Language of document : ECLI:EU:T:2020:220

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

28 mai 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale UMA WORKSPACE – Marques de l’Union européenne figurative et du Royaume-Uni figurative et verbales antérieures WORKSPACE – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑506/19,

Workspace Group plc, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par M. N. Hine, solicitor,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Technopolis Holding Oyj, établie à Oulu (Finlande), représentée par Mes E. Skrzydło-Tefelska et K. Gajek, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 13 mai 2019 (affaire R 1910/2018‑4), relative à une procédure d’opposition entre Workspace Group et  Technopolis Holding,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović, présidente, MM. F. Schalin et I. Nõmm (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 15 juillet 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 10 octobre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 octobre 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 7 mars 2017, l’intervenante, Technopolis Holding Oyj, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal UMA WORKSPACE.

3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 35, 36 et 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 35 : « Services de secrétariat ; planification et organisation de foires, d’expositions et de présentations à des fins commerciales ou publicitaires ; services de photocopie ; services de relogement pour entreprises ; location de photocopieurs ; location d’espaces publicitaires ; location de distributeurs automatiques destinés à la vente ; location de machines et d’appareils de bureau ; systématisation d’informations dans des bases de données informatiques » ;

–        classe 36 : « Souscription d’assurances ; services financiers ; affaires monétaires ; services en matière d’affaires immobilières ; dépôt de valeurs ; location de surfaces de bureaux ; location d’appartements ; gérance d’immeubles d’habitation ; estimation liée à la conception de bâtiments ; estimations de bâtiments ; estimation et gérance de biens immobiliers ; services de prêts immobiliers ; services d’agences immobilières ; recouvrement de loyers ; location de bureaux [immobilier] » ;

–        classe 43 : « Services de cafés ; services de cantines ; location de salles de réunions ; location d’installations pour événements et d’installations temporaires pour bureaux et réunions ; location de locaux pour bureau temporaire ».

4        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2017/049, du 13 mars 2017.

5        Le 13 juin 2017, la requérante, Workspace Group plc, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était notamment fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque de l’Union européenne figurative enregistrée sous le numéro 16240731, notamment pour les « [s]ervices de publicité, de relations publiques, de promotion ; administration commerciale ; organisation de foires et de foires commerciales à des fins commerciales, publicitaires et promotionnelles ; location de machines et d’appareils de bureau ; services de secrétariat ; services de photocopie ; travaux de bureau » relevant de la classe 35, pour les « [s]ervices financiers ; assurance ; services de prêts financiers ; services de biens immobiliers ; services d’agents immobiliers ; services d’évaluations de propriétés ; gestion immobilière ; services de recouvrement de loyers » relevant de la classe 36, ainsi que pour les services de « [m]ise à disposition d’hébergements temporaires ; location de bureaux temporaires et de logements et locaux commerciaux ; mise à disposition d’aliments et de boissons ; services de restaurants, cafés, cantines et bars ; services de traiteurs ; location d’équipements, articles et meubles de traiteur et de restauration ; location de meubles commerciaux et de bureau ; informations, conseils et assistance dans tous les domaines précités » relevant de la classe 43, reproduite ci-après :

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–        la marque du Royaume‑Uni figurative enregistrée sous le numéro 2600648 pour des services compris relevant des classes 35, 36, 39 et 43, reproduite ci-après :

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–        la marque du Royaume-Uni verbale WORKSPACE enregistrée sous le numéro 3178820 pour des services relevant des classes 36 et 43 ;

–        la marque du Royaume‑Uni verbale WORKSPACE enregistrée sous le numéro 3236694 pour des services relevant des classes 9, 35, 36, 38, 39, 42 et 43.

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        Le 31 juillet 2018, la division d’opposition a fait droit à l’opposition au motif de l’existence d’un risque de confusion avec la marque de l’Union européenne antérieure.

9        Le 27 septembre 2018, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 13 mai 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition et a rejeté l’opposition pour l’ensemble des services visés par la marque demandée.

11      Dans un premier temps, la chambre de recours a effectué une comparaison de la marque demandée avec la marque de l’Union européenne antérieure et a ainsi considéré que le territoire pertinent aux fins de l’analyse du risque de confusion était l’Union européenne et tous ses États membres. En premier lieu, elle a considéré, à l’instar de la division d’opposition, que la plupart des services en cause compris dans les classes 35, 36 et 43 étaient identiques, et que certains étaient très similaires et d’autres similaires.

