Celsa actives dans la production et la vente d’APC, dont les quatre requérantes, constituaient une seule entité économique, c’est-à-dire une entreprise au sens de l’article 101 TFUE. De ce constat découlent les cinq conséquences suivantes.

171    Premièrement, il ne saurait être fait grief à la Commission de demeurer en défaut de distinguer, dans chaque cas, entre les entités juridiques auxquelles renvoie le terme « Tycsa » dans la décision attaquée. La confusion de ces sociétés par les autres participants au cartel ayant rédigé les éléments de preuve sur lesquels la Commission s’est appuyée ont d’ailleurs, dans certains cas, rendu cette distinction impossible.

172    Deuxièmement, dans ces conditions, l’imputation de la responsabilité de l’infraction aux requérantes ayant contrôlé celles qui ont directement participé à l’infraction (GSW, s’agissant des trois autres requérantes, et MRT, s’agissant de Tycsa PSC) ne dépend pas exclusivement de la question de savoir si les conditions de la présomption d’exercice d’une influence déterminante sont réunies. Ces questions, néanmoins, seront examinées ci-après dans la partie du présent arrêt consacrée à l’examen de chaque recours.

173    Troisièmement, il est constant que, en raison de leur spécialisation géographique, chaque société peut ne pas avoir participé directement à tous les volets de l’entente. Ainsi, s’étant spécialisée dans les ventes sur son marché national, TQ n’a directement participé qu’au club Espan͂a. Toutefois, dès lors que les quatre requérantes peuvent être considérées comme une entreprise au sens de l’article 101 TFUE, la question de la connaissance par chacune de l’existence des éléments de l’infraction auxquels elle n’a pas directement participé ne saurait être déterminante, cette connaissance devant être considérée comme acquise en raison de l’intégration économique des requérantes.

174    Quatrièmement, il s’ensuit que les arguments identiques présentés par TQ dans la troisième branche du premier moyen et dans les quatre premières branches du deuxième moyen qu’elle soulève (affaire T‑427/10), par Tycsa PSC dans le cadre du premier moyen qu’elle soulève (affaire T‑428/10), par MRT dans le cadre de la seconde branche du premier moyen qu’elle soulève (affaire T‑426/10) ainsi que par GSW dans le cadre de la première branche du premier moyen qu’elle soulève (affaire T‑429/10) visant à contester les « éléments supplémentaires » retenus par la Commission pour caractériser l’existence d’une unité économique entre les quatre requérantes doivent être écartés.

175    Cinquièmement, il s’ensuit également que, sans qu’il soit besoin de statuer sur sa recevabilité, l’argument présenté pour la première fois lors de l’audience par les quatre requérantes et tendant à ce que leur soit appliqué le mode de calcul du plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 20, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, résultant de l’arrêt du 4 septembre 2014, YKK e.a./Commission (C‑408/12 P, EU:C:2014:2153), ne peut qu’être écarté. En effet, les circonstances de l’affaire ayant donné lieu audit arrêt ne sont manifestement pas comparables à celles de l’espèce. Alors que, en l’espèce, les requérantes sont issues de la création de différentes sociétés par répartition des actifs et opérations de fusion et d’absorption à l’intérieur du même groupe et constituent ensemble une unité économique ayant participé à l’infraction, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 4 septembre 2014, YKK e.a./Commission (C‑408/12 P, EU:C:2014:2153), en revanche, une filiale ayant commis seule l’infraction conservait une certaine autonomie permettant de l’individualiser après avoir été acquise par une autre entreprise, dont le début de la participation à l’infraction découlait de cette acquisition.

176    C’est à la lumière de l’ensemble de ces considérations qu’il convient d’apprécier le bien-fondé du surplus des arguments avancés par les requérantes visant à contester l’étendue de leur responsabilité.

4.     Premier et deuxième moyens soulevés par TQ (affaire T‑427/10), tirés d’erreurs de fait et de droit dans l’évaluation de sa participation aux comportements décrits dans la décision attaquée

177    Dans le cadre du premier moyen qu’elle soulève, TQ conteste la réalité de sa propre participation à l’infraction. Dans celui du deuxième moyen qu’elle soulève, dont une partie des arguments vient d’être examinée, elle nie faire partie d’une entité économique unique avec GSW, MRT et Tycsa PSC.

178    La Commission conteste l’ensemble de ces arguments.

a)     Sur le premier moyen soulevé par TQ (affaire T‑427/10), relatif à sa participation directe à l’infraction

179    Le premier moyen avancé par TQ se divise en trois branches. Dans le cadre de la première branche, celle-ci conteste avoir participé à certaines réunions du club Espan͂a. Dans le cadre de la deuxième branche, elle conteste avoir eu connaissance des autres dimensions de l’entente. Dans le cadre de la troisième branche, elle critique un certain nombre d’arguments retenus par la Commission pour établir sa participation à l’infraction.

 Sur la première branche du premier moyen soulevé par TQ, relative à sa participation directe aux réunions du club Espan͂a

180    Au considérant 742 de la décision attaquée, la Commission a considéré que TQ avait directement participé au cartel et, en particulier, au club Espan͂a, depuis le 15 décembre 1992 au plus tard et jusqu’au 19 septembre 2002.

 i) Année 1992

181    Dans la décision attaquée, la Commission considère que TQ a commencé à participer à l’infraction au plus tard lors d’une réunion intervenue le 15 décembre 1992. Il s’agit de la seule réunion de l’année 1992 à laquelle TQ aurait participé. TQ conteste l’existence même de cette réunion et, en tout état de cause, y avoir participé.

182    Aux considérants 490 et 492 de la décision attaquée, la Commission s’est fondée sur les notes de M. Par., un employé d’Emesa, pour établir que des contacts anticoncurrentiels avaient eu lieu en novembre et en décembre 1992 entre des sociétés du groupe « Tycsa » et Emesa. À cet égard, il convient de rappeler que les seules sociétés du groupe « Tycsa » qui existaient à cette époque étaient Trenzas y Cables de Acero et TQ. Les notes de M. Par. font ainsi état d’un contact au cours duquel les ventes réalisées par Trenzas y Cables de Acero, TQ et Emesa au cours des mois d’octobre et de novembre 1992, en Espagne et au Portugal, ont été comparées. Ces notes feraient référence à un système de compensation, ce qui impliquerait l’existence, à cette date, d’une répartition de quotas. TQ conteste la valeur probante des notes de M. Par.

183    Il résulte de l’annexe 4 de la décision attaquée que ces notes ont été transmises à la Commission à l’appui de la demande de clémence présentée par ArcelorMittal Espan͂a. Elles sont contemporaines des faits relatés et auto-incriminantes. La valeur probante d’un tel document est donc élevée. Par ailleurs, les notes relatives à cet échange anticoncurrentiel ont été fournies par l’un des deux participants. Dès lors, il ne saurait être fait grief à la Commission de ne pas avoir cherché à en corroborer la teneur, le seul autre participant susceptible d’apporter une telle corroboration étant, précisément, TQ qui conteste l’existence de ce contact.

184    Les autres critiques adressées par TQ à cet élément de preuve ne sont pas davantage concluantes.

185    En effet, premièrement, TQ se borne à relever qu’aucune liste des participants à la réunion n’a été établie, ce qui, à supposer cette circonstance exacte, est dénué de pertinence. En effet, dès lors que des échanges de données commerciales sensibles ont eu lieu entre Emesa, d’une part, et TQ et Trenzas y Cables de Acero, d’autre part, il importe peu que de tels échanges soient intervenus lors d’une réunion à laquelle des représentants des entreprises participant à l’infraction assistaient physiquement, la communication de telles données suffisant au contraire à caractériser l’infraction.

186    Deuxièmement, l’allégation selon laquelle M. dCo. ne travaillait pas pour TQ et ne pouvait la représenter est dépourvue de pertinence, dès lors que, dans la décision attaquée, la Commission ne s’est pas fondée sur le fait que M. dCo. avait représenté TQ lors de la réunion du 15 décembre 1992, mais sur le fait que des données propres à cette société avaient été communiquées à Emesa et prises en compte aux fins de la comparaison réalisée entre celle-ci, d’une part, et les sociétés du groupe « Tycsa », d’autre part. Or, ainsi qu’il a été constaté aux points 139 à 176 ci-dessus, c’est à juste titre que la Commission a estimé que les sociétés du groupe Celsa actives dans le domaine de la production et de la vente d’APC constituaient une unité économique.

187    Troisièmement, l’éventualité que M. Par. ait pu se procurer les informations relatives aux ventes de Trenzas y Cables de Acero et de TQ auprès des douanes espagnoles est peu crédible au regard de l’indication, figurant dans les notes prises par M. Par. lors de la réunion du 16 mars 1993, selon laquelle, entre « Celsa », le groupe auquel appartenait TQ, et Emesa/Galycas, il avait été « décidé de continuer comme en 1992 ». Une telle annotation ne peut que signifier que, en 1992, un mécanisme de concertation entre les deux groupes avait été mis en place.

188    Pour ces raisons, la participation de TQ au club Espan͂a à compter du 15 décembre 1992 doit être considérée comme établie.

 ii) Année 1993

189    Selon l’annexe 4 de la décision attaquée, le club Espan͂a a tenu treize réunions en 1993. « Tycsa » aurait participé à dix d’entre elles et TQ est mentionnée de façon distincte lors de cinq réunions. TQ conteste sa participation à ces cinq réunions, mais ne conteste pas les cinq autres réunions auxquelles « Tycsa » aurait participé.

–       Réunion « probable » du début de l’année 1993

190    TQ fait valoir que les notes de M. Par., qui ne mentionnent pas de listes de participants, ne peuvent suffire à établir qu’une réunion soit « probablement » intervenue au début de l’année 1993. À cet égard, il convient d’observer que, dans la décision attaquée, la Commission ne fait aucune allusion à une réunion qui se serait tenue avant le 16 mars 1993. En revanche, l’annexe 4 de la décision attaquée fait état des notes de M. Par. en date du 9 février 1993, ne comportant pas de liste de participants, mais évoquant une proposition d’allocation de quotas (en tonnes) entre « Tycsa », TQ et Emesa pour l’Espagne et le Portugal et une comparaison des quantités vendues par ces sociétés en janvier 1993.

191    Ces notes, dont la valeur probante est élevée (voir points 112 et 183 ci-dessus), suffisent à établir, en l’absence de tout élément contraire, l’existence d’un contact anticoncurrentiel au début du mois de février 1993 au cours duquel des données commerciales sensibles propres à TQ ont fait l’objet de discussions. Dès lors, la question de savoir si une réunion entre les protagonistes de ces échanges a été formellement organisée ou non est sans incidence sur la réalité de la participation de TQ à l’infraction. L’absence de liste des participants ne saurait donc être déterminante.

–       Notes d’Emesa des 9 février, 29 mars et du mois d’avril 1993

192    TQ conteste l’interprétation par la Commission des notes de M. Par. des 9 février, 29 mars et du mois d’avril 1993, lesquelles comportent des tableaux où figurent les ventes de cette requérante. Celle-ci fait valoir que ces notes ne comportent pas de liste de participants.

193    À cet égard, pour les raisons exposées aux points 185 et 191 ci-dessus, l’absence de liste de participants n’est nullement déterminante. En effet, d’une part, une telle absence ne prouve pas qu’aucune réunion ne soit intervenue. D’autre part, l’existence de contacts entre des entreprises visant à l’échange de données commerciales sensibles et à l’allocation de quotas et au suivi de cette répartition suffit à caractériser une infraction à l’article 101 TFUE, sans qu’il soit nécessaire que ces échanges interviennent dans le cadre d’une réunion formelle.

194    Or, les notes de M. Par. que TQ conteste la mentionnent toutes et font état d’une proposition d’allocation de quotas pour l’Espagne et le Portugal et d’une comparaison des quantités vendues en janvier 1993 (notes du 9 février 1993), d’une comparaison des ventes réalisées au cours du premier trimestre 1993 et d’une proposition d’allocation de quotas pour le deuxième trimestre 1993 (notes du 29 mars 1993, mentionnant une réunion à Barcelone à laquelle TQ, Trenzas y Cables de Acero et Emesa ont participé) ainsi que de tableaux retraçant les ventes réalisées en 1992 par Galycas, Emesa, Trenzas y Cables de Acero et TQ et la répartition des clients entre ces quatre sociétés (notes d’avril 1993).

195    Par ailleurs, TQ ne conteste pas les notes du 16 mars 1993, dans lesquelles il est fait référence à une allocation des marchés espagnol et portugais entre « Ensi » (c’est-à-dire le groupe dont faisaient alors partie Emesa et Galycas) et « Celsa » (c’est-à-dire le groupe dont fait partie TQ).

196    Ces éléments de preuve sont donc de nature à établir que TQ a poursuivi sa participation au club Espan͂a de février à avril 1993.

–       Réunions d’avril et de mai 1993

197    En premier lieu, TQ conteste que la Commission puisse lui reprocher d’avoir participé à la réunion du 20 avril 1993, mentionnée à l’annexe 4 de la décision attaquée, au motif que, d’une part, M. dCo., qui est mentionné dans la liste des participants, ne travaillait pas pour elle et, d’autre part, les discussions auraient porté sur les prix et les conditions générales de paiement, alors que, selon elle, elle ne pratiquait pas de politique générale de prix et que les conditions de paiement étaient négociées cas par cas avec ses clients.

198    À cet égard, l’allégation selon laquelle M. dCo. ne pouvait légalement la représenter doit être écartée comme étant dépourvue de pertinence, dès lors que TQ ne conteste pas que M. dCo. a travaillé pour différentes sociétés du groupe Celsa – dont, à l’époque, Trenzas y Cables de Acero, qui était sa société mère – et que, lors de cette réunion, les participants ont procédé à une comparaison des ventes réalisées notamment par TQ au premier trimestre 1993 ainsi qu’à une allocation de quotas pour le deuxième trimestre 1993 dont TQ a bénéficié.

199    Il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été indiqué au point 151 ci-dessus, TQ n’a apporté aucun élément de nature à infirmer les constatations de la Commission, étayées sur les nombreuses preuves mentionnées dans les annexes de la décision attaquée, selon lesquelles M. dCo. représentait « Tycsa » dans de nombreuses réunions des différents éléments géographiques du cartel. Or, ainsi qu’il a été indiqué aux points 151 et 168 ci-dessus, l’identification par les différents participants au cartel de M. dCo. en tant que représentant du groupe Celsa constitue l’un des indices permettant de conclure à l’intégration économique des requérantes. Dans ces conditions, il convient de constater que M. dCo., indépendamment de ses relations d’emploi avec TQ, représentait celle-ci aussi bien que Trenzas y Cables de Acero.

200    Enfin, l’allégation de TQ selon laquelle elle ne pouvait pas être intéressée par les discussions portant sur les prix et les conditions de paiement, dès lors qu’elle négociait cas par cas avec chaque client et ne disposait pas d’un tarif général ni de conditions de paiement générales, ne peut qu’être écartée également. En effet, à supposer que TQ n’ait pas été concernée par ce volet des discussions – ce que, au demeurant, elle se contente d’alléguer sans l’établir –, elle a pu bénéficier, en participant à ces échanges, d’informations commerciales sensibles concernant ses concurrents Emesa et Galycas.

201    En second lieu, TQ met en doute l’existence d’une réunion, mentionnée à l’annexe 4 de la décision attaquée, qui serait intervenue à la fin du mois de mai 1993. TQ fait valoir à cet égard que les notes de M. Par. sur lesquelles se fonde la Commission ne permettraient pas d’établir qu’une réunion s’est tenue, puisqu’elles ne comportent pas de liste des participants et font état de données provenant des douanes espagnoles. En outre, ni Trefinor ni Riviere, qui sont mentionnées dans les notes de M. Par., n’auraient exercé leurs activités dans le domaine de l’APC.

202    Il convient de rappeler que, pour les mêmes raisons que celles qui figurent aux points 185, 191 et 193 ci-dessus, l’absence de liste de participants dans les notes de M. Par. ne saurait démontrer l’absence de participation de TQ à un contact anticoncurrentiel.

203    TQ fait manifestement référence à l’indication, figurant à l’annexe 4 de la décision attaquée, selon laquelle, à la fin du mois de mai 1993, une revue détaillée des exportations de Trenzas y Cables de Acero, d’Emesa, de TQ, de Galycas, de Trefinor, de Trefilería Moreda et de Riviere a eu lieu au vu des données (en tonnes et en prix) compilées par les douanes espagnoles. De plus, selon les notes de M. Par. auxquelles cette indication renvoie, une comparaison entre les ventes réalisées et les quotas alloués a eu lieu pour Trenzas y Cables de Acero, Emesa, TQ et Galycas et une allocation de quotas a été décidée entre ces quatre sociétés.

204    Cependant, les circonstances alléguées par TQ ne permettent pas de remettre en cause la nature anticoncurrentielle des échanges relatés par M. Par. Premièrement, il est fort plausible que l’examen par les entreprises participant au club Espan͂a des données collectées par les douanes espagnoles réponde à un souci de vérification et de recoupement des déclarations faites par chacune de ces entreprises aux autres participants au cartel. Deuxièmement, il n’est pas surprenant que les données provenant des douanes mentionnent d’autres entreprises que les participants au cartel de l’APC – à supposer que les requérantes soient fondées à soutenir que Trefinor et Riviere n’étaient pas actives dans ce secteur, ce qu’elles n’établissent pas. Troisièmement, il résulte également des notes de M. Par. relatives à la fin du mois de mai 1993 qu’une comparaison entre les ventes réalisées et les quotas alloués pour les quatre premiers mois de 1993, d’une part, ainsi qu’une nouvelle allocation de quotas, d’autre part, ont eu lieu entre les quatre participants au club Espan͂a.

205    Il s’ensuit que la participation de TQ au club Espan͂a en avril et en mai 1993 doit être considérée comme établie.

 iii) Année 1994

206    Selon l’annexe 4 de la décision attaquée, le club Espan͂a a tenu neuf réunions en 1994. « Tycsa » aurait participé à sept d’entre elles et TQ est mentionnée de façon distincte lors de quatre réunions. TQ conteste ces quatre réunions, mais ne conteste pas les trois autres réunions auxquelles « Tycsa » aurait participé.

–       Réunion du 24 mai 1994

207    TQ conteste la valeur probante des notes de M. Par., sur lesquelles la Commission s’est fondée pour lui reprocher d’avoir participé à une réunion anticoncurrentielle dans les locaux de l’Asociación de trefiladores del acero (ATA), une association professionnelle, le 24 mai 1994. TQ fait valoir, en outre, que ces notes n’indiquent pas l’identité de la personne qui l’aurait représentée lors de cette réunion et que la participation aux réunions d’une association professionnelle ne constitue pas une infraction à l’article 101 TFUE.

208    Il convient de rappeler, tout d’abord, que les notes de M. Par. sont contemporaines des faits qu’elles relatent et qu’elles ont été transmises à la Commission, à l’appui d’une demande de clémence, par ArcelorMittal Espan͂a, pour qui elles étaient auto-incriminantes. La valeur probante de ce document est donc élevée (voir point 183 ci-dessus).

209    Il convient de relever, ensuite, que l’absence de mention du représentant de TQ à cette réunion n’est pas déterminante, dès lors que, d’une part, TQ ne conteste pas que « Tycsa » ait été présente et, d’autre part, lors de cette réunion, elle a bénéficié d’une allocation de quotas.

210    Enfin, bien que, certes, la participation aux réunions d’une association professionnelle ne constitue pas par elle-même une infraction à l’article 101 TFUE, une telle infraction est toutefois constituée lorsque, au cours de la réunion, les participants procèdent, comme l’a indiqué M. Par., à une comparaison de leurs ventes réalisées en 1993 et en 1994 et à une allocation de quotas pour l’Espagne. Dès lors, il convient d’écarter les allégations de TQ selon lesquelles sa participation au club Espan͂a n’est pas établie du fait qu’elle a assisté à la réunion intervenue le 24 mai 1994 dans les locaux de l’ATA.

211    Il convient, par ailleurs, de relever que TQ ne conteste pas spécifiquement avoir participé au cartel entre la fin du mois de mai 1993 et le 24 mai 1994. Or, durant cette période, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, ont eu lieu huit réunions du club Espan͂a, « Tycsa » ou « Celsa » ayant participé à cinq d’entre elles, ce que TQ ne conteste pas.

212    À cet égard, il convient de rappeler que, en l’absence de distanciation de la part de TQ, les preuves de sa participation au club Espan͂a jusqu’au mois de mai 1993 et à compter du 24 mai 1994 suffisent pour permettre de considérer que, même en l’absence de preuve circonstanciée apportée par la Commission, elle a poursuivi sa participation entre ces deux dates (voir, en ce sens, arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 75).

213    En outre, ainsi que la Commission l’a fait valoir dans sa réponse écrite à l’une des questions qui lui avaient été posées par le Tribunal avant l’audience, la réunion du 24 mai 1994 a porté sur les quantités commercialisées par les participants en 1993, ce qui est de nature à établir la participation des requérantes à l’entente durant cette dernière année.

214    Enfin, il convient de rappeler que, en raison de l’intégration économique des quatre requérantes (voir points 139 à 176 ci-dessus), en l’absence de contestation par TQ de la participation de « Tycsa » aux réunions du club Espan͂a intervenues entre le mois de mai 1993 et le 24 mai 1994, la participation de TQ elle-même à l’entente doit être tenue pour établie durant cette période.

–       Réunion du 6 septembre 1994

215    TQ fait valoir que le seul objet de la réunion intervenue le 6 septembre 1994 dans les locaux de l’ATA était l’élection de M. dCo. à la présidence de cette organisation. Cette élection serait par ailleurs le seul sujet de la discussion intervenue entre MM. dCo. et Rub.

216    Il convient de relever que TQ est expressément mentionnée parmi les participants à cette réunion. Selon les notes de M. Par., elle a été représentée par M. Rui., ce qu’elle ne conteste pas. De plus, contrairement aux allégations de TQ, il ressort desdites notes que, outre l’élection de M. dCo., l’objet de la réunion du 6 septembre 1994 a inclus une discussion sur les prix et sur le niveau souhaitable d’« intégration » des participants au cartel. L’objet anticoncurrentiel de la réunion est, dès lors, suffisamment caractérisé et, par suite, la participation de TQ au cartel doit être tenue pour établie jusqu’en septembre 1994.

–       Réunion du 7 novembre 1994

217    En ce qui concerne la réunion du 7 novembre 1994, TQ fait valoir que les preuves sur lesquelles se fonde la Commission sont contradictoires, puisqu’il ressortirait de la réponse de Galycas du 17 mars 2004 qu’elle était représentée à cette réunion par M. Mol., alors que, selon les notes de M. Par., M. Mol. aurait représenté Nueva Montaña Quijano Siderúrgica. Par ailleurs, la réponse de Galycas serait muette en ce qui concerne l’objet de cette réunion. En tout état de cause, TQ fait valoir que M. Mol. ne faisait pas partie de son personnel.

218    Il convient, tout d’abord, d’observer que l’existence de la réunion en cause est établie par deux éléments de preuve distincts, dont l’un émane de Galycas et l’autre d’Emesa, ce que TQ ne conteste pas. Quant à la réponse de Galycas à laquelle elle fait référence, il s’agit d’une déclaration auto-incriminante, adressée par Galycas le 17 mars 2004 à la Commission, en réponse à une demande de renseignements (voir considérant 112 de la décision attaquée).

219    TQ prétend que, si, selon Galycas, elle était représentée par M. Mol. lors de la réunion du 7 novembre 1994, selon les notes de M. Par., en revanche, M. Mol. représentait Nueva Montaña Quijano Siderúrgica à cette réunion. TQ, toutefois, ne soutient pas que, selon les notes de M. Par., elle n’était pas présente à cette réunion.

220    Par ailleurs, la Commission fait valoir, sans être contredite par TQ, que, s’il est vrai que M. Mol. ne faisait plus partie du personnel de TQ depuis 1990, il a continué à lui offrir ses services en tant que consultant indépendant. Rien ne s’oppose, dans ces conditions, à ce que M. Mol., lors de la réunion du 7 novembre 1994, ait pu représenter à la fois TQ et Nueva Montaña Quijano Siderúrgica, lesquelles étaient deux sociétés du groupe Celsa.

221    Enfin, bien que TQ soutienne que la déclaration de Galycas ne précise pas l’objet de la réunion du 7 novembre 1994, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, il résulte tant de cette déclaration que des notes de M. Par. que la discussion informelle entre les participants a porté sur la fixation des prix pour l’Espagne en 1995 ainsi que sur les restrictions de ventes et sur les clients. Il convient, dès lors, de considérer que, en assistant le 7 novembre 1994 à une réunion à objet anticoncurrentiel, TQ a poursuivi sa participation directe au club Espan͂a.

–       Réunion du 20 décembre 1994

222    Au sujet de la réunion intervenue dans les locaux de l’ATA le 20 décembre 1994, TQ fait valoir que M. Mol. ne pouvait la représenter et que le fait que des informations la concernant aient fait l’objet de discussions ne prouve pas son implication personnelle dans l’infraction.

223    Ainsi qu’il ressort du point 220 ci-dessus, TQ ne conteste pas que M. Mol. lui ait fourni des services, même s’il ne faisait pas partie de ses employés. Cette seule circonstance, dès lors, ne fait pas obstacle à ce que M. Mol. l’ait représentée lors des réunions du club Espan͂a, ce qui correspond, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, à la perception conjointe d’Emesa et de Galycas.

