Language of document : ECLI:EU:T:2021:920

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

21 décembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Alpenrausch Dr. Spiller – Marque de l’Union européenne verbale antérieure RAUSCH – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑6/20,

Dr. Spiller GmbH, établie à Siegsdorf (Allemagne), représentée par Mes J. Stock et M. Geitz, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Eberl, Mmes J. Schäfer, A. Söder et D. Walicka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Rausch AG Kreuzlingen, établie à Kreuzlingen (Suisse), représentée par Mes F. Stangl et S. Pilgram, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 8 octobre 2019 (affaire R 2206/2015‑1), relative à une procédure d’opposition entre Rausch Kreuzlingen et Dr. Spiller,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović, présidente, P. Škvařilová-Pelzl (rapporteure) et M. I. Nõmm, juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 janvier 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 18 février 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 16 mars 2020,

à la suite de l’audience du 7 septembre 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 2 août 2012, Dr. Spiller BIOCOSMETIC GmbH, prédécesseur en droit de la requérante, Dr. Spiller GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Alpenrausch Dr. Spiller.

3        Les produits et les services visés par la demande d’enregistrement relèvent des classes 3, 35 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et comprennent, notamment, les produits et les services suivants :

–        classe 3 : « Cosmétiques ; lotions pour les cheveux ; produits de parfumerie ; huiles essentielles » ;

–        classe 35 : « [S]ervices de commerce de détail et de gros de produits de soins corporels et esthétiques, [de] savons, [de] lotions capillaires, [de] produits de parfumerie, [d’]huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical » ;

–        classe 44 : « Soins d’hygiène et de beauté pour des êtres humains ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2012/168, du 4 septembre 2012.

5        Le 28 novembre 2012, l’intervenante, Rausch AG Kreuzlingen, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée, pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur certains des produits relevant des classes 3, 5 et 21 qui étaient désignés par la marque de l’Union européenne verbale RAUSCH, déposée le 22 mai 2007 et enregistrée le 26 février 2008 sous le numéro 5922521, et qui correspondaient à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits cosmétiques, parfumerie, savons » ;

–        classe 5 : « Produits pharmaceutiques à base végétale ; produits pharmaceutiques pour l’apport de vitamines et/ou l’apport de minéraux et/ou l’apport d’oligoéléments » ;

–        classe 21 : « Articles de toilette ».

7        Les motifs invoqués par l’intervenante étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenus article 8, paragraphe 1, sous b), et article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001].

8        Le 1er octobre 2015, la division d’opposition a partiellement accueilli l’opposition, au motif qu’il existait un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus à l’exception des « services de commerce de détail et de gros [de] savons, [d’]huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical ».

9        Le 5 novembre 2015, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, conformément à l’article 59 du règlement no 207/2009 (devenu article 67 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition, dans la mesure où celle-ci portait rejet de la demande d’enregistrement.

10      Après avoir été suspendue en raison de l’introduction, par la requérante, d’une demande en déchéance relative à la marque antérieure, la procédure de recours a été reprise, par suite de l’adoption, le 27 mai 2019, de la décision statuant sur cette demande.

11      Par décision du 8 octobre 2019 (ci-après la « décision originelle »), telle que rectifiée par une décision du 21 janvier 2020 supprimant le point 38 de la décision originelle (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO, tout en tenant compte du résultat de la procédure en déchéance mentionnée au point 10 ci-dessus, a confirmé la décision de la division d’opposition concernant l’existence d’un risque de confusion et, partant, a rejeté le recours et condamné la requérante aux dépens.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        confirmer la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur le droit applicable ratione temporis

15      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 2 août 2012, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

16      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 par la chambre de recours, dans la décision attaquée, comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, qui est d’une teneur identique.

17      Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le présent litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

 Sur l’habilitation des représentants de la requérante à exercer devant une juridiction d’un État membre ou d’un autre État partie à l’accord EEE

18      À titre liminaire, l’intervenante soutient dans son mémoire en réponse que les conditions prévues à l’article 51, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal ne sont pas remplies en l’espèce concernant les représentants de la requérante, car les documents produits en tant qu’annexes A.4 et A.5 de la requête ne démontreraient pas que, au jour de l’introduction de celle-ci, les avocats signataires étaient habilités à intervenir en cette qualité devant une juridiction d’un État membre.

19      En réponse à une question posée à cet égard par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a confirmé être représentée dans le cadre de la présente procédure par des avocats disposant d’une telle habilitation. Quant à l’EUIPO, celui-ci a indiqué n’avoir aucun doute concernant l’existence de ladite habilitation. Enfin, l’intervenante a soutenu que les conditions formelles de preuve de cette habilitation n’avaient pas été remplies en l’espèce, dans la mesure où les avocats de la requérante n’avaient pas produit leur carte d’identité professionnelle.

20      Selon l’article 19, troisième et quatrième alinéas, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53 du même statut, et conformément à l’article 51, paragraphe 1, du règlement de procédure, les parties autres que les États membres et les institutions de l’Union, l’Autorité de surveillance AELE et les États parties à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE), du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3), doivent être représentées devant les juridictions de l’Union par un avocat.

21      Il ressort clairement de l’article 19, quatrième alinéa, du même statut que deux conditions cumulatives doivent être remplies pour qu’une personne puisse valablement représenter des parties autres que les États membres et les institutions de l’Union devant les juridictions de celle-ci, à savoir, premièrement, avoir la qualité d’avocat et, deuxièmement, être habilitée à exercer devant une juridiction d’un État membre ou d’un autre État partie à l’accord EEE (voir, en ce sens, ordonnances du 17 juillet 2014, Brown Brothers Harriman/OHMI, C‑101/14 P, non publiée, EU:C:2014:2115, point 15, et du 4 décembre 2014, ADR Center/Commission, C‑259/14 P, non publiée, EU:C:2014:2417, point 34).

22      L’article 51, paragraphe 2, du règlement de procédure prévoit que l’avocat représentant ou assistant une partie devant le Tribunal est tenu de déposer au greffe de ce dernier un document de légitimation certifiant qu’il est habilité à exercer devant une juridiction d’un État membre ou d’un autre État partie à l’accord EEE. Il ne ressort pas de cette disposition que la carte d’identité professionnelle de l’avocat serait le seul document de légitimation recevable.

23      Comme cela ressort d’une lecture combinée du point 101 et de l’annexe 1, sous a), des dispositions pratiques d’exécution du règlement de procédure du Tribunal, le défaut de production d’un document de légitimation de l’avocat, prévue à l’article 51, paragraphe 2, dudit règlement, est une irrégularité procéduraleaffectant le recours dont il convient d’informer dûment le requérant et dont seule l’absence de régularisation est susceptible d’entraîner le rejet du recours pour cause d’irrecevabilité, conformément à l’article 78, paragraphe 6, et à l’article 177, paragraphe 6, dudit règlement.

24      L’examen du respect de la seconde condition imposée par l’article 19, quatrième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne consiste à vérifier si le représentant est membre d’un barreau national ou d’un autre organe professionnel et est habilité à exercer. Cette vérification tient compte des lois nationales applicables et consiste en une vérification, d’ordre formel, du certificat produit en application de l’article 51, paragraphe 2, du règlement de procédure (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Bobek dans les affaires jointes Uniwersytet Wrocławski et Pologne/REA, C‑515/17 P et C‑561/17 P, EU:C:2019:774, point 116).

25      Les avocats allemands représentant la requérante dans le cadre de la présente procédure ont déposé au greffe du Tribunal, à titre de documents de légitimation certifiant qu’ils étaient habilités à exercer en tant qu’avocats devant des juridictions allemandes, les certificats d’admission à la profession d’avocat (Rechtsanwalt) qui leur avaient été délivrés, respectivement, le 20 mars et le 2 octobre 2007 par le barreau des avocats près l’Oberlandesgericht München (tribunal régional supérieur de Munich, Allemagne).

26      Conformément aux articles 12 à 14 de la Bundesrechtsanwaltsordnung (BRAO) (règlement fédéral sur le statut des avocats) du 1er août 1959 (BGBl. 1959 I, p. 565), la personne titulaire du certificat d’admission à la profession d’avocat est admise à exercer en cette qualité devant des juridictions allemandes aussi longtemps que ledit certificat n’a pas été annulé, révoqué ou retiré. En conséquence, le dépôt d’un tel certificat au greffe du Tribunal ne donne pas lieu, de la part de ce dernier, à une demande de régularisation telle qu’évoquée au point 23 ci-dessus.

27      En outre, si l’intervenante prétend n’avoir aucune certitude, au vu des seuls certificats d’admission à la profession d’avocat délivrés en 2007, que les représentants de la requérante restaient habilités à exercer en qualité d’avocats devant des juridictions allemandes à la date d’introduction du présent recours, à savoir le 8 janvier 2020, celle-ci n’a fourni aucune information ou élément de preuve pouvant laisser penser que lesdits certificats auraient pu, entre-temps, être annulés, révoqués ou retirés.

28      Dans les circonstances de l’espèce, il y a donc lieu de constater que les certificats d’admission à la profession d’avocat produits en tant qu’annexes A.4 et A.5 de la requête satisfont aux conditions de l’article 51, paragraphe 2, du règlement de procédure.

29      Partant, il convient de rejeter la fin de non-recevoir soulevée à cet égard par l’intervenante et de procéder à l’examen au fond présent du recours.

 Sur le deuxième chef de conclusions de l’intervenante

30      Par son deuxième chef de conclusions, l’intervenante demande au Tribunal de confirmer la décision attaquée, tandis que, par son premier chef de conclusions, elle conclut au rejet du présent recours.

