Language of document : ECLI:EU:T:2015:497

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

15 juillet 2015 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Documents relatifs à l’affiliation de certains membres du Parlement au régime de pension complémentaire – Refus d’accès – Exception relative à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu – Article 8, sous b), du règlement (CE) no 45/2001 – Transfert de données à caractère personnel – Conditions relatives à la nécessité du transfert des données et au risque d’atteinte aux intérêts légitimes de la personne concernée »

Dans l’affaire T‑115/13,

Gert‑Jan Dennekamp, demeurant à Giethoorn (Pays‑Bas), représenté par Mes O. Brouwer, T. Oeyen et E. Raedts, avocats,

partie requérante,

soutenu par

République de Finlande, représentée par Mme H. Leppo, en qualité d’agent,

par

Royaume de Suède, représenté initialement par Mmes A. Falk, C. Meyer‑Seitz, S. Johannesson et U. Persson, puis par Mmes Falk, Meyer‑Seitz, Persson, MM. E. Karlsson, L. Swedenborg, C. Hagerman et F. Sjövall, en qualité d’agents,

et par

Contrôleur européen de la protection des données (CEPD), représenté par Mmes A. Buchta et U. Kallenberger, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

contre

Parlement européen, représenté par MM. N. Lorenz et N. Görlitz, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision A (2012) 13180 du Parlement, du 11 décembre 2012, refusant d’accorder au requérant l’accès à certains documents relatifs à l’affiliation de certains membres du Parlement au régime de pension complémentaire,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz (rapporteur) et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. L. Grzegorczyk, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 19 novembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine du litige

1        Le requérant, M. Gert‑Jan Dennekamp, est journaliste, employé par la Nederlandse Omroep Stichting (Association de radiotélévision néerlandaise).

2        Le 25 novembre 2005, le requérant a saisi, sur le fondement du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), le Parlement d’une demande d’accès à « tous les documents » relatifs au régime de pension complémentaire des membres du Parlement (ci‑après le « régime »). L’accès lui a été accordé à une note du secrétaire général au bureau du Parlement (ci‑après le « bureau »), aux « Comptes et rapports annuels » portant sur plusieurs années et au procès‑verbal d’une réunion du bureau. Ultérieurement, la plainte auprès du Médiateur européen, déposée par le requérant en raison du refus de lui accorder l’accès à la liste des membres du Parlement participant au régime, a été clôturée.

3        Par lettre du 20 octobre 2008, le requérant a introduit une demande d’accès à tous les documents indiquant quels membres du Parlement (ci‑après les « membres ») participent au régime, à la liste des membres qui participaient au régime à la date du 1er septembre 2005 et à la liste des participants à la date de la demande d’accès, en faveur desquels le Parlement versait une cotisation mensuelle. Par une décision du 17 décembre 2008, le Parlement a rejeté la demande confirmative d’accès aux documents susmentionnés.

4        Le Tribunal a rejeté le recours en annulation de la décision du 17 décembre 2008 par l’arrêt du 23 novembre 2011, Dennekamp/Parlement (T‑82/09, EU:T:2011:688). En substance, le Tribunal a considéré que le requérant n’avait pas tenu compte, dans sa demande d’accès aux documents, du principe posé par l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager (C‑28/08 P, Rec, EU:C:2010:378, point 63), selon lequel il convient, lorsqu’une demande d’accès porte sur des données à caractère personnel, d’appliquer dans son intégralité le règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1). Plus précisément, le Tribunal a constaté que le requérant n’avait pas démontré la nécessité du transfert de données à caractère personnel, tel qu’il était exigé par les dispositions de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 (arrêt Dennekamp/Parlement, précité, EU:T:2011:688, points 31 à 35).

5        Par un courrier du 10 septembre 2012, le requérant a demandé au président du Parlement de lui accorder l’accès à quatre catégories de documents : tous les documents dont il résulte quels sont, parmi les membres actuels, ceux qui sont affiliés au régime ; la liste nominative des membres qui étaient affiliés au régime après septembre 2005 ; la liste nominative des membres actuellement affiliés au régime et pour lesquels le Parlement verse une cotisation mensuelle ; tous les documents ayant un lien avec la situation financière du régime depuis 2009 (ci‑après la « demande initiale »).

6        Dans la demande initiale, le requérant faisait valoir, d’une part, qu’il existait une nécessité objective, au sens de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, au transfert des données à caractère personnel et, d’autre part, qu’il n’y avait pas de risque que les intérêts légitimes des personnes concernées subissent un préjudice en raison de la divulgation des données en question.

7        Sur la nécessité du transfert des données à caractère personnel, le requérant, s’appuyant sur l’existence d’un grand intérêt public à la transparence, reconnu par le règlement no 1049/2001, mettait en avant le besoin pour le public de mieux comprendre comment les décisions étaient prises et le fait que, pour ce faire, un débat pouvait être engagé au travers des reportages de presse. En l’espèce, il soulignait qu’il était de la plus haute importance pour les citoyens européens de savoir quels étaient les membres qui avaient un intérêt personnel dans le régime, eu égard, principalement, aux circonstances que le Parlement payait deux tiers des contributions des membres participant au régime, qu’il avait, à plusieurs reprises, comblé les déficits du régime et qu’il s’était engagé à compenser toutes les pertes que subirait le régime, assurant ainsi aux membres participant au régime le maintien des droits à pension acquis, ce qui traduisait, selon le requérant, une utilisation considérable de fonds publics.

8        Sur l’absence de tout préjudice aux intérêts légitimes des membres, le requérant était d’avis qu’il était difficile de distinguer quel préjudice découlerait de la divulgation des noms des membres participant au régime, puisque ceux‑ci pourraient continuer à y participer et à en tirer les bénéfices, et que leurs investissements privés ne seraient pas, de cette manière, divulgués. Dans l’hypothèse où il serait considéré que la divulgation des noms des membres participant au régime affecterait leurs intérêts privés, le requérant soutenait qu’il ne s’agirait pas d’intérêts privés légitimes, puisque, eu égard au fait que le régime a été établi et influencé par des élus pour le compte d’élus et qu’il verse des bénéfices financés par des fonds publics, de tels intérêts privés ne devraient pas être traités de la même manière que ceux tenant au caractère privé des contributions à un régime de pension normal. Pour le requérant, une réaction négative du public à la participation de certains membres au régime ne pourrait pas être regardée comme une atteinte à la vie privée que le règlement no 1049/2001 aurait pour but d’éviter.

9        Enfin, dans la demande initiale, le requérant, après s’être référé à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci‑après la « CEDH »), a soutenu que, par sa demande, il ne cherchait pas à interférer avec le domicile ou la vie familiale des membres, mais à engager un débat public sur l’exercice des fonctions publiques auquel les citoyens européens devraient être autorisés à participer.

10      Par un courrier du 17 octobre 2012, le secrétaire général du Parlement a refusé l’accès aux trois premières catégories de documents, au motif qu’il s’agissait de documents contenant des données à caractère personnel pour lesquelles l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 exigeait que le demandeur établisse la nécessité de leur transfert et qu’il n’existait aucune raison de penser que ce transfert pourrait porter atteinte aux intérêts légitimes des personnes concernées. Or, le secrétaire général a considéré que le requérant n’avait pas démontré la nécessité du transfert des données en cause en se référant exclusivement à l’intérêt public à la transparence. Par suite, il a estimé qu’il n’était pas nécessaire d’examiner s’il existait un risque d’atteinte aux intérêts légitimes des membres. Enfin, s’agissant de la quatrième catégorie de documents demandés par le requérant, le secrétaire général a identifié les documents relatifs à la situation financière du régime depuis 2009 et a fourni les références sous lesquelles ces documents pouvaient être trouvés sur le site Internet du Parlement.

11      Par un courrier du 8 novembre 2012, le requérant a présenté, en application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, une demande confirmative d’accès aux trois premières catégories de documents citées au point 5 ci‑dessus (ci‑après la « demande confirmative »). Le requérant a insisté sur les raisons pour lesquelles il estimait nécessaire le transfert des données à caractère personnel en cause, en se fondant sur le droit d’accès à l’information et sur le droit à la liberté d’expression. Il a souligné l’absence de mise en balance par le Parlement de la nécessité du transfert de ces données avec le droit au respect de la vie privée des membres concernés, ainsi que l’absence d’explication quant à la manière dont l’accès demandé aurait pu porter concrètement et spécifiquement atteinte à la vie privée desdits membres. Ensuite, le requérant a expliqué de manière détaillée, d’une part, en quoi il était nécessaire de divulguer les documents demandés, à savoir pouvoir réaliser un reportage sur la façon dont les fonds publics étaient dépensés, sur le possible impact des intérêts privés sur les votes des membres et sur le fonctionnement des mécanismes de contrôle, et, d’autre part, pour quels motifs les éventuels intérêts privés des membres concernés par les documents demandés ne pouvaient l’emporter sur la liberté d’expression et l’intérêt du public à être informé de la façon dont les fonds publics étaient dépensés ainsi que des décisions politiques prises.

