Language of document : ECLI:EU:T:2022:841

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

21 décembre 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale Cash4Life – Cause de nullité absolue – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑554/21,

European Lotto and Betting Ltd, établie à Ocean Village (Gibraltar), représentée par M. D. Egan, solicitor,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme J. Schäfer et M. M. Eberl, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Tipp24 Services Ltd, établie à Londres (Royaume-Uni),

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, V. Valančius et T. Tóth (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, European Lotto and Betting Ltd, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 8 juillet 2021 (affaire R 264/2020‑1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 22 mai 2018, Tipp24 Services Ltd a présenté à l’EUIPO une demande de nullité de la marque de l’Union européenne ayant été enregistrée à la suite d’une demande déposée le 2 février 2016 pour le signe verbal Cash4Life.

3        Les services couverts par la marque contestée pour lesquels la nullité était demandée relevaient des classes 35, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes,  à la description suivante :

–        classe 35 : « Services de publicité, de marketing et de promotion » ;

–        classe 41 : « Loisirs » ;

–        classe 42 : « Services des technologies de l’information ; services technologiques ».

4        Les causes invoquées à l’appui de la demande en nullité étaient celles visées à l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et l’article 59, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

5        Le 4 décembre 2019, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité sur le fondement de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement, et a annulé la marque contestée pour les services visés au point 3 ci-dessus.

6        Le 3 février 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

7        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que la marque contestée avait été enregistrée en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001.

8        Premièrement, la chambre de recours a considéré que le public pertinent était composé du public professionnel fournissant les services en cause ainsi que du grand public de l’Union européenne et a décidé de prendre en considération la partie anglophone de ce public. Elle a estimé que le public pertinent était raisonnablement attentif. Deuxièmement, elle a relevé que la marque contestée était composée des éléments verbaux anglais « cash » et « life », reliés entre eux par le chiffre 4, auquel le public pertinent attribuerait la signification du mot anglais « for ». Elle a, en substance, considéré que la marque contestée serait comprise directement et sans autre réflexion par le public pertinent comme signifiant « argent liquide pour le reste de la vie » et en a conclu qu’elle était descriptive de tous les services en cause. Troisièmement, la chambre de recours a estimé que, indépendamment des constatations relatives au caractère descriptif de la marque contestée, cette dernière était également dépourvue de caractère distinctif au motif qu’elle serait comprise comme offrant la possibilité de gagner de l’argent pour la vie.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et Tipp24 Services aux dépens.

10      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À titre liminaire, il convient de souligner que, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 2 février 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p 1) [voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2021, Apologistics/EUIPO – Kerckhoff (APO), T‑282/20, non publié, EU:T:2021:212, point 12].

12      Par conséquent, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties aux dispositions du règlement 2017/1001 comme visant les dispositions, d’une teneur identique, du règlement no 207/2009.

13      Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le cas d’espèce est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

14      À l’appui de son recours, la requérante soulève, en substance, deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001] et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009

15      La requérante soutient, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que la marque contestée était descriptive des services en cause, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009.

16      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

17      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 52, paragraphe 1, sous a), dudit règlement, sont refusées à l’enregistrement les « marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

18      L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche dès lors que ces signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque [voir arrêt du 15 janvier 2013, BSH/OHMI (ecoDoor), T‑625/11, EU:T:2013:14, point 14 et jurisprudence citée].

19      Pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêts du 12 janvier 2005, Deutsche Post EURO EXPRESS/OHMI (EUROPREMIUM), T‑334/03, EU:T:2005:4, point 25 et jurisprudence citée, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25 et jurisprudence citée].

20      Par ailleurs, pour que l’EUIPO oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il n’est pas nécessaire que le signe en cause soit effectivement utilisé à des fins descriptives, mais uniquement qu’il puisse être utilisé à de telles fins. Un signe verbal doit ainsi se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de cette disposition, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [voir arrêt du 16 décembre 2010, Deutsche Steinzeug Cremer & Breuer/OHMI (CHROMA), T‑281/09, EU:T:2010:537, point 28 et jurisprudence citée].

21      À cet égard, il doit être précisé que le choix par le législateur du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés par ladite disposition ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une desdites caractéristiques (voir arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 50 et jurisprudence citée).

22      Par ailleurs, pour qu’une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot résultant d’une combinaison d’éléments soit considérée comme descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il ne suffit pas qu’un éventuel caractère descriptif soit constaté pour chacun de ces éléments. Un tel caractère doit également être constaté pour le néologisme ou le mot lui-même (voir arrêt du 22 juin 2005, PAPERLAB, T‑19/04, EU:T:2005:247, point 26 et jurisprudence citée).