224    Dans ces conditions, l’argument selon lequel le fait que les données de TQ aient été discutées et qu’elles aient fait l’objet d’allocation de quotas ne prouve pas sa participation à l’infraction doit être écarté, dès lors qu’il présupposerait que ces données aient été discutées à son insu. Or, l’appartenance des quatre requérantes à une unique entité économique (voir points 139 à 175 ci-dessus) s’oppose à une telle éventualité. La participation de TQ au club Espan͂a jusqu’à la fin du mois de décembre 1994 doit donc être considérée comme établie.

 iv) Année 1995

225    Selon l’annexe 4 de la décision attaquée, le club Espan͂a a tenu huit réunions en 1995, auxquelles « Tycsa » aurait participé. TQ est mentionnée de façon distincte lors de cinq réunions. Elle conteste ces cinq réunions, mais ne conteste pas les trois autres réunions auxquelles « Tycsa » aurait participé.

226    De plus, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, les participants au club Espan͂a ont poursuivi leurs activités infractionnelles par la voie de contacts téléphoniques bilatéraux. La Commission recense cinq contacts infractionnels pour l’année 1995, dont quatre concernent « Tycsa » et Emesa. L’existence de ces contacts n’est pas contestée par TQ.

–       Réunion du 9 février 1995

227    TQ soutient que le terme « quotas », employé dans l’annexe 4 de la décision attaquée à l’occasion de la réunion du 9 février 1995, ne fait pas allusion à une répartition de quotas de ventes d’APC, mais à une discussion sur le montant des cotisations des membres de l’ATA, le terme espagnol « cuota » ayant ce double sens.

228    Ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission en défense, la signification attribuée par TQ au terme « quota » est peu crédible, compte tenu de son emploi par M. Par. dans des occurrences dans lesquelles il ne peut faire référence aux cotisations au budget de l’ATA. Par ailleurs, la Commission fait valoir que la référence à un nombre de tonnes dans les notes de M. Par. exclut que les quotas dont il s’agit désignent autre chose que la répartition des ventes entre les participants au club Espan͂a. Il convient donc d’écarter l’argument tiré par TQ de la polysémie du terme « cuota » et de considérer que les notes de M. Par. établissent la participation de TQ à une réunion dont l’objet, consistant entre la répartition de quotas entre les participants, présentait un caractère anticoncurrentiel.

–       Contact du 18 avril 1995

229    Dans sa réponse écrite à la question qui lui avait été posée par le Tribunal avant l’audience, TQ a précisé que, si elle n’avait pas expressément contesté l’existence d’un contact bilatéral, intervenu, le 18 avril 1995, entre Emesa et « Tycsa », au cours duquel, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, le projet de construction d’un pont sur le Tage a été discuté et les quantités vendues par Emesa, par « Tycsa » et par TQ au premier trimestre 1995 ont été comparées, elle avait en revanche contesté de manière générale la crédibilité des notes de M. Par. sur lesquelles la Commission s’est fondée pour établir l’existence dudit contact. En outre, TQ a ajouté que la mention des quantités vendues par elle dans les notes de M. Par. relevait d’une pure conjecture et ne signifiait pas qu’elle ait elle-même communiqué ces données commerciales sensibles à Emesa.

230    D’une part, il convient de rappeler que, compte tenu de la contemporanéité des faits qu’elles relatent ainsi que de leur caractère auto-incriminant, les notes de M. Par. présentent une valeur probante élevée (voir points 112 et 183 ci-dessus). D’autre part, les indices permettant de caractériser l’existence d’une unité économique entre TQ et « Tycsa » contredisent les allégations de TQ selon lesquelles le seul fait que des données commerciales sensibles la concernant aient été discutées lors d’un contact auquel « Tycsa » participait ne permet pas de lui reprocher d’avoir directement pris part à l’infraction (voir points 186, 198 et 224 ci-dessus).

–       Réunions intervenues entre le 20 avril et le mois de décembre 1995

231    Contrairement à ce que fait valoir TQ, il convient également, pour les mêmes raisons, de considérer que la mention, dans les notes de M. Par., de réunions intervenues le 20 avril, puis, chaque mois, de septembre à décembre 1995, au cours desquelles des données relatives aux prix de vente pratiqués et aux quantités vendues par TQ (agrégées sous la dénomination « Celsa ») ont fait l’objet de discussions, indique que celle-ci a communiqué à ses concurrents des données de nature anticoncurrentielle. À cet égard, étant donné qu’il résulte de ce qui précède qu’il s’agit de la poursuite d’une pratique établie depuis la fin de l’année 1992, la circonstance que ni la source des données ainsi communiquées ni la liste des participants ne figurent dans les notes de M. Par. est dépourvue de toute incidence. Il s’ensuit qu’il doit être tenu pour établi que la participation de TQ au club Espan͂a s’est poursuivie jusqu’à la fin de l’année 1995.

 v) Année 1996

232    Selon l’annexe 4 de la décision attaquée, le club Espan͂a a tenu quatorze réunions en 1996. « Tycsa » aurait participé à treize d’entre elles et TQ est mentionnée de façon distincte lors de huit réunions. Elle conteste ces huit réunions, mais non les cinq autres auxquelles « Tycsa » aurait participé.

–       Réunion du 25 janvier 1996

233    Contrairement à ce que fait valoir TQ, la mention, dans les notes de M. Par., de la réunion du 25 janvier 1996, au cours de laquelle des données relatives aux prix de vente pratiqués et aux quantités vendues par TQ entre le 1er juillet 1993 et le 31 décembre 1995 ont fait l’objet de discussions, indique que celle-ci a communiqué à ses concurrents des données de nature anticoncurrentielle. À cet égard, étant donné qu’il s’agit de la poursuite d’une pratique établie depuis la fin de l’année 1992, la circonstance que ni la source des données ainsi communiquées ni la liste des participants ne figurent dans les notes de M. Par. est dépourvue de toute incidence.

–       Réunion du 8 février 1996

234    TQ ne conteste pas sa participation à la réunion du 8 février 1996, mais fait valoir que les « quotas » en cause désignent les cotisations annuelles à l’ATA. Pour les raisons indiquées au point 228 ci-dessus, il convient d’écarter cette argumentation.

–       Réunion du 10 avril 1996

235    S’agissant de la réunion intervenue le 10 avril 1996, TQ conteste pouvoir avoir été valablement représentée par M. Mol. TQ fait valoir également que cette réunion n’avait pas d’objet anticoncurrentiel.

236    Ainsi qu’il a été indiqué aux points 220 et 223 ci-dessus, le seul fait que M. Mol. n’ait plus été employé par TQ à la date du 10 avril 1996 n’exclut pas qu’il ait pu la représenter lors de cette réunion. En tout état de cause, il ressort de l’annexe 4 de la décision attaquée que, lors de cette réunion, TQ était également représentée par M. Pra., ce qu’elle ne conteste pas.

237    Selon l’annexe 4 de la décision attaquée, qui renvoie aux éléments de preuve émanant de Galycas, d’Emesa ainsi que de la demande de clémence d’ArcelorMittal Espan͂a, la réunion du 10 avril 1996 a porté sur les prix, les restrictions de vente, les clients et sur le respect des accords par Socitrel. Ces indications, corroborées par trois sources distinctes dont une établie au moment des faits, doivent être considérées comme suffisamment probantes.

–       Réunions du 26 avril et du début du mois de mai 1996

238    TQ fait valoir que les notes de M. Par., sur lesquelles la Commission s’est fondée pour lui reprocher sa participation à des échanges d’informations confidentielles lors de réunions intervenues le 26 avril ainsi qu’au début du mois de mai 1996, seraient insuffisantes, car elles ne comportent pas la liste des participants à ces prétendues réunions. De plus, les informations échangées relèveraient du domaine public, si bien que TQ estime que ces notes relatent un échange interne entre deux employés d’Emesa.

239    Pour les raisons déjà indiquées aux points 185, 191, 193 et 202 ci-dessus, notamment, l’absence de liste des participants aux réunions intervenues, selon les notes de M. Par., le 26 avril ainsi qu’au début du mois de mai 1996 ne saurait suffire à démontrer que TQ n’est pas à l’origine des données commerciales sensibles la concernant qui ont été portées à la connaissance d’Emesa. De plus, selon les notes de M. Par. et la demande de clémence d’ArcelorMittal Espan͂a, les réunions intervenues entre le 26 avril et le début du mois de mai 1996 que la Commission mentionne à l’annexe 4 de la décision attaquée ont porté, notamment, sur les prix pratiqués par TQ au Portugal, sur l’exclusivité réservée à TQ et à Emesa en ce qui concerne les ventes au Portugal, et sur les prix et les quantités vendues par TQ au Portugal jusqu’au 30 avril 1996. TQ n’indique pas pour quelles raisons de telles données, qui constituent des données commerciales sensibles, se trouvaient à l’époque dans le domaine public, ainsi qu’elle le prétend, et comment elles ont pu faire l’objet de discussions sans qu’elle-même (ou « Tycsa ») ait dû les communiquer aux autres participants à l’entente.

–       Réunion du 12 septembre 1996

240    TQ fait valoir que les notes de M. Par., sur lesquelles se fonde la Commission, ne suffisent pas à démontrer qu’elle a assisté à une réunion à caractère infractionnel le 12 septembre 1996. Les notes de M. Par. ne mentionneraient qu’une liste de sujets relevant des attributions de l’ATA, tels que la situation des produits en Espagne et au Portugal. La seule mention de TQ dans un tableau de données ne serait pas une preuve suffisante de sa participation à une réunion anticoncurrentielle.

241    Il est certes vrai que la mention de données relatives à une entreprise absente ne permet pas de démontrer qu’elle a commis une infraction au droit de la concurrence. Cependant, TQ ne conteste pas sa présence lors de la réunion du 12 septembre 1996, à laquelle elle était d’ailleurs représentée par trois personnes (MM. Mol., Pra. et Pin.), ainsi qu’il ressort de la réponse d’Emesa à une demande de renseignements du 25 octobre 2002. Ces déclarations d’Emesa sont en outre corroborées par les notes de M. Par., transmises à la Commission à l’appui de la demande de clémence présentée par ArcelorMittal Espan͂a. De l’ensemble de ces documents, il ressort que, lors de cette réunion, les discussions ont porté sur les prix, les restrictions de vente et les clients des participants au club Espan͂a ainsi que, en particulier, sur le volume des ventes d’APC (en tonnes) réalisées par TQ et par « Tycsa » de janvier à août 1995. Lors de cette réunion, TQ a donc obtenu et communiqué des informations commerciales sensibles.

–       Réunion du 1er octobre 1996

242    TQ fait valoir que les notes de M. Par. ne coïncident pas avec la liste établie par la Commission des personnes qui sont censées l’avoir représentée lors de la réunion du 1er octobre 1996. Pour autant, elle ne conteste pas sa participation à cette réunion de l’ATA et doit donc être regardée comme y ayant assisté.

243    Elle conteste, en revanche, la nature anticoncurrentielle des discussions intervenues lors de cette réunion et fait valoir que ses représentants ne se sont pas mis d’accord sur des questions de nature anticoncurrentielle. Il ressort cependant des notes de M. Par., corroborées sur ce point par la réponse d’Emesa du 25 octobre 2002 et par la demande de clémence d’ArcelorMittal Espan͂a, que, lors de la réunion du 1er octobre 1996, les discussions ont porté sur les prix, les restrictions de vente et les clients ainsi que sur les doléances de Proderac relatives au respect des accords convenus. La nature anticoncurrentielle de cet échange d’informations doit donc être considérée comme établie.

244    Au surplus, même à supposer fondée l’allégation de TQ selon laquelle ses représentants ne se sont pas accordés sur des questions de nature anticoncurrentielle, il convient d’observer, d’une part, qu’elle a néanmoins pu bénéficier de l’échange d’informations sensibles auquel ses représentants ont assisté et, d’autre part, qu’elle ne soutient pas s’être distanciée lors de cette réunion.

–       Réunion du 22 novembre 1996

245    TQ fait valoir que les preuves sur lesquelles s’appuie la Commission en ce qui concerne la réunion du 22 novembre 1996 permettent de confirmer qu’elle n’a pas fourni de données exactes concernant ses audits et qu’elle n’a pas participé à une entente.

246    Il ressort de l’annexe 4 de la décision attaquée que, lors de la réunion du 22 novembre 1996, à laquelle TQ ne conteste pas avoir participé, les discussions ont porté sur les prix, les restrictions de vente, les clients, des mécanismes de compensation pour les quantités vendues en violation des accords et la fiabilité des données communiquées par les membres du club Espan͂a. Les allégations de TQ, à les supposer exactes, ne démontrent pas qu’elle n’a pas pris part à ces discussions. Au demeurant, même en admettant le bien-fondé de son argumentation, il convient d’observer que la communication à ses concurrents de données erronées par un participant à une entente n’est nullement incompatible avec cette participation, mais démontre, de la part de l’entreprise qui se livre à cette tricherie, la volonté de tirer profit du cartel et de la crédulité de ses concurrents.

247    Il résulte ainsi de ce qui précède que la participation de TQ à l’infraction doit être considérée comme établie jusqu’à la fin du mois de novembre 1996.

 vi) Année 1997

248    Selon l’annexe 4 de la décision attaquée, le club Espan͂a a tenu neuf réunions en 1997. « Tycsa » aurait participé à six d’entre elles. TQ est mentionnée de façon distincte lors de six réunions, bien qu’elle ne figure dans la liste des participants qu’à quatre de ces réunions. Elle conteste seulement ces quatre réunions.

249    De plus, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, les participants au club Espan͂a ont poursuivi leurs activités infractionnelles par la voie de contacts téléphoniques bilatéraux. La Commission recense deux contacts infractionnels pour l’année 1997, dont l’un concerne spécifiquement TQ, qui le conteste.

–       Réunion du 22 janvier 1997

250    TQ n’est pas mentionnée parmi les participants à une réunion du cartel intervenue en marge de l’ATA le 22 janvier 1997, au cours de laquelle des informations détaillées sur les ventes qu’elle a réalisées au Portugal en 1996 ont été discutées avec Emesa. En réponse à la question écrite qui lui a été posée par le Tribunal avant l’audience, TQ a indiqué qu’elle n’avait pas participé à cette réunion et qu’elle ne pouvait expliquer comment des données commerciales sensibles la concernant avaient pu y être discutées. Dès lors qu’il n’est pas contesté que « Tycsa » participait à cette réunion et qu’il a été considéré, pour les raisons indiquées aux points 139 à 176 ci-dessus, que les quatre requérantes, indifféremment désignées en tant que « Tycsa » dans la décision attaquée, constituaient une unité économique, TQ doit être considérée comme ayant participé à cet élément de l’infraction.

–       Échange d’informations entre MM. Par. et Mol. (début mai 1997)

251    TQ conteste que l’échange d’informations relatives au « groupe Celsa » et à Emesa intervenu en mai 1997 entre MM. Par. et Mol. lui soit imputable. TQ se fonde principalement sur l’argument selon lequel M. Mol. ne la représentait pas. À cet égard, il convient de rappeler que la qualité de prestataire de services indépendant de M. Mol. ne faisait pas obstacle à ce qu’il puisse représenter TQ aux réunions du cartel (voir points 220, 223 et 236 ci-dessus). Par ailleurs, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, l’échange intervenu début mai 1997 entre MM. Par. et Mol. a porté non seulement sur des informations relatives au premier trimestre 1997, mais également sur une allocation de quotas, dont TQ, en tant qu’elle faisait partie de l’entité économique constituée par les quatre requérantes, a directement bénéficié.

–       Réunion du 14 octobre 1997

252    TQ fait valoir que les références indiquées par la Commission en ce qui concerne les preuves d’une prétendue réunion intervenue le 14 octobre 1997 sont erronées et qu’elle avait signalé cette erreur à la Commission dans sa réponse à la communication des griefs. En tout état de cause, les notes de M. Par. feraient état d’une réunion intervenue le 4 et non le 14 octobre 1997, à laquelle « Tycsa » et non TQ aurait assisté.

253    Aussi surprenante que puisse sembler l’allégation de TQ relative à la date exacte d’une réunion à laquelle elle soutient ne pas avoir participé, celle-ci, qu’il s’agisse du 4 ou du 14 octobre 1997, est sans incidence sur la question de savoir si la réunion en cause a pu constituer un élément de l’infraction. À cet égard, il résulte, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, non démentie par TQ, que, lors de cette réunion, sont intervenues des discussions relatives aux prix, aux restrictions de vente et aux clients ainsi qu’à une allocation de quotas entre le « grupo Ensidesa » et le « grupo Tycsa », dont TQ faisait partie et dont elle a, à ce titre, directement bénéficié.

254    Par ailleurs, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, TQ était représentée lors de cette réunion par M. Mol., dont, ainsi qu’il a déjà été précisé (voir points 220, 223, 236 et 251 ci-dessus), la qualité d’indépendant ne faisait pas obstacle à ce qu’il la représente aux réunions du cartel.

–       Échange d’informations entre MM. Par. et Tor. (18 novembre 1997)

255    Au sujet de l’échange bilatéral d’informations intervenu, selon la Commission, le 18 novembre 1997 entre MM. Par. et Tor., concernant, premièrement, les prix et conditions de paiement de Tréfileurope au Portugal, deuxièmement, les ventes de toron réalisées au Portugal par TQ, « Tycsa » et Emesa et, troisièmement, une compensation due par « Tycsa » à Emesa, TQ fait valoir que M. Tor. était salarié de Trenzas y Cables et que, par conséquent, son comportement ne pouvait être imputé à TQ.

256    Il ressort de l’annexe 4 de la décision attaquée, dont les indications ne sont pas contestées, que, le 18 novembre 1997, un échange d’informations est intervenu entre « Tycsa » et Emesa. Lors de cet échange, ainsi que TQ le fait valoir, ont été notamment divulguées des informations commerciales sensibles relatives à TQ, à savoir les ventes de toron qu’elle avait réalisées au Portugal au cours de l’année 1997. TQ soutient et il résulte de l’annexe 1 de la décision attaquée que M. Tor., qui a pris part à cet échange pour le groupe « Tycsa », était à l’époque salarié de Trenzas y Cables. Cette circonstance, cependant, n’est pas de nature à exonérer TQ de sa participation à cet échange, mais constitue plutôt une preuve supplémentaire de l’intégration économique des quatre requérantes, dont les données commerciales étaient agrégées pour être communiquées aux autres participants à l’entente (voir points 139 à 176 ci-dessus).

–       Réunion du 27 novembre 1997

257    TQ conteste sa participation à la réunion du 27 novembre 1997, au motif que la Commission n’indique pas qui l’a représentée lors de cette réunion. Cependant, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, TQ a été représentée par M. Rui. et la réunion a porté sur une augmentation des prix en Espagne (à l’exception du Pays basque). Dès lors, et même à supposer, comme elle le prétend, que TQ n’ait pu s’accorder sur une augmentation générale des prix étant donné que, selon elle, elle aurait négocié les prix pour chaque client et pour chaque commande, il n’en demeure pas moins qu’elle a assisté sans se distancier à une réunion dont l’objet était de fausser les conditions normales de la concurrence et qu’elle a pu bénéficier d’un échange d’informations commerciales sensibles, ce qui suffit à caractériser sa participation à l’infraction (voir point 200 ci-dessus).

–       Réunion de la fin du mois de décembre 1997

258    À l’annexe 4 de la décision attaquée, la Commission mentionne expressément la participation de TQ à une réunion intervenue fin décembre 1997.

259    TQ fait valoir, premièrement, que les notes de M. Par. sur lesquelles la Commission s’est fondée ne comportent pas de liste de participants. Pour les raisons notamment exposées aux points 185, 191, 193, 202 et 239 ci-dessus, cette absence ne présente pas un caractère déterminant, dès lors qu’elle ne suffit pas à exclure l’existence de tout contact infractionnel auquel TQ aurait participé ou dont elle aurait pu bénéficier.

260    Deuxièmement, TQ soutient que l’existence de tableaux retraçant ses ventes pourrait provenir d’estimations faites par M. Par. lui-même. Toutefois, une telle interprétation n’est cohérente ni avec le calcul des déviations observées par rapport aux accords convenus ni avec la mise en œuvre de mécanismes de compensation, lesquels figurent dans les notes de M. Par. Or, la fiabilité de telles données, au contraire de l’hypothèse avancée par TQ, dépend de la confrontation des points de vue des participants à l’entente.

261    Troisièmement, l’argument de TQ selon lequel la mention de « quotas » faisait référence aux cotisations à l’ATA doit être écarté pour les raisons indiquées au point 228 ci-dessus.

262    Quatrièmement, enfin, la mention de TQ dans des tableaux ne prouverait pas sa participation à des réunions, ni le caractère anticoncurrentiel desdites réunions, ni même l’existence de ces réunions. Si une telle argumentation peut être accueillie dans son principe, elle doit néanmoins être écartée dans les cas dans lesquels, comme en l’espèce, il est établi que l’entreprise en cause a personnellement participé à de nombreuses réunions au cours desquelles des données commerciales sensibles ont été partagées, le niveau général des prix a été fixé et des quotas ont été alloués et ne s’est à aucun moment distancié de l’entente à laquelle elle a participé (voir point 241 ci-dessus).

263    Il résulte ainsi de ce qui précède que la participation directe de TQ au club Espan͂a doit être considérée comme établie jusqu’à la fin de l’année 1997.

 vii) Année 1998

264    Selon l’annexe 4 de la décision attaquée, le club Espan͂a a tenu onze réunions en 1998. « Tycsa » aurait participé à sept d’entre elles et TQ est mentionnée de façon distincte lors de six réunions. TQ conteste cinq de ces six réunions.

–       Réunion (non contestée) du 28 janvier 1998

265    TQ ne conteste pas la réunion, intervenue dans le cadre de l’ATA le 28 janvier 1998, au cours de laquelle, selon les notes de M. Par., des informations sensibles concernant les ventes d’APC réalisées notamment par TQ et les clients ont été échangées. Cette réunion, mentionnée à l’annexe 4 de la décision attaquée, doit donc être considérée comme avérée. En réponse à une question écrite qui lui avait été posée par le Tribunal avant l’audience, TQ a précisé qu’il lui était impossible d’expliquer de quelle manière des données sensibles la concernant avaient pu être communiquées aux autres membres du club Espan͂a sans sa participation.

–       Réunions du 28 février et du mois de mai 1998

266    À l’annexe 4 de la décision attaquée, la Commission mentionne expressément la participation de TQ à des réunions intervenues le 28 février et en mai 1998.

267    Premièrement, TQ fait valoir que les notes de M. Par. sur lesquelles la Commission s’est fondée ne comportent pas de liste de participants. Pour les raisons indiquées notamment au point 259 ci-dessus, cet argument doit être écarté.

268    Deuxièmement, TQ soutient que l’existence de tableaux retraçant ses ventes pourrait provenir d’estimations faites par M. Par. lui-même. Pour les raisons indiquées notamment au point 260 ci-dessus, cet argument doit être écarté.

269    Troisièmement, l’argument de TQ selon lequel la mention de « quotas » faisait référence aux cotisations à l’ATA doit être écarté pour les raisons indiquées au point 228 ci-dessus.

270    Quatrièmement, enfin, la mention de TQ dans des tableaux ne prouverait pas sa participation à des réunions, ni le caractère anticoncurrentiel desdites réunions, ni même l’existence de ces réunions. Pour les raisons indiquées notamment au point 262 ci-dessus, cet argument doit être écarté.

–       Réunions des 14 mai et 2 décembre 1998

271    TQ conteste avoir assisté aux réunions des 14 mai et 2 décembre 1998, aucun de ses salariés ne figurant sur la liste des participants.

272    Contrairement à ce que soutient TQ, M. Pin. est mentionné à l’annexe 4 de la décision attaquée comme l’ayant représentée à la réunion du 2 décembre 1998 et l’existence de cette réunion est attestée par des preuves émanant d’Emesa, de Galycas, de Socitrel et d’ArcelorMittal Espan͂a (demande de clémence). Selon ces mêmes éléments de preuve, l’objet de cette réunion était identique à celui de la réunion du 14 mai 1998.

273    Quant à cette dernière réunion, elle a porté, selon les notes de M. Par., sur les prix et les quotas. L’absence de mention d’un représentant de TQ à cette réunion ne saurait être déterminante, étant donné qu’il n’est pas contesté que « Tycsa » a été représentée par M. dCo. et que les informations relatives à TQ n’ont pu être communiquées qu’avec sa collaboration.

274    Il résulte de ce qui précède que TQ a participé à l’entente jusqu’à la fin de l’année 1998.

 viii) Année 1999

275    TQ fait valoir que, sur les douze réunions mentionnées à l’annexe 4 de la décision attaquée pour l’année 1999, elle n’a, selon la Commission, assisté qu’à trois d’entre elles, à savoir celles des 18 juin, 2 et 24 septembre. Elle ajoute qu’elle ne pouvait être représentée par M. Mol., qui serait un consultant indépendant sans pouvoir de représentation. En outre, il ne serait pas fait mention de TQ en ce qui concerne la réunion du 2 septembre 1999. Aucune liste des participants n’aurait été établie pour la réunion du 24 septembre 1999.