12      Par une décision A (2012) 13180, du 11 décembre 2012, le Parlement a rejeté la demande confirmative (ci‑après la « décision attaquée »).

13      Dans la décision attaquée, le Parlement a fondé le refus d’accès aux documents demandés sur l’exception tirée du risque d’atteinte à la vie privée et à l’intégrité de l’individu, prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, au motif que ces documents contenaient des données à caractère personnel au sens de l’article 2, sous a), du règlement no 45/2001, dont la divulgation serait contraire à ce règlement, lequel doit être intégralement appliqué lorsque les documents demandés contiennent de telles données.

14      Dans la décision attaquée, s’agissant de la condition de nécessité prévue à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, premièrement, le Parlement a considéré qu’elle devait être interprétée restrictivement comme toute autre exception à un droit fondamental. Deuxièmement, il a concédé que le requérant avait été très précis quant à ses intentions concernant les données personnelles en cause, mais que les arguments de celui‑ci n’établissaient pas la nécessité de leur transfert. En effet, le Parlement a été d’avis qu’admettre comme argument valable dans le contexte de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 l’invocation d’un intérêt du public et des medias à exercer un contrôle sur les dépenses publiques permettrait la divulgation de données à caractère personnel au‑delà de toute limite raisonnable et méconnaîtrait les règles de protection de celles‑ci. Plus précisément, le Parlement a noté que le requérant n’établissait pas de lien entre ses intentions et les données précises auxquelles il demandait à accéder. Or, il ne serait ni nécessaire ni proportionné de demander les noms de tous les membres participant au régime, les décisions relatives à ce dernier étant adoptées par le bureau. Troisièmement, le Parlement a relevé que le risque de conflit d’intérêts était inhérent à la situation d’un parlement, qui décidait toujours des rémunérations de ses membres, un tel fait ne pouvant justifier à lui seul la divulgation de données à caractère personnel. Quatrièmement, le Parlement a considéré que l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 devait être interprété de manière à assurer la ratio et l’effet utile dudit règlement et que son application ne pouvait conduire à vider celui‑ci de toute substance, ce qui serait le cas si, comme en l’espèce, le transfert des données à caractère personnel avait pour seul but leur divulgation immédiate au public. Or, l’application de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 exigeant la démonstration de la nécessité du transfert des données à caractère personnel par celui qui le demande, le but recherché par le requérant permettrait à des personnes qui n’ont pas démontré une telle nécessité d’accéder à ces données, contrairement à la règle énoncée par l’arrêt Commission/Bavarian Lager, point 4 supra (EU:C:2010:378, point 63).

15      S’agissant de la mise en balance de la nécessité du transfert des données à caractère personnel en cause et des intérêts légitimes des personnes concernées, le Parlement a considéré, au regard du règlement no 45/2001, que ces derniers prévalaient, au motif qu’il ne serait pas proportionné d’admettre un tel transfert. Premièrement, le Parlement a admis que les intérêts légitimes d’un membre étaient moins étendus que ceux d’une personne privée sans engagement public et que, par conséquent, le degré de protection de leurs données était moindre. Deuxièmement, le Parlement a, toutefois, relevé que le financement public du régime n’impliquait pas que la protection des données à caractère personnel des membres ne devait pas être appliquée ou que ceux‑ci n’auraient pas d’intérêts légitimes à faire valoir contre une divulgation de ces données. Dans ce contexte, le Parlement a exposé qu’il fallait opérer une distinction entre les données relevant de la sphère publique, sujettes à un plus faible degré de protection, et celles relevant de la sphère privée, protégées par la notion d’intérêts légitimes. Or, selon le Parlement, les données à caractère personnel en cause relevaient de la sphère privée des membres, les informations qu’elles contenaient présentant un intérêt légitime à être protégées. Il s’agirait de données portant sur la situation financière personnelle des membres concernés, à savoir les contributions à un régime de retraite et les droits à pension en découlant, questions de nature privée. Le Parlement notait que, certes, l’existence d’un mandat de membre était la condition sine qua non de l’accès au régime, mais que la pension n’était versée qu’après la fin du mandat et que les contributions personnelles étaient importantes. Troisièmement, le Parlement a fait valoir que, si le financement par des fonds publics suffisait à dénier le caractère de données personnelles, cela vaudrait également pour tout agent d’une administration publique. Quatrièmement, le Parlement a conclu, dans la mise en balance des intérêts, que, eu égard notamment au caractère général de l’intérêt des medias et du grand public dans la situation personnelle des membres, il n’était pas proportionné de divulguer les données demandées, sauf à admettre que soit possible l’accès à toutes les données à caractère personnel des membres ou même de tout agent public, impliquant des dépenses publiques. Pour le Parlement, une telle approche viderait de toute substance l’article 16 TFUE, alors que, pour parvenir à ses fins, le requérant aurait pu se contenter de demander des chiffres agrégés concernant la situation financière du régime. Cinquièmement, le Parlement a noté qu’il existait des mesures plus appropriées pour atteindre les buts recherchés par le requérant, ce qui assurait suffisamment un contrôle des dépenses publiques et informait le public.

 Procédure et conclusions des parties

16      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 février 2013, le requérant a introduit le présent recours.

17      Par actes déposés respectivement les 29, 30 mai et 11 juin 2013, le Contrôleur européen pour la protection des données (CEPD), le Royaume de Suède et la République de Finlande ont demandé à intervenir au soutien des conclusions du requérant.

18      Par ordonnances du président de la deuxième chambre du Tribunal du 11 septembre 2013, le CEPD, d’une part, et la République de Finlande et le Royaume de Suède, d’autre part, ont été admis à intervenir.

19      La composition des chambres ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la cinquième chambre, à laquelle l’affaire a, par conséquent, été attribuée.

20      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner le Parlement aux dépens, y compris à ceux exposés par les parties intervenantes.

21      La République de Finlande, le Royaume de Suède et le CEPD concluent à ce qu’il plaise au Tribunal de faire droit aux conclusions du requérant et, ainsi, d’annuler la décision attaquée.

22      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

23      Par mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a posé une question aux parties principales. Les parties ont répondu par courriers déposés le 16 octobre 2014 pour le Parlement et le 17 octobre 2014 pour le requérant.

24      À l’issue de l’audience, plusieurs questions écrites ont été adressées au Parlement, dont la réponse est parvenue au greffe du Tribunal le 7 janvier 2015. Le requérant a présenté ses observations sur la réponse du Parlement. La phase orale de la procédure a été clôturée le 2 février 2015.

 En droit

1.     Sur l’étendue du litige

25      Dans sa réponse à la mesure d’organisation de la procédure, le requérant a indiqué que 64 membres participant au régime s’étaient opposés aux modifications apportées à celui‑ci par le bureau dans ses réunions des 9 mars et 1er avril 2009, en ayant déposé un recours devant le Tribunal, rejeté par l’ordonnance du 15 décembre 2010, Albertini e.a. et Donnelly/Parlement (T‑219/09 et T‑326/09, Rec, EU:T:2010:519).

26      En outre, un autre membre participant au régime a également déposé un recours devant le Tribunal contre la décision du Parlement refusant de lui accorder le bénéfice de sa pension complémentaire volontaire sous la forme de capital (arrêt du 18 octobre 2011, Purvis/Parlement, T‑439/09, Rec, EU:T:2011:600).

27      Il convient dès lors de constater que les noms de 65 membres participant au régime avaient été rendus publics aux dates auxquelles le Tribunal s’était prononcé dans les trois affaires mentionnées aux points 25 et 26 ci‑dessus, c’est‑à‑dire avant l’introduction du présent recours.

28      Dans cette mesure, le présent recours est sans objet (voir, en ce sens, ordonnance du 11 décembre 2006, Weber/Commission, T‑290/05, EU:T:2006:381, point 42).

