Language of document : ECLI:EU:T:2013:374

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

11 juillet 2013 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative CULTRA – Marques nationales verbales antérieures SCULPTRA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑142/12,

Aventis Pharmaceuticals, Inc., établie à Bridgewater (États-Unis), représentée par Me R. Gilbey, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. F. Mattina, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Fasel Srl, établie à Bologne (Italie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 26 janvier 2012 (affaire R 2478/2010-1), relative à une procédure d’opposition entre Aventis Pharmaceuticals, Inc. et Fasel Srl,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, G. Berardis (rapporteur) et C. Wetter, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 30 mars 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 11 juillet 2012,

vu le mémoire en réplique, accompagné d’une nouvelle offre de preuve, déposé au greffe du Tribunal le 19 octobre 2012,

vu le mémoire en duplique déposé au greffe du Tribunal le 9 janvier 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 19 janvier 2009, Fasel Srl a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 10 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Appareils pour le rajeunissement cutané à usage esthétique, cosmétique et médical ; appareils pour cavitation à ultrasons à usage esthétique, cosmétique et médical ; appareils à lumière pulsée à usage esthétique, cosmétique et médical ; appareils à radiofréquence à usage esthétique, cosmétique et médical ; appareils pour le massage mécanisé à usage esthétique, cosmétique et médical ; appareils et instruments chirurgicaux, médicaux, dentaires et vétérinaires, membres, yeux et dents artificiels ; articles orthopédiques ; matériel de suture ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 17/2009, du 11 mai 2009.

5        Le 11 août 2009, la requérante, Aventis Pharmaceutical, Inc., a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque tchèque verbale SCULPTRA, enregistrée sous le numéro 301724 le 17 juin 2008 pour désigner des produits et services relevant des classes 5, 10 et 44 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques destinés aux soins reconstructifs ou cosmétiques, implants destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique classés dans cette catégorie ; implants chirurgicaux composés de matériaux artificiels destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique ; chirurgie cosmétique, plastique et reconstructive, soins médicaux thérapeutiques, en particulier après un traitement chirurgical des rides et ridules » ;

–        la marque allemande verbale SCULPTRA, enregistrée sous le numéro 30406574 le 6 février 2004 pour désigner des produits et services relevant des classes 5, 10 et 44 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques à appliquer dans le traitement réparateur et les soins de beauté ; implants et prothèses pour chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique ; implants chirurgicaux composés de matériaux artificiels destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique ; chirurgie cosmétique, plastique et reconstructive, soins médicaux ; soins de beauté médicaux, à savoir traitement non chirurgical des rides et ridules » ;

–        la marque finlandaise verbale SCULPTRA, enregistrée sous le numéro 233638 le 6 février 2004 pour désigner des produits et services relevant des classes 5, 10 et 44 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques destinés aux soins reconstructifs et soins de beauté, implants destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique ; implants chirurgicaux composés de matériaux synthétiques destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique ; chirurgie cosmétique, plastique et reconstructive, soins médicaux de beauté, à savoir traitement non chirurgical des rides et ridules »;

–        la marque du Royaume-Uni verbale SCULPTRA, enregistrée sous le numéro 2355273 le 6 février 2004 pour désigner des produits et services relevant des classes 5, 10 et 44 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques destinés aux soins reconstructifs et soins de beauté, implants destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique ; implants chirurgicaux composés de matériaux artificiels destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique ; chirurgie cosmétique, plastique et reconstructive, soins médicaux de beauté, à savoir traitement non chirurgical des rides et ridules » ;

–        la marque hongroise verbale SCULPTRA, enregistrée sous le numéro 183214 le 6 février 2004 pour désigner des produits et services relevant des classes 5, 10 et 44 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques destinés aux centres de soins de santé et de beauté, implants destinés à la chirurgie cosmétique et esthétique ; implants de chirurgie plastique à usage thérapeutique en chirurgie cosmétique et esthétique ; chirurgie ou usage en chirurgie cosmétique, plastique et de réhabilitation, services thérapeutiques médicaux de beauté, en particulier traitement non chirurgical des rides et ridules ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        Le 9 décembre 2010, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son ensemble. En particulier, ladite division a considéré que les marques antérieures et la marque demandée, qui devait être considérée comme étant constituée du mot « cultra », avec la lettre « c » stylisée, ne présentaient qu’un certain degré de similitude, ce qui n’était pas suffisant pour constater un risque de confusion, en raison du niveau d’attention élevé du public visé, et ce même pour les produits identiques.

