Language of document : ECLI:EU:T:2023:422

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre élargie)

26 juillet 2023 (*)

« Recours en annulation et en indemnité – Agent contractuel international auprès du représentant spécial de l’Union européenne en Bosnie-Herzégovine – Politique étrangère et de sécurité commune – Résiliation du contrat de travail à la suite du retrait du Royaume-Uni de l’Union – Compétence du juge de l’Union – Nature contractuelle du litige – Absence de clause compromissoire et de clause attributive de juridiction – Articles 263, 268, 272 et 274 TFUE – Règlement (UE) no 1215/2012 – Recevabilité – Identification des parties défenderesses – Notion d’“organe ou organisme de l’Union” – Incompétence et irrecevabilité partielles »

Dans l’affaire T‑776/20,

Robert Stockdale, demeurant à Bristol (Royaume-Uni), représenté par Me N. de Montigny, avocate,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. A. Vitro, M. Bauer et J. Rurarz, en qualité d’agents,

Commission européenne, représentée par MM. D. Bianchi et G. Gattinara, en qualité d’agents,

Service européen pour l’action extérieure (SEAE), représenté par MM. S. Marquardt, K. Kouri, R. Spáč et Mme S. Rodríguez Sánchez-Tabernero, en qualité d’agents,

et

Représentant spécial de l’Union européenne en Bosnie-Herzégovine, représenté par Mme B. Bajic, en qualité d’agent, assistée de Me E. Raoult, avocate,

parties défenderesses,

LE TRIBUNAL (septième chambre élargie),

composé, lors des délibérations, de MM. R. da Silva Passos (rapporteur), président, V. Valančius, Mme I. Reine, MM. L. Truchot et M. Sampol Pucurull, juges,

greffier : Mme H. Eriksson, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 17 novembre 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur les articles 263, 268 et 272 TFUE, le requérant, M. Robert Stockdale, demande, à titre principal, premièrement, que la décision du représentant spécial de l’Union européenne (ci-après le « RSUE ») en Bosnie-Herzégovine du 17 novembre 2020 par laquelle ce dernier a mis fin à son contrat de travail à compter du 31 décembre 2020 (ci-après la « décision de résiliation ») soit déclarée illégale ainsi que la réparation des préjudices qu’il aurait subis du fait de cette décision, deuxièmement, la requalification de sa relation contractuelle avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine en contrat de travail à durée indéterminée (CDI), troisièmement, la réparation des préjudices qu’il aurait subis du fait de la non-adoption par le Conseil de l’Union européenne, par la Commission européenne et par le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) d’un statut clair lui étant applicable et, à titre subsidiaire, que la responsabilité non contractuelle de l’Union soit engagée en cas de rejet de ses conclusions présentées à titre principal.

 Antécédents du litige

2        Le requérant est un ressortissant du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, qui a occupé les fonctions de chef des finances et de l’administration auprès du RSUE en Bosnie-Herzégovine.

3        La nomination des RSUE est prévue à l’article 33 TUE, disposition relevant du chapitre 2, titre V, du traité sur l’Union européenne, relatif à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), aux termes de laquelle « [l]e Conseil peut, sur proposition du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, nommer un représentant spécial auquel est conféré un mandat en liaison avec des questions politiques particulières[ ; l]e représentant spécial exerce son mandat sous l’autorité du haut représentant ».

4        Le 11 mars 2002, le Conseil a adopté l’action commune 2002/211/PESC, relative à la nomination d’un RSUE en Bosnie-Herzégovine (JO 2002, L 70, p. 7).

5        Par la suite, le Conseil a adopté divers actes successifs par lesquels il a nommé, sans interruption, un RSUE en Bosnie-Herzégovine pour un mandat à durée déterminée.

6        À la date de l’introduction du présent recours, le 29 décembre 2020, le RSUE en Bosnie-Herzégovine était nommé par la décision (PESC) 2019/1340 du Conseil, du 8 août 2019, portant nomination du RSUE en Bosnie-Herzégovine (JO 2019, L 209, p. 10), pour la période allant du 1er septembre 2019 au 31 août 2021. Son mandat a été prorogé jusqu’au 31 août 2023 par la décision (PESC) 2021/1193 du Conseil, du 19 juillet 2021, prorogeant le mandat du RSUE en Bosnie-Herzégovine et modifiant la décision 2019/1340 (JO 2021, L 258, p. 46).

7        Le requérant a été recruté par un premier contrat de travail à durée déterminée (CDD) conclu avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine, à partir du 15 février 2006 et pour une durée ne pouvant excéder le mandat de ce dernier. À compter du 1er mars 2007, le requérant a conclu seize CDD successifs avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine. Le dernier CDD conclu par le requérant (ci-après le « contrat en cause ») prévoyait, en son article 5, une durée allant du 1er septembre 2019 au 31 août 2021.

8        Parallèlement à ses 17 CDD successifs, le requérant a signé treize contrats tripartites, avec la Commission et le RSUE en Bosnie-Herzégovine, le désignant comme chef de bureau par intérim, à compter du 1er juillet 2007.

9        Les contrats tripartites en cause prévoyaient que, en cas de décès ou de démission du RSUE en Bosnie-Herzégovine, d’accident ou de maladie l’empêchant d’exercer ses fonctions ou de fin de la convention de financement conclue entre la Commission et ce RSUE, le requérant deviendrait le responsable de la gestion des fonds alloués audit RSUE. Le dernier contrat de chef de bureau par intérim a été signé par le requérant le 7 octobre 2019 (ci-après le « contrat de chef de bureau par intérim »).

10      Le 24 janvier 2020, les représentants de l’Union et du Royaume-Uni ont signé l’accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 2020, L 29, p. 7, ci-après l’« accord sur le retrait du Royaume-Uni »). Le 30 janvier 2020, le Conseil a adopté la décision (UE) 2020/135 relative à la conclusion de l’accord sur le retrait du Royaume-Uni (JO 2020, L 29, p. 1). En vertu de l’article 1er de cette décision, l’accord sur le retrait du Royaume-Uni a été approuvé au nom de l’Union.

11      Le 31 janvier 2020, à minuit, le Royaume-Uni s’est retiré de l’Union et de la Communauté européenne de l’énergie atomique et, le 1er février 2020, l’accord sur le retrait du Royaume-Uni est entré en vigueur, conformément à son article 185.

12      L’accord sur le retrait du Royaume-Uni fixe, à son article 126, une période de transition commençant à la date d’entrée en vigueur du même accord et se terminant le 31 décembre 2020. Au cours de cette période, conformément à l’article 127, paragraphe 6, du même accord, la référence aux « États membres » dans le droit de l’Union devait s’entendre comme incluant le Royaume-Uni.

13      Le 24 juin 2020, le requérant a adressé un courrier au RSUE en Bosnie-Herzégovine afin de l’interroger sur ses droits et se plaindre d’une discrimination dans l’hypothèse où son poste serait finalement considéré comme excédentaire en cas de transfert du bureau du RSUE en Bosnie-Herzégovine à la délégation de l’Union dans cet État et, donc, au SEAE. En particulier, il a souligné que, pour le personnel international dudit RSUE, aucune indemnité de licenciement ni aucun droit au chômage n’étaient prévus, de même qu’il n’existait aucune disposition concernant les cotisations de retraite.

14      Le 7 juillet 2020, le RSUE en Bosnie-Herzégovine a fait suivre cette demande à la directrice du service des instruments de politique étrangère de la Commission, en indiquant que le requérant soulevait des questions concernant ses conditions d’emploi, notamment dans la perspective d’une probable résiliation du contrat en cause liée au retrait du Royaume-Uni de l’Union. Une cheffe d’unité dudit service a répondu, le 13 juillet suivant, que ce service n’était pas chargé des ressources humaines s’agissant du personnel relevant de la PESC et conseillait au RSUE en Bosnie-Herzégovine de consulter le SEAE à cet égard. En outre, elle a souligné que, pour autant que la demande du requérant présentait des aspects financiers, aucune indemnité de licenciement ou de cotisation de retraite ne pourrait lui être payée, conformément aux clauses du contrat en cause.

15      Le 15 septembre 2020, le RSUE en Bosnie-Herzégovine s’est adressé au SEAE en lui transmettant le courrier du requérant du 24 juin 2020.

16      Le 28 septembre 2020, le requérant a écrit au RSUE en Bosnie-Herzégovine afin que ce dernier obtienne davantage d’informations sur les possibilités pour lui de rester en fonctions au-delà de la fin de la période de transition expirant, conformément à l’accord sur le retrait du Royaume-Uni, le 31 décembre 2020. Après que ledit RSUE a saisi le service des instruments de politique étrangère de la Commission, la directrice de ce dernier lui a répondu, le 2 octobre 2020, qu’aucune exception n’était prévue pour les ressortissants du Royaume-Uni et que leurs contrats prendraient fin le 31 décembre 2020.

17      Le 17 novembre 2020, le RSUE en Bosnie-Herzégovine a adopté la décision de résiliation, par laquelle il a mis fin au contrat en cause moyennant un préavis, une telle décision prenant effet le 31 décembre 2020.

18      Le 25 novembre 2020, le requérant a écrit au RSUE en Bosnie-Herzégovine en lui demandant un réexamen de la décision de résiliation.

 Conclusions des parties

19      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal :

–        déclarer illégale la décision de résiliation ;

–        quant aux droits découlant de son contrat d’emploi avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine :

–        requalifier sa relation contractuelle en CDI ;

–        dire pour droit qu’il a subi une discrimination eu égard au motif de licenciement et condamner, pour cette raison, les parties défenderesses à lui payer la somme de 10 000 euros, assortie d’intérêts, à titre de dommage psychologique ;

–        constater la violation par les parties défenderesses de leurs obligations contractuelles et, notamment, de la notification d’un préavis valable dans le cadre de la rupture d’un CDI ;

–        condamner les parties défenderesses à le réintégrer ou, à titre subsidiaire, à lui verser une indemnité à établir ultérieurement et provisoirement fixée à 393 850,08 euros, assortis d’intérêts ;

–        quant aux autres droits, fondés sur l’existence d’une discrimination par rapport aux autres agents de l’Union :

–        constater qu’il aurait dû être recruté en tant qu’agent temporaire du Conseil, de la Commission ou du SEAE et déclarer que ces trois parties défenderesses l’ont traité de manière discriminatoire quant à sa rémunération, à ses droits à pension et aux avantages y afférents ainsi qu’à la garantie d’un emploi ultérieur ;

–        condamner le Conseil, la Commission et le SEAE à l’indemniser de la perte de rémunération, de pension, d’indemnités et d’avantages occasionnée par les violations du droit de l’Union dont il fait état, en assortissant ces sommes d’intérêts ;

–        fixer un délai aux parties pour déterminer le montant d’une telle indemnité, en tenant compte du grade et de l’échelon dans lequel il aurait dû être engagé, de la progression moyenne de rémunération, de l’évolution de sa carrière et des allocations qu’il aurait ainsi dû percevoir au titre de ses contrats d’agent temporaire, déduction faite de la rémunération qu’il a effectivement perçue ;

–        à titre subsidiaire, condamner le Conseil, la Commission et le SEAE à l’indemniser au titre de la responsabilité non contractuelle de l’Union, engagée pour le non-respect de ses droits fondamentaux, à concurrence d’un montant provisoirement fixé à 400 000 euros ;

–        condamner les parties défenderesses aux dépens.

20      Dans des exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité soulevées au titre de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal, le Conseil, la Commission et le SEAE concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable en ce qui les concerne ;

–        condamner le requérant aux dépens.

