Language of document : ECLI:EU:T:2021:922

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

21 décembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne verbale ARCH FIT – Motifs absolus de refus – Absence de caractère distinctif – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑598/20,

Skechers USA, Inc. II, établie à Manhattan Beach, Californie (États‑Unis), représentée par Mmes T. Holman, A. Reid, solicitors, Mes J. Bogatz et Y. Stone, avocates,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Scardocchia et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 29 juillet 2020 (affaire R 2631/2019-1), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal ARCH FIT comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović (rapporteure), présidente, P. Škvařilová‑Pelzl et M. I. Nõmm, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 septembre 2020,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 8 décembre 2020,

à la suite de l’audience du 7 septembre 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 3 juin 2019, la requérante, Skechers USA, Inc. II, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal ARCH FIT.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Chaussures ».

4        Par décision du 26 septembre 2019, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement de la marque demandée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec son article 7, paragraphe 2.

5        Le 20 novembre 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 29 juillet 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, au motif que la marque demandée était descriptive en ce qui concernait les produits visés au point 3 ci-dessus et dépourvue de caractère distinctif.

7        En particulier, premièrement, elle a considéré en substance que, au regard des produits en cause, le public pertinent était constitué du grand public anglophone au sein de l’Union européenne. Deuxièmement, aux termes d’une analyse concernant la signification des mots anglais « arch » et « fit » au regard des produits en cause, elle a relevé que, pour ce qui était de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, pour le public pertinent la marque demandée décrivait une « caractéristique aisément reconnaissable des produits proposés ». Plus précisément, lorsqu’il sera en présence du signe verbal ARCH FIT, le consommateur comprendra sans effort et immédiatement que les chaussures en cause sont spécialement conçues pour épouser la voûte plantaire de l’utilisateur. Troisièmement, la chambre de recours a constaté que la marque demandée était également et nécessairement dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Du reste, l’expression « arch fit » n’aurait rien de fantaisiste, d’arbitraire ni de stimulant sur le plan intellectuel au regard des produits en cause. Quatrièmement, la chambre de recours a estimé que l’invocation, par la requérante, de divers enregistrements de marques de l’Union européenne antérieurs et enregistrements internationaux désignant l’Union européenne antérieurs n’était pas susceptible de remettre en cause la légalité du refus d’enregistrement de la marque demandée. En effet, selon elle, les décisions adoptées en première instance par l’EUIPO ne sauraient lier ni les chambres de recours ni le juge de l’Union. En outre, aucun des exemples invoqués par la requérante n’aurait porté sur une marque identique à celle faisant l’objet du recours introduit devant elle. En tout état de cause, il n’existerait pas de contradiction manifeste entre la solution retenue dans la décision attaquée et celles appliquées dans les enregistrements antérieurs invoqués par la requérante. Le rappel, par la requérante, de l’existence d’un enregistrement de la marque ARCH FIT aux États-Unis ne serait pas pertinent, étant donné que le régime des marque de l’Union serait un système autonome.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

9        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

10      À l’appui du présent recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sousc), du règlement 2017/1001

11      La requérante estime que, en considérant que la marque demandée était descriptive, la chambre de recours a commis une erreur de droit. La chambre de recours aurait mal appliqué les exigences relatives à l’appréciation du caractère descriptif d’une marque au cas d’espèce.

12      Ainsi, selon la requérante, en premier lieu, c’est à tort que la chambre de recours a conclu que, en ce qui concernait l’expression « arch fit », une seule signification viendrait naturellement à l’esprit du public pertinent. Le terme « arch » n’évoquerait pas automatiquement la voûte plantaire d’un pied humain. Il en irait de même pour le mot « fit ».

13      En deuxième lieu, la requérante estime que, dans la mesure où les chaussures sont souvent utilisées pour faire de l’exercice physique, il n’est pas compréhensible que la chambre de recours ait, dans la décision attaquée, écarté la possibilité que le terme « fit » puisse être compris comme se rapportant à l’aptitude physique. De fait, la marque ARCH FIT pourrait tout aussi bien signifier que les chaussures désignées par celle-ci faciliteraient l’exercice de la course à pied ou d’autres exercices physiques, ou encore que le fait de porter ces chaussures aurait une influence sur la solidité de la voûte plantaire. Toutes ces options auraient été ignorées, à tort, par la chambre de recours.

14      En troisième lieu, lorsqu’elle a indiqué que l’expression « arch fit », prise dans son ensemble, ne serait « ni incorrecte d’un point de vue syntaxique ni inattendue sur le plan conceptuel » (voir point 30 de la décision attaquée), la chambre de recours aurait méconnu le fait que, si un signe était correct d’un point de vue grammatical, il n’en résultait pas pour autant qu’il serait immédiatement compris comme étant en relation avec les produits et les services en cause. En réalité, même un énoncé grammaticalement correct, ne présentant pas de particularités syntaxiques, n’aurait pas nécessairement un caractère descriptif.

