Language of document : ECLI:EU:T:2015:670

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

23 septembre 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire verbale AINHOA – Marques communautaire et internationale figuratives antérieures NOA – Motifs relatifs de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑400/13,

L’Oréal, établie à Paris (France), représentée par Mes M. H. Granado Carpenter et M. L. Polo Carreño, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. Ó. Mondéjar Ortuño et A. Schifko, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Cosmetica Cabinas SL, établie à El Masnou (Espagne), représentée par Mes L. Montoya Terán et J.-B. Devaureix, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 6 juin 2013 (affaire R 1643/2012‑1), relative à une procédure de nullité entre L’Oréal et Cosmetica Cabinas, SL,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 août 2013,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 19 février 2014,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 23 février 2014,

vu la décision du 26 mai 2014 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

à la suite de l’audience du 19 mars 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédent du litige

1        Le 9 septembre 2003, l’intervenante, Cosmetica Cabinas, SL, a obtenu, auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) l’enregistrement, sous le numéro 2 720 811, de la marque communautaire verbale AINHOA (ci-après la « marque contestée ») en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1) tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 3, 35 et 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits cosmétiques » ;

–        classe 35 : « Services de vente au détail de produits cosmétiques » ;

–        classe 39 : « Distribution, transport et entreposage de produits cosmétiques ».

3        Le 14 octobre 2009, la requérante, L’Oréal , a présenté à l’OHMI une demande visant à faire déclarer la nullité de la marque contestée, en vertu de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009.

4        La demande de nullité est fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque communautaire figurative, déposée le 12 avril 2002 et enregistrée le 25 juillet 2003 sous le numéro 2 652 170 pour les produits relevant de la classe 3 et correspondant à la description suivante : « Parfums, eaux de toilette ; gels et sels pour le bain et la douche non à usage médical ; savons de toilette ; déodorants corporels ; cosmétiques notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage, le corps et les mains ; laits, gels et huiles de bronzages et après-soleil (cosmétiques) ; produits de maquillage ; shampooings ; gels, mousses, baumes et produits sous la forme d’aérosol pour le coiffage et le soin des cheveux ; laques pour les cheveux ; colorants et produits pour la décoration des cheveux ; produits pour l’ondulation et la mise en plis des cheveux ; huiles essentielles » et reproduite ci-après :

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–        la marque figurative, identique à la marque reproduite ci-dessus, faisant l’objet de l’enregistrement international n° 702 616, demandé le 3 novembre 1998, produisant ses effets au Benelux, en République tchèque, en Allemagne, en Espagne, en Italie, en Hongrie, en Autriche, en Pologne, au Portugal, en Roumanie, en Slovaquie et au Royaume-Uni pour les produits relevant de la classe 3 et correspondant à la description suivante : « Parfums, eaux de toilette ; gels et sels pour le bain et la douche non à usage médical ; savons de toilette ; déodorants corporels ; cosmétiques notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage, le corps et les mains ; laits, gels et huiles de bronzages et après-soleil \/ ; produits de maquillage ; shampooings ; gels, mousses, baumes et produits sous la forme d’aérosol pour le coiffage et le soin des cheveux ; laques pour les cheveux ; colorants et produits pour la décoration des cheveux ; produits pour l’ondulation et la mise en plis des cheveux ; huiles essentielles ; dentifrices » .

5        Les motifs invoqués à l’appui de la demande de nullité étaient ceux visés à l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, dudit règlement.