12      En deuxième lieu, en ce qui concerne la comparaison des signes, elle s’est interrogée, premièrement, sur la signification des éléments figurant dans les marques en conflit. Elle a souligné tout d’abord que le terme « uma » de la marque demandée n’avait de signification dans aucune des langues de l’Union. Ensuite, elle a relevé que l’élément figuratif de la marque antérieure, s’il n’était pas négligé, serait simplement perçu comme un élément décoratif. En outre, elle a estimé que le terme « workspace » présent dans les deux marques avait été largement employé dans la vie des affaires pour désigner des espaces de bureau destinés à être temporairement loués par des entrepreneurs, qu’il ne disposait d’aucune traduction appropriée dans les langues de l’Union autres que l’anglais et qu’il serait compris universellement. Elle a souligné qu’il s’agissait d’un fait notoire. Elle a également estimé que, les mots anglais basiques « work » et « space » étant fréquemment utilisés, le terme composite « workspace » serait compris par le public professionnel pertinent de toute l’Union comme une référence descriptive à des services liés à la fourniture et à l’entretien d’un espace de travail. Deuxièmement et compte tenu de ces significations, elle a considéré que le terme « workspace » était descriptif au regard des services en cause. Enfin, elle a estimé que l’élément verbal « uma » de la marque demandée serait perçu comme la partie la plus distinctive et dominante de celle-ci compte tenu de son absence de signification, compte tenu du fait qu’il constituait la partie initiale de la marque demandée et compte tenu du caractère descriptif de l’élément verbal « workspace ». Troisièmement, elle a opéré la comparaison des marques en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Tout d’abord, elle a indiqué que les marques différaient par l’élément distinctif et dominant « uma » de la marque demandée et l’élément figuratif de la marque antérieure et que l’élément verbal commun « workspace » ne pouvait générer qu’une faible similitude sur le plan visuel entre les marques en conflit compte tenu de son caractère descriptif. Ensuite, elle a souligné que les marques en conflit différaient en raison de la prononciation de la première partie dominante et distinctive de la marque demandée et que le fait que les marques coïncidaient en raison de la présence du mot descriptif « workspace » les rendaient similaires sur le plan phonétique à un faible degré. Enfin, elle a considéré que, sur le plan conceptuel, les deux marques véhiculaient la notion d’« espace de travail » et que, compte tenu du caractère descriptif de ce terme au regard des services concernés, le niveau de similitude conceptuelle entre les signes était, tout au plus, faible.

13      En troisième lieu, la chambre de recours a procédé à l’appréciation globale du risque de confusion. Elle a conclu que, compte tenu du degré faible de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle entre les signes en conflit, du fait qu’ils partageaient seulement un élément descriptif, du faible degré de caractère distinctif de la marque antérieure et du niveau d’attention élevé du consommateur pertinent, il n’existait pas de risque de confusion, même si les services visés par les marques en conflit étaient identiques.

14      Dans un second temps, la chambre de recours a indiqué que, s’agissant des marques du Royaume-Uni antérieures, la même conclusion relative à l’absence de risque de confusion s’appliquait. La chambre de recours a relevé que les certificats d’enregistrement pertinents présentés par l’opposante confirmaient que chacune des marques du Royaume-Uni verbales antérieures était « dépourvue de caractère distinctif intrinsèque, mais [que] des éléments de preuve [avaient] été produits pour démontrer que, à la date de la demande, [elle] avait effectivement acquis un caractère distinctif par l’usage ». Dans ce contexte, elle a ajouté que l’argument selon lequel les marques du Royaume-Uni verbales antérieures possédaient un caractère distinctif acquis par l’usage n’était toutefois étayé par aucun élément de preuve concret, la seule référence aux certificats d’enregistrement de ces marques étant insuffisant à cet égard, puisqu’elle ne permettait pas à la chambre de recours de se faire son propre avis.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        confirmer la décision de la division d’opposition ;

–        condamner l’EUIPO et la partie intervenante aux dépens.

16      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

17      L’intervenante conclut en substance à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés aux fins des procédures de recours et d’opposition.

 En droit

18      À l’appui de son recours, la requérante soulève quatre moyens, tirées, le premier, de la violation de l’article 8 du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), le deuxième, de la violation de l’article 27 du même règlement et de l’article 95 du règlement 2017/1001, le troisième, de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et, le quatrième, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

19      Le Tribunal estime opportun d’examiner en premier lieu le quatrième moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

20      La requérante soutient, en premier lieu, que la chambre de recours a erronément considéré que le mot « workspace » serait perçu comme un terme descriptif dans l’ensemble de l’Union par les consommateurs pertinents des services d’hébergement professionnel. Selon elle, il ne pouvait raisonnablement être supposé que le public pertinent des services concernés aurait une connaissance linguistique suffisante pour distinguer les marques. Elle renvoie à cet égard à ses observations devant la chambre de recours. En deuxième lieu, elle fait valoir que la chambre de recours n’a non plus pris en compte ses observations quant à l’absence de caractère descriptif des nombreux services visés par la marque demandée, qui n’étaient pas liés à la fourniture d’hébergement. En troisième lieu, la requérante s’est prévalue du fait que, les éléments verbaux « uma » et « workspace » n’ayant aucune résonance conceptuelle, ils assumaient un rôle distinctif indépendant dans la marque demandée.

21      L’EUIPO réfute ces arguments.

22      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

23      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits/services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

24      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si la chambre de recours a, à juste titre, estimé qu’il n’existait pas, en l’espèce, un risque de confusion entre les marques en conflit.

 Sur le public pertinent

25      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

26      En l’espèce, la chambre de recours a opéré l’examen du risque de confusion en prenant tout d’abord en compte la marque de l’Union européenne antérieure, dont la protection s’étendait ainsi à l’ensemble de l’Union. C’est donc la perception des marques en conflit par le consommateur des produits et des services en cause sur l’ensemble de ce territoire qu’il convient de considérer. La chambre de recours a estimé au point 31 de la décision attaquée que les services en cause s’adressaient au public professionnel dont le niveau d’attention était plus élevé que la moyenne. Il y a lieu d’approuver cette considération au demeurant non contestée par la requérante.