9        Le 16 décembre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 26 janvier 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a considéré que :

–        le niveau d’attention du public était relativement élevé ;

–        les biens et services visés par les marques en conflit étaient similaires ou identiques ;

–        la similitude visuelle entre les signes en conflit était très faible, notamment au motif que la partie initiale de la marque demandée, qui débutait par un élément figuratif arrondi susceptible d’être perçu comme un grand « c », était différente de la partie initiale des marques antérieures ;

–        la similitude phonétique entre lesdits signes était faible, dès lors que l’élément verbal de la marque demandée, qui se limitait au mot « ultra », et les marques antérieures ne coïncidaient que dans leur dernière syllabe respective, alors que la présence des consonnes « s » et « p » dans les seules marques antérieures créaient des différences considérables ;

–        les signes en conflit n’étaient pas conceptuellement similaires, dès lors que les marques antérieures renvoyaient à la sculpture, alors que la marque demandée n’était qu’une formule laudative ou pouvait tout au plus, pour le public qui verrait un « c » à son début, renvoyer à la culture ;

–        il n’existait pas de risque de confusion, malgré la similitude ou l’identité des produits et des services visés, aux motifs que les signes étaient faiblement similaires, que les marques antérieures avaient un caractère distinctif intrinsèque et que le public pertinent avait un degré d’attention relativement élevé.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rendre un avis sur les conclusions qui auraient été tirées en ce qui concerne le risque de confusion si les « faits corrects » avaient été appliqués à l’égard des signes ;

–        condamner l’OHMI aux dépens de la procédure juridictionnelle et à ceux auxquels elle a été condamnée dans la procédure administrative.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer irrecevable le deuxième chef de conclusions ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

1.     Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante

13      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de rendre un avis sur les conclusions qui auraient été tirées en ce qui concerne le risque de confusion si les « faits corrects » avaient été appliqués à l’égard des signes.

14      L’OHMI fait valoir que cette demande est irrecevable.

15      Il convient de rappeler que le Tribunal n’est pas compétent, dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 263 TFUE et sur l’article 65 du règlement n° 207/2009, pour prononcer des arrêts déclaratoires [voir en ce sens, arrêts du Tribunal du 16 novembre 2011, Dorma/OHMI – Puertas Doorsa (doorsa FÁBRICA DE PUERTAS AUTOMÁTICAS), T‑500/10, non publié au Recueil, point 17, et du 22 mai 2012, Olive Line International/OHMI – Umbria Olii International (O·LIVE), T‑273/10, non publié au Recueil, point 19 ; voir, en ce sens et par analogie, ordonnance de la Cour du 9 décembre 2003, Italie/Commission, C‑224/03, Rec. p. I‑14751, points 20 et 21].

16      Dès lors, le deuxième chef de conclusions de la requérante doit être rejeté comme manifestement irrecevable.

2.     Sur le fond

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens, tirés :

–        le premier, des violations de l’article 76 du règlement n° 207/2009, de la règle 50 du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), et du droit d’être entendu ;

–        le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en ce que la chambre de recours, en se fondant sur le prétendu faible degré de similitude des signes en conflit, aurait à tort exclu l’existence d’un risque de confusion, alors même que les produits et services en cause sont similaires ou identiques.

 Observations liminaires

18      La chambre de recours a considéré, au point 22 de la décision attaquée, que la marque demandée était composée du mot « ultra », avec un élément figuratif qui pourrait être perçu comme la lettre « c ». Ensuite, dans l’examen de la comparaison des signes, elle a tenu compte, sur le plan visuel et sur le plan conceptuel, tant de la partie du public pertinent qui lirait ladite lettre que de la partie qui ne la lirait pas. En revanche, sur le plan phonétique, elle n’a pas mentionné cette lettre à l’égard de la marque demandée.