6        Par décision du 26 juillet 2012, la division d’annulation a rejeté la demande de nullité.

7        Le 31 août 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 6 juin 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Premièrement, la chambre de recours a rejeté les arguments fondés sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle a considéré que les produits en cause relevant de la classe 3 étaient identiques, que les produits couverts par les marques antérieures et les services relevant de la classe 35 couverts par la marque contestée présentaient un degré de similitude faible et qu’il n’y avait pas de similitude entre les produits couverts par les marques antérieures et les services relevant de la classe 39 couverts par la marque contestée. Elle a estimé que les marques en conflit présentaient un faible degré de similitude, en raison d’une très faible similitude visuelle, d’une similitude phonétique perceptible uniquement dans certaines langues, telles que l’espagnol ou le français, et d’une absence de similitude conceptuelle. La chambre de recours a estimé que les marques antérieures avaient un caractère distinctif normal, en l’absence de preuves suffisantes du caractère distinctif renforcé des marques antérieures. Eu égard à l’ensemble de ces éléments et au fait que les produits couverts par les marques antérieures seraient généralement achetés après un examen visuel de ces produits, la chambre de recours a considéré que les différences visuelles constatées suffisaient pour écarter l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Deuxièmement, la chambre de recours a rejeté les arguments fondés sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2209, au motif que la requérante n’avait pas apporté de preuves suffisantes permettant de démontrer la renommée des marques antérieures.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À l’appui de son recours, la requérante soulève deux moyens, tirés, respectivement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et de la violation de l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement, lus conjointement avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), de ce même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), du même règlement

12      À l’appui de son premier moyen, la requérante soutient en substance que la chambre de recours a commis une erreur dans l’appréciation du risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, concernant, premièrement, la similitude de certains produits et services en cause, deuxièmement, la similitude des signes en conflit et, troisièmement, le caractère distinctif des marques antérieures.

13      Aux termes de l’article 53, paragraphe 1, sous a), lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur demande du titulaire de la marque antérieure, une marque communautaire est déclarée nulle lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i) et iii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques communautaires et les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

14      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

15      En outre, il convient de tenir compte de la circonstance selon laquelle le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il garde en mémoire (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec, EU:C:1999:323, point 26).

 Sur le public pertinent

16      Il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits ou de services concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

17      S’agissant du territoire pertinent, les marques antérieures prises en compte par la chambre de recours étant une marque communautaire et une marque figurative faisant l’objet d’un enregistrement international produisant ses effets dans plusieurs États membres de l’Union européenne, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que le territoire au regard duquel le risque de confusion devait être apprécié est celui de l’Union.

18      En ce qui concerne le degré d’attention du public pertinent, la chambre de recours a considéré, à juste titre et sans être contredite par les parties, que les produits couverts par les marques antérieures et les produits visés par la marque contestée s’adressaient au grand public. La chambre de recours a également constaté, sans être contredite par les parties, que les services relevant de la classe 39, visés par la marque contestée, étaient destinés à des professionnels.

19      S’agissant des services relevant de la classe 35 couverts par la marque contestée, eu égard à leur nature, il y a lieu de considérer que la chambre de recours a constaté, à bon droit, que lesdits services étaient destinés aux consommateurs moyens.

20      Par conséquent, le public pertinent est composé, en l’espèce, des consommateurs moyens de l’Union, normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, et des professionnels du secteur des cosmétiques, dont le niveau d’attention est élevé.

 Sur la comparaison des produits et des services

21      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

22      La chambre de recours a considéré que les produits couverts par les marques antérieures et ceux visés par la marque contestée étaient identiques, que les produits couverts par les marques antérieures et les services relevant de la classe 35 visés par la marque contestée étaient similaires à un faible degré et qu’il n’existait aucune similitude entre les produits couverts par les marques antérieures et les services relevant de la classe 39 visés par la marque contestée.

23      La requérante fait valoir que les services relevant de la classe 35 visés par la marque contestée présentent un degré de similitude moyen, et non faible, avec les produits relevant de la classe 3 couverts par les marques antérieures, et que les services relevant de la classe 39 visés par la marque contestée présentent un degré de similitude faible avec les produits visés par les marques antérieures.

24      À titre liminaire, il convient de confirmer la constatation, non contestée, de la chambre de recours, faite au point 19 de la décision attaquée, selon laquelle les produits couverts par les marques antérieures sont inclus dans les « produits cosmétiques » visés par la marque contestée et que lesdits produits sont donc identiques .