 Sur la comparaison des services

27      Selon la chambre de recours, la plupart des services visés par les marques en conflit compris dans les classes 35, 36 et 43 étaient identiques, certains étaient très similaires et d’autres similaires. Ces considérations qui, au demeurant, ne sont pas remises en cause par la requérante, doivent être approuvées.

 Sur la comparaison des signes

28      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée). Par ailleurs, il n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite qu’il en a gardée en mémoire (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26).

29      En outre, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [voir arrêt du 5 octobre 2016, Foodcare/EUIPO – Michalczewski (T.G.R. ENERGY DRINK), T‑456/15, EU:T:2016:597, point 37 et jurisprudence citée].

30      En l’espèce, les signes à comparer sont le signe verbal UMA WORKSPACE pour la marque demandée et le signe figuratif WORKSPACE pour la marque de l’Union européenne antérieure.

31      Il ressort des points 21 à 24 de la décision attaquée que la chambre de recours a considéré que le terme « workspace » était descriptif au regard des services désignés par les marques en conflit et que l’élément verbal « uma » de la marque demandée serait considéré comme la partie la plus distinctive et dominante de celle-ci. En outre, aux points 25 à 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que les signes en conflit disposaient d’un très faible degré de similitude sur le plan visuel, d’une faible similitude sur le plan phonétique et d’un niveau de similitude sur le plan conceptuel tout au plus faible.

32      La requérante soutient, en premier lieu, que la chambre de recours n’a pas pris en compte ses observations selon lesquelles de nombreux services visés par les marques en conflit n’étaient pas liés à la fourniture d’hébergement et réfute en tout état de cause le prétendu caractère descriptif du mot « workspace » à l’égard de ces services. En deuxième lieu, elle fait valoir que la chambre de recours n’a pas tenu compte de ses arguments présentés devant elle selon lesquels les consommateurs pertinents de l’Union n’auraient pas la connaissance linguistique leur permettant de distinguer les marques en conflit et renvoie à cet égard à ses observations présentées devant la division d’opposition. En troisième lieu, la requérante soutient qu’il n’existe aucune résonance conceptuelle entre les éléments « uma » et « workspace », que ces deux éléments ont un rôle distinctif indépendant dans la marque demandée et qu’il existe donc un risque de confusion avec les marques du Royaume-Uni verbales antérieures.

33      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

34      Au vu des arguments de la requérante, il importe, en premier lieu, de déterminer les éléments distinctifs et dominants dans les signes en conflit.

–       Sur les éléments distinctifs et dominants

35      Aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée, et donc à distinguer ces produits de ceux d’autres entreprises [voir arrêt du 22 septembre 2016, Sun Cali/EUIPO – Abercrombie & Fitch Europe (SUN CALI), T‑512/15, EU:T:2016:527, point 59 et jurisprudence citée].

36      Selon une jurisprudence constante, un terme possédant une signification claire n’est considéré comme étant descriptif que s’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêt du 24 février 2016, Tayto Group/OHMI – MIP Metro (REAL HAND COOKED), T‑816/14, non publié, EU:T:2016:93, point 63 et jurisprudence citée].

37      En premier lieu, en ce qui concerne l’élément figuratif de la marque de l’Union européenne antérieure, constitué de deux cercles noir et gris placés au-dessus de l’élément verbal « workspace », il y a lieu d’approuver la considération figurant au point 19 de la décision attaquée selon laquelle ledit élément figuratif, bien qu’il ne sera pas négligé, sera simplement perçu comme un élément décoratif.

38      En deuxième lieu, s’agissant du premier élément verbal « uma » de la marque demandée, la chambre de recours a considéré à juste titre qu’il ne serait compris dans aucune des langues de l’Union et a ainsi estimé en substance qu’il ne contiendrait aucune référence se rapportant aux services en cause. C’est également à bon droit que, prenant en compte le caractère faiblement distinctif du deuxième élément verbal « workspace » et la circonstance que l’élément verbal « uma » était le plus susceptible d’attirer l’attention du consommateur en raison de sa position initiale dans la marque demandée, elle a conclu que ledit élément verbal « uma » constituait la partie la plus distinctive et dominante de la marque demandée.

39      En troisième lieu, il y a lieu d’examiner l’appréciation par le chambre de recours du caractère distinctif du terme « workspace ».

40      Premièrement, il convient d’avaliser la conclusion de la chambre de recours selon laquelle ce terme est largement employé dans la vie des affaires pour désigner des espaces de bureaux loués par les entrepreneurs, essentiellement des jeunes entreprises et des particuliers, afin d’y mener leurs activités tout en disposant de tout le confort et de toutes les installations nécessaires. Dans ce contexte, la chambre de recours a recouru à la notion de fait notoire pour considérer que le terme « workspace » ne dispose d’aucune traduction appropriée dans les langues de l’Union autres que l’anglais, qu’il est généralement utilisé sous la forme d’un anglicisme et qu’il sera compris universellement. La requérante conteste en substance la réalité de ce fait notoire en remettant en cause le fait que le public pertinent de l’ensemble de l’Union ait une connaissance suffisante de l’anglais pour comprendre la signification du terme « workspace » dans le sens décrit ci-dessus.