21      Dans une exception d’incompétence et d’irrecevabilité soulevée au titre de l’article 130 du règlement de procédure, le RSUE en Bosnie-Herzégovine conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

22      En vertu de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure, si la partie défenderesse le demande, le Tribunal peut statuer sur l’incompétence ou l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément à l’article 130, paragraphe 7, dudit règlement, le Tribunal statue dans les meilleurs délais sur la demande ou, si des circonstances particulières le justifient, joint l’examen de celle-ci au fond.

23      En l’espèce, les parties défenderesses ont demandé qu’il soit statué sur l’incompétence et sur l’irrecevabilité. Dans ces conditions, le Tribunal estime qu’il y a lieu de statuer sur ces demandes avant d’engager le débat au fond.

24      En substance, par son recours, le requérant présente :

–        un chef de conclusions principal lié à la décision de résiliation, en vertu duquel il demande au Tribunal, premièrement, de déclarer illégale la décision de résiliation, deuxièmement, de condamner les parties défenderesses à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral né de cette décision et, troisièmement, d’ordonner sa réintégration ou, à titre subsidiaire, de condamner les parties défenderesses à lui verser la somme de 393 850,08 euros en réparation du préjudice matériel né de ladite décision (ci-après le « premier chef de conclusions ») ;

–        un chef de conclusions principal lié à la succession des CDD conclus avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine, en vertu duquel il demande au Tribunal, d’une part, de requalifier en CDI sa relation contractuelle avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine et, d’autre part, de constater la violation par les parties défenderesses de leurs obligations contractuelles et, notamment, de la notification d’un préavis valable dans le cadre de la rupture d’un CDI (ci-après le « deuxième chef de conclusions ») ;

–        un chef de conclusions principal fondé sur l’existence d’une discrimination dans lequel il fait grief au Conseil, à la Commission et au SEAE de ne pas avoir soumis au régime applicable aux autres agents de l’Union (ci-après le « RAA ») le personnel contractuel international recruté dans le cadre de la PESC ou de ne pas avoir adopté pour ce personnel un régime juridique comparable à celui du RAA, en vertu duquel il demande au Tribunal de condamner ces trois parties défenderesses à l’indemniser du préjudice subi du fait de l’absence d’un tel statut (ci-après le « troisième chef de conclusions ») ;

–        un chef de conclusions subsidiaire, en cas de rejet des trois premiers chefs de conclusions, par lequel il demande la condamnation du Conseil, de la Commission et du SEAE à lui verser la somme de 400 000 euros, sur le fondement de la responsabilité non contractuelle de l’Union résultant de l’absence de respect de ses droits fondamentaux (ci-après le « quatrième chef de conclusions »).

25      Afin de répondre aux exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité, il convient, en l’espèce, d’examiner, premièrement, si le Tribunal est compétent pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions, deuxièmement, si les exigences de forme de la requête ont été respectées, troisièmement, si la procédure précontentieuse prévue dans le statut des fonctionnaires de l’Union (ci-après le « statut ») a été respectée et, quatrièmement, si le recours est recevable en ce qui concerne toutes les parties défenderesses.

 Sur la compétence du Tribunal pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions en l’absence de clause compromissoire

26      Dans leurs écritures respectives, les parties défenderesses soutiennent que les premier et deuxième chefs de conclusions présentent un lien avec le contrat en cause et, dès lors, un caractère contractuel. Elles font également observer que ledit contrat ne comporte pas de clause compromissoire et en déduisent que cela permet d’exclure la compétence du Tribunal sur le fondement de l’article 272 TFUE.

27      Lors de l’audience, les parties défenderesses ont précisé que la décision de résiliation devait, eu égard à son motif tiré de la perte de nationalité d’un État membre par le requérant, être regardée comme un acte de puissance publique détachable du contrat en cause. Ainsi, selon elles, le Tribunal est compétent pour contrôler la légalité dudit acte sur le fondement de l’article 263 TFUE et donc pour statuer sur le premier chef de conclusions en ce que le requérant y demande l’annulation de cet acte.

28      S’agissant, en revanche, des autres prétentions du requérant présentées dans le cadre des premier et deuxième chefs de conclusions, les parties défenderesses ont fait valoir, tant lors de l’audience qu’en réponse à une question posée par le Tribunal dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, que ni les stipulations du contrat en cause ni les dispositions du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1, ci-après le « règlement Bruxelles I bis »), ne permettaient d’identifier une juridiction nationale compétente. Lors de l’audience, elles ont fait valoir que de telles prétentions pourraient relever de la compétence des juridictions de Bosnie-Herzégovine, lieu d’établissement du RSUE en Bosnie-Herzégovine et d’exécution du contrat en cause. Ledit RSUE a également souligné que l’article 17 du contrat en cause prévoyait la compétence d’une instance arbitrale, qui devrait être considérée comme étant compétente pour statuer sur lesdites prétentions, le requérant n’ayant pas démontré que la compétence d’une telle instance entravait son droit à un recours effectif.

29      Pour sa part, le requérant soutient en substance, à titre principal, que le Tribunal est compétent pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions, sur le fondement de l’article 272 TFUE, en application de la clause compromissoire contenue dans le contrat de chef de bureau par intérim.

30      À titre subsidiaire, le requérant fait valoir que, sur le fondement du règlement Bruxelles I bis, les juridictions belges pourraient être compétentes pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions et que, dans l’hypothèse où la compétence des juridictions des États membres serait exclue, le Tribunal devrait se déclarer compétent sur le fondement des articles 263 et 268 TFUE, pour statuer sur toutes les prétentions présentées dans le cadre de ces chefs de conclusions.

 Sur la nature des premier et deuxième chefs de conclusions

31      Afin de déterminer si les premier et deuxième chefs de conclusions relèvent de la matière contractuelle, d’une part, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE est ouvert à l’encontre de tous les actes pris par les institutions, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique. Ainsi, en présence d’un contrat liant le requérant à l’une des institutions, le juge de l’Union ne peut être saisi d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE que si l’acte attaqué vise à produire des effets juridiques contraignants qui se situent en dehors de la relation contractuelle liant les parties et qui impliquent l’exercice de prérogatives de puissance publique conférées à l’institution contractante en sa qualité d’autorité administrative (voir arrêt du 25 juin 2020, SC/Eulex Kosovo, C‑730/18 P, EU:C:2020:505, points 31 et 32 et jurisprudence citée).

32      D’autre part, afin de déterminer si une action a pour objet la responsabilité contractuelle de l’Union ou la responsabilité non contractuelle de celle-ci, les juridictions de l’Union doivent vérifier si cette action a pour objet une demande de dommages et intérêts reposant de manière objective et globale sur des droits et des obligations d’origine contractuelle ou d’origine non contractuelle. À ces fins, ces juridictions doivent vérifier, au regard d’une analyse des différents éléments du dossier, tels que notamment la règle de droit prétendument violée, la nature du préjudice invoqué, le comportement reproché ainsi que les rapports juridiques existant entre les parties en cause, s’il existe entre celles-ci un véritable contexte contractuel, lié à l’objet du litige, dont l’examen approfondi se révèle indispensable pour trancher ledit recours (voir, en ce sens, arrêt du 18 avril 2013, Commission/Systran et Systran Luxembourg, C‑103/11 P, EU:C:2013:245, point 66).

33      En l’espèce, en premier lieu, par le premier chef de conclusions, le requérant présente des demandes liées à la décision de résiliation (voir point 24 ci-dessus).

34      À cet égard, il est vrai que la décision de résiliation était motivée par la circonstance que, en raison du retrait du Royaume-Uni de l’Union, le requérant ne possédait plus la nationalité d’un État membre, ce qui impliquait, selon le RSUE en Bosnie-Herzégovine, qu’il ne pouvait plus être conservé au sein de son personnel.

35      Toutefois, contrairement à ce qu’ont soutenu les parties défenderesses lors de l’audience, cette circonstance ne permet pas, à elle seule, de considérer que la décision de résiliation produit des effets juridiques contraignants qui se situent en dehors de la relation contractuelle ayant lié le requérant au RSUE en Bosnie-Herzégovine et qui impliquent l’exercice de prérogatives de puissance publique, au sens de la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus.

36      En effet, tout d’abord, la décision de résiliation a pour objet la fin anticipée du contrat en cause, de sorte que les effets de cette décision ne s’étendent pas au-delà de ce contrat. Ensuite, ainsi que l’avait relevé le Conseil dans son exception d’incompétence et d’irrecevabilité, l’article 16 du contrat en cause prévoit la possibilité d’une résiliation unilatérale par l’une ou l’autre partie moyennant un préavis de quatre semaines. Il est ainsi manifeste que cette décision, par laquelle le RSUE en Bosnie-Herzégovine a mis fin unilatéralement au contrat en cause moyennant un tel préavis, a été prise sur la base des pouvoirs qu’il tire de ce contrat. Enfin, ladite décision est motivée par le fait que, à compter de sa prise d’effet, le requérant allait perdre la qualité de ressortissant d’un État membre, conformément à l’accord sur le retrait du Royaume-Uni, et que, dès lors, il ne satisferait plus à une condition qui était exigée par le contrat en cause. En effet, les conditions d’emploi, qui faisaient partie intégrante du contrat en cause, ainsi que cela résulte de ses articles 1er et 18, requéraient que le chef des finances et de l’administration du RSUE en Bosnie-Herzégovine eût la nationalité d’un État membre.

37      Partant, la décision de résiliation présente un lien direct avec le contrat en cause. Il s’ensuit que les prétentions du requérant formulées dans le cadre du premier chef de conclusions, étroitement lié à cette décision (voir point 24, premier tiret, ci-dessus), dérivent du contrat en cause et présentent dès lors une nature contractuelle.

38      En second lieu, par le deuxième chef de conclusions, le requérant présente des demandes portant sur l’ensemble de sa relation d’emploi avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine, qui était faite de CDD successifs et dont le requérant demande la requalification en CDI. Dès lors, les prétentions du requérant formulées dans le cadre du deuxième chef de conclusions présentent également une nature contractuelle, dans la mesure où elles dérivent de l’ensemble des CDD successifs qu’il a conclus avec ledit RSUE.

 Sur la compétence du Tribunal pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions au titre de l’article 272 TFUE

39      Aux termes de l’article 272 TFUE, « [l]a Cour de justice de l’Union européenne est compétente pour statuer en vertu d’une clause compromissoire contenue dans un contrat de droit public ou de droit privé passé par l’Union ou pour son compte ».

40      Les compétences du Tribunal sont celles limitativement énumérées à l’article 256 TFUE, tel que précisé par l’article 51 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. En application de ces dispositions, le Tribunal n’est compétent pour statuer, en première instance, sur les litiges en matière contractuelle portés devant lui, qu’en vertu d’une clause compromissoire. À défaut d’une telle clause, il étendrait sa compétence juridictionnelle au-delà des litiges dont la connaissance lui est limitativement réservée par l’article 274 TFUE, cette disposition conférant aux juridictions nationales la compétence de droit commun pour connaître des litiges auxquels l’Union est partie (voir, en ce sens, arrêt du 8 mai 2007, Citymo/Commission, T‑271/04, EU:T:2007:128, point 53, et ordonnance du 30 septembre 2014, Bitiqi e.a./Commission e.a., T‑410/13, non publiée, EU:T:2014:871, point 26).

41      En l’espèce, il convient de constater que les contrats de travail successifs du requérant, dont dérivent les premier et deuxième chefs de conclusions, ne contiennent pas de clause compromissoire donnant compétence au Tribunal en tant que juge du contrat.

42      Par ailleurs, le requérant ne saurait se prévaloir de la clause compromissoire en faveur du Tribunal, contenue dans le contrat de chef de bureau par intérim.