276    Ainsi qu’il a déjà été constaté à maintes reprises (voir points 220, 223, 236 et 251 ci-dessus), la qualité de consultant indépendant de M. Mol. ne faisait pas obstacle à ce que, dans les circonstances de l’espèce, il représente TQ aux réunions du club Espan͂a.

277    Par ailleurs, contrairement à ce que prétend TQ, elle est bien mentionnée parmi les participants à la réunion du 2 septembre 1999 et une liste des participants, sur laquelle elle figure, a été établie pour la réunion du 24 septembre 1999, même si l’identité de son représentant n’est pas indiquée. L’existence de cette réunion, au cours de laquelle ont été discutés les prix, les restrictions de ventes et les clients, est corroborée par Emesa, ArcelorMittal Espan͂a et Galycas.

278    Il s’ensuit que la participation directe de TQ au club Espan͂a en 1999 doit être considérée comme établie.

 ix) Année 2000

279    TQ fait valoir que, sur les 17 réunions qui, selon la Commission, seraient intervenues en 2000, sa participation n’a été retenue qu’à celle du 29 septembre, dans le cadre de l’ATA. Elle fait valoir que l’objet anticoncurrentiel de cette réunion n’est pas démontré et qu’elle ne pouvait être représentée par M. Mol.

280    Pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment (voir points 220, 223, 236, 251 et 276 ci-dessus), il convient de considérer que M. Mol. pouvait représenter TQ à la réunion du 29 septembre 2000. Par ailleurs, il ressort de la demande de clémence d’ArcelorMittal Espan͂a, corroborée sur ce point par Emesa, Galycas et Socitrel ainsi que par les déclarations de Trenzas y Cables, que l’objet de cette réunion était de discuter les prix, les restrictions de ventes et les clients ainsi que de fixer les prix par catégorie de clients.

281    En outre, lors de la réunion du 1er juin 2000, non contestée par TQ, une discussion sur les ventes réalisées par les sociétés du groupe « Tycsa » et sur une allocation de quotas au groupe « GSW » est intervenue. De même, lors des réunions des 28 juillet et 8 septembre 2000, également non contestées, des allocations de quotas ont été réalisées au bénéfice du groupe « Celsa », dont TQ a ainsi directement profité.

282    Il résulte de ce qui précède que la participation de TQ au club Espan͂a s’est poursuivie en 2000.

 x) Année 2001

283    TQ fait valoir que, sur 18 réunions relevées par la Commission en 2001, il ne lui est reproché que d’avoir participé à deux réunions, en janvier ou en février et le 18 avril respectivement. Elle conteste avoir participé à ces deux réunions.

284    Il ressort de l’annexe 4 de la décision attaquée que des données relatives aux ventes d’APC de TQ ont été discutées lors d’une réunion, intervenue en janvier ou en février 2001, dont la liste des participants n’a pas été précisée. Il résulte cependant de la demande de clémence d’ArcelorMittal Espan͂a qu’une réunion est intervenue au cours de cette période, durant laquelle les prévisions de vente ont été discutées pour « Proderac, GSW ([Trenzas y Cables SL] + [TQ]), Aceralia (Emesa + Galycas), Socitrel et Fapricela » et que les écarts entre les ventes réalisées et les quotas alloués ont été calculés. Cette déclaration auto-incriminante établit donc que des données confidentielles propres à TQ ont été communiquées à ses concurrents. Elle témoigne aussi de la perception de ces concurrents selon laquelle les requérantes constituent une entité économique unique.

285    Quant à la réunion du 18 avril 2001, laquelle, selon les notes de M. Par. et les déclarations d’Emesa, a eu pour objet des discussions sur les prix et les ventes et une répartition de clientèle, TQ figure sur la liste des participants, mais conteste avoir pu être représentée par M. Pue. au motif que cette personne n’était plus son employé, mais travaillait pour Trenzas y Cables. Il convient toutefois d’observer que Trenzas y Cables est mentionnée comme participant également à cette réunion, à laquelle elle aurait été représentée par M. Cub. Il ressort donc des déclarations d’Emesa, et ce quel que soit le bien-fondé des allégations de TQ en ce qui concerne la possibilité pour M. Pue. de la représenter, que les concurrents de TQ ont estimé qu’elle était personnellement présente, aux côtés de Trenzas y Cables, à cette réunion.

286    Il s’ensuit que TQ doit être considérée comme ayant participé au club Espan͂a en 2001.

 xi) Année 2002

287    TQ fait valoir que son nom n’est pas mentionné à l’occasion des huit réunions qui, selon l’annexe 4 de la décision attaquée, sont intervenues en 2002.

288    Il convient cependant de rappeler que, comme l’indique la Commission dans la décision attaquée, les termes « Tycsa » et « GSW » désignent indifféremment les quatre requérantes. Ainsi, il est constant que GSW ne produisait pas d’APC, mais qu’elle s’est néanmoins vu attribuer des quotas de ventes d’APC. Par ailleurs, l’objet des réunions mentionnées dans l’annexe 4 de la décision attaquée pour 2002 fait état de « comparaisons historiques ». Or, la participation directe de TQ au club Espan͂a a été établie jusqu’en 2001. Il est, de plus, avéré que les concurrents de TQ percevaient les quatre requérantes comme une entité économique. Il convient ainsi d’en déduire que les indications « Tycsa » et « GSW » renvoient indifféremment aux sociétés du groupe actives dans la vente d’APC, dont TQ.

289    Dès lors, il doit être tenu pour établi que TQ a poursuivi sa participation au club Espan͂a jusqu’à la fin de l’entente, sans qu’il soit même besoin de retenir pour établir cette participation les deux documents contestés par TQ – à savoir un document en date du 7 mai 2002, qui la mentionne, mais dont elle soutient ne pas avoir été mise en mesure de prendre connaissance durant la phase administrative de la procédure, et un fax, qui, selon la Commission, l’incrimine, mais qu’elle conteste avoir envoyé à Emesa le 22 juillet 2002.

290    Il résulte de tout ce qui précède que la participation directe de TQ au club Espan͂a depuis le 15 décembre 1992 et jusqu’au 19 septembre 2002 doit être considérée comme établie et que, par suite, la première branche du premier moyen doit être écartée.

 Sur la deuxième branche du premier moyen soulevé par TQ, tirée de l’absence de preuve de sa connaissance du club Italia et du club Europe

291    TQ soutient que le seul élément de preuve retenu par la Commission pour lui reprocher sa connaissance du club Italia et du club Europe – les autres éléments de l’infraction à laquelle la Commission n’a pas établi qu’elle avait directement participé –, à savoir un courrier électronique envoyé par Nedri le 8 août 2002, ne peut être retenu contre elle, car il n’a pas été mentionné dans la communication des griefs et, de toute façon, ne saurait suffire à apporter la preuve de cette connaissance.

292    Cependant, contrairement à ce que soutient TQ, il ressort des considérants 562 et suivants de la décision attaquée que la Commission n’a pas fondé son appréciation selon laquelle TQ avait pris connaissance de l’existence des autres volets de l’entente en s’appuyant sur le seul courrier électronique que Nedri lui a envoyé le 8 août 2002, mais également sur l’existence des liens structurels entre les requérantes et sur le rôle actif que Trenzas y Cables jouait en tant que coordonnateur du club Espan͂a et sa participation, dès 1993, au club Zurich ainsi qu’au club Italia. Or, TQ ne conteste pas ces affirmations. Par ailleurs, il résulte des considérations qui figurent aux points 139 à 174 ci-dessus qu’il y a lieu de considérer comme suffisamment démontrée l’existence d’une unité économique entre les quatre requérantes. Dès lors que TQ ne conteste pas la participation des autres requérantes aux volets de l’entente ne concernant ni l’Espagne ni le Portugal, il convient donc de considérer qu’elle avait elle-même nécessairement connaissance de cette participation.

293    Il s’ensuit que la connaissance par TQ des autres volets de l’entente, hormis le club Espan͂a auquel elle a directement participé, est établie et qu’il convient, en conséquence, d’écarter la deuxième branche du premier moyen.

 Sur la troisième branche du premier moyen, visant à contester certains arguments sur lesquels la Commission s’est fondée


 i) En ce qui concerne l’incidence de la perception des concurrents de TQ selon laquelle TQ et « Tycsa » constituent un groupe unique

294    TQ soutient que la perception des tiers est sans incidence sur la réalité de sa participation personnelle à l’infraction. Cet argument doit être écarté pour les raisons indiquées aux points 146 à 152 ci-dessus.

 ii) En ce qui concerne les conséquences pour TQ de la participation de MM. Mol., Rui., Pra., Pin., Pue. et dCo. aux réunions de l’entente

295    Premièrement, TQ fait valoir que M. Mol., étant un consultant externe, ne pouvait la représenter. Toutefois, elle ne conteste pas les affirmations de la Commission selon lesquelles elle a rémunéré M. Mol. pour ses prestations depuis l’année 1990. M. Mol. a ainsi pu être perçu par les concurrents de TQ, dont M. Par., comme qualifié pour la représenter. Les notes de M. Par. à ce sujet sont particulièrement crédibles, puisqu’elles sont contemporaines des faits qu’elles relatent et qu’elles émanent du principal concurrent du groupe Celsa en Espagne et au Portugal et autre participant au club Espan͂a.

296    Deuxièmement, d’une part, s’agissant de MM. Rui., Pra. et Pin., TQ ne conteste pas qu’ils aient pu la représenter, mais fait valoir qu’ils l’ont fait lors de réunions de l’ATA et que l’objet de ces réunions n’était pas anticoncurrentiel. Les arguments relatifs à l’objet des réunions de l’ATA ont été examinés et écartés dans le cadre de l’examen de la première branche du présent moyen (voir points 210, 216, 224, 228, 234, 241, 243, 250, 261, 265, 269 et 280 ci-dessus). Il s’avère, en effet, que, lors ou en marge des réunions de cette organisation professionnelle, se sont déroulées des réunions du club Espan͂a au cours desquelles des données commerciales sensibles ont été échangées, des quotas de vente ont été alloués et des répartitions de clientèle ainsi que des fixations de prix sont intervenues.

297    D’autre part, la circonstance, à la supposer avérée, que M. Pue. n’ait pu représenter TQ lors de la réunion du 18 avril 2001 est, en tout état de cause, dépourvue d’incidence. En effet, les concurrents de TQ ont estimé qu’elle avait personnellement pris part à cette réunion et l’ont mentionnée dans la liste des participants (voir point 285 ci-dessus).

298    Troisièmement, TQ conteste que M. dCo. ait pu la représenter lors des réunions du club Espan͂a, au motif qu’il travaillait pour d’autres sociétés du groupe Celsa. Cette circonstance n’exclut pas, cependant, qu’il ait pu également représenter TQ, en raison de l’unité économique existant entre les quatre sociétés requérantes. En effet, M. dCo. apparaissait, ainsi qu’il ressort des éléments de preuve recueillis par la Commission auprès des autres participants à l’infraction, comme le représentant habituel du groupe Celsa (voir point 151 ci-dessus).

 iii) Sur la nature des réunions de l’ATA

299    TQ, enfin, conteste la nature anticoncurrentielle des réunions de l’ATA. Les raisons pour lesquelles cet argument doit être écarté ont été rappelées au point 296 ci-dessus.

300    Il résulte de ce qui précède qu’il convient d’écarter la troisième branche du premier moyen soulevé par TQ et, par suite, ledit moyen (affaire T‑427/10) dans son ensemble.

b)     Sur le deuxième moyen soulevé par TQ (affaire T‑427/10), tiré de ce qu’elle-même et les autres requérantes constituaient des entités économiques distinctes

301    Dans le cadre du deuxième moyen soulevé par TQ, celle-ci conteste les constatations figurant dans la décision attaquée relatives au chevauchement du personnel des différentes sociétés (première branche), à la pertinence du fait que GSW a été son administrateur unique pendant une partie de la période infractionnelle (deuxième branche), aux conséquences de la répartition de la production et des ventes d’APC entre Tycsa PSC et elle-même (troisième branche) ainsi qu’à la valeur probante de la perception des autres participants au cartel selon laquelle elle-même constituait, avec les autres requérantes, une entité économique unique (quatrième branche). Par la cinquième branche du deuxième moyen, TQ conteste en outre que GSW ait exercé sur elle une influence déterminante au sens de la jurisprudence permettant d’imputer, par présomption, la responsabilité des infractions commises par une filiale à sa société-mère.

302    La Commission conteste l’ensemble de cette argumentation.

303    Il convient de rappeler d’emblée que les raisons pour lesquelles les arguments présentés dans le cadre de la première branche du deuxième moyen doivent être écartés ont été indiquées aux points 154 à 159 ci-dessus. Par ailleurs, il résulte des points 144 et 145 ci-dessus que les arguments présentés dans le cadre de la deuxième branche du deuxième moyen doivent être écartés. De plus, la troisième branche du deuxième moyen doit être écartée pour les raisons mentionnées aux points 160 à 162 ci-dessus. En outre, les arguments avancés dans la quatrième branche du deuxième moyen ont été écartés aux points 146 à 153 ci-dessus. Partant, il convient d’écarter comme non fondées les quatre premières branches du deuxième moyen.

304    Il convient également de rappeler que le premier moyen soulevé par TQ a été écarté en raison du fait que la participation de celle-ci à l’entente depuis le 15 décembre 1992 et jusqu’au 19 septembre 2002 était établie. Dès lors que les premier et deuxième moyens présentés dans l’affaire T‑427/10 sont uniquement relatifs à la responsabilité encourue par TQ en raison de sa participation à l’infraction, il n’est pas nécessaire de statuer sur les arguments de celle-ci visant à contester que GSW ait exercé sur elle une influence déterminante (cinquième branche du deuxième moyen), dès lors que ce n’est pas le motif sur lequel s’est fondée la Commission dans la décision attaquée pour lui imputer la responsabilité de l’infraction à laquelle elle a directement participé.

305    Il s’ensuit que le deuxième moyen soulevé par TQ (affaire T‑427/10) doit être écarté comme non fondé dans ses quatre premières branches et comme inopérant dans sa cinquième branche.

5.     Premier moyen soulevé par Tycsa PSC (affaire T‑428/10), tiré d’erreurs de droit et de fait dans l’établissement de sa responsabilité

306    Dans son premier moyen, Tycsa PSC fait valoir que la Commission n’a pas établi qu’elle constituait avec Trenzas y Cables et GSW une unité économique permettant de regarder ces trois sociétés comme une entreprise.

307    Ainsi que le fait valoir la Commission dans le mémoire en défense et qu’elle l’a elle-même confirmé en réponse aux questions qui lui ont été posées par le Tribunal, il convient de constater d’emblée que Tycsa PSC se borne, dans le cadre du premier moyen qu’elle soulève, à contester son appartenance à une unité économique constituée d’elle-même, de Trenzas y Cables et de GSW. Or, ce motif de la décision attaquée est purement surabondant à l’égard de Tycsa PSC, dès lors que, au considérant 740 de ladite décision notamment, la Commission a estimé que celle-ci avait directement participé au club Europe, au club Italia et au club Espan͂a, depuis la date de sa constitution, à savoir le 26 mars 1998, jusqu’au 19 septembre 2002. Il s’ensuit que, dès lors qu’il est uniquement relatif à la responsabilité encourue par Tycsa PSC en raison de sa participation à l’infraction (voir point 93 ci-dessus), le premier moyen présenté dans l’affaire T‑428/10 doit être écarté comme inopérant.

308    Une telle appréciation n’est pas remise en cause par l’invocation, pour la première fois lors de l’audience, d’un argument tiré de ce que, étant donné que la Commission a considéré à tort qu’elle appartenait à une entité économique unique, également constituée de Trenzas y Cables, devenue MRT, et de GSW, le calcul du plafond de 10 % prévu à l’article 20, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 aurait dû prendre en compte son seul chiffre d’affaires et non celui de l’ensemble de cette prétendue entité unique.

309    Sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité de cet argument, il convient de constater que, en tant qu’il est avancé à l’appui d’un moyen présenté expressément comme tendant à l’annulation de la décision attaquée en raison d’erreurs relatives à l’imputation à Tycsa PSC de la responsabilité de l’infraction, il est inopérant. En tout état de cause, il ne pourrait qu’être rejeté comme non fondé pour les raisons exposées aux points 139 à 176 ci-dessus, dont il résulte que Tycsa PSC doit être considérée comme appartenant à une unité économique constituée par elle-même ainsi que les trois autres requérantes.

310    Partant, le premier moyen soulevé par Tycsa PSC (affaire T‑428/10) doit être écarté dans son ensemble.

6.     Premier moyen soulevé par MRT (affaire T‑426/10), tiré d’erreurs de droit et de fait dans l’application de l’article 101 TFUE ainsi que d’un défaut de motivation en ce qui concerne l’attribution de responsabilité à MRT

311    Dans le cadre du premier moyen soulevé par MRT (affaire T‑426/10), celle-ci considère que c’est à tort que la Commission a considéré qu’elle avait succédé à Trenzas y Cables et que, par suite, elle devait répondre de l’infraction commise par Trenzas y Cables et par Tycsa PSC, que Trenzas y Cables contrôlait. Ce moyen se divise en deux branches. Dans la première branche, MRT soutient que c’est Tycsa PSC et non elle-même qui a succédé à Trenzas y Cables. La seconde branche est tirée de l’absence d’unité économique entre MRT, Tycsa PSC et GSW.

312    La Commission conteste cette argumentation.

a)     Rappel des principes applicables

 Principes applicables en matière de succession d’entreprises


 i) Notion d’entreprise et principe de responsabilité personnelle

313    Selon une jurisprudence constante, le droit de l’Union relatif à la concurrence vise les activités des entreprises et la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement. Lorsqu’une telle entité enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (voir arrêt du 13 juin 2013, Versalis/Commission, C‑511/11, EU:C:2013:386, point 51 et jurisprudence citée).

314    Lorsqu’une entité ayant commis une infraction aux règles de la concurrence fait l’objet d’un changement juridique ou organisationnel, ce changement n’a pas nécessairement pour effet de créer une nouvelle entreprise dégagée de la responsabilité des comportements contraires aux règles de la concurrence de la précédente entité si, du point de vue économique, il y a identité entre les deux entités. En effet, si des entreprises pouvaient échapper à des sanctions par le simple fait que leur identité ait été modifiée par suite de restructurations, de cessions ou d’autres changements juridiques ou organisationnels, l’objectif de réprimer les comportements contraires aux règles de la concurrence et d’en prévenir le renouvellement au moyen de sanctions dissuasives serait compromis (voir arrêt du 11 décembre 2007, ETI e.a., C‑280/06, EU:C:2007:775, points 41 et 42 et jurisprudence citée).

315    La notion d’entreprise doit être comprise comme désignant une unité économique – c’est-à-dire une organisation unitaire d’éléments personnels, matériels et immatériels poursuivant de façon durable un but économique déterminé – même si, du point de vue juridique, cette unité économique est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales (voir, en ce sens, arrêts du 12 juillet 1984, Hydrotherm Gerätebau, 170/83, EU:C:1984:271, point 11 ; du 11 décembre 2003, Minoan Lines/Commission, T‑66/99, EU:T:2003:337, point 122, et du 15 septembre 2005, DaimlerChrysler/Commission, T‑325/01, EU:T:2005:322, point 85).

316    Par ailleurs, en vertu du principe de responsabilité personnelle, un fait punissable ne peut être imputé qu’à son auteur. En outre, conformément au principe de personnalité des peines, une peine ne peut être subie par une autre personne que le coupable. Ces principes, qui constituent des garanties fondamentales issues du droit répressif, s’opposent par conséquent à l’engagement de la responsabilité d’une personne physique ou d’une personne morale qui n’a pas été l’auteur d’une infraction (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Cosmas dans l’affaire Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1997:357, point 74, et de l’avocat général Bot dans les affaires jointes ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., C‑201/09 P et C‑216/09 P, EU:C:2010:634, point 181, et dans l’affaire ThyssenKrupp Nirosta/Commission, C‑352/09 P, EU:C:2010:635, point 162).

 ii) Succession d’entreprises dans le cas de l’absorption de la personne morale auteur de l’infraction

317    Lorsque, entre le moment où l’infraction est commise et le moment où l’entreprise en cause doit en répondre, la personne morale responsable de l’infraction a cessé d’exister juridiquement, du fait qu’elle a été absorbée par une autre personne morale, cette dernière reprend l’actif et le passif de la première, y compris la responsabilité encourue pour avoir commis une infraction au droit de l’Union (arrêt du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, EU:T:2006:396, points 324 à 326 ; voir également, en ce sens, conclusions de l’avocat général Mischo dans l’affaire Stora Kopparbergs Bergslags/Commission, C‑286/98 P, EU:C:2000:263, point 75).

318    Dans cette hypothèse, la responsabilité pour l’infraction commise par l’entreprise absorbée peut être imputée à la nouvelle entité résultant de cette absorption, et ce même dans l’hypothèse où l’entreprise absorbée aurait cédé ou préalablement transféré les activités dans le cadre desquelles elle avait commis l’infraction (voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1999:356, point 145, et du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, EU:T:2006:396, point 326).

 Présomption réfragable d’exercice d’une influence déterminante par les sociétés mères sur leurs filiales

319    Il résulte également d’une jurisprudence constante que le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 54 et jurisprudence citée).

320    En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 101 TFUE, la Commission peut adresser une décision imposant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 55 et jurisprudence citée). En d’autres termes, ce n’est pas nécessairement une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et la filiale, ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, qui habilite la Commission à adresser la décision imposant des amendes à la société mère, mais le fait que les sociétés concernées constituent une seule entreprise, au sens de l’article 101 TFUE (arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 88).

321    Par ailleurs, la Cour a précisé que, dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence de l’Union, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une telle influence (ci‑après la « présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante ») (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 56 et jurisprudence citée).

322    La présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante vise notamment à ménager un équilibre entre l’importance, d’une part, de l’objectif consistant à réprimer les comportements contraires aux règles de la concurrence, en particulier à l’article 101 TFUE, et d’en prévenir le renouvellement et, d’autre part, des exigences de certains principes généraux du droit de l’Union tels que, notamment, les principes de présomption d’innocence, de personnalité des peines et de sécurité juridique ainsi que le respect des droits de la défense, y compris le principe d’égalité des armes. C’est notamment pour cette raison qu’elle est réfragable (arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 59). Il s’ensuit qu’une telle présomption est proportionnée au but légitime poursuivi (arrêt du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 108).

323    Ainsi, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce effectivement une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 57 et jurisprudence citée).

324    La présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante trouve également à s’appliquer dans les cas dans lesquels la société mère détient la quasi-totalité du capital social de sa filiale (voir, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2010, Alliance One International e.a./Commission, T‑24/05, EU:T:2010:453, point 217).

325    Une société mère peut être considérée comme responsable d’une infraction commise par une filiale, même lorsqu’il existe un grand nombre de sociétés opérationnelles dans un groupe (arrêts du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, dit « PVC II », T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, EU:T:1999:80, point 989, et du 27 septembre 2012, Shell Petroleum e.a./Commission, T‑343/06, EU:T:2012:478, point 52).

326    Il convient de préciser que, si la Cour, dans sa jurisprudence, a évoqué d’autres circonstances, telles que l’absence de contestation de l’influence exercée par la société mère sur la politique commerciale de sa filiale et la représentation commune des deux sociétés durant la procédure administrative, il n’en demeure pas moins que de telles circonstances n’ont pas été relevées dans le but de subordonner la mise en œuvre de la présomption à la production d’indices supplémentaires relatifs à l’exercice effectif d’une influence de la société mère. En d’autres termes, la Commission n’est pas tenue, en vue de faire jouer la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante dans un cas donné, d’apporter des indices supplémentaires à ceux démontrant l’applicabilité et le caractère opérant de cette présomption (voir, en ce sens, arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 80 et jurisprudence citée).

327    En outre, la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante repose sur le constat selon lequel, d’une part, sauf circonstances tout à fait exceptionnelles, une société détenant la totalité du capital d’une filiale peut, au vu de cette seule part de capital, exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, l’absence d’exercice effectif de ce pouvoir d’influence peut normalement le plus utilement être recherchée dans la sphère des entités à l’encontre desquelles la présomption opère. Dans ces conditions, s’il suffisait à une partie intéressée de réfuter ladite présomption en avançant de simples affirmations non étayées, celle-ci serait largement privée de son utilité (arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, points 60 et 61).

328    Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, la seule circonstance qu’une société mère soit un holding ne saurait suffire pour exclure qu’elle ait exercé une influence déterminante sur sa filiale. En effet, dans le contexte d’un groupe de sociétés, un holding, qui coordonne notamment les investissements financiers au sein du groupe, est une société qui a vocation à regrouper des participations dans diverses sociétés et a pour fonction d’en assurer l’unité de direction, notamment par le biais de ce contrôle budgétaire (voir, en ce sens, arrêts du 8 octobre 2008, Schunk et Schunk Kohlenstoff-Technik/Commission, T‑69/04, EU:T:2008:415, point 63 ; du 13 juillet 2011, Shell Petroleum e.a./Commission, T‑38/07, EU:T:2011:355, point 70 et jurisprudence citée, et du 29 juin 2012, E.ON Ruhrgas et E.ON/Commission, T‑360/09, EU:T:2012:332, point 283).