19      Il convient d’examiner d’abord le second moyen, afin de vérifier si la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle il n’existe pas de risque de confusion entre les marques en conflit, peut être confirmée en ce qui concerne la partie du public pertinent qui reconnaît la lettre « c » dans l’élément figuratif de la marque demandée.

20      À cet égard, il doit être observé que l’OHMI admet qu’au moins une partie de ce public reconnaitra la lettre « c » dans ledit élément.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

21      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. En vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire sont à considérer comme étant des marques antérieures.

22      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

23      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

24      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 11 de la décision attaquée, que, au vu de l’étendue géographique des marques antérieures, le public pertinent était situé en République tchèque, en Allemagne, en Finlande, au Royaume-Uni ainsi qu’en Hongrie et, au point 33 de ladite décision, que le niveau d’attention de ce public était relativement élevé, les produits et services visés par les marques en conflit étant étroitement liés à la santé.

25      À cet égard, il y a lieu, premièrement, de confirmer les conclusions de la chambre de recours relatives aux États membres où se situe le public pertinent.

26      Deuxièmement, il convient de relever que les produits et services visés par les marques en conflit s’adressent, d’une part, aux professionnels des milieux médical et paramédical et, d’autre part, aux consommateurs finals de ces produits ou services.

27      Selon la jurisprudence, tant les professionnels que les consommateurs finals de produits et services liés à leur état de santé font preuve d’un niveau d’attention élevé [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 21 octobre 2008, Aventis Pharma/OHMI – Nycomed (PRAZOL), T‑95/07, non publié au Recueil, point 29 ; du 8 juillet 2009, Procter & Gamble/OHMI – Laboratorios Alcala Farma (oli), T‑240/08, non publié au Recueil, point 50, et du 15 décembre 2009, Trubion Pharmaceuticals/OHMI – Merck (TRUBION), T‑412/08, non publié au Recueil, point 28]. S’agissant des consommateurs finals de produits et services à des fins cosmétiques, ou ayant des finalités cosmétiques, il y a lieu de considérer que leur niveau d’attention est à tout le moins relativement élevé [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 28 octobre 2010, Farmeco/OHMI – Allergan (BOTUMAX), T‑131/09, non publié au Recueil, points 25 et 65 ; du 18 octobre 2011, dm-drogerie markt/OHMI – Semtee (caldea), T‑304/10, non publié au Recueil, point 58, et du 28 novembre 2012, Bauer/OHMI – BenQ Materials (Daxon), T‑29/12, non publié au Recueil, point 36].

28      Dès lors, il convient de conclure que le niveau d’attention du public est au moins aussi élevé que la chambre de recours l’a estimé, ce que la requérante ne conteste pas.

 Sur la comparaison des produits et services

29      La chambre de recours, au point 17 de la décision attaquée, a confirmé l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle les produits visés par la marque demandée étaient identiques ou semblables à ceux visés par les marques antérieures. Plus en détail, il ressort de la décision de ladite division que l’identité n’existe que pour les produits « appareils et instruments chirurgicaux, médicaux, dentaires et vétérinaires », couverts par la marque demandée, et les produits « implants chirurgicaux composés de matériaux artificiels destinés à la chirurgie thérapeutique, cosmétique et esthétique », protégés par les marques antérieures, alors que les autres produits et services sont simplement similaires.

30      Il convient de confirmer l’appréciation de la division d’opposition, que la chambre de recours a faite sienne et que la requérante ne conteste pas.

 Sur la comparaison des signes

31      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

–       Sur la comparaison visuelle

32      Sur le plan visuel, la chambre de recours a considéré, au point 23 de la décision attaquée, que les marques antérieures SCULPTRA ne présentaient qu’un très faible degré de similitude avec la marque demandée, que celle-ci soit interprétée comme contenant le mot « ultra » ou le mot « cultra ». En effet, selon la chambre de recours, il convenait de tenir compte des différences concernant les parties initiales des signes en conflit, de la taille frappante de l’élément figuratif de la marque demandée et de la présence des lettres « s » et « p » dans les seules marques antérieures.

33      La requérante fait valoir que la chambre de recours a attribué une importance excessive auxdits élément figuratif et lettres, au lieu d’effectuer une comparaison globale.