41      Il ressort de la jurisprudence qu’un fait est notoire lorsqu’il est susceptible d’être connu par toute personne ou qu’il peut être connu par le biais de sources généralement accessibles [voir arrêt du 9 février 2011, Ineos Healthcare/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (ALPHAREN), T‑222/09, EU:T:2011:36, point 29 et jurisprudence citée]. Il est également de jurisprudence constante que les chambres de recours, pour déterminer la perception que le public pertinent aura des marques en conflit, peuvent s’appuyer sur des faits notoires, sous réserve de la démonstration, par la partie à laquelle cette appréciation fait grief, d’une erreur d’appréciation au regard du caractère notoire de ces faits [voir, en ce sens, arrêts du 17 octobre 2006, Hammarplast/OHMI – Steninge Slott (STENINGE SLOTT), T‑499/04, non publié, EU:T:2006:324, point 53, et du 30 juin 2015, La Rioja Alta/OHMI – Aldi Einkauf (VIÑA ALBERDI), T‑489/13, EU:T:2015:446, point 56 (non publié)].

42      Il convient tout d’abord d’admettre, comme le souligne la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée, que les termes « work » et « space » font partie du vocabulaire de base de l’anglais. Or, dès lors qu’une grande partie des consommateurs dans l’Union a des connaissances du vocabulaire élémentaire anglais [voir, en ce sens, arrêts du 21 janvier 2010, G-Star Raw Denim/OHMI – ESGW (G Stor), T‑309/08, non publié, EU:T:2010:22, point 32 ; du 11 mai 2010, Wessang/OHMI – Greinwald (star foods), T‑492/08, non publié, EU:T:2010:186, point 52, et du 5 février 2016, Kicktipp/OHMI – Italiana Calzature (kicktipp), T‑135/14, EU:T:2016:69, point 118 (non publié)], et que ces deux mots sont fréquemment employés dans l’Union, il y a lieu d’avaliser le constat que le public pertinent de l’ensemble de l’Union en comprendra leur signification. La réalité de ce constat peut être appuyée par la considération que le public professionnel pourrait avoir une meilleure compréhension de la l’anglais que le grand public [voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2012, Colas/OHMI – García-Teresa Gárate et Bouffard Vicente (BASE-SEAL), T‑172/10, non publié, EU:T:2012:119, point 45].

43      C’est également à juste titre que la chambre de recours a observé que le mot « workspace » était largement utilisé dans la vie des affaires en tant que terme composé qui se réfère à des espaces de bureaux loués par les entrepreneurs. À cet égard, il revenait à la requérante de contester une telle observation de la chambre de recours conformément à la jurisprudence citée au point 41 ci-dessus. Or, force est de constater que la requérante s’est contentée de nier que le public pertinent dans l’Union aurait les connaissances linguistiques lui permettant de distinguer les marques en conflit et n’a aucunement étayé son raisonnement, ni n’a présenté le moindre élément concret visant à remettre en cause l’existence de ce fait et à démontrer ainsi une erreur d’appréciation au regard du caractère notoire de celle-ci.

44      Il y a ainsi lieu de considérer que, compte tenu de la signification bien connue des termes « work » et « space » par le public professionnel et de l’utilisation étendue du mot composé « workspace » rappelée au point 43 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que ledit public professionnel comprendrait également le terme « workspace » en tant que terme composé qui se référait à des espaces de bureaux loués par les entrepreneurs et que ce terme serait ainsi compris de ce public comme étant une référence descriptive à des services liés à la fourniture et à l’entretien d’un espace dans lequel travailler.

45      Deuxièmement, quant à la question du caractère descriptif du terme « workspace » pour l’ensemble des services visés par les marques en conflit, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas pris en compte ses observations selon lesquelles de nombreux services visés par les marques en conflit n’étaient pas liés à la fourniture d’hébergement.

46      Il y a lieu de considérer que le raisonnement figurant au point 23 de la décision attaquée qui a conduit la chambre de recours à conclure que le terme « workspace » était descriptif au regard de l’ensemble des services visés par les marques en conflit n’est entaché d’aucune erreur d’appréciation.

47      Tout d’abord, en ce qui concerne les services compris dans la classe 35, il y a lieu, d’une part, d’approuver la considération de la chambre de recours selon laquelle ils avaient trait à la fourniture d’un espace de travail en ce qu’ils visaient à rendre l’espace de travail confortable, complet et attrayant. D’autre part, c’est à juste titre que l’EUIPO souligne en substance que les « services de publicité, de relations publiques, de promotion » sont également liés à la mise à disposition d’espaces de travail pour les entreprises dans la mesures où le public professionnel, constitué principalement des jeunes entreprises, a besoin d’une assistance et de conseils pour se développer.

