Language of document : ECLI:EU:T:2021:934

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

21 décembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Enregistrement international figuratif désignant l’Union européenne – Marque figurative HYALOSTEL ONE – Marques de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et figurative antérieure HyalOne – Marque internationale verbale antérieure HYALO – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑194/21,

Fidia farmaceutici SpA, établie à Abano Terme (Italie), représentée par Mes R. Kunz-Hallstein et H. P. Kunz-Hallstein, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Sliwinska et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Stelis Biopharma Ltd, établie à Karnataka (Inde),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 27 janvier 2021 (affaire R 831/2020-5), relative à une procédure d’opposition entre Fidia Farmaceutici et Stelis Biopharma,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, M. Kancheva (rapporteure) et T. Perišin, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 12 avril 2021,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 23 juin 2021,

vu la désignation d’un autre juge pour compléter la chambre à la suite du décès de M. le juge Berke,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 14 décembre 2017, l’autre partie à la procédure devant l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), Stelis Biopharma Ltd, a présenté une demande d’enregistrement international désignant l’Union européenne auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif représenté ci-après :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Substances et produits médicinaux, nutritionnels et pharmaceutiques ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 84/2018, du 4 mai 2018, sous le numéro 1399649.

5        Le 24 août 2018, la requérante, Fidia Farmaceutici SpA, a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur seize marques antérieures et notamment sur celles présentées ci-après :

–        la marque de l’Union européenne figurative, reproduite ci-après, déposée le 22 février 2010 et enregistrée le 2 août 2010, sous le numéro 8 899 148 pour les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques ; dispositifs médico-chirurgicaux pour le traitement des pathologies traumatiques et dégénératives et pour la chirurgie orthopédique » :

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–        l’enregistrement international de la marque verbale HYALO désignant l’Union européenne, déposée et enregistrée le 29 juillet 2016, sous le numéro 1 328 073, pour les produits relevant, entre autre, de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Préparations pharmaceutiques et vétérinaires ; préparations d’hygiène à usage médical ; nourriture et substances diététiques à usage médical ou vétérinaire, aliments pour bébés ; compléments d’apport alimentaire pour êtres humains et animaux ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières d’obturation dentaire, cire dentaire ; désinfectants ; fongicides ; médicaments ; produits médicaux compris dans cette classe, à savoir substances et préparations de substances de diagnostic, prévention, surveillance, traitement ou soulagement de blessures, maladies ou infirmités ; préparations pharmaceutiques à usage gynécologique et dermatologique ; produits parapharmaceutiques à usage dermatologique et gynécologique ; gels, sprays et crèmes anti-démangeaisons à usage externe [antiprurigineux] ; lubrifiants pour préservatifs ; hydratants vaginaux ; bains vaginaux ; lubrifiants sexuels ; antiseptiques ; détergents à usage médical ; pommades et onguents à usage médical ; lingettes ou gazes imprégnées de préparations antibactériennes, de crèmes médicales ou lotions médicales ; crèmes, sprays, lotions, gels, ou onguents à usage dermatologique, pour la cicatrisation de plaies et pour la réparation de tissus ; préparations pharmaceutiques pour le traitement de la bouche et des dents ; minéraux à usage médical ; vitamines ; compléments diététiques et nutritionnels » ;

–        la marque de l’Union européenne verbale HYALISTIL, enregistrée le 22 octobre 2015 sous le numéro 14 287 338 pour les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques ; médicaments ; produits médicinaux, à savoir substances et compositions pour diagnostic, prévention, surveillance, traitement ou soulagement de maladies ou blessures ; collyres à usage médical ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        Le 2 mars 2020, la division d’opposition a rejeté l’opposition, au motif qu’il n’existait de risque de confusion ni avec la marque de l’Union européenne figurative antérieure HyalOne, qui a été examinée en détail, ni avec les quinze autres marques antérieures.

9        Le 4 mai 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition, en concentrant ses arguments tant sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure HyalOne, que sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque verbale antérieure HYALO.