43      En effet, tout d’abord, le contrat de chef de bureau par intérim est un contrat qui n’a pas pour objet d’établir une relation de travail entre le requérant et les autres parties à celui-ci, mais de lui attribuer certaines fonctions déterminées. Il s’agit d’ailleurs, comme le souligne le Conseil, d’une annexe à la convention de financement conclue périodiquement entre la Commission et le RSUE en Bosnie-Herzégovine, dans le cadre de la délégation octroyée à ce dernier pour l’exécution du budget, conformément à la première phrase de l’article 5, paragraphe 3, de la décision 2019/1340, selon laquelle « [l]a gestion des dépenses fait l’objet d’un contrat entre le RSUE [en Bosnie-Herzégovine] et la Commission ».

44      Ensuite, le contrat de chef de bureau par intérim présente un caractère accessoire par rapport aux CDD du requérant. En effet, d’une part, aux termes de l’article 8 de la convention de financement conclue par la Commission et le RSUE en Bosnie-Herzégovine et portant la référence CFSP/2019/15, « le chef de bureau par intérim doit appartenir au personnel du RSUE [en Bosnie-Herzégovine] ». D’autre part, selon le contrat de chef de bureau par intérim, qui renvoie dans son préambule à l’article 8 de la convention de financement CFSP/2019/15, il est prévu que, « [s]i le chef de bureau par intérim est un membre du personnel engagé par le RSUE [en Bosnie-Herzégovine], sa rémunération, ses droits et obligations sont maintenus conformément aux conditions de son contrat de travail ».

45      Enfin, le contrat de chef de bureau par intérim présente un caractère conditionnel, dès lors qu’il n’est susceptible de s’appliquer qu’en présence de certaines conditions liées à l’état du RSUE en Bosnie-Herzégovine, telles que son décès, son incapacité, sa démission ou en cas de période de vacance entre les mandats successifs de deux RSUE en Bosnie-Herzégovine (voir point 9 ci-dessus). Or, à la date de la décision de résiliation, par laquelle les fonctions du requérant auprès du RSUE en Bosnie-Herzégovine ont pris fin, aucune des conditions précitées ne s’était réalisée, de sorte que le contrat de chef de bureau par intérim n’a pas eu à s’appliquer.

46      Compte tenu de ce qui précède, en l’absence de clause compromissoire contenue dans les CDD du requérant, le Tribunal n’est pas compétent pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions au titre de l’article 272 TFUE.

 Sur la compétence du Tribunal pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions au titre des articles 263 et 268 TFUE

47      Ainsi qu’il a été constaté aux points 37 et 38 ci-dessus, les prétentions du requérant formulées dans le cadre des premier et deuxième chefs de conclusions dérivent de ses contrats de travail, lesquels ne contiennent pas de clause compromissoire donnant compétence au Tribunal en tant que juge du contrat, au titre de l’article 272 TFUE (voir point 41 ci-dessus). Partant, en application des principes rappelés au point 40 ci-dessus, ces chefs de conclusions relèvent, en principe, de la compétence des juridictions nationales, conformément à l’article 274 TFUE.

48      Toutefois, lorsque, dans le cadre d’un litige de nature contractuelle, le juge de l’Union décline la compétence que lui confèrent les articles 263 et 268 TFUE, c’est afin d’assurer une interprétation cohérente de ces dispositions avec les articles 272 et 274 TFUE et, partant, de préserver la cohérence du système juridictionnel de l’Union qui est constitué par un ensemble complet de voies de recours et de procédures destiné à assurer, respectivement, le contrôle de la légalité des actes des institutions, des organes et des organismes de l’Union, et la réparation des dommages causés par l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF, C‑14/19 P, EU:C:2020:492, points 80 à 82).

49      Dès lors, dans le contexte d’un litige de nature contractuelle, le juge de l’Union ne peut décliner une compétence que lui confère le traité FUE, lorsque cela a pour effet de soustraire à tout contrôle juridictionnel, par le juge de l’Union ou par les juridictions des États membres, des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l’Union ou une demande tendant à la réparation des dommages causés par l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF, C‑14/19 P, EU:C:2020:492, points 84 et 85).

50      Dans ces conditions, en dépit de la nature contractuelle des premier et deuxième chefs de conclusions, afin d’assurer l’existence d’un contrôle juridictionnel effectif, le Tribunal ne peut décliner la compétence qu’il tire des articles 263 et 268 TFUE qu’après s’être assuré que le requérant peut soumettre de telles prétentions à une juridiction nationale, au sens de l’article 274 TFUE, c’est-à-dire à une juridiction d’un État membre.

51      C’est la raison pour laquelle il ne saurait être admis que, comme l’ont soutenu les parties défenderesses lors de l’audience, ces chefs de conclusions pourraient relever de la compétence des juridictions bosniennes, ces dernières n’étant pas des juridictions des États membres. De la même manière, doit être écarté l’argument du RSUE en Bosnie-Herzégovine selon lequel le requérant avait la possibilité de saisir l’instance arbitrale prévue à l’article 17 du contrat en cause pour statuer sur lesdits chefs de conclusions, la compétence d’une telle instance ne pouvant être envisagée à l’exclusion de celle du juge de l’Union ou des juridictions des États membres, quand bien même ladite instance satisferait aux critères d’indépendance et d’impartialité.

52      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de vérifier si le contenu du contrat en cause ou, à défaut, les règles de droit de l’Union applicables permettent d’identifier une juridiction d’un État membre, compétente pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions.

–       Sur les stipulations contractuelles

53      En premier lieu, il convient de constater qu’aucun des contrats de travail du requérant ne contenait de clause donnant compétence à la juridiction d’un État membre. En effet, à l’exception du premier d’entre eux, ces contrats contenaient uniquement une clause relative au « règlement des différends », permettant de saisir une instance arbitrale dans l’hypothèse de l’échec d’une tentative de règlement amiable du différend opposant les parties auxdits contrats, la sentence arbitrale n’étant pas susceptible d’appel.

54      En second lieu, il ressort des articles 1er et 18 du contrat en cause que le requérant s’est engagé à respecter les procédures opérationnelles standard du RSUE en Bosnie-Herzégovine, document général s’appliquant à tous les membres du personnel dudit RSUE. S’agissant des voies de recours ouvertes à ces membres, le chapitre 11 desdites procédures opérationnelles standard, intitulé « Recours et différends », comprend un article 11.1, intitulé « Recours », qui prévoit qu’un agent du RSUE en Bosnie-Herzégovine peut soumettre à son supérieur hiérarchique un recours contre un acte qui lui fait grief, ainsi qu’un article 11.2, intitulé « Règlement des différends », qui prévoit uniquement la possibilité de saisir une instance arbitrale dont les sentences ne sont pas susceptibles d’appel.

55      Il résulte de ce qui précède que les contrats de travail du requérant ne permettent pas d’identifier une juridiction d’un État membre compétente pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions.

–       Sur les dispositions de droit de l’Union

56      S’agissant des dispositions de droit de l’Union relatives à la compétence des juridictions des États membres, le législateur de l’Union a adopté le règlement Bruxelles I bis qui, ainsi qu’il ressort de ses considérants 4 et 15, vise à unifier les règles de conflit de juridictions en matière civile et commerciale au moyen de règles de compétence présentant un haut degré de prévisibilité. Ce règlement poursuit ainsi un objectif de sécurité juridique qui consiste à renforcer la protection juridique des personnes établies dans l’Union, en permettant à la fois au demandeur d’identifier facilement la juridiction qu’il peut saisir et au défendeur de prévoir raisonnablement celle devant laquelle il peut être attrait (arrêt du 4 octobre 2018, Feniks, C‑337/17, EU:C:2018:805, point 34).

57      Contrairement à ce qu’ont fait valoir les parties défenderesses au cours de l’audience, il y a lieu de considérer que le règlement Bruxelles I bis s’applique en l’espèce. À cet égard, aux termes de son article 1er, paragraphe 1, il est prévu que ce règlement « s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction », et qu’« [i]l ne s’applique notamment ni aux matières fiscales, douanières ou administratives, ni à la responsabilité de l’État pour des actes ou des omissions commis dans l’exercice de la puissance publique (acta jure imperii) ». Or, en l’espèce, il se déduit du point 36 ci-dessus que la décision de résiliation ne constitue pas un acte de puissance publique au sens de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, mais trouve son fondement dans le contrat en cause. Partant, le premier chef de conclusions relève de la matière civile et commerciale, au sens de l’article 1er de ce règlement. De la même manière, il se déduit des considérations exposées au point 38 ci-dessus que le deuxième chef de conclusions relève aussi de ladite matière.

58      Ainsi, dès lors que, en l’espèce, les premier et deuxième chefs de conclusions concernent un litige de nature contractuelle qui est censé relever de la compétence de principe des juridictions nationales, conformément à l’article 274 TFUE (voir point 40 ci-dessus), il y a lieu d’examiner si les dispositions du règlement Bruxelles I bis permettent d’identifier une juridiction d’un État membre compétente pour statuer sur ceux-ci.

59      En matière de contrats individuels de travail, les règles de compétence sont prévues à l’article 21 du règlement Bruxelles I bis, rédigé comme suit :

« 1.      Un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait :

a)      devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile ; ou

b)      dans un autre État membre :

i)      devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail ; ou

ii)      lorsque le travailleur n’accomplit pas ou n’a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l’établissement qui a embauché le travailleur.

2.      Un employeur qui n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait devant les juridictions d’un État membre conformément au paragraphe 1, point b). »

60      En premier lieu, l’application de l’article 21 du règlement Bruxelles I bis donne compétence à la juridiction nationale du lieu du domicile de l’employeur, de sorte qu’il convient d’identifier l’employeur du requérant.

61      À cet égard, selon la jurisprudence de la Cour, un travailleur a, à l’égard de son employeur, un lien de subordination dont l’existence doit être appréciée dans chaque cas particulier, en fonction de tous les éléments et de toutes les circonstances caractérisant les relations entre les parties (voir, en ce sens, arrêt du 20 octobre 2022, ROI Land Investments, C‑604/20, EU:C:2022:807, points 30 à 32). Aussi, pour déterminer l’employeur d’un travailleur, est-il nécessaire d’identifier l’entité sous l’autorité effective de laquelle est placé ledit travailleur, cette entité étant celle qui, notamment, doit supporter la charge salariale correspondante et dispose du pouvoir effectif de licencier ledit travailleur (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, AFMB e.a., C‑610/18, EU:C:2020:565, points 56 et 61).

62      En l’occurrence, il convient d’abord de constater que le requérant a conclu la totalité de ses contrats de travail avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine, qui y était désigné comme l’« employeur ».

63      Ensuite, aux termes de l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2019/1340, le RSUE en Bosnie-Herzégovine est « responsable de la constitution d’une équipe », « [d]ans les limites d[e son] mandat […] et des moyens financiers y afférents mis à disposition » et il « informe rapidement le Conseil et la Commission de la composition de l’équipe ». L’article 6, paragraphe 2, de la même décision prévoit que « les États membres, les institutions de l’Union et le SEAE peuvent proposer le détachement d’agents appelés à travailler avec le RSUE [en Bosnie-Herzégovine ; l]a rémunération de ce personnel détaché [étant] prise en charge, respectivement, par l’État membre ou l’institution de l’Union en question ou par le SEAE » et que « le personnel international sous contrat a la nationalité d’un État membre ».

64      D’une part, il découle de ces dispositions que le RSUE en Bosnie-Herzégovine peut recruter du personnel contractuel international, qu’il lui revient de choisir de manière autonome par rapport au Conseil, de la Commission ou du SEAE, et que c’est seulement une fois un tel choix effectué qu’il doit en informer le Conseil et la Commission, ainsi que cela a été confirmé lors de l’audience. D’autre part, il découle de ces mêmes dispositions que la rémunération des membres du personnel contractuel international recruté par ledit RSUE est déduite du budget alloué à ce dernier, de sorte que c’est lui qui supporte la charge effective d’une telle rémunération.

