Language of document : ECLI:EU:T:2004:4

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)
14 janvier 2004 (1)

Recours en annulation – Aides d'État – Aides accordées par le royaume des Pays-Bas à des entreprises de traitement du lisier – Régime autorisé par la Commission pour une durée déterminée – Aides octroyées avant ou après la période autorisée

Dans l'affaire T-109/01,

Fleuren Compost BV, établie à Middelharnis (Pays-Bas), représentée par Me J. Stuyck, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. V. di Bucci et H. van Vliet, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision 2001/521/CE de la Commission, du 13 décembre 2000, concernant le régime d'aides que le royaume des Pays-Bas a mis à exécution en faveur de six entreprises de traitement du lisier (JO 2001, L 189, p. 13),



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre élargie)



composé de MM. N. J. Forwood, président, J. Pirrung, P. Mengozzi, A. W. H. Meij et M. Vilaras, juges,

greffier: M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 17 juin 2003,

rend le présent



Arrêt




Cadre juridique

1
Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, CE:

«Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre les États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.»

2
Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun.

3
La communication de la Commission concernant l’encadrement communautaire des aides d’État aux petites et moyennes entreprises (JO 1996, C 213, p. 4, ci‑après l’«encadrement des aides aux PME») prévoit, en son point 4.2.1, la possibilité pour la Commission d’autoriser, au titre de la dérogation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, les aides aux petites et moyennes entreprises situées en dehors des régions éligibles aux aides nationales à finalité régionale dont l’intensité, en équivalent-subvention brut par rapport aux coûts éligibles, ne dépasse pas:

15 % pour les petites entreprises;

7,5 % pour les «entreprises moyennes».

4
Selon le point 3.2 de l’encadrement des aides aux PME, il faut, notamment, pour qu’une entreprise soit considérée comme petite ou moyenne au sens de cet encadrement:

que son chiffre d’affaires annuel n’excède pas 40 millions d’euros ou que le total de son bilan annuel n’excède pas 27 millions d’euros;

qu’elle respecte le critère d’indépendance, à savoir ne pas être détenue à hauteur de 25 % ou plus du capital ou des droits de vote par une entreprise ou conjointement par plusieurs entreprises ne correspondant pas à la définition de l’ «entreprise moyenne» ou de la petite entreprise, selon le cas.

5
En outre, au point 4.1 de l’encadrement des aides aux PME, sous l’intitulé «Principes généraux», la Commission rappelle que, pour pouvoir bénéficier de la dérogation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, une aide d’État «doit […] avoir un caractère incitatif: elle ne peut en aucun cas avoir pour seul effet de réduire de façon continue ou périodique les coûts que doit normalement supporter l’entreprise tout en maintenant le statu quo, comme c’est le cas des aides au fonctionnement, et elle doit être nécessaire pour atteindre des objectifs que les seules forces du marché ne permettraient pas d’obtenir». La Commission y précise que «[c]es objectifs doivent être d’intérêt communautaire» et que «l’aide doit être proportionnée aux handicaps à surmonter pour atteindre les bénéfices socio-économiques souhaités d’un point de vue communautaire: ces effets positifs doivent l’emporter sur les effets nocifs de l’aide sur la concurrence et les échanges».

6
La communication de la Commission concernant l’encadrement communautaire des aides d’État pour la protection de l’environnement (JO 1994, C 72, p. 3, ci‑après l’«encadrement des aides à l’environnement») définit les conditions dans lesquelles les aides d’État en faveur de l’environnement sont susceptibles de bénéficier de l’une des dérogations prévues à l’article 87 CE.

7
Selon le point 3.2.3. A de l’encadrement des aides à l’environnement, les aides aux investissements à des fins d’environnement destinées à satisfaire aux nouvelles normes obligatoires ou à d’autres obligations juridiques nouvelles impliquant l’adaptation d’installations et d’équipements à ces nouvelles exigences peuvent être autorisées à concurrence d’un niveau maximal de 15 % brut des coûts éligibles. Ces aides ne peuvent toutefois être accordées que pour une durée limitée et uniquement pour des installations fonctionnant depuis deux ans au moins au moment de l’entrée en vigueur des normes ou des obligations nouvelles.

8
Selon le point 3.2.3. B de l’encadrement des aides à l’environnement, les aides aux investissements à des fins d’environnement permettant d’atteindre des niveaux de protection de l’environnement très nettement supérieurs à ceux imposés par les normes obligatoires peuvent être autorisées à concurrence d’un niveau maximal de 30 % brut des coûts d’investissement éligibles.


Faits à l’origine du recours

9
Par décision du 6 juillet 1989 (ci-après la «décision d’approbation»), la Commission a approuvé le régime d’aides néerlandais dénommé «Bijdrageregeling Proefprojecten Mestverwerking» (régime d’aides en faveur de projets pilotes dans le domaine du traitement du lisier, ci-après le «régime BPM») pour la période 1989‑1990. Par décision C 17/90 (ex N 88/90), du 14 décembre 1990 (JO 1991, C 82, p. 3, ci‑après la «décision de prorogation»), la Commission a approuvé la prorogation de ce régime pour la période 1990‑1994, au titre de la dérogation prévue à l’article 92, paragraphe 3, sous c), du traité CE [devenu, après modification, article 87, paragraphe 3, sous c), CE]. Les autorités néerlandaises ont ainsi été autorisées à octroyer «avant 1995» des aides à l’investissement, à concurrence de 35 % des coûts admissibles, en faveur d’une vingtaine d’installations de traitement à grande échelle du lisier.

10
La requérante produit du compost frais, destiné à la culture des champignons, par traitement de lisier constitué d’un mélange de fumier de cheval, de fiente de poule, de gypse et de paille.

11
Le 1er décembre 1994, la requérante a introduit une demande auprès des autorités néerlandaises, en vue d’obtenir une subvention sur la base du régime BPM, pour des installations de stockage et de traitement en milieu fermé du lisier.

12
Par lettre du 5 décembre 1994, lesdites autorités ont accusé réception de cette demande dans les termes suivants:

«J’ai reçu votre demande de subvention [au titre du régime BPM] le 1er décembre 1994.

Votre demande sera prise en considération.

[…]»

13
Plusieurs plaintes ayant attiré l’attention de la Commission sur les aides accordées par les Pays-Bas à des projets de traitement du lisier après la période couverte par la décision de prorogation, la Commission a pris contact avec les autorités néerlandaises à ce sujet. En réponse à une lettre de ces dernières du 7 août 1995, elle leur a notamment adressé, le 21 août 1995, une lettre libellée comme suit:

«[La Commission] prend bonne note de ce qu’aucune aide n’a été accordée après le 31 décembre 1994 au titre du [régime BPM], mais que cinq demandes sont encore en cours.

La Commission n’ayant approuvé ledit régime que pour la période 1990‑1994, il vous appartient, en vertu de l’article [88], paragraphe 3, du traité CE de nous tenir informés dans les délais requis de toute application dudit régime après le 31 décembre 1994. Je vous saurais gré de confirmer à la Commission dans le mois qui suit la réception de la présente lettre que cette obligation de notification sera respectée.

La Commission a également appris que certains projets pour lesquels une aide avait été accordée avant le 31 décembre 1994 ne pourront être réalisés que le 31 décembre 1997 au plus tard. Ces aides-là sont couvertes par l’approbation de la Commission.»

14
Par lettre du 21 décembre 1995, les autorités néerlandaises ont informé la requérante qu’une subvention d’un montant de 1 073 925 florins néerlandais (NLG), soit 4,5 % du montant pouvant faire l’objet d’une subvention, lui était accordée conformément à sa demande et aux dispositions du régime BPM. La Commission n’a pas été informée de l’octroi de cette aide.

15
Par lettre du 23 avril 1996, la requérante a été informée qu’un premier acompte était mis à sa disposition. Par lettre du 11 septembre 1997, la requérante a présenté un décompte final. Par lettre du 3 octobre 1997, une subvention définitive lui a été accordée.

16
La Commission ayant été saisie d’une nouvelle plainte concernant l’aide octroyée à l’entreprise Industriële Mestverwerkingsnetwerk Noord-Limburg en décembre 1997, elle a, par lettre du 22 janvier 1998, suivie de deux rappels des 15 avril et 29 juillet 1998, demandé des informations complémentaires aux autorités néerlandaises.

17
Par lettre du 6 août 1998, les autorités néerlandaises ont communiqué à la Commission une liste de projets subventionnés à des dates qui lui ont paru méconnaître la décision de prorogation. La subvention accordée à la requérante était mentionnée dans cette liste.

18
Par lettre fondée sur l’article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) nº 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88] CE (JO L 83, p. 1), datée du 15 juillet 1999, la Commission a enjoint aux autorités néerlandaises de lui communiquer, dans un délai de 20 jours ouvrables, toutes les informations nécessaires afin de déterminer si les aides en cause relevaient du régime BPM tel qu’il avait été approuvé par elle et de lui indiquer si d’autres aides avaient également été versées en faveur de projets analogues.

19
Par lettres des 12 et 19 octobre 1999, les autorités néerlandaises ont communiqué un certain nombre d’informations à la Commission, sans toutefois fournir toutes les précisions demandées par celle-ci dans sa demande de renseignements.