15      En quatrième lieu, la requérante observe que la chambre de recours a commis une erreur en estimant, au même point 30 de la décision attaquée, que les expressions « slim fit » et « loose fit », qui seraient couramment utilisées dans le domaine des vêtements et qui sont similaires à l’expression « arch fit », confirmaient le caractère descriptif de la marque demandée. En effet, l’emploi des expressions « slim fit » et « loose fit » serait rare et inhabituel pour des chaussures. Par voie de conséquence, l’affirmation de la chambre de recours, au point 31 de la décision attaquée, selon laquelle la signification attribuée au signe ARCH FIT en ce qui concerne des chaussures « v[enai]t d’autant plus facilement à l’esprit » serait, elle aussi, infondée.

16      En cinquième lieu, la requérante prétend que la chambre de recours a considéré à tort que le public pertinent établirait immédiatement un lien direct et spécifique entre le signe ARCH FIT et certaines caractéristiques des chaussures.

17      Premièrement, il serait erroné de considérer qu’il existe un besoin particulier du public pertinent pour des chaussures épousant la voûte plantaire. Si un tel besoin existait réellement, davantage d’entreprises feraient de la publicité pour une telle caractéristique.

18      Deuxièmement, le public pertinent n’utiliserait pas l’expression « arch fit » pour décrire une chaussure. En effet, il n’existerait pas de pied particulier auquel devraient convenir les chaussures. Le pied d’une personne pourrait être normal, plat ou creux, de sorte qu’il n’existerait pas de « solution idéale » qui conviendrait à chacun ni donc d’« “arch fit” proprement dit ». Cette expression nécessiterait donc un effort d’interprétation pour en déterminer le sens.

19      Troisièmement, la volonté d’établir, en l’espèce, un lien direct et spécifique entre la marque demandée et les produits en question irait à l’encontre de la jurisprudence du Tribunal. Il résulterait, en substance, des arrêts du 7 mai 2019, Fissler/EUIPO (vita) (T‑423/18, EU:T:2019:291), et du 25 juin 2020, Off‑White/EUIPO (OFF‑WHITE) (T‑133/19, non publié, EU:T:2020:293), que le simple fait que des chaussures puissent être disponibles dans une certaine couleur (blanc et « blanc cassé » respectivement) ne signifierait pas que cette couleur serait effectivement perçue par le public pertinent comme étant une caractéristique intrinsèque et inhérente à la nature de ces produits. Or, si la chambre de recours avait appliqué ce raisonnement à la marque demandée, elle aurait dû considérer que le simple fait qu’une chaussure puisse éventuellement convenir à la voûte plantaire de certains consommateurs ne constituait pas une caractéristique générale de ce produit pour l’ensemble du public pertinent et n’aurait pas pu affirmer qu’il existait un lien direct et immédiat entre l’expression « arch fit » et les chaussures.

20      En sixième lieu, ce serait à tort que, au point 40 de la décision attaquée, la chambre de recours aurait rejeté, comme étant non fondé, l’argument de la requérante selon lequel le signe demandé « [étai]t flou, fantaisiste ou prim[ait sur] la somme de ses éléments ». En effet, l’expression « arch fit » n’existerait pas en soi. Le fait que l’expression ne soit utilisée que par la requérante et qu’elle ne figure dans aucun dictionnaire en attesterait. Certes, il ne serait pas nécessaire qu’une expression figure dans un dictionnaire pour qu’elle puisse être considérée comme étant descriptive, mais le fait qu’elle ne s’y trouve pas constituerait un indice important de son absence de caractère descriptif.

21      En septième lieu, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les enregistrements d’autres marques comportant les mots « arch » ou « fit », se rapportant à des produits relevant de la classe 25, ne pouvaient avoir d’incidence « sur le caractère enregistrable de la marque demandée », puisqu’ils différaient du cas d’espèce (voir points 57 et suivants de la décision attaquée), ne serait pas correcte. La requérante rappelle dans ce contexte que, après un rejet temporaire, la marque de l’Union européenne verbale EXACT FIT avait été acceptée par l’EUIPO pour des chaussures, au motif que cette marque disposait d’un caractère distinctif pour les produits relevant des classes 18 et 25 dans la mesure où il n’existerait pas de « taille fixée universellement à laquelle d[eva]it correspondre chaque article ». Ce raisonnement aurait également été applicable en l’espèce. De plus, au point 57 de la décision attaquée, la chambre de recours aurait commis une autre erreur en indiquant qu’aucun des exemples de marques cités par la requérante devant l’EUIPO ne portait sur une marque identique à celle faisant l’objet du présent recours et que les produits contestés n’étaient pas comparables. Or, pour que les mêmes principes de droit s’appliquent à la marque demandée, il ne serait nullement nécessaire que les marques antérieures soient identiques à la marque litigieuse, mais il suffirait qu’elles soient comparables.