65      Enfin, ainsi qu’il a été relevé au point 54 ci-dessus, le RSUE en Bosnie-Herzégovine a adopté des procédures opérationnelles standard qui s’appliquent à tous les agents travaillant auprès de lui et auxquelles renvoie le contrat en cause. Il en ressort que :

–        le RSUE en Bosnie-Herzégovine a le pouvoir de licencier son personnel contractuel (voir article 12.2) ;

–        la décision de renouveler le contrat d’un agent contractuel international ne peut être prise qu’à l’initiative et à la discrétion absolue du RSUE en Bosnie-Herzégovine (voir article 5.6) ;

–        le RSUE en Bosnie-Herzégovine est l’autorité disciplinaire pour les membres de son personnel (voir article 10.2.5) ;

–        le RSUE en Bosnie-Herzégovine est chargé de l’évaluation annuelle des membres de son personnel ayant une ancienneté de plus de six mois (voir article 5.4) ;

–        le RSUE en Bosnie-Herzégovine fixe les horaires et le temps de travail des membres de son personnel et doit approuver toute modification des horaires normaux ainsi que toute demande de travail supplémentaire, lequel est compensé par des jours de congé ou, à titre exceptionnel, sur autorisation du RSUE en Bosnie-Herzégovine, par le paiement d’une indemnité (voir article 7.1) ;

–        le RSUE en Bosnie-Herzégovine doit approuver toute demande de congé, annuel ou spécial, d’un membre de son personnel et c’est lui qui peut, à titre exceptionnel, accorder à un agent contractuel une indemnité compensatrice pour des congés non pris avant la fin de son contrat (voir articles 7.2 et 7.3).

66      Dans ces conditions, aux fins de l’exécution de ses contrats de travail, le requérant était placé sous l’autorité effective du RSUE en Bosnie-Herzégovine, qui était, dès lors, son employeur au sens de l’article 21 du règlement Bruxelles I bis.

67      Or, le RSUE en Bosnie-Herzégovine étant établi à Sarajevo (Bosnie-Herzégovine), la juridiction du lieu de son domicile ne relève pas d’un État membre. Ainsi, l’article 21, paragraphe 1, sous a), du règlement Bruxelles I bis ne permet pas d’identifier une juridiction d’un État membre compétente pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions.

68      En deuxième lieu, c’est également à Sarajevo que les contrats de travail du requérant devaient être exécutés. Cela ressort, en particulier, s’agissant du contrat en cause, de son article 3 et de la fiche de poste du requérant annexée audit contrat. Partant, l’article 21, paragraphe 1, sous b), i), du règlement Bruxelles I bis ne permet donc pas non plus d’identifier, sur la base du lieu où le requérant accomplissait son travail, une juridiction d’un État membre compétente pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions.

69      En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ait accompli habituellement son travail dans plusieurs pays, de sorte que les règles de compétence prévues à l’article 21, paragraphe 1, sous b), ii), du règlement Bruxelles I bis ne sont pas applicables à sa situation.

70      En quatrième lieu, le requérant se prévaut de l’article 20, paragraphe 2, du règlement Bruxelles I bis, qui implique de considérer un employeur qui n’est pas domicilié dans un État membre comme ayant son domicile dans l’État membre au sein duquel il possède une succursale, une agence ou tout autre établissement. À cet égard, l’application de cette disposition requiert notamment que le litige concerne soit des actes relatifs à l’exploitation de ces entités, soit des engagements pris par celles-ci au nom de la maison mère, lorsque ces derniers doivent être exécutés dans l’État où elles sont situées (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2012, Mahamdia, C‑154/11, EU:C:2012:491, point 48 et jurisprudence citée).

71      Or, en l’espèce, rien ne permet de considérer que l’employeur effectif du requérant, à savoir le RSUE en Bosnie-Herzégovine, possède une succursale, une agence ou tout autre établissement sur le territoire d’un État membre, ni a fortiori que les premier et deuxième chefs de conclusions portent sur des actes liés à de telles entités.

72      De même, il est vrai que, comme il est indiqué par le requérant, le Conseil, la Commission et le SEAE ont tous les trois leur siège à Bruxelles (Belgique), tandis que l’article 8, point 1, du règlement Bruxelles I bis permet, en cas de pluralité de défendeurs, de tous les attraire devant le tribunal du domicile de l’un d’eux. Toutefois, il ressort de la jurisprudence de la Cour que cette disposition n’a pas vocation à s’appliquer à un défendeur qui n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre lorsque celui-ci est assigné dans le cadre d’une action intentée contre plusieurs défendeurs parmi lesquels se trouvent également des personnes domiciliées dans l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 11 avril 2013, Sapir e.a., C‑645/11, EU:C:2013:228, point 56). Ainsi, l’article 8, point 1, dudit règlement ne permettrait pas au requérant d’attraire le RSUE en Bosnie-Herzégovine devant les juridictions de Bruxelles s’agissant des premier et deuxième chefs de conclusions.

73      Au surplus, conformément à l’article 20, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, l’article 8, point 1, du même règlement s’applique uniquement, s’agissant d’un contrat de travail, « dans le cadre d’une action intentée à l’encontre d’un employeur ». Or, ainsi qu’il a été relevé au point 66 ci-dessus, l’employeur du requérant était le RSUE en Bosnie-Herzégovine. Ainsi, les premier et deuxième chefs de conclusions, en ce que la requête mentionne comme parties défenderesses le Conseil, la Commission et le SEAE, qui ont tous les trois leur siège à Bruxelles, ne constituent pas une « action dirigée à l’encontre d’un employeur » rendant applicable la règle prévue à cette dernière disposition.

74      Il résulte de ce qui précède que, s’agissant des premier et deuxième chefs de conclusions, liés au contrat en cause, devrait en principe trouver application l’article 6, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, disposition générale selon laquelle, « [s]i le défendeur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre, la compétence est, dans chaque État membre, réglée par la loi de cet État ».

75      L’application de l’article 6, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis impliquerait que la compétence éventuelle d’une juridiction nationale présente une nature aléatoire, dans la mesure où c’est la loi de chaque État membre qui déterminerait si les juridictions de celui-ci peuvent être saisies d’un tel litige, avec la conséquence possible que, in fine, aucune juridiction d’un État membre ne soit compétente. Une telle conséquence est même particulièrement probable en l’espèce, dès lors que, à l’instar du RSUE en Bosnie-Herzégovine, le requérant a son domicile dans un pays tiers, au Royaume-Uni, et qu’il n’apparaît pas manifeste que le présent litige présente un élément de rattachement avec l’un ou l’autre État membre, susceptible de justifier une compétence de la juridiction d’un tel État.

76      Or, ainsi qu’il a été relevé aux points 48 et 49 ci-dessus, le Tribunal ne peut, dans le cadre d’un litige de nature contractuelle auquel l’Union est partie, décliner la compétence que lui confèrent les articles 263 et 268 TFUE lorsque cela conduit à soustraire à tout contrôle juridictionnel, par le juge de l’Union ou par les juridictions des États membres, des décisions adoptées par une institution, un organe ou un organisme de l’Union ou une demande en réparation de dommages causés par l’Union.

77      Dans ces circonstances, il appartient au Tribunal d’examiner si les demandes présentées dans le cadre des premier et deuxième chefs de conclusions relèvent des compétences qu’il tire de ces dispositions et, le cas échéant, de se déclarer compétent pour statuer sur ces demandes.

78      À cet égard, le Tribunal est compétent, sur le fondement de l’article 263 TFUE, pour statuer sur la demande présentée par le requérant, dans le cadre du premier chef de conclusions, portant sur la légalité de la décision de résiliation, qui est une décision adoptée par une entité relevant de l’Union et instituée en vertu des traités, à savoir le RSUE en Bosnie-Herzégovine, et qui doit dès lors être imputée à une institution, un organe ou un organisme de l’Union. Ainsi, il doit être considéré que le requérant demande, dans le cadre de ce chef de conclusions, l’annulation de ladite décision. De même, en ce que, dans le cadre dudit chef de conclusions, le requérant demande la réparation pécuniaire du préjudice moral prétendument subi du fait de la décision de résiliation, une telle demande doit être regardée comme tendant à l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, pour laquelle le Tribunal est compétent sur le fondement de l’article 268 TFUE.

79      S’agissant par ailleurs de la demande du requérant présentée dans le cadre du premier chef de conclusions et tendant à ce que le Tribunal ordonne sa réintégration au sein du personnel du RSUE en Bosnie-Herzégovine, une telle demande doit être rejetée en raison de l’incompétence du Tribunal pour en connaître.

80      En effet, selon la jurisprudence, le juge de l’Union ne saurait, en principe, adresser des injonctions à une institution, un organe ou un organisme de l’Union sans empiéter sur les prérogatives de l’autorité administrative (voir arrêts du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, point 145 et jurisprudence citée, et du 9 septembre 2020, P. Krücken Organic/Commission, T‑565/18, non publié, EU:T:2020:395, point 23 et jurisprudence citée). Ce principe s’applique, en principe, dans le cadre d’un recours en indemnité par lequel un requérant demande la condamnation de l’institution défenderesse à prendre des mesures déterminées en vue de réparer le préjudice allégué (voir, en ce sens, ordonnances du 14 janvier 2004, Makedoniko Metro et Michaniki/Commission, T‑202/02, EU:T:2004:5, point 53, et du 17 décembre 2008, Portela/Commission, T‑137/07, non publiée, EU:T:2008:589, point 46).

81      Certes, les articles 268 et 340, deuxième alinéa, TFUE, relatifs à la responsabilité non contractuelle de l’Union, permettent l’octroi d’une réparation en nature, laquelle peut, le cas échéant, si elle apparaît conforme aux principes généraux communs aux droits des États membres en matière de responsabilité non contractuelle, prendre la forme d’une injonction de faire ou de ne pas faire, pouvant conduire l’institution défenderesse à adopter un comportement donné (ordonnance du 3 septembre 2013, Idromacchine e.a./Commission, C‑34/12 P, non publiée, EU:C:2013:552, point 29 ; voir également, en ce sens, arrêt du 10 mai 2006, Galileo International Technology e.a./Commission, T‑279/03, EU:T:2006:121, point 63).

82      Toutefois, une telle hypothèse ne peut être envisagée que dans des cas particuliers, où la partie requérante se prévaut d’un préjudice qui ne saurait être intégralement réparé par le biais d’une indemnité, et dont les caractéristiques propres requièrent le prononcé d’une injonction de faire ou de ne pas faire, notamment si une telle injonction vise à faire cesser le fait à l’origine d’un préjudice dont les effets sont continus. Tel n’est pas le cas en l’espèce, le requérant ayant été en mesure de quantifier l’étendue du préjudice matériel qu’il aurait subi du fait de la décision de résiliation, qu’il évalue à 393 850,08 euros, ce montant correspondant aux salaires qu’il n’a pu percevoir pendant trois années en conséquence de la cessation de ses fonctions.

83      En outre, en ce que, dans le cadre du premier chef de conclusions, le requérant demande, à titre subsidiaire par rapport à sa demande de réintégration, que les parties défenderesses soient condamnées à lui verser 393 850,08 euros en réparation du préjudice matériel prétendument subi du fait de la décision de résiliation, une telle demande doit être regardée comme tendant à l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, pour laquelle le Tribunal est compétent sur le fondement de l’article 268 TFUE.