20
Par lettre du 17 mai 2000, la Commission a notifié aux Pays-Bas sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE à l’égard de six aides accordées après la période couverte par la décision de prorogation (ci‑après la «décision d’ouverture de la procédure»).

21
Cette décision a été publiée le 23 septembre 2000 (JO C 272, p. 22), conformément à l’article 26, paragraphe 2, du règlement n° 659/1999, les parties intéressées étant par la même occasion invitées à présenter leurs observations sur les aides en question dans un délai d’un mois à compter de la date de publication (ci‑après l’«invitation à présenter des observations»).

22
La Commission n’a pas reçu d’observations de la requérante, ni d’aucune autre partie intéressée, en réaction à cette publication.

23
Le 13 décembre 2000, la Commission a adopté la décision 2001/521/CE, concernant le régime d’aides que le royaume des Pays‑Bas a mis à exécution en faveur de six entreprises de traitement du lisier (ci-après la «décision attaquée»). Cette décision, notifiée aux Pays-Bas sous le numéro C (2000) 4070, a été publiée le 11 juillet 2001 (JO 2001, L 189, p. 13).

24
Aux termes de l’article 1er de la décision attaquée, «[l]es aides d’État mises à exécution par les Pays-Bas en faveur des usines de traitement du lisier Ferm‑o‑Feed BV, Fleuren Compost BV, Vloet Oploo BV, Smith Markelo, Arev Venhorst et Memon KPI, pour un montant de 2 501 089 euros, sont incompatibles avec le marché commun».

25
Selon l’article 2, paragraphe 1, de la décision attaquée, «[l]es Pays-Bas prennent toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès de leurs bénéficiaires les aides visées à l’article 1er et déjà illégalement mises à leur disposition».

26
La requérante a été informée de la décision attaquée par lettre des autorités néerlandaises du 9 mars 2001, qu’elle déclare avoir reçue le, ou aux environs du, 12 mars 2001.


Procédure et conclusions des parties

27
Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 mai 2001, la requérante a introduit le présent recours, dans lequel elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

annuler la décision attaquée, du moins en ce qui la concerne;

condamner la Commission aux dépens.

28
La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter le recours;

condamner la requérante aux dépens.

29
Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre élargie) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, a invité la Commission à déposer certains documents. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti.

30
Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 17 juin 2003.


En droit

31
Au soutien de ses conclusions en annulation, la requérante invoque sept moyens tirés, le premier, d’une violation de l’article 87, paragraphe 1, CE et d’une erreur manifeste d’appréciation, le deuxième, d’une violation de l’article 88 CE et du principe de sécurité juridique, le troisième, d’une violation de la décision de prorogation, le quatrième, d’une violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE et d’une erreur manifeste d’appréciation, le cinquième, d’une violation de l’obligation de motivation, le sixième, d’une violation du principe de protection de la confiance légitime et, le septième, d’une violation du droit d’être entendu.

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 87, paragraphe 1, CE et d’une erreur manifeste d’appréciation

Décision attaquée

32
Aux considérants 21 à 24 de la décision attaquée, la Commission expose:

«(21)
Les aides à l’investissement accordées par les autorités néerlandaises étaient destinées à permettre et à encourager l’investissement dans des installations de traitement du lisier et elles favorisaient par conséquent les entreprises concernées. Une fois traité, le lisier est, pour l’essentiel, commercialisé comme fumier sec sous forme granulée. Les usines de traitement du lisier sont en concurrence avec d’autres producteurs d’engrais organiques et chimiques. Ces incitations financières, en améliorant la situation financière des bénéficiaires, menacent de fausser la concurrence dans le marché intérieur, étant donné que le fumier de ferme, lorsqu’il est utilisé comme engrais, concurrence d’autres engrais organiques.

(22)
Selon une étude sur les débouchés possibles pour les effluents d’élevage traités provenant des Pays-Bas, qui a été réalisée en 1990 pour le compte du ministère néerlandais compétent, la concurrence dans le secteur des engrais animaux et végétaux ne s’exerce pas seulement au niveau local, mais aussi sur les marchés français, espagnol, portugais, italien et grec. Au cours de la période 1988‑1990, la part des Pays‑Bas dans les échanges intracommunautaires totaux de ces produits a varié de 44 à 60 %. Il est prévu que les exportations néerlandaises de fumier animal traité vers d’autres États membres augmentent, surtout du fait des projets en cause.

(23)
Malgré l’injonction de fournir des renseignements qui leur a été adressée, les autorités néerlandaises n’ont pas communiqué les informations nécessaires concernant la position sur le marché des différentes entreprises concernées. Ces informations auraient permis d’apprécier l’incidence de chacune de ces entreprises sur les marchés du traitement du lisier et des engrais. La Commission a par conséquent fondé son appréciation sur les données concernant le marché dans son ensemble.

(24)
En conséquence, les aides sont susceptibles d’affecter les échanges entre États membres dans ce secteur et elles constituent des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.»

Arguments des parties

33
La requérante soutient, en premier lieu, que l’aide litigieuse ne contribue pas à augmenter sa capacité de production, mais qu’elle a uniquement pour but et pour effet de lui permettre d’équiper ses installations de production dans le respect de l’environnement.

34
La requérante soutient, en deuxième lieu, que l’aide litigieuse n’affecte pas les échanges entre les États membres.

35
En effet, l’obligation imposée par les autorités néerlandaises à la requérante de produire ses engrais dans des installations fermées, de façon à éviter les nuisances provoquées par l’odeur, entraînerait un renchérissement du produit qui rendrait son exportation difficile, voire impossible. Dans sa réplique, elle précise qu’elle exporte à peine 2 % de son compost, et exclusivement vers la Belgique. Elle expose également que les coûts élevés du transport de compost et le risque qu’il fermente en cours de route rendent son déplacement économiquement inintéressant sur des distances supérieures à 200 km.

36
La requérante soutient, en troisième lieu, que l’aide litigieuse ne fausse ni ne menace de fausser la concurrence dans le marché commun.

37
À cet égard, elle fait valoir que, par leur nature particulière et leur destination spécifique, à savoir la culture des champignons, les produits qu’elle fabrique ne font pas concurrence aux engrais organiques et chimiques. Dans sa réplique, elle conteste par ailleurs la pertinence de l’étude évoquée au considérant 22 de la décision attaquée. En effet, cette étude ne concernerait que les engrais animaux, qui, selon elle, ne conviennent pas pour la culture des champignons.

38
Parallèlement à ces trois arguments, la requérante fait valoir que, avant de prendre une décision qui lui était défavorable, la Commission aurait dû insister auprès des autorités néerlandaises pour obtenir les données qui lui auraient permis d’apprécier l’impact réel de l’aide litigieuse sur le commerce interétatique et, en cas de refus persistant de ces autorités, demander ces données à la requérante elle-même. Dans ce contexte, la requérante soutient qu’on ne peut lui reprocher de ne pas avoir remarqué ni, dès lors, de n’avoir pas réagi à l’invitation à présenter des observations. Elle estime, en effet, qu’elle pouvait légitimement s’attendre à ce que les Pays‑Bas prennent les mesures nécessaires et fassent les observations appropriées. Elle considère également que l’État membre qui accorde l’aide a l’obligation d’informer les bénéficiaires de ces mesures. À cet égard, elle relève que, dans la lettre d’engagement de la procédure, la Commission avait demandé aux autorités néerlandaises de notifier sans retard une copie de ladite lettre aux bénéficiaires potentiels.

39
La Commission réfute l’ensemble de ces arguments et renvoie, en substance, aux considérants 21 à 24 de la décision attaquée.

Appréciation du Tribunal

40
S’agissant, tout d’abord, de l’argument de la requérante fondé sur un prétendu manque d’insistance de la Commission à obtenir des informations (voir point 38 ci-dessus), il convient de relever que, lors de la phase d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE, la Commission doit mettre les intéressés en mesure de présenter leurs observations.

41
La Cour a jugé, dans le cadre de l’application de cette disposition, que la publication d’un avis au Journal officiel des Communautés européennes constitue un moyen adéquat en vue de faire connaître à tous les intéressés l’ouverture d’une procédure (arrêts de la Cour du 14 novembre 1984, Intermills/Commission, 323/82, Rec. p. 3809, point 17, et du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, Rec. p. I‑7869, point 80). Cette communication vise à obtenir, de la part des intéressés, toutes informations destinées à éclairer la Commission dans son action future (arrêt de la Cour du 12 juillet 1973, Commission/Allemagne, 70/72, Rec. p. 813, point 19). Une telle procédure donne aussi aux autres États membres et aux milieux concernés la garantie de pouvoir se faire entendre (arrêt de la Cour du 20 mars 1984, Allemagne/Commission, 84/82, Rec. p. 1451, point 13).

42
La procédure de contrôle des aides d’État est cependant, compte tenu de son économie générale, une procédure ouverte vis-à-vis de l’État membre responsable, au regard de ses obligations communautaires, de l’octroi de l’aide (arrêts de la Cour du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, dit «Meura», 234/84, Rec. p. 2263, point 29, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, cité au point 41 ci-dessus, point 81).