23      Une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle‑même descriptive des caractéristiques de ces produits ou de ces services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, sauf s’il existe un écart perceptible entre le néologisme ou le mot et la simple somme des éléments qui le composent. Cela suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le néologisme ou le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, de sorte qu’il prime la somme desdits éléments. À cet égard, l’analyse du terme en cause au vu des règles lexicales et grammaticales appropriées est également pertinente (voir arrêt du 22 juin 2005, PAPERLAB, T‑19/04, EU:T:2005:247, point 27 et jurisprudence citée).

24      Il convient enfin de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la perception qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés [arrêt du 7 juillet 2011, Cree/OHMI (TRUEWHITE), T‑208/10, non publié, EU:T:2011:340, point 17].

25      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner, au vu de l’appréciation exposée par la chambre de recours dans la décision attaquée, l’argumentation de la requérante.

 Sur le public pertinent

26      Il y a lieu de constater que, ainsi que l’a, en substance, indiqué à bon droit la chambre de recours aux points 23 à 26 de la décision attaquée, les services en cause sont destinés tant aux professionnels fournissant ces services qu’au grand public, chacun d’eux étant raisonnablement attentif. Cette définition du public pertinent et de son niveau d’attention n’est par ailleurs pas contestée par les parties.

27      En outre, dès lors que la marque contestée est composée par les termes « cash » et « life » qui revêtent une signification en anglais, reliés entre eux par le chiffre 4, c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu que l’appréciation de son caractère descriptif devait s’effectuer, au moins, au regard du consommateur anglophone de l’Union, ce qui n’est d’ailleurs pas non plus contesté par les parties.

 Sur la signification de la marque contestée

28      La chambre de recours a considéré, aux points 29 et 30 de la décision attaquée, que la marque contestée était composée des éléments verbaux anglais « cash » et « life », reliés entre eux par le chiffre 4, auquel le public pertinent attribuerait la signification du mot anglais « for ». Elle en a conclu que, puisque l’élément verbal « cash » signifiait « argent liquide » et que l’expression « for life » signifiait notamment « pour la vie », la marque contestée serait traduite par « argent liquide pour le reste de la vie » en référence à un type de rente viagère.

29      Premièrement, la requérante fait valoir que, contrairement à ce qu’a indiqué la chambre de recours au point 37 de la décision attaquée, elle a contesté cette signification retenue par la division d’annulation. Elle indique, en substance, avoir clairement souligné dans ses observations devant la division d’annulation que le terme « cash » et le chiffre 4 avaient des significations diverses. Selon elle, si ses observations et ses arguments relatifs au sens conceptuel de la marque contestée avaient été correctement pris en considération, la chambre de recours aurait dû conclure qu’elle avait une signification distincte et ambiguë en tant que néologisme, et qu’il n’était pas possible de considérer qu’elle serait comprise comme signifiant « argent liquide pour le reste de la vie ». La requérante, en se référant à ses observations présentées devant la division d’annulation, souligne également que la marque contestée pourrait être comprise dans un sens plus large, à savoir « profiter de la vie » ou « profiter des opportunités économiques de la vie ».

30      Cette argumentation ne saurait être retenue. Il y a lieu de rappeler la jurisprudence citée au point 20 ci-dessus, selon laquelle, pour relever de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il suffit qu’un signe verbal, dans l’une au moins de ses significations potentielles, désigne une caractéristique des produits ou des services concernés.

31      Or, comme l’a, en substance, considéré la chambre de recours, les éléments verbaux « cash » et « life » sont des mots communs, d’usage courant et compréhensibles pour toute personne ayant une connaissance de l’anglais et a fortiori par la partie anglophone du public pertinent. Quant au chiffre 4, il est exact, ainsi que l’a souligné l’EUIPO, qu’il peut être présumé, eu égard notamment à l’usage très répandu du langage dit « langage SMS » lors d’échanges sur Internet par messagerie instantanée ou courrier électronique, sur les forums Internet et les blogs, ou encore dans les jeux en réseau, que le chiffre 4, lorsqu’il est associé à un mot anglais, sera généralement lui-même lu en anglais et compris comme renvoyant à la préposition anglaise « for » (pour) [voir, en ce sens, arrêt du 16 janvier 2014, Aloe Vera of America/OHMI – Detimos (FOREVER), T‑528/11, EU:T:2014:10, point 69 et jurisprudence citée].