25      S’agissant de la similitude entre les produits couverts par les marques antérieures et les services de vente au détail relevant de la classe 35 visés par la marque contestée, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il existe une similitude entre des produits et les services de vente au détail qui portent sur ces produits [voir arrêt du 5 juillet 2012, Comercial Losan/OHMI – McDonald’s International Property (Mc. Baby), T‑466/09, EU:T:2012:346, point 24 et jurisprudence citée]. En l’espèce, les produits couverts par les marques antérieures sont identiques à ceux sur lesquels portent les services visés par la marque contestée. En outre, il convient de constater que ces services de vente au détail se retrouvent dans les mêmes points de vente que les produits visés par les marques antérieures et qu’il existe donc un lien entre ces produits et ces services. Dès lors, c’est à tort que la chambre de recours a considéré que les services de vente au détail, qui incluent les services de vente de produits cosmétiques relevant de la classe 35 et visés par la marque contestée et les produits cosmétiques relevant de la classe 3 et couverts par les marques antérieures présentaient un faible degré de similitude et non un degré de similitude moyen.

26      S’agissant de la similitude entre les produits couverts par les marques antérieures et les services relevant de la classe 39 et visés par la marque contestée, ainsi qu’il a été rappelé au point 21 ci-dessus, la similitude entre les produits et les services en cause s’apprécie notamment en fonction de leur caractère concurrent ou complémentaire.

27      Les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Par définition, des produits ou services adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire [voir arrêt du 12 décembre 2014, Comptoir d’Épicure/OHMI – A-Rosa Akademie (da rosa), T‑405/13, EU:T:2014:1072, point 95 et jurisprudence citée].

28      D’une part, il y a lieu de constater que les produits et les services en cause diffèrent par leur nature et leur modalité d’utilisation. D’autre part, il ressort du point 18 ci-dessus que les produits relevant de la classe 3 sont destinés aux consommateurs moyens tandis que les services relevant de la classe 39, visés par la marque contestée, sont destinés aux professionnels du secteur des cosmétiques.

29      Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, que les produits relevant de la classe 3 couverts par les marques antérieures et les services relevant de la classe 39 visés par la marque contestée étaient différents.

 Sur la comparaison des signes en conflit

30      Selon une jurisprudence constante, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects visuel, phonétique ou conceptuel [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec, EU:T:2002:261, point 30].

31      En outre, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur des produits et des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

32      Enfin, il convient de rappeler que le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [voir arrêt du 13 juillet 2011, Inter IKEA Systems/OHMI – Meteor Controls (GLÄNSA), T‑88/10, EU:T:2011:368, point 32 et jurisprudence citée].

33      Premièrement, sur le plan visuel, la chambre de recours a considéré, après avoir relevé que les marques avaient en commun les lettres « n », « o » et « a », que la similitude entre les signes en conflit était très faible en raison du fait que le nombre de lettres et la structure des deux marques étaient différents, et que, compte tenu de l’emplacement de la lettre « h » dans la marque contestée, la seule similitude perceptible résidait dans les deux dernières lettres ‘oa’ de chaque signe.

34      La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours. Elle fait valoir que, comme la lettre « h » ne se prononce pas dans certaines langues, son impact visuel est également limité et la similitude visuelle entre les signes doit être considérée comme moyenne.

35      En l’espèce, les marques antérieures sont composées de trois lettres majuscules dont l’une d’entre elles, à savoir la lettre « o » centrale, a été stylisée par l’ajout d’un point noir à l’intérieur de ladite lettre. La marque contestée est, quant à elle, constituée par le mot « ainhoa ».

36      Ainsi qu’il a été rappelé au point 32 ci-dessus, le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots. Or, il est constant que la partie initiale des signes en conflit est différente. Il convient également de relever que, bien que l’ensemble des lettres figurant dans le signe antérieur se retrouvent dans la marque contestée, la seule similitude perceptible se limite à la terminaison commune « oa », dès lors que, dans la marque contestée, la lettre « n » et le groupe de lettres « oa » sont séparés par la lettre « h ».

37      En outre, il ressort de la jurisprudence que la longueur des signes en conflit est également un élément à prendre en compte dans l’analyse de leur similitude visuelle [voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2011, Seven/OHMI – Seven for all mankind (SEVEN FOR ALL MANKIND), T‑176/10, EU:T:2011:577, point 40]. Or, même si les signes en conflit se composent tous deux d’un mot unique, il convient de relever que les marques antérieures sont composées de trois lettres tandis que la marque contestée est composée de six lettres.