31      En réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience concernant l’interprétation du deuxième chef de conclusions de l’intervenante, cette dernière a soutenu que celui-ci devait être compris comme une demande de rejeter le recours. La requérante a exclu, en général, la possibilité d’interpréter un chef de conclusions. Quant à l’EUIPO, il a fait valoir que, dès lors qu’il avait été formulé de manière autonome par rapport au premier chef de conclusions de l’intervenante, son deuxième chef de conclusions devait être rejeté comme étant irrecevable.

32      Étant donné que « confirmer la décision attaquée » équivaut à rejeter le recours, il y a lieu de regarder des chefs de conclusions qui tendent au rejet du présent recours et à la confirmation de la décision dont l’annulation est poursuivie dans le cadre de celui-ci comme tendant uniquement au rejet du recours [voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2018, Star Television Productions/EUIPO – Marc Dorcel (STAR), T‑797/17, non publié, EU:T:2018:469, point 75 et jurisprudence citée].

33      En l’espèce, il y a donc lieu d’interpréter les deux premiers chefs de conclusions de l’intervenante comme tendant uniquement au rejet du présent recours.

 Sur l’objet du recours

34      Dans son mémoire en réponse, l’EUIPO relève en substance que, aux points 36 et 37 de la décision attaquée et au point 38 de la décision originelle, la chambre de recours a statué à tort sur les « savons », relevant de la classe 3, et sur les « services de commerce de détail et de gros de savons, d’huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical », relevant de la classe 35, alors que ces produits et ces services ne faisaient pas partie de l’objet du recours porté devant elle. Dans ce même mémoire, il rappelle que, par décision du 21 janvier 2020, la chambre de recours a rectifié la décision originelle en supprimant le point 38 de celle-ci.

35      En réponse à une question posée à cet égard par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a renvoyé à ses écritures devant le Tribunal. L’EUIPO n’a pas souhaité faire d’observations complémentaires. L’intervenante s’est ralliée à la position exposée par l’EUIPO dans son mémoire en réponse, telle que rappelée au point 34 ci-dessus.

36      À titre liminaire, il convient de rappeler que le recours introduit devant le Tribunal contre la décision d’une chambre de recours, statuant sur une opposition, ne peut avoir pour objet de contester les appréciations de la chambre de recours portant sur des produits ou des services pour lesquels la décision de la division d’opposition est devenue définitive [voir, en ce sens, ordonnance du 8 mars 2019, Herrero Torres/EUIPO – DZ Licores (CARAJILLO LICOR 43 CUARENTA Y TRES), T‑326/18, non publiée, EU:T:2019:149, point 28].

37      En l’espèce, le recours formé devant la chambre de recours par la requérante, demanderesse de l’enregistrement de la marque demandée, visait à l’annulation de la décision de la division d’opposition en ce qu’elle avait accueilli l’opposition et rejeté la demande d’enregistrement et l’intervenante, opposante à l’enregistrement de cette marque, n’a pas formé de recours incident.

38      Or, comme le reconnaît l’EUIPO, dans la décision attaquée, la chambre de recours a examiné l’opposition également s’agissant des produits et des services mentionnés au point 34 ci-dessus, qui ne faisaient pas l’objet du recours porté devant elle.

39      Cette erreur a partiellement été corrigée par la chambre de recours, qui, par décision du 21 janvier 2020, a rectifié la décision originelle afin d’en supprimer le point 38, spécifiquement consacré aux « services de commerce de détail et de gros d’huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical », relevant de la classe 35.

40      Par ailleurs, il ressort du dispositif de la décision attaquée, selon lequel le recours de la requérante a été rejeté, que la chambre de recours s’est limitée à confirmer intégralement la décision adoptée par la division d’opposition.

41      Il en résulte que le dispositif de la décision attaquée ne va pas au-delà de l’objet du recours porté devant la chambre de recours et que, dès lors, le fait que cette dernière ait statué, dans les motifs de la décision attaquée, sur des produits et des services qui ne faisaient pas l’objet du recours porté devant elle reste sans conséquence sur la légalité de ladite décision.

42      Ainsi, le présent recours a uniquement pour objet la demande d’enregistrement en cause en tant qu’elle porte sur les produits et les services pour lesquels la chambre de recours a rejeté le recours introduit devant elle et pour lesquels la décision de la division d’opposition, accueillant partiellement l’opposition à ladite demande d’enregistrement et rejetant en conséquence partiellement cette dernière, n’était pas devenue définitive, à savoir les produits et les services correspondant à la description suivante :

–        classe 3 : « Cosmétiques ; lotions pour les cheveux ; produits de parfumerie ; huiles essentielles » ;

–        classe 35 : « Services de commerce de détail et de gros de produits de soins corporels et esthétiques, [de] lotions capillaires [et de] produits de parfumerie » ;

–        classe 44 : « Soins d’hygiène et de beauté pour des êtres humains ».

 Sur le fond

43      La requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 42, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 [devenu article 47, paragraphe 1, du règlement 2017/1001], lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, qui est articulé en cinq branches. La première branche est fondée sur une erreur d’appréciation des éléments les plus distinctifs et dominants des signes en conflit. La deuxième branche est prise d’une erreur d’appréciation dans la comparaison des signes en conflit, qui auraient été considérés à tort comme étant similaires sur les plans visuel et phonétique. La troisième branche est prise d’une erreur d’appréciation dans la comparaison des produits et des services en cause, résultant de ce que certains d’entre eux auraient été considérés à tort comme étant identiques ou similaires. La quatrième branche est tirée d’une erreur d’appréciation concernant le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure. La cinquième branche est fondée sur une erreur d’appréciation dans l’analyse du risque de confusion, résultant de la reconnaissance d’un tel risque.

44      L’EUIPO et l’intervenante concluent au rejet, comme étant non fondé, du moyen unique, pris en ses cinq branches, et, partant, du présent recours.

45      À titre liminaire, il importe de rappeler que, d’une part, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

46      D’autre part, l’absence de contestation, par les parties qui concluent à l’annulation de la décision d’une chambre de recours, des appréciations de cette dernière concernant certains facteurs essentiels à l’analyse du risque de confusion ne préjuge pas de ce que le Tribunal peut ou doit contrôler le bien-fondé desdites appréciations, dès lors que la détermination de ces facteurs constitue une étape essentielle du raisonnement que celui-ci est amené à effectuer pour exercer le contrôle de l’appréciation de la chambre de recours relative à l’existence d’un tel risque. Dès lors que l’une des parties concluant à l’annulation de la décision de la chambre de recours a mis en cause l’appréciation de cette dernière relative au risque de confusion, en vertu du principe d’interdépendance entre les facteurs pris en compte, notamment la similitude des marques et celle des produits et des services couverts, le Tribunal est compétent pour examiner l’appréciation que ladite chambre a portée sur ces facteurs (voir, en ce sens, arrêt du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, EU:C:2008:739, point 47). En effet, lorsqu’il est appelé à apprécier la légalité d’une décision d’une chambre de recours de l’EUIPO, le Tribunal ne peut être lié par une appréciation erronée des faits par cette chambre, dans la mesure où ladite appréciation fait partie des conclusions dont la légalité est contestée devant lui (arrêt du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, EU:C:2008:739, point 48).

 Sur le territoire pertinent

47      Conformément à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, l’existence d’un risque de confusion doit être appréciée dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée.

48      Il ressort de la décision attaquée, notamment de son point 20, que la chambre de recours a considéré que le territoire pertinent aux fins de l’appréciation du risque de confusion était celui de l’Union.

49      Cette appréciation, qui n’est du reste pas contestée par les parties, doit être approuvée.

 Sur le public pertinent et son niveau d’attention

50      Lorsque les marques en conflit sont enregistrées ou demandées à l’enregistrement pour différents produits ou services, la chambre de recours est tenue d’identifier les consommateurs qui, sur le territoire pertinent, sont susceptibles d’utiliser chacun de ces produits ou de ces services [arrêt du 17 février 2017, Construlink/EUIPO – Wit-Software (GATEWIT), T‑351/14, non publié, EU:T:2017:101, point 44].

51      En outre, selon la jurisprudence, le public pertinent à prendre en compte pour apprécier l’existence d’un risque de confusion n’est composé que des consommateurs qui sont susceptibles d’utiliser tant les produits ou les services couverts par la marque antérieure que ceux désignés par la marque dont l’enregistrement est demandé [voir, en ce sens, arrêt du 30 septembre 2010, PVS/OHMI – MeDiTA Medizinische Kurierdienst (medidata), T‑270/09, non publié, EU:T:2010:419, point 28 et jurisprudence citée].

52      De plus, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen des produits ou des services en cause, lequel est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction des produits ou des services en cause [voir, en ce sens, arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

53      Le degré d’attention du public pertinent pour les produits du secteur de l’hygiène corporelle ne saurait être considéré comme élevé. En effet, ces produits, eu égard à leur nature et à leur prix faible, sont des produits de consommation courante, destinés au grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention moyen. Même si certains consommateurs de ces produits pourraient être plus attentifs au moment de leur achat, en raison de leurs problèmes de peau, il n’en demeure pas moins que ce ne sera pas le cas de tous les consommateurs et, en tout cas, d’une partie non négligeable de ceux-ci [arrêt du 23 octobre 2017, Tetra Pharm (1997)/EUIPO – Sebapharma (SeboCalm), T‑441/16, non publié, EU:T:2017:747, points 35 et 36].

54      Au point 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que les produits et les services désignés par les marques en conflit étaient destinés à la fois au grand public et à une clientèle professionnelle dotée de connaissances ou de compétences professionnelles particulières et que le niveau d’attention dont ferait preuve le public pertinent ainsi défini varierait de moyen à élevé, car certains des produits et des services en cause ne seraient pas utilisés au quotidien et seraient donc choisis avec soin. Cependant, au point 45 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, en substance, que, conformément à la jurisprudence selon laquelle, aux fins de l’appréciation du risque de confusion, il convenait de prendre en considération le public le moins attentif, le niveau d’attention du public pertinent à retenir était moyen.

