Language of document : ECLI:EU:T:2021:921

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

21 décembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale CEFA Certified European Financial Analyst – Marque de l’Union européenne verbale antérieure CFA – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑369/20,

European Federation of Financial Analysts’ Societies (EFFAS), établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Mes S. Merico, G. Macías Bonilla et F. Miazzetto, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. P. Villani, J. Crespo Carrillo et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

CFA Institute, établi à Charlottesville, Virginie (États‑Unis), représenté par Mes G. Engels et W. May, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 31 mars 2020 (R 1082/2019-5), relative à une procédure d’opposition entre CFA Institute et EFFAS,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović (rapporteure), présidente, M. F. Schalin et Mme P. Škvařilová‑Pelzl, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 juin 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 31 août 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenant déposé au greffe du Tribunal le 3 septembre 2020,

à la suite de l’audience du 14 juillet 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 14 décembre 2015, la requérante, European Federation of Financial Analysts’ Societies (EFFAS), a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal CEFA Certified European Financial Analyst.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent des classes 9 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Publications électroniques éducatives dans le domaine de l’analyse financière » ;

–        classe 41 : « Services d’éducation et de formation ; services de formation liés à la finance, à l’assurance, aux services bancaires, à la comptabilité, au droit, à la gestion ; coaching [formation] ; services d’éducation en formation commerciale ; cours (de formation) liés à la finance, à l’assurance, aux services bancaires, à la comptabilité, au droit, à la gestion ; conduite de séminaires de formation et d’éducation liés à la finance, à l’assurance, aux services bancaires, à la comptabilité, au droit, à la gestion ; information et conseils en matière de carrière professionnelle [conseils en formation et éducation] ; services de conseil en matière d’éducation ; examens pédagogiques ; services d’examens universitaires, organisation de tests mesurant le rendement ; tests éducatifs ; services de présentation audiovisuelle à des fins éducatives ; organisation d’expositions, conférences et symposiums éducatifs ; ateliers à des fins éducatives ; publication de textes éducatifs, contenus, contenus éducatifs ; tous les services précités se rapportant au domaine de l’analyse financière ».

4        Après avoir refusé l’enregistrement de la marque demandée en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001], l’EUIPO a accepté son enregistrement le 22 mai 2017 sur la base du caractère distinctif acquis par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001].

5        La demande a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2017/105, du 6 juin 2017.

6        Le 6 septembre 2017, l’intervenant, CFA Institute, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

7        L’opposition était notamment fondée sur les quatre droits antérieurs suivants :

–        la marque de l’Union européenne verbale CFA, déposée le 4 janvier 2000 et enregistrée le 2 mars 2001 sous le numéro 1448596, désignant les produits et les services suivants :

–        classe 16 : « Publications imprimées dans le domaine de l’analyse financière et destinées à la promotion des intérêts des analystes financiers » ;

–        classe 41 : « Services éducatifs, à savoir organisation, traitement et mise à disposition de cours, réunions de discussion, séminaires et conférences dans le domaine de l’analyse financière et diffusion de matériel de cours y afférent » ;

–        classe 42 : « Services associatifs, plus particulièrement destinés à la promotion des intérêts des analystes financiers » ;

–        la marque de l’Union européenne figurative reproduite ci-après, déposée le 13 janvier 2000 et enregistrée le 8 octobre 2002 sous le numéro 1460534, désignant les services de la classe 42 et correspondant à la description suivante : « Services d’associations, à savoir promotion de l’éducation, de la responsabilisation professionnelle, de l’éthique et de l’intégrité des analystes financiers » ;

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–        l’enregistrement international de la marque figurative désignant, notamment, l’Union européenne reproduite ci-après, déposée et enregistrée le 22 novembre 2011 sous le numéro 1102821, désignant les produits et les services correspondant à la description suivante :

–        classe 16 : « Publications imprimées, à savoir circulaires, brochures, livres, livres condensés et monographies dans les domaines de la gestion des investissements et de l’analyse financière, ainsi qu’en tant que supports destinés aux professionnels de l’investissement et aux analystes financiers » ;