34      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le public prête généralement une plus grande attention au début d’une marque qu’à sa fin [voir arrêt du Tribunal du 25 mars 2009, L’Oréal/OHMI – Spa Monopole (SPA THERAPY), T‑109/07, Rec. p. II‑675, point 30, et la jurisprudence citée].

35      Tel est d’autant plus le cas en l’espèce en ce qui concerne la marque demandée, dès lors qu’elle commence par un élément figuratif qui, sans être dominant, attire néanmoins davantage l’attention. Notamment pour la partie du public qui reconnaît dans cet élément une grande lettre « c », la différence avec les marques antérieures, qui commencent par la lettre « s », sera donc évidente.

36      De même, la lettre « p », qui ne figure que dans les marques antérieures, représente un autre facteur de différenciation qui n’échappera pas à l’attention du public pertinent.

37      Si la présence, dans tous les signes en conflit, des suites de lettres « c », « u », « l » et « t », « r », « a » constitue un élément de similitude, les différences mentionnées aux points 35 et 36 ci-dessus permettent de confirmer l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle il n’existe en l’espèce qu’un très faible degré de similitude visuelle.

38      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’arrêt PRAZOL, précité, invoqué par la requérante. En effet, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, il s’agissait de deux marques purement verbales, à savoir les mots « prazol » et « prezal », qui présentaient le même couple de consonnes dans leur partie initiale, se composaient du même nombre de lettres et ne se distinguaient qu’en raison d’une de celles-ci.

–       Sur la comparaison phonétique

39      Sur le plan phonétique, au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient similaires à un faible degré.

40      La requérante fait valoir, d’une part, que la chambre de recours a omis de tenir compte, ne fût-ce qu’à titre subsidiaire, du fait que l’élément figuratif de la marque demandée était une représentation de la lettre « c » et, d’autre part, que, s’il est évident que deux lettres dans un mot ne passent pas inaperçues, cette constatation n’est pas déterminante en l’espèce, dans la mesure où elle ne justifie pas la conclusion à laquelle la chambre de recours est parvenue. En revanche, il serait important de savoir si la présence des lettres « s » et « p » dans les seules marques antérieures prime sur le fait que toutes les marques en conflit contiennent les deux suites de lettres « c », « u », « l » et « t », « r », « a ».

41      À cet égard, il ressort des trois premières phrases du point 24 de la décision attaquée que la chambre de recours a effectué la comparaison phonétique entre les marques antérieures SCULPTRA et la marque demandée en interprétant cette dernière comme étant composée des syllabes « ul » et « tra ». C’est par rapport à la syllabe « ul » que la chambre de recours a constaté que la marque demandée avait un début et une terminaison différents de ceux des marques antérieures, qui commençaient par la syllabe « sculp ». Par la suite, la chambre de recours a mis en avant le fait que les lettres « s » et « p », qui n’apparaissaient que dans les marques antérieures, ne passeraient pas inaperçues à l’oreille du public pertinent, si bien que les premières syllabes desdites marques créaient une impression phonétique considérablement différente de celle de la première syllabe de la marque demandée.

42      Or, il y a lieu de constater que, contrairement à la méthode suivie en ce qui concerne les similitudes visuelle et conceptuelle, la chambre de recours a omis de procéder à la comparaison des signes en conflit sur le plan phonétique du point de vue de la partie du public pertinent qui prononcerait l’élément figuratif de la marque demandée comme une lettre « c ». Cette omission constitue une erreur affectant la conclusion de ladite chambre quant à l’existence d’un degré seulement faible de similitude phonétique en l’espèce, dès lors que la présence de cette lettre dans la marque demandée est un élément qui la rapproche des marques antérieures.

43      Par ailleurs, quand bien même il pourrait être considéré que la chambre de recours, en se limitant, dans la seconde partie dudit point 24, à mentionner les lettres « s » et « p », et non également la lettre « c », comme éléments différenciant les premières syllabes des signes en conflit, ait implicitement tenu compte de l’éventualité que le public pertinent prononce la marque demandée comme étant le mot « cultra », sa conclusion quant au fait que les premières syllabes des marques en conflit sont considérablement différentes n’en serait pas moins erronée.