29      Par conséquent, il n’y a pas lieu de statuer sur cet aspect du litige.

2.     Sur le bien‑fondé du recours

30      Pour contester la décision attaquée, le requérant soulève deux moyens. Le premier moyen est tiré de la violation des articles 11 et 42 de la charte des droits fondamentaux et d’une erreur de droit dans l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, lu en combinaison avec l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001. Le second moyen est tiré d’un défaut de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 11 et 42 de la charte des droits fondamentaux et d’une erreur de droit dans l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, lu en combinaison avec l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001

31      Dans une première branche du moyen, le requérant soutient que, dans la demande confirmative, il a fourni, conformément à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, des justifications expresses et légitimes de la nécessité du transfert des données à caractère personnel contenues dans les documents demandés, en se fondant sur le droit à l’information des citoyens européens. Dans une seconde branche, le requérant fait valoir que, dans la mise en balance des intérêts, les membres n’ont pas d’intérêt légitime à la protection de leur vie privée au sens de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001.

32      La première branche du moyen se divise en quatre griefs, par lesquels le requérant estime, premièrement, avoir démontré la nécessité du transfert des données à caractère personnel, critère prévu par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 et interprété à la lumière des arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra (EU:C:2010:378, point 63), et Dennekamp/Parlement, point 4 supra (EU:T:2011:688, points 31 à 35), deuxièmement, que le critère de nécessité ne doit pas faire l’objet d’une interprétation restrictive, troisièmement, avoir explicitement fait le lien entre l’objectif poursuivi par sa demande et la nécessité de divulguer tous les noms demandés, moyen le plus approprié pour atteindre cet objectif, et, quatrièmement, que la décision attaquée ne tient pas suffisamment compte de la structure et de l’objectif du règlement no 1049/2001.

33      La seconde branche du moyen se divise en trois griefs. Premièrement, le requérant soutient que les membres n’ont pas d’intérêt légitime à la protection de leur vie privée au sens de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, puisqu’ils soumettent leur conduite à un important degré d’examen du public. Deuxièmement, il est d’avis que, dans la décision attaquée, le Parlement n’a pas justifié le fait que la divulgation des documents demandés portait atteinte aux intérêts légitimes des membres. Par un troisième grief, il estime que, même si le Parlement avait, à juste titre, considéré que l’information demandée relevait de la sphère privée des membres, cela n’aurait pas suffi pour la protéger en tant qu’intérêt légitime au sens de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, qui exige une mise en balance des intérêts en présence.

34      Il convient, tout d’abord, d’examiner les conditions au regard desquelles le transfert de données à caractère personnel est autorisé par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, en répondant notamment aux deuxième et quatrième griefs de la première branche du moyen, qui visent à contester la façon dont le Parlement a conjointement appliqué les règlements no 1049/2001 et no 45/2001. Ensuite, il convient de déterminer si le Parlement a correctement apprécié les justifications données par le requérant quant à la nécessité du transfert des données à caractère personnel, en répondant aux premier et troisième griefs de la première branche du moyen. Enfin, il convient d’examiner si le Parlement a correctement mis en balance les intérêts légitimes des membres à la protection de leur vie privée et l’intérêt en faveur du transfert des données à caractère personnel, en répondant aux trois griefs de la seconde branche du moyen, qui se recoupent largement.

 Sur l’application conjointe des règlements no 1049/2001 et no 45/2001 et sur l’interprétation des conditions d’application de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001

35      À titre liminaire, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 15, paragraphe 3, TFUE, tout citoyen de l’Union européenne et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre ont un droit d’accès aux documents des institutions de l’Union sous réserve des principes et des conditions qui sont fixés conformément à la procédure visée à l’article 294 TFUE (voir arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, Rec, EU:C:2014:112, point 61 et jurisprudence citée). Conformément à son considérant 1, le règlement no 1049/2001 s’inscrit dans la volonté exprimée à l’article 1er, deuxième alinéa, TUE, inséré par le traité d’Amsterdam, de marquer une nouvelle étape dans le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe, dans laquelle les décisions sont prises dans le plus grand respect possible du principe d’ouverture et le plus près possible des citoyens. Ainsi que le rappelle le considérant 2 dudit règlement, le droit d’accès du public aux documents des institutions se rattache au caractère démocratique de ces dernières (arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, Rec, EU:C:2008:374, point 34, et du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, Rec, EU:C:2011:496, point 72).

36      À cette fin, le règlement no 1049/2001 vise, comme l’indiquent son considérant 4 et son article 1er, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible (arrêts Suède et Turco/Conseil, point 35 supra, EU:C:2008:374, point 33, et Suède/MyTravel et Commission, point 35 supra, EU:C:2011:496, point 73).

37      Certes, ce droit n’en est pas moins soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. Plus spécifiquement, et en conformité avec son considérant 11, ledit règlement prévoit, à son article 4, un régime d’exceptions autorisant les institutions à refuser l’accès à un document dans le cas où la divulgation de ce dernier porterait atteinte à l’un des intérêts protégés par cet article (arrêt Suède/MyTravel et Commission, point 35 supra, EU:C:2011:496, point 74).

38      Néanmoins, dès lors que de telles exceptions dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (arrêts Suède et Turco/Conseil, point 35 supra, EU:C:2008:374, point 36, et Suède/MyTravel et Commission, point 35 supra, EU:C:2011:496, point 75).

39      Ainsi, lorsque l’institution concernée décide de refuser l’accès à un document dont la communication lui a été demandée, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant aux questions de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001 et invoquée par cette institution (arrêt Suède/MyTravel et Commission, point 35 supra, EU:C:2011:496, point 76). En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêts Suède et Turco/Conseil, point 35 supra, EU:C:2008:374, point 43, et Suède/MyTravel et Commission, point 35 supra, EU:C:2011:496, point 76).

40      Il importe également de rappeler qu’il résulte de la jurisprudence que, lors de l’examen de la relation existant entre les règlements no 1049/2001 et no 45/2001 en vue de l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, à savoir la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, il faut garder à l’esprit que lesdits règlements ont des objectifs différents. Le premier vise à assurer la plus grande transparence possible du processus décisionnel des autorités publiques ainsi que des informations qui fondent leurs décisions. Il vise donc à faciliter au maximum l’exercice du droit d’accès aux documents ainsi qu’à promouvoir de bonnes pratiques administratives. Le second vise à assurer la protection des libertés et des droits fondamentaux des personnes physiques, notamment de leur vie privée, lors du traitement de données à caractère personnel (arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 49, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 23).

41      Les règlements no 45/2001 et no 1049/2001 ne comportant pas de dispositions prévoyant expressément la primauté de l’un sur l’autre, il convient, en principe, d’assurer leur pleine application (arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 56, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 24).

42      L’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, sur lequel le Parlement a fondé son refus d’accès aux documents demandés dans la décision attaquée, prévoit que « [l]es institutions refusent l’accès à un document dans le cas où la divulgation porterait atteinte à la protection […] de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, notamment en conformité avec la législation [de l’Union] relative à la protection des données à caractère personnel ». Il ressort de la jurisprudence qu’il s’agit d’une disposition indivisible qui exige que l’atteinte éventuelle à la vie privée et à l’intégrité de l’individu soit toujours examinée et appréciée conformément à la législation de l’Union relative à la protection des données à caractère personnel, notamment au règlement no 45/2001. Cette disposition établit ainsi un régime spécifique et renforcé de protection d’une personne dont les données à caractère personnel pourraient, le cas échéant, être communiquées au public (arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, points 59 et 60, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 25).

43      Lorsqu’une demande fondée sur le règlement no 1049/2001 vise à obtenir l’accès à des documents comprenant des données à caractère personnel, les dispositions du règlement no 45/2001 deviennent intégralement applicables, y compris l’article 8 de celui‑ci (arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 63, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 26).

44      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’argumentation du requérant, soutenu en cela par la République de Finlande, le Royaume de Suède et le CEPD.

45      Le requérant soutient que la décision attaquée ne tient pas suffisamment compte de la structure et de l’objectif du règlement no 1049/2001, à savoir améliorer la responsabilité et la légitimité du processus décisionnel public en le rapprochant du citoyen par la transparence. En application de l’arrêt Commission/Bavarian Lager, point 4 supra (EU:C:2010:378), il ne serait pas possible de priver le règlement no 1049/2001 de son effet utile par une interprétation des dispositions pertinentes qui impliquerait qu’une divulgation légitime ne pourrait jamais poursuivre l’objectif d’une divulgation complète au public. En outre, un tel résultat ne prendrait pas en considération les conditions au regard desquelles la Cour européenne des droits de l’homme estime que l’intérêt du public à recevoir des informations prévaut sur le droit au respect de la vie privée d’une personnalité publique, à savoir que le reportage relate des faits susceptibles de contribuer à un débat dans une société démocratique au sujet de ces personnalités quand elles exercent leurs fonctions officielles. Le requérant considère que le Parlement viole l’article 11 de la charte des droits fondamentaux lu à la lumière de l’article 10 de la CEDH, lorsqu’il est affirmé, dans la décision attaquée, qu’il serait contraire à l’objectif de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 que la divulgation publique des données constitue un objectif légitime.