48      Ensuite, en ce qui concerne les services de la classe 36 visés par la marque demandée et la marque de l’Union figurative antérieure, doit être avalisé le raisonnement de la chambre de recours selon lequel les services de biens immobiliers et de location présentaient un lien avec la notion d’espace de travail en ce sens que lesdits biens pouvaient parfaitement inclure un tel espace. Dans le même sens, doit être approuvée la considération que les services intitulés « gérance d’immeubles d’habitation, estimation liée à la conception de bâtiments ; estimations de bâtiments ; estimation et gérance de biens immobiliers » pouvaient tous être associés à un espace de travail. Il en va de même des services intitulés « souscription d’assurances ; services financiers ; affaires monétaires ; dépôt de valeurs » qui, comme le souligne la chambre de recours, étaient étroitement liés aux services concernant les biens immobiliers et la location de biens immobiliers eu égard au rôle essentiel qu’ils jouaient dans la concrétisation d’un éventuel accord dans ces domaines. À cet égard, dans le sens souligné par l’EUIPO, il y a lieu de considérer que les entreprises, et en particulier les nouvelles entreprises, ont besoin de l’offre de services financiers pour exister et pour se développer – par exemple pour agrandir leur espace de travail – et que, partant, le public professionnel pertinent fera toujours le lien entre le terme « workspace » et ces services financiers, même si la finalité principale de ceux-ci ne correspond pas directement à la mise à disposition d’espaces de travail et de leurs installations.

49      Enfin, la chambre de recours a considéré à bon droit que les services compris dans la classe 43 fournissaient ou facilitaient l’accès à un espace de travail, ceux-ci satisfaisant aux besoins des individus ou des entreprises qui ont besoin d’un lieu pour gérer leur entreprise.

50      Il résulte de tout ce qui précède que la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation en concluant que l’élément verbal commun « workspace » était un élément faiblement distinctif au regard des services désignés par les marques en conflit, que l’élément verbal « uma » de la marque demandée devait être considéré comme la partie la plus distinctive et dominante de celle-ci et, partant, que le caractère distinctif intrinsèque de la marque de l’Union européenne antérieure devait être considérée comme faible.

–       Sur les comparaisons visuelle, phonétique et conceptuelle

51      Sur le plan visuel, les signes en conflit diffèrent au regard de l’élément distinctif et dominant « uma » de la marque demandée et au regard de l’élément figuratif de la marque de l’Union européenne antérieure. Lesdits signes coïncident en revanche au regard du terme « workspace ». Toutefois, en raison du caractère descriptif du terme « workspace », la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant, au point 25 de la décision attaquée, que la similitude visuelle entre les signes en conflit n’était que très faible.

52      Sur le plan phonétique, ainsi qu’il ressort du point 26 de la décision attaquée, les marques diffèrent en raison de la prononciation de l’élément verbal « uma », qui représente la première partie dominante et distinctive de la marque demandée et qui n’est pas présente dans la marque de l’Union européenne antérieure. Pour cette raison et celle selon laquelle l’élément verbal « workspace » est faiblement distinctif, pour les motifs rappelés aux points 39 à 44 et 46 à 49 ci-dessus, il convient d’admettre que la présence de l’élément verbal « workspace » ne les rend similaires qu’à un faible degré, ce que, au demeurant, la requérante n’a pas remis en cause.

53      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé, au point 27 de la décision attaquée, que les signes en conflit véhiculaient la notion d’« espace de travail », mais que, en raison du caractère descriptif de ce terme au regard des services concernés, le niveau de similitude conceptuelle entre les signes en conflit devait tout au plus être considéré comme faible. Un tel raisonnement doit être avalisé. À cet égard, la requérante tente en vain de se prévaloir du fait que, les éléments verbaux « uma » et « workspace » n’ayant aucune résonance conceptuelle, ils assumeraient un rôle distinctif indépendant dans la marque demandée. En effet, rien ne permet de considérer que ces termes revêtiraient un tel rôle distinctif indépendant et qu’il conviendrait ainsi de les apprécier de façon artificiellement indépendante.

54      Si l’argument de la requérante devait se comprendre comme étant fondé sur l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), et signifiant que le terme « workspace » occuperait une position distinctive autonome dans la marque demandée, qui conduirait à une similitude des signes en conflit, il doit être rejeté.

55      En effet, il y a lieu de rappeler que, dans l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), la Cour a dit pour droit qu’un risque de confusion pouvait exister dans l’esprit du public, en cas d’identité des produits et des services, lorsque le signe en cause était constitué de la juxtaposition, d’une part, de la dénomination de l’entreprise d’un tiers et, d’autre part, de la marque enregistrée, dotée d’un pouvoir distinctif normal, et que celle-ci, sans créer à elle seule l’impression d’ensemble du signe composé, conservait dans ce dernier une position distinctive autonome.

56      Or, force est de constater que la requérante n’a à aucun moment démontré que les conditions permettant l’application de la jurisprudence issue de l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), étaient réunies en l’espèce. Au surplus, il y a lieu de considérer que le principe établi par la Cour dans cet arrêt ne saurait être appliqué en l’espèce, le terme « workspace » ne présentant pas un caractère distinctif normal, mais étant tout au plus doté d’un caractère distinctif faible.