22      En huitième lieu, la requérante soutient que la marque demandée n’est pas différente d’autres marques dont l’enregistrement avait été accepté par le Tribunal, au motif que ces marques étaient non descriptives, voire distinctives. À cet égard, elle renvoie à plusieurs arrêts du Tribunal.

23      En neuvième lieu, compte tenu de la méconnaissance, par la chambre de recours, de la pratique décisionnelle de l’EUIPO et de la jurisprudence du juge de l’Union, la requérante estime qu’il y a lieu de constater que le rejet de l’enregistrement de la marque demandée viole non seulement l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, mais aussi le principe d’égalité de traitement.

24      L’EUIPO conteste ces arguments de la requérante.

25      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. Selon le paragraphe 2 du même article, le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

26      En interdisant l’enregistrement en tant que marque de tels signes ou indications, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou les indications descriptives des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (voir arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 31 et jurisprudence citée).

27      Selon la jurisprudence, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative [arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 30, et du 7 juillet 2011, Cree/OHMI (TRUEWHITE), T‑208/10, non publié, EU:T:2011:340, point 13].

28      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement et sans autre réflexion une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques (voir arrêt du 7 juillet 2011, TRUEWHITE, T‑208/10, non publié, EU:T:2011:340, point 14 et jurisprudence citée). En outre, il suffit, pour que l’EUIPO oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, que, en au moins une de ses significations potentielles, le signe en cause désigne une caractéristique des produits ou des services visés (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 32).

29      Enfin, il convient de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services visés [arrêts du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 38, et du 7 juillet 2011, TRUEWHITE, T‑208/10, non publié, EU:T:2011:340, point 17].

30      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner les arguments des parties dirigés contre les appréciations de la chambre de recours figurant dans la décision attaquée.

 Sur le public pertinent

31      S’agissant de la perception par le public pertinent du signe dont l’enregistrement est demandé en tant que marque de l’Union européenne, la chambre de recours a, au point 15 de la décision attaquée, considéré que, compte tenu de la nature des produits en cause et du fait que le signe était composé de termes issus de l’anglais, le public pertinent était, en substance, composé du grand public anglophone de l’Union, dont le niveau d’attention serait moyen lors de l’achat des produits en cause, à savoir des chaussures.

32      Cette définition du public pertinent n’est pas contestée par la requérante et doit être confirmée pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés dans la décision attaquée.

33      En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, il suffit qu’un motif absolu de refus existe dans une partie de l’Union pour justifier le refus d’enregistrement d’une marque demandée. Partant, il suffit, en l’espèce, que la marque demandée soit descriptive des produits concernés ou de certaines de leurs caractéristiques pour le public pertinent, à savoir le grand public anglophone de l’Union vivant, par exemple, en Irlande et à Malte, pour qu’elle soit refusée à l’enregistrement.

 Sur le caractère descriptif de la marque demandée

34      Ainsi que cela a déjà été relevé au point 6 ci-dessus, la chambre de recours a retenu que la marque demandée était descriptive en ce qui concerne les produits en cause, à savoir les chaussures. À cet égard, elle a, en substance, indiqué, au point 24 de la décision attaquée, que, même si le mot anglais « arch » pouvait, certes, évoquer différents concepts, par exemple un type de construction ou de structure dans le secteur de la construction, lorsqu’il serait utilisé dans le contexte des chaussures, la signification qui viendrait naturellement à l’esprit du public pertinent était une référence claire à la voûte plantaire du pied humain. Ensuite, au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a exposé, en substance, que, bien que le mot « fit » pût revêtir différentes significations, selon le contexte, et notamment désigner une personne qui est en bonne santé grâce à la pratique d’un sport, lorsque le signe était utilisé pour des chaussures, qui sont censées s’adapter correctement au pied de la personne qui les porte, afin de lui fournir un soutien et un confort appropriés, la signification qui viendrait naturellement à l’esprit du public pertinent serait une référence claire à une chaussure de la bonne taille ou ayant une forme appropriée pour son utilisateur. Compte tenu de ces éléments, la chambre de recours a constaté, aux points 32, 34 et 37 de la décision attaquée, que le signe ARCH FIT serait immédiatement compris par le public pertinent comme une référence directe à une « caractéristique » des chaussures qui serait particulièrement importante pour le public pertinent, à savoir le « fait que les chaussures en cause épousent la voûte plantaire de la personne qui les porte ». La marque décrirait donc directement, dans l’esprit du public pertinent, une « caractéristique aisément reconnaissable des produits [en cause] ».