46      Dans la réplique, le requérant fait valoir que le critère de nécessité prévu à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 ne doit pas faire l’objet d’une interprétation restrictive, ce qui aboutirait à une interprétation extensive d’une exception au droit fondamental d’accès aux documents, à une restriction illégitime de ce droit et à contredire la jurisprudence de l’Union.

47      La thèse du requérant repose sur l’idée que l’application conjointe des règlements no 1049/2001 et no 45/2001, conformément à l’arrêt Commission/Bavarian Lager, point 4 supra (EU:C:2010:378), ne doit pas conduire à neutraliser complètement les dispositions du premier règlement et, partant, le droit fondamental d’accès aux documents des institutions de l’Union dont bénéficie tout citoyen européen. D’ailleurs, la République de Finlande estime, dans son mémoire en intervention, qu’il y a lieu d’appliquer le contenu de base et les principes fondamentaux des deux règlements, pour que l’application de l’un soit compatible et cohérente avec celle de l’autre. Parmi ces principes, elle considère qu’il convient de prendre en compte, notamment, la règle édictée par le règlement no 1049/2001 relative à l’absence de justification des demandes d’accès aux documents. Dans ce contexte, il ne saurait être donné une interprétation restrictive de la notion de nécessité du transfert de données à caractère personnel, prévue à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, qui restreindrait ou annihilerait toute possibilité d’accès aux documents lorsque la demande est fondée sur un intérêt général comme le droit à l’information.

48      Afin de répondre à cette argumentation, qui vise à établir un équilibre entre le droit d’accès aux documents détenus par les institutions, découlant du règlement no 1049/2001, et les obligations résultant du règlement no 45/2001 pour le transfert de données à caractère personnel par ces mêmes institutions, il convient de préciser l’articulation des règles fixées par les deux règlements.

49      En premier lieu, il importe de rappeler que, dans le contexte d’une demande d’accès aux documents, le règlement no 45/2001 n’est appliqué que lorsque l’institution saisie refuse l’accès aux documents en opposant au demandeur l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001. Cette disposition exige que l’atteinte éventuelle à la vie privée et à l’intégrité de l’individu soit examinée et appréciée conformément à la législation de l’Union relative à la protection des données à caractère personnel, notamment au règlement no 45/2001 (voir, en ce sens, arrêt Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 59).

50      Si les documents demandés contiennent des données à caractère personnel au sens de l’article 2, sous a), du règlement no 45/2001, l’institution doit, en principe, assurer la pleine application des deux règlements à la demande d’accès (arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 56, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 24). Cependant, il est à noter que le règlement no 45/2001 établit un régime spécifique et renforcé de protection d’une personne dont les données à caractère personnel pourraient être communiquées au public et que, lors de l’examen de la demande d’accès, ses dispositions deviennent intégralement applicables, y compris son article 8 (arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, points 60 et 63, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, points 25 et 26). D’ailleurs, les considérants 7 et 14 du règlement no 45/2001, lus ensemble, indiquent que les dispositions de celui‑ci sont contraignantes et s’appliquent à tout traitement de données à caractère personnel effectué par les institutions de l’Union dans quelque contexte que ce soit.

51      Ainsi, lorsqu’une demande d’accès aux documents peut avoir pour conséquence, s’il y est répondu favorablement, la divulgation de données à caractère personnel, l’institution saisie doit appliquer toutes les dispositions du règlement no 45/2001, sans que les différentes règles et principes inscrits dans le règlement no 1049/2001 puissent avoir pour effet de limiter la plénitude de la protection accordée à ces données. Un tel principe d’action des institutions découle, selon le considérant 12 du règlement no 45/2001, de l’importance reconnue aux droits conférés aux personnes concernées pour leur protection à l’égard du traitement de telles données.

52      Dans un tel cadre général, il est certes vrai que, comme le soulignent le requérant et la République de Finlande, le droit d’accès aux documents n’est pas, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, conditionné par la justification, par le demandeur, d’un intérêt à la divulgation desdits documents. Il s’agit là d’une traduction concrète des principes d’ouverture et de transparence qui doivent animer l’action des institutions de l’Union ainsi que du caractère démocratique de ces dernières.

53      Or, il convient de constater que, en obligeant les institutions à examiner le risque d’atteinte à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu au travers du règlement no 45/2001 et des restrictions et limitations qu’il impose au traitement des données à caractère personnel, notamment au moyen de son article 8, sous b), l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 exige, indirectement, du demandeur qu’il démontre, par une ou des justifications expresses et légitimes, la nécessité du transfert des données à caractère personnel contenues dans les documents auxquels il demande à accéder (voir, en ce sens, arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 78, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 30).

54      Ainsi, l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 requiert de l’institution saisie qu’elle se livre, dans un premier temps, à une appréciation du caractère nécessaire, donc proportionné, du transfert des données à caractère personnel au regard de l’objectif poursuivi par le demandeur (voir, en ce sens, arrêt Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 34). Ce même article 8, sous b), du règlement no 45/2001 impose à l’institution saisie d’examiner, dans un second temps, si le transfert de données à caractère personnel peut porter atteinte aux intérêts légitimes des personnes concernées, en déterminant, au cours de cet examen, si l’objectif poursuivi par le demandeur est susceptible d’emporter une telle conséquence (voir, en ce sens, arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 78, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 30). Ce faisant, l’institution est conduite à apprécier la justification donnée par le demandeur au transfert des données à caractère personnel et partant à l’accès aux documents.

55      Par suite, la mise en œuvre de la condition de nécessité du transfert des données à caractère personnel inscrite dans l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 conduit à reconnaître l’existence d’une exception à la règle fixée par l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001. Une telle conséquence est justifiée par l’effet utile qu’il convient de conférer aux dispositions du règlement no 45/2001, puisqu’une solution autre que l’examen de la nécessité du transfert des données à caractère personnel au regard de l’objectif poursuivi par le demandeur d’accès aux documents conduirait nécessairement à laisser inappliqué l’article 8, sous b), de ce règlement.

56      En deuxième lieu, il importe de prendre tout particulièrement en considération les caractéristiques essentielles du régime de protection accordé par le règlement no 45/2001 aux personnes physiques à l’égard du traitement de leurs données à caractère personnel, puisque la mise en œuvre de l’exception au droit d’accès prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 implique l’application pleine et entière du règlement no 45/2001, dont l’article 1er précise qu’il a pour objet, notamment, la protection des droits et libertés fondamentaux des personnes physiques, notamment de leur vie privée.

57      Au chapitre II, section 2, du règlement no 45/2001, l’article 5 du règlement no 45/2001 précise les motifs pour lesquels un traitement de données à caractère personnel est considéré comme licite. Les articles 7, 8 et 9 du règlement no 45/2001 fixent les conditions pour effectuer un transfert de données à caractère personnel, respectivement, entre institutions ou organes de l’Union ou en leur sein, à des destinataires autres que les institutions et organes de l’Union et relevant de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO L 281, p. 31), et à des destinataires autres que les institutions et organes de l’Union et ne relevant pas de la directive 95/46.

58      Si aucun des articles 7, 8 et 9 du règlement no 45/2001 n’institue un principe assorti d’exceptions, chacun d’eux limite précisément les possibilités de transfert de données à caractère personnel de façon à soumettre celui‑ci à de strictes conditions, qui, si elles ne sont pas remplies, l’interdisent. Parmi de telles conditions figure toujours la nécessité du transfert au regard de buts de nature différente.

59      Or, le règlement no 45/2001 vise, conformément à son considérant 5, à donner aux personnes qu’il définit comme concernées des droits juridiquement protégés et à définir les obligations des responsables du traitement au sein des institutions et organes de l’Union en matière de traitement des données. Pour atteindre une telle finalité, les conditions fixées en ce qui concerne la possibilité pour une institution ou un organe de l’Union de transférer des données à caractère personnel doivent être interprétées strictement, sauf à mettre en péril les droits reconnus à ces personnes par le règlement no 45/2001 en tant que droits fondamentaux, selon son considérant 12. Ainsi, la satisfaction de la condition de nécessité implique de démontrer que le transfert des données à caractère personnel est la mesure la plus appropriée parmi les autres mesures envisageables pour atteindre l’objectif poursuivi par le demandeur et qu’elle est proportionnée à cet objectif, ce qui oblige le demandeur à présenter des justifications expresses et légitimes en ce sens (voir, en ce sens, arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 78, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, points 30 et 34).