329    Enfin, afin d’apprécier si une filiale détermine de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en considération l’ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent cette filiale à la société mère, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l’objet d’une énumération exhaustive (arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C‑97/08 P, EU:C:2009:536, point 74).

330    Il n’y a pas lieu de restreindre cette appréciation aux seuls éléments se rapportant à la politique commerciale stricto sensu de la filiale, telle que la stratégie de distribution ou des prix. En particulier, la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante ne saurait être renversée par la seule démonstration que c’est la filiale qui gère ces aspects spécifiques de sa politique commerciale sans recevoir de directives à cet égard (voir arrêt du 16 juin 2011, FMC/Commission, T‑197/06, EU:T:2011:282, point 105 et jurisprudence citée). De même, étant donné que l’autonomie de la filiale ne s’apprécie pas au regard des seuls aspects de la gestion opérationnelle de l’entreprise, le fait que la filiale n’ait jamais mis en œuvre, au profit de la société mère, une politique d’information spécifique sur le marché concerné ne saurait suffire à démontrer son autonomie (arrêt du 16 juin 2011, FMC/Commission, T‑197/06, EU:T:2011:282, point 145).

331    En outre, le fait qu’il ne ressorte pas des pièces du dossier que la société mère ait donné des instructions à sa filiale ne saurait prouver que de telles instructions n’ont pas existé (voir arrêt du 7 juin 2011, Arkema France e.a./Commission, T‑217/06, EU:T:2011:251, point 118 et jurisprudence citée ; arrêts du 13 juillet 2011, Shell Petroleum e.a./Commission, T‑38/07, EU:T:2011:355, point 70, et du 13 juillet 2011, Eni/Commission, T‑39/07, EU:T:2011:356, point 97).

 Obligation de motivation

332    Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 63 ; du 30 septembre 2003, Allemagne/Commission, C‑301/96, EU:C:2003:509, point 87, et du 22 juin 2004, Portugal/Commission, C‑42/01, EU:C:2004:379, point 66).

b)     Sur la première branche, tirée de ce que c’est Tycsa PSC et non MRT qui a succédé à Trenzas y Cables

333    Selon la décision attaquée, Trenzas y Cables a directement participé au club Zurich depuis sa constitution, le 10 juin 1993, a contribué à la poursuite de l’infraction durant la période transitoire d’un an et quatre mois entre le club Zurich et le club Europe (ci-après la « période transitoire ») ainsi qu’à l’accord du Sud, au club Europe, à la coordination des ventes envers Addtek (considérant 735 de la décision attaquée), et ce jusqu’au 19 septembre 2002. De plus, Trenzas y Cables a été impliquée, de sa constitution, le 10 juin 1993, au 19 septembre 2002, dans le club Espan͂a. En outre, Trenzas y Cables a directement participé au club Italia, au moins depuis le 17 décembre 1996 jusqu’au 19 septembre 2002 (considérant 736 de la décision attaquée).

334    Il résulte tant des arguments présentés par MRT que du considérant 737 de la décision attaquée que MRT est issue de l’absorption de Trenzas y Cables par Trefilerías Moreda, intervenue le 27 décembre 2002, la nouvelle entité ainsi formée ayant alors pris la dénomination de MRT. Selon la jurisprudence rappelée aux points 317 et 318 ci-dessus, MRT doit donc répondre des infractions commises par Trenzas y Cables avant son absorption.

335    Il convient de rappeler, à titre liminaire, que, dans le cadre du premier moyen, MRT ne conteste pas que Trenzas y Cables ait été directement impliquée dans l’entente du 10 juin 1993 au 19 septembre 2002. C’est donc à juste titre que la Commission a estimé qu’elle devait répondre de cette infraction.

336    En effet, aucun des arguments avancés par MRT n’est de nature à infirmer cette appréciation.

337    En premier lieu, MRT soutient que la Commission aurait dû constater que les actifs impliqués dans l’infraction ont été transférés par Trenzas y Cables à Tycsa PSC avant son absorption par elle-même et que, dès lors, la Commission aurait dû considérer Tycsa PSC et non elle-même comme le successeur de Trenzas y Cables. Cet argument, toutefois, ne saurait prospérer, eu égard à la jurisprudence citée aux points 317 et 318 ci-dessus, dont il découle que MRT, en absorbant Trenzas y Cables, en a acquis l’actif et le passif, lequel incluait la responsabilité de l’infraction commise entre le 10 juin 1993 et le 19 septembre 2002.

338    À cet égard, si la circonstance que, à la date de son absorption par MRT, Trenzas y Cables avait transféré à Tycsa PSC les actifs qu’elle avait utilisés pour commettre l’infraction aurait pu, ainsi que le fait valoir MRT, permettre à la Commission de rechercher la responsabilité de Tycsa PSC sur le fondement de la continuité économique, une telle circonstance, cependant, n’est pas de nature à exonérer Trenzas y Cables de sa responsabilité. C’est donc à juste titre que la Commission a considéré que ladite responsabilité avait été transférée à MRT au moment où cette dernière a absorbé Trenzas y Cables.

339    Il convient, en outre, de constater que, entre la date du transfert de la totalité des actifs de Trenzas y Cables à Tycsa PSC (mars 2002) et celle de la décision attaquée, Trenzas y Cables a continué de détenir la totalité du capital de Tycsa PSC et que MRT ne présente aucun argument de nature à renverser la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante de Trenzas y Cables sur Tycsa PSC, si bien que la Commission était en tout état de cause fondée à imputer à Trenzas y Cables et, par voie de conséquence, à MRT, la responsabilité de l’infraction commise par Tycsa PSC.

340    En deuxième lieu, MRT estime que, en lui imputant la responsabilité de l’infraction commise par Trenzas y Cables, la Commission a méconnu plusieurs principes généraux du droit de l’Union.

341    Premièrement, la Commission aurait méconnu le principe in dubio pro reo. Cette allégation est toutefois insuffisamment précise pour permettre au Tribunal d’en comprendre la portée et, par suite, d’en apprécier le bien-fondé.

342    Deuxièmement, la Commission aurait méconnu le principe de non-discrimination au détriment de MRT et au profit de Tycsa PSC. À cet égard, il suffit de constater que MRT et Tycsa PSC ne sont pas dans une situation comparable, étant donné que, à la différence de Tycsa PSC, MRT doit être considérée comme ayant succédé à Trenzas y Cables pour les raisons rappelées au point 337 ci-dessus. En tout état de cause, il convient d’observer que Tycsa PSC a elle aussi été condamnée pour sa participation personnelle à l’infraction.

343    Troisièmement, MRT soutient que la Commission a méconnu le principe d’individualité des peines en la sanctionnant elle plutôt que Tycsa PSC pour les agissements commis par Trenzas y Cables. Cet argument ne peut qu’être écarté, dès lors que MRT doit être considérée comme ayant succédé à Trenzas y Cables et, par suite, répondre personnellement des infractions commises par cette dernière.

344    Quatrièmement, MRT fait grief à la Commission d’avoir sanctionné deux fois la même infraction, puisque Tycsa PSC a elle aussi été sanctionnée. À cet égard, il suffit de constater que MRT a été tenue pour responsable de l’infraction commise par Trenzas y Cables depuis le 10 juin 1993, alors que Tycsa PSC a été sanctionnée pour l’infraction qu’elle a personnellement commise depuis le 26 mars 1998.

345    En troisième lieu, MRT soutient que la décision attaquée n’est pas suffisamment motivée au regard des raisons qui ont amené la Commission à la tenir pour responsable de l’infraction commise par Trenzas y Cables. À cet égard, les motifs sur lesquels la Commission s’est fondée ont été exposés, aux considérants 735 à 739 de la décision attaquée, avec une précision suffisante pour satisfaire aux exigences de la jurisprudence rappelée au point 332 ci-dessus. Il convient, en outre, d’observer que la Commission y a répondu aux observations que MRT avait présentées à la suite de la communication des griefs, lesquelles sont en substance identiques à son argumentation devant le Tribunal.

346    Il s’ensuit qu’il convient d’écarter la première branche du premier moyen soulevé par MRT (affaire T‑426/10).

c)     Sur la seconde branche, tirée de l’absence d’unité économique entre MRT, Tycsa PSC et GSW

347    MRT présente une seconde branche dans laquelle elle conteste l’existence d’une unité économique entre elle-même, Tycsa PSC et GSW. À cet égard, il suffit de rappeler que, pour retenir la responsabilité de MRT, la Commission s’est fondée sur le fait que celle-ci succédait à Trenzas y Cables et non sur l’existence d’une unité économique entre MRT, Tycsa PSC et GSW. Dès lors, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 307 ci-dessus, il convient d’écarter la seconde branche du premier moyen comme inopérante.

348    Au surplus, dès lors qu’il a été constaté, à l’occasion de l’examen de la première branche du présent moyen, que la Commission avait pu à juste titre considérer MRT comme le successeur de Trenzas y Cables et qu’il ressort des points 139 à 176 ci-dessus que l’examen des arguments des requérantes permet de considérer que TQ, Tycsa PSC, Trenzas y Cables et GSW constituaient une unité économique, la seconde branche du présent moyen est, en tout état de cause, dépourvue de fondement.

349    Il résulte de ce qui précède que le premier moyen soulevé par MRT (affaire T‑426/10) doit être écarté comme partiellement non fondé et partiellement inopérant.

7.     Premier moyen soulevé par GSW (affaire T‑429/10), tiré d’erreurs de droit et de fait en ce qui concerne l’attribution de responsabilité à GSW

350    Par le premier moyen qu’elle soulève (affaire T‑429/10), GSW conteste pouvoir être tenue pour responsable de l’infraction.

a)     Rappel des principes applicables

351    Les principes jurisprudentiels relatifs à la succession d’entreprise en cas d’absorption d’une personne morale par une autre ont été rappelés aux points 317 et 318 ci-dessus.

352    Les principes relatifs à la responsabilité des sociétés mères pour les infractions commises par leurs filiales et à la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante ont été exposés aux points 319 à 324 ci-dessus.

b)     Étendue de la responsabilité encourue par GSW

 Succession de Trenzas y Cables de Acero

353    Ainsi qu’il a été rappelé au considérant 749 de la décision attaquée et par GSW dans la requête qu’elle a déposée, cette société est issue de la fusion par absorption, intervenue le 19 octobre 1996, de Trenzas y Cables de Acero et de Nueva Montaña Quijano Siderúrgica. Selon la jurisprudence citée aux points 317 et 318 ci-dessus, cette circonstance suffit à imputer à GSW la responsabilité des infractions commises par Trenzas y Cables de Acero antérieurement à sa disparition.

354    Or, il convient de rappeler que Trenzas y Cables de Acero a été tenue pour responsable de l’infraction en raison, premièrement, de sa participation directe au club Espan͂a, à compter du 15 décembre 1992 et au moins jusqu’au 10 juin 1993, deuxièmement, du contrôle qu’elle a exercé sur TQ, pour la période comprise entre le 15 décembre 1992 et le 19 octobre 1996, et, troisièmement, du contrôle qu’elle a exercé sur Trenzas y Cables, pour la période comprise entre le 10 juin 1993 et le 19 octobre 1996.

355    Il convient de rappeler également que, ainsi qu’il résulte des points 177 à 305 ci-dessus, le premier et le deuxième moyens présentés par TQ doivent être écartés, si bien que la participation directe de TQ à l’infraction doit être considérée comme établie durant toute la période allant du 15 décembre 1992 au 19 octobre 1996. Par ailleurs, GSW ne conteste ni que Trenzas y Cables ait directement participé à l’infraction à compter de sa constitution, c’est-à-dire à partir du 10 juin 1993, ni que Trenzas y Cables de Acero ait effectivement contrôlé Trenzas y Cables durant l’intégralité de cette période.

356    Dès lors, et sans même qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si c’est à juste titre que la Commission a pu considérer que Trenzas y Cables de Acero contrôlait effectivement TQ durant la période allant du 15 décembre 1992 au 19 octobre 1996, il convient de considérer que c’est à juste titre qu’elle a considéré que Trenzas y Cables de Acero devait être tenue pour responsable de sa participation directe à l’infraction pour la période comprise entre le 15 décembre 1992 et, à tout le moins, le 10 juin 1993 ainsi que comme responsable de la participation directe de Trenzas y Cables à l’infraction pour la période comprise entre le 10 juin 1993 et le 19 octobre 1996. Il s’ensuit que, en tant que successeur de Trenzas y Cables de Acero, GSW doit être tenue pour responsable de l’infraction pour la période comprise entre le 15 décembre 1992 et le 19 octobre 1996.

 Contrôle de Trenzas y Cables et de Tycsa PSC

357    Il est par ailleurs constant que GSW, dès sa constitution et jusqu’à la fin de l’infraction, a détenu la totalité du capital social de Trenzas y Cables, et, par l’intermédiaire de cette dernière, la totalité de celui de Tycsa PSC. Il convient donc d’examiner les arguments présentés par GSW pour renverser la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante sur laquelle la Commission s’est fondée pour lui imputer, notamment, la responsabilité de l’infraction à laquelle Trenzas y Cables et Tycsa PSC ont directement participé.

358    Or, il convient de rappeler que, pour partie, ces allégations doivent être écartées, ainsi qu’il résulte des points 139 à 176 ci-dessus. En effet, GSW conteste qu’une réunion ait pu intervenir dans ses locaux entre Trenzas y Cables et Nedri, fait valoir que le transfert du personnel de Trenzas y Cables à Tycsa PSC s’expliquait par le transfert de l’activité de vente d’APC intervenu en mars 2002 et conteste la pertinence du fait qu’elle a été l’administrateur unique de Trenzas y Cables entre 1997 et 2002 et de Tycsa PSC entre 1998 et 2002. Ainsi qu’il a été constaté aux points 139 à 176 ci-dessus, l’ensemble de ces éléments permet de caractériser l’existence d’une unité économique entre GSW, Trenzas y Cables, devenue MRT (voir points 333 à 346 ci-dessus), et Tycsa PSC, notamment.

359    En outre, au regard de la jurisprudence rappelée aux points 328, 330 et 331 ci-dessus, les allégations, au demeurant seulement étayées par des déclarations des directeurs des sociétés concernées et, par conséquent, non démontrées à suffisance, selon lesquelles ses filiales auraient disposé d’un libre pouvoir de décision, n’auraient pas reçu d’instructions, n’auraient pas informé GSW de la marche de leurs affaires, se seraient engagées librement envers les tiers, auraient défini librement leur propre stratégie juridique et été représentées dans les différents contentieux de façon autonome, auraient approuvé librement leur plan d’affaires (business plan) et défini leurs propres objectifs commerciaux, auraient eu des clients et des fournisseurs différents, auraient géré leurs finances et, en particulier, leur trésorerie de manière autonome, se seraient abstenues de communiquer des informations à GSW, auraient tenu des réunions sans que des représentants de GSW soient présents et auraient librement vendu des terrains, ne sauraient suffire pour renverser la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante. En effet, de telles allégations, même à les supposer établies, ne sont pas de nature à exclure que GSW ait été en mesure d’exercer un contrôle effectif des sociétés qu’elle détenait.

360    C’est, dès lors, à juste titre que la Commission a tenu GSW responsable de sa participation à l’infraction pour la période allant du 15 décembre 1992 au 19 septembre 2002.

361    Il s’ensuit que le premier moyen soulevé par GSW (affaire T‑429/10) doit être écarté, sans qu’il soit besoin de statuer sur les arguments relatifs à l’imputation à celle-ci de la responsabilité de la participation directe de TQ à l’infraction.

B –  Moyens relatifs à la qualification de l’infraction

362    Dans le cadre de son deuxième moyen, MRT (affaire T‑426/10) fait valoir que la Commission a commis des erreurs de fait et de droit en considérant l’infraction sanctionnée dans la décision attaquée comme unique et continue. Cette argumentation est présentée à l’identique par TQ, dans le cadre du troisième moyen (affaire T‑428/10), par Tycsa PSC (affaire T‑427/10) et par GSW (T‑429/10), dans le cadre du deuxième moyen.

363    Ces moyens sont présentés à titre principal et tendent à l’annulation de la décision attaquée.

1.     Composantes de l’entente et caractérisation de l’infraction unique dans la décision attaquée

364    Au considérant 122 de la décision attaquée, la Commission a décrit l’entente à laquelle il est reproché aux requérantes d’avoir participé comme un « arrangement paneuropéen consistant en une phase dite de Zurich et une phase dite européenne et/ou en arrangements nationaux/régionaux selon le cas ». Les considérants 123 à 135 de la décision présentent brièvement ces différents accords et pratiques concertées, qui sont par la suite exposés plus en détail et appréciés au regard de l’article 101, paragraphe 1, TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE. Selon la Commission, l’entente se compose, en particulier et dans l’ordre chronologique, de sept composantes essentielles. Ainsi qu’il est exposé ci-après, « Tycsa » a participé à la totalité de ces sept composantes.

365    Premièrement, le club Zurich, soit la première phase de l’accord paneuropéen, a duré du 1er janvier 1984 au 9 janvier 1996 et portait sur la fixation de quotas par pays (Allemagne, Autriche, Benelux, France, Italie et Espagne), le partage de clients, les prix et l’échange d’informations commerciales sensibles. Ses membres étaient, dans un premier temps, Tréfileurope, Nedri, WDI, DWK et Redaelli, laquelle représentait en outre plusieurs autres entreprises italiennes – au moins à partir de 1993 –, rejoints ensuite par Emesa, en 1992, et « Tycsa », en 1993.

366    Deuxièmement, plusieurs entreprises espagnoles [TQ, « Tycsa », Emesa, Galycas et Proderac (cette dernière à partir de mai 1994)] et deux entreprises portugaises (Socitrel à partir d’avril 1994 et Fapricela à partir de décembre 1998) ont constitué le club Espan͂a. Les entreprises participant à ce volet de l’entente sont convenues, pour l’Espagne et le Portugal, de maintenir leur part de marché stable et de fixer des quotas, de s’attribuer des clients, y compris pour les marchés publics de travaux, et de fixer les prix et les conditions de paiement. Elles ont, en outre, échangé des informations commerciales sensibles. Le club Espan͂a a poursuivi ses activités anticoncurrentielles jusqu’aux inspections menées par la Commission le 19 septembre 2002. « Tycsa » participait en outre aux réunions du club Zurich, du club Italia, de l’accord du Sud, du club Europe et à la coordination des ventes à Addtek. Des discussions et des arrangements fréquents ont également eu lieu entre d’autres participants du club Espan͂a et du club Europe.

367    Troisièmement, le club Italia, un arrangement national qui a duré du 5 décembre 1995 au 19 septembre 2002, portait sur la fixation de quotas pour l’Italie ainsi que sur les exportations de ce pays vers le reste de l’Europe. Ses membres étaient les entreprises italiennes Redaelli, ITC, CB et Itas, rejoints ensuite par Tréfileurope et Tréfileurope Italia, le 3 avril 1995, « Tycsa », le 17 décembre 1996, SLM, le 10 février 1997, DWK, le 24 février 1997, Trame, le 4 mars 1997, et Austria Draht, le 15 avril 1997.

368    Quatrièmement, l’accord du Sud est un arrangement régional négocié et conclu en 1996 par les entreprises italiennes, Redaelli, ITC, CB et Itas, avec « Tycsa » et Tréfileurope, afin de déterminer le taux de pénétration de chacun des participants dans les pays du Sud (Espagne, Italie, France, Belgique et Luxembourg) et de s’engager à négocier ensemble les quotas avec les autres producteurs de l’Europe du Nord.

369    Cinquièmement, le club Europe, soit la seconde phase de l’accord paneuropéen, a réuni, en mai 1997, les membres permanents (Tréfileurope, Nedri, WDI, DWK, « Tycsa » et Emesa). Les réunions du club Europe, auxquelles d’autres producteurs européens ont pu s’associer occasionnellement, ont pris fin en septembre 2002. L’accord visait à surmonter la crise du club Zurich et portait sur le partage de nouveaux quotas (calculés sur la période allant du quatrième trimestre 1995 au premier trimestre 1997), la répartition de clientèle et la fixation des prix. Les membres permanents sont convenus de règles de coordination incluant la désignation de coordonnateurs responsables de la mise en œuvre des arrangements dans plusieurs pays et de la coordination avec d’autres entreprises intéressées, actives dans ces pays ou concernant les mêmes clients. Leurs représentants se sont réunis régulièrement à différents niveaux, afin de surveiller la mise en œuvre des arrangements. Ils ont échangé des informations commerciales sensibles. En cas d’écart par rapport au comportement convenu, un système de compensation était appliqué.

370    Sixièmement, dans le cadre des volets paneuropéens de l’entente, les six membres permanents, rejoints occasionnellement par les producteurs italiens et Fundia, entretenaient également des contacts, bilatéraux ou multilatéraux, et participaient à la fixation de prix et à l’attribution de clientèle sur une base ad hoc, s’ils avaient un intérêt. Ainsi, Tréfileurope, Nedri, WDI, « Tycsa », Emesa, CB et Fundia ont coordonné ensemble les prix et les volumes pour le client Addtek. Ces projets concernaient principalement la Finlande, la Suède et la Norvège, mais aussi les Pays-Bas, l’Allemagne, les États baltes ainsi que l’Europe centrale et orientale. La coordination concernant Addtek a débuté durant le club Zurich de l’arrangement paneuropéen et s’est poursuivie au moins jusqu’à la fin de 2001.

371    Septièmement, au cours de la période allant, au moins, de septembre 2000 à septembre 2002, les membres permanents, ITC, CB, Redaelli, Itas et SLM se sont réunis régulièrement dans le but d’intégrer les entreprises italiennes dans le club Europe en tant que membres permanents. Les entreprises italiennes souhaitaient accroître leurs quotas en Europe, alors que le club Europe soutenait le statu quo. À cette fin, se sont tenues des réunions au sein du club Italia, aux fins de définir une position commune aux entreprises italiennes, des réunions au sein du club Europe, pour examiner les prétentions des entreprises italiennes, et des réunions entre des participants du club Europe et des représentants italiens, pour parvenir à un rapprochement entre les membres de ces deux arrangements. Au cours de ces négociations, les entreprises impliquées échangeaient des informations commerciales sensibles. Pour les besoins de la redistribution des quotas européens dans le but d’inclure les producteurs italiens, ces entreprises sont convenues d’utiliser une nouvelle période de référence (30 juin 2000-30 juin 2001). Elles se sont également entendues sur un volume d’exportation global des entreprises italiennes vers le reste de l’Europe. Parallèlement, elles ont discuté des prix, les membres du club Europe cherchant à étendre, à l’échelle de l’Europe, le mécanisme de fixation des prix appliqués par les producteurs italiens au sein du club Italia.

372    La Commission, aux considérants 610 à 612 de la décision attaquée, a indiqué les raisons pour lesquelles elle considérait que ces éléments infractionnels avaient constitué un ensemble cohérent de mesures visant l’unique objectif de restreindre la concurrence sur le marché de l’APC aux échelons européen et nationaux. Ainsi, la Commission a estimé que l’ensemble des arrangements anticoncurrentiels identifiés concourait à un unique but commercial anticoncurrentiel, à savoir fausser ou supprimer les conditions concurrentielles normales du marché de l’APC et instaurer un équilibre global par des mécanismes communs aux différents niveaux auxquels l’infraction avait été commise, c’est-à-dire la fixation des prix, l’allocation de quotas, la répartition de la clientèle et l’échange d’informations commerciales sensibles.

373    Plus particulièrement, au considérant 613 de la décision attaquée, elle a précisé les raisons pour lesquelles les phases du club Zurich et du club Europe avaient constitué une infraction unique, en dépit de la période transitoire. La Commission a, en particulier, relevé que des réunions dont l’objet était de porter atteinte à la libre concurrence et de remettre en place un arrangement paneuropéen durable avaient eu lieu dès la fin du club Zurich. Elle a aussi indiqué que les effets des contrats conclus sous l’égide du club Zurich avaient perduré durant la période transitoire et que le fonctionnement des arrangements régionaux, lesquels contribuaient au même but unique que celui qui était poursuivi par chacune des composantes de l’entente, s’était poursuivi durant cette même période.

374    Aux considérants 614 et 615 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que des mécanismes concrets de fonctionnement des différents éléments de l’entente assuraient la coordination entre les arrangements paneuropéens et les différents accords nationaux. Ainsi, selon la Commission, le système de quotas mis en place au sein du club Italia aurait inspiré le système retenu par le club Zurich. Par ailleurs, la coordination entre le club Europe et les producteurs italiens était assurée par Tréfileurope et celle entre le club Europe et le club España était assurée par « Tycsa » et par Emesa, qui participaient aux deux clubs.

375    Au total, selon les considérants 616 à 621 de la décision attaquée, tous les participants aux arrangements anticoncurrentiels ont participé, à des degrés divers, à un plan anticoncurrentiel commun, dont la mise en œuvre a été continue, tant dans ses objectifs que dans ses caractéristiques essentielles, de 1984 à la fin de 2002.

376    Au considérant 622 de la décision attaquée, la Commission a relevé que, même si tous les participants à l’entente n’avaient pas participé chacun à tous les éléments de l’infraction, ils avaient tous bénéficié des échanges d’informations intervenus entre les participants et savaient que leur participation s’inscrivait dans un plan d’ensemble.