35      Ces considérations de la chambre de recours appellent les observations suivantes.

36      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le terme « caractéristique » – auquel fait référence la chambre de recours dans la décision attaquée – vise une propriété, facilement reconnaissable par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi que la Cour l’a déjà souligné, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une desdites caractéristiques (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 50).

37      Ensuite, il suffit, pour justifier le refus d’enregistrer une marque, que celle-ci, dans la perception du public pertinent, puisse être utilisée aux fins de désigner une caractéristique actuelle ou potentielle des produits visés, même inexistante en l’état actuel de la technique. Cette possibilité doit être appréciée par rapport à la perception du public pertinent, et non selon la conclusion d’experts scientifiques [arrêt du 16 octobre 2014, Larrañaga Otaño/OHMI (GRAPHENE), T‑458/13, EU:T:2014:891, point 22].

38      Enfin, s’il est indifférent qu’une telle caractéristique soit essentielle ou accessoire sur le plan commercial, une caractéristique, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, doit néanmoins être objective et inhérente à la nature du produit ou du service concerné ainsi qu’intrinsèque et permanente pour ce produit ou ce service (voir arrêt du 7 mai 2019, vita, T‑423/18, EU:T:2019:291, point 44 et jurisprudence citée).

39      En l’occurrence, en premier lieu, dans le contexte des chaussures, le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement avisé, au sein du public pertinent, à savoir le grand public anglophone, percevra l’élément « arch » comme un mot anglais se rapportant à ce qui peut être désigné en anglais par « raised part of the foot formed by a curved section of bones » (partie surélevée du pied formée par une section incurvée d’os). Cette signification est l’une des significations de base, c’est‑à‑dire, non lointaines et non subtiles, de ce mot, comme cela ressort du dictionnaire en ligne destiné aux apprenants de la langue anglaise consultable à l’adresse suivante : https://www.oxfordlearnersdictionaries.com. En présence du mot « arch » désignant des chaussures, le grand public anglophone ne s’engagerait pas dans un processus visant à vérifier, dans son esprit, si d’autres significations du mot « arch » pourraient également être retenues. Dans le contexte des chaussures, il n’hésitera pas à associer ledit mot au pied humain.

40      Quant à l’élément « fit », le grand public anglophone le comprendra comme un verbe qui renvoie directement à la signification des termes anglais « be the right shape and size for somebody/ something » (avoir la bonne forme et la bonne taille pour quelqu’un/ quelque chose), conformément à l’une des premières significations de ce verbe qui est mentionnée dans le dictionnaire en ligne cité au point 39 ci‑dessus. Il s’agit là d’une signification commune et évidente, qui viendra naturellement et sans autre réflexion à l’esprit du public pertinent. L’élément « fit » pourrait également être perçu, par le public pertinent, comme un nom commun renvoyant, dans le contexte de l’espèce, au sens des termes mentionnés dans le dictionnaire mentionné au point 39 ci‑dessus « way that two things match each other or are suitable for each other » (façon dont deux choses se correspondent ou sont adaptées l’une à l’autre), tout comme dans l’expression « a perfect fit » (un ajustement parfait). Le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement avisé, issu du grand public anglophone exclura toute autre signification de l’élément « fit » dans le contexte de l’espèce. En particulier, il ne pensera pas à « fit » au sens que ce terme possède, par exemple, dans des expressions anglaises « a fit of laughter » (un éclat de rire) ou « epileptic fit » (crise d’épilepsie).

41      Sans qu’il soit besoin de s’interroger sur la question de savoir si, dans la marque demandée, le mot « fit » sera plutôt perçu comme un verbe ou comme un nom commun, il y a lieu de constater que, ainsi que l’a relevé à bon droit la chambre de recours aux points 32, 34 et 37 de la décision attaquée, la combinaison des mots anglais « arch » et « fit » sera comprise par le grand public anglophone comme une information selon laquelle les chaussures désignées par la marque demandée sont spécialement conçues pour épouser la voûte plantaire de l’utilisateur.

42      Or, le fait que les chaussures s’adaptent ou doivent s’adapter au pied et, notamment, à la forme de la partie surélevée du pied humain qui est appelée la « voûte plantaire » doit être considéré comme la description de l’une des caractéristiques objective et inhérente à la nature de ces produits ainsi qu’intrinsèque et permanente pour lesdits produits, au sens de la jurisprudence citée aux points 36 à 38 ci-dessus.