55      La requérante conteste cette appréciation dans la mesure où, dans le cadre de la cinquième branche du moyen unique, elle se fonde sur la prémisse selon laquelle le niveau d’attention du public pertinent serait élevé.

56      En réponse, l’EUIPO et l’intervenante se rallient globalement aux appréciations de la chambre de recours concernant le public pertinent et son niveau d’attention. L’EUIPO observe que certains consommateurs sélectionnent plus attentivement ce type de produits et de services, par exemple en raison de problèmes de peau, mais ajoute que cela n’est pas le cas de la majorité d’entre eux et que, lesdits produits et services étant de consommation courante, ils ne sont pas achetés par des consommateurs dont le niveau d’attention serait élevé.

57      Il convient de constater que chacun des produits et des services en cause existe, sur le marché, sous différentes formes et qualités, certains de ces produits et services étant des produits standards, bon marché et de consommation courante, tandis que d’autres sont des produits et des services personnalisés ou adaptés aux consommateurs, plus chers et de consommation plus occasionnelle. Ainsi, même lorsqu’ils sont acquis par des consommateurs du grand public, et non par des professionnels, ces produits et ces services peuvent, selon leur niveau de gamme, être sélectionnés avec soin. Cela peut également être le cas du fait que les produits en cause ou les produits qui sont utilisés dans le cadre de la fourniture des services en cause sont apposés sur la peau et peuvent avoir un impact sur la santé des consommateurs, de sorte que ceux d’entre eux qui ont des problèmes de peau peuvent être amenés à les sélectionner avec une attention particulière.

58      Néanmoins, dès lors que, pour chaque type de produits ou de services en cause, il existera une partie non négligeable, et même substantielle, des consommateurs au sein du grand public qui ne fera preuve que d’un niveau d’attention moyen lors de leur achat, c’est à bon droit que la chambre de recours a tenu compte de la partie du grand public ayant un niveau d’attention moyen pour apprécier, en l’espèce, l’existence d’un risque de confusion. En effet, conformément à la jurisprudence selon laquelle, lorsque le public pertinent est composé de deux catégories de consommateurs ayant chacune un niveau d’attention différent, la partie du public ayant le niveau d’attention le moins élevé doit être prise en considération [voir arrêts du 20 mai 2014, Argo Group International Holdings/OHMI – Arisa Assurances (ARIS), T‑247/12, EU:T:2014:258, point 29 et jurisprudence citée, et du 10 mars 2016, credentis/OHMI – Aldi Karlslunde (Curodont), T‑53/15, non publié, EU:T:2016:136, point 22 et jurisprudence citée], la chambre de recours a tenu compte de la partie du grand public ayant un niveau d’attention moyen pour apprécier, en l’espèce, l’existence d’un risque de confusion.

59      Pour ces motifs, la chambre de recours n’a commis aucune erreur en décidant d’apprécier l’existence d’un risque de confusion par rapport à la partie du grand public dont le niveau d’attention sera moyen lors de l’achat des produits et des services en cause (ci-après le « grand public concerné »).

60      Le Tribunal estime toutefois qu’il convient de n’examiner le présent recours qu’à l’égard d’une partie du grand public concerné, à savoir la partie non germanophone dudit public. À cet égard, il convient, en effet, de rappeler que, si, lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques par le consommateur des produits ou des services en cause sur ce territoire, il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, qu’un motif relatif de refus, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, existe dans une partie de l’Union [voir arrêt du 8 novembre 2017, Pempe/EUIPO – Marshall Amplification (THOMAS MARSHALL GARMENTS OF LEGENDS), T‑271/16, non publié, EU:T:2017:787, point 28 et jurisprudence citée].

61      En outre, le Tribunal juge opportun de poursuivre par la comparaison des produits et des services en cause et, donc, de commencer par l’examen de la troisième branche du moyen unique avancé par la requérante.

 Sur la troisième branche, tirée d’une erreur d’appréciation dans la comparaison des produits et des services en cause

62      La requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir, aux points 37 à 39 de la décision attaquée, commis une erreur d’appréciation dans la mesure où elle a conclu que certains des produits et des services en cause étaient similaires. Tout d’abord, la chambre de recours se serait contredite en considérant, d’une part et à juste titre, que les « services de commerce de détail et de gros [d’]huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical », relevant de la classe 35, visés par la marque demandée et les produits relevant de la classe 3 désignés par la marque antérieure n’étaient pas similaires et, d’autre part et de manière erronée, que les « lotions pour les cheveux » et les « huiles essentielles », relevant de la classe 3, visées par la marque demandée et les « produits cosmétiques » et la « parfumerie », relevant de la même classe, désignés par la marque antérieure étaient similaires. En effet, les « huiles essentielles » et la « parfumerie » ne seraient pas des produits similaires, car elles seraient commercialisées par des canaux de distribution différents, répondraient à des intérêts différents des consommateurs et ne seraient pas utilisées en tant que substituts. Ensuite, il n’existerait pas de similitude entre les « produits cosmétiques », relevant de la classe 3, visés par la marque antérieure et les « services de commerce de détail et de gros de produits de soins corporels et esthétiques », relevant de la classe 35, désignés par la marque demandée. Enfin, les services de « soins d’hygiène et de beauté pour des êtres humains », relevant de la classe 44, visés par la marque demandée et les produits couverts par la marque antérieure ne seraient ni identiques ni similaires, dès lors que le public pertinent ne supposerait pas que ces services seraient fournis par les producteurs des produits d’hygiène et de beauté qui seraient utilisés pour lesdits soins.

63      L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante et concluent au rejet de la troisième branche comme étant non fondée.

64      Aux points 36 à 39 de la décision attaquée, la chambre de recours, nonobstant certaines modifications, a entériné, en substance, les appréciations de la division d’opposition concernant la comparaison des produits et des services en cause.

65      En premier lieu, s’agissant des produits de la classe 3 visés par la marque demandée, la chambre de recours a constaté, au point 36 de la décision attaquée, que les « cosmétiques », les « savons » et les « produits de parfumerie » désignés par la marque demandée étaient identiques aux « produits cosmétiques », à la « parfumerie » et aux « savons » visés par la marque antérieure. En outre, au point 37 de la décision attaquée, elle a considéré que les « lotions pour les cheveux » ainsi que les « huiles essentielles » désignées par la marque demandée et les « produits cosmétiques » et la « parfumerie » visés par la marque antérieure étaient similaires. À cet égard, il convient de souligner que, comme cela ressort du point 42 ci-dessus, le présent recours ne porte pas sur les « savons », relevant de la classe 3, visés par la marque demandée.

66      En deuxième lieu, s’agissant des services relevant de la classe 35 visés par la marque demandée, la chambre de recours a constaté, au point 37 de la décision attaquée, que les « services de commerce de détail et de gros de produits de soins corporels et esthétiques, [de] savons, [de] lotions capillaires [et de] produits de parfumerie » désignés par cette marque et les produits relevant de la classe 3 couverts par la marque antérieure étaient similaires à un faible degré, en raison du rapport de complémentarité existant entre eux. Toutefois, ainsi que cela ressort du point 42 ci-dessus, le présent recours ne porte pas sur les « services de commerce de détail et de gros de savons » relevant de la classe 35.

67      En troisième et dernier lieu, s’agissant des services relevant de la classe 44 visés par la marque demandée, à savoir les « soins d’hygiène et de beauté pour des êtres humains », la chambre de recours a considéré, au point 39 de la décision attaquée, qu’il existait un faible degré de similitude entre ceux-ci et les produits relevant de la classe 3 visés par la marque antérieure, dans la mesure où ces derniers produits relèvent des soins d’hygiène et de beauté et sont complémentaires auxdits services et où tous ces produits et services sont produits ou commercialisés dans les mêmes établissements et ciblent les mêmes consommateurs finaux.

68      Selon une jurisprudence constante, afin d’apprécier la similitude entre les produits ou les services couverts par les marques en conflit, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent les rapports existant entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits ou des services concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

69      Lorsque les produits ou les services visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits ou ces services sont considérés comme étant identiques [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée].

70      En l’espèce, premièrement, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant, au point 36 de la décision attaquée, que les « cosmétiques » et les « produits de parfumerie », relevant de la classe 3, visés par la marque demandée étaient identiques aux « produits cosmétiques » et à la « parfumerie », relevant de la même classe, visés par la marque antérieure. À cet égard, il convient de noter que, comme la chambre de recours l’a constaté à juste titre, les mots « cosmétiques » et « produits cosmétiques » sont des synonymes.

71      Deuxièmement, la requérante soutient à tort que les « lotions pour les cheveux » et les « huiles essentielles », comprises dans la classe 3, visées par la marque demandée, d’une part, et les « produits cosmétiques » et la « parfumerie », relevant de la même classe, visés par la marque antérieure, d’autre part, ne sont pas similaires.

72      S’agissant, premièrement, des « lotions pour les cheveux », comprises dans la classe 3, visées par la marque demandée, celles-ci doivent être considérées, conformément à la jurisprudence citée au point 69 ci-dessus, comme étant identiques aux « produits cosmétiques », relevant de la même classe, visés par la marque antérieure. En effet, les « produits cosmétiques » recouvrent une vaste catégorie de produits qui inclut les « lotions pour les cheveux ».

73      Ainsi, la chambre de recours a commis une erreur en ne constatant pas, au point 37 de la décision attaquée, l’existence d’une identité entre les produits susmentionnés, mais en retenant seulement l’existence d’une similitude entre ceux-ci.