32      Il est donc raisonnable d’estimer que, prise dans son ensemble, la marque contestée sera comprise directement et sans autre réflexion dans le sens de « cash for life », qui se traduit par « argent liquide pour toute la vie » ou « argent liquide pour le reste de la vie ». En effet, eu égard à sa structure, qui n’est pas inhabituelle, et au fait qu’elle est conforme aux règles de la langue anglaise, cette marque ne crée pas, auprès du public pertinent, une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple juxtaposition des mots qui la composent pour en modifier le sens ou la portée (voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 2005, PAPERLAB, T‑19/04, EU:T:2005:247, point 32). La seule circonstance que la marque contestée puisse également revêtir une autre signification est dépourvue de pertinence aux fins d’apprécier son caractère descriptif [voir, en ce sens, arrêt du 15 mai 2018, Wirecard/EUIPO (mycard2go), T‑676/16, non publié, EU:T:2018:266, point 34].

33      Deuxièmement, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait également commis une erreur en tenant compte des éléments de preuve produits par Tipp24 Services pour déterminer la signification de la marque contestée alors que ces éléments faisaient tous référence à la loterie « Cash4Life » aux États-Unis et non à l’Union.

34      Cet argument ne peut qu’être rejeté. En effet, indépendamment de la question de savoir si lesdits éléments de preuve sont tous relatifs à la loterie « Cash4Life » aux États-Unis comme le prétend la requérante, il suffit de constater, à l’instar de l’EUIPO, que ces éléments n’ont été cités par la chambre de recours qu’aux fins de corroborer son analyse de la signification de la marque contestée et qu’ils n’ont pas servi de fondement à cette analyse.

35      Partant, les arguments de la requérante visant à contester la conclusion de la chambre de recours relative à la signification de la marque contestée doivent être rejetés comme étant non fondés.

 Sur l’existence d’un rapport suffisamment direct et concret entre la marque contestée et les services en cause

36      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque contestée était descriptive des services en cause. Elle a en effet estimé, en substance, que, lorsque le public pertinent se trouverait en présence de la marque contestée pour ces services qui peuvent être fournis dans le contexte des jeux d’argent ou de hasard et des loteries, celui-ci associerait, immédiatement et sans autre réflexion, cette marque à des situations de gains d’argent pour la vie.

37      La requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours n’aurait nullement expliqué et démontré en quoi l’élément verbal « cash4life » serait descriptif de l’ensemble desdits services, et ce y compris quand ils seraient liés aux loteries et aux jeux de hasard. Premièrement, elle relève que la signification de la marque contestée retenue par la chambre de recours est erronée. Deuxièmement, à supposer que cette signification soit correcte, elle estime que celle-ci renvoie, tout au plus, à une idée vague et imparfaite de gains éventuels en ce qui concerne les services relevant de la classe 41 au motif, notamment, qu’aucune indication quant à la nature ou à la fréquence des gains ne peut être déduite de la marque contestée. Troisièmement, la requérante prétend qu’il est absurde de considérer le néologisme « cash4life » comme descriptif de tout service informatique ou technologique relevant de la classe 42, même pour une sous-catégorie de services associés aux jeux d’argent ou de hasard et aux loteries.

38      À cet égard, premièrement, contrairement à ce que prétend la requérante, il convient de souligner qu’il ressort des points 28 à 35 ci-dessus que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que, puisque l’élément verbal « cash » signifiait « argent liquide » et que l’expression « for life » signifiait notamment « pour la vie », la marque contestée serait traduite par « argent liquide pour le reste de la vie » en référence à un type de rente viagère.

39      Deuxièmement, force est de constater que l’argument selon lequel la chambre de recours n’aurait nullement expliqué et démontré en quoi l’élément verbal « cash4life » serait descriptif pour les services en cause procède d’une lecture partielle de la décision attaquée. En effet, après avoir déterminé la signification de la marque contestée, la chambre de recours a, en substance, relevé que les services en cause soit pouvaient être fournis dans le contexte des jeux d’argent ou de hasard et des loteries soit englobaient, entre autres, des jeux de hasard, des jeux de hasard en ligne et des services en rapport avec des jeux de hasard. Elle a en particulier précisé, au point 43 de la décision attaquée, qu’en cas de désignation de jeux de hasard au moyen de l’élément verbal « cash4life » le public pertinent comprendrait immédiatement, et sans autre réflexion, qu’il s’agissait de jeux de hasard impliquant une chance de gagner de l’argent pour la vie. Elle a ajouté, au point 44 de la décision attaquée, que le simple fait que le public ciblé puisse imaginer pouvoir gagner de l’argent pour la vie en cas de participation aux services de loisirs suffisait au motif que, s’agissant de ces services, l’élément verbal « cash4life » communiquerait au public la promesse que les gagnants de la loterie ou du jeu de hasard obtiendraient de l’argent durant leur vie entière.