–       Sur l’appréciation globale du risque de confusion

57      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

58      I l ressort également de la jurisprudence que, lorsque les éléments de similitude entre deux signes tiennent au fait qu’ils partagent un composant présentant un caractère distinctif faible, l’impact de tels éléments de similitude sur l’appréciation globale du risque de confusion est lui‑même faible [arrêt du 22 février 2018, International Gaming Projects/EUIPO – Zitro IP (TRIPLE TURBO), T‑210/17, non publié, EU:T:2018:91, point 73 ; voir également, en ce sens, arrêts du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 85 ; du 4 mars 2015, FSA/OHMI – Motokit Veículos e Acessórios (FSA K-FORCE), T‑558/13, non publié, EU:T:2015:135, points 49 à 52].

59      L’appréciation globale du risque de confusion opérée par la chambre de recours aux points 31 à 33 de la décision attaquée doit être avalisée. En effet, celle-ci a considéré à juste titre que, compte tenu du degré de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle tout au plus faible entre les signes en conflit, du fait que ces signes partageaient un élément qui était descriptif, du faible degré de caractère distinctif de la marque de l’Union européenne antérieure et du niveau d’attention élevé du public professionnel, il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 même si les services en cause étaient identiques. Ce constat doit également s’appliquer aux marques du Royaume-Uni antérieures, pour lesquelles une absence de risque de confusion avec la marque demandée doit être confirmée, sous réserve toutefois de la réponse donnée ci-après au premier moyen.

60      Il résulte de tout ce qui précède que le quatrième moyen doit être rejeté.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8 du règlement 2018/625

61      Dans le cadre du premier moyen, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en refusant de tenir compte des marques du Royaume‑Uni verbales antérieures. Elle lui reproche de ne pas avoir présumé que ces marques nationales antérieures étaient valides, qu’elles produisaient leurs pleins effets et qu’elles accordaient des droits exclusifs pour les produits et services revendiqués. Elle se réfère à cet égard au point 35 de la décision attaquée selon lequel la simple référence à l’enregistrement des deux marques verbales susmentionnées ne saurait suffire, puisqu’elle « ne permet pas à la chambre de recours de se faire son propre avis » concernant le caractère distinctif factuel de la marque WORKSPACE au Royaume-Uni. Elle estime cependant que l’EUIPO n’est pas compétente pour remettre en cause la validité des marques nationales antérieures ou pour conclure que la requérante n’est pas parvenue à prouver leur validité, la présomption de validité s’appliquant à celles-ci.

62      L’EUIPO, soutenue en ce sens par l’intervenante, réfute ce moyen.

63      Au préalable, il importe de souligner que l’article 82, paragraphe 2, sous b), du règlement 2018/625 prévoit que « les articles 7 et 8 [dudit règlement] ne s’appliquent pas aux procédures d’opposition dont la phase contradictoire a débuté avant le 1er octobre 2017 ». En l’espèce, la phase contradictoire de procédure d’opposition a débuté avant cette date, à savoir le 26 août 2017, si bien que la requérante ne saurait utilement se prévaloir de l’article 8, paragraphe 7, de ce règlement [voir, par analogie, arrêt du 27 mars 2019, Biernacka-Hoba/EUIPO – Formata Bogusław Hoba (Formata), T‑265/18, non publié, EU:T:2019:197, point 37].

64      Toutefois, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le Tribunal doit interpréter les moyens d’une partie requérante par leur substance plutôt que par leur qualification [arrêts du 10 février 2009, Deutsche Post et DHL International/Commission, T‑388/03, EU:T:2009:30, point 54, et du 6 juin 2019, Torrefazione Caffè Michele Battista/EUIPO – Battista Nino Caffè (BATTISTINO), T‑221/18, non publié, EU:T:2019:382, point 23].

65      Ainsi, il y a lieu de considérer le moyen soulevé par la requérante comme étant tiré en réalité de la violation de la règle 20 du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1), qui prévoyait notamment en substance que l’EUIPO invitait l’opposante à lui fournir, dans le délai imparti, les preuves de l’enregistrement ou du dépôt de la marque antérieure ou les preuves de l’acquisition et de l’étendue de la protection du droit antérieur, lorsqu’elle estimait que l’acte d’opposition ne contenait pas de renseignements détaillés sur ladite marque antérieure ou sur ledit droit antérieur.

66      Il est reproché en substance à la chambre de recours, d’une part, d’avoir considéré que les marques du Royaume-Uni verbales antérieures n’étaient pas valides et, d’autre part, de ne pas avoir tenu compte du fait que ces deux marques avaient acquis un caractère distinctif du fait de l’usage qui en avait été fait.

67      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon l’arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI (C‑196/11 P, EU:C:2012:314, point 40), il découle de la coexistence des marques de l’Union européenne et des marques nationales ainsi que du fait que l’enregistrement de ces dernières ne relève pas de la compétence de l’EUIPO, ni leur contrôle juridictionnel de la compétence du Tribunal, que, lors d’une procédure d’opposition à une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, la validité des marques nationales ne peut être mise en cause.

68      C’est pourquoi il importe de déterminer si, comme le soutient la requérante, la chambre de recours a remis en cause, à tort, la validité des marques du Royaume-Uni verbales antérieures.