84      Enfin, s’agissant du deuxième chef de conclusions, d’une part, la demande tendant à ce que le Tribunal prononce la requalification en CDI de son contrat de travail doit être regardée comme une demande d’injonction adressée au RSUE en Bosnie-Herzégovine, en sa qualité d’employeur du requérant (voir point 66 ci-dessus). Or, conformément à la jurisprudence rappelée au point 80 ci-dessus, le Tribunal n’est pas compétent pour statuer sur une demande de ce type. En outre, même à supposer qu’une telle demande doive être regardée comme visant à réparer un préjudice qu’aurait causé le défaut de conclusion d’un CDI, elle ne relèverait pas d’un cas particulier pour lequel le Tribunal pourrait adresser une injonction de faire, en application de la jurisprudence citée au point 81 ci-dessus. En effet, l’éventuel préjudice né du défaut de conclusion d’un contrat impliquant une rémunération déterminée pourrait, le cas échéant, être réparé par la condamnation de l’Union, par le Tribunal, à verser une somme d’argent au requérant.

85      D’autre part, la demande également présentée dans le cadre du deuxième chef de conclusions et tendant à ce que le Tribunal constate que les parties défenderesses ont violé leurs obligations contractuelles, n’est pas présentée au soutien de conclusions en annulation au sens de l’article 263 TFUE. Cette demande n’est pas davantage présentée au soutien d’une demande tendant à la réparation d’un préjudice que le Tribunal pourrait examiner en vertu de l’article 268 TFUE. Partant, une telle demande doit être regardée comme tendant uniquement à ce que le Tribunal prononce une déclaration en droit. Or, les compétences que le Tribunal tire des traités, et en particulier des articles 263 et 268 TFUE, ne lui permettent pas de prendre position par le biais d’une déclaration générale ou de principe (voir, en ce sens, ordonnance du 9 décembre 2003, Italie/Commission, C‑224/03, non publiée, EU:C:2003:658, points 20 et 21 ; arrêt du 21 mars 2012, Fulmen et Mahmoudian/Conseil, T‑439/10 et T‑440/10, EU:T:2012:142, point 41, et ordonnance du 25 octobre 2011, DMA Die Marketing Agentur et Hofmann/Autriche, T‑472/11, non publiée, EU:T:2011:631, point 10).

86      Aussi le deuxième chef de conclusions doit-il être rejeté, dans son intégralité, en raison de l’incompétence du Tribunal.

 Conclusion

87      Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, premièrement, il convient de rejeter les exceptions en ce qu’elles sont tirées de l’incompétence du Tribunal pour statuer sur le premier chef de conclusions à l’égard de la demande tendant à l’annulation de la décision de résiliation, pour laquelle le Tribunal est compétent sur le fondement de l’article 263 TFUE, ainsi qu’à l’égard des demandes du requérant tendant à la réparation pécuniaire des préjudices moral et matériel qu’il aurait subis du fait de cette décision, pour lesquelles le Tribunal est compétent, sur le fondement de l’article 268 TFUE.

88      Deuxièmement, la demande présentée par le requérant dans le cadre du premier chef de conclusions, et tendant à ce que soit ordonnée sa réintégration au sein du personnel du RSUE en Bosnie-Herzégovine, doit être rejetée pour cause d’incompétence.

89      Troisièmement, le deuxième chef de conclusions doit être rejeté pour cause d’incompétence.

 Sur les fins de non-recevoir tirées du non-respect des exigences de forme de la requête

90      Le Conseil, le SEAE et le RSUE en Bosnie-Herzégovine font valoir que la requête méconnaît les exigences de formes imposées par l’article 76 du règlement de procédure. Conjointement ou séparément, elles tirent argument du manque de clarté, premièrement, des conclusions dans leur ensemble, deuxièmement, de leurs fondements juridiques, troisièmement, du quatrième chef de conclusions en particulier et, quatrièmement, des moyens invoqués au soutien des chefs de conclusions.

91      En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 25 janvier 2018, BSCA/Commission, T‑818/14, EU:T:2018:33, point 95 et jurisprudence citée).

92      En outre, c’est à la partie requérante qu’il appartient de faire le choix du fondement juridique de son recours et non au juge de l’Union de choisir lui-même la base légale la plus appropriée (voir arrêt du 15 mars 2005, Espagne/Eurojust, C‑160/03, EU:C:2005:168, point 35 et jurisprudence citée).

93      Enfin, une requête tendant à la réparation de dommages prétendument causés par une institution de l’Union doit contenir les éléments qui permettent d’identifier le comportement que la partie requérante reproche à l’institution, les raisons pour lesquelles elle estime qu’un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu’elle prétend avoir subi ainsi que le caractère et l’étendue de ce préjudice (voir arrêt du 2 mars 2010, Arcelor/Parlement et Conseil, T‑16/04, EU:T:2010:54, point 132 et jurisprudence citée).

94      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les présentes fins de non-recevoir.

95      Par ailleurs, eu égard au rejet, en raison de l’incompétence du Tribunal, de la demande du requérant tendant à sa réintégration au sein du personnel du RSUE en Bosnie-Herzégovine ainsi que de ses demandes présentées dans le cadre du deuxième chef de conclusions (voir points 88 et 89 ci-dessus), il y a lieu de limiter l’examen des présentes fins de non-recevoir aux autres demandes du requérant.

 Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté des conclusions du requérant dans leur ensemble

96      Le Conseil souligne que l’énumération des chefs de conclusions dans le petitum de la requête fait état de trois chefs de conclusions, alors que la partie de la requête relative à l’argumentation juridique n’en mentionne que deux.

97      Toutefois, il ressort des conclusions du requérant, telles qu’elles sont énoncées au début comme à la fin de la requête, et résumées au point 24 ci-dessus, que les chefs de conclusions du requérant consistent, d’une part, en trois demandes formulées à titre principal et, d’autre part, en une demande formulée à titre subsidiaire.

98      Contrairement à ce que soutient le Conseil, cette présentation est conforme à la mention de deux chefs de conclusions dans la partie de la requête consacrée à l’argumentation juridique. En effet, la lecture de cette partie permet de comprendre que, d’une part, la référence dans la requête à un « premier chef de conclusions principal » renvoie à ses trois demandes principales listées dans ses conclusions résumées au point 24, premier à troisième tirets, ci-dessus. D’autre part, le « second chef de conclusions » mentionné dans la requête présente un caractère subsidiaire et correspond donc au quatrième chef de conclusions résumé au point 24, quatrième tiret, ci-dessus.

99      En conséquence, la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté des conclusions du requérant dans leur ensemble doit être rejetée.

 Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté du fondement juridique du recours

100    Le Conseil, le SEAE et le RSUE en Bosnie-Herzégovine soutiennent que le fondement juridique du recours n’est pas suffisamment clair.

101    Certes, la requête présente une certaine imprécision en ce qui concerne les dispositions sur la base desquelles elle a été introduite. En effet, sur la première page de la requête figure l’intitulé « Recours en annulation et en indemnisation », et il est indiqué que le requérant « forme un recours en annulation et en indemnisation, en vertu des articles 263, 268 et 272 TFUE ».

102    Toutefois, en premier lieu, en dépit des imprécisions de la requête, la lecture des parties de celle-ci consacrées à la compétence du Tribunal et à l’argumentation juridique permet de comprendre que le requérant a présenté le premier chef de conclusions, à titre principal, sur le fondement de l’article 272 TFUE et de la clause compromissoire, en faveur du Tribunal, contenue dans le contrat de chef de bureau par intérim. En outre, il ressort de la requête que ce chef de conclusions est invoqué, à titre subsidiaire, sur le fondement des articles 263 et 268 TFUE, comme le requérant l’a confirmé lors de l’audience.

103    En deuxième lieu, par le troisième chef de conclusions, le requérant vise à obtenir réparation de préjudices liés aux choix qu’auraient effectués le Conseil, la Commission et le SEAE concernant la politique de recrutement et de gestion du personnel contractuel international engagé par le RSUE en Bosnie-Herzégovine, sur le fondement de l’article 268 TFUE, ce que le requérant a confirmé dans ses observations sur les exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité.

104    En troisième lieu, le quatrième chef de conclusions, présenté à titre subsidiaire, en cas de rejet des chefs de conclusions principaux vise expressément la responsabilité non contractuelle de l’Union. Il s’en déduit que ce chef de conclusions est fondé sur l’article 268 TFUE.

105    Compte tenu de ce qui précède, la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté du fondement juridique du recours doit être rejetée.

 Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté du quatrième chef de conclusions en particulier

106    Le Conseil fait valoir que le quatrième chef de conclusions n’expose pas de façon suffisamment claire les trois conditions permettant l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union.

107    Par ailleurs, la Commission fait en substance valoir que le quatrième chef de conclusions manque de clarté dans la mesure où le requérant ne détermine pas la part respective de la responsabilité des différentes parties défenderesses, ni la faute susceptible de leur être reprochée. Or, le droit de l’Union ne connaîtrait pas de responsabilité collective et forfaitaire.

108    En dépit de ces contestations, le contenu de la requête permet de comprendre, à suffisance, que le requérant présente le quatrième chef de conclusions à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où ses trois premiers chefs de conclusions seraient rejetés comme étant irrecevables ou non fondés. Selon le requérant, un tel rejet devrait nécessairement être imputé à l’absence d’adoption par le Conseil, la Commission et le SEAE, d’un cadre juridique suffisamment clair lui permettant notamment de saisir une juridiction identifiable, selon des modalités déterminées. Il dénonce ainsi une méconnaissance du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination, des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime ainsi que du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude. Il demande, en conséquence, l’indemnisation d’un préjudice évalué à 400 000 euros.

109    Quant à l’argument de la Commission tiré de l’absence d’identification des fautes respectivement reprochées aux trois parties défenderesses concernées par le quatrième chef de conclusions, une telle circonstance ne fait pas obstacle à la recevabilité dudit chef de conclusions, dès lors que le contenu de la requête permet de comprendre que le requérant considère que ces parties défenderesses auraient toutes pu être impliquées dans l’adoption d’un régime général applicable au personnel contractuel relevant de la PESC. De même, c’est à tort que la Commission reproche au requérant de ne pas avoir déterminé la « part respective de responsabilité » de chacune desdites parties défenderesses. Contrairement à ce qu’elle fait valoir, il ressort de l’arrêt du 13 novembre 1973, Werhahn Hansamühle e.a./Conseil et Commission (63/72 à 69/72, EU:C:1973:121, point 8), que, dans le cadre d’un recours en responsabilité non contractuelle, n’est pas irrecevable une demande tendant à la condamnation solidaire de plusieurs institutions auxquelles le fait générateur de responsabilité est imputé.

110    Partant, la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté du quatrième chef de conclusions doit être rejetée.

 Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté des moyens invoqués au regard des différents chefs de conclusions

111    Selon le Conseil, la requête ne fait pas apparaître clairement les moyens se rapportant à chacun des chefs de conclusions.

112    À cet égard, il y a lieu de considérer que, premièrement, au soutien du premier chef de conclusions, le requérant invoque un moyen unique tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement, en général, et en ce qu’il est protégé par le droit anglais, en particulier. D’une part, une telle méconnaissance découlerait du motif sur lequel repose la décision de résiliation, à savoir la nationalité du requérant. D’autre part, le requérant affirme avoir été victime d’une inégalité de traitement par rapport aux fonctionnaires et agents du Royaume-Uni soumis au régime applicable aux autres agents de l’Union (ci-après le « RAA »), dès lors que, en vertu d’une dérogation offerte à ceux-ci, ils auraient pu conserver leur poste malgré le retrait du Royaume-Uni de l’Union. En outre, la requête permet aussi de comprendre que le requérant demande réparation du préjudice moral subi du fait du motif prétendument discriminatoire de la décision de résiliation à hauteur de 10 000 euros et des préjudices matériels liés à ladite décision, en condamnant les parties défenderesses à lui verser une indemnité de 393 850,08 euros.