10      Par décision du 27 janvier 2021, la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours (ci-après la « décision attaquée »). En substance, elle a, en premier lieu, considéré, aux points 19 à 77 de la décision attaquée, qu’il n’existait pas de risque de confusion entre la marque de l’Union européenne figurative antérieure HyalOne et la marque demandée.

11      En deuxième lieu, la chambre de recours a analysé, aux points 78 à 100 de la décision attaquée, s’il existait un risque de confusion entre la marque demandée et la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL. À cet égard, elle a considéré, premièrement, que le public pertinent comprenait à la fois les consommateurs moyens, faisant preuve d’une niveau d’attention supérieur à la moyenne, dans la mesure où les produits affectent leur état de santé, et les professionnels du domaine médical et pharmaceutique, ayant un niveau d’attention élevé. En outre, bien que le territoire pertinent était l’Union européenne, l’analyse s’est concentrée sur la partie italophone du public pertinent pour laquelle l’élément verbal « hyal » de ladite marque antérieure n’évoquerait pas la notion d’acide hyaluronique. Deuxièmement, s’agissant de la comparaison des produits, ladite chambre a conclu que les produits médicinaux et pharmaceutiques visés par la marque demandée étaient identiques aux produits pharmaceutiques couverts par cette marque antérieure et que les substances et produits nutritionnels visés par la marque demandée étaient très similaires aux produits pharmaceutiques couverts par la même marque antérieure. Troisièmement, s’agissant de la comparaison des signes, elle a considéré que ceux-ci présentaient un degré moyen de similitude visuelle et phonétique, étaient neutres d’un point de vue conceptuel, en raison du faible caractère distinctif du mot « one » pour la partie du public pertinent qui ne comprenait pas le terme « hyal », et de l’absence de toute signification des termes « listil » et « lostel », et donc que pour ledit public comprenant le terme « hyal », lesdits signes étaient similaires à un faible degré. Quatrièmement, elle a considéré que la marque antérieure en question avait un caractère distinctif intrinsèque normal, bien qu’elle puisse évoquer l’« acide hyaluronique » pour les professionnels du domaine médical et pharmaceutique italophones ou la partie italophone du grand public susceptibles de percevoir le terme « hyal » comme évoquant l’acide hyaluronique et que la marque demandée avait également un caractère distinctif normal, bien qu’elle puisse faire allusion au terme « one » et possiblement évoquer la notion d’« acide hyaluronique ». Cinquièmement, s’agissant de l’appréciation globale du risque de confusion, elle a conclu que, compte tenu du degré moyen de similitude visuelle et phonétique, de la neutralité conceptuelle (pour le grand public) et de la faible similitude conceptuelle (pour le public professionnel), du caractère distinctif normal des marques en conflit, ainsi que plus particulièrement du niveau d’attention allant de supérieur à la moyenne à élevé, le risque de confusion pouvait être exclu pour le public visé, même si les produits étaient identiques ou complémentaires, eu égard aux différences relevées entre les signes en cause, notamment les différentes voyelles « o » et « e » dans la marque demandée et « i » et « i » dans la marque antérieure et le terme final « one » présent dans la seule marque demandée.

12      En troisième lieu, en ce qui concerne les quatorze autres marques antérieures, y compris la marque verbale antérieure HYALO, la chambre de recours a considéré que celles-ci étaient encore moins similaires à la marque demandée et que la requérante n’avait, en tout état de cause, pas présenté d’arguments spécifiques visant ces autres marques antérieures.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      À l’appui du recours, la requérante invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 165, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, ainsi que des articles 32, sous f), et 39, paragraphe 5, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1). Le deuxième moyen est tiré de la violation des articles 94, paragraphe 1, et 95, paragraphe 1, dudit règlement quant à la comparaison entre la marque verbale antérieure HYALO et la marque demandée. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, lors de la comparaison entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée.

16      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante conteste les appréciations de la chambre de recours quant à l’évaluation du risque de confusion uniquement à l’égard de la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque verbale antérieure HYALO.