69      D’une part, il y a lieu de rappeler qu’il est fait référence aux marques du Royaume-Uni verbales antérieures au point 32 de la décision attaquée dans le cadre de l’examen du risque de confusion entre la marque demandée et la marque de l’Union européenne antérieure. En effet, après avoir indiqué que la requérante n’avait pas explicitement fait valoir que la marque de l’Union européenne antérieure présentait un caractère particulièrement distinctif en raison d’un usage intensif ou d’une renommée, la chambre de recours a souligné que l’argument de la requérante selon lequel les marques du Royaume-Uni verbales antérieures avaient acquis un caractère distinctif par l’usage « v[enai]t simplement confirmer le faible caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure et [ne pouvai]t , en l’absence de tout élément de preuve concret à l’appui, \/ démontrer ce même caractère distinctif intrinsèque pour la marque de l’Union européenne antérieure ».

70      D’autre part, les marques du Royaume-Uni verbales antérieures ont fait l’objet d’un examen aux points 34 et 35 de la décision attaquée. Tout d’abord, la chambre de recours y a considéré que, « [é]tant donné qu’elles couvr[ai]ent les mêmes services et le même signe, ou exclusivement le mot “workspace”, comme cela [était] le cas de la [marque de l’Union antérieure] examinée […], la conclusion indiquant l’absence d’un risque de confusion s’appliqu[ait] également ». Ensuite, elle a relevé à cet égard que, « pour les marques [du Royaume-Uni verbales antérieures], les certificats d’enregistrement pertinents présentés par l’opposante confirm[ai]ent effectivement, pour chacune d’entre elles, que “la marque était dépourvue de caractère distinctif intrinsèque, mais [que] des éléments de preuve [avaie]nt été produits pour démontrer que, à la date de la demande, la marque avait effectivement acquis un caractère distinctif par l’usage” ». Enfin, elle a estimé que « [l]’argument de [la requérante] selon lequel les marques [du Royaume-Uni verbales antérieures] poss[édai]ent un caractère distinctif acquis par l’usage n’[était] toutefois étayé par aucun élément de preuve concret » et a souligné que « [l]a seule référence aux certificats d’enregistrement de ces marques [n’aurait pu] suffire[,] puisqu’elle ne [lui] permet[tait] pas […] de se faire son propre avis ».

71      Il y a lieu de considérer que, pris dans son ensemble, le raisonnement de la chambre de recours ne peut logiquement être interprété que dans le sens que celle-ci a opéré une distinction entre le caractère distinctif « acquis » par l’usage – qui a été reconnu aux marques du Royaume-Uni verbales antérieures par l’United Kingdom Intellectual Property Office (Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni) – et le caractère distinctif « accru » par l’usage qui impliquait que fût attribué aux marques nationales antérieures un caractère distinctif plus élevé. Il importe de relever que la chambre de recours a estimé en substance et sans équivoque, au point 34 de la décision attaquée, que les considérations concernant l’appréciation du risque de confusion de la marque demandée avec la marque de l’Union européenne antérieure et la conclusion en résultant qu’il n’existait pas de risque de confusion entre celles-ci, s’appliquaient également aux marques nationales antérieures du Royaume-Uni. Ce constat confirme qu’elle n’a à aucun moment remis en cause l’existence desdites marques nationales et que celles-ci revêtaient le caractère distinctif minimal reconnu aux marques enregistrées.

72      Certes, au point 35 de la décision attaquée, la chambre de recours a souligné que « [l]’argument de [la requérante] selon lequel les marques du Royaume‑Uni antérieures poss[édai]ent un caractère distinctif acquis par l’usage n’[était] toutefois étayé par aucun élément de preuve concret » et que « [l]a seule référence aux certificats d’enregistrement de ces marques [n’aurait pu] suffire[,] puisqu’elle ne permet[tait] pas à la chambre de recours de se faire son propre avis ». Toutefois, cette formulation maladroite doit en réalité se comprendre comme une réponse à l’argumentation développée par la requérante dans ses observations devant la chambre de recours, portant sur l’importance du caractère distinctif à accorder aux marques du Royaume-Uni verbales antérieures du fait de leur réputation. La requérante s’est en effet prévalue du caractère distinctif des marques du Royaume-Uni verbales antérieures en se référant à la réputation considérable de la marque « workspace » et à l’utilisation intensive de celle-ci au Royaume-Uni depuis 1990.

73      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant que, faute d’éléments de preuve concrets, elle n’était pas en mesure d’accorder aux marques du Royaume-Uni verbales antérieures un degré de caractère distinctif plus important, en raison d’un prétendu usage intensif ou d’une renommée alléguée, que le caractère distinctif minimal qu’elle leur a reconnu.