–        classe 35 : « Services d’association, à savoir promotion des normes et pratiques professionnelles et fourniture d’informations sur les carrières dans les domaines de la gestion d’investissements et de l’analyse financière ; promotion en faveur de professionnels de l’investissement et d’analystes financiers » ;

–        classe 41 : « Services éducatifs, à savoir organisation, conduite et mise à disposition de cours d’instruction, d’examens, d’ateliers de formation, de séminaires et de conférences dans les domaines de la gestion d’investissements et de l’analyse financière, ainsi que distribution de matériel pédagogique correspondant » ;

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–        l’enregistrement international de la marque verbale CFA INSTITUTE, enregistrée le 19 juin 2012 sous le numéro 1130423, désignant les produits de la classe 9 et correspondant à la description suivante : « Publications téléchargeables sous forme de circulaires, revues, livres, recueils et monographies, ainsi que contenus audio et vidéo téléchargeables, tous consacrés au domaine de la gestion d’investissements et de l’analyse financière ».

8        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement 2017/1001].

9        Par décision du 21 mars 2019, la division d’opposition a accueilli l’opposition dans son intégralité en retenant en substance que, en tenant compte de la marque de l’Union européenne verbale CFA, no 1448596, et des produits et des services visés par celle‑ci, il convenait de conclure à l’existence d’un risque de confusion pour l’ensemble des produits et des services visés par la marque demandée.

10      Le 16 mai 2019, la requérante a formé un recours contre la décision de la division d’opposition demandant que celle-ci soit annulée dans son intégralité et a invoqué une application erronée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

11      Par décision du 31 mars 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition, en rejetant ainsi le recours formé par la requérante. En concentrant son examen uniquement sur la marque antérieure CFA, la chambre de recours a considéré en substance, notamment, que les produits et les services visés par la marque demandée étaient identiques ou similaires à ceux couverts par ladite marque antérieure. Le public pertinent des produits et des services en cause se composerait tant du grand public, dont le niveau d’attention serait moyen, que de professionnels, dont le niveau d’attention serait élevé. Le public ayant le niveau d’attention le moins élevé devrait être pris en considération dans le cadre de l’examen. Sur le plan visuel, les deux signes présenteraient un degré moyen de similitude. Sur le plan phonétique, les marques en conflit seraient très fortement ou faiblement similaires en fonction de la prononciation de l’élément initial de la marque demandée, à savoir l’élément « cefa ». Sur le plan conceptuel, les signes ne seraient pas similaires. La marque antérieure posséderait, quant à elle, un caractère distinctif moyen. Enfin, la chambre de recours a considéré que, compte tenu de la notion d’image imparfaite gardée en mémoire, et du « principe d’interdépendance », eu égard aux similitudes existant entre les signes en conflit et compte tenu de l’identité et de la similitude des produits et des services en cause, il existait un risque de confusion dans l’esprit de la partie anglophone du public pertinent. Au point 55 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté que, si la marque demandée était considérée dans son ensemble, le public pertinent comprendrait que la lettre « e » de son acronyme signifierait « European ». Ainsi, les consommateurs, « y compris le public professionnel », pourraient être amenés à croire que le titulaire de la marque antérieure CFA a lancé une nouvelle ligne de produits et de services désignés par la marque demandée. Il existerait dès lors un risque que le « public pertinent » associe les marques, en pensant que la marque demandée est la branche européenne d’une entité mondiale ou nationale CFA.

 Procédure et conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

13      L’EUIPO et l’intervenant concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 14 décembre 2015, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

15      Dans la mesure où les dispositions matérielles pertinentes applicables en l’espèce sont identiques dans leur version résultant, respectivement, du règlement no 207/2009 et du règlement 2017/1001, le fait que les parties se soient référées aux dispositions de ce dernier règlement demeure sans incidence aux fins de la présente procédure, et il convient d’interpréter leurs arguments comme étant fondés sur les dispositions pertinentes du règlement no 207/2009 [arrêt du 5 octobre 2020, nanoPET Pharma/EUIPO – Miltenyi Biotec (viscover), T‑264/19, non publié, EU:T:2020:470, point 23].