113    Deuxièmement, il ressort du contenu de la requête que, par le troisième chef de conclusions, le requérant fait grief au Conseil, à la Commission et au SEAE, de ne pas avoir adopté de régime juridique comparable à celui du RAA en vue de l’appliquer au personnel contractuel international recruté dans le cadre de la PESC et, en particulier, par le RSUE en Bosnie-Herzégovine ou, à défaut, de ne pas avoir soumis ce personnel au RAA. Une telle carence, d’une part, méconnaîtrait l’article 336 TFUE et, d’autre part, aurait entraîné la création d’un système discriminatoire à l’encontre du personnel contractuel international du RSUE en Bosnie-Herzégovine, par rapport aux agents contractuels soumis au RAA, en particulier ceux travaillant auprès de ce RSUE en sa qualité de chef de la délégation de l’Union dans cet État. Selon le requérant, cette inégalité de traitement lui a causé un préjudice correspondant au montant des droits et allocations qu’il aurait perçus s’il avait été recruté comme agent temporaire soumis au RAA, dont il demande réparation dans le cadre de ce chef de conclusions.

114    Troisièmement, s’agissant du quatrième chef de conclusions, le requérant fait valoir, en substance, que, dans l’hypothèse où ses trois premiers chefs de conclusions seraient rejetés, un tel rejet découlerait de l’absence de cadre juridique suffisamment clair lui ayant permis de saisir une juridiction selon une procédure et des modalités suffisamment déterminées (voir point 108 ci-dessus). Il ressort du contenu de la requête que le requérant soutient notamment que, en n’ayant pas prévu un tel cadre juridique, le Conseil, la Commission et le SEAE ont méconnu le principe d’égalité de traitement et de non-discrimination, le principe de sécurité juridique, le principe de protection de la confiance légitime ainsi que le principe de bonne administration et le devoir de sollicitude.

115    Certes, certains moyens présentés dans le cadre du quatrième chef de conclusions, tirés d’une violation d’un prétendu principe de protection des particuliers ainsi que du code européen de bonne conduite, ne font l’objet d’aucun développement permettant de comprendre en quoi consisteraient ces violations. Toutefois, bien que ces moyens ne satisfassent pas aux exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, un tel constat n’emporte pas l’irrecevabilité du quatrième chef de conclusions dans son ensemble, celui-ci étant soutenu de façon suffisamment claire par les moyens énumérés au point 114 ci-dessus.

 Conclusion

116    Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, les fins de non-recevoir tirées du non-respect, par le requérant, des exigences de forme imposées par l’article 76 du règlement de procédure sont rejetées.

 Sur la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité des troisième et quatrième chefs de conclusions pour non-respect de la procédure précontentieuse prévue aux articles 90 et 91 du statut

117    Le Conseil soutient que les troisième et quatrième chefs de conclusions sont irrecevables dans la mesure où ils n’ont pas été précédés de la phase précontentieuse prévue en application de l’article 270 TFUE. Selon lui, dès lors que, dans le cadre de ces chefs de conclusions, le requérant demande réparation d’un préjudice correspondant aux montants qu’il aurait perçus si ses CDD successifs avaient été conclus, non plus avec le RSUE en Bosnie-Herzégovine, mais avec une autorité habilitée à conclure les contrats au sens du RAA, il aurait dû, conformément à l’article 90, paragraphe 1, du statut, introduire, auprès de l’autorité selon lui compétente, une demande de requalification desdits contrats et une demande d’indemnisation.

118    L’article 270 TFUE, lu en combinaison avec l’article 256, paragraphe 1, TFUE donne compétence au Tribunal pour statuer sur « tout litige entre l’Union et ses agents dans les limites et conditions déterminées par le statut […] et le [RAA] ». Les voies de recours, notamment les délais et les règles procédurales, font l’objet des articles 90 et 91 du statut, auxquels renvoie l’article 46 du RAA.

119    À cet égard, il ressort de la jurisprudence que ces voies de recours s’appliquent non seulement aux personnes qui ont la qualité de fonctionnaire ou d’agent autre que local, mais aussi à celles qui revendiquent ces qualités (voir arrêt du 23 janvier 1997, Coen, C‑246/95, EU:C:1997:33, point 17 et jurisprudence citée).

120    En l’espèce, il convient de souligner que, par le troisième chef de conclusions, introduit sur le fondement de l’article 268 TFUE, le requérant demande au Tribunal de condamner le Conseil, la Commission et le SEAE à l’indemniser pour les préjudices qu’il a subis du fait de leur prétendue carence dans l’édiction d’un régime applicable au personnel contractuel international travaillant pour le RSUE en Bosnie-Herzégovine ou, à tout le moins, pour ne pas avoir étendu à ce personnel l’application du RAA. Une telle carence aurait eu pour conséquence que le requérant a systématiquement été engagé en tant qu’agent contractuel de ce RSUE, sur la base de CDD soumis au droit anglais, ce qui l’aurait conduit à subir une discrimination par rapport aux agents temporaires soumis au RAA travaillant auprès dudit RSUE.

121    C’est dans ce contexte que le requérant soutient que le statut d’agent temporaire du SEAE aurait dû lui être octroyé, « dès lors qu’il n’existe aucun autre statut légal applicable », et demande réparation d’un préjudice correspondant aux indemnités et allocations auxquelles il aurait pu prétendre en tant qu’agent temporaire recruté au titre du RAA, « à défaut d’appliquer un autre cadre de comparaison ». En outre, dans ses observations sur les exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité, le requérant a indiqué qu’il « ne plaid[ait] pas la requalification de son contrat en contrat d’agent temporaire ».

122    Quant au quatrième chef de conclusions, le requérant n’y revendique pas davantage la qualité d’agent temporaire au sens du RAA, mais demande, en substance, à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où les trois premiers chefs de conclusions seraient rejetés, l’indemnisation des préjudices subis en l’absence de régime juridique clair lui permettant, notamment, l’accès à une juridiction.

123    Dans ces conditions, les demandes indemnitaires présentées dans les troisième et quatrième chefs de conclusions relèvent de l’article 268 TFUE et non de l’article 270 TFUE, de sorte qu’il ne saurait être reproché au requérant de n’avoir pas respecté la procédure précontentieuse prévue aux articles 90 et 91 du statut.

124    Il s’ensuit que la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité des troisième et quatrième chefs de conclusions, pour non-respect de la procédure précontentieuse prévue aux articles 90 et 91 du statut, doit être rejetée.

 Sur les fins de non-recevoir relatives à l’identification de la ou des parties défenderesses

125    Le Conseil, la Commission et le SEAE contestent pouvoir être la partie défenderesse s’agissant des premier et deuxième chefs de conclusions, étant donné qu’ils n’ont jamais été parties au contrat en cause et que leur rôle à l’égard du RSUE en Bosnie-Herzégovine ne concerne pas la gestion du personnel contractuel de celui-ci. En particulier, la décision de résiliation ne leur serait pas imputable, dans la mesure où elle a été prise par le RSUE en Bosnie-Herzégovine, qui devrait être regardé comme un organisme de l’Union susceptible d’être la partie défenderesse pour le premier chef de conclusions.

126    Par ailleurs, s’agissant du troisième chef de conclusions, la Commission fait valoir que le choix de recourir à une succession de CDD pour le personnel contractuel international engagé par des entités relevant de la PESC ne lui est pas imputable. À cet égard, elle souligne que c’est le Conseil qui est compétent pour adopter, le cas échant, une décision fixant le statut des personnels relevant de la PESC.

127    Pour sa part, le requérant explique avoir désigné quatre parties défenderesses dans la requête compte tenu de l’absence d’indépendance du RSUE en Bosnie-Herzégovine, qui entretiendrait des liens de subordination tant avec le Conseil qu’avec la Commission et le SEAE. Il souligne que le Conseil nomme ledit RSUE, que la Commission est responsable du contrôle de l’exécution du mandat de ce RSUE et que le SEAE est l’employeur du même RSUE. En outre, le requérant soutient que le RSUE en Bosnie-Herzégovine n’est pas visé par le troisième chef de conclusions dans la mesure où il n’est pas compétent pour adopter un cadre d’emploi des agents contractuels internationaux travaillant auprès de lui-même.

128    Eu égard au rejet, en raison de l’incompétence du Tribunal, de la demande du requérant tendant à sa réintégration au sein du personnel du RSUE en Bosnie-Herzégovine ainsi que de ses demandes présentées dans le cadre du deuxième chef de conclusions (voir points 88 et 89 ci-dessus), il y a lieu de limiter l’examen des présentes fins de non-recevoir aux autres demandes du requérant.

 Sur le premier chef de conclusions

129    Ainsi qu’il a été conclu au point 87 ci-dessus, le Tribunal est compétent pour examiner le premier chef de conclusions, sur le fondement de l’article 263 TFUE, en ce qu’il tend à l’annulation de la décision de résiliation et, sur le fondement de l’article 268 TFUE, en ce qu’il tend à la réparation pécuniaire des préjudices moral et matériel prétendument causés par cette décision.

130    À cet égard, d’une part, aux termes de l’article 263, premier alinéa, TFUE, la voie du recours en annulation est ouverte contre les actes émanant de certaines institutions dénommées, mais aussi, de manière plus large, contre ceux adoptés par des organes ou organismes de l’Union, dans la mesure où il s’agit d’actes visant à produire des effets juridiques obligatoires (ordonnance du 4 juin 2013, Elitaliana/Eulex Kosovo, T‑213/12, EU:T:2013:292, point 19). Un recours en annulation doit ainsi être dirigé contre l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union qui a adopté l’acte en cause (voir ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 19 et jurisprudence citée).

131    D’autre part, en vertu de l’article 268 TFUE et de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, le Tribunal, en matière de responsabilité non contractuelle, est compétent pour connaître des litiges relatifs à la réparation des dommages causés par les institutions de l’Union ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions. Le terme « institution », employé à l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, ne vise pas seulement les institutions de l’Union énumérées à l’article 13, paragraphe 1, TUE, mais il recouvre également tous les autres organes et organismes de l’Union institués sur la base des traités et destinés à contribuer à la réalisation des objectifs de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 10 avril 2002, Lamberts/Médiateur, T‑209/00, EU:T:2002:94, point 49 et jurisprudence citée).

132    Ainsi, dans le cadre d’un recours en responsabilité non contractuelle de l’Union, cette dernière est représentée devant le Tribunal par l’institution, l’organe ou l’organisme auquel le fait générateur de responsabilité est reproché (voir, en ce sens, ordonnance du 6 janvier 2015, Kendrion/Union européenne, T‑479/14, non publiée, EU:T:2015:2, point 15 et jurisprudence citée).

133    En l’espèce, le premier chef de conclusions a trait à la décision de résiliation, qui est imputable au RSUE en Bosnie-Herzégovine. Dès lors, il convient d’examiner si ledit RSUE peut être qualifié d’organe ou organisme de l’Union susceptible d’être partie défenderesse dans le cadre d’un recours introduit sur le fondement des articles 263 et 268 TFUE.

134    À cet égard, pour déterminer si une entité ou une structure relevant du schéma organisationnel de l’Union ou œuvrant au sein de celui-ci peut être considérée comme un organe ou un organisme de l’Union, il y a lieu de vérifier si, au regard des dispositions régissant le statut de l’entité ou de la structure concernée, celle-ci dispose d’une capacité juridique suffisante pour pouvoir être considérée comme un organe autonome de l’Union et se voir reconnaître la qualité de partie défenderesse (voir, en ce sens, ordonnance du 4 juin 2012, Elti/Délégation de l’Union au Monténégro, T‑395/11, EU:T:2012:274, points 27 à 29). En particulier, l’entité ou la structure en question doit être qualifiée d’organe ou organisme de l’Union lorsque, d’une part, elle est investie d’un mandat intrinsèquement lié au fonctionnement de l’Union et, d’autre part, elle est juridiquement distincte des institutions, organes et organismes de l’Union existants (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance du 3 mars 2022, Commission/Conseil, C‑551/21, EU:C:2022:163, point 14).