44      En effet, il y a lieu de constater que, à la différence de ce que soutient l’OHMI, la prononciation des parties initiales des mots « cultra » et « sculptra » par le public pertinent hongrois et tchèque est susceptible de donner lieu à des sons similaires. Par ailleurs, s’il est vrai que la lettre « p », qui n’apparaît que dans les marques antérieures, n’échappera pas à l’attention notamment de ce public pertinent, il y a lieu de rappeler que le public prête généralement une plus grande attention au début d’une marque.

45      Dès lors que les premières syllabes des signes en conflit commencent par deux sons similaires pour une partie du public pertinent et que leurs secondes syllabes coïncident, il y a lieu de conclure que, contrairement à ce qu’a affirmé la chambre de recours, lesdits signes sont similaires du point de vue phonétique pour cette partie dudit public.

–       Sur la comparaison conceptuelle

46      Au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient différents sur le plan conceptuel, dès lors que les marques antérieures renvoyaient vaguement au concept de sculpture, tandis que la marque demandée, pour le public qui reconnaît la lettre « c » dans l’élément figuratif de celle-ci, renvoyait au concept de culture.

47      La requérante fait valoir que les concepts de culture et de sculpture ont tous les deux trait à l’esthétique et aux produits de beauté, ainsi que cela ressortirait des arguments avancés et des preuves produites par elle devant la chambre de recours.

48      À cet égard, il convient d’observer que l’existence d’un certain degré de similitude conceptuelle entre les signes en conflit n’est pas exclue en ce qui concerne la partie du public pertinent qui associe les mots « cultra » et « sculptra » respectivement aux concepts de culture et de sculpture, ces deux concepts pouvant présenter un lien entre eux. Or, la chambre de recours s’est limitée à conclure que lesdits mots sont conceptuellement différents, sans fournir la moindre explication au soutien de son affirmation, et ce bien qu’elle ait admis qu’ils puissent renvoyer auxdits concepts.

49      Dès lors, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit sont différents du point de vue conceptuel ne saurait être confirmée.

50      Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si c’est à tort que la chambre de recours a omis de se prononcer sur les preuves que la requérante lui avait soumises aux fins de l’évaluation de la similitude conceptuelle.

–       Conclusions sur la comparaison des signes

51      La chambre de recours a conclu, au point 26 de la décision attaquée, que les signes en conflit étaient globalement similaires à un faible degré.

52      Cette conclusion ne saurait être confirmée, puisqu’elle se fondait sur les prémisses erronées (voir points 42 à 45, 48 et 49 ci-dessus) que les signes en conflit étaient similaires seulement à un faible degré du point de vue phonétique et qu’ils étaient différents du point de vue conceptuel.

 Sur le risque de confusion

53      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

54      En l’espèce, la chambre de recours a exclu l’existence d’un risque de confusion, malgré l’identité ou la similitude des produits ou services en cause.

55      La requérante fait valoir qu’il existe un risque de confusion, compte tenu du prétendu degré de similitude à tout le moins moyen entre les signes en conflit.

56      Il convient de relever que, les produits et services visés par les marques en conflit étant similaires ou identiques, l’exclusion de l’existence d’un risque de confusion entre celles-ci constatée dans la décision attaquée découle forcément de l’analyse insuffisante qui a conduit la chambre de recours à des conclusions erronées en ce qui concerne l’évaluation de la similitude de ces marques des points de vue phonétique et conceptuel.

57      Dans ces circonstances, il y a lieu d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le premier moyen, et de rejeter le recours pour le surplus, conformément à ce qui a été relevé aux points 15 et 16 ci-dessus.

 Sur les dépens

58      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant succombé pour l’essentiel, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

59      En outre, la requérante a conclu à la condamnation de l’OHMI aux dépens qu’elle a exposés dans la procédure administrative devant celui-ci. À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Il n’en va toutefois pas de même des frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’opposition. Partant, la demande de la requérante tendant à ce que l’OHMI, ayant succombé en ses conclusions, soit condamné aux dépens de la procédure administrative ne peut être accueillie que s’agissant des seuls dépens indispensables exposés par la requérante aux fins de la procédure devant la chambre de recours.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 26 janvier 2012 (affaire R 2478/2010-1) est annulée.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par Aventis Pharmaceuticals, Inc., aux fins de la procédure devant le Tribunal et devant la chambre de recours.

Kanninen

Berardis

Wetter

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 juillet 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.