74      S’agissant, deuxièmement, des « huiles essentielles », comprises dans la classe 3, visées par la marque demandée, c’est à bon droit que, au point 37 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que celles-ci et les « produits cosmétiques » et la « parfumerie », relevant de la même classe, visés par la marque antérieure étaient similaires, même si elle n’a pas précisé explicitement le degré de cette similitude.

75      En effet, l’argument de la requérante selon lequel les « huiles essentielles », comprises dans la classe 3, visées par la marque demandée seraient commercialisées par l’intermédiaire d’autres canaux de distribution que la « parfumerie » et les « savons », relevant de la même classe, visés par la marque antérieure n’est pas fondé. Il y a lieu d’observer d’emblée que ledit argument, en tant qu’il concerne les « savons », est fondé sur une lecture erronée de la décision attaquée, car, ainsi qu’il ressort du point 65 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas constaté, dans celle-ci, que les « huiles essentielles » et les « savons » étaient similaires. Par conséquent, ledit argument est sans pertinence à cet égard. S’agissant, par ailleurs, de la « parfumerie » et des « produits cosmétiques », visés par la chambre de recours au point 37 de la décision attaquée, ainsi que l’observe à bon droit l’EUIPO, il convient de souligner que ces produits et les « huiles essentielles » peuvent tous être distribués dans les mêmes magasins.

76      De plus, c’est à tort que la requérante allègue que les « huiles essentielles », comprises dans la classe 3, visées par la marque demandée répondent à des besoins différents des consommateurs et ne sont pas utilisées en tant que substituts des « produits de parfumerie » et des « savons », relevant de la même classe, visés par la marque antérieure. Tout d’abord, ainsi que cela a été relevé au point 75 ci-dessus, la chambre de recours, au point 37 de la décision attaquée, n’a pas constaté la similitude des « huiles essentielles » et des « savons », de sorte que le présent argument de la requérante est sans pertinence à cet égard. Ensuite, d’une part, la requérante ne fournit aucun élément précis à l’appui dudit argument, en tant qu’il porte sur les autres produits concernés. D’autre part, les « huiles essentielles » et les « produits de parfumerie » ainsi que les « produits cosmétiques », visés par la chambre de recours au point 37 de la décision attaquée, peuvent être utilisés et sont utilisés en tant que substituts. À titre d’exemple, certaines « huiles essentielles » ayant une odeur agréable peuvent être appliquées sur la peau notamment en considération de leur parfum, tandis que les « huiles essentielles » ayant des propriétés thérapeutiques peuvent être utilisées en tant que « produits cosmétiques », pour traiter des problèmes de peau. Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, les produits qui sont destinés aux soins quotidiens du corps ou qui partagent des propriétés hygiéniques et cosmétiques peuvent être considérés comme étant similaires [voir, en ce sens, arrêts du 27 septembre 2007, La Mer Technology/OHMI – Laboratoires Goëmar (LA MER), T‑418/03, non publié, EU:T:2007:299, point 111, et du 10 mars 2016, Curodont, T‑53/15, non publié, EU:T:2016:136, point 28]. Cela est le cas, en l’espèce, des « huiles essentielles », comprises dans la classe 3, visées par la marque demandée et de la « parfumerie » et des « produits cosmétiques », relevant de la même classe, couverts par la marque antérieure.

77      Par ailleurs, l’argument de la requérante tiré du caractère prétendument contradictoire de certaines constatations effectuées par la chambre de recours n’est pas fondé. Cet argument vise les constatations de cette dernière selon lesquelles, d’une part, les « lotions pour les cheveux » et les « huiles essentielles », relevant de la classe 3, visées par la marque demandée et les « produits cosmétiques » et la « parfumerie », relevant de la même classe, désignés par la marque antérieure étaient similaires et, d’autre part, les « services de commerce de détail et de gros [d’]huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical », relevant de la classe 35, visés par la marque demandée étaient différents des produits désignés par la marque antérieure, y compris ceux relevant de la classe 3.

78      En effet, il convient de constater d’emblée que la requérante fonde son argumentation sur des appréciations, concernant les « services de commerce de détail et de gros [d’]huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical », relevant de la classe 35, visés par la marque demandée, qui figuraient au point 38 de la décision originelle, lequel a été supprimé de celle-ci, par la décision rectificative de la chambre de recours du 21 janvier 2020, au motif que ces produits ne faisaient pas l’objet du litige introduit devant cette dernière.

79      Par ailleurs, comme l’a souligné à bon droit l’EUIPO, les produits et les services concernés ont une nature différente. Le fait que les « services de commerce de détail et de gros [d’]huiles essentielles, [de] compléments alimentaires minéraux, [de] produits hygiéniques [et de] substances diététiques à usage médical », relevant de la classe 35, couverts par la marque demandée et les produits relevant de la classe 3 désignés par la marque antérieure ne soient pas considérés comme étant similaires n’empêche donc pas de conclure à la similitude de ces derniers produits et des « lotions pour les cheveux » et des « huiles essentielles », relevant de la classe 3, visées par la marque demandée.

80      Troisièmement, concernant l’appréciation de la chambre de recours, figurant au point 37 de la décision attaquée, selon laquelle il existe une similitude de faible degré entre les « services de commerce de détail et de gros de produits de soins corporels et esthétiques, [de] lotions capillaires [et de] produits de parfumerie », compris dans la classe 35, désignés par la marque demandée et les produits relevant de la classe 3 couverts par la marque antérieure, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il existe une similitude entre des produits et les services de vente au détail qui portent sur ces produits, les produits et les services concernés étant complémentaires [voir arrêt du 7 octobre 2015, CBM/OHMI – Aeronautica Militare (TRECOLORE), T‑365/14, non publié, EU:T:2015:763, point 34 et jurisprudence citée]. Sauf motif particulier, une telle similitude doit, en principe, être considérée comme étant de degré moyen.

81      Or, ainsi qu’il ressort de leur libellé, les services ici en cause portent sur des produits qui sont soit inclus dans la vaste catégorie des « produits cosmétiques », relevant de la classe 3, couverts par la marque antérieure, soit identiques à la « parfumerie » ou aux « savons », relevant de la même classe, visés par cette même marque. Aussi, ces services doivent être considérés comme étant complémentaires et, partant, similaires aux produits relevant de la classe 3 couverts par la marque antérieure.

82      Par suite, les services ici en cause, compris dans la classe 35, visés par la marque demandée et les produits relevant de la classe 3 désignés par la marque antérieure sont similaires à un degré moyen. Ainsi, il y a lieu de constater que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que lesdits services et produits n’étaient similaires qu’à un faible degré.

83      Quatrièmement, concernant l’appréciation de la chambre de recours, figurant au point 39 de la décision attaquée, selon laquelle les « soins d’hygiène et de beauté pour des êtres humains », relevant de la classe 44, visés par la marque demandée et les produits relevant de la classe 3 désignés par la marque antérieure sont similaires à un faible degré, il importe de tenir compte du fait que la similitude desdits produits et services est principalement déterminée par leur rapport de complémentarité.

84      À cet égard, il convient de rappeler que des produits ou des services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Par définition, des produits ou des services adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire (voir arrêt du 10 mars 2016, Curodont, T‑53/15, non publié, EU:T:2016:136, point 29 et jurisprudence citée).

85      Or, comme l’a relevé à bon droit la chambre de recours, il existe un rapport de complémentarité entre les produits relevant de la classe 3 couverts par la marque antérieure et les services relevant de la classe 44 visés par la marque demandée. Ces produits et ces services partagent le même objet général, à savoir prodiguer des soins d’hygiène et de beauté. Les services de soins hygiéniques et de beauté pour êtres humains constituent une vaste catégorie ayant pour objet de laver, de purifier et d’embellir le corps humain. De même, les « produits cosmétiques », la « parfumerie » et les « savons » sont destinés à être mis en contact avec le corps humain en vue de le nettoyer, de le parfumer, de le protéger, de l’embellir ou de le maintenir en bon état. En outre, le libellé utilisé pour désigner les services de « soins d’hygiène et de beauté » est très large et comprend, notamment, les soins pour lesquels peuvent être utilisés les produits relevant de la classe 3 couverts par la marque antérieure.

86      À ce titre, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel le public pertinent ne supposera pas que le fournisseur de services de « soins d’hygiène et de beauté pour des êtres humains » est également un producteur de produits de soins corporels et esthétiques pour des êtres humains. Ainsi que la chambre de recours l’a souligné à juste titre, au point 39 de la décision attaquée, les produits et les services ici en cause peuvent être produits ou commercialisés dans les mêmes établissements, par exemple dans les salons de beauté, et ciblent les mêmes consommateurs au sein du grand public concerné.

87      Dès lors, il y a lieu de conclure que les produits et les services ici en cause sont complémentaires, et donc similaires à un degré moyen. Partant, il y a lieu de relever que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que ladite similitude était seulement de faible degré.

88      C’est en tenant compte des erreurs entachant les appréciations de la chambre de recours portant sur la comparaison des produits et des services en cause, relevées aux points 73, 82 et 87 ci-dessus, qu’il convient de poursuivre l’examen du présent recours.

 Sur la première branche, tirée d’une erreur d’appréciation des éléments les plus distinctifs et dominants des signes en conflit

89      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir, aux points 23 à 30 de la décision attaquée, commis une erreur d’appréciation en ce qui concerne les éléments les plus distinctifs et dominants de la marque demandée. Ce serait à tort qu’elle aurait constaté que cette dernière était composée d’un seul terme, dans lequel l’élément « rausch » occupait une position distinctive autonome.