43      En deuxième lieu, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, pour qu’une marque constituée d’un mot résultant d’une combinaison d’éléments puisse être considérée comme étant descriptive, il ne suffit pas qu’un éventuel caractère descriptif soit constaté pour chacun de ces éléments. Un tel caractère doit être constaté pour le mot lui-même (arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, EU:C:2004:86, point 96). Cela vaut, mutatis mutandis, pour une expression qui n’est qu’une combinaison d’éléments verbaux. De plus, il y a lieu de rappeler que, en règle générale, la simple combinaison d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé reste elle‑même descriptive desdites caractéristiques. En effet, le simple fait d’accoler de tels éléments sans y apporter de modification inhabituelle, notamment d’ordre syntaxique ou sémantique, ne peut produire qu’une marque composée exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, à désigner des caractéristiques desdits produits ou services (arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, EU:C:2004:86, point 98).

44      Or, en l’espèce, ce ne sont pas uniquement les termes « arch » et « fit » qui sont aptes, en tant que tels, à transmettre un message descriptif en ce qui concerne les chaussures, mais également leur utilisation combinée. Prise dans son ensemble, l’expression « arch fit » ne présente pas une structure grammaticale qui serait à tel point inhabituelle qu’il pourrait être conclu qu’elle modifierait le message que transmettraient lesdits éléments, pris isolément, dans le contexte des chaussures.

45      En troisième et dernier lieu, il y a lieu de constater que, en l’espèce, le rapport existant entre la marque demandée et les produits en cause, à savoir les chaussures, est suffisamment direct et concret, au sens de la jurisprudence citée au point 28 ci-dessus, pour que public pertinent perçoive immédiatement et sans un effort mental particulier ladite marque comme étant la description de l’une des caractéristiques de ces produits. En effet, pour le grand public anglophone, le message transmis par « arch fit » concernant des chaussures sera dépourvu d’ambiguïté, car les mots composant cette expression seront compris conformément à l’une de leurs significations de base, et ladite expression ne présente pas de particularités, d’ordre grammatical ou sémantique, susceptibles de modifier ces significations de base.

46      Compte tenu des appréciations qui précèdent, il y a lieu de conclure que c’est à bon droit que la chambre de recours a retenu, dans la décision attaquée, que le signe ARCH FIT avait un caractère descriptif pour les produits en cause.

47      Aucun des arguments invoqués par la requérante au soutien de son recours ne saurait remettre en cause cette conclusion.

48      En premier lieu, il y a lieu de rejeter comme étant non fondé l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait méconnu le fait qu’un énoncé grammaticalement correct n’a pas nécessairement un caractère descriptif (voir point 14 ci-dessus).

49      En effet, il ne ressort pas de la décision attaquée que la chambre de recours aurait méconnu un tel fait. Il est vrai que, au point 30 de celle‑ci, la chambre de recours a retenu que, « prise dans son ensemble, l’expression “arch fit” n’[était] ni incorrecte d’un point de vue syntaxique ni inattendue sur le plan conceptuel ». Ce faisant, elle a répondu à la question de savoir si le signe ARCH FIT pourrait être immédiatement compris par le public pertinent comme une expression descriptive de certaines caractéristiques des chaussures ou s’il présentait des inexactitudes grammaticales ou des particularités conceptuelles telles qu’il ne pouvait être considéré comme étant descriptif (voir point 44 ci-dessus).

50      Or, le fait qu’un énoncé soit grammaticalement correct ne permet pas de déduire qu’il aurait un caractère descriptif pour les produits en cause, et la chambre de recours s’est gardée d’effectuer une telle déduction dans la décision attaquée. Ainsi, l’argument que la requérante prétend tirer du constat, par ladite chambre, que l’expression « arch fit » composant la marque demandée était grammaticalement correcte est sans rapport direct avec les appréciations qui ont effectivement été portées par celle-ci dans la décision attaquée, de sorte qu’il doit être écarté comme étant inopérant et, en toute hypothèse, non fondé.

51      En deuxième lieu, il y a également lieu de rejeter comme étant non fondé l’argument de la requérante selon lequel, en substance, il aurait été erroné de considérer que la signification du signe ARCH FIT en ce qui concerne des chaussures « v[enai]t d’autant plus facilement à l’esprit » qu’il était similaire aux expressions « slim fit » et « loose fit » qui auraient été couramment utilisées dans le domaine des vêtements (voir point 15 ci-dessus).

52      À cet égard, il y a lieu de relever que, au point 30 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué, d’une part, que « [l]a structure du signe ARCH FIT n’[était] nullement inhabituelle ou peu commune lorsqu’il s’agi[ssai]t de désigner des “articles destinés à couvrir le corps humain” » et, d’autre part, que « la structure du signe ARCH FIT [était] similaire à celle d’expressions telles que “slim fit” ou “loose fit” [qui étaient] couramment utilisées dans le domaine des vêtements ». Sur la base de ces constats, au point 31 de ladite décision, la chambre de recours est parvenue à la conclusion que « [l]a signification du signe ARCH FIT en ce qui concern[ait] les chaussures v[enai]t d’autant plus facilement à l’esprit que les consommateurs [étaie]nt habitués à l’utilisation d’expressions similaires pour d’autres articles destinés à couvrir le corps ».