43
Dans la procédure de contrôle des aides d’État, les intéressés autres que l’État membre concerné n’ont que le rôle rappelé au point 41 ci‑dessus et, à cet égard, ils ne sauraient prétendre eux-mêmes à un débat contradictoire avec la Commission, tel que celui ouvert au profit dudit État membre (arrêts de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 59, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, cité au point 41 ci-dessus, point 82).

44
Aucune disposition de la procédure de contrôle des aides d’État ne réserve, parmi les intéressés, un rôle particulier au bénéficiaire de l’aide. À cet égard, il y a lieu de préciser que la procédure de contrôle des aides d’État n’est pas une procédure ouverte «à l’encontre» du bénéficiaire ou des bénéficiaires des aides qui impliquerait que celui-ci ou ces derniers puissent se prévaloir de droits aussi étendus que les droits de la défense en tant que tels (arrêt Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, cité au point 41 ci-dessus, point 83).

45
Ainsi, dès lors que la décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE contient une analyse préliminaire suffisante de la Commission exposant les raisons pour lesquelles elle éprouve des doutes quant à la compatibilité des aides en cause avec le marché commun, il appartient à l’État membre concerné et, le cas échéant, au bénéficiaire des aides d’apporter les éléments de nature à démontrer que ces aides sont compatibles avec le marché commun et, éventuellement, de faire part de circonstances spécifiques relatives au remboursement d’aides déjà versées dans l’occurrence où la Commission viendrait à exiger celui-ci (voir, par analogie, arrêt Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, cité au point 41 ci-dessus, point 170).

46
En l’espèce, la requérante n’a pas allégué que la décision d’ouverture de la procédure était insuffisamment motivée pour lui permettre d’exercer utilement ses droits. Au demeurant, le Tribunal constate que les éléments repris aux considérants 21 à 24 de la décision attaquée étaient déjà exposés, en substance, au point 3.2 de la décision d’ouverture de la procédure.

47
Il y a donc lieu de conclure que, lorsque la Commission a effectué, comme en l’espèce, la publication mentionnée au point 41 du présent arrêt, c’est-à-dire lorsqu’elle a notamment invité le bénéficiaire de l’aide à présenter ses observations et que, ainsi qu’il a été constaté au point 22 ci‑dessus, ledit bénéficiaire n’a pas fait usage de cette possibilité, la Commission n’a violé aucun de ses droits (arrêt Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, cité au point 41 ci‑dessus, points 84 et 169), étant entendu également que la Commission ne saurait être tenue pour responsable de l’omission, par l’État membre concerné, de notifier une copie de la lettre d’engagement de la procédure au bénéficiaire de l’aide.

48
Par ailleurs, si l’article 88, paragraphe 2, CE impose à la Commission, avant de prendre sa décision, de recueillir les observations des parties intéressées, il n’interdit pas à cette institution de conclure qu’une aide est incompatible avec le marché commun en l’absence de telles observations (arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑113/00, Rec. p. I‑7601, point 39).

49
Il ne saurait davantage être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’éventuels éléments de fait ou de droit qui auraient pu lui être présentés pendant la procédure administrative, mais qui ne l’ont pas été, la Commission n’étant pas dans l’obligation d’examiner d’office et par supputation quels sont les éléments qui auraient pu lui être soumis (voir, en ce sens, arrêt Commission/Sytraval et Brink’s France, cité au point 43 ci-dessus, point 60).

50
Pour autant que la requérante se réfère, à l’appui de son recours, à des éléments d’information qui n’étaient pas disponibles lors de l’adoption de la décision attaquée, ou qui n’ont pas été portés à la connaissance de la Commission au cours de la procédure précontentieuse, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre d’un recours en annulation fondé sur l’article 230 CE, la légalité de l’acte communautaire concerné doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où cet acte a été adopté (arrêt de la Cour du 7 février 1979, France/Commission, 15/76 et 16/76, Rec. p. 321, point 7; arrêt du Tribunal du 25 juin 1998, British Airways e.a./Commission, T‑371/94 et T‑394/94, Rec. p. II‑2405, point 81).

51
Ainsi, conformément à la jurisprudence, la légalité d’une décision en matière d’aides doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (arrêts Meura, cité au point 42 ci-dessus, point 16, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, cité au point 41 ci-dessus, point 168). Un État membre ne saurait ainsi se prévaloir devant le juge communautaire d’éléments de fait qui n’ont pas été avancés au cours de la procédure précontentieuse prévue à l’article 88 CE (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, C‑278/92 à C‑280/92, Rec. p. I‑4103, point 31, et du 13 juin 2002, Pays-Bas/Commission, C‑382/99, Rec. p. I‑5163, points 49 et 76).

52
Or, il n’apparaît pas, sur la base des éléments de fait et de droit portés à sa connaissance ou dont elle pouvait disposer au moment où elle a arrêté la décision attaquée, que la Commission ait commis une quelconque erreur d’appréciation en retenant, pour les motifs exposés notamment aux considérants 21 à 24 de ladite décision, que la subvention litigieuse constitue une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, que cette aide affecte les échanges entre les États membres et qu’elle fausse ou menace de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.

53
Quant aux arguments de la requérante invoqués pour la première fois dans le cadre du présent recours, à supposer même qu’ils puissent être pris en considération par le Tribunal malgré la jurisprudence rappelée ci-dessus, il convient de relever, en premier lieu, que la notion d’aide recouvre les avantages consentis par les autorités publiques qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui grèvent normalement le budget d’une entreprise (arrêt de la Cour du 26 septembre 1996, France/Commission, C‑241/94, Rec. p. I‑4551, point 34). L’octroi de subsides au titre du régime BPM répond incontestablement à cette définition.

54
En revanche, il est indifférent que la mise en œuvre de ce régime ait pour but d’aider les entreprises à satisfaire à leurs obligations légales en matière de protection de l’environnement. En effet, il résulte d’une jurisprudence constante que l’article 87, paragraphe 1, CE ne distingue pas selon les causes ou les objectifs des interventions étatiques, mais les définit en fonction de leurs effets (arrêts de la Cour du 2 juillet 1974, Italie/Commission, 173/73, Rec. p. 709, point 27, et Pays‑Bas/Commission, cité au point 51 ci-dessus, point 61). Sans préjudice de l’applicabilité au cas d’espèce de l’encadrement des aides à l’environnement, question qui sera appréciée dans le cadre de l’examen du quatrième moyen, le fait que les subsides octroyés au titre du régime BPM favorisent un meilleur respect de l’environnement ne suffit donc pas à les faire échapper d’emblée à la qualification d’aides au sens de l’article 87 CE.

55
Il convient, en deuxième lieu, de rejeter les arguments de la requérante tirés de l’absence d’affectation des échanges entre États membres, dès lors que, d’après les indications fournies par la requérante elle-même aux autorités néerlandaises dans sa demande d’octroi d’un subside au titre du régime BPM, ses exportations étaient «satisfaisantes, étant donné la demande en provenance de Belgique et d’Allemagne». De même, le rapport de la commission consultative sur le traitement du lisier («Adviescommissie Mestverwerking») du 22 mai 1995, remis aux autorités néerlandaises dans le cadre de la procédure d’examen de la demande d’aide, mentionne que le compost produit par la requérante est exporté par elle «entre autres en Allemagne». Force est ainsi de constater que, même si le pourcentage exact de la production de la requérante faisant l’objet d’exportations n’est pas connu, celle-ci participe pleinement aux échanges intracommunautaires en exportant des volumes substantiels de compost vers d’autres États membres.

56
En ce qui concerne, en troisième lieu, l’argument de la requérante selon lequel l’aide en cause ne fausserait ni ne menacerait de fausser la concurrence dans le marché commun, il ne peut davantage être retenu, dès lors que ladite aide se traduit, en tout état de cause, par une diminution des coûts de production des producteurs qui en bénéficient, de sorte qu’elle est susceptible d’affecter les échanges de ce produit.

57
Lorsqu’une aide accordée par un État ou au moyen de ressources d’État renforce la position d’une entreprise par rapport à d’autres entreprises concurrentes dans les échanges intracommunautaires, ces derniers doivent être considérés comme influencés par l’aide (arrêts de la Cour du 17 septembre 1980, Philip Morris/Commission, 730/79, Rec. p. 2671, point 11, et du 21 mars 1991, Italie/Commission, C‑303/88, Rec. p. I‑1433, point 27). Tel est le cas en l’espèce, puisque toute autre entreprise que celles visées par la mesure litigieuse ne peut financer de nouveaux investissements qu’à des conditions moins favorables, qu’elle soit établie aux Pays‑Bas ou dans un autre État membre.

58
Contrairement à ce que soutient la requérante, la motivation de la décision attaquée, telle que reprise au point 32 du présent arrêt, suffit à caractériser l’incidence de l’aide litigieuse sur la concurrence et les échanges entre États membres, dès lors qu’elle concerne un produit qui est par nature susceptible de faire l’objet de transactions d’un État membre à l’autre. Il convient d’ajouter que, comme la Commission l’a relevé à juste titre dans son mémoire en défense, un rayon d’action de 200 km autour de l’établissement de production de la requérante permet à celle‑ci d’atteindre divers lieux en Belgique et en Allemagne. Par ailleurs, l’aide litigieuse constitue également un avantage pour la requérante par rapport à des concurrents étrangers souhaitant exporter aux Pays‑Bas. Enfin, il ne ressort nullement de l’étude citée au considérant 22 de la décision attaquée que ladite étude ne concerne que des engrais animaux non utilisables pour la culture des champignons.