2.     Notion d’infraction unique

377    Les requérantes contestent l’appréciation selon laquelle le club Zurich et le club Europe constituent deux éléments d’une infraction unique. Elles considèrent, de plus, que les membres du club Zurich ont interrompu l’infraction durant la période transitoire, si bien que la partie de l’infraction correspondant au club Zurich serait prescrite.

378    Selon une jurisprudence constante, une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE peut résulter non seulement d’un acte isolé, mais également d’une série d’actes ou bien encore d’un comportement continu, quand bien même un ou plusieurs éléments de cette série d’actes ou de ce comportement continu pourraient également constituer en eux-mêmes et pris isolément une violation de ladite disposition. Ainsi, lorsque les différentes actions s’inscrivent dans un plan d’ensemble, en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l’infraction considérée dans son ensemble (arrêts du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1999:356, point 81 ; du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 258, et du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 41).

379    Une entreprise ayant participé à une telle infraction unique et complexe par des comportements qui lui étaient propres, qui relevaient des notions d’accord ou de pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE et qui visaient à contribuer à la réalisation de l’infraction dans son ensemble, peut ainsi être également responsable des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction. Tel est le cas lorsqu’il est établi que ladite entreprise entendait contribuer par son propre comportement aux objectifs communs poursuivis par l’ensemble des participants et qu’elle avait connaissance des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par d’autres entreprises dans la poursuite des mêmes objectifs, ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque (arrêts du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1999:356, points 83, 87 et 203 ; du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 83, et du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 42).

380    Ainsi, une entreprise peut avoir directement participé à l’ensemble des comportements anticoncurrentiels composant l’infraction unique et continue, auquel cas la Commission est en droit de lui imputer la responsabilité de l’ensemble de ces comportements et, partant, de ladite infraction dans son ensemble. Une entreprise peut également n’avoir directement participé qu’à une partie des comportements anticoncurrentiels composant l’infraction unique et continue, mais avoir eu connaissance de l’ensemble des autres comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par les autres participants à l’entente dans la poursuite des mêmes objectifs, ou avoir pu raisonnablement les prévoir et avoir été prête à en accepter le risque. Dans un tel cas, la Commission est également en droit d’imputer à cette entreprise la responsabilité de l’ensemble des comportements anticoncurrentiels composant une telle infraction et, par suite, de celle-ci dans son ensemble (arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 43).

381    En revanche, si une entreprise a directement pris part à un ou plusieurs des comportements anticoncurrentiels composant une infraction unique et continue, mais qu’il n’est pas établi que, par son propre comportement, elle entendait contribuer à l’ensemble des objectifs communs poursuivis par les autres participants à l’entente et qu’elle avait connaissance de l’ensemble des autres comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par lesdits participants dans la poursuite des mêmes objectifs ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque, la Commission n’est en droit de lui imputer la responsabilité que des seuls comportements auxquels elle a directement participé et des comportements envisagés ou mis en œuvre par les autres participants dans la poursuite des mêmes objectifs que ceux qu’elle poursuivait et dont il est prouvé qu’elle avait connaissance ou pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque (arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 44).

382    Cela ne saurait néanmoins conduire à exonérer cette entreprise de sa responsabilité pour les comportements dont il est constant qu’elle y a pris part ou dont elle peut effectivement être tenue pour responsable. Il n’est toutefois envisageable de diviser ainsi une décision de la Commission qualifiant une entente globale d’infraction unique et continue que si, d’une part, ladite entreprise a été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de comprendre qu’il lui était également reproché chacun des comportements la composant, et donc de se défendre sur ce point, et si, d’autre part, ladite décision est suffisamment claire à cet égard (arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, points 45 et 46).

383    À cet égard, plusieurs critères ont été identifiés par la jurisprudence comme étant pertinents pour apprécier le caractère unique d’une infraction, à savoir l’identité des objectifs des pratiques en cause, l’identité des produits et des services concernés, l’identité des entreprises qui y ont pris part et l’identité des modalités de sa mise en œuvre. En outre, l’identité des personnes physiques impliquées pour le compte des entreprises et l’identité du champ d’application géographique des pratiques en cause sont également des éléments susceptibles d’être pris en considération aux fins de cet examen (voir arrêt du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, point 60 et jurisprudence citée).

384    Enfin, le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé doit être pris en considération lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et, le cas échéant, de la détermination de l’amende (arrêts du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1999:356, point 90, et du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 86).

3.     En ce qui concerne l’existence d’un plan d’ensemble

385    Les requérantes considèrent que la Commission ne pouvait se contenter, pour démontrer l’existence d’un plan d’ensemble, de relever que les différents éléments de l’infraction concernaient le même secteur économique. La Commission ne saurait, à cet égard, se fonder sur la présence de participants communs, lesquels, au demeurant, variaient selon les volets de l’entente concernés. En outre, c’est à tort qu’elle n’aurait tiré aucune conséquence du fait que la portée géographique des décisions prises en matière de quotas concernait les marchés nationaux dans le cadre du club Zurich, la totalité du marché européen dans le cadre du club Europe et des marchés différents dans les autres volets de l’entente. Par ailleurs, selon elles, les modalités de la coordination étaient différentes, puisque, par exemple, les directeurs des ventes participaient aux réunions du club Europe alors que seuls les cadres dirigeants assistaient aux réunions du club Zurich. De plus, des coordinateurs nationaux auraient été mis en place au sein du club Europe, alors que le club Zurich fonctionnait avec un bureau central de notification unique. Enfin, les différents volets de l’entente auraient été différents par leur portée temporelle.

386    Cependant, aucun de ces arguments n’est de nature à ébranler la démonstration effectuée dans la décision attaquée.

387    En effet, ainsi que la Commission l’a relevé, l’entente sanctionnée dans la décision attaquée était constituée d’un ensemble d’accords qui se sont succédé dans le temps aux niveaux tant local (national ou régional) qu’européen, dont l’objectif commun était d’assurer un équilibre non concurrentiel du marché européen de l’APC, caractérisé par une surcapacité structurelle.

388    Il est, en outre, constant que les moyens employés pour viser cet objectif, à savoir la fixation des prix, l’allocation de quotas, la répartition de clientèle et l’échange d’informations commerciales sensibles, étaient communs à tous les éléments de l’entente. Ainsi, les principaux participants au club Zurich et au club Europe, dont les requérantes, étaient les mêmes entreprises. La Commission fait valoir sans être contredite que ces entreprises étaient souvent représentées par les mêmes personnes physiques dans le cadre du club Zurich, puis dans celui du club Europe.

389    En outre, des mécanismes de coordination entre le club Zurich, puis le club Europe, d’une part, et les arrangements nationaux et régionaux (accords du Sud, club Italia et club España), d’autre part, bien qu’ils ne soient pas rigoureusement identiques, ont dans tous les cas été mis en place. En effet, d’une part, il est constant que les producteurs italiens participaient directement au club Zurich, alors que la coordination entre le club Europe et le club Italia a été assurée par Tréfileurope. D’autre part, la coordination entre le club España et le club Europe a été réalisée par l’intégration d’Emesa et de « Tycsa » au sein de ce dernier.

390    Ces constatations de fait, opérées par la Commission dans la décision attaquée et non sérieusement contestées par les requérantes, permettent de conclure à l’unicité d’une infraction constituée de plusieurs éléments au sens de la jurisprudence citée au point 383 ci-dessus.

391    Quant aux différences entre le club Zurich et le club Europe sur lesquelles s’appuient les requérantes, lesquelles ont au demeurant également été relevées dans la décision attaquée, il convient d’observer que celles-ci, loin de faire obstacle au constat d’une infraction unique, traduisent au contraire la volonté de mettre en place des moyens plus efficaces pour atteindre le même objectif que celui poursuivi par l’ensemble des participants aux différents arrangements de l’entente, à savoir limiter les effets de la concurrence dans un marché en surcapacité structurelle, notamment par le biais d’accords portant sur les prix, les quotas de production et la répartition des principaux clients.

392    Ce constat permet d’expliquer la contradiction apparente relevée par les requérantes entre les considérants 186 et 629 de la décision attaquée. En effet, bien que l’unicité de l’objet général poursuivi par l’entente dans ses composantes successives soit avérée, chacun des accords, dont l’ensemble constitue l’infraction unique, était caractérisé par sa dimension géographique, plus ou moins restreinte, ainsi que par les méthodes mises en œuvre pour assurer le suivi des engagements, lesquels, quant à eux, sont demeurés identiques et portaient sur les prix, les quotas de livraison, la répartition des clients et des échanges d’informations commerciales sensibles.

393    Dès lors, les différences de fonctionnement entre les deux phases successives des arrangements paneuropéens, les différences de portée géographique et temporelle et les différences observées entre les participants aux différents volets de l’entente ne s’opposent pas à la reconnaissance de l’existence d’un plan d’ensemble, caractérisé par une identité d’objet anticoncurrentiel, dans lequel se sont successivement inscrits le club Zurich et le club Europe, notamment (voir, en ce sens, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 258 ; du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, C‑105/04 P, EU:C:2006:592, point 110, et du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, point 60 et jurisprudence citée).

4.     En ce qui concerne l’incidence des allégations des requérantes relatives à l’interruption de l’entente sur la qualification de l’infraction et sur l’acquisition de la prescription

394    Les requérantes soutiennent que, à la suite de fortes dissensions intervenues au sein du club Zurich dès 1995, celui-ci a cessé de fonctionner le 9 décembre 1995, et ce avant que, le 12 mai 1997, ne débute le club Europe. Il y aurait donc interruption, pendant la période transitoire, du fonctionnement de l’entente, ce qui ferait obstacle à ce que le club Zurich et le club Europe puissent être considérés comme des éléments distincts d’une infraction unique.

395    À cet égard, il convient de rappeler que les requérantes ne contestent pas que les arrangements régionaux et nationaux, auxquels elles ont d’ailleurs participé, ne se sont pas interrompus durant la période transitoire. En outre, il convient de rappeler que, pour les raisons indiquées aux points 387 à 393 ci-dessus, la communauté d’objectifs et de moyens poursuivis par chacun des accords anticoncurrentiels identifiés par la Commission ainsi que, a fortiori dans le cas du club Zurich et du club Europe, la présence des mêmes producteurs principaux permettent de caractériser l’existence d’un plan d’ensemble, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 378 à 384 ci-dessus, dans lequel se sont successivement inscrits ces deux clubs.

396    Dès lors, même à supposer que la période transitoire constitue une rupture de l’entente ou, seulement, une période de cessation de toute activité infractionnelle, ce serait tout de même à bon droit que la Commission a considéré que les différents volets de l’entente constituaient une infraction unique. En effet, la durée de la période transitoire ayant été inférieure à celle de cinq ans prévue à l’article 25, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, l’infraction unique à laquelle ont participé les membres du club Zurich devrait tout au plus, s’il était admis que cette période avait constitué une interruption, être considérée comme répétée, avec pour seule conséquence que la durée prise en compte pour le calcul du montant des amendes infligées devrait être réduite (voir, en ce sens, arrêt du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, points 70 à 95 et jurisprudence citée).

397    Il s’ensuit que le présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, dès lors qu’il est tiré de l’acquisition de la prescription en ce qui concerne la période antérieure au 12 mai 1997, doit être écarté dans son ensemble, et ce que la période transitoire ait ou non constitué une interruption de l’infraction.

5.     En ce qui concerne le bien-fondé des allégations des requérantes relatives à l’interruption de l’entente durant la période transitoire

398    Au surplus, il convient également d’écarter comme dépourvus de fondement les arguments des requérantes relatifs à l’interruption de l’entente durant la période transitoire.

399    En effet, pour estimer que les agissements anticoncurrentiels des participants au club Zurich s’étaient poursuivis durant la période transitoire, la Commission s’est fondée, au considérant 613 de la décision attaquée, sur les arguments rappelés au point 373 ci-dessus. Par ailleurs, l’annexe 2 de la décision attaquée fait état de onze réunions au cours desquelles auraient eu lieu des échanges d’informations et seraient intervenus des accords sur les prix et des répartitions de quotas. Les requérantes, quant à elles, se bornent à soutenir que les éléments de preuve avancés par la Commission ne sont pas suffisants pour établir la poursuite de l’infraction durant la période transitoire.

400    À cet égard, il convient de rappeler qu’il n’est nullement inhabituel que, compte tenu des conflits d’intérêts inhérents à ce type d’accords, une entente pratiquée sur une longue période subisse des évolutions tant en ce qui concerne l’identité des participants que les formes et l’intensité de leur collusion.

401    Par ailleurs, il a été jugé de manière constante que le fait de communiquer des renseignements à ses concurrents en vue de préparer un accord anticoncurrentiel suffisait à prouver l’existence d’une pratique concertée au sens de l’article 101 TFUE (arrêts du 5 décembre 2013, Solvay/Commission, C‑455/11 P, EU:C:2013:796, point 40 ; du 6 avril 1995, Trefilunion/Commission, T‑148/89, EU:T:1995:68, point 82, et arrêt du 8 juillet 2008, BPB/Commission, T‑53/03, EU:T:2008:254, point 178).

402    Dans la décision attaquée (considérant 613), pour affirmer que les agissements anticoncurrentiels des anciens membres du club Zurich s’étaient poursuivis durant la période transitoire, la Commission a retenu six réunions parmi les onze mentionnées dans l’annexe 2.

403    Premièrement, selon la Commission, une réunion s’est tenue à Paris (France) le 1er mars 1996. Lors de cette réunion, auraient eu lieu des discussions portant sur les quotas et les prix en Europe. Il ressort, en effet, de la demande de clémence présentée par ITC, dans laquelle cette entreprise se réfère à un compte rendu de réunion établi le 12 mars 1996, c’est-à-dire peu après la réunion elle-même, qu’une réunion s’est tenue à cette date à Paris entre des représentants d’ITC, de « Tycsa », de Tréfileurope, de DWK, de Redaelli, de Nedri et de WDI. Selon la demande de clémence d’ITC, les sujets abordés lors de cette réunion ont concerné les prix et les quotas en Europe ainsi que l’état des stocks des entreprises présentes. Cette déclaration d’ITC, laquelle est auto-incriminante et se fonde sur un compte rendu contemporain des faits relatés, présente une valeur probante élevée. Les requérantes, quant à elles, n’ont présenté aucun élément de preuve contraire et l’inexactitude de ces informations ne ressort d’aucune des pièces du dossier soumis au Tribunal. L’existence de cette réunion, l’identité des participants et les sujets abordés doivent, dès lors, être tenus pour établis.

404    Deuxièmement, selon la Commission, une réunion s’est tenue le 8 octobre 1996 à Rosmalen (Pays-Bas). Cette réunion est attestée par Nedri dans la demande de clémence que cette société a présentée à la Commission. Selon Nedri, outre elle-même, ont assisté à cette réunion des représentants de DWK, de Fontaine Union ainsi que de WDI et les discussions ont porté sur la situation du marché néerlandais. Cette déclaration, auto-incriminante, n’est contredite par aucun élément de preuve contraire présenté par les requérantes ni par aucune des pièces du dossier. Il y a donc lieu de considérer comme établis l’existence de cette réunion, l’identité des participants ainsi que le sujet abordé.

405    Troisièmement, la Commission se réfère à une réunion intervenue le 4 novembre 1996. À cet égard, il ressort de la demande de clémence de Nedri que les participants à cette réunion étaient les mêmes que ceux qui avaient participé à une réunion organisée à Düsseldorf (Allemagne) le 8 janvier 1996, et que l’objet de ces deux réunions était identique. Or, il résulte de ladite demande de clémence que la première réunion, à laquelle avaient participé DWK, Nedri, Tréfileurope, « Tycsa » ainsi que WDI, avait porté sur la situation consécutive aux difficultés rencontrées depuis le mois de mai 1995 dans la mise en œuvre des accords de marché conclus dans le cadre du club Zurich. En revanche, il ne ressort ni de la demande de clémence de Nedri ni d’aucun autre élément de preuve avancé par la Commission que la réunion du 4 novembre 1996 ait également porté, ainsi qu’il est indiqué dans la décision attaquée, sur la situation du marché aux Pays-Bas. Sous cette seule réserve, l’existence de cette réunion, l’identité des participants et l’objet des discussions doivent être considérés comme établis.

406    Quatrièmement, la Commission fait état d’une réunion, intervenue le 4 décembre 1996, portant sur un « nouveau système de quotas ». Nedri, dans sa demande de clémence, a indiqué, au sujet de cette réunion, qu’elle s’était tenue à Bruxelles entre elle-même, Emesa, DWK, Tréfileurope, « Tycsa » ainsi que WDI. Selon Nedri, l’objet de cette réunion a été de discuter de la mise en place d’un nouveau système paneuropéen de quotas. Ces discussions, toutefois, n’ont pas abouti. Ces déclarations, auto-incriminantes, ne sont contredites par aucun élément de preuve contraire. Au regard de la jurisprudence citée au point 401 ci-dessus, la volonté de mettre en place un nouveau système de quotas présente en elle-même un caractère infractionnel et l’échec des négociations lors de la réunion du 4 décembre 1996 demeure donc sans incidence en ce qui concerne la nature infractionnelle de cette réunion.

407    Cinquièmement, la Commission renvoie, dans la décision attaquée, à une réunion intervenue le 3 avril 1997, portant également sur un « nouveau système de quotas ». Il ressort effectivement de la demande de clémence présentée par DWK qu’une réunion s’est tenue le 3 avril 1997 à Paris, à l’initiative de Nedri et de Tréfileurope. À cette réunion, ont participé, outre ces trois entreprises, « Tycsa », Emesa ainsi que WDI. Au cours de cette réunion, selon DWK, les discussions sur la mise en place d’un nouveau système de quotas ont été poursuivies, sans toutefois aboutir. DWK ajoute que, lors de cette réunion et par la suite, des informations commerciales sensibles ont été échangées entre les participants.

408    Sixièmement, enfin, la Commission a fait allusion à une réunion intervenue le 9 avril 1997, portant également sur un « nouveau système de quotas ». L’existence d’une telle réunion, le 9 avril 1997, à Düsseldorf, est attestée par Nedri dans sa demande de clémence. Nedri confirme ainsi que les participants à la réunion du 3 avril 1997 (voir point 407 ci-dessus) ont poursuivi leurs discussions tendant à la mise en place d’un nouveau système de quotas paneuropéen, incluant la Norvège et la Suisse mais excluant le Royaume-Uni et l’Irlande.

409    Il résulte de ce qui précède qu’il doit être considéré comme établi que, au moins à six reprises durant une période d’un an et quatre mois, les principaux producteurs européens, à savoir les membres tant du club Zurich jusqu’à sa dissolution que du club Europe à partir de sa constitution, se sont réunis pour échanger des informations commerciales sensibles et tenter de mettre en place un nouveau système de quotas paneuropéen contraignant. « Tycsa » a d’ailleurs participé à cinq de ces six réunions. Il résulte de la jurisprudence (voir point 401 ci-dessus) que de tels agissements suffisent à caractériser une infraction à l’article 101 TFUE. Dès lors, l’argument tiré par les requérantes de ce que chacun des producteurs européens a adopté un comportement autonome sur le marché durant la période transitoire n’est pas de nature à réfuter l’affirmation de la Commission selon laquelle l’infraction unique à laquelle elles ont participé s’est poursuivie durant la période transitoire.

410    Au surplus, d’une part, les requérantes ne contestent pas que, durant la période transitoire, les réunions des clubs Italia et España, auxquelles elles-mêmes participaient, se soient poursuivies (voir annexes 3 et 4 de la décision attaquée). Or, ainsi qu’il a été constaté aux points 387 à 389 ci-dessus, ces accords régionaux s’inscrivaient, en raison de leur communauté d’objectif et de moyens ainsi que de l’existence de mécanismes visant à la coordination entre les différents éléments de l’entente, dans un plan d’ensemble permettant de caractériser une infraction unique. En outre, durant la période transitoire elle-même, des membres du club Italia ont participé à la réunion du 1er mars 1996 (voir point 403 ci-dessus) et les requérantes, par ailleurs membres de tous les autres volets de l’entente, ont été associées à cinq des six réunions dont l’existence a été considérée comme établie, à l’exception de celle qui s’est tenue le 8 octobre 1996 à Rosmalen. Pour ce motif supplémentaire, la Commission était également en droit de considérer, comme elle l’a fait dans la décision attaquée, que l’infraction unique ne s’était pas interrompue.

411    D’autre part, la Commission est fondée à soutenir que la poursuite des effets des accords conclus entre les producteurs d’APC et leur clients à l’époque du club Zurich suffit à démontrer que l’infraction s’est poursuivie après la dissolution de ce club. À cet égard, l’argument tiré par les requérantes de ce que les contrats en cause étaient négociés à des dates variables durant l’année et de ce que certains de ces contrats ont pu venir à expiration au début de l’année 1996 ou que seuls deux contrats seraient concernés ne saurait infirmer l’analyse de la Commission, dès lors que les requérantes n’ont ni démontré, ni même soutenu, qu’aucun contrat n’avait été conclu peu avant la dissolution du club Zurich.

412    Il résulte de tout ce qui précède que la Commission était fondée à considérer que l’entente qu’elle a caractérisée dans la décision attaquée ne s’était pas interrompue durant la période transitoire et qu’elle a, dès lors, constitué une infraction unique et continue à l’article 101 TFUE.

413    Par suite, le présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, doit être écarté. Il s’ensuit, dès lors que doit être écarté l’ensemble des moyens présentés à titre principal et tendant à l’annulation de la décision attaquée, qu’il convient d’examiner les moyens des recours présentés à titre subsidiaire dans les affaires T‑426/10 à T‑429/10, lesquels tendent à la réduction du montant des amendes infligées aux requérantes.

C –  Moyens tirés de ce que l’application des lignes directrices de 2006 viole les principes de proportionnalité, de confiance légitime, de non-rétroactivité et de sécurité juridique

414    À titre subsidiaire, le troisième moyen présenté par MRT (affaire T‑426/10), par Tycsa PSC (affaire T‑428/10) et par GSW (affaire T‑429/10) ainsi que le quatrième moyen présenté par TQ (affaire T‑427/10) sont tirés de ce que la Commission a méconnu les principes généraux de proportionnalité, de confiance légitime, de non-rétroactivité et de sécurité juridique en appliquant, en l’espèce, les lignes directrices de 2006 à des faits commis antérieurement à leur entrée en vigueur.

1.     Sur l’application en l’espèce des lignes directrices de 2006

415    Les requérantes reprochent, en substance, à la Commission d’avoir fait application de la méthodologie figurant dans les lignes directrices de 2006 pour sanctionner des faits commis antérieurement à leur publication. Selon les requérantes, cette application rétroactive d’une loi pénale plus sévère méconnaît le principe de légalité des peines et de non-rétroactivité de la loi pénale institué, notamment, par l’article 7, paragraphe 1, de la CEDH. Cette application violerait en outre les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique.

416    Il convient de rappeler que le principe de protection de la confiance légitime s’inscrit parmi les principes fondamentaux de l’Union. Selon une jurisprudence constante, tout particulier a le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime lorsqu’il se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître à son égard des espérances fondées. Les assurances données doivent, en outre, être conformes aux normes applicables (voir arrêt du 24 mars 2011, ISD Polska e.a./Commission, C‑369/09 P, EU:C:2011:175, points 122 et 123 et jurisprudence citée).

417    En outre, les principes généraux de légalité des délits et des peines et de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère sont institués, en droit de l’Union, par l’article 49, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux. En vertu de l’article 53 de ladite charte, les droits garantis par ces principes doivent être d’une portée au moins équivalente à la protection des droits fondamentaux qui découle de l’interprétation par la Cour européenne des droits de l’homme de l’article 7, paragraphe 1, de la CEDH.

418    Par ailleurs, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que les règles de conduite interne adoptées par l’administration visant à produire des effets juridiques sur des tiers, tels les opérateurs économiques susceptibles de commettre des infractions à l’article 101 TFUE, si elles ne sauraient pour autant être qualifiées de règles de droit à caractère impératif en raison de leur nature intrinsèque, énoncent toutefois des règles de conduite indicatives dont l’administration ne peut d’elle-même s’écarter dans un cas particulier, sauf à fournir des justifications compatibles avec le principe d’égalité de traitement (arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 209 et 210).

419    Il en découle que les lignes directrices de 2006, qui constituent de telles règles de conduite, sont englobées dans la notion de « droit » au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la CEDH (voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 216, et du 18 mai 2006, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, C‑397/03 P, EU:C:2006:328, point 20).

420    Or, cette disposition, qui consacre notamment le principe de légalité des délits et des peines, si elle ne saurait être interprétée comme proscrivant la clarification graduelle des règles de la responsabilité pénale peut, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, s’opposer à l’application rétroactive d’une nouvelle interprétation d’une norme établissant une infraction (arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 217).

421    Il s’ensuit que les requérantes sont fondées à soutenir que le pouvoir d’appréciation de la Commission n’est pas uniquement limité par le cadre fixé par le règlement n° 17 ainsi que le règlement n° 1/2003 et que la seule circonstance que la Commission n’a pas méconnu ces règlements ne suffit pas à établir que l’application desdites lignes directrices de 2006 en l’espèce ne viole pas le principe de non-rétroactivité de la loi pénale. Ce principe, en effet, pourrait se trouver méconnu en cas d’application d’une interprétation qui n’aurait pas été raisonnablement prévisible au moment où l’infraction sanctionnée a été commise (arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 218).