38      Enfin, l’argument de la requérante selon lequel la lettre « h » a un impact limité en raison du fait qu’elle ne se prononce pas dans certaines langues ne saurait être accueilli. En effet, le fait qu’une lettre se prononce ou non n’est pas de nature à influer sur l’analyse de la similitude visuelle des signes en conflit.

39      Dès lors, il convient de considérer que la similitude des signes est très faible sur le plan visuel, car elle est limitée à la terminaison commune « oa ».

40      Deuxièmement, sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré qu’il existait une similitude entre les marques en conflit, en espagnol et en français, mais que cette similitude se limitait à la partie finale des signes.

41      La requérante fait valoir que la chambre de recours a conclu à tort à une similitude faible sur le plan phonétique entre la marque contestée et les marques antérieures. Elle soutient notamment que, dans les langues dans lesquelles la lettre « h » n’est pas prononcée, telles que l’espagnol ou le français, la dernière syllabe de la marque contestée se prononcerait de manière identique aux marques antérieures et que cette dernière syllabe constituerait la partie la plus importante de la marque contestée.

42      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, à juste titre et sans être contredite par les parties, que les marques antérieures étaient composées de deux syllabes « no » et « a » dont la prononciation était identique quelle que soit la langue prise en considération.

43      Par ailleurs, il convient de constater que la prononciation de la marque contestée varie en fonction de la langue considérée, notamment en fonction du fait que la lettre « h » est muette dans certaines langues, telles que le français ou l’espagnol. Par conséquent, la partie finale des marques en conflit se prononce de manière identique dans les langues dans lesquelles la lettre « h » est muette.

44      Toutefois, la partie initiale de la marque contestée diffère de la partie initiale des marques antérieures, quelle que soit la langue considérée.

45      Par conséquent, il y a lieu de considérer que les signes en conflit présentaient une similitude phonétique faible, limitée à leur partie finale.

46      Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la requérante, il n’y a pas lieu d’accorder une importance plus grande à la similitude phonétique en raison du mode de commercialisation des produits. En effet, il convient de rappeler que les produits en cause sont des produits de soins de beauté et sont généralement présentés sur des rayons de façon à en permettre un examen visuel par les consommateurs en étant vendus côte à côte dans les drugstores, les supermarchés, les grands magasins et les points de ventes au détail. Dès lors, cela a pour effet d’atténuer encore l’importance de la faible similitude phonétique relevée entre les signes en conflit, le public percevant la marque de façon avant tout visuelle [voir arrêt du 18 octobre 2011, dm-drogerie markt/OHMI – Semtee (caldea), T‑304/10, EU:T:2011:602, point 57 et jurisprudence citée]. Partant, même s’il n’est pas exclu que lesdits produits puissent également être vendus sur commande verbale, il ne saurait être considéré que cette modalité est le mode de commercialisation habituel de ces produits [voir arrêt du 13 décembre 2012, Hairdreams/OHMI – Bartmann (MAGIC LIGHT), T‑34/10, EU:T:2012:687, point 43 et jurisprudence citée]. De plus, en ce qui concerne les services en cause, il y a lieu de constater que la requérante n’apporte aucun argument visant à démontrer en quoi la chambre de recours serait tenue d’accorder une importance plus grande à la similitude phonétique en raison de leur mode de commercialisation.

47      Troisièmement, sur le plan conceptuel, il suffit de constater que la requérante ne conteste pas la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il n’y a pas de similitude conceptuelle entre les marques en conflit.

48      Eu égard à ce qui précède, les marques en conflit étant très faiblement similaires sur le plan visuel, faiblement similaires sur le plan phonétique et ne présentant aucune similitude sur le plan conceptuel, il convient de considérer que les marques en conflit sont très faiblement similaires.

 Sur le caractère distinctif des marques antérieures

49      Ainsi qu’il découle du considérant 8 du règlement n° 207/2009, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec, EU:C:1998:442, point 18, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 15 supra, EU:C:1999:323, point 20).