59
Il résulte de ce qui précède que la Commission a suffisamment établi l’incidence de l’aide litigieuse sur la concurrence et les échanges entre États membres.

60
Au regard de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

Sur les deuxième et troisième moyens, respectivement tirés d’une violation de l’article 88 CE et du principe de sécurité juridique et d’une violation de la décision de prorogation

61
Il convient d’examiner conjointement les deuxième et troisième moyens, dès lors qu’ils portent essentiellement sur la question de savoir si l’aide litigieuse relève du champ d’application ratione temporis de la décision de prorogation.

Décision attaquée

62
Aux considérants 17 à 20 de la décision attaquée, la Commission expose:

«(17)
Pour déterminer si les aides aux six entreprises concernées doivent être considérées comme des aides existantes, la Commission a d’abord examiné dans quelle mesure le régime BPM était applicable aux projets en question.

(18)
La question juridique la plus importante que soulèvent ces six affaires est celle de la différence d’interprétation quant à la nature de l’acte devant être considéré comme la décision juridiquement contraignante d’octroyer une aide. Tout en soutenant que c’est la lettre notifiant l’octroi (toekenningsbrief) qui constitue l’acte juridiquement contraignant par lequel l’autorité compétente s’engage à accorder l’aide, les autorités néerlandaises estiment que toutes les aides en cause pour lesquelles une lettre notifiant l’octroi a été envoyée après le 31 décembre 1994 relèvent du régime [BPM] étant donné que la lettre de confirmation (bevestigingsbrief) avait été envoyée avant cette échéance.

(19)
Après avoir procédé à un examen approfondi des documents relatifs à la procédure administrative concernant les affaires en cause, la Commission estime que l’acte juridiquement contraignant est la lettre notifiant l’octroi (toekenningsbrief). La lettre de confirmation (bevestigingsbrief) est un simple accusé de réception de la demande d’aide, qui est envoyé sans examen préalable de la conformité du projet aux conditions prévues par le régime. En outre, l’octroi des aides était subordonné à l’appréciation du projet par un comité consultatif composé de représentants de différents ministères. Ce n’est qu’après consultation de ce comité que le ministère de tutelle, en l’occurrence le ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Environnement (Ministerie van Landbouw, Visserij en Natuurbeheer), envoyait une lettre notifiant l’octroi (toekenningsbrief), dans laquelle étaient spécifiés le montant des coûts admissibles ainsi que le montant de l’aide et les conditions auxquelles elle était accordée. L’analyse des étapes de la procédure a donc montré que l’aide n’était pas accordée systématiquement à tous les demandeurs, mais seulement sur décision des autorités compétentes.

(20)
La Commission estime par conséquent que la date de l’envoi de la lettre notifiant l’octroi (toekenningsbrief) doit être considérée comme la date d’octroi de l’aide, comme les autorités néerlandaises l’avaient du reste elles-mêmes indiqué dans un premier temps. Les aides accordées à ces six usines de traitement du lisier ne relèvent par conséquent pas du régime [BPM] et elles doivent être considérées comme des mesures d’aide illégales mises à exécution en violation de l’article 88, paragraphe 3, du traité CE.»

Arguments des parties

63
La requérante soutient, en substance, que, contrairement à ce qui est exposé dans la décision attaquée, les autorités néerlandaises ont confirmé l’octroi de l’aide litigieuse avant le 31 décembre 1994. Cette aide devait donc être considérée comme une aide existante, au sens de l’article 88, paragraphe 3, CE et de l’article 1er, sous b), du règlement n° 659/1999, de sorte que, en adoptant la décision attaquée, la Commission a violé tant l’article 88 CE et le principe de sécurité juridique (deuxième moyen) que sa propre décision de prorogation (troisième moyen).

64
Selon la requérante, le principe de sécurité juridique veut que, lorsque les autorités nationales confirment l’octroi d’une aide au demandeur, dans le délai pour lequel la Commission a autorisé un régime d’aides, celle-ci ne peut pas objecter par la suite que cette aide n’est pas couverte ratione temporis par l’autorisation lorsqu’il est établi, comme ce serait le cas en l’espèce, que toutes les conditions d’octroi de l’aide étaient remplies.

65
Dans sa réplique, la requérante renvoie également à un document des autorités néerlandaises intitulé «Exposé des motifs pour le Journal officiel relatif à la modification du 13 octobre 1994», duquel il ressortirait de manière non équivoque que, selon ces autorités, les demandes déposées avant le 1er janvier 1995 seraient traitées dans le cadre du régime BPM et seraient couvertes par l’approbation de la Commission.

66
Dans ses observations faites à l’audience concernant les documents produits par la Commission à la demande du Tribunal (voir point 29 ci-dessus), la requérante a, par ailleurs, mis en cause le manque de clarté de la décision de prorogation, quant à la date limite pour l’octroi de subsides au titre du régime BPM. Selon elle, il ne ressort clairement ni de cette décision ni de la correspondance échangée, antérieurement à son adoption, entre la Commission et les autorités néerlandaises que les décisions nationales d’octroi de subsides au titre du régime BPM devaient nécessairement être prises avant le 31 décembre 1994.

67
La Commission réfute l’ensemble de ces arguments et renvoie, en substance, aux considérants 17 à 20 de la décision attaquée.

Appréciation du Tribunal

68
Pour répondre aux deuxième et troisième moyens du recours, il y a lieu de commencer par délimiter le champ d’application ratione temporis de la décision de prorogation.

69
À cet égard, il convient tout d’abord de relever que, dans la lettre de la représentation permanente du royaume des Pays-Bas auprès des Communautés européennes à la Commission du 1er mars 1990, portant notification de la prorogation envisagée du régime BPM, il est indiqué que «[l]a décision d’accorder ces aides est motivée par la nécessité impérieuse de mettre en place avant 1995 une capacité de traitement du lisier d’au moins 6 millions de tonnes».

70
Dans la lettre de la même représentation permanente à la Commission du 17 avril 1990, qui expose les modifications apportées au régime BPM à l’occasion de sa prorogation, il est de surcroît indiqué, en réponse à une question de la Commission portant sur la durée d’application du régime ainsi modifié, que celui-ci sera en principe en vigueur «jusqu’à 1995» («tot 1995»). S’agissant des mesures particulières de soutien envisagées au titre de ce régime, il est prévu qu’elles seront accordées «jusques et y compris 1994» («tot en met 1994»). Enfin, en réponse à une question de la Commission portant sur le nombre envisagé d’installations pilotes devant bénéficier de ce régime, il est indiqué qu’une vingtaine d’usines sont concernées «au cours de la période courant jusqu’à 1995» («in de periode tot 1995»).

71
Ensuite, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort de son libellé, la décision de prorogation visait à autoriser les aides à l’investissement que le gouvernement néerlandais «se proposait d’accorder à des usines de traitement de lisier [durant la période] 1990‑1994», en vue de créer une «première vingtaine d’usines de traitement de grande dimension avant 1995».

72
Force est, dès lors, de constater que seules sont couvertes par ladite décision de prorogation les aides accordées au titre du régime BPM au cours de la période 1990‑1994 et, en tout cas, avant 1995.

73
Aux fins d’apprécier si l’aide litigieuse relève du champ d’application ratione temporis de cette décision, tel que délimité au point précédent, il convient donc d’examiner si elle peut être considérée comme ayant été accordée avant 1995.

74
À cet égard, c’est à juste titre que la Commission estime que le critère pertinent est celui de l’«acte juridiquement contraignant par lequel l’autorité [nationale] compétente s’engage à accorder l’aide» (voir considérant 19 de la décision attaquée, cité au point 62 ci-dessus).

75
Il est exclu, en revanche, que la simple notification à la requérante, le 5 décembre 1994, d’une lettre confirmant l’introduction de la demande d’octroi de l’aide en cause suffise à permettre de considérer que cette aide a été accordée avant 1995, comme l’implique l’argumentation du gouvernement néerlandais (voir considérant 18 de la décision attaquée, cité au point 62 ci-dessus). Tant le libellé de la décision de prorogation que la règle d’interprétation stricte des dérogations au principe général de l’interdiction des aides d’État s’opposent à une telle extension du champ d’application dans le temps du régime d’aides approuvé.

76
Quant à l’argument que la requérante prétend tirer du principe de sécurité juridique, il repose sur la prémisse que les autorités néerlandaises lui ont confirmé l’octroi de l’aide litigieuse par lettre du 5 décembre 1994. Or, cette prémisse est incorrecte, de sorte que l’argument manque en fait. En effet, ainsi qu’il ressort de ses termes mêmes (voir point 12 ci‑dessus), la lettre des autorités néerlandaises du 5 décembre 1994 est un simple accusé de réception de la demande de subvention introduite par la requérante, envoyé à celle-ci sans aucune autre forme d’examen. Une telle lettre n’engage nullement son auteur quant à l’octroi de la subvention demandée, qui doit faire l’objet d’une appréciation et d’une décision ultérieures des autorités compétentes, ainsi que la Commission l’a relevé à juste titre au considérant 19 de la décision attaquée. En l’occurrence, la décision d’octroi a été adoptée le, ou aux environs du, 21 décembre 1995, date à laquelle elle a été notifiée à la requérante (voir point 14 ci-dessus).

