Language of document : ECLI:EU:F:2011:91

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

22 juin 2011 (*)

«Non-lieu à statuer»

Dans l’affaire F‑46/10,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

AD, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me É. Boigelot, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. J. Currall et D. Martin, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de M. H. Tagaras (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. S. Van Raepenbusch, juges,

greffier: Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 16 juin 2010 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 21 juin suivant), AD demande l’annulation des décisions de la Commission des Communautés européennes, du 9 septembre et du 13 novembre 2009, lui refusant l’octroi de l’allocation de foyer prévue par l’article 1er de l’annexe VII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le «statut»), au motif, pour ce refus, que le couple qu’il forme avec W, son partenaire stable non matrimonial de même sexe, avait accès au mariage civil en Belgique, pays de sa résidence, et que, par conséquent, la condition posée par l’article 1er, paragraphe 2, sous c), point iv), de l’annexe VII du statut (ci-après la «disposition litigieuse») n’était pas remplie en l’espèce.

2        Aux termes de la disposition litigieuse, qui s’applique à la présente espèce en vertu de l’article 81 du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne, le fonctionnaire enregistré comme partenaire stable non matrimonial a droit à l’allocation de foyer, à condition que «le couple n’ait pas accès au mariage civil dans un État membre».

3        Dans son argumentation, le requérant faisait notamment valoir que W, son partenaire stable non matrimonial de même sexe, dispose de la double nationalité, belge et marocaine, et que le droit du pays de sa seconde nationalité, à savoir le droit marocain, non seulement n’autorise pas le mariage entre personnes de même sexe, mais, de surcroît, sanctionne pénalement les comportements homosexuels, ce qui exposerait son partenaire à de graves dangers si son homosexualité était révélée aux autorités marocaines suite à leur éventuel mariage en Belgique. Dès lors, il serait «de facto impossible» au requérant et à son partenaire de contracter mariage, ce qui équivaudrait, aux fins de l’application de la disposition litigieuse, à un véritable empêchement au mariage.

4        À la date d’introduction du présent recours, était pendante devant le Tribunal l’affaire W/Commission, enregistrée sous la référence F‑86/09, introduite par W, le partenaire du requérant, et tendant à l’annulation du refus de la Commission de lui octroyer l’allocation de foyer. Dans cette affaire, d’une part, la position de W, en ce qui concerne l’interprétation de la disposition litigieuse, était en substance la même que celle exposée au point précédent et soutenue par le requérant dans le cadre de la présente instance, d’autre part, la Commission avait également refusé l’octroi de l’allocation de foyer au motif que la législation marocaine réprimant les comportements homosexuels ne constituait pas un empêchement au mariage de W en Belgique.

5        Dans ce contexte, et suite à une demande de la Commission en ce sens à laquelle le requérant s’est rallié, le président de la deuxième chambre du Tribunal a, par ordonnance du 15 septembre 2010 adoptée en application de l’article 71, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, suspendu la procédure jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal mettant fin à l’instance dans l’affaire W/Commission, précitée.

6        Par arrêt du 14 octobre 2010, W/Commission (F‑86/09, ci-après l’«arrêt du 14 octobre 2010»), le Tribunal a accueilli le recours en jugeant que l’accès au mariage civil de W en Belgique ne pouvait être considéré comme concret et effectif au sens de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, motivation qui rejoint en substance l’argumentation du requérant telle qu’exposée sommairement au point 3 de la présente ordonnance.

7        Par lettre du 20 décembre 2010, la Commission a indiqué au Tribunal qu’elle renonçait à déposer un mémoire en défense dans l’affaire faisant l’objet de la présente ordonnance. En outre, elle n’a pas attaqué par pourvoi l’arrêt du 14 octobre 2010.

8        Plusieurs courriers ont été échangés entre les parties et entre celles-ci et le greffe du Tribunal quant aux conséquences à tirer, dans l’affaire faisant l’objet de la présente ordonnance, d’une part de l’arrêt du 14 octobre 2010 et, d’autre part, des prises de position ultérieures de la Commission.

9        Finalement, par lettre du 14 février 2011, le Tribunal a demandé à la Commission si ses prises de position, notamment celles mentionnées au point 7 de la présente ordonnance, pouvaient être interprétées en ce sens qu’elle reconnaissait que le requérant, du fait de son partenariat avec W, remplissait la condition posée par la disposition litigieuse pour l’octroi de l’allocation de foyer. Le Tribunal ajoutait que, dans l’affirmative, il envisageait, d’une part, de s’adresser au requérant pour lui demander s’il entendait renoncer à l’instance conformément à l’article 74 du règlement de procédure et, d’autre part, d’examiner si le recours était devenu sans objet au sens de l’article 75 du règlement de procédure.

10      Par lettre du 16 février 2011, la Commission a confirmé que l’interprétation du Tribunal, telle que mentionnée au point précédent de la présente ordonnance, était correcte et a exprimé l’avis que le recours était devenu sans objet.

11      Invité, par lettre du 3 mars 2011, à présenter ses observations sur l’application, en l’espèce, de l’article 75 du règlement de procédure, le requérant a affirmé que, dans la mesure où la Commission reconnaît clairement que son partenariat avec W ouvre droit à l’allocation de foyer en ce qu’il remplit la condition posée par la disposition litigieuse, son recours était devenu sans objet, sous réserve, toutefois, que la Commission exécute pleinement l’arrêt du 14 octobre 2010 et en tire les conséquences qui s’imposent le concernant. Le requérant ajoutait que, partant, il convenait de condamner la Commission aux dépens.

12      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu pour le Tribunal, par application de l’article 75 du règlement de procédure, de constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu d’y statuer, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la demande du Conseil de l’Union européenne, partie intervenante dans l’affaire W/Commission, précitée, d’intervenir également dans l’affaire faisant l’objet de la présente ordonnance.

13      Aux termes de l’article 89, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

14      En l’espèce, le recours est devenu sans objet du fait de l’acceptation par la Commission de la position soutenue par le requérant au sujet de l’application de la disposition litigieuse dans son cas, position que la Commission contestait initialement, ce qui a amené le requérant à porter l’affaire en justice. Il y a dès lors lieu de mettre à la charge de la Commission l’ensemble des dépens, ainsi, du reste, que le demande le requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

déclare et arrête:

1)      Il n’y a pas lieu de statuer sur le recours.

2)      La Commission européenne supporte l’ensemble des dépens.

Fait à Luxembourg, le 22 juin 2011.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       H. Tagaras

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions de l’Union européenne citées dans celle-ci sont disponibles sur le site internet www.curia.europa.eu et font, en principe, l’objet d’une publication, par ordre chronologique, au Recueil de la jurisprudence de la Cour de justice et du Tribunal ou au Recueil de jurisprudence – Fonction publique, selon le cas.


* Langue de procédure: le français.