50      L’existence d’un caractère distinctif supérieur à la normale, en raison de la connaissance qu’a le public d’une marque sur le marché, suppose nécessairement que cette marque soit connue d’au moins une partie significative du public concerné, sans qu’elle doive nécessairement posséder une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009. Il ne saurait être indiqué d’une façon générale, par exemple en recourant à des pourcentages déterminés relatifs au degré de connaissance qu’a le public de la marque dans les milieux concernés, qu’une marque a un caractère distinctif élevé. Néanmoins, il y a lieu de reconnaître une certaine interdépendance de la connaissance qu’a le public d’une marque et du caractère distinctif de celle-ci en ce sens que, plus la marque est connue du public ciblé, plus le caractère distinctif de cette marque est renforcé. Pour examiner si une marque jouit d’un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance qu’en a le public, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations des chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles [voir arrêt du 12 juillet 2006, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Johnson’s Veterinary Products (VITACOAT), T‑277/04, Rec, EU:T:2006:202, points 34 et 35 et jurisprudence citée].

51      En l’espèce, au point 31 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la requérante n’avait pas démontré que l’utilisation des marques antérieures était suffisamment intensive pour justifier l’octroi d’une protection accrue des marques antérieures.

52      La requérante soutient que, la chambre de recours ayant constaté que l’utilisation de la marque était répandue au cours des années 1998 à 2002 et qu’elle avait fait l’objet de campagnes publicitaires intensives en 1998 et 2002, elle aurait dû conclure à l’existence d’un caractère distinctif élevé ou à la renommée des marques antérieures à la date d’introduction de la demande de nullité.

53      Il convient de constater que, afin de démontrer le caractère distinctif des marques antérieures qui découlerait de son usage, la requérante a présenté à l’OHMI un certain nombre d’éléments de preuve, tels que :

–        des copies de plusieurs pages de QUIÉN ES QUIÉN (publication annuelle sur les parfums et les cosmétiques en Espagne) datant de 2001 et de 2005 à 2009 ;

–        des copies de trois articles extraits de sites Internet www.beautybuzz.com, www.fragrance.org et www.cpcpkg.com mentionnant le parfum « NOA » ;

–        une déclaration sur l’honneur signée en 2002 par le mandataire de la requérante, détaillant l’investissement dans les médias et les chiffres d’affaires réalisés dans plusieurs pays de l’Union entre 1999 et 2001 ;

–        des extraits de magazines français publiés en 1998 concernant le lancement du parfum « NOA » ;

–        des extraits de magazines sur la mode ou les cosmétiques publiés en 2000 concernant le parfum « NOA » ;

–        des extraits du magazine espagnol VENTAS DE PERFUMERÍA Y COSMÉTICA de 1999, dans lesquels le parfum « NOA » est cité parmi les fragrances nommées dans plusieurs catégories des FiFi Awards, et à partir de 2001, dans lesquels « NOA » est classé quatorzième marque de renom parmi les fragrances féminines (en valeur) en 2000 ;

–        des copies de plusieurs pages de la publication espagnole DICCIONARIO DE LAS FRAGRANCIAS pour les années 1999 à 2001, 2005 et 2007 à 2009 ;

–        une copie de la situation financière consolidée de la requérante pour l’année 2000 ;

–        une copie d’une photo de l’emballage de l’eau de toilette « NOA » ;

–        un document sans date imprimé du site Internet www.beaumontsociety.org.uk mentionnant le parfum « NOA » ;

–        quelques publicités pour le parfum « NOA » parues dans plusieurs magazines (Royaume-Uni, Danemark et France) entre 2000 et 2002 ;

–        un extrait imprimé des sites Internet www.dooyoo.co.uk, www.dooyoo.es et www.dooyoo.fr, y compris plusieurs avis de consommateurs sur le parfum « NOA », datant surtout de 2001, mais aussi des avis plus récents, de 2007 ou 2008 ;

–        les listes des prix auxquels les produits « NOA » étaient vendus dans plusieurs pays de l’Union entre 1999 et 2002 ;

–        plusieurs factures émises pour des produits « NOA », en particulier des parfums et des savons, à des clients en France, au Danemark, en Finlande et au Benelux entre 1998 et 2002 ;

–        des extraits imprimés de plusieurs sites Internet contenant des publications plus récentes (2006, 2010 ou 2011) où il est fait mention du parfum « NOA ».