 Sur le risque de confusion, visé à larticle 8, paragraphe 1, sous b), premier membre de phrase, du règlement no 207/2009

16      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. Dans le cadre de ce moyen, elle soutient que la chambre de recours a commis des erreurs lorsqu’elle a procédé à la comparaison des signes en conflit, afin d’établir si ces signes étaient ou non similaires. Ce serait donc à tort que la chambre de recours aurait conclu à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 207/2009.

17      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante.

18      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

19      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

20      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits ou des services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

21      Enfin, aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

22      C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu d’examiner les différents griefs de la requérante.

23      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a retenu que le public pertinent aux fins de l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion en l’espèce était constitué par les consommateurs de l’Union (point 31 de la décision attaquée). Étant donné que la marque demandée est composée de mots anglais, il conviendrait, selon la chambre de recours, de se concentrer en l’espèce sur le public anglophone (point 33 de la décision attaquée). Le public pertinent des produits et des services visés par la marque demandée et par la marque antérieure CFA, se composerait à la fois du grand public intéressé par l’éducation et par la formation et d’un public spécialisé constitué de professionnels des affaires et de professionnels du domaine de la finance, possédant des connaissances ou une expertise spécifiques (point 30 de la décision attaquée). Le niveau d’attention du public pertinent varierait donc, selon la chambre de recours, de moyen à élevé. En l’espèce, du fait que les produits et les services en cause sont destinés à la fois aux professionnels et au grand public, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé devrait être pris en considération (points 30 et 50 de la décision attaquée).

24      Puisque la marque demandée contient des mots anglais, la chambre de recours était en droit de se concentrer sur le public anglophone en l’espèce, de sorte que cette constatation, qui n’est d’ailleurs pas contestée par la requérante, doit être entérinée. Il est également exact que, pour les motifs exposés par la chambre de recours, le public pertinent se compose à la fois du grand public et de professionnels. Enfin, il est également correct de considérer que le public professionnel dispose d’un niveau élevé d’attention.

25      Toutefois, en ce qui concerne la question de savoir quel était le niveau d’attention du grand public pertinent au regard des produits et des services en cause, il y a lieu de s’écarter des appréciations qui découlent du point 30 de la décision attaquée, et ce en dépit du fait que la requérante n’a pas contesté ces appréciations dans sa requête.

26      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, même si la partie requérante n’a pas contesté une appréciation erronée des faits effectuée par une chambre de recours de l’EUIPO dans sa décision, lorsqu’il est appelé à apprécier la légalité d’une telle décision, le Tribunal ne saurait être lié par une appréciation erronée y figurant, dans la mesure où ladite appréciation fait partie des conclusions dont la légalité est contestée devant le Tribunal (arrêt du 18 octobre 2012, Neuman et Galdeano del Sel/Baena Grupo, C‑101/11 P et C‑102/11 P, EU:C:2012:641, point 40). Or, en l’espèce, les appréciations de la chambre de recours concernant le niveau d’attention du grand public font partie des conclusions dont la légalité est contestée devant le Tribunal.

27      En premier lieu, en ce qui concerne, plus précisément, le niveau d’attention du grand public au regard des services d’éducation et de formation en cause relevant de la classe 41 (voir points 3 et 7 ci‑dessus), il y a lieu de relever les éléments suivants.

28      D’une part, il a été jugé que, si les services d’éducation et de formation relevant de la classe 41 en général ont parfois un coût élevé, ils peuvent également être proposés pour des prix plus modestes. En outre, de tels services n’impliquent pas nécessairement d’engagements à long terme. De même, si les services en cause ne sont pas de consommation courante, leur acquisition n’est pas systématiquement précédée d’un long processus de réflexion. Pour ces raisons, s’agissant de tels services, le Tribunal a considéré que l’existence d’un niveau d’attention « accru » de la part du grand public ne saurait être présumée [arrêt du 24 septembre 2019, IAK – Forum International/EUIPO – Schwalb (IAK), T‑497/18, non publié, EU:T:2019:689, points 32 et 33].