17      Par souci d’économie de procédure, le Tribunal estime qu’il convient d’examiner d’abord le troisième moyen.

 Sur letroisième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, lors de la comparaison entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée

18      Le troisième moyen s’articule en cinq griefs. Par le premier grief, la requérante allègue que la chambre de recours a identifié erronément les éléments distinctifs et dominants de la marque demandée et a conduit un examen erroné des similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle entre ladite marque et la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL. Par le deuxième grief, elle critique la conclusion de ladite chambre quant à l’absence de risque de confusion entre lesdites marques dans l’esprit du public pertinent, dans la mesure où, lors de l’appréciation globale, celle-ci se serait fondé sur une appréciation contradictoire quant à la compréhension et à la perception par ledit public de l’élément verbal « hyal ». Par le troisième grief, elle reproche à cette chambre d’avoir commis une erreur d’appréciation s’agissant du poids relatif à accorder aux différents éléments composant la marque demandée. Par les quatrième et cinquième griefs, elle reproche à la même chambre de ne pas avoir tenu compte, d’une part, du principe de l’interdépendance des facteurs dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, et d’autre part, du principe du souvenir imparfait du consommateur après l’achat.

19      Le Tribunal estime opportun d’examiner tout d’abord le deuxième grief du troisième moyen.

20      Selon la requérante, la chambre de recours ne pouvait conclure à l’absence de risque de confusion entre la marque demandée et la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL en se fondant sur une appréciation contradictoire quant à la compréhension et à la perception par ledit public de l’élément verbal « hyal ». Elle souligne que, d’une part, ladite chambre a exclu, au point 97 de la décision attaquée, l’existence d’un tel risque de confusion, compte tenu du niveau d’attention élevé du public pertinent, en considérant que le terme « hyal » de ladite marque antérieure pouvait faire allusion à l’acide hyaluronique pour une partie italophone dudit public et avoir donc un caractère distinctif faible et, d’autre part, cette chambre a retenu, au point 28 de ladite décision, que ladite partie de ce public ne percevraient pas ledit terme comme évoquant la notion d’acide hyaluronique et, au point 88 de cette décision, que le caractère distinctif intrinsèque de ce terme était normal.

21      L’EUIPO rétorque, à cet égard que le deuxième grief du troisième moyen, s’appuyant sur une prétendue contradiction de motifs, concerne en réalité l’appréciation du bien-fondé de la décision attaquée. Par ailleurs, il affirme qu’il conviendrait de réexaminer s’il est raisonnable de supposer, aux fins de l’appréciation à effectuer en l’espèce, qu’une partie importante du public pertinent ne comprendra pas le préfixe « hyal » comme faisant allusion à l’« acide hyaluronique ». Selon lui, seule une partie négligeable du public pertinent, normalement informé, attentif et avisé, et faisant preuve d’un niveau d’attention supérieur à la moyenne, ne comprendra pas que l’élément « hyal » des signes en cause fait allusion au concept d’« acide hyaluronique ». Partant, il conviendrait, pour l’examen au fond de l’affaire, de partir du principe que le terme « hyal » sera compris par le public pertinent et doit donc être considéré comme présentant, tout au plus, un faible degré de caractère distinctif.

22      En vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Elle a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union européenne d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En outre, l’obligation de motivation n’impose pas aux chambres de recours qu’elles fournissent un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements que les parties ont articulés devant elles. Il suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision. Par ailleurs, la motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [voir arrêt du 24 mars 2021, Kfz-Gewerbe/EUIPO – The Blink Fish (Représentation d’un poisson), T‑354/20, non publié, EU:T:2021:156, point 21 et jurisprudence citée].

23      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner le bien-fondé du grief de la requérante.

24      En l’espèce, il ressort du point 97 de la décision attaquée que la chambre de recours a exclu l’existence d’un risque de confusion entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée, en considérant que le terme « hyal » pouvait faire allusion à l’acide hyaluronique pour une partie du public pertinent italophone. Toutefois, au point 28 de ladite décision, ladite chambre avait indiqué qu’elle se concentrerait principalement sur la partie italophone du public qui est plus sujette à confusion, en considérant que cette partie du public pertinent ne percevrait pas ledit terme comme évoquant la notion d’acide hyaluronique.