422    Il résulte donc de ce qui précède que les lignes directrices doivent être considérées comme une interprétation, émanant de la Commission, relative à la conduite que celle-ci s’engage à adopter lorsqu’elle envisage d’infliger des amendes sur le fondement du règlement n° 17 ou du règlement n° 1/2003 et il ressort de la jurisprudence que les modifications apportées par la Commission à de telles interprétations sont compatibles avec les principes de non-rétroactivité de la loi pénale et de sécurité juridique pour autant que ces modifications peuvent être considérées comme raisonnablement prévisibles. En revanche, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les lignes directrices de 1998 pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 17 et de l’article 65, paragraphe 5, du traité CECA (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les « lignes directrices de 1998 ») faisaient partie du cadre juridique applicable au présent litige au même titre que l’article 15, paragraphe 4, du règlement n° 17.

423    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme que la portée de la notion de prévisibilité dépend dans une large mesure du contenu du texte dont il s’agit, du domaine qu’il couvre ainsi que du nombre et de la qualité de ses destinataires. La prévisibilité de la loi ne s’oppose pas à ce que la personne concernée soit amenée à recourir à des conseils éclairés pour évaluer, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences pouvant résulter d’un acte déterminé. Il en va spécialement ainsi des professionnels habitués à devoir faire preuve d’une grande prudence dans l’exercice de leur métier, dont il peut être attendu qu’ils mettent un soin particulier à évaluer les risques que comportent leurs actes infractionnels (voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 219).

424    En outre, l’application efficace des règles de la concurrence exige que la Commission puisse à tout moment adapter le niveau des amendes aux besoins de sa politique. Il en découle que les entreprises impliquées dans une procédure administrative pouvant donner lieu à une amende ne sauraient acquérir une confiance légitime dans le fait que la Commission ne dépassera pas le niveau des amendes pratiquées antérieurement ni dans une méthode de calcul de ces dernières (voir arrêt du 18 mai 2006, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, C‑397/03 P, EU:C:2006:328, points 21 et 22 et jurisprudence citée).

425    Par conséquent, en l’espèce, les requérantes devaient tenir compte de la possibilité que, à tout moment, la Commission décide d’élever le montant des amendes par rapport à sa pratique antérieure. Cela vaut non seulement lorsque la Commission procède à un relèvement du montant des amendes dans des cas particuliers, mais également si ce relèvement s’opère par l’application, à des cas d’espèce, de règles de conduite de portée générale telles les lignes directrices (voir arrêt du 18 mai 2006, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, C‑397/03 P, EU:C:2006:328, points 23 et 24 et jurisprudence citée).

426    Il s’ensuit que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que, après avoir adopté les lignes directrices de 1998, la Commission ne pouvait en aucun cas appliquer à des procédures en cours de nouvelles orientations sans violer la confiance légitime des entreprises.

427    Il convient toutefois de vérifier si les conditions de l’application des lignes directrices de 2006 en l’espèce satisfont aux exigences de sécurité juridique et de prévisibilité posées par la jurisprudence.

428    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de leur paragraphe 38, les lignes directrices de 2006 sont applicables à toutes les affaires pour lesquelles une communication des griefs a été notifiée après leur date de publication au Journal officiel de l’Union européenne. Cette publication étant intervenue le 1er septembre 2006 et la communication des griefs ayant été notifiée aux requérantes au plus tôt le 30 septembre 2008, les montants des amendes qui leur ont été infligées ont donc été calculés selon la méthodologie prévue dans les lignes directrices de 2006 et présumée connue des requérantes à la date de la notification de la communication des griefs.

429    Premièrement, il convient d’observer que cette règle contribue au respect du principe de sécurité juridique en précisant de façon claire et objective les conditions d’application dans le temps des lignes directrices de 2006 (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2012, Denki Kagaku Kogyo et Denka Chemicals/Commission, T‑83/08, non publié, EU:T:2012:48, point 108). En revanche, pour les raisons indiquées aux points 418 à 422 ci-dessus, les lignes directrices de 2006 ne peuvent être qualifiées de règles de droit à caractère impératif en raison de leur nature intrinsèque, dont l’opposabilité dépendrait d’une publication préalable, mais énoncent des règles de conduite indicatives que l’administration s’impose à elle-même et dont elle ne saurait s’écarter sauf à fournir des justifications compatibles avec le principe d’égalité de traitement. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, leur opposabilité aux tiers ne dépend pas, par conséquent, du point de savoir si elles ont fait l’objet d’une publication préalable à la date à laquelle les infractions sanctionnées ont été commises.

430    Deuxièmement, il convient également d’examiner si l’adoption des lignes directrices de 2006 présentait un caractère suffisamment prévisible au sens de la jurisprudence rappelée aux points 421 à 425 ci-dessus.

431    À cet égard, la principale innovation des lignes directrices de 2006, ainsi qu’il ressort de leurs paragraphes 5 à 7, consiste à prendre comme point de départ du calcul du montant de l’amende un montant de base, déterminé en fonction de la valeur des ventes des biens ou des services en relation avec l’infraction, de la durée et de la gravité de celle-ci, en y incluant en outre un montant spécifique en vue de dissuader les entreprises de s’engager dans des comportements illicites. Force est ainsi de constater que les lignes directrices de 2006 s’appuient sur les critères de gravité et de durée définis dans le règlement n° 17 et repris dans le règlement n° 1/2003, lesquels étaient déjà pris en compte dans les lignes directrices de 1998 (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2012, Denki Kagaku Kogyo et Denka Chemicals/Commission, T‑83/08, non publié, EU:T:2012:48, point 114).

432    Par ailleurs, l’éventualité qu’un opérateur avisé puisse ne pas être en mesure de déterminer à l’avance avec précision le niveau des amendes que la Commission infligera dans chaque cas particulier n’est pas en soi contraire à l’exigence de prévisibilité inhérente au principe de non-rétroactivité de la loi pénale. En effet, les objectifs de répression et de dissuasion poursuivis par la politique de la concurrence peuvent justifier d’éviter que les entreprises soient en mesure d’évaluer exactement les bénéfices et les inconvénients qu’elles retireraient de leur participation à une infraction. Il suffit que les entreprises, au besoin en s’entourant d’un conseil juridique, puissent prévoir de manière suffisamment précise les critères et l’ordre de grandeur des amendes qu’elles encourent. Or, ainsi qu’il vient d’être constaté, les critères pris en considération dans les lignes directrices de 2006 découlent de ceux mentionnés dans le règlement n° 17, lesquels avaient déjà été pris en compte dans les lignes directrices de 1998 (voir, en ce sens, arrêts du 22 mai 2008, Evonik Degussa/Commission, C‑266/06 P, non publié, EU:C:2008:295, point 55, et du 2 février 2012, Denki Kagaku Kogyo et Denka Chemicals/Commission, T‑83/08, non publié, EU:T:2012:48, point 118).

433    Enfin, les entreprises devant s’attendre à tout moment à l’éventualité que la Commission adapte sa pratique aux besoins de la politique de la concurrence, y compris en adoptant de nouvelles orientations générales (voir arrêt du 18 mai 2006, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, C‑397/03 P, EU:C:2006:328, points 23 et 24 et jurisprudence citée), l’argument des requérantes selon lequel la Commission n’avait pas rendu publique son intention de réformer les lignes directrices de 1998 n’est pas de nature à rendre une telle réforme imprévisible.

434    Il doit en être conclu que les lignes directrices de 2006 et la nouvelle méthode de calcul qu’elles comportent, à supposer qu’elle ait eu un effet aggravant quant au niveau des amendes infligées, étaient raisonnablement prévisibles pour des entreprises telles que les requérantes à l’époque où l’infraction concernée a été commise. Partant, en appliquant, dans la décision attaquée, les lignes directrices de 2006 pour calculer le montant de l’amende à infliger aux requérantes pour une infraction commise avant leur adoption, la Commission n’a pas violé le principe de non-rétroactivité de la loi pénale (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2012, Denki Kagaku Kogyo et Denka Chemicals/Commission, T‑83/08, non publié, EU:T:2012:48, points 117 et 124).

435    Il s’ensuit que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les lignes directrices de 2006 ne pouvaient être appliquées en l’espèce, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur le point de savoir si les requérantes sont fondées à soutenir que l’application des lignes directrices de 2006 a donné lieu à une amende plus lourde que celle qui leur aurait été infligée si elle avait été calculée en application des lignes directrices de 1998.

436    En effet, ainsi qu’il a été rappelé aux points 424 et 425 ci-dessus, le principe de non-rétroactivité ne s’oppose pas à l’application de lignes directrices ayant, par hypothèse, un effet aggravant quant au niveau des amendes infligées pour des infractions commises, à condition que la politique qu’elles mettent en œuvre soit raisonnablement prévisible à l’époque à laquelle les infractions concernées ont été commises (voir arrêts du 12 décembre 2007, BASF et UCB/Commission, T‑101/05 et T‑111/05, EU:T:2007:380, points 233 et 234 et jurisprudence citée, et du 2 février 2012, Denki Kagaku Kogyo et Denka Chemicals/Commission, T‑83/08, non publié, EU:T:2012:48, point 126 et jurisprudence citée).

437    En tout état de cause, il convient d’observer que, en se bornant à récapituler les éléments de calcul retenus par la Commission dans la décision attaquée, les requérantes demeurent en défaut d’établir que le montant des amendes qui auraient pu leur être infligées selon la méthodologie définie dans les lignes directrices de 1998 aurait nécessairement été moins élevé.

2.     Sur la violation de l’obligation de statuer dans un délai raisonnable

438    Les requérantes se prévalent de la violation de l’obligation de statuer dans un délai raisonnable, ce qui aurait eu pour conséquence que la communication des griefs leur soit notifiée tardivement et que les lignes directrices de 2006 soient appliquées en l’espèce.

a)     Obligation de statuer dans un délai raisonnable

439    Premièrement, l’observation d’un délai raisonnable dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général dont les juridictions de l’Union assurent le respect (voir arrêt du 19 décembre 2012, Heineken Nederland et Heineken/Commission, C‑452/11 P, non publié, EU:C:2012:829, point 97 et jurisprudence citée). Ce principe a été réaffirmé à l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux, en vertu duquel « toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l’Union » (arrêt du 5 juin 2012, Imperial Chemical Industries/Commission, T‑214/06, EU:T:2012:275, point 284).

440    Deuxièmement, le caractère raisonnable de la durée de la procédure doit s’apprécier en fonction des circonstances propres de chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, de la conduite des parties au cours de la procédure, de l’enjeu de l’affaire pour les différentes entreprises intéressées et de son degré de complexité (voir, en ce sens, arrêt du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, dit « PVC II », T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, EU:T:1999:80, point 126) ainsi que, le cas échéant, d’informations ou de justifications que la Commission est susceptible d’apporter quant aux actes d’enquête diligentés au cours de la procédure administrative.

441    Troisièmement, la Cour a jugé que la procédure administrative pouvait donner lieu à l’examen de deux périodes successives, chacune de celles-ci répondant à une logique interne propre. La première période, qui s’étend jusqu’à la communication des griefs, a pour point de départ la date à laquelle la Commission, faisant usage des pouvoirs que lui a conférés le législateur de l’Union, prend des mesures impliquant le reproche d’avoir commis une infraction et doit permettre à celle-ci de prendre position sur l’orientation de la procédure. La seconde période, quant à elle, s’étend de la communication des griefs à l’adoption de la décision finale. Elle doit permettre à la Commission de se prononcer définitivement sur l’infraction reprochée (arrêt du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, C‑105/04 P, EU:C:2006:592, point 38).

b)     Examen des arguments des requérantes

442    En l’espèce, la procédure administrative a connu quatre phases successives. La première phase a débuté le 9 janvier 2002, avec la communication à la Commission, par le Bundeskartellamt, des documents mentionnés au point 26 ci-dessus et s’est terminée le 30 septembre 2008 par l’adoption de la communication des griefs. La deuxième phase s’est alors ouverte et s’est achevée par l’adoption de la décision initiale, le 30 juin 2010. Après l’introduction d’une première série de recours, la Commission a adopté, le 30 septembre 2010, une première décision modificative, en vue de corriger diverses erreurs qu’elle avait constatées dans la décision initiale, ce qui a mis un terme à la troisième phase de la procédure administrative. Enfin, le 4 avril 2011, s’est achevée la quatrième phase de la procédure administrative, par l’adoption par la Commission de la seconde décision modificative.

443    Il convient de relever d’emblée que le moyen avancé par les requérantes ne porte que sur la première phase de la procédure administrative.

444    Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du 2 mai 1991, le Tribunal a adressé une question écrite à la Commission, afin d’obtenir une description détaillée des diligences qu’elle avait accomplies à la suite des inspections, qui ont eu lieu les 19 et 20 septembre 2002, et ce jusqu’à l’adoption de la communication des griefs. La Commission a déféré à cette demande par acte déposé au greffe du Tribunal dans le délai qui lui avait été imparti et une copie de la réponse de la Commission a été communiquée aux requérantes.

445    La Commission y expose, de manière détaillée et convaincante, les diligences qu’elle a accomplies tout au long de la procédure administrative et les raisons pour lesquelles la communication des griefs a été notifiée à la fin de l’année 2008. Plusieurs facteurs expliquent, en effet, la durée de la procédure administrative en l’espèce.

446    Il convient à ce propos d’avoir égard à la durée de l’entente (plus de 18 ans), à sa dimension géographique particulièrement étendue (l’entente concernait la majorité des États membres), à l’organisation de l’entente au niveau géographique et dans le temps, au nombre de réunions qui se sont tenues dans le cadre des différents clubs (plus de 500), au nombre d’entreprises concernées (17), au nombre de demandes de clémence présentées et au volume particulièrement important de documents, fournis dans ce cadre ou obtenus au cours des inspections et établis dans diverses langues, qui ont dû être examinés par la Commission, aux diverses demandes de renseignements complémentaires qui ont dû être adressées par la Commission aux différentes sociétés concernées au fur et à mesure de l’évolution de sa compréhension de l’entente, au nombre de destinataires de la communication des griefs (plus de 40) ainsi qu’au nombre de langues de procédure (8).

447    Sur la base des informations fournies par la Commission, qui témoignent de la complexité particulière de l’affaire, le Tribunal estime que, en dépit de la longueur particulière de la première phase de la procédure, celle-ci ne doit pas être qualifiée d’excessive. Par conséquent, la Commission n’a pas méconnu son obligation de statuer dans un délai raisonnable et il convient dès lors d’écarter le présent grief, sans qu’il soit besoin de statuer sur sa recevabilité dans les affaires T‑426/10 à T‑428/10, dans lesquelles il n’a été présenté qu’au stade de la réplique.

448    Il résulte de ce qui précède que le présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, doit être écarté dans son ensemble.

D –  Moyens tirés d’erreurs de fait et de droit dans l’appréciation des circonstances atténuantes

449    À titre subsidiaire, le quatrième moyen présenté par MRT (affaire T‑426/10), par Tycsa PSC (affaire T‑428/10) et par GSW (affaire T‑429/10) ainsi que le cinquième moyen présenté par TQ (affaire T‑427/10) sont tirés de ce que la Commission a commis des erreurs d’appréciation en refusant d’accorder aux quatre requérantes le bénéfice de circonstances atténuantes.

1.     Considérations liminaires

450    La Commission a examiné les demandes des requérantes tendant à ce que leur soit reconnu le bénéfice des circonstances atténuantes prévues par les lignes directrices de 1998 en cas de rôle mineur ou passif au point 19.2.2.3 de la décision attaquée.

451    Lors de l’audience, la Commission a renoncé à invoquer le caractère inopérant du présent moyen, bien que celui-ci soit tiré de la violation des lignes directrices de 1998. Or, ainsi qu’il résulte des points 415 à 448 ci-dessus, c’est à bon droit que, en l’espèce, la Commission a appliqué les lignes directrices de 2006. Il convient donc d’apprécier les arguments avancés par les requérantes au regard des critères prévus au paragraphe 29 des lignes directrices de 2006.

2.     Sur la première branche, tirée de la coopération effective des requérantes avec la Commission

452    Les requérantes, dans le cadre de la première branche du présent moyen, se prévalent de deux circonstances atténuantes relatives à leur prétendue coopération avec la Commission. Premièrement, elles soutiennent qu’elles n’ont pas contesté les faits durant la procédure administrative. Deuxièmement, elles estiment avoir fourni à la Commission des preuves dont la valeur ajoutée était significative.

a)     Sur l’absence de contestation des faits

453    Ainsi que la Commission le fait valoir à juste titre, l’absence de contestation des faits par une entreprise durant la procédure administrative ne constitue pas une circonstance atténuante susceptible de justifier une réduction du montant des amendes. En outre, la Commission fait remarquer que les requérantes ont précisément contesté les faits qui leur étaient reprochés dès leur réponse à la communication des griefs.

454    Il s’ensuit que le présent grief doit être écarté comme dépourvu de tout fondement et, en tout état de cause, comme manquant en fait.

b)     Sur la valeur ajoutée des preuves fournies

455    Les requérantes font valoir qu’elles ont fourni, dès le 17 octobre 2002, des preuves relatives aux réunions du club Europe intervenues les 3 juillet, 5 octobre 2000 et 26 novembre 2001.

456    Selon l’annexe 2 de la décision attaquée, la réunion du 3 juillet 2000 a porté sur une discussion générale sur l’intérêt d’un relèvement des prix, sans qu’aucune décision soit prise. Cette réunion est également attestée par DWK et par Tréfileurope.

457    Selon la même annexe, la réunion du 5 octobre 2000 a porté sur l’analyse des marchés nordiques. Aucune décision ne semble avoir été prise lors de cette réunion. Il ne semble pas que la Commission dispose d’autre source que « Tycsa » pour en établir l’existence.

458    Selon ladite annexe, la réunion du 26 novembre 2001 a donné lieu à un échange d’informations sur les ventes et sur les perspectives du marché par pays, mais ni à une allocation de quotas ni à une fixation de prix. « Tycsa » est la seule source mentionnée par la Commission.

459    Il convient d’observer d’emblée que les trois réunions en cause ne présentent aucun caractère essentiel, dès lors qu’elles n’ont pas permis à la Commission d’approfondir sa compréhension du fonctionnement de l’entente ni de prendre connaissance d’éléments susceptibles de faire apparaître la gravité de l’infraction.

460    Par ailleurs, la Commission soutient, sans être contredite par les requérantes, qu’elle a appris l’existence des réunions du 3 juillet 2000 et du 26 novembre 2001 lors des inspections qu’elle a réalisées dans les locaux des requérantes, c’est-à-dire en-dehors de toute contribution spontanée de leur part.

461    Enfin, les requérantes ne fournissent aucun élément de nature à faire apparaître qu’elles étaient dans une situation comparable à celle ayant donné lieu à la décision de la Commission C (2007) 512 final, du 21 février 2007 (affaire COMP/E-1/38.823, ascenseurs et escaliers mécaniques), dont elles se prévalent.

462    Il s’ensuit que les informations fournies par les requérantes concernant ces trois réunions (sur un total de 12 en 2000 et de 26 en 2001) ne présentent pas une valeur ajoutée significative, qui aurait dû amener la Commission à réduire le montant des amendes infligées.

463    Il résulte ainsi de ce qui précède que la première branche du présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, doit être écartée.

3.     Sur la seconde branche, tirée de la non-application des accords

464    Il ressort des lignes directrices de 2006 que, pour pouvoir bénéficier de la circonstance atténuante prévue au troisième tiret de leur paragraphe 29, l’entreprise doit prouver qu’elle s’est effectivement soustraite à l’application des accords.

465    Force est de constater que les requérantes n’apportent aucune preuve à l’appui de leurs allégations. Celles-ci, au demeurant, sont assez peu crédibles, de la part d’une entreprise membre de la totalité des volets de l’entente. Sur une période de dix années, il est en effet peu vraisemblable que les concurrents des requérantes ne se soient pas rendu compte de leur absence systématique de respect des engagements conclus dans le cadre de l’entente.

466    Par ailleurs, l’absence de mécanismes de sanction alléguée par les requérantes ne saurait ni constituer en soi une circonstance atténuante ni démontrer que les requérantes se sont en réalité soustraites à leurs obligations.

467    Enfin, les requérantes n’établissent pas que TQ, qui a bénéficié d’allocations constantes de quotas dans le cadre du club Espan͂a, se soit trouvée dans une situation comparable à celle de Proderac et de Trame.

468    Il résulte, dès lors, de ce qui précède que la seconde branche du présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, et, par suite, ledit moyen dans son ensemble doivent être écartés.

E –  Moyens relatifs à l’appréciation de la capacité contributive des requérantes dans la décision attaquée

469    Les quatre requérantes présentent chacune deux moyens, en substance identiques, relatifs à l’appréciation par la Commission de leur capacité contributive dans la décision attaquée.

470    Dans le cinquième moyen soulevé dans les affaires T‑426/10, T‑428/10 et T‑429/10 ainsi que dans le sixième moyen soulevé dans l’affaire T‑427/10, elles contestent la régularité formelle de l’appréciation de leur capacité contributive.

471    Dans le sixième moyen soulevé dans les affaires T‑426/10, T‑428/10 et T‑429/10 ainsi que dans le septième moyen soulevé dans l’affaire T‑427/10, elles contestent le bien-fondé de cette même appréciation.

1.     Rappel de la procédure et de la décision attaquée

472    En février 2009, les requérantes ont présenté quatre demandes tendant à la reconnaissance de leur absence de capacité contributive (ci-après les « demandes »), qu’elles ont étayées à la suite d’une demande de renseignements de la Commission du 23 février 2009 et actualisées en août 2009. Les demandes présentaient des considérations relatives à la situation de chaque requérante et à celle du groupe GSW. Les requérantes alléguaient que leur viabilité économique serait sérieusement compromise si une amende leur était infligée.

473    La Commission a rejeté les demandes au considérant 1175 de la décision attaquée, en raison de la possibilité pour les requérantes d’augmenter leurs facilités bancaires à court terme et de l’importance des ressources financières à la disposition des actionnaires du groupe GSW. Ce considérant se lit comme suit :

« Premièrement, les facilités bancaires à court terme et à la disposition de GSW peuvent encore être augmentées au vu de la solvabilité du groupe. Deuxièmement, l’ensemble du groupe et ses propriétaires familiaux ont d’importants moyens financiers. Le groupe GSW est détenu par la famille [Rub.] qui détient une série d’autres entreprises sidérurgiques, incluant notamment le groupe Celsa dont les actifs sont plusieurs fois plus importants que ceux du groupe GSW. En outre, la richesse nette de la famille [Rub.] en dehors de l’industrie sidérurgique est estimée à plus de deux fois le montant de l’amende. Ces éléments de richesse des actionnaires (dans les autres entreprises et dans les entreprises extérieures) leur permettent d’aider l’entreprise en cas de besoin. Les deux raisons ci-dessus (la possibilité de voir augmenter les facilités bancaires à court terme et l’aide possible des actionnaires) constituent chacune en elle-même une raison suffisante pour rejeter les demandes de GSW, de [Tycsa PSC], de MRT et de [TQ] invoquant leur absence de capacité contributive. Combinées, elles mènent a fortiori au rejet des demandes invoquant l’absence de capacité contributive. »

2.     Moyens relatifs à la violation des formes substantielles

474    Dans la première branche du présent moyen de la première série de recours (voir point 470 ci-dessus), les requérantes soutiennent que la Commission a violé le principe de respect des droits de la défense. Dans la seconde branche de ce moyen, elles font valoir que le rejet par la Commission des demandes est entaché d’un défaut de motivation.

a)     Sur la première branche, tirée de la violation des droits de la défense

475    Les requérantes soutiennent que la Commission a violé à leur égard les droits de la défense, en rejetant leurs demandes sans leur avoir communiqué au préalable les raisons pour lesquelles elle avait l’intention de rejeter celles-ci ni leur avoir donné l’occasion d’être entendues.

476    La Commission conteste cette allégation.

477    Le principe du respect des droits de la défense, dont l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux constitue une modalité d’application, comporte notamment le droit de toute personne d’être entendue avant l’adoption de toute mesure individuelle l’affectant défavorablement.

478    Ce principe, pour autant, ne fonde pas un droit des entreprises ayant présenté une demande de réduction du montant de l’amende en raison de leur absence de capacité contributive à être entendues sur le projet de décision envisagé par la Commission.

479    Une décision de rejet constitue, certes, une mesure individuelle défavorable. Il n’en demeure pas moins que le droit d’être entendu, lequel découle du principe de respect des droits de la défense, doit être considéré comme ayant été respecté dans les situations dans lesquelles, comme en l’espèce, la décision prise n’est fondée que sur des éléments communiqués par le demandeur et au vu d’un contexte juridique et factuel connu de lui (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2014, Euris Consult/Parlement, T‑637/11, EU:T:2014:237, point 119). En effet, il ressort des pièces du dossier soumis au Tribunal et il n’est pas contesté par les parties que les informations sur lesquelles la Commission a fondé son appréciation de la capacité contributive des requérantes dans la décision attaquée sont celles qui lui ont été fournies par celles-ci, en réponse au questionnaire que la Commission leur avait adressé ou de leur propre initiative.