60      Contrairement à l’argumentation du requérant, la condition de nécessité prévue à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, ainsi interprétée, ne peut être regardée comme une interprétation extensive d’une exception au droit fondamental d’accès aux documents, qui aboutirait à une restriction illégitime de ce droit, contraire à la jurisprudence de l’Union. Une telle interprétation ne conduit pas à créer une exception de « catégorie » au principe d’accès aux documents en faveur des données à caractère personnel, mais à concilier les deux droits fondamentaux qui s’opposent lorsqu’une demande d’accès aux documents porte sur des données à caractère personnel, protégées par le règlement no 45/2001, ainsi que cela ressort des points 56 à 59 ci‑dessus. Dans l’articulation des dispositions protégeant ces droits antagonistes, le droit d’accès aux documents est également préservé, puisque l’application obligatoire, comme en l’espèce, de l’article 8, sous b), du règlement no°45/2001 ne conduit, dans un premier temps, qu’à exiger que le demandeur démontre la nécessité d’obtenir le transfert des données à caractère personnel, c’est‑à‑dire de prouver qu’il s’agit du moyen proportionné le plus approprié pour parvenir à l’objectif qu’il recherche (voir, en ce sens, arrêt Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 34), et, dans un second temps, qu’à imposer que l’institution examine si le transfert de données à caractère personnel peut porter atteinte aux intérêts légitimes des personnes concernées au regard de l’objectif poursuivi par le demandeur (voir, en ce sens, arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 78, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 30). L’interprétation stricte des conditions posées par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 ne conduit donc nullement à instaurer une exception qui empêcherait de manière générale tout accès aux documents contenant des données à caractère personnel.

61      Pour autant, l’interprétation stricte de la condition de nécessité, prévue à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, ne signifie pas qu’une justification du transfert de données à caractère personnel de nature générale, comme le droit à l’information du public quant au comportement des membres dans l’exercice de leurs fonctions, ne puisse être prise en considération. En réalité, ainsi qu’il résulte déjà du point 54 ci‑dessus, la nature générale de la justification du transfert n’a pas d’incidence directe sur le point de savoir si le transfert est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi par le demandeur.

62      Il est vrai que, comme le Parlement le relève, les dispositions de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 ne prévoient pas la mise en balance de l’intérêt public relatif à la vie privée et à l’intégrité de l’individu avec un intérêt public supérieur. Cependant, à l’exception de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 45/2001, qui exige que les données à caractère personnel ne soient pas traitées de manière incompatible avec les finalités pour lesquelles ces données ont été collectées, aucune disposition dudit règlement ne limite le champ des justifications que le demandeur peut donner au transfert sollicité. Rien ne l’empêche d’invoquer une justification de nature générale comme celle invoquée en l’espèce, en substance le droit à l’information du public.

63      Quoique l’exception au droit d’accès aux documents prévue par l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 oblige les institutions à examiner le risque d’atteinte à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu au travers du règlement no 45/2001 et plus particulièrement de son article 8, sous b), elle doit être mise en œuvre de manière à conférer un effet utile aux autres dispositions du règlement no 1049/2001. Tel ne serait pas le cas s’il était possible à l’institution saisie d’une demande d’accès à des documents comportant des données à caractère personnel d’interdire, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, au demandeur de justifier le transfert de données sollicité par un objectif de nature générale, comme, en l’espèce, le droit à l’information du public.

64      Dès lors, il ne saurait être soutenu que la justification de caractère général donnée par le requérant au transfert de données à caractère personnel pour fonder la condition de nécessité prévue à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 reviendrait à réintroduire un critère d’intérêt public supérieur au sens du règlement no 1049/2001.

65      En troisième lieu, nonobstant ce qui a été constaté au point 51 ci‑dessus, il convient d’écarter l’argumentation du Parlement selon laquelle une interprétation stricte de la condition de nécessité, posée par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, serait d’autant plus nécessaire que, en l’espèce, le requérant a explicitement et exclusivement pour objectif de communiquer au public, de façon imminente, les données à caractère personnel qui lui seraient transférées, ce qui constituerait une ingérence maximale dans le droit à la protection de ces données. Pour le Parlement, le règlement no 45/2001 n’a pas vocation à permettre une divulgation erga omnes de données à caractère personnel.

66      Le requérant a, en effet, exprimé la volonté de communiquer au public les données à caractère personnel dont il demande le transfert. Toutefois, il convient de rappeler le contexte juridique dans lequel s’insère l’application de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001. Ainsi qu’il a été expliqué aux points 49 et 50 ci‑dessus, c’est parce qu’une demande d’accès à des documents détenus par le Parlement a été présentée au titre du règlement no 1049/2001 et que lui a été opposée l’exception tirée de l’article 4, paragraphe 1, sous b), dudit règlement que les dispositions du règlement no 45/2001 sont devenues intégralement applicables.

67      Même dans ce contexte, une demande d’accès a pour objet et pour effet, s’il y est répondu positivement, la divulgation des documents demandés, ce qui implique, en vertu de l’article 2, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001, que l’institution ou l’organe saisi rende ces documents accessibles au public. Or, il ne peut être question d’interpréter les conditions mises au transfert des données à caractère personnel par le règlement no 45/2001, notamment celles fixées par l’article 8, sous b), de telle sorte que la mise en œuvre de l’une d’elles ait pour effet que, par principe, l’accès aux documents contenant ces données soit accordé au seul demandeur et interdit au public, et, ainsi, de rendre impossible l’application du règlement no 1049/2001. Dès lors que la personne qui demande l’accès aux documents contenant les données à caractère personnel a démontré la nécessité du transfert de celles‑ci et que l’institution saisie a estimé qu’il n’existait aucune raison de penser que ce transfert pourrait porter atteinte aux intérêts légitimes des personnes concernées, les données peuvent être transférées et, sous réserve qu’aucune exception prévue par le règlement no 1049/2001 autre que celle tirée de l’atteinte à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu ne s’applique, le ou les documents contenant les données sont divulgués et, partant, rendus accessibles au public.

68      Il résulte des points 49 à 67 ci‑dessus que le critère de nécessité prévu à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 doit faire l’objet d’une interprétation stricte, que la condition de la nécessité du transfert des données à caractère personnel implique un examen par l’institution ou l’organe saisi de la nécessité au regard de l’objectif poursuivi par le demandeur d’accès aux documents, ce qui restreint la portée de la règle de l’absence de justification d’une demande d’accès, que la justification de la nécessité du transfert de ces données, invoquée par le demandeur, peut être de nature générale et que le règlement no 1049/2001 ne doit pas être privé de son effet utile par une interprétation des dispositions pertinentes impliquant qu’une divulgation légitime ne peut jamais poursuivre l’objectif d’une divulgation complète au public.

 Sur l’appréciation des justifications de la nécessité du transfert des données à caractère personnel

69      En substance, le requérant estime avoir démontré la nécessité du transfert des données à caractère personnel, critère prévu par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, tel qu’interprété à la lumière des arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra (EU:C:2010:378, point 63), et Dennekamp/Parlement, point 4 supra (EU:T:2011:688, points 31 à 35), et explicitement fait le lien entre l’objectif poursuivi par sa demande et la nécessité de divulguer tous les noms demandés.

70      Afin de répondre aux griefs du requérant, il convient d’exposer, tout d’abord, les justifications de la nécessité du transfert des données à caractère personnel en cause fournies lors de la procédure administrative et l’appréciation portée par le Parlement à cet égard dans la décision attaquée, et, ensuite, de faire part de l’appréciation du Tribunal au regard des arguments échangés devant lui.

–       Appréciation du Parlement quant à la nécessité du transfert des données à caractère personnel dans la décision attaquée

71      Il convient de constater que, s’agissant de la nécessité du transfert des données à caractère personnel, la demande initiale mettait en avant le besoin pour le public de mieux comprendre comment les décisions étaient prises et le fait que, pour ce faire, un débat pouvait être engagé au travers des reportages de presse. En l’espèce, il aurait été de la plus haute importance pour les citoyens européens de savoir quels étaient les membres qui avaient un intérêt personnel dans le régime alors qu’ils étaient appelés à prendre des décisions sur sa gestion.

72      Dans la demande confirmative, le requérant a estimé nécessaire le transfert des données à caractère personnel, en se fondant sur le droit à l’information et sur le droit à la liberté d’expression. Il a expliqué qu’il était nécessaire de divulguer les documents demandés pour qu’il puisse réaliser un reportage sur la façon dont les fonds publics étaient dépensés, sur le possible impact des intérêts privés sur les votes des membres et sur le fonctionnement des mécanismes de contrôle. Dans ce but, il a indiqué qu’il était indispensable de connaître les noms des membres concernés pour les besoins de son reportage afin d’exercer sa liberté d’expression et de transmettre cette information au public qui avait un intérêt à la connaître, en tant que citoyens et contribuables. Selon lui, la divulgation des noms des membres participant au régime permettrait d’éviter que ceux‑ci utilisent leurs votes pour influer sur le régime, de manière à ce qu’il leur bénéficie d’une façon non conforme aux vœux de leurs électeurs. Selon le requérant, il n’y a pas d’autres moyens pour le public de savoir comment les membres utilisent leurs prérogatives publiques au regard du régime.