90      D’une part, la marque demandée n’aurait pas été composée du seul élément « alpenrausch », comme l’aurait indiqué la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée, puisqu’elle aurait également comporté les mots « Dr. Spiller », qui auraient été compris par le public pertinent comme une référence à un nom de famille ou à un nom propre, ainsi que la chambre de recours l’aurait relevé au point 30 de la décision attaquée, et qui correspondaient également à la raison sociale de la requérante. Ces derniers mots auraient joué un rôle déterminant au sein de la marque demandée pour indiquer l’origine commerciale des produits et des services que cette marque désignait. Certes, la chambre de recours aurait relativisé sa position aux points 26 et 27 de la décision attaquée. Toutefois, ses appréciations auraient donné l’impression qu’elle se serait limitée à prendre en compte l’élément « alpenrausch » de la marque demandée dans le cadre de la comparaison des signes.

91      D’autre part, dans la marque demandée, l’élément « rausch », correspondant au seul élément constituant la marque antérieure, n’aurait pas occupé une position autonome et n’aurait pas non plus été dominant, mais aurait été perçu par le public pertinent, qu’il s’agisse ou non de la partie germanophone de celui-ci, comme une partie indissociable de l’élément « alpenrausch », considéré par la chambre de recours comme étant un terme fantaisiste. Conformément à la jurisprudence selon laquelle le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, qui plus est au mépris des règles linguistiques, le public pertinent n’aurait eu aucune raison d’établir un lien entre l’élément « rausch », constituant la marque antérieure, et le terme fantaisiste « alpenrausch », contenu dans la marque demandée. Dans cette dernière, le public pertinent aurait davantage pu se focaliser sur la première partie dudit terme, « alpen », qu’il aurait pu comprendre comme une allusion à une chaîne de montagnes européennes, les Alpes, ainsi désignées en allemand et dans d’autres langues officielles de l’Union, comme la chambre de recours l’aurait relevé au point 30 de la décision attaquée. En définitive, la marque demandée aurait été globalement perçue par le public pertinent comme une expression fantaisiste associant un terme fantaisiste, « alpenrausch », à un titre et à un nom de famille, « Dr. Spiller », correspondant au titulaire de cette marque, ainsi que l’intervenante l’aurait relevé à la page 4 de son mémoire du 22 août 2013 devant la chambre de recours.

92      L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante et concluent au rejet de la première branche comme étant non fondée.

93      Aux points 23 à 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a observé, s’agissant de la marque antérieure, que celle-ci serait perçue comme un nom de famille très courant dans les pays germanophones. Bien que le mot allemand « Rausch » aurait également pu se traduire par « ivresse », au sens propre ou figuré de ce dernier mot, rien n’aurait permis de considérer que la marque antérieure aurait été perçue comme une référence à l’ivresse, au sens propre de ce terme, au regard du type de produits qu’elle désignait, à savoir des produits cosmétiques.

94      S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a constaté, aux points 26 à 29 de la décision attaquée, qu’elle était constituée de deux éléments, « alpenrausch » associé au nom de famille Spiller, lui-même précédé du titre de docteur. Selon la chambre de recours, le terme « alpenrausch » n’aurait pas possédé de signification claire. Bien qu’il aurait pu faire allusion au sentiment de joie associé à des vacances dans les Alpes, le lien entre cette interprétation et les produits en cause serait resté indéterminé. De plus, selon la chambre de recours, les éléments « alpen » et « rausch » avaient le même poids dans l’impression globale produite par le signe constituant la marque demandée, de sorte que le terme fantaisiste « alpenrausch » possédait une signification distinctive qui lui était propre, à l’inverse des mots « Dr. Spiller ». La chambre de recours a ajouté, au point 30 de la décision attaquée, que les éléments « Dr. Spiller » et « alpen » seraient compris, même dans les pays non germanophones, comme des références, respectivement, à un nom de famille et aux Alpes, alors que les éléments « rausch » et « alpenrausch » n’auraient pas eu de signification dans lesdits pays.

95      Il ressort implicitement, mais nécessairement, du point 29 de la décision attaquée, lu en combinaison avec le point 47 de celle-ci, que la chambre de recours a considéré que, pour l’ensemble du grand public concerné, l’élément verbal « alpenrausch » de la marque demandée serait l’élément le plus distinctif de cette marque.

96      Comme cela a été indiqué au point 60 ci-dessus, le Tribunal se concentrera, en l’espèce, sur la perception des marques en conflit par la partie non germanophone du grand public concerné.

97      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails [voir arrêt du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 46 et jurisprudence citée].

98      Si, selon la jurisprudence citée au point 97 ci-dessus, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en reste pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir arrêt du 8 juillet 2010, Engelhorn/OHMI – The Outdoor Group (peerstorm), T‑30/09, EU:T:2010:298, point 60 et jurisprudence citée].

99      Aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’un élément d’une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée, et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée (voir arrêt du 3 septembre 2010, 61 A NOSSA ALEGRIA, T‑472/08, EU:T:2010:347, point 47 et jurisprudence citée).

100    En premier lieu, pour autant que la requérante allègue, en substance, que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a erronément écarté, lors de la comparaison des signes en conflit, les mots « Dr. Spiller » de la marque demandée, la requérante méconnaît le contenu de la décision attaquée. En effet, même si la formulation du point 22 de cette dernière est ambiguë, ainsi que l’EUIPO l’admet lui-même, il ressort des points subséquents de celle-ci que la chambre de recours a pris en compte, dans son analyse, tous les éléments composant la marque demandée, y compris les mots « Dr. Spiller ». Plus précisément, au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que la marque demandée était composée de deux éléments, à savoir « alpenrausch » associé au nom de famille Spiller, lui-même précédé du titre de docteur. Au point 30 de ladite décision, elle a ajouté que les mots « Dr. Spiller » seraient reconnus comme une référence à un nom de famille, et ce même en dehors des pays germanophones. Aux points 32 et 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté l’existence de différences visuelles et phonétiques entre les signes en conflit résultant de la présence des mots « Dr. Spiller » dans la marque demandée. Enfin, au stade de l’appréciation globale du risque de confusion, la chambre de recours a souligné, au point 47 de la décision attaquée, que l’ajout du nom de famille Spiller précédé du titre « Dr. » ne modifiait pas de manière significative l’impression d’ensemble produite par la marque demandée, l’élément « alpenrausch » ayant une signification distinctive propre. Dès lors, le présent argument de la requérante n’est pas fondé.

101    En deuxième lieu et pour autant que la requérante indique que la présente branche est notamment tirée d’une appréciation erronée des éléments dominants de la marque demandée, il y a lieu d’observer que ladite marque est une marque verbale.

102    Or, selon la jurisprudence, les marques verbales sont constituées exclusivement de lettres, de mots ou d’associations de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique [voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 2019, Laverana/EUIPO – Agroecopark (VERA GREEN), T‑106/18, non publié, EU:T:2019:143, point 56 et jurisprudence citée]. Dès lors, de telles marques ne présentent pas d’élément dominant, puisque, par nature, aucun de leurs éléments constitutifs ne revêt un aspect graphique ou stylistique particulier susceptible de lui conférer un tel caractère (voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 2019, VERA GREEN, T‑106/18, non publié, EU:T:2019:143, point 56).

103    Il s’ensuit que la requérante n’est pas fondée à prétendre que la marque demandée pourrait contenir des éléments dominants.

104    En troisième lieu et pour autant que la présente branche met en cause l’analyse, par la chambre de recours, des éléments les plus distinctifs des signes en conflit, premièrement, il importe de relever que la marque antérieure n’est composée que d’un élément, à savoir « rausch ». Il s’ensuit que l’analyse des éléments les plus distinctifs n’a pas de pertinence pour cette marque et seule l’analyse du caractère distinctif de ladite marque, prise dans son ensemble, sera un facteur pertinent à prendre en compte dans le cadre de l’analyse globale du risque de confusion.

105    Deuxièmement, en ce qui concerne l’analyse des éléments composant la marque demandée, c’est à tort que la requérante soutient que l’ensemble du grand public concerné, y compris la partie non germanophone de celui-ci, à laquelle se limite l’analyse du Tribunal, ne sera pas susceptible de décomposer ladite marque en plusieurs éléments et, en particulier, percevra l’élément « alpenrausch » comme une expression globale qu’il ne scindera pas en deux éléments, « alpen » et « rausch ».

106    Certes, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, la connaissance d’une langue étrangère ne peut pas, en général, être présumée [arrêt du 13 septembre 2010, Inditex/OHMI – Marín Díaz de Cerio (OFTEN), T‑292/08, EU:T:2010:399, point 83 ; voir également, en ce sens, arrêt du 24 juin 2014, Hut.com/OHMI – Intersport France (THE HUT), T‑330/12, non publié, EU:T:2014:569, point 40]. Ainsi, il ne peut être présumé, en l’espèce, que la partie non germanophone du grand public concerné reconnaîtra les mots allemands « Alpen » et « Rausch », qui sont accolés dans le terme fantaisiste « alpenrausch » de la marque demandée.

107    Néanmoins, il y a lieu de tenir compte de ce que cette partie du grand public concerné sera en mesure d’associer l’élément « alpen » au mot, qui lui est proche, utilisé dans sa propre langue pour désigner la célèbre chaîne de montagnes européennes de haute altitude et, du fait de cette association, de comprendre ce mot comme une référence aux Alpes, ainsi que la chambre de recours l’a constaté à juste titre, en substance, au point 30 de la décision attaquée.

108    Concernant le nom de famille ou le mot allemand « Rausch », la partie non germanophone du grand public concerné ne sera pas susceptible de le connaître et, pour cette partie du grand public concerné, l’élément « rausch », seul ou associé à un autre élément faisant référence aux Alpes, n’aura aucune signification et sera perçu comme étant un terme purement fantaisiste.

109    Il ressort toutefois de la jurisprudence qu’il n’est pas nécessaire que tous les éléments accolés au sein d’une marque aient une signification concrète pour que le public pertinent les décompose, mais qu’il suffit, à cet égard, qu’il perçoive le sens de certains d’entre eux [voir, en ce sens, arrêt du 23 mai 2019, Dentsply De Trey/EUIPO – IDS (AQUAPRINT), T‑312/18, non publié, EU:T:2019:358, point 55].