53      Lorsqu’elle a raisonné de cette manière, la chambre de recours a procédé à une extrapolation de la signification des expressions « slim fit » et « loose fit », telles qu’utilisées dans le contexte des vêtements, et, partant, du caractère descriptif de ces expressions pour les vêtements, à la signification que pourrait posséder l’expression « arch fit » en ce qui concerne des chaussures, étant entendu que le point de départ pour une telle extrapolation était le fait que tant les vêtements que les chaussures étaient des « articles destinés à couvrir le corps humain ».

54      La requérante ne démontre pas en quoi le raisonnement, figurant aux points 30 et 31 de la décision attaquée, qui est visiblement tributaire de l’affirmation selon laquelle les vêtements et les chaussures sont des sous-catégories de la catégorie plus générale des « articles destinés à couvrir le corps humain », serait inexact. Elle se borne à relever que les expressions « slim fit » et « loose fit » sont plutôt inhabituelles pour des chaussures (voir point 22 de la requête). Or, la chambre de recours n’a nullement pris position, dans le cadre de l’extrapolation qu’elle a effectuée dans la décision attaquée, sur le caractère habituel ou inhabituel des expressions « slim fit » et « loose fit » concernant des chaussures. Il s’ensuit que le présent argument doit être écarté comme étant inopérant.

55      En troisième lieu, les arguments de la requérante tirés, en substance, de ce qu’il n’existerait pas un lien direct et spécifique entre le signe ARCH FIT et les chaussures (voir points 16 à 19 ci-dessus) doivent être rejetés comme étant non fondés. Ainsi qu’il a déjà été exposé au point 45 ci‑dessus, le signe ARCH FIT, considéré dans son ensemble, présente, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret avec l’une des caractéristiques des produits en cause.

56      Premièrement, la requérante ne saurait prétendre que la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existait un besoin particulier de chaussures épousant la voûte plantaire d’une personne est incorrecte (voir point 17 ci-dessus). En effet, le fait qu’une chaussure doive s’adapter au pied et également à la forme de la voûte plantaire de son utilisateur est une caractéristique des chaussures et correspond même à un besoin. À cet égard, peu importe la circonstance – d’ailleurs nullement démontrée par la requérante – que les entreprises ne fassent pas de la publicité pour une telle caractéristique (voir point 17 ci-dessus). Toutes les caractéristiques des chaussures ne font pas l’objet de publicité. Le fait que les chaussures soient censées s’adapter correctement au pied de la personne qui les porte, afin de lui fournir un soutien et un confort appropriés, correspond à une attente générale du public pertinent qui ne doit pas nécessairement être rappelée à celui-ci par l’intermédiaire de campagnes publicitaires.

57      Deuxièmement, sont non pertinentes, dans ce contexte, la question de savoir si l’expression « arch fit » ne figure pas dans un dictionnaire ainsi que l’affirmation de la requérante selon laquelle le fait que cette expression ne se trouve pas dans un dictionnaire constituerait un indice important de l’absence de caractère descriptif s’y rattachant (voir point 20 ci-dessus). Contrairement à ce que suggère la requérante, il n’est pas nécessaire de vérifier, en l’espèce, si le fait qu’un terme se trouve ou ne se trouve pas dans un dictionnaire constitue ou non un « indice important » de l’absence de caractère descriptif s’y rattachant. L’utilisation d’un signe ne peut pas être appréciée uniquement en consultant un ouvrage lexical et, partant, de manière abstraite, mais doit être considérée au regard des produits et des services visés. Pour des raisons exposées précédemment, l’expression « arch fit » doit être considérée comme présentant un rapport suffisamment direct et concret avec une des caractéristiques des produits visés par la demande d’enregistrement en cause. Elle est donc descriptive des chaussures indépendamment du fait de son absence dans un quelconque ouvrage lexical.