73      Dans la décision attaquée, le Parlement a considéré, principalement, que le requérant n’avait pas démontré la nécessité du transfert des données à caractère personnel, en se fondant sur deux motifs distincts pour écarter les justifications présentées. Premièrement, le Parlement a identifié, comme constituant une justification de la demande, l’intérêt du public et des médias quant aux dépenses publiques, dont font partie les avantages financiers des membres, dans le contexte de la liberté d’information et de la liberté d’expression. Sur ce point, il a estimé que l’intérêt public revendiqué était abstrait et très général, et que, s’il constituait un argument valide dans le contexte de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, il permettrait la divulgation de données personnelles au‑delà de toute limite raisonnable et aboutirait à un résultat qui ne respecterait pas les règles de l’Union sur la protection des données à caractère personnel. Deuxièmement, le Parlement a relevé que le requérant était resté en défaut de fournir un lien entre les buts qu’il poursuivait et les données personnelles précises dont il demandait le transfert, les raisons pour lesquelles le transfert aurait été nécessaire n’étant pas claires. Il a poursuivi en notant que, pour exercer un contrôle public, il n’était ni nécessaire ni proportionné de demander les noms de tous les membres participant au régime, puisque les décisions relatives à ce dernier étaient prises par le bureau, signalant que le requérant aurait dû identifier un risque particulier et spécifique de conflit d’intérêts pour que la nécessité du transfert soit prouvée.

–       Arguments des parties

74      Dans un premier grief, le requérant fait valoir qu’il a justifié la nécessité du transfert des données à caractère personnel par le fait qu’il s’agissait d’informations d’intérêt public, qu’il pourrait, en tant que journaliste, présenter aux citoyens européens, afin qu’ils sachent comment les fonds publics étaient dépensés, comment leurs représentants élus se comportaient et si le vote de ces derniers à l’égard du régime avait été influencé par leur intérêt financier. Dans un second grief, il estime avoir explicitement fait le lien entre l’objectif poursuivi par sa demande et la nécessité de divulguer tous les noms demandés, seul moyen pour le public de tenir ses représentants pour responsables de leurs actes en lien avec le régime. Il n’aurait pas eu à être plus précis dans sa demande quant aux membres qui faisaient partie du bureau.

75      Pour la République de Finlande, le Royaume de Suède et le CEPD, la divulgation des informations demandées est justifiée par l’intérêt public général de transparence, qui doit permettre de fournir au public une évaluation intéressante des faits relatifs au régime, comme le comportement de vote des membres, et d’offrir la possibilité d’interroger ou d’entendre ces derniers, par le fait que le seuil pour établir la nécessité du transfert des données à caractère personnel doit être bas lorsqu’il y a lieu d’interpréter l’exception au droit d’accès prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 et par le fait qu’il peut y avoir nécessité au sens de cet article sur la base de raisons tirées de l’intérêt public, comme le requérant l’a fait valoir de manière précise et concrète dans sa demande d’accès.

76      Principalement, le Parlement soutient que le requérant ne s’acquitte pas des impératifs de proportionnalité résultant de la jurisprudence de l’Union pour démontrer la nécessité du transfert des données à caractère personnel en cause. Il rappelle que cette interprétation de la notion de nécessité est conforme à l’article 15 TUE et au règlement no 1049/2001. Il en serait d’autant plus ainsi lorsque, comme en l’espèce, l’objectif de la demande de transfert des données à caractère personnel est leur communication au public, qui est une ingérence maximale dans le droit à la protection de ces données. Selon le Parlement, le règlement no 45/2001 n’a pas vocation à permettre une divulgation erga omnes, mais à autoriser le transfert exclusif de données à caractère personnel à des destinataires précis. De plus, il relève que le requérant n’a pas fourni, avant l’adoption de la décision attaquée, d’argument étayant objectivement le prétendu intérêt public, notamment qu’existerait actuellement un débat sur le régime ou que le comportement d’un membre serait sujet à caution, ainsi qu’il est prévu par l’arrêt Dennekamp/Parlement, point 4 supra (EU:T:2011:688).

–       Appréciation du Tribunal

77      Ainsi qu’il a été constaté au point 59 ci‑dessus, la satisfaction de la condition de nécessité prévue à l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, qui s’interprète strictement, implique de démontrer que le transfert des données à caractère personnel est la mesure la plus appropriée parmi les autres mesures envisageables pour atteindre l’objectif poursuivi par le demandeur et qu’elle est proportionnée à cet objectif. En l’espèce, il convient de répondre ensemble aux deux griefs selon lesquels le transfert des données en cause est la mesure la plus appropriée pour atteindre les objectifs poursuivis.

78      Parmi les objectifs au regard desquels le requérant a soutenu, dans sa demande confirmative, qu’il était nécessaire pour le Parlement de procéder au transfert des données à caractère personnel en cause, il convient de distinguer entre, d’une part, le contrôle public de la façon dont les fonds publics sont dépensés par la mise en œuvre du droit à l’information et, d’autre part, le possible impact des intérêts des membres sur leurs votes à l’égard du régime, c’est‑à‑dire l’identification des conflits d’intérêts potentiels chez les membres.

79      En premier lieu, le requérant fait état de sa volonté de présenter des informations sur le régime au travers d’articles de presse et de reportages télévisés, pour permettre au public de participer à un débat légitime sur le régime, mettant tout particulièrement en avant son rôle en tant que journaliste dans une société démocratique.

80      Dans cette optique, le requérant a soutenu, à l’audience, que le caractère nécessaire du transfert des données à caractère personnel devait être apprécié au regard de l’article 9 de la directive 95/46, qui prévoyait des règles spécifiques lorsque le traitement de telles données était effectué à des fins journalistiques, au motif que l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 renvoyait à la législation de l’Union relative à la protection des données à caractère personnel sans autre précision. Cependant, il ressort des dispositions combinées de l’article 76, sous d), et de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal que la requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués et que la production de moyens ou d’arguments nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ou arguments ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure (arrêt du 21 octobre 2010, Umbach/Commission, T‑474/08, EU:T:2010:443, point 60) ou qu’ils constituent l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui‑ci (voir arrêt du 29 novembre 2012, Thesing et Bloomberg Finance/BCE, T‑590/10, EU:T:2012:635, point 24 et jurisprudence citée). Tel n’est pas le cas en l’espèce et cet argument, présenté tardivement, doit être rejeté comme irrecevable.

81      Dans la mesure où, dans sa demande confirmative, le requérant s’est fondé sur le droit à l’information et sur le droit à la liberté d’expression pour justifier la nécessité du transfert des données à caractère personnel en cause, il y a lieu de constater que cela ne saurait suffire à démontrer que le transfert des noms des membres participant au régime est la mesure la plus appropriée parmi les autres mesures envisageables pour atteindre son objectif et qu’elle est proportionnée à cet objectif.

82      Par son argumentation, le requérant a, certes, clairement spécifié les buts qu’il poursuivait et les raisons pour lesquelles il estimait nécessaire le transfert des données : en substance, pouvoir réaliser un reportage sur le régime afin de mettre le public européen en mesure de connaître son fonctionnement et d’exercer un contrôle sur les membres qui le représentent. Ce faisant, il n’a, toutefois, pas exposé en quoi le transfert des noms des membres participant au régime était la mesure la plus appropriée pour atteindre l’objectif qu’il s’était assigné contrairement à l’exigence qui ressortait de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, tel qu’interprété par l’arrêt Dennekamp/Parlement, point 4 supra (EU:T:2011:688, points 30 et 34).

83      En effet, le requérant s’est borné à affirmer, dans la demande confirmative, que les mesures destinées à permettre un contrôle du public sur les dépenses publiques faites dans le cadre du régime, comme la procédure de décharge budgétaire, ne protégeaient pas les droits fondamentaux qu’il invoquait, à savoir le droit d’information et de communication au public des informations collectées, et qu’elles ne pouvaient, de ce fait, justifier la non‑divulgation des données en cause. Force est de constater que de tels éléments ne permettent pas de déterminer en quoi le transfert des noms des membres participant au régime constitue la mesure la plus appropriée pour atteindre l’objectif poursuivi par le requérant ni en quoi elle est proportionnée à cet objectif. La simple affirmation que le transfert serait plus à même d’assurer la protection des droits fondamentaux ne peut être regardée comme le résultat d’une analyse, même réduite, des effets et des implications des différentes mesures qu’il pourrait être envisagé de prendre pour satisfaire les objectifs du requérant.