110    Dès lors, il y a lieu de considérer que la partie non germanophone du grand public concerné décomposera l’élément « alpenrausch » de la marque demandée en deux éléments, « alpen » et « rausch ».

111    Troisièmement, en ce qui concerne l’analyse des éléments les plus distinctifs de la marque demandée, il convient de relever, tout d’abord, s’agissant de l’élément « alpen », que le fait que la partie non germanophone du grand public concerné percevra celui-ci comme une référence aux Alpes ne permet pas de conclure que, pour cette partie dudit public, cet élément sera descriptif des produits et des services en cause et, partant, dépourvu de tout caractère distinctif intrinsèque.

112    En effet, selon une jurisprudence constante, un terme possédant une signification claire n’est considéré comme étant descriptif que s’il présente avec les produits ou les services concernés un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de ces produits ou de ces services ou de l’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, points 24 et 25 et jurisprudence citée].

113    Il n’en demeure pas moins que le caractère allusif d’un élément composant une marque, tout comme le caractère descriptif ou laudatif d’un tel élément, est de nature à affecter son caractère distinctif intrinsèque. L’aptitude visant à permettre au consommateur de distinguer, de façon immédiate et certaine, les produits désignés par une marque, en tant qu’elle comporte un tel élément, par rapport aux produits des autres entreprises est réduite dans tous les scénarios précités (arrêt du 23 mai 2019, AQUAPRINT, T‑312/18, non publié, EU:T:2019:358, point 50).

114    En l’espèce, bien qu’il ne soit pas descriptif pour les produits et les services en cause, l’élément « alpen » pourrait être perçu comme une allusion au fait que les produits qui sont en cause ou qui sont utilisés pour fournir les services en cause contiennent des ingrédients provenant des Alpes, connues pour être une zone naturelle préservée.

115    Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, il y a lieu de constater que, bien que l’élément « alpen » soit en première position dans le signe contesté, le fait que celui-ci puisse être perçu par la partie non germanophone du grand public concerné comme une allusion aux Alpes impose plutôt de constater que, pour cette partie dudit public, ledit mot aura un faible caractère distinctif intrinsèque.

116    Ensuite, s’agissant de la combinaison de mots « Dr. Spiller », il y a lieu de constater que, même si la partie non germanophone du grand public concerné ne connaîtra pas le nom de famille Spiller en tant que tel, dans la mesure où il ne s’agit ni d’un nom répandu ni du nom d’une personne célèbre dans l’Union, cette partie dudit public sera en mesure de comprendre ladite combinaison comme désignant un certain docteur nommé Spiller. En effet, sur tout le territoire de l’Union, l’abréviation « Dr. » est généralement utilisée pour désigner le titre de docteur et elle est habituellement suivie par le nom de famille de son titulaire. Ainsi, pour ladite partie du grand public concerné, les mots « Dr. Spiller » formeront une combinaison linguistique logique pour désigner un docteur nommé Spiller.

117    Contrairement à ce que soutient la requérante, cette dernière circonstance ne justifie pas de considérer la combinaison de mots « Dr. Spiller » comme étant l’élément intrinsèquement le plus distinctif de la marque demandée.

118    Compte tenu de la nature des produits et des services en cause, qui, ainsi que cela a déjà été constaté au point 57 ci-dessus, peuvent avoir un impact sur la santé des personnes qui les consomment, et du fait que, dans la marque demandée, la combinaison de mots « Dr. Spiller » est précédée par l’élément « alpenrausch », ladite combinaison sera vraisemblablement comprise par la partie non germanophone du grand public concerné comme une allusion à une personne réelle, mais inconnue, disposant d’une qualification médicale, sous le contrôle de laquelle aurait été créée ou développée la ligne de produits ou de services spécifiques pour le corps humain désignée par l’élément « alpenrausch ».

119    Il s’ensuit que, dans l’esprit des consommateurs non germanophones faisant partie du grand public concerné, la combinaison de mots « Dr. Spiller » aura tendance à être perçue comme faisant référence à une personne particulière sous le contrôle de laquelle une ligne de produits ou de services spécifique a été élaborée et comportera, dès lors, un caractère allusif. Cela impose plutôt de constater que, pour cette partie dudit public, la combinaison de mots « Dr. Spiller » de la marque demandée aura un faible caractère distinctif intrinsèque.

120    Par ailleurs, pour autant que la requérante fait valoir que la combinaison de mots « Dr. Spiller » correspond à sa dénomination sociale, il importe de rappeler que, selon la jurisprudence, une dénomination sociale n’a pas, en elle-même, pour finalité de distinguer des produits ou des services. En effet, une telle dénomination a pour objet d’identifier une société [voir arrêt du 18 juillet 2017, Savant Systems/EUIPO – Savant Group (SAVANT), T‑110/16, non publié, EU:T:2017:521, point 25 et jurisprudence citée].

121    Ainsi, même à supposer que certains consommateurs au sein de la partie non germanophone du grand public concerné percevraient la combinaison de mots « Dr. Spiller » comme un renvoi à la dénomination sociale de la requérante, cela ne permettrait pas de conclure, comme le soutient cette dernière, que ces mots seraient également perçus par ceux-ci comme étant caractéristiques d’une marque et comme possédant un degré de caractère distinctif intrinsèque moyen ou élevé.

122    Enfin, s’agissant de l’élément « rausch », dans la mesure où la partie non germanophone du grand public concerné le considérera comme un terme purement fantaisiste (voir point 108 ci-dessus), ledit élément revêtira, pour cette partie dudit public, un caractère distinctif intrinsèque élevé et autonome par rapport à celui de l’élément « alpen », perçu comme allusif, auquel il est accolé.

123    Pour ces raisons, il y a lieu de considérer que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a commis une erreur en ne constatant pas, s’agissant de la partie non germanophone du grand public concerné, à laquelle se limite l’analyse du Tribunal, que l’élément « rausch » était l’élément intrinsèquement le plus distinctif de la marque demandée.

124    C’est en tenant compte de l’erreur ainsi relevée, entachant les appréciations de la chambre de recours portant sur l’identification des éléments intrinsèquement les plus distinctifs de la marque demandée pour la partie non germanophone du grand public concerné, qu’il convient de poursuivre l’examen du présent recours.

 Sur la deuxième branche, prise d’une erreur d’appréciation dans la comparaison des signes en conflit

125    La requérante soutient que, aux points 31 à 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en concluant à l’existence d’une similitude entre les signes en conflit sur les plans visuel et phonétique, alors qu’il n’y a, selon elle, aucune similitude sur aucun plan entre ces signes. Le seul fait que la marque antérieure serait identique à l’un des éléments composant la marque demandée ne suffirait pas pour conclure à l’existence d’une similitude entre lesdites marques, compte tenu de la jurisprudence selon laquelle chaque marque serait normalement perçue comme un tout.

126    Sur le plan phonétique, la chambre de recours aurait conclu à tort à l’existence d’un degré moyen de similitude entre les signes en conflit. En effet, la partie initiale de ceux-ci se prononcerait de manière radicalement différente. De plus, la succession de consonnes présentes dans chacun de ces signes différerait sensiblement. La prononciation des signes différerait également du fait de la longueur différente des mots qui les composent, de la différence de nombreuses syllabes dans les deux signes et de la séquence des voyelles présentes dans chacun de ceux-ci ainsi que de la présence des mots « Dr. Spiller » dans la marque demandée. Dans cette dernière, la prononciation de l’élément commun « rausch » passerait à l’arrière-plan et retiendrait peu l’attention, en raison de la position centrale de cet élément. La prononciation dudit élément ne pourrait donc pas justifier l’existence d’une similitude phonétique entre les signes en conflit.

127    Sur le plan visuel, la chambre de recours aurait conclu à tort à l’existence d’une similitude entre les signes en conflit. Dans la marque demandée, l’élément « rausch » passerait à l’arrière-plan et retiendrait moins l’attention en raison de sa position centrale. De plus, les signes en conflit seraient de longueur très différente. Pour ces motifs, aucune similitude visuelle ne pourrait être constatée entre ces signes.

128    Sur le plan conceptuel, aux points 34 et 35 de la décision attaquée, la chambre de recours aurait elle-même reconnu, sans que cela ne soit remis en cause par l’EUIPO, l’absence de toute similitude entre les signes en conflit.

129    L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante et concluent au rejet de la deuxième branche comme étant non fondée.

130    Aux points 31 à 35 de la décision attaquée, la chambre de recours a procédé à la comparaison des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Tout d’abord, elle a estimé qu’il existait une similitude entre lesdits signes sur le plan visuel, dans la mesure où ceux-ci coïncidaient sur la suite de lettres constituant l’élément « rausch ». Ensuite, la chambre de recours a considéré que ces signes présentaient un degré moyen de similitude sur le plan phonétique, en raison de la concordance de leur prononciation concernant lesdites lettres. Enfin, sur le plan conceptuel, elle a observé que, d’une part, pour la partie germanophone du grand public concerné, une comparaison des signes en conflit serait dépourvue de pertinence, car cette partie dudit public n’associerait pas l’élément « rausch » au mot allemand « Rausch » décrivant un état provoqué par des produits stimulants ou à une émotion excessive, ni ne l’interpréterait comme étant une abréviation du terme fantaisiste « alpenrausch ». D’autre part, pour la partie non germanophone du grand public concerné, lesdits signes seraient dépourvus de signification et une telle comparaison serait donc impossible.

131    Selon une jurisprudence constante, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [voir arrêt du 7 février 2012, Dosenbach-Ochsner/OHMI – Sisma, Représentation d’éléphants dans un rectangle, T‑424/10, EU:T:2012:58, point 23 et jurisprudence citée]. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, sont pertinents les aspects visuel, auditif et conceptuel (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 23, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 25).