77
Il découle de ce qui précède que l’aide en question ne saurait être considérée comme ayant été accordée avant 1995 et que, dès lors, elle n’était pas couverte par la décision de prorogation.

78
Cette conclusion ne saurait être infirmée par la circonstance que, dans sa version codifiée issue des modifications apportées les 7 août 1989, 15 mai 1991, 13 avril 1992, 8 mars 1994 et 19 octobre 1994 à la version initiale du 29 avril 1988, le régime BPM prévoit, en son article 15, paragraphe 4, que « [l]es demandes [d’octroi d’une aide] peuvent être introduites jusqu’au 31 décembre 1994».

79
Le Tribunal constate, en effet, que, à la différence de cette version codifiée, les versions antérieures du régime BPM, et notamment celles sur la base desquelles ont été adoptées tant la décision d’approbation que la décision de prorogation, ne contenaient pas une telle mention. Celle-ci n’a été introduite dans l’article 15, paragraphe 4, du régime BPM que lors de la modification de ce régime en date du 13 octobre 1994, publiée au Nederlandse Staatscourant du 19 octobre 1994. Elle a été portée à la connaissance de la Commission par une lettre des autorités néerlandaises du 10 novembre 1994. Dans sa lettre en réponse du 16 décembre 1994, la Commission l’a aussitôt contestée, en insistant sur le fait que d’éventuels engagements au titre du régime BPM après le 31 décembre 1994 devraient être considérés comme une prorogation devant lui être notifiée conformément à l’article 93, paragraphe 3, du traité CE.

80
Or, il ne saurait être admis qu’un État membre puisse, par la voie d’une modification apportée à un régime d’aides postérieurement à son autorisation par la Commission, étendre unilatéralement la portée de cette autorisation.

81
S’agissant, enfin, de l’argument que la requérante prétend tirer du document intitulé «Exposé des motifs pour le Journal officiel relatif à la modification du 13 octobre 1994» (voir point 65 ci-dessus), il suffit, pour le rejeter, de renvoyer au point 143 ci-après, dès lors que cet argument repose exclusivement sur l’éventuelle confiance légitime de la requérante dans la régularité de l’aide litigieuse, du fait des assurances que lui auraient données les autorités néerlandaises.

82
Au regard de l’ensemble de ces considérations, il n’apparaît pas que la Commission ait violé l’article 88, paragraphe 3, CE, la décision de prorogation ou le principe de sécurité juridique en déclarant l’aide en question incompatible avec le marché commun dans la décision attaquée.

83
Les deuxième et troisième moyens doivent, dès lors, être rejetés.

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE et d’erreurs manifestes d’appréciation

84
Ce moyen se subdivise en trois branches, portant respectivement sur la violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, l’erreur manifeste d’appréciation de la compatibilité de l’aide litigieuse avec l’encadrement des aides aux PME et l’erreur manifeste d’appréciation de la compatibilité de l’aide litigieuse avec l’encadrement des aides à l’environnement.

Sur la première branche, portant sur la violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE

    Arguments des parties

85
Dans le cadre de la première branche du moyen, la requérante soutient, en substance, que l’aide litigieuse satisfaisait aux conditions de fond du régime BPM, de sorte que la Commission aurait dû lui appliquer l’exception prévue par l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE.

86
La Commission réfute cet argument.

    Appréciation du Tribunal

87
Pour autant que la requérante adopte pour prémisse que l’aide en cause était couverte par la décision de prorogation, la première branche du quatrième moyen se confond avec le troisième moyen et elle doit dès lors être rejetée pour les mêmes motifs que ceux qui ont conduit au rejet de ce moyen.

88
Dans sa réplique, la requérante elle-même admet d’ailleurs que le régime BPM n’était valable que jusqu’à la fin de l’année 1994. Elle insiste toutefois à nouveau sur le fait qu’elle n’en a été informée qu’au cours de la procédure, les autorités néerlandaises ayant toujours laissé entendre, selon elle, qu’il suffisait d’introduire une demande d’aide avant le 1er janvier 1995 pour que la mesure d’octroi de l’aide relève du régime BPM autorisé.

89
À cet égard, il suffit à nouveau de renvoyer au point 143 ci-après, dès lors que cet argument n’est pas différent, en substance, de celui déjà exposé au point 65 ci‑dessus et rejeté au point 81 ci-dessus.

90
Pour le surplus, il convient de rappeler, d’une part, que la Commission jouit, pour l’application de l’article 87, paragraphe 3, CE, d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice implique des évaluations d’ordre économique et social qui doivent être effectuées dans un contexte communautaire (voir, notamment, arrêts de la Cour du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, C‑156/98, Rec. p. I‑6857, point 67, et du 7 mars 2002, Italie/Commission, C‑310/99, Rec. p. I‑2289, point 45), et, d’autre part, que le juge communautaire, en contrôlant la légalité de l’exercice d’un tel pouvoir, ne saurait substituer son appréciation en la matière à celle de l’autorité compétente, mais doit se limiter à examiner si cette dernière appréciation est entachée d’erreur manifeste ou de détournement de pouvoir (voir arrêts de la Cour du 7 mars 2002, Italie/Commission, précité, point 46, et du 12 décembre 2002, France/Commission, C‑456/00, Rec. p. I‑11949, point 41; arrêt du Tribunal du 13 juin 2000, EPAC/Commission, T‑204/97 et T‑270/97, Rec. p. II‑2267, point 97).

91
En l’espèce, hormis la prétendue conformité de l’aide litigieuse aux conditions de fond du régime BPM, élément d’appréciation dénué de pertinence dès lors que, ainsi qu’il a été constaté ci-dessus, cette aide ne relevait pas du champ d’application de la décision de prorogation, la requérante n’a invoqué, dans le cadre de la première branche du quatrième moyen, aucun élément permettant de conclure que la Commission aurait dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation, en considérant que cette aide ne répondait pas aux conditions permettant de bénéficier de l’une des dérogations prévues à l’article 87, paragraphe 3, CE.

92
La première branche du quatrième moyen doit dès lors être rejetée.

Sur la deuxième branche, portant sur l’erreur manifeste d’appréciation de la compatibilité de l’aide litigieuse avec l’encadrement des aides aux PME

    Décision attaquée

93
Aux considérants 34 et 35 de la décision attaquée, consacrés à l’examen de la compatibilité des aides en cause avec l’encadrement des aides aux PME, la Commission expose:

«(34)
L’intensité d’aide n’était inférieure au maximum fixé par l’encadrement des aides aux PME que dans le cas de Fleuren Compost BV. Les autorités néerlandaises n’ont cependant pas démontré que cette entreprise remplissait les critères prévus au point 3.2 de l’encadrement, en dépit des doutes concernant la taille des entreprises concernées émis par la Commission dans la demande de renseignements qui accompagnait sa décision d’engager la procédure.

(35)
Les autorités néerlandaises n’ont donc pas fourni la preuve que ces six entreprises remplissaient les critères de définition des petites et moyennes entreprises prévus par l’encadrement des aides aux PME. Elles n’ont du reste pas invoqué ledit encadrement pour justifier les aides. En outre, elles n’ont pas prouvé que les principes [...] énoncés au point 4.1 de l’encadrement des aides aux PME ont été respectés. La Commission estime par conséquent que l’encadrement des aides aux PME n’est pas applicable.»

    Arguments des parties

94
Dans sa requête, la requérante se déclare disposée à démontrer au Tribunal qu’elle répond bien aux critères posés au point 3.2 de l’encadrement des aides aux PME, contrairement à ce qui est exposé dans la décision attaquée. Elle fait valoir, dès lors, que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en constatant que l’aide en cause est incompatible avec le marché commun. La Commission ayant relevé, dans son mémoire en défense, que la requérante n’avait présenté aucune preuve en ce sens au cours de la procédure administrative, et qu’elle continuait à s’en abstenir dans le cadre de la présente procédure, la requérante a déclaré, dans sa réplique, qu’elle ne le ferait qu’à «titre subsidiaire». À l’audience, la requérante a maintenu qu’elle était une petite entreprise familiale, sans toutefois produire d’éléments de preuve additionnels à l’appui de cette affirmation.

95
La Commission se réfère, en substance, aux considérants 34 et 35 de la décision attaquée et souligne que la requérante ne produit toujours aucune preuve à l’appui de ses dires.

    Appréciation du Tribunal

96
Il convient de rappeler que la légalité d’une décision en matière d’aides doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir la jurisprudence citée au point 51 ci‑dessus et arrêt du Tribunal du 15 septembre 1998, BFM et EFIM/Commission, T‑126/96 et T‑127/96, Rec. p. II‑3437, point 88).

97
En l’espèce, il importe donc de déterminer quels sont les éléments d’information dont la Commission a pu disposer au cours de la procédure administrative.