74      Le caractère distinctif accru du fait de l’usage intensif ou d’une renommée ne se présume pas et doit donc être démontré par celui qui s’en prévaut. À cet égard, la seule mention figurant dans les certificats de l’Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni – selon laquelle les marques verbales antérieures étaient intrinsèquement dépourvues de caractère distinctif, mais qu’elles avaient acquis, à la date de la demande d’enregistrement desdites marques antérieures, un caractère distinctif du fait de leur usage – ne saurait suffire à démontrer que le caractère distinctif des marques verbales antérieures avait été accru du fait d’un usage intensif ou d’une renommée. La seule obligation qui s’imposait à la chambre de recours, en application de la jurisprudence issue de l’arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI (C‑196/11 P, EU:C:2012:314), était de reconnaître, en tant que marques, les marques du Royaume-Uni verbales antérieures et de leur accorder le caractère distinctif minimal requis pour les marques existantes. En l’espèce, la chambre de recours s’est parfaitement conformée à cette obligation.

75      Eu égard à ces considérations, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et de l’article 27 du règlement 2018/625 

76      Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante invoque une violation de l’article 27, paragraphe 2, du règlement 2018/625 et de l’article 95, paragraphe 1 du règlement 2017/1001, au motif que, en remettant en cause la validité des marques du Royaume-Uni verbales antérieures, la chambre de recours aurait fondé la décision attaquée sur l’examen de faits, de preuves et d’arguments qui n’avaient pas été présentés par les parties et qui n’avaient pas été invoqués dans leurs conclusions. Elle estime en outre que la chambre a fondé la décision attaquée sur des motifs qui n’avaient pas été invoqués par l’intervenante dans son mémoire exposant les motifs du recours ou devant la division d’opposition.

77      L’EUIPO et l’intervenante réfutent ce moyen.

78      Au préalable, il convient d’observer que l’article 82, paragraphe 2, sous j), du règlement 2018/625 prévoit que le titre V – dans lequel figure l’article 27, paragraphe 2, invoqué par la requérante à l’appui du deuxième moyen – « ne s’applique pas aux recours introduits avant le 1er octobre 2017 ». Le recours contre la décision de la division d’opposition ayant été introduit après cette date, à savoir le 27 septembre 2018, c’est à juste titre que la requérante a fondé le deuxième moyen sur cette disposition. Il y a également lieu de rappeler que, selon l’article 27, paragraphe 2, du règlement 2018/625, l’examen du recours est limité, dans les procédures inter partes, aux moyens invoqués dans le mémoire exposant les motifs.

79      La requérante reproche en substance à la chambre de recours d’avoir violé cette disposition lue à la lumière de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, en examinant, de sa propre initiative, la question de la validité et de l’opposabilité des marques du Royaume-Uni antérieures alors même que cette question n’aurait pas été soulevée par les parties.

80      Toutefois, ainsi qu’il ressort de l’analyse du premier moyen, la chambre de recours n’a à aucun moment remis en cause la validité des marques du Royaume-Uni verbales antérieures.

81      Partant, il convient, en tout état de cause, de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

82      La requérante fait valoir qu’elle invoque une violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 en ce que, même si la chambre de recours avait le droit de remettre en cause la validité des enregistrements dont elle se prévalait dans l’opposition, elle a omis de lui donner l’opportunité de présenter ses observations et ses arguments et de produire des preuves à l’appui de ceux-ci.

83      L’EUIPO, soutenue en ce sens par l’intervenante, réfute ces arguments.

84      L’examen du premier moyen a révélé que à aucun moment la chambre de recours n’a remis en cause la validité des marques du Royaume-Uni verbales antérieures. Il s’ensuit qu’il ne saurait lui être reproché d’avoir prétendument omis de donner à la requérante l’opportunité de présenter ses arguments et de produire des preuves en vue de contester la remise en cause de la validité desdites marques antérieures.

85      Partant, il convient, en tout état de cause, de rejeter le troisième moyen.

86      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le recours doit être rejeté dans son intégralité, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions invoqué par la requérante, visant à ce que le Tribunal confirme la décision de la division d’opposition.

 Sur les dépens

87      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

88      En outre, l’intervenante a conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’elle a exposés lors des procédures devant la division d’opposition et la chambre de recours.

89      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Il n’en va toutefois pas de même des frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’opposition [arrêt du 26 octobre 2017, Sulayr Global Service/EUIPO – Sulayr Calidad (sulayr GLOBAL SERVICE), T‑685/15, non publié, EU:T:2017:761, point 53]. Dès lors, les conclusions de l’intervenante tendant à la condamnation de la requérante aux dépens exposés devant la division d’opposition ne peuvent qu’être rejetées. 

90      En tout état de cause, force est de constater que, dans la décision attaquée, la requérante a été condamnée, par la chambre de recours, à payer à l’intervenante des dépens au titre des frais que celle-ci avait exposés dans le cadre des procédures d’opposition et de recours. Partant, dès lors que le présent arrêt rejette le recours dirigé contre la décision attaquée, c’est le dispositif de cette dernière qui continue à régler les dépens en cause [voir, par analogie, arrêt du 10 octobre 2017, Cofra/EUIPO – Armand Thiery (1841), T‑233/15, non publié, EU:T:2017:714, point 127 ; du 19 octobre 2017, Aldi/EUIPO – Sky (SKYLITe), T‑736/15, non publié, EU:T:2017:729, point 131, et du 28 février 2019, Lotte/EUIPO – Générale Biscuit-Glico France (PEPERO original), T‑459/18, non publié, EU:T:2019:119, point 194].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Workspace Group plc est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Schalin

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 mai 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.