132    Il y a lieu de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire [arrêts du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, EU:T:2002:262, point 28, et du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, EU:T:2004:197, point 38].

133    En premier lieu, s’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel, il convient d’observer que tous deux sont des signes verbaux coïncidant par l’élément « rausch », qui est le seul élément composant la marque antérieure, de sorte que la marque antérieure est complètement reprise dans la marque demandée. Les signes en conflit diffèrent par la présence, dans la marque demandée, des éléments « alpen » et « rausch », qui sont accolés, ainsi que des mots « Dr. Spiller ».

134    Eu égard à ce qui précède, il existe une certaine similitude entre les marques en conflit sur le plan visuel, résultant de ce que la marque demandée reprend intégralement la marque antérieure. Contrairement à ce que soutient la requérante, les éléments supplémentaires de la marque demandée n’apportent pas suffisamment de différences pour écarter cette similitude. De plus, l’impact de l’élément commun « rausch » dans l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit est renforcé par le fait que, comme cela a déjà exposé au point 123 ci-dessus, ledit élément sera l’élément intrinsèquement le plus distinctif de la marque demandée pour la partie non germanophone du grand public concerné, à laquelle se limite l’analyse du Tribunal.

135    En outre, ne peuvent prospérer les arguments de la requérante relatifs au positionnement de l’élément « rausch » à l’« arrière-plan » ou « au milieu » de la marque demandée, décrit comme étant « une position qui attire peu l’attention ».

136    Certes, il ressort de la jurisprudence que le consommateur est réputé attacher normalement plus d’importance au début d’une marque qu’à sa fin, la partie initiale d’une marque ayant normalement, tant sur le plan visuel que sur le plan phonétique, un impact plus fort que la partie finale de celle-ci [voir, en ce sens, arrêts du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, EU:T:2006:247, point 51, et du 27 février 2019, Aytekin/EUIPO – Dienne Salotti (Dienne), T‑107/18, non publié, EU:T:2019:114, point 47 et jurisprudence citée]. Toutefois, ainsi que l’indique l’adverbe « normalement », cette considération ne saurait valoir dans tous les cas [voir arrêts du 9 avril 2014, Farmaceutisk Laboratorium Ferring/OHMI – Tillotts Pharma (OCTASA), T‑501/12, non publié, EU:T:2014:194, point 58 et jurisprudence citée, et du 12 juillet 2019, MAN Truck & Bus/EUIPO – Halla Holdings (MANDO), T‑698/17, non publié, EU:T:2019:524, point 62 et jurisprudence citée]. Or, en l’espèce, pour des raisons analogues à celles exposées au point 134 ci-dessus, il n’y a aucune raison de considérer que, pour la partie non germanophone du grand public concerné, les autres éléments de la marque demandée disposeraient, sur le plan visuel, d’une importance plus forte que l’élément « rausch ».

137    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que les signes en conflit présentent un degré de similitude moyen sur le plan visuel pour la partie non germanophone du grand public concerné. Même si la chambre de recours n’a pas explicitement précisé le degré de similitude sur le plan visuel existant entre les signes en conflit, c’est donc à bon droit qu’elle les a considérés comme étant similaires.

138    En deuxième lieu, s’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan phonétique, leur prononciation coïncide également concernant l’élément « rausch », qui leur est commun, et diffère par les éléments supplémentaires composant la marque demandée, à savoir les éléments « alpen » et « rausch », qui sont accolés, ainsi que les mots « Dr. Spiller ».

139    C’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude de degré moyen entre les signes en conflit sur le plan phonétique. En effet, d’une part, comme cela a été souligné à bon droit par celle-ci, au point 33 de la décision attaquée, et contrairement à ce que soutient la requérante, la différence du nombre de syllabes et la différence qui en résulte dans le rythme sonore et dans l’intonation ne suffisent pas pour écarter le constat d’un degré moyen de similitude dans l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit sur le plan phonétique, étant rappelé que leur élément commun est le seul élément constitutif de la marque antérieure et sera perçu comme l’élément le plus distinctif de la marque demandée. D’autre part, comme le soutient à juste titre l’EUIPO, une partie non négligeable du grand public concerné pourrait ne prononcer la marque demandée que de manière abrégée, en se limitant à sa première moitié, « alpenrausch », ce qui renforcerait encore le degré de similitude phonétique existant entre les marques en conflit. En effet, le consommateur moyen a tendance à abréger oralement une marque comprenant plusieurs termes afin de la rendre plus facile à prononcer [voir arrêt du 11 novembre 2009, Frag Comercio Internacional/OHMI – Tinkerbell Modas (GREEN by missako), T‑162/08, non publié, EU:T:2009:432, point 49 et jurisprudence citée].

140    En troisième lieu, s’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel, il y a lieu de rappeler que l’élément « rausch » composant la marque antérieure et présent dans la marque demandée ne sera pas compris par la partie non germanophone du grand public concerné (voir point 108 ci-dessus). En particulier, la marque antérieure ne sera pas perçue par les consommateurs qui composent cette partie dudit public comme un nom de famille allemand, dès lors que cette marque ne contient aucun élément d’où ils pourraient déduire que ce mot correspond à un tel nom et qu’il n’est pas établi que le patronyme Rausch serait un nom de famille connu dans les territoires non germanophones de l’Union. En ce qui concerne la marque demandée, si, pour les raisons qui ont déjà été exposées aux points 111, 114 et 116 ci-dessus, celle-ci pourrait être comprise comme incluant une référence aux Alpes et à la santé, elle sera, dans son ensemble, perçue par la partie non germanophone du grand public concerné comme une combinaison verbale fantaisiste, c’est-à-dire dépourvue de toute signification particulière. Dès lors, il convient de considérer que la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel est, en l’espèce, neutre.

141    Au vu des appréciations qui précèdent concernant la comparaison des signes en conflit par rapport à la partie non germanophone du grand public concerné, à laquelle se limite la présente analyse, il y a lieu de rejeter, concernant cette partie dudit public, la troisième branche du moyen unique de la requérante.

 Sur la quatrième branche, tirée d’une erreur d’appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure

142    La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir commis une erreur d’appréciation en constatant que la marque antérieure possédait un degré de caractère distinctif intrinsèque normal. Au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours aurait elle-même relevé que la marque antérieure était constituée d’un mot allemand du langage courant revêtant un caractère descriptif et, partant, faiblement distinctif, y compris par rapport aux produits couverts par la marque antérieure. Le faible caractère distinctif de cette marque, impliquant une protection limitée, découlerait également de ce que, comme l’attesterait un document produit devant l’EUIPO, 45 marques parmi les nombreuses marques enregistrées auprès de ce dernier contiendraient l’élément « rausch » (annexe A.6).

143    L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante et concluent au rejet de la quatrième branche comme étant non fondée.

144    Aux points 41 et 42 de la décision attaquée, la chambre de recours a observé que l’intervenante n’avait pas invoqué le caractère distinctif accru de la marque antérieure acquis par l’usage, de sorte que l’appréciation du caractère distinctif de cette marque devait uniquement se fonder sur son caractère distinctif intrinsèque. La chambre de recours a conclu que ce caractère distinctif intrinsèque était moyen, car l’élément « rausch », même au sens du mot allemand « Rausch », n’avait aucune signification descriptive pour les produits désignés par la marque antérieure.

145    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, au nombre des facteurs pertinents pour l’appréciation globale du risque de confusion figure notamment le caractère distinctif de la marque antérieure, que celui-ci dérive des qualités intrinsèques de cette marque ou de sa renommée [voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2015, Hostel Tourist World/OHMI – WRI Nominees (HostelTouristWorld.com), T‑566/13, non publié, EU:T:2015:239, points 66 et 67 et jurisprudence citée].

146    En l’espèce, il n’est pas contesté par les parties que, comme cela a été relevé à bon droit par la chambre de recours, au point 42 de la décision attaquée, l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure doit uniquement reposer sur son caractère distinctif intrinsèque.

147    Comme cela a déjà été indiqué au point 108 ci-dessus, pour la partie non germanophone du grand public concerné, la marque antérieure n’a aucune signification.

148    Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que, par rapport à la partie non germanophone du grand public concerné, la marque antérieure possédait un caractère distinctif moyen.

149    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

150    D’une part, la requérante allègue que la chambre de recours aurait elle-même constaté, au point 24 de la décision attaquée, que le mot allemand « Rausch » était « un terme descriptif généralement courant ».

151    Dans ledit point, la chambre de recours a indiqué que le mot allemand « Rausch » pouvait signifier « ivresse ». Or, conformément à la jurisprudence qui a déjà été citée au point 106 ci-dessus, cette constatation reste sans pertinence pour la partie non germanophone du grand public concerné.

152    D’autre part, la requérante soutient que le faible caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure découle de ce que de nombreuses marques comprenant l’élément « rausch » seraient déjà enregistrées.

153    À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, le facteur pertinent aux fins de contester le caractère distinctif d’un élément consiste dans la présence effective de ce dernier sur le marché, et non dans des registres ou des bases de données [voir arrêt du 25 mai 2016, Ice Mountain Ibiza/EUIPO – Marbella Atlantic Ocean Club (ocean beach club ibiza), T‑5/15, non publié, EU:T:2016:311, point 35 et jurisprudence citée].

154    Par conséquent, c’est à tort que la requérante soutient que les inscriptions de marques dans le registre doivent être prises en considération même indépendamment de leur utilisation sur le marché.

155    Par ailleurs, la requérante n’a pas produit devant l’EUIPO d’éléments de preuve qui auraient permis de constater, ainsi qu’elle l’invoque, la présence effective sur le marché de marques contenant l’élément « rausch ».