58      Troisièmement, dans la mesure où la requérante avance que l’expression « arch fit » nécessiterait un effort d’interprétation de la part du public pertinent pour en déterminer le sens, puisque ledit public n’utiliserait pas cette expression pour décrire une chaussure ou l’une de ses caractéristiques, car il n’existerait pas de « solution idéale » qui conviendrait à chaque utilisateur (voir point 18 ci-dessus), cet argument doit être rejeté comme étant non fondé, au regard des appréciations qui ont été portées au point 45 ci-dessus. En réalité, l’expression « arch fit » et les produits en cause présentent un rapport suffisamment direct et concret pour que le public pertinent perçoive celle-ci comme la description de l’une des caractéristiques des chaussures, et ce sans aucun effort d’interprétation ni processus de réflexion. En effet, le public pertinent est constitué, en l’espèce, du grand public anglophone pour lequel les mots anglais « arch » et « fit » et leur combinaison dans l’expression « arch fit » ne posent aucune difficulté particulière d’interprétation en ce qui concerne des chaussures.

59      Quatrièmement, l’argument tiré de l’existence d’une incohérence entre les appréciations de la chambre de recours quant au lien direct et spécifique entre la marque demandée et les produits en question, d’une part, et la jurisprudence récente du Tribunal, d’autre part (voir point 19 ci-dessus), doit être écarté pour les motifs suivants.

60      Certes, dans les arrêts du 7 mai 2019, vita (T‑423/18, EU:T:2019:291), et du 25 juin 2020, OFF-WHITE (T‑133/19, non publié, EU:T:2020:293), le Tribunal s’est interrogé sur le fait de savoir si le blanc et la couleur appelée « blanc cassé » présentaient un rapport direct et immédiat avec la nature des produits faisant l’objet du litige, à savoir, notamment, des outils et appareils de cuisine (récipients pour le ménage, robots de cuisine, etc.) dans l’affaire T‑423/18, et des articles d’usage personnel (savons, bijoux etc.) dans l’affaire T‑133/19. Au point 45 de ces arrêts, le Tribunal a jugé que la couleur blanche et le « blanc cassé » étaient des aspects purement accidentels et contingents n’ayant aucun rapport direct et immédiat avec la nature des produits en cause, dès lors que lesdits produits étaient disponibles dans une multitude d’autres couleurs. Par conséquent, le Tribunal n’a pu conclure que lesdites couleurs spécifiques concernées étaient une caractéristique inhérente à la nature de ces mêmes produits.

61      Contrairement à une couleur, qui est, certes, un aspect accidentel et contingent non seulement s’agissant des produits qui étaient en cause dans les affaires T‑423/18 et T‑133/19 mais aussi en ce qui concerne les chaussures, le fait qu’une chaussure doive s’adapter à la voûte plantaire correspond à l’une des caractéristiques de ces produits. Il s’agit là d’une caractéristique objective, car habituelle et attendue, qui est inhérente à la nature des chaussures. La jurisprudence du Tribunal citée par la requérante (voir point 19 ci-dessus) n’étant pas développée à partir de la même prémisse, l’argument de la requérante tiré d’une incohérence existant entre celle-ci et les appréciations de la chambre de recours constatant l’existence d’un lien direct entre la marque demandée et les produits visés par cette dernière doit être écarté comme étant non fondé.

62      En quatrième lieu, le fait que l’expression « arch fit » n’existe pas en tant que telle (voir point 20 ci-dessus) et, notamment, qu’elle ne figure pas dans les dictionnaires n’a aucune incidence sur la conclusion que cette expression est descriptive de l’une des caractéristiques des chaussures. En effet, un grand nombre d’expressions pourvues d’un caractère descriptif n’existent pas « en soi », sans que cela préjuge qu’elle pourra être perçue par le public pertinent comme étant descriptive des produits en cause ou de l’une de leurs caractéristiques si jamais elle venait à être employée [voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2007, BORCO-Marken-Import Matthiesen/OHMI (Caipi), T‑405/04, non publié, EU:T:2007:315, point 35, et du 14 décembre 2011, Häfele/OHMI (Vorfront), T‑531/10, non publié, EU:T:2011:745, point 26].

63      En cinquième lieu, l’argument lié au fait que l’EUIPO  ait, dans sa pratique décisionnelle antérieure, accepté d’enregistrer des marques composées des mots anglais « arch » ou « fit » se rapportant à des produits relevant de la classe 25 ou des marques comparables à celle dont l’enregistrement a été demandé en l’espèce (voir point 21 ci‑dessus) doit être rejeté, lui aussi, comme non fondé.

64      Certes, il a été jugé que l’EUIPO devait, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne, prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens [arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 74, et du 24 novembre 2015, Intervog/OHMI (meet me), T‑190/15, non publié, EU:T:2015:874, point 39].

65      Toutefois, ces principes doivent se concilier avec le respect du principe de légalité. Par conséquent, la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique (voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 75 et 76, et du 24 novembre 2015, meet me, T‑190/15, non publié, EU:T:2015:874, point 40).

66      De plus, pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 77, et du 24 novembre 2015, meet me, T‑190/15, non publié, EU:T:2015:874, point 41).