29      D’autre part, il a été jugé que les services de formation relevant de la classe 41 en général visaient à étendre des connaissances et à développer des compétences, généralement à travers un engagement en termes de temps et de ressources de la part du public pertinent. Selon cette partie de la jurisprudence, ces services ne répondent pas à un besoin courant ou répétitif, mais à un intérêt personnel ou de loisir. En principe, le grand public y aura recours pour acquérir des connaissances et aptitudes à des fins de réadaptation professionnelle et fonctionnelle ou pour développer une certaine expertise technique. Pour ces raisons, le Tribunal a conclu que, s’agissant de tels services, le niveau d’attention du consommateur moyen du public pertinent était « élevé » [arrêt du 9 décembre 2020, Man and Machine/EUIPO – Bim Freelance (bim ready), T‑819/19, non publié, EU:T:2020:596, point 35].

30      Aux fins du présent litige, il n’y a pas lieu de décider laquelle des deux solutions exposées aux points 28 et 29 ci‑dessus devrait être suivie. En effet, à la différence de la catégorie de services dont il est question dans les arrêts du 24 septembre 2019, IAK (T‑497/18, non publié, EU:T:2019:689), et du 9 décembre 2020, bim ready (T‑819/19, non publié, EU:T:2020:596), à savoir les services de formation en général, les services d’éducation et de formation en cause sont des services ayant une nature spécifique, en ce qu’ils touchent au domaine de l’analyse financière.

31      Selon une jurisprudence récente, s’agissant des services de formation se rapportant à l’analyse financière, relevant de la classe 41, les consommateurs intéressés par ces services, même s’ils appartiennent au grand public, y consacreront une attention particulière lors du choix des programmes de leur préférence, normalement après une étude et une comparaison des offres d’éducation [arrêt du 9 juin 2021, Global Chartered Controller Institute/EUIPO – CFA Institute (CCA CHARTERED CONTROLLER ANALYST CERTIFICATE), T‑266/20, non publié, EU:T:2021:342, point 47]. Dès lors que les consommateurs n’ont pas recours aux services de formation financière de manière quotidienne, leur niveau d’attention ne peut pas équivaloir à celui dont ils font preuve à l’égard de services de consommation courante, mais, en revanche, il doit être considéré nécessairement comme étant plus élevé (arrêt du 9 juin 2021, CCA CHARTERED CONTROLLER ANALYST CERTIFICATE, T‑266/20, non publié, EU:T:2021:342, point 48).

32      Pour les raisons exposées aux points 47 et 48 de l’arrêt du 9 juin 2021, CCA CHARTERED CONTROLLER ANALYST CERTIFICATE (T‑266/20, non publié, EU:T:2021:342), il convient de se rallier à l’analyse et à la conclusion y figurant. Au regard des services d’éducation et de formation relevant de la classe 41 en cause, contrairement à ce qui ressort du point 30 de la décision attaquée, il y a dès lors lieu de retenir que le niveau d’attention du grand public est élevé.

33      Au demeurant, il importe d’ajouter que, lors de l’audience, à la suite d’une question du Tribunal, les parties au litige ont pu présenter leurs observations sur la question de savoir de quel niveau d’attention pourrait faire preuve le grand public en ce qui concerne les services d’éducation et de formation en cause relevant de la classe 41, y compris l’interprétation qui devrait être retenue en l’espèce à l’aune des trois arrêts cités aux points 28, 29 et 31 ci‑dessus.