156    Il y a donc lieu de rejeter la quatrième branche du moyen unique soulevé par la requérante par rapport à la partie non germanophone du grand public concerné, à laquelle se limite la présente analyse.

 Sur la cinquième branche, tirée d’une erreur d’appréciation dans l’analyse du risque de confusion

157    La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en concluant à l’existence d’un risque de confusion. Elle souligne que, au point 48 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est bornée à constater qu’un risque de confusion ne saurait être exclu, alors que le libellé de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 exigerait l’existence avérée d’un risque de confusion.

158    Par ailleurs, la requérante fait valoir que, à l’issue de l’analyse globale des différents facteurs pertinents, la chambre de recours devait conclure à l’absence de tout risque de confusion, au motif que les produits et les services en cause étaient, en réalité, différents. Une telle constatation se serait également imposée au regard des différences existant entre les signes en conflit, que ladite chambre aurait elle-même relevées au point 44 de la décision attaquée, ainsi que du niveau d’attention élevé du public pertinent. Ledit public n’aurait pas non plus risqué d’établir un lien entre les marques en conflit ni de penser que la marque demandée était une « variante » de la marque antérieure, dans la mesure où l’élément « rausch », constituant cette dernière, n’aurait pas occupé une position distinctive autonome dans la première, ce qui aurait été pertinent au regard de la jurisprudence.

159    L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante et concluent au rejet de la cinquième branche comme étant non fondée.

160    Aux points 43 à 49 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté qu’un risque de confusion ne pouvait être exclu dans l’esprit du grand public concerné et serait, en particulier, suscité dans celui de la partie non germanophone dudit public. Elle a pris en compte les différences et les similitudes existant entre les signes en conflit, la similitude d’une partie des produits et des services en cause ainsi que le degré moyen d’attention du grand public concerné. La chambre de recours a souligné que la circonstance déterminante en l’espèce était que l’élément « rausch » apparaissait à l’identique dans les deux marques. Selon la chambre de recours, les autres éléments de la marque demandée n’étaient pas suffisants pour modifier de manière significative l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit.

161    À titre liminaire, il convient de rappeler que, en l’espèce et conformément à ce qui a été exposé au point 60 ci-dessus, le Tribunal se limitera à apprécier le bien-fondé du présent recours, concernant l’appréciation globale du risque de confusion par la chambre de recours, par rapport à la partie non germanophone du grand public concerné.

162    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, constitue un risque de confusion le risque que le public pertinent puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services concernés, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services concernés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

163    En application du principe d’interdépendance, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés par les marques en conflit peut être compensé par un degré élevé de similitude entre lesdites marques, et inversement [voir, en ce sens, arrêt du 25 novembre 2015, Soprema/OHMI – Sopro Bauchemie (SOPRAPUR), T‑763/14, non publié, EU:T:2015:883, point 68 et jurisprudence citée].

164    Le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure se révèle être important (arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24, et du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18).

165    En outre, le risque de confusion varie en fonction du niveau d’attention dont fait preuve le public pertinent. Ainsi, selon la jurisprudence, si le public pertinent n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe entre les différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite qu’il a gardée en mémoire, un niveau d’attention élevé du public pertinent peut amener à conclure qu’il ne confondra pas les marques en cause malgré l’absence de comparaison directe entre les différentes marques [voir arrêt du 13 juillet 2017, Migros-Genossenschafts-Bund/EUIPO – Luigi Lavazza (CReMESPRESSO), T‑189/16, non publié, EU:T:2017:488, point 86 et jurisprudence citée].

166    S’agissant des facteurs pertinents pour l’appréciation du risque de confusion, premièrement, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel les produits et les services en cause seraient différents, dès lors qu’il ressort des appréciations effectuées aux points 70 à 87 ci-dessus que ces produits et ces services sont, pour partie, identiques et, pour le reste, similaires à des degrés divers.

167    Deuxièmement, comme cela a été observé au point 59 ci-dessus, le niveau d’attention du grand public concerné, y compris la partie non germanophone de celui-ci, est moyen. Dans le cadre de la présente branche, la requérante fait état d’un degré d’attention accru du public pertinent, mais sans présenter aucun argument justifiant de renverser l’appréciation de la chambre de recours à cet égard, que le Tribunal a faite sienne.

168    Troisièmement, pour la partie non germanophone du grand public concerné, comme cela a déjà été constaté aux points 133 à 140 ci-dessus, les signes en conflit sont similaires à un degré moyen sur les plans tant visuel que phonétique, alors que leur comparaison est neutre sur le plan conceptuel. Pour cette raison, il y a lieu d’observer que les similitudes sur les plans visuel et phonétique existant entre les signes en conflit ne peuvent pas être compensées, en l’espèce, par une éventuelle différence qui existerait entre ceux-ci sur le plan conceptuel. De plus, il est important de souligner que les signes en conflit coïncident par l’élément le plus distinctif de la marque demandée, qui est l’élément unique de la marque antérieure, ce qui renforce la possibilité d’une confusion.

169    Il convient également de souligner que, dès lors que le caractère distinctif de la marque antérieure est de degré moyen, il n’y a aucune raison de restreindre la protection qui doit être accordée à cette marque.

170    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de considérer que, contrairement à ce que soutient la requérante, il existe un risque de confusion dans l’esprit de la partie non germanophone du grand public concerné. En effet, au vu des facteurs pertinents rappelés aux points 166 à 168 ci-dessus, il y a un risque que cette partie dudit public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement.

171    Cette appréciation n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante. Il en est ainsi, premièrement, de l’argument selon lequel les mots « Dr. Spiller » de la marque demandée indiqueraient clairement l’origine différente des produits et des services couverts par cette marque. En effet, pour les raisons visées aux points 120 et 121 ci-dessus, le seul fait que ces mots se réfèrent à la raison sociale de la requérante ne permet pas de considérer que la partie non germanophone du grand public concerné les percevrait comme ayant les caractéristiques d’une marque et, par conséquent, n’est pas suffisant pour éliminer tout risque de confusion en l’espèce.

172    Deuxièmement, la requérante soutient à tort que sa position sur l’inexistence d’un risque de confusion est confirmée par l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594). En effet, dans cet arrêt, la Cour a dit pour droit qu’un risque de confusion pouvait exister dans l’esprit du public pertinent en cas d’identité des produits et des services concernés lorsque la marque dont l’enregistrement était demandé était constituée de la juxtaposition, d’une part, de la dénomination de l’entreprise du demandeur à l’enregistrement et, d’autre part, d’une marque antérieure, dotée d’un pouvoir distinctif normal, et que l’élément correspondant à celle-ci, sans dominer à lui seul l’impression d’ensemble produite par la marque dont l’enregistrement était demandé, conservait dans cette dernière une position distinctive autonome.

173    En se référant audit arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), la Cour a également précisé, dans sa jurisprudence, que l’élément d’une marque composée ne conservait pas une position distinctive autonome dans cette marque s’il formait avec le ou les autres éléments qui la composaient, pris ensemble, une unité ayant un sens différent de celui de tous ces éléments pris séparément (voir, en ce sens, arrêt du 22 octobre 2015, BGW, C‑20/14, EU:C:2015:714, point 39 et jurisprudence citée).

174    Il ressort de ce qui précède que l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), invoqué par la requérante, non seulement n’étaye pas sa position, mais, à l’inverse, renforce l’appréciation selon laquelle, en l’espèce, il y a lieu de conclure à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de la partie non germanophone du grand public concerné, dès lors que, pour celle-ci, l’élément commun aux marques en conflit, à savoir l’élément « rausch », n’aura aucune signification, qu’il soit isolé, comme dans la marque antérieure, ou pris ensemble avec les autres éléments de la marque demandée (voir point 108 ci-dessus). Comme cela a déjà été constaté au point 122 ci-dessus, l’élément « rausch » de la marque demandée conservera une position distinctive autonome dans cette dernière marque.

175    Enfin, troisièmement, il convient d’écarter l’argument de la requérante selon lequel l’appréciation du risque de confusion par la chambre de recours serait erronée, au motif que celle-ci aurait constaté que ledit risque « ne saurait être exclu », alors qu’elle aurait dû constater l’existence effective de ce risque. D’une part, ainsi que l’EUIPO l’a relevé à juste titre, la chambre de recours a expressément affirmé, au point 49 de la décision attaquée, l’existence d’un risque de confusion concernant la partie non germanophone du grand public concerné. D’autre part, il ressort de la motivation de la décision attaquée, telle qu’elle ressort des points 43 à 49 de celle-ci, que la chambre de recours a clairement exposé les raisons pour lesquelles, selon elle, il existait en l’espèce un risque de confusion dans l’esprit du grand public concerné, y compris dans celui de la partie non germanophone dudit public.

176    Il découle des considérations qui précèdent que la cinquième branche du moyen unique doit également être rejetée, comme étant non fondée, par rapport à la partie non germanophone du grand public concerné.

177    Par souci d’économie procédurale et dès lors que l’existence d’un risque de confusion a déjà été constatée dans l’esprit d’une partie significative ou non négligeable du grand public concerné et du public pertinent, à savoir la partie non germanophone du grand public concerné, ayant un niveau d’attention moyen, il n’y a pas lieu pour le Tribunal de poursuivre l’analyse du risque de confusion pour les autres parties du grand public concerné et du public pertinent, puisque ladite constatation est suffisante pour conclure que la chambre de recours a pu considérer à bon droit, dans la décision attaquée, qu’il existait un risque de confusion et rejeter le recours par lequel la requérante lui avait demandé d’annuler la décision de la division d’opposition et de rejeter l’opposition.

178    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le moyen unique et, partant, le présent recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

179    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

180    En l’espèce, la requérante a succombé en ses conclusions. Partant, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Dr. Spiller GmbH est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 décembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.