25      Force est ainsi de constater que le raisonnement de la chambre de recours sur l’existence du risque de confusion se fonde sur des considérations contradictoires.

26      Une lecture combinée des points 26 à 28, 39, 42, 45 à 47, 49, 79, 87, 95 et 97 de la décision attaquée ne permet d’ailleurs pas de déterminer clairement quelle partie du public pertinent a été prise en considération par la chambre de recours pour exclure l’existence d’un risque de confusion entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée.

27      En effet, s’il ressort des points 26 à 28 de la décision attaquée auxquels renvoie le point 79 de la même décision s’agissant de la comparaison entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée, ainsi que du point 39 de ladite décision, que la chambre de recours a concentré son analyse sur la partie du public pertinent la plus sujette à confusion, à savoir la partie italophone du public pertinent, qui ne percevrait pas le terme « hyal » comme évoquant l’acide hyaluronique, qui en italien se traduit par « acido ialuronico »,elle a fait référence dans ce dernier point au reste du public pertinent d’autres États membres de l’Union européenne, dont les langues officielles traduisent le mot « hyaluronique » par des termes très proches, qui percevrait ledit terme comme évoquant l’acide hyaluronique, en indiquant que, pour ce public, ce terme aurait donc un caractère distinctif faible en ce qu’il faisait allusion à un ingrédient des produits concernés.

28      Par ailleurs, au point 42 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que, en vertu d’une jurisprudence constante, il suffisait qu’un risque de confusion n’existe que pour une partie du public pertinent et qu’un risque de confusion était constaté sur la base de la partie du public qui ne comprendrait pas le terme [voir, en ce sens, arrêt du 20 novembre 2017, Stada Arzneimittel/EUIPO – Urgo recherche innovation et développement (Immunostad), T‑403/16, non publié, EU:T:2017:824, points 49 et 54 et jurisprudence citée].

29      Ensuite, aux points 43 à 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, premièrement, que, au moins pour la partie italophone du public pertinent, le terme « hyal » n’évoquerait aucune signification, deuxièmement, que ce consommateur percevrait ce terme comme un mot d’origine étrangère étant donné que les lettres « h » et « y » ne sont utilisées qu’exceptionnellement dans sa langue, troisièmement, que ledit consommateur devrait convertir ledit terme en « acide hyaluronique » et le traduire en italien, à savoir « acido ialuronico », ce qui apparaît peu probable dans la mesure où trop d’étapes mentales étaient nécessaires pour parvenir à la signification associée à l’« acide hyaluronique » et, quatrièmement, qu’aucun élément de preuve ne témoignait de l’usage courant de ce terme pour désigner l’« acide hyaluronique » en italien, ni du fait que les professionnels de la santé italophones faisaient référence à l’« acide hyaluronique » en utilisant le terme en question. Elle en a conclu au point 46 de ladite décision que rien ne portait donc à croire qu’« une partie des consommateurs moyens italophones » comprendrait le terme en cause comme signifiant « acide hyaluronique ».

30      Cependant, au point 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté qu’il ne saurait être exclu qu’« une partie du grand public italophone » puisse également percevoir le terme « hyal » comme faisant référence à l’« acide hyaluronique », sans donner plus de précisions quant à l’importance de la partie de ce public susceptible de le percevoir ainsi. En outre, au point 49 de ladite décision, elle a indiqué qu’il s’ensuivait que ledit terme serait perçu comme significatif ou dépourvu de signification par la partie italophone du public pertinent. Ces considérations, bien que développées dans le cadre de la comparaison entre la marque de l’Union européenne figurative antérieure HyalOne et la marque demandée, demeurent pertinentes dans le cadre de la comparaison entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée, compte tenu de l’identité de l’élément verbal auquel elles se réfèrent, à savoir « hyal ».