135    S’agissant du RSUE en Bosnie-Herzégovine, il convient de relever que, tout d’abord, en application de l’article 33 TUE, il a été nommé par le Conseil, sur proposition du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (ci-après le « haut représentant »), en vue d’exercer un « mandat en lien avec des questions politiques particulières » (voir point 3 ci-dessus). Ainsi, ledit RSUE est investi d’un mandat intrinsèquement lié au fonctionnement de l’Union.

136    Ensuite, aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la décision 2019/1340, le RSUE en Bosnie-Herzégovine est « responsable de l’exécution de son mandat ». Bien que cette disposition prévoie également que ce RSUE « agit sous l’autorité du [haut représentant] », cette autorité ne vise que l’exécution du mandat dudit RSUE tel qu’il est défini à l’article 3 de la même décision, et non la gestion administrative dans le cadre de pareil mandat, notamment en matière de personnel.

137    En outre, plusieurs dispositions de la décision 2019/1340 montrent que le RSUE en Bosnie-Herzégovine est juridiquement distinct des autres institutions, organes ou organismes de l’Union. À cet égard, d’une part, l’article 5, paragraphes 2 et 3, de cette décision confère audit RSUE la capacité juridique de passer des marchés et d’acheter des biens et lui impose de conclure un contrat avec la Commission concernant la gestion de ses dépenses. D’autre part, ainsi que cela a été relevé au point 63 ci-dessus, l’article 6, paragraphe 2, de la même décision permet au même RSUE d’accueillir du personnel détaché par les institutions de l’Union ou par le SEAE.

138    Enfin, en matière de gestion de son personnel contractuel, le RSUE en Bosnie-Herzégovine dispose d’une capacité juridique lui permettant d’agir de façon autonome. D’une part, il ressort de l’article 6, paragraphes 1 et 2, de la décision 2019/1340 que ledit RSUE est « responsable de la constitution d’une équipe » et qu’il a la capacité juridique de conclure des contrats pour recruter du personnel international, qu’il choisit sans devoir obtenir l’aval d’autres institutions, organes ou organismes de l’Union, le Conseil et la Commission devant être informés a posteriori (voir points 63 et 64 ci-dessus). D’autre part, ladite décision fait mention des « membres du personnel du RSUE [en Bosnie-Herzégovine] » (article 7), des « membres de son équipe » (article 8), du « personnel placé sous son autorité directe » (article 10) ou encore du « RSUE [en Bosnie-Herzégovine] et son personnel » (article 13).

139    En conséquence, pour les besoins de la présente affaire portant sur des questions relatives à la gestion du personnel du RSUE en Bosnie-Herzégovine, ce dernier doit être assimilé aux organes et organismes de l’Union susceptibles d’être parties défenderesses dans le cadre d’un recours fondé sur les articles 263 et 268 TFUE, au sens de la jurisprudence citée aux points 130 à 132 ci-dessus. Il s’ensuit que le premier chef de conclusions est recevable en ce qui concerne le RSUE en Bosnie-Herzégovine.

140    S’agissant du Conseil, il est vrai que cette institution nomme le RSUE en Bosnie-Herzégovine, définit les termes ainsi que la durée de son mandat et peut décider d’y mettre fin de façon anticipée. Toutefois, une telle circonstance n’est pas de nature à remettre en cause l’autonomie et la capacité juridique de ce RSUE s’agissant de la gestion de son personnel, telles qu’elles sont constatées au point 138 ci-dessus. Par ailleurs, si l’article 4, paragraphe 2, de la décision 2019/1340 prévoit que le Conseil fournit, par l’intermédiaire du Comité politique et de sécurité (COPS), des orientations stratégiques et politiques audit RSUE, le premier chef de conclusions porte uniquement sur des questions relatives à la gestion du personnel du même RSUE et n’est donc pas rattachable à des actes de ce dernier de nature stratégique ou politique. Il s’ensuit que ce chef de conclusions est irrecevable en ce qui concerne le Conseil.

141    S’agissant de la Commission, il convient de constater que, conformément à l’article 5, paragraphe 3, de la décision 2019/1340, la gestion des dépenses fait l’objet d’un contrat entre elle et le RSUE en Bosnie-Herzégovine, et ce dernier répond de toutes les dépenses devant elle. Ainsi, le rôle de la Commission à l’égard du RSUE en Bosnie-Herzégovine porte sur le contrôle de l’exécution budgétaire du mandat de ce dernier. Or, le premier chef de conclusions porte sur la gestion de son personnel par le RSUE en Bosnie-Herzégovine et non sur l’exécution, par ce dernier, de son budget. Partant, le premier chef de conclusions doit être rejeté comme étant irrecevable en ce qui concerne la Commission (voir, par analogie, arrêt du 19 juillet 2016, H/Conseil e.a., C‑455/14 P, EU:C:2016:569, point 65).

142    S’agissant du SEAE, il est vrai que, en fait, le RSUE en Bosnie-Herzégovine est également le chef de la délégation de l’Union dans cet État et, en cette dernière qualité, un agent temporaire du SEAE. Toutefois, premièrement, le contrat en cause, de même que les CDD qui l’ont précédé, ont été signés exclusivement par ledit RSUE, en cette qualité, sans faire référence à sa qualité de chef de la délégation de l’Union en Bosnie-Herzégovine. Deuxièmement, l’article 1er, paragraphe 4, de la décision 2010/427/UE, du 26 juillet 2010, fixant l’organisation et le fonctionnement du SEAE (JO 2010, L 201, p. 30), prévoit que le SEAE « est composé d’une administration centrale et des délégations de l’Union auprès de pays tiers et d’organisations internationales », sans inclure les RSUE. Troisièmement, il ressort des pièces du dossier, et notamment d’un document de travail du SEAE du 16 mars 2016, que le personnel d’un RSUE dans un pays tiers ne se confond pas avec celui affecté à la délégation de l’Union dans cet État, y compris lorsque, comme dans le cas de la Bosnie-Herzégovine, le RSUE et le chef de la délégation de l’Union sont la même personne. En conséquence, le premier chef de conclusions est irrecevable en ce qui concerne le SEAE.

 Sur le troisième chef de conclusions

143    Ainsi qu’il a été relevé au point 132 ci-dessus, dans le cadre d’un recours en responsabilité non contractuelle de l’Union, cette dernière est représentée devant le Tribunal par l’institution, l’organe ou l’organisme auquel le fait générateur de responsabilité est reproché.

144    En l’espèce, par le troisième chef de conclusions, le requérant présente, sur le fondement de l’article 268 TFUE, une demande indemnitaire fondée sur l’existence d’une discrimination. Dans cette demande, il fait grief au Conseil, à la Commission et au SEAE de ne pas avoir soumis au RAA le personnel contractuel international recruté dans le cadre de la PESC ou de ne pas avoir adopté pour ce personnel un régime juridique comparable à celui du RAA.

145    Il s’ensuit que le fait générateur de la responsabilité non contractuelle de l’Union allégué par le requérant réside dans les choix opérés, au niveau institutionnel, quant au régime juridique applicable à l’emploi du personnel contractuel recruté dans le cadre de la PESC.

146    À cet égard, en premier lieu, le requérant fait valoir qu’un régime applicable au personnel contractuel international recruté par le RSUE en Bosnie-Herzégovine aurait dû être adopté sur la base de l’article 336 TFUE, aux termes duquel « le Parlement européen et le Conseil, statuant par voie de règlements conformément à la procédure législative ordinaire, arrêtent […] le statut […] et le [RAA] ». Toutefois, le RSUE en Bosnie-Herzégovine est une entité relevant de la PESC (voir point 3 ci-dessus) et il ressort clairement de l’article 24, paragraphe 1, TUE et de l’article 31, paragraphe 1, du même traité, que l’adoption d’actes législatifs est exclue dans le domaine de la PESC.

147    Partant, l’article 336 TFUE n’est pas pertinent, en l’espèce, pour identifier la ou les institutions auxquelles le fait générateur de responsabilité est reproché dans le cadre du troisième chef de conclusions.

148    En deuxième lieu, il convient de relever que, aux termes de l’article 26 TUE, c’est au Conseil qu’il incombe d’élaborer la PESC et de prendre les décisions nécessaires à la définition et à la mise en œuvre de cette politique, sur la base des orientations générales et des lignes stratégiques définies par le Conseil européen. Or, l’adoption, le cas échéant, d’un régime juridique applicable au personnel contractuel recruté dans le cadre de la PESC relève de la mise en œuvre de cette dernière et, dès lors, de la compétence du Conseil.

149    À cet égard, ainsi que le souligne le requérant, il ressort d’une lecture combinée des points 1.5 et 3.3 de la communication C(2012) 4052 final, du 26 juin 2012, relative aux règles de gestion financière des missions relevant de la PESC, que la Commission avait suggéré au Conseil d’appliquer le RAA aux agents contractuels des missions relevant de la PESC et des RSUE.

150    Or, si une telle suggestion n’a pas été suivie d’effet, c’est parce que les délégations des États membres ne sont pas parvenues à un accord au sein du Conseil, ainsi que cela ressort d’une note adressée par la présidence de cette institution au Comité des représentants permanents (Coreper), le 22 mai 2013. En particulier, dans cette note, il était souligné que lesdites délégations auraient besoin de temps pour étudier les implications juridiques, institutionnelles et opérationnelles avant d’entamer tout changement dans le régime des missions relevant de la PESC et qu’elles considéraient que la situation des RSUE nécessiterait de nouvelles discussions. Cette note était accompagnée d’une proposition, dans laquelle, s’agissant des RSUE, il était indiqué ce qui suit :

« Le Conseil considère que la situation des RSUE nécessite de nouvelles discussions, et que le statu quo devrait rester en place pour le moment. [Il] ne peut que s’accorder sur ce qui suit à ce stade :

[…]

–        [c]ontinuer d’examiner les options pour des alternatives à la situation où chaque RSUE est personnellement responsable pour le budget et emploie personnellement le personnel, y compris la possibilité d’établir une cellule de soutien du RSUE et faire rapport au Coreper d’ici au 31 mars 2014. »

151    Par ailleurs, le 13 mars 2014, le secrétariat général du Conseil a élaboré une note ayant pour objet l’approbation de nouvelles directives sur la nomination, le mandat et le financement des RSUE, dont le texte a été arrêté par le groupe « Relations extérieures » du Conseil, après des discussions sur la base d’un document de travail du SEAE, qui faisait suite à une conclusion du groupe « Affaires générales » du Conseil, du 17 décembre 2013, selon laquelle il était nécessaire d’adopter ces nouvelles directives. Il ressort de cette note que les délégations des États membres avaient considéré nécessaire de clarifier les implications juridiques, institutionnelles et opérationnelles de l’application, au personnel contractuel des RSUE, de nouvelles règles concernant le personnel contractuel des missions relevant de la PESC.

152    Dans ces conditions, il convient de considérer que l’adoption d’un régime juridique applicable au personnel contractuel recruté dans le cadre de la PESC relève d’un choix opéré au niveau du Conseil, ainsi que l’a d’ailleurs souligné le SEAE dans son exception d’incompétence et d’irrecevabilité.

153    En troisième lieu, il importe de souligner que la nomination d’un RSUE relève de la compétence du Conseil, sur proposition du haut représentant, en vertu de l’article 33 TUE.