98
La Commission a produit, à l’appui de son mémoire en défense, les lettres des 12 et 19 octobre 1999, par lesquelles les autorités néerlandaises ont donné suite à son injonction de fournir toutes les informations nécessaires. Il ne ressort pas de ces lettres que lesdites autorités aient invoqué l’encadrement des aides aux PME pour justifier l’aide litigieuse, alors même que celle-ci était décrite comme visant une «installation de traitement à grande échelle du lisier».

99
Au point 3.3.2 de la décision d’ouverture de la procédure, la Commission s’est néanmoins livrée à une appréciation préliminaire de la compatibilité des six aides en cause avec l’encadrement des aides aux PME. Elle a notamment indiqué, après avoir rappelé les dispositions pertinentes de l’encadrement des aides aux PME:

«L’intensité d’aide n’est inférieure au maximum fixé par l’encadrement des aides aux PME que dans le cas de Fleuren Compost BV.

Vu que les autorités néerlandaises n’ont pas fourni la preuve que ces six entreprises satisfont aux critères de l’encadrement des aides aux PME, et qu’elles n’ont du reste pas invoqué ledit encadrement pour justifier les aides, la Commission doit considérer qu’il n’est pas satisfait aux exigences de l’encadrement des aides aux PME.»

100
Ainsi qu’il a été exposé au point 22 ci-dessus, la Commission n’a reçu aucune information des autorités néerlandaises ni de la requérante à la suite de la publication de l’invitation à présenter des observations.

101
Se trouvant dès lors, en dépit du fait qu’elle avait prononcé une injonction au titre de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 659/1999 et qu’elle avait formulé une invitation à présenter des observations au titre de l’article 88, paragraphe 2, CE, dans l’impossibilité d’apprécier si l’aide litigieuse satisfaisait aux critères de l’encadrement des aides aux PME, la Commission a pu valablement estimer, compte tenu des éléments d’information dont elle disposait, que cet encadrement n’était pas applicable à l’aide en question.

102
En tout état de cause, même en admettant que la requérante satisfaisait bien aux critères posés au point 3.2 de l’encadrement des aides aux PME, ainsi qu’elle le prétend sans toutefois en rapporter la preuve formelle, il lui resterait encore, pour que son moyen prospère, à établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant, au considérant 35 de la décision attaquée, qu’il n’était pas prouvé que les principes énoncés au point 4.1 de cet encadrement avaient été respectés. Or, la requérante n’a pas avancé le moindre élément en ce sens, ni même allégué que la défenderesse avait commis une telle erreur, de sorte que son argumentation doit être considérée comme inopérante.

103
Dans ces conditions, la deuxième branche du quatrième moyen ne peut qu’être rejetée.

Sur la troisième branche, portant sur l’erreur manifeste d’appréciation de la compatibilité de l’aide en cause avec l’encadrement des aides à l’environnement

    Décision attaquée

104
Aux considérants 39 et 40 de la décision attaquée, consacrés à l’examen de la compatibilité des aides en cause avec l’encadrement des aides à l’environnement, la Commission expose:

«(39)
Toutefois, même si l’encadrement des aides [à] l’environnement était applicable, il est prévu à son point 3.2.3 B – Aides destinées à inciter les entreprises à aller au-delà de ce que leur imposent les normes obligatoires – que seules peuvent être autorisées les aides aux investissements permettant d’atteindre des niveaux de protection de l’environnement très nettement supérieurs à ceux imposés par les normes obligatoires. Les autorités néerlandaises n’ont pas prouvé que tel était le cas des mesures en cause. La Commission doute que les installations de traitement du lisier puissent contribuer à aller au-delà des objectifs fixés par la directive 91/676/CEE [du Conseil, du 12 décembre 1991, concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles (JO L 375, p. 1)], étant donné qu’au moins quatre des usines pilotes qui ont bénéficié de subventions lorsque le régime [BPM] était encore en vigueur ont dû fermer par la suite. Selon la Commission, il est donc exclu que l’on puisse encore invoquer, pour justifier les aides qui ont été accordées après l’arrivée à expiration du régime [BPM], les considérations qui ont conduit, à titre exceptionnel, à la prorogation dudit régime.

(40)
La Commission a également examiné les mesures au regard des dispositions concernant les aides destinées à aider les entreprises à s’adapter aux nouvelles normes obligatoires. Sur la base des informations dont elle dispose, la Commission estime que les critères prévus au point 3.2.3 A de l’encadrement des aides [à] l’environnement ne sont pas remplis. Selon ces dispositions, des aides peuvent être autorisées à concurrence d’un niveau maximal de 15 % brut des coûts éligibles, et cela uniquement pour une durée limitée et pour des installations fonctionnant depuis deux ans au moins au moment de l’entrée en vigueur des normes ou des obligations nouvelles. Les aides n’ont pas été accordées conformément à ces conditions puisqu’elles l’ont été à de nouvelles usines et que leur intensité a atteint 35 %.»

    Arguments des parties

105
La requérante soutient que l’aide litigieuse répond bien aux critères de l’encadrement des aides à l’environnement, contrairement à ce qui est exposé dans la décision attaquée.

106
En premier lieu, il ressortirait de l’étude d’évaluation de l’impact sur l’environnement du 25 août 1994, jointe à la demande de subsides de la requérante, ainsi que de l’avis positif rendu sur cette demande, le 22 mai 1995, par la commission consultative sur le traitement du lisier, que les investissements en cause visaient réellement un niveau de protection de l’environnement considérablement supérieur à celui imposé par les normes obligatoires, notamment en ce qu’ils devaient permettre de réduire à zéro les émissions d’ammoniaque et les nuisances olfactives. La requérante part du principe que la Commission a eu connaissance de ces éléments d’information. Elle ajoute que, si tel n’était pas le cas, la Commission aurait dû les demander aux Pays‑Bas.

107
En deuxième lieu, la Commission elle-même aurait reconnu, au considérant 11 de la décision attaquée, que l’intensité de l’aide litigieuse s’élevait seulement à 4,5 % pour ce qui concerne la requérante. Celle-ci soutient, dès lors, que la Commission ne pouvait pas raisonnablement conclure, au considérant 40 de cette même décision, que l’intensité de l’aide en cause avait atteint 35 % et qu’elle excluait donc l’application à son endroit de l’encadrement des aides à l’environnement. La requérante indique toutefois, dans sa réplique, qu’elle n’a jamais affirmé que l’aide en cause fût destinée à adapter les installations existantes à de nouvelles normes.

108
La Commission réfute l’ensemble de ces arguments et renvoie, en substance, aux considérants 39 et 40 de la décision attaquée ainsi qu’au point 3.3.2 de la décision d’ouverture de la procédure.

    Appréciation du Tribunal

109
S’agissant, en premier lieu, de l’applicabilité à l’aide litigieuse du point 3.2.3 A de l’encadrement des aides à l’environnement, il suffit de relever que cette disposition ne vise que les aides accordées «pour des installations fonctionnant depuis deux ans au moins au moment de l’entrée en vigueur des normes ou des obligations nouvelles».

110
Or, il est constant que l’aide litigieuse a été accordée en vue de la construction d’une nouvelle installation de traitement du lisier.

111
Dès lors que cette condition d’application du point 3.2.3 A de l’encadrement des aides à l’environnement n’était pas remplie, il est sans pertinence que l’intensité de l’aide litigieuse ait ou non excédé le niveau maximal de 15 % brut des coûts éligibles que cette disposition fixe par ailleurs.

112
S’agissant, en second lieu, de l’applicabilité à l’aide litigieuse du point 3.2.3 B de l’encadrement des aides à l’environnement, il convient de rappeler que cette disposition ne prévoit la possibilité d’octroyer des aides que pour favoriser des actions «permettant d’atteindre des niveaux de protection de l’environnement très nettement supérieurs à ceux imposés par les normes obligatoires».

113
Or, malgré les doutes exprimés par la Commission au point 3.3.2 de la décision d’ouverture de la procédure, ni la requérante ni les autorités néerlandaises n’ont fourni aucun élément de nature à établir que l’aide litigieuse satisfaisait à cette condition.

114
De même, aucun des documents invoqués par la requérante dans le cadre du présent recours, à supposer même qu’ils puissent être pris en considération par le Tribunal malgré la jurisprudence rappelée aux points 50 et 51 ci-dessus, ne prouve que l’aide en cause devait permettre d’atteindre un niveau de protection très nettement supérieur à celui imposé par les normes obligatoires. Ainsi que le relève la Commission, l’étude d’évaluation de l’impact sur l’environnement du 25 août 1994, réalisée par la requérante et jointe à sa demande de subsides, se borne à indiquer, en bas de la page 23, que «[l]es émissions ont été confrontées aux normes et il apparaît qu’elles satisfont largement aux conditions requises». De même, l’avis rendu le 22 mai 1995 par la commission consultative sur le traitement du lisier indique simplement que, «dans une installation d’épuration de l’air, l’élimination de l’ammoniaque et des odeurs respecte les normes des directives provisoires». En outre, la requérante elle-même souligne, dans sa requête, que c’est «sur l’ordre des autorités néerlandaises [qu’elle] produit ses engrais dans des installations couvertes afin d’éviter les nuisances provoquées par l’odeur» et que, par conséquent, ses «coûts de production élevés découl[e]nt des prescriptions légales».