31      Dès lors, à la lecture de la décision attaquée, il n’est pas possible de déterminer quelle est, selon la chambre de recours, l’importance de la partie du public pertinent qui percevra la signification du terme « hyal » et celle de l’autre partie dudit public qui ne la percevra pas, ni sur laquelle de ces deux parties de ce public ladite chambre s’est fondée pour apprécier l’existence d’un risque de confusion entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée, ni de savoir si cette chambre a considéré que le niveau d’attention supérieur à la moyenne avait ou pas une incidence sur l’une ou l’autre de ces deux parties du même public.

32      Or, en vertu de la jurisprudence rappelée au point 28 ci-dessus, il n’est pas nécessaire de constater qu’un risque de confusion existe pour la totalité du public visé. En effet, il suffit que ce risque existe pour une partie du public pertinent, à condition qu’il ne s’agisse pas d’une partie négligeable de ce public, pour accueillir une opposition formée contre une demande d’enregistrement d’une marque [voir, en ce sens, arrêt du 10 février 2021, Herlyn et Beck/EUIPO – Brillux (B.home), T‑821/19, non publié, EU:T:2021:80, point 80 et jurisprudence citée].

33      Ainsi l’absence de toute précision sur la partie du public pertinent prise comme point de référence ainsi que sur son importance est susceptible d’affecter le raisonnement de la chambre de recours dans son ensemble. En effet, les considérations relatives au caractère distinctif de l’élément verbal « hyal », figurant aussi bien dans la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL que dans la marque demandée, dépend de la compréhension par le public pertinent de ce terme comme évoquant l’acide hyaluronique, en tant qu’ingrédient souvent présent dans les produits pharmaceutiques ou cosmétiques et donc de la perception par ledit public du caractère descriptif de ce terme. Il en va de même en ce qui concerne les considérations relatives à la possibilité pour le public pertinent de décomposer la marque dans des mots qu’il comprend. De ces considérations, contenues aux points 86 à 89 de la décision attaquée dépendent à leur tour les appréciations concernant la similitude des signes, aux points 90 à 93 de cette décision, et, in fine, le risque de confusion aux points 94 à 100 de la même décision. Dans ces conditions, lesdites appréciations ne peuvent être ni comprises, ni contrôlées par le juge de l’Union.

34      De plus, l’absence de clarté dans la décision attaquée ne peut pas être comblée par les précisions apportées par l’EUIPO dans le cadre de ses écritures. En effet, la référence au caractère négligeable de la partie italophone du public pertinent qui ne comprendra pas la signification de l’élément verbal « hyal » apparaît pour la première fois dans le mémoire en réponse. Il en va de même pour la définition du caractère distinctif faible du terme « hyal », alors que, au point 88 de ladite décision, la chambre de recours a considéré que ce terme avait un caractère distinctif normal, sauf à le contredire dans le cadre des conclusions sur l’inexistence d’un risque de confusion entre la marque de l’Union européenne verbale antérieure HYALISTIL et la marque demandée aux points 97 et 99 de la même décision. Ainsi, même si l’EUIPO cherche à rattacher ces précisions à ce qui est indiqué dans la décision de la division d’opposition, il n’en demeure pas moins que cette chambre a défini le caractère distinctif dudit terme de manière contradictoire aux points 88 et 97 de cette décision, ce qui ne permet pas de comprendre de manière univoque l’appréciation de celle-ci concernant le risque de confusion entre lesdites marques.

35      Compte tenu de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les premier et deuxième moyens ou sur les autres griefs formulés dans le cadre du troisième moyen, il y a lieu d’annuler la décision attaquée dans son ensemble pour violation de l’obligation de motivation et de renvoyer l’affaire devant l’EUIPO, dès lors que le Tribunal ne peut pas substituer sa propre appréciation à celle formulée de manière équivoque par la chambre de recours concernant le public pertinent pris comme point de référence en l’espèce et à toutes les autres appréciations fondées sur celle-ci.

 Sur les dépens

36      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

37      L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 27 janvier 2021 (affaire R 831/2020-5) est annulée.

2)      L’EUIPO supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Fidia farmaceutici SpA dans le cadre de la présente procédure.

Costeira

Kancheva

Perišin

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 décembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.