40      Or, d’une part, il y a lieu de considérer que le raisonnement figurant aux points 43 et 44 de la décision attaquée s’applique non seulement aux services en cause relevant de la classe 41 mais aussi, mutatis mutandis, aux services en cause relevant des classes 35 et 42, dès lors que ces services peuvent être fournis dans le contexte de jeux d’argent ou de hasard et de loteries, ce que ne conteste pas la requérante au demeurant. D’autre part, étant donné que la participation à des jeux d’argent ou de hasard et à des loteries est motivée notamment par la volonté de gagner de l’argent, il existe un rapport évident entre le fait de gagner de l’argent pour la vie et les services désignés par la marque contestée lorsque ces derniers sont fournis dans le contexte des jeux d’argent ou de hasard et des loteries, de sorte que l’élément verbal « cash4life » est descriptif en ce qui concerne ces services.

41      C’est donc à tort que la requérante prétend que l’élément verbal « cash4life » aurait, en relation avec les services relevant de la classe 41, une signification vague et imparfaite, et qu’il ne véhiculerait pas une information précise ou une signification spécifique concernant ces services ou leurs caractéristiques. En tout état de cause, ainsi que le souligne l’EUIPO, le fait qu’aucune indication, quant à la nature ou à la fréquence des gains, ne puisse être déduite de la marque contestée est dénué de pertinence. Conformément à la jurisprudence, il est indifférent qu’une caractéristique que décrit une marque soit essentielle ou accessoire sur le plan commercial, tout en étant précisé qu’une caractéristique, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, doit néanmoins être objective et inhérente à la nature du produit ou du service ainsi qu’intrinsèque et permanente pour ce produit ou ce service [voir, en ce sens, arrêt du 7 mai 2019, Fissler/EUIPO (vita), T‑423/18, EU:T:2019:291, point 44 et jurisprudence citée]. Par ailleurs, ainsi que cela a été rappelé au point 20 ci-dessus, un signe verbal doit ainsi se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de cette disposition, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés, ce qui est le cas en l’espèce.

42      Quant au fait allégué par la requérante selon lequel l’élément verbal « cash4life » ne saurait être considéré comme descriptif de tout service informatique ou technologique relevant de la classe 42, il suffit de relever que, selon la jurisprudence, le fait qu’une marque soit descriptive quant à une partie seulement des produits ou des services relevant d’une catégorie pour laquelle elle est enregistrée n’empêche pas que cette marque soit annulée pour cette catégorie de produits ou de services dans son ensemble. En effet, conformément à une jurisprudence constante, la reconnaissance du caractère descriptif d’une marque s’applique non seulement aux produits ou aux services pour lesquels elle est directement descriptive, mais également à la catégorie plus large à laquelle appartiennent ces produits ou ces services en l’absence de limitation adéquate opérée par le demandeur de la marque [voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2015, Australian Gold/OHMI – Effect Management & Holding (HOT), T‑611/13, EU:T:2015:492, point 44 et jurisprudence citée].

43      Il résulte des considérations qui précèdent que les arguments de la requérante visant à contester la conclusion de la chambre de recours, relative au caractère descriptif de la marque contestée quant aux services en cause, doivent être rejetés comme étant non fondés.

44      Le premier moyen doit dès lors être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

45      La requérante reproche à la chambre de recours, en substance, d’avoir considéré que, à la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, celle-ci était dépourvue de caractère distinctif en ce qui concernait les services en cause.

46      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, il suffit qu’un des motifs absolus de refus prévus à l’article 7 dudit règlement s’applique pour que la nullité de la marque de l’Union européenne soit déclarée.

47      Par conséquent, dès lors que, ainsi que cela ressort des points 15 à 44 ci-dessus, à la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, celle-ci revêtait un caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il n’est pas nécessaire, en l’espèce, d’examiner le bien-fondé des arguments de la requérante concernant l’appréciation du caractère distinctif de ladite marque.

48      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter les arguments de la requérante visant à démontrer que la marque contestée était distinctive.

49      Le second moyen doit dès lors être rejeté, ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

50      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

51      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      European Lotto and Betting Ltd est condamnée aux dépens.

Spielmann

Valančius

Tóth

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 décembre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.