115
La requérante n’ayant ainsi pas été en mesure d’établir que l’encadrement des aides à l’environnement était applicable à l’aide en cause, la troisième branche de son quatrième moyen ne peut qu’être rejetée comme non fondée.

116
Il y a donc lieu de rejeter le quatrième moyen dans son ensemble.

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

Arguments des parties

117
La requérante fait grief à la Commission de ne pas avoir suffisamment motivé ses conclusions selon lesquelles l’aide litigieuse ne tombe pas dans les champs d’application respectifs du régime BPM, de l’encadrement des aides aux PME et de l’encadrement des aides à l’environnement. La Commission n’aurait pas davantage motivé à suffisance de droit sa conclusion selon laquelle l’aide litigieuse pourrait affecter les échanges entre les États membres ou fausser la concurrence dans le marché commun.

118
La Commission estime que la décision attaquée est suffisamment motivée.

Appréciation du Tribunal

119
Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir, notamment, arrêts de la Cour du 13 mars 1985, Pays-Bas et Leeuwarder Papierwarenfabriek/Commission, 296/82 et 318/82, Rec. p. 809, point 19, et Commission/Sytraval et Brink’s France, cité au point 43 ci-dessus, point 63).

120
Appliqué à la qualification d’une mesure d’aide, ce principe exige que soient indiquées les raisons pour lesquelles la Commission considère que la mesure en cause entre dans le champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE. À cet égard, même dans les cas où il ressort des circonstances dans lesquelles l’aide a été accordée qu’elle est de nature à affecter les échanges entre États membres et à fausser ou à menacer de fausser la concurrence, il incombe tout au moins à la Commission d’évoquer ces circonstances dans les motifs de sa décision (arrêts de la Cour du 7 juin 1988, Grèce/Commission, 57/86, Rec. p. 2855, point 15, et du 24 octobre 1996, Allemagne e.a./Commission, C‑329/93, C‑62/95 et C‑63/95, Rec. p. I‑5151, point 52).

121
Enfin, il y a lieu de rappeler que, s’il est constant que la Commission est tenue d’évoquer, dans les motifs de sa décision, à tout le moins les circonstances dans lesquelles une aide a été accordée, lorsqu’elles permettent de démontrer que l’aide est de nature à affecter les échanges entre États membres (arrêts de la Cour du 14 octobre 1987, Allemagne/Commission, 248/84, Rec. p. 4013, point 18, et du 19 septembre 2002, Espagne/Commission, cité au point 48 ci-dessus, point 54), elle n’est pas tenue de faire la démonstration de l’effet réel d’aides déjà accordées. Si tel était le cas, en effet, cette exigence aboutirait à favoriser les États membres qui versent des aides en violation du devoir de notification prévu à l’article 88, paragraphe 3, CE au détriment de ceux qui notifient les aides à l’état de projet (arrêts de la Cour du 14 février 1990, France/Commission, dit «Boussac», C‑301/87, Rec. p. I‑307, points 32 et 33, et du 19 septembre 2002, Espagne/Commission, cité au point 48 ci-dessus, point 54).

122
Au regard de cette jurisprudence, il n’apparaît pas que la Commission ait manqué, en l’occurrence, à l’obligation de motiver de manière suffisante la décision attaquée.

123
En effet, la Commission y a exposé clairement et de façon non équivoque, aux considérants 21 à 24, les raisons pour lesquelles elle considérait que la mesure en cause constituait une aide d’État et était de nature à affecter les échanges entre les États membres et à fausser ou à menacer de fausser la concurrence, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

124
Aux considérants 13 et 14, 17 à 20 et 25 de la décision attaquée, la Commission a également exposé de façon adéquate les raisons pour lesquelles elle considérait que, contrairement à la thèse soutenue par les Pays-Bas, cette mesure ne tombait pas dans le champ d’application du régime BPM et devait dès lors être considérée comme une aide nouvelle, illégalement mise en œuvre, en violation de l’article 88, paragraphe 3, CE.

125
De même, la Commission a exposé à suffisance de droit les raisons pour lesquelles elle considérait que la mesure en cause ne tombait pas dans les champs d’application respectifs de l’encadrement des aides aux PME (considérants 32 à 35 de la décision attaquée) et de l’encadrement des aides à l’environnement (considérants 36 à 44 de la décision attaquée).

126
Par ailleurs, conformément à la jurisprudence citée au point 121 ci‑dessus, il n’était pas nécessaire que la motivation de la décision attaquée contînt une appréciation actualisée des effets de l’aide litigieuse.

127
Il convient d’ajouter que cette motivation a manifestement permis à la requérante de connaître les justifications de la mesure prise et au Tribunal d’exercer son contrôle.

128
Il s’ensuit que le cinquième moyen doit être rejeté.

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime

Arguments des parties

129
La requérante soutient, en substance, que, eu égard à sa qualité de petite entreprise familiale, à son ignorance de la réglementation applicable ainsi qu’aux circonstances dans lesquelles l’aide en cause lui a été octroyée, elle a pu légitimement avoir confiance dans la régularité de cette mesure. Elle souligne, notamment, qu’elle avait reçu, avant la fin de l’année 1994, confirmation qu’elle pouvait bénéficier de cette aide, et que la lettre du 21 décembre 1995, par laquelle les autorités néerlandaises lui ont notifié l’octroi définitif de l’aide (voir point 14 ci-dessus), ne mentionnait pas que cet octroi était subordonné à la condition suspensive de son approbation par la Commission. La requérante se fonde également sur les éléments déjà exposés aux points 64 à 66 ci‑dessus.

130
La requérante soutient, en outre, que la Commission a également violé le principe de protection de la confiance légitime en décidant d’engager la procédure au titre de l’article 88, paragraphe 2, CE le 23 septembre 2000, soit plus de trois ans après l’attribution de la subvention définitive à la requérante, plus de quatre ans après la lettre confirmant cette attribution et près de six ans après l’introduction de la demande de subvention et l’accusé de réception de cette demande par les autorités néerlandaises.

131
La requérante ajoute que, selon ses propres dires, c’est en décembre 1997 que la Commission a reçu une plainte dénonçant l’octroi d’aides illégales dans le cadre du régime BPM. Elle fait valoir que, eu égard au moment où l’aide litigieuse a été promise et versée et compte tenu des précédents, à savoir l’autorisation du régime BPM, la Commission n’aurait pas dû attendre jusqu’au milieu de 1999 pour adresser aux Pays‑Bas une demande de renseignements au titre de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 659/1999.

132
Dans sa réplique, la requérante constate par ailleurs que, dès le 21 août 1995, la Commission avait envoyé aux Pays‑Bas une lettre dont il ressortirait qu’elle avait eu connaissance de cinq demandes de subsides alors en suspens, dont elle demandait la notification dans un délai d’un mois. Elle fait valoir que tout bénéficiaire d’une mesure d’aide est en droit de penser que le dispensateur de l’aide donnera suite à une telle demande expresse de la Commission.

133
La Commission réfute l’ensemble de ces arguments.

Appréciation du Tribunal

134
L’aide en cause ne relevant ni de la décision de prorogation, ni de l’encadrement des aides aux PME, ni de l’encadrement des aides à l’environnement, ainsi qu’il a déjà été jugé ci-dessus, c’est en violation des dispositions de l’article 88 CE qu’elle n’a pas été notifiée à la Commission.

135
Or, il est de jurisprudence constante que, compte tenu du caractère impératif du contrôle des aides étatiques opéré par la Commission au titre de l’article 88 CE, les entreprises ne sauraient, en principe, avoir une confiance légitime dans la régularité de l’aide dont elles ont bénéficié que si celle‑ci a été accordée dans le respect de la procédure prévue par ledit article. En effet, un opérateur économique diligent doit normalement être en mesure de s’assurer que cette procédure a été respectée, même si l’État concerné était à ce point responsable de l’illégalité de la décision d’octroi de l’aide que son retrait apparaît comme étant contraire à la bonne foi (arrêts de la Cour du 20 septembre 1990, Commission/Allemagne, C‑5/89, Rec. p. I‑3437, point 14, et du 20 mars 1997, Alcan Deutschland, C‑24/95, Rec. p. I-1591, point 25).

136
Certes, la jurisprudence n’exclut pas la possibilité, pour les bénéficiaires d’une aide illégale, d’invoquer, dans le cadre de la procédure de récupération, des circonstances exceptionnelles qui ont pu légitimement fonder leur confiance légitime dans le caractère régulier de cette aide, pour s’opposer à son remboursement (arrêts de la Cour du 20 septembre 1990, Commission/Allemagne, cité au point 135 ci-dessus, point 16, et du 10 juin 1993, Commission/Grèce, C‑183/91, Rec. p. I‑3131, point 18; arrêt BFM et EFIM/Commission, cité au point 96 ci-dessus, point 69).