54      Il convient de relever que le caractère distinctif élevé acquis par l’usage doit être établi à la date de dépôt de la demande en nullité (voir, en ce sens, arrêt VITACOAT, point 50 supra, EU:T:2006:202, point 38). Or, ainsi que l’a souligné à juste titre la chambre de recours, la majorité des éléments de preuve présentés à l’OHMI par la requérante concernent une période comprise entre 1998 et 2002. Cette période est antérieure de plus de sept ans à la date du dépôt de la demande en nullité à savoir le 14 octobre 2009.

55      En outre, en ce qui concerne les éléments de preuve relatifs à la période comprise entre 2002 et 2009, il convient de constater qu’il s’agit d’extraits de sites Internet, de publications professionnelles, notamment des extraits du « Diccionario de las fragrancias » ainsi que d’avis de consommateurs. Ces éléments, par ailleurs peu nombreux, ne permettent pas de déterminer la part de marché détenue par les marques antérieures, l’intensité et l’étendue géographique de leur usage, l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour les promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d’une entreprise déterminée grâce aux marques au sens de la jurisprudence rappelée au point 50 ci-dessus.

56      Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu que la requérante n’avait pas démontré que les marques antérieures avaient acquis un caractère distinctif élevé à la date d’introduction de la demande de nullité.

 Sur le risque de confusion

57      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignées. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts Canon, point 49 supra, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec, EU:T:2006:397, point 74].

58      En l’espèce, il convient de constater que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant à l’absence de risque de confusion. En effet, ainsi qu’il a été relevé aux points 33 à 48 ci-dessus et aux points 51 à 56 ci-dessus, les marques en conflit ne sont que très faiblement similaires et le caractère distinctif élevé des marques antérieures n’a pas été établi. Ainsi, en l’espèce, l’identité des produits visés par la marque contestée ne peut être compensée par le très faible degré de similitude entre les marques en conflit, en particulier, compte tenu des différences relevées aux points 36 et 43 ci-dessus. Il en est de même en ce qui concerne les services visés par la marque contestée, semblables aux, ou différents des produits couverts par les marques antérieures, pour lesquels tout risque de confusion est également exclu.

59      Par conséquent, il résulte de ce qui précède que le premier moyen soulevé par la requérante n’est pas fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), du même règlement

60      À l’appui de son second moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation concernant la renommée des marques antérieures en estimant que les preuves qu’elle a présentées n’étaient pas suffisantes et que c’est à tort que la chambre de recours a considéré qu’il n’existait pas un risque certain de profit indu tiré de ladite renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

61      Aux termes de l’article 53, paragraphe 1, sous a), lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, sur demande du titulaire d’une marque antérieure au sens de l’article 8, paragraphe 2, une marque est également déclarée nulle si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’Union et que l’usage sans juste motif de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.

62      Il ressort du libellé de ces dispositions que leur application est soumise aux conditions suivantes : premièrement, l’identité ou la similitude des marques en conflit ; deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’annulation et, troisièmement, l’existence du risque que l’usage sans juste motif de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice. Ces conditions sont cumulatives et l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [voir arrêt du 25 janvier 2012, Viaguara/OHMI – Pfizer (VIAGUARA), T‑332/10, EU:T:2012:26, point 21 et jurisprudence citée].

63      Il convient de rappeler que les preuves présentées par la requérante afin de démontrer l’acquisition d’un caractère distinctif élevé des marques antérieures qui découlerait de son usage servaient également à démontrer la renommée de ces marques. Or, il ressort de l’examen effectué aux points 53 à 55 ci-dessus que ces preuves ne sont pas suffisantes pour démontrer que les marques antérieures avait acquis un caractère distinctif élevé par l’usage. Elles peuvent donc d’autant moins prouver la renommée de ces marques. Dès lors, la condition relative à l’existence d’une renommée des marques antérieures fait défaut.

64      Par conséquent, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les arguments de la requérante relatifs au risque certain de profit indu, il y a lieu de rejeter le second moyen et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

65      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      L’Oréal est condamnée aux dépens.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 septembre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.