154    En outre, l’article 28 TUE prévoit, à son paragraphe 1, premier alinéa, que, lorsqu’une situation internationale exige une action opérationnelle de l’Union, le Conseil adopte les décisions nécessaires et que celles-ci fixent leurs objectifs, leur portée, les moyens à mettre à la disposition de l’Union, les conditions relatives à leur mise en œuvre et, si nécessaire, leur durée. Ainsi, dans le cadre spécifique de la PESC, c’est au Conseil qu’il appartient de décider des moyens à mettre à la disposition de l’Union et des conditions relatives à la mise en œuvre des décisions qu’il adopte au titre de l’action opérationnelle de l’Union concernée, ce qui inclut notamment les moyens en personnel mis à la disposition de ladite action (voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2021, Jenkinson/Conseil e.a., T‑602/15 RENV, sous pourvoi, EU:T:2021:764, point 226).

155    Certes, la décision 2019/1340 ne vise pas expressément l’article 28 TUE, mais se réfère uniquement au « traité [UE], et notamment son article 33 et son article 31, paragraphe 2 ». Toutefois, cette décision implique une action opérationnelle relevant de la PESC, dans la mesure où elle institue un RSUE en Bosnie-Herzégovine, qui a pour mandat, en substance, de soutenir l’action de l’Union relative à des questions politiques particulières sur le territoire de cet État, en lien avec les autorités locales, et qui dispose, aux fins de la réalisation de ce mandat, d’un budget et d’une équipe.

156    D’ailleurs, l’action commune 2002/211, par laquelle le RSUE en Bosnie-Herzégovine a été nommé pour la première fois, a été adoptée au visa de l’article 14 UE (dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne), contenant, en son paragraphe 1, une disposition similaire à l’article 28 TUE dans sa version actuelle. En outre, la décision 2012/330/PESC du Conseil, du 25 juin 2012, modifiant la décision 2011/426/PESC portant nomination du RSUE en Bosnie-Herzégovine (JO 2012, L 165, p. 66), et la décision 2013/351/PESC du Conseil, du 2 juillet 2013, modifiant la décision 2011/426/PESC portant nomination du RSUE en Bosnie-Herzégovine (JO 2013, L 185, p. 7), ont été adoptées postérieurement à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, au visa, notamment, de l’article 28 TUE.

157    Ainsi, la nomination du RSUE en Bosnie-Herzégovine relève bien de l’article 28 TUE, de sorte que, conformément à la jurisprudence citée au point 154 ci-dessus, c’est au Conseil qu’il appartient de déterminer les moyens en personnel dont peut disposer cette entité.

158    Cette conclusion est confortée par les directives sur la nomination, le mandat et le financement des RSUE, visées au point 151 ci-dessus, à la section C desquelles il est indiqué que la décision du Conseil nommant un RSUE doit couvrir plusieurs éléments, dont les règles relatives à la constitution et à la composition de l’équipe du RSUE.

159    Dans ces conditions, l’adoption d’un statut applicable au personnel contractuel international du RSUE en Bosnie-Herzégovine relève des compétences du Conseil.

160    En quatrième lieu, lors de l’audience, le SEAE a soutenu, en se fondant sur l’article 30, paragraphe 1, TUE, que le Conseil ne pourrait adopter de régime juridique applicable au personnel contractuel relevant de la PESC sans être saisi d’une proposition en ce sens, émanant soit du haut représentant, soit d’un État membre. Toutefois, il ressort de cette disposition, aux termes de laquelle « [c]haque État membre, le haut représentant […], ou le haut représentant avec le soutien de la Commission peut saisir le Conseil de toute question relevant de la [PESC] et soumettre, respectivement, des initiatives ou des propositions au Conseil », que le haut représentant et les États membres disposent d’un droit d’initiative, mais que ce dernier ne constitue pas un monopole, ni une condition pour que le Conseil puisse adopter un acte tel qu’une décision relative au régime juridique du personnel contractuel recruté dans le cadre de la PESC en général, ou du RSUE en Bosnie-Herzégovine en particulier. Ainsi, cette disposition n’exclut pas que le Conseil puisse prendre une décision tendant à l’adoption d’un tel régime de sa propre initiative, s’il l’estime nécessaire, ou demander au haut représentant de lui soumettre une proposition en ce sens.

161    Cette conclusion est confortée par les éléments du dossier. D’une part, il ressort du point 151 ci-dessus que c’est à l’initiative du groupe « Affaires générales » du Conseil que les directives sur la nomination, le mandat et le financement des RSUE ont été révisées. D’autre part, dans ces mêmes directives, il est précisé, s’agissant de la procédure de nomination d’un RSUE, que, « [l]orsqu’il considère que le contexte politique l’exige, le Conseil peut inviter le [haut représentant] à présenter une proposition pour la nomination d’un RSUE chargé d’un mandat en lien avec une question politique particulière ».

162    Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que toute éventuelle carence fautive dans l’adoption d’un régime général applicable au personnel contractuel relevant, en général, de la PESC ou, en particulier, du RSUE en Bosnie-Herzégovine, doit être imputée au Conseil. Le troisième chef de conclusions est donc recevable en ce qui concerne le Conseil, et irrecevable en ce qui concerne la Commission et le SEAE.

 Sur le quatrième chef de conclusions

163    Par son quatrième chef de conclusions, subsidiaire par rapport aux trois premiers, le requérant demande la condamnation du Conseil, de la Commission et du SEAE, sur le fondement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, à lui verser la somme de 400 000 euros au motif que ses conditions d’emploi n’auraient pas respecté ses droits fondamentaux.

164    Or, ainsi que cela ressort des points 148 à 162 ci-dessus, c’est au Conseil qu’il revient de déterminer les conditions d’emploi du personnel contractuel du RSUE en Bosnie-Herzégovine. Partant, le Conseil doit être identifié comme étant partie défenderesse s’agissant du quatrième chef de conclusions.

165    Certes, le requérant renvoie également aux moyens avancés au soutien des premier et deuxième chefs de conclusions, qui visent le RSUE en Bosnie-Herzégovine en sa qualité d’employeur. Toutefois, le requérant n’a pas entendu engager la responsabilité non contractuelle de l’Union pour des agissements du RSUE en Bosnie-Herzégovine dans le cadre du quatrième chef de conclusions. En effet, tant dans la requête que dans ses observations sur les exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité, le requérant précise que le quatrième chef de conclusions concerne les « institutions européennes », ce qui, selon une lecture d’ensemble de ses écritures, doit être compris comme une référence non au RSUE en Bosnie-Herzégovine, mais au Conseil, à la Commission ainsi qu’au SEAE, bien que ce dernier ne soit pas une institution au sens de l’article 13 TUE.

166    Compte tenu de ce qui précède, le quatrième chef de conclusions doit être déclaré recevable en ce qui concerne le Conseil et irrecevable en ce qui concerne la Commission et le SEAE.

 Conclusion

167    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, premièrement, s’agissant du premier chef de conclusions, le Tribunal est compétent, d’une part, sur le fondement de l’article 263 TFUE, pour statuer sur la demande tendant à l’annulation de la décision de résiliation et, d’autre part, sur le fondement de l’article 268 TFUE, pour statuer sur les demandes tendant à la réparation pécuniaire des préjudices moral et matériel prétendument subis par le requérant du fait de cette décision. Ces demandes sont recevables en ce qu’elles concernent le RSUE en Bosnie-Herzégovine, et irrecevables en ce qu’elles concernent le Conseil, la Commission et le SEAE.

168    En outre, la demande tendant à la réintégration du requérant au sein du personnel du RSUE en Bosnie-Herzégovine doit être rejetée pour cause d’incompétence.

169    Deuxièmement, le deuxième chef de conclusions doit être rejeté, dans son ensemble, pour cause d’incompétence.

170    Troisièmement, les troisième et quatrième chefs de conclusions, pour lesquels le Tribunal est compétent en vertu de l’article 268 TFUE, sont recevables en ce qui concerne le Conseil et irrecevables en ce qui concerne la Commission et le SEAE.

 Sur les dépens

171    En vertu de l’article 133 du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance. En outre, aux termes de l’article 135, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, lorsque l’équité l’exige, le Tribunal peut décider qu’une partie qui succombe supporte, outre ses propres dépens, uniquement une fraction des dépens de l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

172    Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que ce dernier met fin à l’instance en ce qui concerne la Commission et le SEAE, ces parties défenderesses, à l’égard desquelles le recours doit être rejeté, ayant expressément conclu à la condamnation du requérant aux dépens.

173    Toutefois, ainsi qu’il a été relevé aux points 140 à 142 ci-dessus, l’action du RSUE en Bosnie-Herzégovine s’inscrit dans un contexte juridique complexe, caractérisé par les liens qu’il entretient avec le Conseil, avec la Commission et avec le SEAE. Ainsi, il était incontestablement difficile pour le requérant d’identifier les parties défenderesses lors de l’introduction du présent recours. Dans ces conditions, le Tribunal estime juste et équitable de décider que la Commission et le SEAE supportent leurs propres dépens.

174    Par ailleurs, le présent arrêt ne met pas fin à l’instance en ce qui concerne le Conseil et le RSUE en Bosnie-Herzégovine. Partant, il y a lieu de réserver les dépens exposés par le requérant et par ces deux parties défenderesses afférents aux exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté :

–        pour cause d’incompétence, en ce qu’il tend à ce que soit ordonnée la réintégration de M. Robert Stockdale au sein du personnel du représentant spécial de l’Union européenne en Bosnie-Herzégovine ;

–        pour cause d’incompétence, en ce qu’il tend à la requalification des contrats de travail à durée déterminée de M. Stockdale en un seul contrat de travail à durée indéterminée et au constat de la violation, par les parties défenderesses, de leurs obligations contractuelles ;

–        comme irrecevable, en ce qui concerne le Conseil de l’Union européenne, la Commission européenne et le Service européen pour l’action extérieure (SEAE), en ce qu’il tend à l’annulation de la décision du représentant spécial de l’Union européenne en Bosnie-Herzégovine du 17 novembre 2020 par laquelle le contrat de travail de M. Stockdale a été résilié et à la réparation des préjudices prétendument causés par cette décision ;

–        comme irrecevable, pour le surplus, en ce qui concerne la Commission et le SEAE.

2)      Les exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité sont rejetées pour le surplus.

3)      La Commission et le SEAE supporteront leurs propres dépens afférents aux exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité.

4)      Les dépens exposés par M. Stockdale, par le Conseil et par le représentant spécial de l’Union européenne en Bosnie-Herzégovine, afférents aux exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité, sont réservés.

da Silva Passos

Valančius

Reine

Truchot

 

Sampol Pucurull

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 juillet 2023.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

G. De Baere


Table des matières


Antécédents du litige

Conclusions des parties

En droit

Sur la compétence du Tribunal pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions en l’absence de clause compromissoire

Sur la nature des premier et deuxième chefs de conclusions

Sur la compétence du Tribunal pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions au titre de l’article 272 TFUE

Sur la compétence du Tribunal pour statuer sur les premier et deuxième chefs de conclusions au titre des articles 263 et 268 TFUE

– Sur les stipulations contractuelles

– Sur les dispositions de droit de l’Union

Conclusion

Sur les fins de non-recevoir tirées du non-respect des exigences de forme de la requête

Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté des conclusions du requérant dans leur ensemble

Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté du fondement juridique du recours

Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté du quatrième chef de conclusions en particulier

Sur la fin de non-recevoir tirée du manque de clarté des moyens invoqués au regard des différents chefs de conclusions

Conclusion

Sur la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité des troisième et quatrième chefs de conclusions pour non-respect de la procédure précontentieuse prévue aux articles 90 et 91 du statut

Sur les fins de non-recevoir relatives à l’identification de la ou des parties défenderesses

Sur le premier chef de conclusions

Sur le troisième chef de conclusions

Sur le quatrième chef de conclusions

Conclusion

Sur les dépens


*      Langue de procédure : le français.