137
Il ressort toutefois implicitement de la jurisprudence de la Cour (arrêt de la Cour du 20 septembre 1990, Commission/Allemagne, cité au point 135 ci-dessus, points 13 à 16, et arrêt Alcan Deutschland, cité au point 135 ci-dessus, points 24 et 25), et il a été explicitement jugé à deux reprises par le Tribunal (arrêts du Tribunal du 8 juin 1995, Siemens/Commission, T‑459/93, Rec. p. II‑1675, points 104 et 105, et du 27 janvier 1998, Ladbroke Racing/Commission, T‑67/94, Rec. p. II‑1, point 83), que ces bénéficiaires ne peuvent invoquer de telles circonstances exceptionnelles, sur la base des dispositions pertinentes du droit national, que dans le cadre de la procédure de récupération devant les juridictions nationales, auxquelles seules il appartient d’apprécier, le cas échéant après avoir posé à la Cour des questions préjudicielles en interprétation, les circonstances de la cause.

138
En tout état de cause, aucune des circonstances avancées en l’espèce par la requérante ne saurait être retenue comme susceptible de justifier l’annulation de la décision attaquée.

139
Tout d’abord, il convient de relever que le régime BPM indique, en son article 16, que le droit à l’aide ne prend naissance que sous réserve de l’accord de la Commission.

140
S’agissant de la prétendue ignorance, par la requérante, de la réglementation applicable, il suffit de rappeler que les bénéficiaires d’une aide ne sauraient, sur la base de considérations liées à leur taille, être dispensés de se tenir informés des règles de droit communautaire, sous peine de porter atteinte à l’effet utile de ce droit (arrêts du Tribunal du 15 juin 2000, Alzetta e.a./Commission, T‑298/97, T‑312/97, T‑313/97, T‑315/97, T‑600/97 à 607/97, T‑1/98, T‑3/98 à T‑6/98 et T‑23/98, Rec. p. II‑2319, point 172, et du 29 septembre 2000, CETM/Commission, T‑55/99, Rec. p. II‑3207, point 127).

141
Le fait que la requérante n’ait pas été informée par les autorités néerlandaises du déroulement de la procédure administrative, même à le supposer fondé, ne saurait, lui non plus, être considéré comme une circonstance exceptionnelle ayant pu fonder sa confiance légitime quant à la régularité de l’aide litigieuse (arrêt CETM/Commission, cité au point 140 ci-dessus, point 127).

142
La requérante ne soutient pas non plus que la Commission lui a fourni des assurances précises de nature à lui donner des espérances fondées quant à la régularité de l’aide concernée (arrêts du Tribunal du 31 mars 1998, Preussag Stahl/Commission, T‑129/96, Rec. p. II‑609, point 78, et du 5 juin 2001, ESF Elbe-Stahlwerke Feralpi/Commission, T‑6/99, Rec. p. II‑1523, point 185). Au contraire, il ressort de la décision C 17/90 (ex N 88/90), du 14 décembre 1990, que la Commission avait entendu limiter à la période 1990‑1994 son approbation du régime BPM, étant précisé qu’elle avait l’intention d’adopter une attitude a priori défavorable à l’égard de tout nouveau projet d’aide envisagé par les Pays‑Bas. En outre, par lettre du 21 août 1995, la Commission avait invité les Pays-Bas à lui notifier individuellement toutes les aides octroyées au titre du régime BPM après le 31 décembre 1994.

143
Quant à l’argument tiré de ce que les autorités néerlandaises auraient clairement indiqué, dans un document intitulé «Exposé des motifs pour le Journal officiel relatif à la modification du 13 octobre 1994», que les demandes d’octroi d’une aide introduites avant le 1er janvier 1995 seraient traitées dans le cadre du régime BPM et qu’elles seraient couvertes par l’approbation de la Commission, il convient d’ajouter que d’éventuelles espérances suscitées à tort par les autorités néerlandaises, sans même que la Commission en ait été informée, ne sauraient en aucun cas affecter la légalité de la décision attaquée. Admettre une telle possibilité reviendrait à priver les dispositions des articles 87 CE et 88 CE de tout effet utile dans la mesure où les autorités nationales pourraient ainsi se fonder sur leur propre comportement illégal ou leur négligence pour mettre en échec l’efficacité des décisions prises par la Commission en vertu des dispositions du traité (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 20 septembre 1990, Commission/Allemagne, cité au point 135 ci-dessus, point 17, et du 14 janvier 1997, Espagne/Commission, C‑169/95, Rec. p. I‑135, point 48; conclusions de l’avocat général Sir Gordon Slynn sous l’arrêt de la Cour du 24 novembre 1987, RSV/Commission, 223/85, Rec. p. 4617, 4639 et 4652).

144
Pour regrettables qu’elles soient, les indications erronées fournies par les autorités néerlandaises dans leur communication du 13 octobre 1994 ne sont donc pas de nature à avoir créé une confiance légitime, à l’égard de la Commission, dans le chef de la requérante.

145
Quant à la durée de la procédure administrative, il convient de rappeler que l’exigence fondamentale de la sécurité juridique s’oppose à ce que la Commission puisse retarder indéfiniment l’exercice de ses pouvoirs (arrêts de la Cour du 14 juillet 1972, Geigy/Commission, 52/69, Rec. p. 787, point 21, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, cité au point 41 ci-dessus, point 140). Dans l’arrêt du 24 novembre 1987, RSV/Commission (223/85, Rec. p. 4617), la Cour a jugé que, lorsque la Commission, s’agissant d’une aide étatique destinée à couvrir les coûts supplémentaires d’une opération ayant fait l’objet d’une aide autorisée, dont l’examen ne nécessitait pas une recherche approfondie, n’a pris une décision constatant l’incompatibilité de ladite aide avec le marché commun et ordonnant sa suppression que 26 mois après sa notification, l’on se trouvait en présence d’un retard qui pouvait fonder chez le bénéficiaire de l’aide une confiance légitime de nature à empêcher la Commission d’enjoindre aux autorités nationales d’ordonner la restitution de l’aide.

146
Il y a donc lieu de vérifier si, en l’espèce, la Commission n’a pas agi de manière excessivement tardive.

147
L’examen du dossier conduit à rejeter le grief tiré d’une action excessivement tardive de la Commission. En effet, plusieurs plaintes ayant attiré l’attention de la Commission sur des aides accordées par les Pays-Bas après la période couverte par la décision de prorogation, elle a aussitôt pris contact avec les autorités néerlandaises à ce sujet. Dès le 21 août 1995, la Commission a commencé à interroger ces autorités à propos de cinq aides semblables dont il lui avait été indiqué qu’elles étaient encore en cours d’examen. À cette occasion, elle a invité les autorités néerlandaises à lui notifier tout cas d’application du régime BPM après le 31 décembre 1994. L’aide en cause a fait l’objet d’une décision d’octroi notifiée à la requérante le 21 décembre 1995 et elle lui a été versée par tranches successives entre le 23 avril 1996 et le 3 octobre 1997, sans que la Commission en soit avisée. La Commission ayant été saisie d’une nouvelle plainte concernant une aide semblable octroyée à une autre entreprise en décembre 1997, elle a, par lettre du 22 janvier 1998, suivie de deux rappels des 15 avril et 29 juillet 1998, demandé des informations complémentaires aux autorités néerlandaises. La Commission n’a officiellement appris l’existence de l’aide en cause qu’à la suite de la lettre des autorités néerlandaises du 6 août 1998, qui lui communiquait une liste de projets subventionnés à des dates lui paraissant méconnaître la décision de prorogation. Après instruction de l’ensemble du dossier, la Commission a adressé aux autorités néerlandaises, le 15 juillet 1999, une injonction au titre de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 659/1999, et à la suite d’informations partielles obtenues de ces autorités les 12 et 19 octobre 1999 elle a engagé, par lettre du 17 mai 2000, la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE à l’égard de six aides accordées après l’arrivée à expiration du régime BPM. Enfin, la Commission a adopté la décision attaquée le 13 décembre 2000.

148
Il résulte de l’ensemble de ces circonstances que la requérante ne peut prétendre que la Commission aurait agi de façon excessivement tardive.

149
Le sixième moyen doit, dès lors, être rejeté.

Sur le septième moyen, tiré d’une violation du droit d’être entendu

Arguments des parties

150
La requérante fait valoir que, après avoir constaté que les autorités néerlandaises lui avaient fourni des informations insuffisantes, la Commission aurait pu et dû demander aux entreprises concernées de rapporter la preuve que les conditions d’application de l’encadrement des aides aux PME ou de l’encadrement des aides à l’environnement étaient remplies.

151
Dans sa réplique, la requérante ne nie pas que les intéressés ont été informés par la publication de la communication au Journal officiel, dont elle déclare toutefois ne pas avoir eu connaissance. La requérante estime qu’il est impossible et même absurde de contrôler le Journal officiel quotidiennement. Elle ajoute que les Pays‑Bas auraient dû l’informer des intentions de la Commission.

152
La Commission réfute ces arguments.

Appréciation du Tribunal

153
Ce moyen soulevant, en substance, les mêmes questions que celles déjà évoquées au point 38 ci-dessus, il convient de le rejeter pour les motifs exposés aux points 40 à 48 ci-dessus.


Sur les dépens

154
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la défenderesse.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)

déclare et arrête:

1)
Le recours est rejeté.

2)
La requérante est condamnée aux dépens.

Forwood

Pirrung

Mengozzi

Meij

Vilaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 janvier 2004.

Le greffier

Le président de la sixième chambre

H. Jung

N. J. Forwood


1
Langue de procédure: le néerlandais.