480    À cet égard, il convient d’observer que l’allégation des requérantes selon laquelle la Commission se serait fondée sur des « éléments extérieurs » n’est ni suffisamment précise ni étayée par le moindre commencement de justification. En tout état de cause, il suffit de constater que les requérantes ne soutiennent pas que la Commission se serait fondée sur des éléments qui ne leur ont pas été communiqués et sur lesquels elles n’ont pas été mises en mesure de prendre position avant l’adoption de la décision attaquée.

481    Il s’ensuit que la première branche du présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, doit être écartée.

b)     Sur la seconde branche, tirée d’un défaut de motivation

482    Les requérantes soutiennent que la décision attaquée n’est pas suffisamment motivée en ce qui concerne l’exposé des raisons justifiant le rejet de leur demande de réduction fondée sur le paragraphe 35 des lignes directrices de 2006. En particulier, la Commission n’aurait fourni aucune précision quant à la manière dont elle est parvenue aux conclusions exposées dans la décision attaquée et quant aux données financières qu’elle a prises en compte.

483    La Commission conteste cette allégation.

484    Ainsi qu’il a été rappelé au point 332 ci-dessus et selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 63 ; du 30 septembre 2003, Allemagne/Commission, C‑301/96, EU:C:2003:509, point 87, et du 22 juin 2004, Portugal/Commission, C‑42/01, EU:C:2004:379, point 66).

485    Les motifs de la décision attaquée, reproduits au point 473 ci-dessus, permettent au Tribunal de comprendre les raisons qui ont conduit la Commission à rejeter la demande présentée par les requérantes et n’ont manifestement pas empêché celles-ci, au vu de la longueur de leurs écritures et du caractère circonstancié de leur argumentation, de comprendre ces justifications.

486    Il s’ensuit que la seconde branche du présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, et, par suite, ledit moyen dans son ensemble doivent être écartés.

F –  Moyens relatifs au bien-fondé de l’appréciation de la capacité contributive des requérantes

487    Dans le présent moyen (voir point 471 ci-dessus) de la première série de recours, les requérantes soutiennent que la Commission a commis plusieurs erreurs de fait et de droit en rejetant leurs demandes de réduction du montant de l’amende en raison de leur absence de capacité contributive.

488    La Commission conteste ces allégations.

1.     Considérations générales relatives à l’appréciation de la capacité contributive des entreprises sanctionnées pour avoir enfreint l’article 101 TFUE

489    Le paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 envisage l’incidence que peut avoir la capacité contributive d’une entreprise sanctionnée pour avoir enfreint l’article 101 TFUE sur le calcul du montant de l’amende susceptible de lui être infligée. Ce paragraphe est rédigé comme suit :

« Dans des circonstances exceptionnelles, la Commission peut, sur demande, tenir compte de l’absence de capacité contributive d’une entreprise dans un contexte social et économique particulier. Aucune réduction du montant de l’amende ne sera accordée à ce titre par la Commission sur la seule constatation d’une situation financière défavorable ou déficitaire. Une réduction ne pourrait être accordée que sur le fondement de preuves objectives que l’imposition d’une amende, dans les conditions fixées par les présentes lignes directrices, mettrait irrémédiablement en danger la viabilité économique de l’entreprise concernée et conduirait à priver ses actifs de toute valeur. »

490    Selon une jurisprudence constante, en adoptant des règles de conduite telles que des lignes directrices et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 211, et du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 40).

491    Il y a lieu de relever d’emblée qu’une réduction du montant de l’amende ne peut être accordée au titre du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 que dans des circonstances exceptionnelles et aux conditions qui sont définies dans ces orientations. Ainsi, d’une part, il doit être démontré que l’amende infligée « mettrait irrémédiablement en danger la viabilité économique de l’entreprise concernée et conduirait à priver ses actifs de toute valeur ». D’autre part, l’existence d’un « contexte économique et social particulier » doit également être établie. Il convient de rappeler, en outre, que ces deux ensembles de conditions ont été dégagés au préalable par les juridictions de l’Union.

492    S’agissant du premier ensemble de conditions, il a été jugé que la Commission n’est pas, en principe, obligée de tenir compte, lors de la détermination du montant de l’amende à infliger pour une violation des règles de la concurrence, de la situation financière déficitaire d’une entreprise, étant donné que la reconnaissance d’une telle obligation reviendrait à procurer un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises les moins adaptées aux conditions du marché (arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 327, et du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 94).

493    En effet, si tel devait être le cas, ces entreprises risqueraient d’être favorisées aux dépens d’autres entreprises, plus efficaces et mieux gérées. De ce fait, la seule constatation d’une situation financière défavorable ou déficitaire de l’entreprise concernée ne saurait suffire à fonder une demande visant à obtenir de la Commission qu’elle tienne compte de son absence de capacité contributive pour accorder une réduction du montant de l’amende.

494    Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, le fait qu’une mesure prise par une autorité de l’Union provoque la faillite ou la liquidation d’une entreprise n’est pas interdit, en tant que tel, par le droit de l’Union. Si une telle opération peut porter atteinte aux intérêts financiers des propriétaires ou des actionnaires, cela ne signifie pas pour autant que les éléments personnels, matériels et immatériels représentés par l’entreprise perdraient eux aussi leur valeur (voir, en ce sens, arrêts du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑236/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, EU:T:2004:118, point 372, et du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 50).

495    Il peut être déduit de cette jurisprudence que seule l’hypothèse d’une perte de la valeur des éléments personnels, matériels et immatériels représentés par une entreprise, en d’autres termes de ses actifs, pourrait justifier la prise en considération, lors de la fixation du montant de l’amende, de l’éventualité de sa faillite ou de sa liquidation, à la suite de l’imposition de cette amende (arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 51).

496    En effet, la liquidation d’une société n’implique pas nécessairement la disparition de l’entreprise en cause. Celle-ci peut continuer à subsister en tant que telle, soit en cas de recapitalisation de la société, soit en cas de reprise globale des éléments de son actif par une autre entité. Une telle reprise peut intervenir soit par un rachat volontaire, soit par une vente forcée des actifs de la société avec poursuite d’exploitation (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 97).

497    Il convient donc de comprendre la référence qui est faite, au paragraphe 35 des lignes directrices de 2006, à la privation des actifs de l’entreprise concernée de toute valeur comme envisageant la situation dans laquelle la reprise de l’entreprise dans les conditions évoquées au point 496 ci-dessus paraît improbable, voire impossible. Dans une telle hypothèse, les éléments d’actif de cette entreprise seront offerts à la vente séparément et il est probable que beaucoup d’entre eux ne trouveront aucun acheteur ou, au mieux, ne seront vendus qu’à un prix considérablement réduit (arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 98).

498    Quant au second ensemble de conditions, relatif à l’existence d’un contexte économique et social particulier, il renvoie, selon la jurisprudence, aux conséquences que le paiement de l’amende pourrait entraîner, notamment en termes d’augmentation du chômage ou de détérioration des secteurs économiques situés en amont et en aval de l’entreprise concernée (arrêts du 29 juin 2006, SGL Carbon/Commission, C‑308/04 P, EU:C:2006:433, point 106, et du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 99).

499    Dès lors, si les conditions cumulatives envisagées précédemment sont réunies, l’imposition d’une amende qui risquerait de provoquer la disparition d’une entreprise s’avérerait contraire à l’objectif poursuivi par le paragraphe 35 des lignes directrices de 2006. L’application dudit paragraphe aux entreprises concernées constitue, de la sorte, une traduction concrète du principe de proportionnalité en matière de sanctions des infractions au droit de la concurrence (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 100).

500    Enfin, ainsi que la Commission l’a rappelé à juste titre, à plusieurs reprises, dans le cadre des phases écrite et orale de la procédure devant le Tribunal, dès lors que l’application du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 constitue le dernier élément pris en considération lors de la détermination du montant des amendes infligées pour violation des règles de la concurrence applicables aux entreprises, l’appréciation de la capacité contributive des entreprises sanctionnées relève de la compétence de pleine juridiction qui est prévue à l’article 261 TFUE et à l’article 31 du règlement n° 1/2003.

501    Quant à la portée de cette compétence, il convient de rappeler qu’elle constitue une modalité de mise en œuvre du principe de protection juridictionnelle effective, principe général du droit de l’Union qui est maintenant exprimé à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux et correspond, dans le droit de l’Union, à l’article 6 de la CEDH (arrêts du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 51 ; du 6 novembre 2012, Otis e.a., C‑199/11, EU:C:2012:684, point 47, et du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 36).

502    Selon la jurisprudence, en effet, le respect de l’article 6 de la CEDH n’exclut pas que, dans une procédure de nature administrative, une « peine » soit imposée d’abord par une autorité administrative. Il suppose cependant que la décision d’une autorité administrative ne remplissant pas elle-même les conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH subisse le contrôle ultérieur d’un organe juridictionnel de pleine juridiction. Parmi les caractéristiques d’un organe juridictionnel de pleine juridiction, figure le pouvoir de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise. Un tel organe doit notamment avoir compétence pour se pencher sur toutes les questions de fait et de droit pertinentes pour le litige dont il se trouve saisi (arrêt du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 35 ; voir Cour EDH, Menarini Diagnostics c. Italie, n° 43509/08, § 59 et jurisprudence citée, 27 septembre 2011, et Segame c. France, n° 4837/06, § 55 et jurisprudence citée, 7 juin 2012).

503    Par ailleurs, l’absence de contrôle d’office de l’ensemble de la décision litigieuse ne méconnaît pas le principe de protection juridictionnelle effective. Il n’est pas indispensable au respect de ce principe que le Tribunal, certes tenu de répondre aux moyens soulevés et d’exercer un contrôle tant de droit que de fait, soit tenu de procéder d’office à une nouvelle instruction complète du dossier (arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, points 51 et 66).

504    Ainsi, sous réserve des moyens d’ordre public qu’il lui appartient d’examiner et, le cas échéant, de soulever d’office, le juge de l’Union doit effectuer son contrôle sur la base des éléments apportés par le requérant au soutien des moyens invoqués et ne saurait s’appuyer sur la marge d’appréciation dont dispose la Commission en ce qui concerne l’évaluation de ces éléments pour renoncer à exercer un contrôle approfondi tant de droit que de fait (voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 62).

505    Enfin, ainsi que le soutient à bon droit la Commission, le juge de pleine juridiction doit, en principe et sous réserve de l’examen des éléments qui lui sont soumis par les parties, tenir compte de la situation de droit et de fait qui prévaut à la date à laquelle il statue lorsqu’il estime qu’il est justifié d’exercer son pouvoir de réformation (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, InnoLux/Commission, T‑91/11, EU:T:2014:92, point 157). A fortiori, il doit en être ainsi dans les cas dans lesquels, comme en l’espèce, le montant de l’amende dont doit s’acquitter la société sanctionnée prenant en compte sa capacité contributive est celui qui résulte de la décision adoptée par le Tribunal à la suite du recours introduit par celle-ci, le paiement effectif de l’amende ayant été différé.

506    C’est à l’aune de ces considérations générales et au vu des moyens de fait et de droit présentés par les parties devant le Tribunal qu’il convient d’apprécier le raisonnement figurant dans la décision attaquée.

507    Ces mêmes considérations, en revanche, conduisent à écarter l’argumentation liminaire présentée à titre principal par la Commission selon laquelle elle disposerait d’un pouvoir discrétionnaire dans l’application du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 la soustrayant à tout contrôle juridictionnel. Il convient également, pour les mêmes raisons, d’écarter son argumentation liminaire présentée à titre subsidiaire selon laquelle le contrôle juridictionnel devrait être limité à la censure de l’erreur manifeste d’appréciation.

2.     En ce qui concerne le bien-fondé de l’appréciation de la capacité contributive des requérantes dans la décision attaquée

508    Il convient de rappeler que la demande de réduction du montant de l’amende pour absence de capacité contributive a été rejetée dans la décision attaquée pour deux motifs dont chacun, s’il s’avère fondé, justifie à lui seul le rejet de cette demande. Premièrement, la Commission a estimé que la situation financière des requérantes leur permettait de s’acquitter du paiement de l’amende ou d’obtenir les financements nécessaires, en particulier sous la forme de crédits ou de garanties consenties par des établissements de crédit. Deuxièmement, la Commission a estimé que le patrimoine des actionnaires des requérantes, qu’il s’agisse des autres sociétés du groupe Celsa ou du patrimoine personnel de son fondateur et propriétaire en dernier ressort, M. Rub., leur permettait de faire face au paiement des amendes infligées dans la décision attaquée.

a)     En ce qui concerne la possibilité pour les requérantes d’obtenir les financements nécessaires auprès d’établissements de crédit

509    En premier lieu, il convient de préciser que, si, dans le cadre de leurs moyens relatifs à l’imputation de l’infraction, les requérantes contestent qu’elles aient pu constituer une unité économique, dans le cadre de leurs moyens relatifs à l’appréciation de leur capacité contributive, en revanche, elles ne contredisent pas la thèse de la Commission selon laquelle il convient principalement de se placer du point de vue de GSW, laquelle contrôle directement ou indirectement les trois autres requérantes. À cet égard, d’une part, les arguments des requérantes selon lesquels elles ne constituent pas une unité économique doivent être écartés pour les raisons indiquées, notamment, aux points 139 à 176, 333 à 339 et 357 à 361 ci-dessus. D’autre part, il convient de constater d’emblée que les arguments présentés par MRT, TQ et Tycsa PSC relatifs à la situation financière de chacune d’elles ne présentent de pertinence qu’au cas où il serait constaté que, au regard de la situation financière de GSW, la décision attaquée est entachée d’erreurs d’appréciation. Il convient donc d’examiner d’abord la question de savoir si la Commission a pu constater à bon droit que la situation économique de GSW justifiait que la demande de réduction du montant de l’amende en application du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 présentée par les quatre requérantes devait être rejetée.

510    En deuxième lieu, à cet égard, les requérantes ne contestent pas les éléments suivants, sur lesquels s’est appuyée la Commission lorsqu’elle a adopté la décision attaquée.

511    Premièrement, GSW disposait, à la fin de l’année 2009, de lignes de crédit non utilisées pour un montant de 22 millions d’euros, lequel doit être mis en regard du montant total des amendes infligées au groupe, soit 54 389 000 euros. Dans ces conditions, le montant supplémentaire à financer, sans tenir compte de la situation des autres requérantes, était de l’ordre de 30 millions d’euros.

512    Deuxièmement, le montant total des amendes infligées aux quatre requérantes n’excédait pas 7 % des actifs de GSW.

513    Troisièmement, le solde de la trésorerie consolidée du groupe GSW au 31 décembre 2009 était supérieur au montant total des amendes infligées.

514    Quatrièmement, GSW bénéficiait de la confiance de ses créanciers, puisque, au moment de l’adoption de la décision attaquée, les requérantes ont obtenu un refinancement à hauteur de 3 milliards d’euros (contrats « Marco » et « Jumbo »). Le montant total des amendes infligées aux quatre requérantes représentait ainsi moins de 2 % de ce refinancement.

515    Au vu de l’ensemble de ces données, force est de constater que, ainsi que la Commission l’a estimé dans la décision attaquée, les requérantes avaient les moyens, sinon de s’acquitter immédiatement de la totalité des amendes infligées, du moins d’obtenir les financements ou les garanties nécessaires.

516    En troisième lieu, aucun des arguments des requérantes n’est de nature à contredire cette appréciation.

517    Premièrement, les différents rapports de Deloitte, lesquels sont tous postérieurs à la décision attaquée, comportent des prévisions pessimistes quant à la viabilité des requérantes qui ne se sont pas réalisées à ce jour. Au contraire, les parties se sont accordées, lors de l’audience, sur l’existence d’un plan de paiement échelonné de la totalité des amendes mises à la charge des quatre requérantes, négocié entre celles-ci et les services comptables de la Commission.

518    Deuxièmement, les requérantes reprochent à la Commission de s’être fondée sur les données relatives à l’exercice 2009, lequel, selon elles, ne donnaient pas une image exacte de leur situation financière. Or, à la date de l’adoption de la décision attaquée, à savoir le 30 juin 2010, les comptes annuels relatifs à cet exercice étaient les derniers disponibles et devaient donc, à ce titre, être pris en considération par la Commission.

519    Troisièmement, bien qu’elles-mêmes demandent au Tribunal d’apprécier le bien-fondé de l’appréciation de la Commission au vu de rapports financiers dont le premier a été établi plus de trois mois après la décision attaquée, les requérantes reprochent à la Commission de tenir compte du refinancement de 3 milliards d’euros dont elles ont bénéficié, au motif que les contrats « Marco » et « Jumbo » ont été conclus la veille de l’adoption de la décision attaquée et portés à la connaissance de la Commission postérieurement à cette adoption. Une telle argumentation, toutefois, ne saurait prospérer, dès lors que le Tribunal est amené à apprécier le caractère approprié des amendes dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction (voir point 505 ci-dessus).

520    Il s’ensuit que c’est à juste titre que la Commission a estimé que les requérantes pouvaient dégager les financements nécessaires pour faire face au paiement des amendes qui leur ont été infligées et que ce motif suffit à lui seul pour écarter le présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10.

b)     En ce qui concerne la possibilité d’un recours aux actionnaires

521    À titre surabondant, la Commission était également fondée à considérer que la situation financière des actionnaires du groupe GSW permettait aux requérantes de faire face au paiement de l’amende.

522    À cet égard, il convient tout d’abord d’observer que les requérantes n’ont pas transmis à la Commission les renseignements qu’elle estimait nécessaires pour évaluer l’importance du patrimoine de leurs actionnaires. Cette absence de diligence suffit à fonder le rejet de leur demande de réduction en raison de leur absence de capacité contributive, dès lors qu’il incombe à l’entreprise qui présente une telle demande de présenter d’elle-même à la Commission les éléments de fait nécessaires à cette appréciation.

523    En tout état de cause, la Commission soutient sans être contredite que la situation du groupe Celsa à la fin de l’année 2009 était la suivante : Celsa Nordic disposait de 48 millions d’euros en liquidités et de 70 millions d’euros supplémentaires en réserves ; Celsa UK disposait de 45 millions de livres sterling (GBP) en liquidités ; Celsa Huta Ostrowiec disposait de l’équivalent de 173 millions d’euros ; Celsa Spain, enfin, la division du groupe Celsa à laquelle appartiennent les requérantes, possédait des actifs d’une valeur cumulée de 2 milliards d’euros et 82 millions d’euros en liquidités, le capital social consolidé étant, quant à lui, évalué à 531 millions d’euros. Il doit être considéré comme établi, dans ces conditions, que le paiement d’une amende de 54,389 millions d’euros ne représentait pas une charge insoutenable pour le groupe Celsa.

524    Les requérantes, qui se bornent à renvoyer aux rapports établis par Deloitte et à soutenir que l’évaluation comptable du patrimoine de ses actionnaires personnes morales est supérieure à leur valeur réelle, ne présentent aucun commencement de preuve à l’appui de leur argumentation.

525    Il s’ensuit que le deuxième motif retenu par la Commission dans la décision attaquée suffit également à justifier le rejet de la demande de réduction du montant de l’amende en raison de leur capacité contributive présentée par les requérantes, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le patrimoine personnel de M. Rub., d’une part, et la situation financière de MRT, de TQ et de Tycsa PSC, d’autre part.

526    Il s’ensuit que le présent moyen, commun aux affaires T‑426/10 à T‑429/10, doit être écarté.

527    Il résulte ainsi de tout ce qui précède que la première série d’affaires (affaires T‑426/10 à T‑429/10) doit être rejetée.

II –  Sur la troisième série d’affaires

A –  Rappel de la procédure et du contenu de la lettre du 25 juillet 2012

1.     Deuxièmes demandes et procédure administrative

528    À la suite de l’adoption de la décision attaquée, les requérantes ont considéré être dans l’impossibilité d’obtenir une garantie bancaire et ne pas être en mesure de payer l’amende sans compromettre leur viabilité.

529    En juillet 2011, elles ont présenté de nouvelles demandes (ci-après les « deuxièmes demandes ») tendant à la reconnaissance de leur absence de capacité contributive, fondées sur le paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 et la section V de la note d’information du 10 juin 2010 de M. Joaquín Almunia, vice-président de la Commission, et de M. Janusz Lewandowski, membre de la Commission, sur l’absence de capacité contributive au sens du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006 (ci-après la « note d’information »). À l’appui de ces nouvelles demandes, les requérantes alléguaient les faits suivants.

530    D’une part, l’impossibilité d’obtenir un financement pour couvrir le montant des amendes serait démontrée par la conclusion des contrats de financement « Jumbo » et « Marco », sans lesquels les requérantes se seraient trouvées en situation d’insolvabilité définitive. De plus, la situation économique en Espagne, en particulier dans le secteur de la sidérurgie, se serait détériorée depuis l’adoption de la décision attaquée. En outre, des rapports d’experts mettraient en évidence qu’il leur est impossible de faire face à de nouvelles obligations de paiement. Enfin, les requérantes auraient obtenu des attestations d’établissements de crédit selon lesquelles lesdits établissements refuseraient de leur accorder les garanties bancaires ainsi que les facilités nécessaires au paiement des amendes.

531    D’autre part, l’impossibilité du recours à leurs actionnaires serait démontrée tant par des rapports d’experts faisant état de l’impossibilité pour les actionnaires personnes morales des requérantes de contribuer au paiement de l’amende ou à l’obtention d’une garantie bancaire que par le décès de l’unique actionnaire indirect de contrôle, dont les ayants droit auraient accepté l’héritage sans avoir conclu d’accord concernant la gestion des sociétés du groupe. Leur patrimoine s’avérerait, en outre, insuffisant pour couvrir le montant de l’amende.

532    Dans ce contexte, les requérantes ont fourni à de nombreuses reprises des informations sur l’évolution de leur situation financière. Le 28 juillet 2011, une réunion a eu lieu avec la Commission et, le 31 août 2011, les requérantes ont fourni des renseignements financiers demandés au cours de cette réunion. Le 17 novembre 2011, la Commission a transmis aux requérantes une demande de renseignements, à laquelle il a été répondu par courriers électroniques envoyés le 15 décembre 2011. Le 27 janvier 2012, les requérantes ont envoyé à la Commission des renseignements sur l’évolution négative du prix du fil machine pendant le dernier trimestre de 2011, par comparaison avec les prévisions initiales. Le 30 janvier 2012, un échange de courriers électroniques est intervenu entre GSW et la Commission. Le 31 janvier 2012, la Commission a adressé aux requérantes une nouvelle demande de renseignements, à laquelle GSW a répondu le 22 février 2012. Par lettre du 9 mars 2012, dans laquelle elle fournissait des informations actualisées sur l’évolution de sa situation financière, GSW a sollicité une réunion avec la Commission, afin de discuter de manière circonstanciée des faits invoqués dans la seconde demande. Le 15 mars 2012, la Commission a accepté la tenue d’une réunion et elle a envoyé une nouvelle demande de renseignements sur la situation financière des actionnaires finals des requérantes. Le 21 mars 2012, les requérantes ont communiqué certains renseignements ainsi que des documents décrivant le plan d’entreprise de GSW et du groupe de sociétés faisant partie de Celsa Spain pour la période 2012-2015. Une réunion a eu lieu le 22 mars 2012. Le 27 mars 2012, la Commission a demandé par téléphone des éclaircissements sur la situation financière des actionnaires finals des requérantes. Le 30 mars 2012, puis le 24 avril 2012, la Commission a demandé à nouveau des informations sur la situation financière de GSW ainsi que sur celle des actionnaires finals, demandes auxquelles il a été répondu le 26 avril 2012. Le 8 mai 2012, les requérantes ont transmis des renseignements supplémentaires. Le 25 mai 2012, la Commission a demandé des renseignements aux requérantes au cours d’une conversation téléphonique, lesquels ont été communiqués par courrier électronique du 28 mai 2012. Le 1er juin 2012, la Commission a demandé par téléphone des éclaircissements sur la situation financière de GSW.

2.     Lettre du 25 juillet 2012

533    Le 25 juillet 2012 le directeur général a communiqué aux requérantes sa décision de rejeter les deuxièmes demandes. Dans cette lettre, laquelle fait l’objet de la troisième série d’affaires (affaires T‑438/12 à T‑441/12), le directeur général a indiqué ce qui suit.

534    Premièrement, il a estimé que la situation financière de GSW ne s’était pas détériorée de manière significative par rapport à l’évaluation effectuée dans la décision attaquée. Même s’il reconnaissait que les contrats « Jumbo » et « Marco » pouvaient entraîner des problèmes de liquidités, il a considéré que la situation s’était améliorée par rapport aux chiffres disponibles avant la décision. Il en a conclu que, dès lors que le montant total des amendes infligées représentait un pourcentage inférieur à 2 % du total de la dette renégociée, GSW disposait de ressources suffisantes (actuelles et futures) pour faire face au paiement de celles-ci.

535    Deuxièmement, il a évoqué la possibilité que les actionnaires personnes morales ainsi que les actionnaires personnes physiques contribuent au paiement de l’amende. Concernant les premiers, les entreprises participant au périmètre espagnol (Tycsa PSC, ses actionnaires personnes morales et plusieurs autres entreprises liées) seraient, selon lui, en mesure de contribuer à ce paiement, compte tenu de la faible proportion de l’amende par rapport à leur taille. Concernant les actionnaires personnes physiques, le directeur général a estimé que les ayants droit du fondateur du groupe Celsa étaient en mesure de fournir une aide financière à GSW.