34      En second lieu, en ce qui concerne les produits et les services autres que les services d’éducation et de formation compris dans la classe 41, c’est‑à‑dire les produits relevant des classes 9, 16, et les services relevant de la classe 42, il convient de constater que ceux‑ci sont également liés au domaine de l’analyse financière. En ce qui concerne ces produits et ces services, le niveau d’attention du grand public doit être également considéré comme étant élevé, à l’instar de ce qui a été relevé au point 32 ci‑dessus.

35      Pour les raisons exposées précédemment, il convient de retenir que la conclusion de la chambre de recours visant à considérer que le niveau d’attention du grand public serait moyen en ce qui concerne les services d’éducation et de formation relevant de la classe 41 en cause est constitutive d’une erreur de droit.

36      Cette erreur a vicié l’ensemble du raisonnement développé, par ladite chambre, aux points 50 à 54 de la décision attaquée, lesquels portent sur l’appréciation globale d’un éventuel risque de confusion au regard de la marque demandée et de la marque antérieure CFA.

37      Dans le cadre du présent litige, l’EUIPO et l’intervenant ont, certes, indiqué que, lorsque la chambre de recours a exposé ses conclusions quant à l’existence d’un « risque d’association », au point 55 de la décision attaquée, ladite chambre ne s’était pas bornée à opérer ses constats en se fondant uniquement sur l’existence d’un niveau d’attention moyen, mais qu’elle aurait pris en compte le niveau d’attention élevé, qui est propre aux professionnels. Selon l’EUIPO et l’intervenant, il devrait être considéré en l’espèce que la chambre de recours avait examiné les services pertinents également du point de vue d’un niveau d’attention élevé.

38      Cet argument ne saurait, toutefois, convaincre. L’argument mentionné au point 37 ci‑dessus équivaut à transposer la mention figurant au point 55 de la décision attaquée, quant à l’existence d’un niveau d’attention élevé de la part des professionnels, au raisonnement figurant aux points 50 à 54 de la même décision. Un tel raisonnement contredirait les prémisses sur lesquelles reposent ces derniers points de la décision attaquée et ne saurait, de ce fait, être retenu.

39      En effet, au point 50 de la décision attaquée, après avoir indiqué que, selon elle, les produits et les services en cause « s’adress[ai]ent au grand public dont le degré d’attention est moyen et à un public professionnel dont le degré d’attention est supérieur à la normale », la chambre de recours a poursuivi son raisonnement en déclarant : « Étant donné que, selon une jurisprudence constante, le grand public est plus enclin à la confusion, l’examen s’est poursuivi sur cette base. » La chambre de recours ne s’est donc pas proposé d’analyser et n’a pas analysé l’existence d’un risque de confusion en prenant en compte, comme critère d’appréciation, un niveau d’attention élevé du grand public pour les produits et les services en cause, mais uniquement un niveau d’attention moyen de ce public. En argumentant comme elle l’a fait au point 50 de la décision attaquée, la chambre de recours a exclu vouloir procéder à une analyse du risque de confusion en prenant en compte un niveau d’attention élevé du grand public. Cette erreur a un impact sur l’analyse globale du risque de confusion à laquelle la chambre de recours a procédé. À la suite de l’annulation de la décision attaquée, il lui appartiendra de reprendre cette analyse en tenant compte du niveau d’attention du grand public tel qu’il a été déterminé dans le présent arrêt.

40      L’autre motif pour lequel les conclusions et les prémisses retenues par la chambre de recours concernant le risque d’association, mentionné au point 55 de la décision attaquée, ne peuvent être transposées à l’appréciation globale du risque de confusion, figurant aux points 50 à 54 de cette décision, est le fait que, selon la logique intrinsèque de la décision attaquée, et malgré l’existence de l’expression « en particulier » par laquelle ledit point 55 débute, les appréciations de la chambre de recours figurant dans ce point 55 ne visaient à étayer qu’à titre subsidiaire la conclusion relative à la présence d’un risque de confusion, étant rappelé que cette conclusion apparaît déjà au point 54 de ladite décision. Sans une explication supplémentaire, laquelle n’a pas été fournie par l’EUIPO ni par l’intervenant en l’espèce, ce que la chambre de recours a relevé dans le cadre d’un raisonnement subsidiaire ne saurait être transposé aux affirmations de cette même chambre dans le cadre de l’examen principal.