84      S’agissant de l’argument du requérant selon lequel un débat sur le régime existe déjà compte tenu de la controverse entourant sa création et son financement ou que, même en l’absence d’un tel débat, il serait nécessaire d’accéder aux noms des membres pour encourager son émergence, le requérant ne fait qu’invoquer des arguments qui se rattachent à la finalité qu’il poursuit par sa demande d’accès aux documents. Ces arguments ne permettent pas de démontrer la nécessité dans laquelle il se trouve d’obtenir le transfert des données en cause, aucun rapport avec le caractère approprié et proportionné de la mesure demandée n’en ressortant comme cela est exigé par la jurisprudence de l’Union (voir, en ce sens, arrêt Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 34). En outre, l’existence d’un débat sur le régime, plus précisément sur son caractère avantageux pour les membres au détriment des finances publiques, tout comme les différents éléments factuels relevés par le requérant tendent à démontrer que celui‑ci dispose déjà d’informations précises sur les règles et le fonctionnement du régime, susceptibles de lui permettre d’engager ou de développer le débat public qu’il vise à amorcer quant à la bonne gestion du régime et aux risques financiers qu’il fait peser sur le budget de l’Union. Au‑delà de l’absence de preuve de la nécessité du transfert des données à caractère personnel en cause, il convient de constater que ces différents éléments, présentés par le requérant lui‑même, ne militent pas en faveur de la thèse selon laquelle il serait nécessaire de connaître les noms des membres participant au régime pour dénoncer ses prétendus effets négatifs sur les fonds publics.

85      Ensuite, il convient de tirer la même conséquence s’agissant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, laquelle aurait jugé que le refus d’accès à des informations constituées des données personnelles d’un élu n’était pas nécessaire dans une société démocratique eu égard au droit des journalistes de recevoir et de communiquer des informations d’intérêt public. Un tel constat ne permet, en effet, aucunement de déterminer si la mesure demandée par le requérant est la plus appropriée pour atteindre l’objectif qu’il poursuit et si elle est proportionnée à celui‑ci.

86      Enfin, restent également sans incidence sur la conclusion du point 82 ci‑dessus les arguments selon lesquels le requérant aurait explicitement fait le lien entre l’objectif poursuivi par sa demande et la nécessité de divulguer tous les noms demandés et il n’aurait pas eu à être plus précis dans sa demande, notamment s’agissant des membres qui faisaient partie du bureau, eu égard à la possibilité de divulgation partielle prévue par l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001. Rien parmi de tels arguments ne permet de démontrer la nécessité du transfert des noms des membres participant au régime comme il est exigé par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001.

87      Par suite, il convient d’écarter l’argumentation du requérant quant à la nécessité du transfert des noms des membres participant au régime eu égard à l’objectif d’informer le public et de le faire participer à un débat sur la légitimité du régime, les articles 11 et 42 de la charte des droits fondamentaux, qui ont respectivement trait à la liberté d’expression et au droit d’accès aux documents des institutions et organes de l’Union, n’étant dès lors pas méconnus.

88      En second lieu, le requérant estime que le transfert des données à caractère personnel en cause est nécessaire pour pouvoir déterminer si le vote des membres à l’égard du régime est influencé par leurs intérêts financiers, la divulgation de tous les noms des membres participant au régime étant le seul moyen pour le public de tenir ses représentants pour responsables de leurs actes en lien avec le régime.

89      L’argumentation du requérant repose, tant dans sa demande confirmative que dans ses écrits d’instance, sur la nécessité de mettre à jour les possibles conflits d’intérêts des membres.

90      Premièrement, il y a lieu de relever que le Parlement, en réponse à une question posée à l’audience, a soutenu que la divulgation de conflits d’intérêts ne pouvait être regardée, au plan juridique, comme une finalité légitime d’un traitement de données à caractère personnel au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 45/2001, reprenant ainsi un argument qu’il avait avancé dans le mémoire en défense sans le relier à cette disposition. Or, force est de constater que le Parlement n’a pas fait valoir, dans la décision attaquée, que le transfert des noms des membres participant au régime serait un traitement de données incompatible avec les finalités légitimes pour lesquelles celles‑ci avaient été collectées. Dès lors, cet argument doit, en tout état de cause, être écarté comme manquant en fait, puisque la décision attaquée n’est aucunement motivée par une telle constatation.

91      Deuxièmement, l’article 3, paragraphe 1, du code de conduite des députés au Parlement européen en matière d’intérêts financiers et de conflits d’intérêts dispose :

« Un conflit d’intérêts existe lorsqu’un [membre] a un intérêt personnel qui pourrait influencer indûment l’exercice de ses fonctions en tant que député. Il n’y a pas de conflit d’intérêts lorsque le député tire un avantage du seul fait d’appartenir à la population dans son ensemble ou à une large catégorie de personnes. »

92      Également, il peut être noté que, pour le Conseil de l’Europe, un conflit d’intérêts naît d’une situation dans laquelle un agent public a un intérêt personnel de nature à influer ou paraître influer sur l’exercice impartial et objectif de ses fonctions officielles, ledit intérêt personnel englobant tout avantage pour lui‑même ou en faveur de sa famille, de parents, d’amis ou de personnes proches, ou de personnes ou organisations avec lesquelles il ou elle a ou a eu des relations d’affaires ou politiques, ainsi que toute obligation financière ou civile à laquelle l’agent public est assujetti [voir article 13 de la recommandation R (2000) 10 du Comité des ministres du Conseil de l’Europe aux États membres sur les codes de conduite pour les agents publics, adoptée le 11 mai 2000].

93      Dans le cas d’un élu, le conflit d’intérêts suppose donc, comme le fait valoir le requérant, que, à l’occasion d’un vote sur un sujet donné, le comportement de l’élu puisse être influencé par son intérêt personnel. En l’espèce, le conflit d’intérêts potentiel réside dans le fait que les membres peuvent, par leur vote, modifier le régime ou exprimer leur position sur celui‑ci de manière à favoriser leurs intérêts en tant que bénéficiaires du régime.

94      Or, pour être en mesure de mettre à jour les conflits d’intérêts potentiels des membres lorsqu’ils se prononcent sur le régime, il est nécessaire de connaître les noms de ceux d’entre eux qui participent à ce dernier, sans que la circonstance que le conflit d’intérêts en cause soit, comme le soutient le Parlement, inhérent à la fonction de membre d’une assemblée élue influe sur l’appréciation de la nécessité du transfert des données à caractère personnel. En soi, cette circonstance ne permet aucunement de démontrer que le transfert envisagé ne serait pas nécessaire. Un tel transfert constitue donc la seule mesure qui permette d’atteindre l’objectif poursuivi par le requérant, aucune autre mesure n’étant susceptible d’assurer l’identification des membres placés dans une situation de conflit d’intérêts potentiel. Dès lors, il convient de considérer, en vue d’appliquer l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 que le transfert des noms des membres participant au régime est la mesure la plus appropriée et qu’elle est proportionnée pour déterminer si les intérêts que les membres détiennent dans le régime peuvent influer sur leur comportement de vote (voir, en ce sens, arrêt Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, points 30 et 34).

95      Néanmoins, il convient, à ce stade, de noter que, dans la présente situation, dans laquelle le conflit d’intérêts potentiel réside dans le comportement de vote des membres, la seule révélation de l’identité de ceux qui participent au régime ne peut à elle seule mettre à jour le conflit. Il est, en outre, nécessaire de déterminer lesquels des membres ont été appelés à se prononcer sur le régime à l’occasion d’un vote, le Parlement soutenant que seuls les membres participant au régime et faisant partie du bureau, organe qui, d’après lui, fixe les modalités de gestion du régime, pourraient se trouver dans une situation de conflit d’intérêts potentiel.

96      Or, le requérant ne s’est pas limité, dans la demande confirmative, à faire référence aux votes à l’issue desquels des modifications ont été apportées aux modalités de gestion du régime, mais à tout vote au cours duquel le Parlement ou un de ses organes se serait prononcé sur le régime d’une manière ou d’une autre. Il a ainsi fait état du possible impact des intérêts privés sur le comportement de vote des membres, de la position des membres par laquelle ils peuvent influencer la façon dont les fonds publics sont utilisés en leur faveur et de l’absence d’autre voie que la divulgation des noms des membres participant au régime pour révéler comment les élus utilisent leurs prérogatives publiques en rapport avec le régime.