67      Enfin, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les décisions concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne que les chambres de recours sont amenées à prendre, en vertu du règlement 2017/1001, relèvent d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne doit être apprécié que sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique antérieure des chambres de recours (arrêts du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, point 47, et du 24 novembre 2015, meet me, T‑190/15, non publié, EU:T:2015:874, point 42).

68      En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a procédé à un examen complet et concret de la marque demandée pour refuser son enregistrement. Au surplus, il résulte de l’examen des autres griefs invoqués par la requérante que cet examen a conduit la chambre de recours à retenir à juste titre le motif absolu de refus d’enregistrement visé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 pour s’opposer à l’enregistrement de la marque demandée. L’examen de la marque demandée au regard de cette disposition n’ayant pu aboutir, à lui seul, à un résultat différent, les allégations de la requérante relatives à l’absence de prise en considération de l’enregistrement d’autres marques ne sauraient prospérer. La requérante ne peut donc utilement invoquer des décisions antérieures de l’EUIPO aux fins d’infirmer la conclusion de la chambre de recours selon laquelle l’enregistrement de la marque demandée est incompatible avec le règlement 2017/1001.

69      En sixième lieu, quant au grief de la requérante selon lequel la marque demandée n’est pas différente d’autres marques dont l’enregistrement aurait été « accepté » par le Tribunal au motif que ces marques étaient non descriptives, voire distinctives (voir point 22 ci-dessus), il importe de relever que, de manière similaire à ce qui vient d’être précisé au sujet de l’incidence de la pratique décisionnelle de l’EUIPO, la requérante ne saurait utilement invoquer des arrêts antérieurs du Tribunal aux fins d’infirmer la conclusion de la chambre de recours selon laquelle l’enregistrement de la marque demandée est incompatible avec le règlement 2017/1001.

70      En septième lieu, compte tenu de ce qui précède, contrairement à ce que fait valoir la requérante (voir point 23 ci-dessus), aucune violation du principe d’égalité de traitement ne saurait être constatée en l’espèce.

71      Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter intégralement le premier moyen.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

72      Selon la requérante, en substance, c’est à tort que la chambre de recours a conclu que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. La chambre de recours aurait également mal appliqué les exigences relatives à l’appréciation du caractère distinctif de la marque.

73      La requérante estime que, lorsque la signification d’un signe est floue ou ambigüe, ou que son interprétation exige du public pertinent un effort mental considérable, il est probable que ce signe sera considéré comme étant distinctif, car ledit public n’établira pas de lien clair et direct entre la marque concernée et les produits et les services pour lesquels la protection est demandée. La requérante indique ensuite, jurisprudence à l’appui, qu’il n’est toutefois pas nécessaire qu’une marque soit le fruit d’une invention pour qu’il soit conclu qu’elle jouit d’un caractère distinctif. Il ne serait pas nécessaire que les marques possèdent un degré particulier de créativité artistique ou d’imagination. Selon la requérante, des mots ordinaires pourraient donc toujours être utilisés comme des marques distinctives et, en réalité, un minimum de caractère distinctif suffirait.

74      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

75      En premier lieu, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés dans cette disposition s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne [arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, EU:C:2002:506, point 29, et du 7 octobre 2015, Chypre/OHMI (XAΛΛOYMI et HALLOUMI), T‑292/14 et T‑293/14, EU:T:2015:752, point 74].

76      Par conséquent, dès lors que, pour les produits en cause, il résulte de l’examen du premier moyen que la marque demandée revêt un caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et que ce motif justifie à lui seul le refus d’enregistrement de cette marque, il n’est pas nécessaire d’examiner le bien-fondé du second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, dudit règlement.

77      En second lieu et en tout état de cause, il convient de rappeler qu’il a été jugé qu’un signe ayant, s’agissant des produits ou des services pour lesquels son enregistrement en tant que marque est demandé, un caractère descriptif, au sens énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, est, sous réserve de l’application du paragraphe 3 de cet article, dépourvu de caractère distinctif en ce qui concerne ces produits ou ces services [voir arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 33 et jurisprudence citée, et du 23 septembre 2015, Mechadyne International/OHMI (FlexValve), T‑588/14, non publié, EU:T:2015:676, point 78 et jurisprudence citée].

78      Or, pour les motifs indiqués aux points 34 à 69 ci-dessus, il y a lieu de considérer que la marque demandée est descriptive, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, en ce qui concerne les chaussures. En outre, la requérante n’a ni invoqué ni démontré que la marque demandée avait acquis, pour les produits en cause, un caractère distinctif acquis par l’usage, de sorte que l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 ne s’applique pas.

79      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que ladite marque était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

80      Il convient donc de rejeter également le second moyen et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

81      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Skechers USA, Inc. II est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 décembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.