 Sur le risque dassociation, visé à larticle 8, paragraphe 1, sous b), dernier membre de phrase, du règlement no 207/2009

41      Ainsi qu’il a d’ores et déjà été relevé, la chambre de recours a, au point 55 de la décision attaquée, invoqué, à titre subsidiaire, l’existence d’un risque d’association en ce qui concerne la marque demandée et la marque antérieure CFA.

42      Par un argument soulevé au point 72 de la requête, la requérante a remis en cause le bien‑fondé de l’affirmation faite par la chambre de recours au point 55 de la décision attaquée, en déclarant qu’il s’agirait d’une affirmation se fondant sur des hypothèses erronées et déconnectées de la réalité du marché. Selon la requérante, les entreprises ne modifient jamais leurs marques en ajoutant une nouvelle lettre à leurs marques ou leurs acronymes habituels.

43      L’argument soulevé au point 72 de la requête équivaut à déclarer que la marque demandée ne présente pas de caractéristiques de nature à créer une association entre le signe demandé et une éventuelles série de marques antérieures, puisque ce n’est pas ainsi que les entreprises procèdent. Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que ledit argument de la requérante vise à contester également, de par sa substance, les appréciations de la chambre de recours concernant l’existence d’un risque d’association.

44      L’EUIPO et l’intervenant contestent ce grief de la requérante.

45      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le risque d’association ne peut être invoqué que si deux conditions sont réunies cumulativement. En premier lieu, doit être démontrée l’existence d’une série d’enregistrements antérieurs ou, à tout le moins, d’un nombre de marques susceptibles de constituer une série. En second lieu, la marque demandée doit non seulement être semblable aux marques appartenant à la série, mais également présenter des caractéristiques susceptibles de la rattacher à la série [voir, en ce sens, arrêts du 23 février 2006, Il Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE), T‑194/03, EU:T:2006:65, points 125 à 127, et du 25 novembre 2014, UniCredit/OHMI, T‑303/06 RENV et T‑337/06 RENV, EU:T:2014:988, point 58].

46      En l’espèce, en comparant la marque demandée uniquement avec la marque antérieure CFA, la chambre de recours n’a pas vérifié l’existence d’une série de marques antérieures à laquelle le grand public pourrait associer la marque demandée. En particulier, la chambre de recours n’a pas examiné la question de savoir si les marques invoquées par l’intervenant dans le cadre de son opposition, telles que mentionnées au point 7 ci‑dessus, constituaient effectivement une série de marques.

47      Dès lors, l’une des conditions matérielles inhérentes à la notion de risque d’association, à savoir l’existence d’une série de marques, n’a pas été établie par la chambre de recours.

48      L’examen figurant au point 55 de la décision attaquée est donc entaché d’une erreur de droit, de sorte que les appréciations y figurant qui concernent le niveau d’attention élevé des professionnels ne peuvent, à elles seules, justifier le dispositif de la décision attaquée.

49      Les erreurs identifiées aux points 35 et 47 ci‑dessus ne peuvent avoir pour conséquence que l’annulation de la décision attaquée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs invoqués par la requérante dans le cadre de son moyen.

 Sur les dépens

50      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En l’espèce, l’EUIPO et l’intervenant ont succombé. La requérante n’ayant conclu qu’à la condamnation de l’EUIPO aux dépens devant le Tribunal, il y a lieu de condamner ce dernier à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante dans le cadre de la présente instance.

51      En application de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, l’intervenant supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 31 mars 2020 (R 1082/2019-5) est annulée.

2)      L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par European Federation of Financial Analysts’ Societies (EFFAS).

3)      CFA Institute supportera ses propres dépens.

Tomljenović

Schalin

Škvařilová-Pelzl

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 décembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.