3.     Troisième demande d’appréciation de la capacité contributive des requérantes et demandes adressées au comptable de la Commission

536    Le 13 août 2012, les requérantes ont demandé à la Commission de reconsidérer les conclusions formulées dans la lettre du 25 juillet 2012 (ci-après la « troisième demande ») et ont proposé au comptable de la Commission de constituer une garantie réelle sur l’un des biens de GSW.

537    Par courrier électronique du 21 août 2012, le comptable de la Commission a rejeté la proposition de constitution de garanties réelles, en indiquant que celle-ci n’était pas conforme aux objectifs de la Commission et que l’amende devrait être couverte par un paiement provisoire ou une garantie bancaire.

538    Par lettre du 24 septembre 2012, le directeur général a rejeté la troisième demande. Cette lettre ne fait pas l’objet des présents recours, introduits le 5 octobre 2012.

B –  Sur la recevabilité des recours

539    La Commission a contesté la recevabilité de la troisième série d’affaires par voie d’exception. Ces exceptions, contestées par les requérantes, ont été jointes au fond.

540    Il convient de rappeler que toute manifestation d’opinion écrite émanant d’une institution de l’Union ne saurait constituer une décision de nature à faire l’objet d’un recours en annulation en vertu de l’article 263, premier alinéa, TFUE, dès lors qu’elle n’est pas susceptible de produire des effets juridiques ou qu’elle ne vise pas à produire de tels effets (voir, en ce sens, arrêts du 27 mars 1980, Sucrimex et Westzucker/Commission, 133/79, EU:C:1980:104, points 15 à 19, et du 27 septembre 1988, Royaume-Uni/Commission, 114/86, EU:C:1988:449, points 12 à 15).

541    De même, toute lettre émanant d’un organisme de l’Union envoyée en réponse à une demande formulée par son destinataire ne constitue pas un acte susceptible de faire l’objet d’un recours au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (voir, en ce sens, ordonnance du 27 janvier 1993, Miethke/Parlement, C‑25/92, EU:C:1993:32, point 10).

542    En revanche, en vertu d’une jurisprudence constante, les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts des tiers en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique constituent des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours au titre de l’article 263 TFUE (voir arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9 et jurisprudence citée, et du 17 avril 2008, Cestas/Commission, T‑260/04, EU:T:2008:115, point 67 et jurisprudence citée).

543    De plus, il y a lieu de s’attacher à la substance de la mesure dont l’annulation est demandée pour déterminer si elle est susceptible de faire l’objet d’un recours au titre de l’article 263 TFUE, la forme dans laquelle cette mesure a été prise étant en principe indifférente à cet égard (voir arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9 et jurisprudence citée, et du 17 avril 2008, Cestas/Commission, T‑260/04, EU:T:2008:115, point 68 et jurisprudence citée).

544    Seul l’acte par lequel un organisme de l’Union détermine sa position de façon non équivoque et définitive, dans une forme permettant d’en identifier la nature, constitue une décision susceptible de faire l’objet d’un recours au titre de l’article 263 TFUE, à la condition toutefois que cette décision ne constitue pas la simple confirmation d’un acte antérieur (voir, en ce sens, arrêt du 26 mai 1982, Allemagne et Bundesanstalt für Arbeit/Commission, 44/81, EU:C:1982:197, point 12).

545    Selon une jurisprudence bien établie, un recours formé contre un acte purement confirmatif d’une autre décision devenue définitive est irrecevable. Un acte est considéré comme purement confirmatif d’une décision antérieure s’il ne contient aucun élément nouveau par rapport à la décision antérieure et n’a pas été précédé d’un réexamen de la situation du destinataire de cette décision (arrêts du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 44 ; du 22 mai 2012, Sviluppo Globale/Commission, T‑6/10, non publié, EU:T:2012:245, point 22, et du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 40).

546    Toutefois, le caractère confirmatif ou non d’un acte ne saurait être apprécié en fonction uniquement de son contenu par rapport à celui de la décision antérieure qu’il confirmerait. En effet, il y a également lieu d’apprécier le caractère de l’acte attaqué par rapport à la nature de la demande à laquelle cet acte constitue une réponse (arrêts du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 45 ; du 22 mai 2012, Sviluppo Globale/Commission, T‑6/10, non publié, EU:T:2012:245, point 23, et du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 41).

547    En particulier, si l’acte constitue la réponse à une demande dans laquelle des faits nouveaux et substantiels sont invoqués et par laquelle l’administration est priée de procéder à un réexamen de la décision antérieure, cet acte ne saurait être considéré comme revêtant un caractère purement confirmatif, dans la mesure où il statue sur ces faits et contient, ainsi, un élément nouveau par rapport à la décision antérieure (arrêts du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 46 ; du 22 mai 2012, Sviluppo Globale/Commission, T‑6/10, non publié, EU:T:2012:245, point 24, et du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 42).

548    Selon une jurisprudence constante, l’existence de faits nouveaux et substantiels peut justifier la présentation d’une demande tendant au réexamen d’une décision antérieure devenue définitive. Si une demande visant au réexamen d’une décision devenue définitive est fondée sur des faits nouveaux et substantiels, l’institution concernée est tenue d’y procéder. À la suite de ce réexamen, l’institution devra prendre une nouvelle décision, dont la légalité pourra, le cas échéant, être contestée devant le juge de l’Union. En revanche, si la demande de réexamen n’est pas fondée sur des faits nouveaux et substantiels, l’institution n’est pas tenue d’y faire droit (voir arrêt du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, points 47 et 48 et jurisprudence citée ; arrêt du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 43).

549    Un recours introduit contre une décision refusant de procéder à un réexamen d’une décision devenue définitive sera déclaré recevable s’il apparaît que la demande était effectivement fondée sur des faits nouveaux et substantiels. En revanche, s’il apparaît que la demande n’était pas fondée sur de tels faits, le recours contre la décision refusant de procéder au réexamen sollicité sera déclaré irrecevable (voir arrêt du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 49 et jurisprudence citée ; arrêt du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 44).

550    En ce qui concerne la question de savoir selon quels critères des faits doivent être qualifiés de « nouveaux » et de « substantiels », il ressort de la jurisprudence que, pour pouvoir être considéré comme « nouveau », il est nécessaire que ni la partie requérante ni l’administration n’aient eu ou n’aient été en mesure d’avoir connaissance du fait concerné au moment de l’adoption de la décision antérieure (voir arrêt du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 50 et jurisprudence citée ; arrêt du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 45).

551    Pour présenter un caractère « substantiel », il est nécessaire que le fait concerné soit susceptible de modifier de façon substantielle la situation de l’auteur de la demande initiale ayant donné lieu à la décision antérieure devenue définitive (voir arrêt du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 51 et jurisprudence citée ; arrêt du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 46).

552    C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il y a lieu d’examiner la recevabilité des présents recours, dans la mesure où ils sont dirigés contre la lettre du 25 juillet 2012.

553    Force est d’observer d’emblée que, pour rejeter les deuxièmes demandes, le directeur général s’est fondé, dans la lettre du 25 juillet 2012, sur les mêmes motifs que ceux que le collège des membres de la Commission avait retenus dans la décision attaquée.

554    Ainsi, en l’espèce, le directeur général a considéré que les éléments transmis par les requérantes depuis l’adoption de la décision attaquée révélaient que leur situation financière s’était améliorée par rapport à celle que la Commission avait prise en compte lorsqu’elle a estimé qu’elles pouvaient faire face au paiement de l’amende en recourant, le cas échéant, à des établissements de crédit.

555    En ce qui concerne le second motif retenu dans la décision attaquée, à savoir la possibilité d’un recours aux actionnaires personnes morales et physiques, le directeur général l’a repris à l’identique, estimant que le décès de M. Rub., intervenu durant l’examen des deuxièmes demandes, ne présentait pas un caractère substantiel, étant donné que son patrimoine personnel avait été transmis à ses ayants droit.

556    Si la Commission n’est pas fondée à soutenir que seule une aggravation de sa situation financière pourrait justifier qu’une entreprise présente une nouvelle demande d’appréciation de sa capacité contributive, il convient néanmoins de considérer que, lorsque le seul changement par rapport à la situation de fait examinée par la Commission au moment où elle a apprécié la capacité contributive d’une entreprise consiste en l’amélioration de sa situation financière, celle-ci n’est pas recevable à demander à la Commission qu’elle réexamine la position qu’elle a préalablement adoptée. Dans une telle situation, par voie de conséquence, le rejet par la Commission de cette demande de réappréciation ne constitue pas un acte susceptible de recours.

557    Il convient ainsi de distinguer, lorsque l’administration est saisie d’une demande de réexamen d’une décision préalablement adoptée, entre la question de l’examen de la situation de fait et de droit dans laquelle se trouve l’intéressé et celle du réexamen de la décision antérieure. Ce n’est que lorsque, au terme de l’examen de la situation de l’intéressé, l’administration constate un changement substantiel, en fait ou en droit, de la situation de l’intéressé qu’elle est alors tenue de procéder au réexamen de sa décision. En revanche, à défaut d’un changement substantiel des circonstances de fait ou de droit, l’administration ne saurait être tenue de procéder au réexamen de ses décisions et la prise de position par laquelle elle rejette une demande de réexamen présentée dans ces conditions ne présente pas de caractère décisionnel, si bien qu’un recours introduit contre une telle prise de position doit être rejeté comme irrecevable, car dirigé contre un acte non susceptible de recours. Cependant, l’appréciation de l’administration selon laquelle l’intéressé ne présente aucun fait nouveau et n’établit pas le changement substantiel de sa situation de fait et de droit peut être soumise au contrôle du juge de l’Union.

558    Il convient donc d’examiner si, comme la Commission le prétend, la situation financière des requérantes s’est améliorée par rapport à celle qu’elle avait prise en considération dans la décision attaquée, ce que les requérantes contestent.

559    À titre liminaire, il convient de rappeler que la Commission était fondée à prendre en compte, lorsqu’elle a adopté la décision attaquée, la situation des requérantes telle qu’elle apparaissait dans les derniers comptes annuels disponibles, lesquels étaient relatifs à l’exercice 2009 (voir point 518 ci-dessus). Par ailleurs, les requérantes ont présenté de nombreux éléments relatifs à leur situation financière à l’appui des deuxièmes demandes (voir point 532 ci-dessus). Les premiers éléments ont été présentés à la date de ces demandes, c’est-à-dire en juillet 2011, et portaient sur le début de l’année 2011. L’instruction des deuxièmes demandes a duré près d’une année, au cours de laquelle la Commission a demandé et obtenu des renseignements, si bien que, dans la lettre du 25 juillet 2012, le directeur général s’est fondé sur les données financières existant à la fin de l’année 2011.

560    Or, les requérantes, à l’appui de leur allégation selon laquelle leur situation s’est dégradée depuis l’adoption de la décision attaquée, ne comparent pas les données de la fin de l’année 2011 – à savoir les dernières disponibles lorsque le directeur général a statué – avec celles de l’année 2009 – à savoir celles que la Commission a prises en considération dans la décision attaquée –, mais les données du début de l’année 2011 avec celles de 2008, année du paroxysme de la crise économique.

561    Force est toutefois de constater que la comparaison entre la situation des requérantes telle qu’elle pouvait être connue au mois de juillet 2012 avec celle, relative à l’année 2009, qui a été prise en compte par la Commission dans la décision attaquée fait ressortir une sensible amélioration. Or, les données présentées à cet égard par la Commission ne sont pas contestées par les requérantes.

562    Ainsi, si le montant total des amendes, intérêts compris, était de 54,26 millions d’euros en 2010 et s’établissait à 58,6 millions d’euros à la fin de l’année 2011, le chiffre d’affaires mondial de GSW a, durant la même période, progressé de 543 à 823 millions d’euros. Le rapport entre le montant des amendes et le chiffre d’affaires de GSW a ainsi diminué de 10 %, à la date de l’adoption de la décision attaquée, à 7,1 %, à la date à laquelle le directeur général a statué.

563    Durant cette même période, il convient de constater que le rapport entre le montant des amendes et la valeur des actifs cumulés de GSW et de TQ est demeuré stable et compris entre 6 et 7 %.

564    S’il est vrai que les fonds propres des requérantes se sont dégradés entre l’année 2009 et l’année 2011, passant de 212 à 196 millions d’euros, si bien que le rapport entre le montant total des amendes et les fonds propres s’est également légèrement dégradé, passant de 26 à 30 %, il convient toutefois d’avoir égard aux projections soumises par les requérantes à la Commission selon lesquelles le niveau des fonds propres attendus en 2015 était de 244 millions d’euros, soit un niveau supérieur à celui enregistré pour l’exercice 2009.

565    Durant la même période, les perspectives de rentabilité de GSW se sont par ailleurs substantiellement améliorées. Ainsi, en 2009, GSW a enregistré des pertes après cinq années consécutives durant lesquelles le résultat avait été positif. Les prévisions de résultats pour les années 2010 et 2011 étaient établies, à la fin de l’année 2009, à une perte de 6 millions d’euros et à 5 millions d’euros, respectivement. Or, les résultats réalisés ont été supérieurs à ces prévisions, à savoir un bénéfice de 1 million d’euros en 2010 et de 25 millions d’euros en 2011. De même, alors que le « earnings before interest, taxes, depreciation, and amortization » (bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement, EBITDA) était de – 20 millions d’euros en 2009, il atteignait 51 millions d’euros en 2010 et 90 millions d’euros en 2011. Le profil de risque de GSW, constitué par le rapport entre sa dette nette, avec ou sans amende, d’une part, et l’EBITDA, d’autre part, s’est ainsi considérablement amélioré entre 2009 et 2011.

566    En outre, les disponibilités en liquidités se sont également améliorées entre 2009 et 2011, le fonds de roulement passant de – 51 millions d’euros en 2010 à – 42 millions d’euros en 2011. Si le résultat du test Z-score d’Altmann, un indicateur du risque de faillite fondé sur des données rétrospectives, était préoccupant en 2009 (0,59 sans amende et 0,44 amendes comprises), il ne l’était plus en 2011 (1,35 sans amende et 1,29 amendes comprises), le seuil s’établissant, pour l’industrie, à 1,23.

567    Enfin, alors que, en 2009, GSW disposait d’un montant total de crédits bancaires de plus de 160 millions d’euros, dont 22 n’étaient pas utilisés en 2011, les dettes bancaires de l’entreprise avaient été renégociées avec succès pour un montant de 3 milliards d’euros, dont les amendes constituaient environ 2 %.

568    Les requérantes ne contestent pas l’exactitude de ces données financières. En effet, elles se bornent à proposer d’autres comparaisons, portant sur les données relatives à des années différentes. À cet égard, pour les raisons indiquées au point 559 ci-dessus, la Commission est fondée à soutenir que, pour apprécier la question de l’évolution de la situation des requérantes à la date de la lettre du 25 juillet 2012, les termes de la comparaison sont, d’une part, la situation qui prévalait à la fin de l’année 2009 et qui a été prise en considération dans la décision attaquée et, d’autre part, celle qui existait à la date à laquelle le directeur général a adopté la lettre du 25 juillet 2012. Or, force est de constater que, entre ces deux dates, la situation financière des requérantes s’est sensiblement améliorée.

569    Eu égard aux considérations évoquées aux points 556 et 557 ci-dessus, il s’ensuit que les faits allégués par les requérantes dans les deuxièmes demandes n’étaient pas susceptibles de modifier de façon substantielle l’appréciation portée sur leur capacité contributive dans la décision attaquée. Dès lors, la lettre du 25 juillet 2012 ne présente pas de caractère décisionnel et les recours constituant la troisième série d’affaires (affaires T‑438/12 à T‑441/12), étant dirigés contre ladite lettre, doivent être rejetés comme irrecevables.

570    Il résulte de tout ce qui précède que l’ensemble des présents recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

571    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Les recours sont rejetés.

2)      Moreda-Riviere Trefilerías, SA, Trefilerías Quijano, SA, Trenzas y Cables de Acero PSC, SL, et Global Steel Wire, SA sont condamnées aux dépens.

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 juin 2016.

Signatures

Table des matières


Objet du litige

Antécédents du litige

I –  Secteur faisant l’objet de la procédure

A –  Produit

B –  Structure de l’offre

C –  Structure de la demande

D –  Échanges au sein de l’UE et de l’EEE

II –  Sociétés appartenant au groupe Celsa

A –  GSW

B –  Tycsa PSC et MRT

C –  TQ

III –  Procédure administrative

A –  Première demande de clémence et immunité accordée à DWK

B –  Inspections et demandes de renseignements

C –  Autres demandes de clémence et réponses apportées par la Commission

D –  Ouverture de la procédure et communication des griefs

E –  Accès au dossier, audition et prise en compte de la capacité contributive

F –  Demandes complémentaires de renseignements

IV –  Décision attaquée

A –  Club Zurich et accords régionaux

B –  Club Europe et accords régionaux

C –  Participation des requérantes à l’entente et sanctions infligées

V –  Lettre du 25 juillet 2012

Procédure et conclusions des parties

I –  Procédure devant le Tribunal

II –  Jonction des présentes affaires aux fins de l’arrêt

III –  Conclusions des parties

En droit

I –  Sur la première série d’affaires

A –  Moyens relatifs à la participation des requérantes à l’infraction (affaires T‑426/10 à T‑429/10)

1.  Observations liminaires

a)  Résumé des arguments des parties

b)  Historique de la constitution des requérantes et rappel des motifs retenus dans la décision attaquée pour leur imputer leur participation à l’infraction

2.  Principes applicables à l’établissement des infractions ainsi qu’à la charge et à l’administration de la preuve

3.  En ce qui concerne la question de savoir dans quelle mesure les quatre requérantes peuvent être considérées comme une unité économique

a)  Observations liminaires

b)  Arguments des parties

En ce qui concerne la perception des concurrents selon laquelle les quatre requérantes constituaient une seule entité économique

En ce qui concerne le chevauchement du personnel employé par les requérantes

Sur la pertinence du fait que GSW était l’administrateur unique de TQ, de Trenzas y Cables et de Tycsa PSC

Sur les conséquences de la répartition de la production et des ventes d’APC entre TQ et Tycsa PSC

En ce qui concerne l’argument tiré par la Commission de ce qu’une réunion serait intervenue à Barcelone entre Trenzas y Cables et Nedri dans les locaux de GSW

c)  Appréciation du Tribunal

Existence de liens structurels entre les quatre requérantes

Perception des requérantes par les autres participants comme constituant une seule entité économique

Personnel commun

Répartition des activités de production et de vente d’APC entre les requérantes

En ce qui concerne l’argument tiré par la Commission de ce qu’une réunion serait intervenue à Barcelone entre Trenzas y Cables et Nedri dans les locaux de GSW

Appréciation globale de l’intégration des requérantes

4.  Premier et deuxième moyens soulevés par TQ (affaire T‑427/10), tirés d’erreurs de fait et de droit dans l’évaluation de sa participation aux comportements décrits dans la décision attaquée

a)  Sur le premier moyen soulevé par TQ (affaire T‑427/10), relatif à sa participation directe à l’infraction

Sur la première branche du premier moyen soulevé par TQ, relative à sa participation directe aux réunions du club Espan͂a

i) Année 1992

ii) Année 1993

–  Réunion « probable » du début de l’année 1993

–  Notes d’Emesa des 9 février, 29 mars et du mois d’avril 1993

–  Réunions d’avril et de mai 1993

iii) Année 1994

–  Réunion du 24 mai 1994

–  Réunion du 6 septembre 1994

–  Réunion du 7 novembre 1994

–  Réunion du 20 décembre 1994

iv) Année 1995

–  Réunion du 9 février 1995

–  Contact du 18 avril 1995

–  Réunions intervenues entre le 20 avril et le mois de décembre 1995

v) Année 1996

–  Réunion du 25 janvier 1996

–  Réunion du 8 février 1996

–  Réunion du 10 avril 1996

–  Réunions du 26 avril et du début du mois de mai 1996

–  Réunion du 12 septembre 1996

–  Réunion du 1er octobre 1996

–  Réunion du 22 novembre 1996

vi) Année 1997

–  Réunion du 22 janvier 1997

–  Échange d’informations entre MM. Par. et Mol. (début mai 1997)

–  Réunion du 14 octobre 1997

–  Échange d’informations entre MM. Par. et Tor. (18 novembre 1997)

–  Réunion du 27 novembre 1997

–  Réunion de la fin du mois de décembre 1997

vii) Année 1998

–  Réunion (non contestée) du 28 janvier 1998

–  Réunions du 28 février et du mois de mai 1998

–  Réunions des 14 mai et 2 décembre 1998

viii) Année 1999

ix) Année 2000

x) Année 2001

xi) Année 2002

Sur la deuxième branche du premier moyen soulevé par TQ, tirée de l’absence de preuve de sa connaissance du club Italia et du club Europe

Sur la troisième branche du premier moyen, visant à contester certains arguments sur lesquels la Commission s’est fondée

i) En ce qui concerne l’incidence de la perception des concurrents de TQ selon laquelle TQ et « Tycsa » constituent un groupe unique

ii) En ce qui concerne les conséquences pour TQ de la participation de MM. Mol., Rui., Pra., Pin., Pue. et dCo. aux réunions de l’entente

iii) Sur la nature des réunions de l’ATA

b)  Sur le deuxième moyen soulevé par TQ (affaire T‑427/10), tiré de ce qu’elle-même et les autres requérantes constituaient des entités économiques distinctes

5.  Premier moyen soulevé par Tycsa PSC (affaire T‑428/10), tiré d’erreurs de droit et de fait dans l’établissement de sa responsabilité

6.  Premier moyen soulevé par MRT (affaire T‑426/10), tiré d’erreurs de droit et de fait dans l’application de l’article 101 TFUE ainsi que d’un défaut de motivation en ce qui concerne l’attribution de responsabilité à MRT

a)  Rappel des principes applicables

Principes applicables en matière de succession d’entreprises

i) Notion d’entreprise et principe de responsabilité personnelle

ii) Succession d’entreprises dans le cas de l’absorption de la personne morale auteur de l’infraction

Présomption réfragable d’exercice d’une influence déterminante par les sociétés mères sur leurs filiales

Obligation de motivation

b)  Sur la première branche, tirée de ce que c’est Tycsa PSC et non MRT qui a succédé à Trenzas y Cables

c)  Sur la seconde branche, tirée de l’absence d’unité économique entre MRT, Tycsa PSC et GSW

7.  Premier moyen soulevé par GSW (affaire T‑429/10), tiré d’erreurs de droit et de fait en ce qui concerne l’attribution de responsabilité à GSW

a)  Rappel des principes applicables

b)  Étendue de la responsabilité encourue par GSW

Succession de Trenzas y Cables de Acero

Contrôle de Trenzas y Cables et de Tycsa PSC

B –  Moyens relatifs à la qualification de l’infraction

1.  Composantes de l’entente et caractérisation de l’infraction unique dans la décision attaquée

2.  Notion d’infraction unique

3.  En ce qui concerne l’existence d’un plan d’ensemble

4.  En ce qui concerne l’incidence des allégations des requérantes relatives à l’interruption de l’entente sur la qualification de l’infraction et sur l’acquisition de la prescription

5.  En ce qui concerne le bien-fondé des allégations des requérantes relatives à l’interruption de l’entente durant la période transitoire

C –  Moyens tirés de ce que l’application des lignes directrices de 2006 viole les principes de proportionnalité, de confiance légitime, de non-rétroactivité et de sécurité juridique

1.  Sur l’application en l’espèce des lignes directrices de 2006

2.  Sur la violation de l’obligation de statuer dans un délai raisonnable

a)  Obligation de statuer dans un délai raisonnable

b)  Examen des arguments des requérantes

D –  Moyens tirés d’erreurs de fait et de droit dans l’appréciation des circonstances atténuantes

1.  Considérations liminaires

2.  Sur la première branche, tirée de la coopération effective des requérantes avec la Commission

a)  Sur l’absence de contestation des faits

b)  Sur la valeur ajoutée des preuves fournies

3.  Sur la seconde branche, tirée de la non-application des accords

E –  Moyens relatifs à l’appréciation de la capacité contributive des requérantes dans la décision attaquée

1.  Rappel de la procédure et de la décision attaquée

2.  Moyens relatifs à la violation des formes substantielles

a)  Sur la première branche, tirée de la violation des droits de la défense

b)  Sur la seconde branche, tirée d’un défaut de motivation

F –  Moyens relatifs au bien-fondé de l’appréciation de la capacité contributive des requérantes

1.  Considérations générales relatives à l’appréciation de la capacité contributive des entreprises sanctionnées pour avoir enfreint l’article 101 TFUE

2.  En ce qui concerne le bien-fondé de l’appréciation de la capacité contributive des requérantes dans la décision attaquée

a)  En ce qui concerne la possibilité pour les requérantes d’obtenir les financements nécessaires auprès d’établissements de crédit

b)  En ce qui concerne la possibilité d’un recours aux actionnaires

II –  Sur la troisième série d’affaires

A –  Rappel de la procédure et du contenu de la lettre du 25 juillet 2012

1.  Deuxièmes demandes et procédure administrative

2.  Lettre du 25 juillet 2012

3.  Troisième demande d’appréciation de la capacité contributive des requérantes et demandes adressées au comptable de la Commission

B –  Sur la recevabilité des recours

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’espagnol.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.