97      En réponse à la mesure d’organisation de la procédure (voir point 23 ci‑dessus), le requérant a présenté au Tribunal les actes adoptés depuis le 1er octobre 2005 par lesquels, selon lui, l’assemblée plénière du Parlement, la commission de contrôle budgétaire du Parlement et le bureau avaient apporté des modifications au régime ou s’étaient prononcés sur sa gestion. Pour l’assemblée plénière, il s’agit de la décision 2008/497/CE, Euratom du Parlement européen, du 24 avril 2007, concernant la décharge sur l’exécution du budget général de l’Union européenne pour l’exercice 2005, section I – Parlement (JO 2008, L 187, p. 1), de la décision 2009/185/CE, Euratom du Parlement européen, du 22 avril 2008, concernant la décharge sur l’exécution du budget général de l’Union européenne pour l’exercice 2006, section I – Parlement (JO 2009, L 88, p. 1), de la décision 2009/628/CE, Euratom du Parlement européen, du 23 avril 2009, concernant la décharge sur l’exécution du budget général de l’Union européenne pour l’exercice 2007, section I – Parlement (JO L 255, p. 1), et de la décision 2012/544/UE, Euratom du Parlement européen, du 10 mai 2012, concernant la décharge sur l’exécution du budget général de l’Union européenne pour l’exercice 2010, section I – Parlement (JO L 286, p. 1). Pour la commission de contrôle budgétaire, il s’agit du projet de rapport du 8 mars 2007 sur les amendements 1 à 21 concernant la décharge sur l’exécution du budget général de l’Union pour l’exercice 2005, section I – Parlement, d’un document d’information sur l’avis de la commission sur la décharge budgétaire pour l’exercice 2006 et d’un compte rendu de travaux de la commission sur la décharge budgétaire pour l’exercice 2010. Pour le bureau, il s’agit de la décision du 30 novembre 2005 sur la gestion du régime, de la décision des 19 mai et 9 juillet 2008 portant mesures d’application du statut des députés au Parlement européen (JO 2009, C 159, p. 1), de la décision du 9 mars 2009 concernant le fonds de pension volontaire et de la décision du 1er avril 2009 concernant le fonds de pension volontaire.

98      D’emblée, il convient de laisser à l’écart la décision 2005/684/CE, Euratom du Parlement, du 28 septembre 2005, portant adoption du statut des députés au Parlement européen (JO L 262, p. 1), puisque cette décision se situe en dehors du champ de la demande d’accès aux documents présentée par le requérant, qui porte, notamment, sur la liste nominative des membres participant au régime après septembre 2005. Il doit en être de même du document d’information sur l’avis de la commission de contrôle budgétaire sur la décharge budgétaire pour l’exercice 2006 et du compte rendu de travaux de ladite commission sur la décharge budgétaire pour l’exercice 2010, qui ne font que renvoyer indirectement à des décisions ou à des votes sans qu’elles soient identifiées de manière précise.

99      Ensuite, il y a lieu de constater, à la lecture des réponses des parties principales à la mesure d’organisation de la procédure, que les quatre décisions de l’assemblée plénière mentionnées au point 97 ci‑dessus, qui comprennent chacune une décision donnant décharge au président du Parlement pour l’exécution du budget et des observations contenues dans une résolution, ont fait l’objet d’un vote portant sur les décisions de décharge elles‑mêmes et sur les résolutions. Interrogé à l’audience, le Parlement n’a pas été en mesure de préciser alors si, pour chacune de ces décisions et de ces résolutions, les votes avaient été exprimés de manière globale ou séparée sur des paragraphes ou des propositions d’amendement de certains paragraphes.

100    Les questions écrites posées au Parlement à l’issue de l’audience ont donc porté, notamment, sur l’identification des modalités précises de vote des quatre décisions de décharge budgétaire susmentionnées et des quatre résolutions les accompagnant, adoptées par l’assemblée plénière.

101    Or, il ressort de la réponse du Parlement que, si chacune des quatre décisions de décharge citées au point 97 ci‑dessus et chacune des résolutions qui les accompagnent a été adoptée par un vote global de l’assemblée plénière, le vote sur les résolutions portant sur la décharge pour l’exercice 2005, qui a eu lieu le 24 avril 2007, le vote sur celle pour l’exercice 2006, qui a eu lieu le 22 avril 2008, et le vote sur celle pour l’exercice 2010, qui a eu lieu le 10 mai 2012, ont été, chacun, précédés de votes séparés sur des amendements et des paragraphes spécifiques des projets de résolution. S’agissant de la résolution portant sur la décharge pour l’exercice 2005, les paragraphes 74 à 84 du projet de résolution, qui portent sur le régime, ont fait l’objet de votes séparés, au cours desquels les membres se sont exprimés. S’agissant de la résolution portant sur la décharge pour l’exercice 2006, les paragraphes 70 à 73, qui portent sur le régime, ont été adoptés de la même manière. Il en est également de même quant à la résolution portant sur la décharge pour l’exercice 2010 pour les paragraphes 98 et 99 du projet de résolution, qui portaient sur le régime.

102    Il résulte de ce qui précède que tous les membres faisant partie de l’assemblée plénière étaient en droit de se prononcer sur le régime, le 24 avril 2007, le 22 avril 2008 et le 10 mai 2012.

103    Dès lors, afin de permettre au requérant d’atteindre son objectif de mise à jour des conflits d’intérêts potentiels des membres, le Parlement aurait dû procéder au transfert des noms des membres participant au régime qui étaient également membres de l’assemblée plénière aux dates mentionnées au point 102 ci‑dessus et qui ont effectivement participé aux votes ayant eu lieu à ces dates, sans se limiter aux noms de ceux qui ont participé aux scrutins organisés selon la procédure de vote par appel nominal, prévue par l’article 180 du règlement de procédure du Parlement, comme les remarques du requérant dans ses observations déposées le 2 février 2015 pourraient le laisser supposer. En effet, quelle que soit la procédure de vote utilisée lors des scrutins portant sur le régime, tous les membres qui ont effectivement voté et qui participaient au régime pouvaient être influencés par leur intérêt personnel à cet égard (voir point 102 ci‑dessus).

104    Il découle de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu d’examiner les modalités précises de vote de la commission de contrôle budgétaire et du bureau, leurs membres étant également membres de l’assemblée plénière.

105    Troisièmement, le Parlement considère qu’il est, par nature, impossible de déterminer si les membres, lorsqu’ils ont été amenés à se prononcer sur le régime, ont été réellement influencés par leurs propres intérêts financiers ou par un tout autre motif légitime ou non, puisque le fait d’identifier les membres participant au régime ne fournirait aucune information sur les motifs subjectifs de leurs votes sur le régime.

106    Or, la notion de conflit d’intérêts ne renvoie pas uniquement à une situation dans laquelle un agent public a un intérêt personnel de nature à avoir influé effectivement sur l’exercice impartial et objectif de ses fonctions officielles, ici celle d’élu au Parlement, mais également à celle dans laquelle l’intérêt identifié peut, aux yeux du public, paraître influer sur un exercice impartial et objectif des fonctions officielles. D’ailleurs, la divulgation de conflits d’intérêts potentiels ne vise pas seulement à révéler les cas dans lesquels l’agent public a exercé ses fonctions en ayant pour objectif de satisfaire ses intérêts personnels, mais aussi à informer le public des risques de conflits d’intérêts pesant sur les agents publics, afin que, dans l’exercice de leurs fonctions officielles, ceux‑ci agissent de manière impartiale, après avoir, eu égard aux circonstances dans lesquelles ils se trouvent, déclaré la situation de conflit d’intérêt potentiel les touchant et pris ou proposé des mesures pour résoudre ou éviter ledit conflit. Par suite, l’argument du Parlement est infondé et doit être écarté, les motifs subjectifs d’un vote exprimé par un élu étant d’ailleurs par nature invérifiables.

107    Quatrièmement, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 106 ci‑dessus, il convient d’écarter l’argument du Parlement tenant à l’absence de preuve par le requérant d’un débat sur les conflits d’intérêts potentiels des membres relatif au régime ou sur le comportement d’un membre précis.

108    Cinquièmement, il résulte également du raisonnement des points 91 à 106 ci‑dessus que la règle selon laquelle il découlerait du règlement no 45/2001, tel qu’interprété par l’arrêt Dennekamp/Parlement, point 4 supra (EU:T:2011:688, points 34 et 35), qu’il incombe à la personne sollicitant le transfert des données à caractère personnel de fournir avec précision les éléments permettant de conclure à la nécessité de ce transfert ne peut conduire aux conséquences qu’implique l’argumentation du Parlement.

109    Tout d’abord, contrairement à ce qu’affirme celui‑ci, force est de constater que le requérant a exposé les raisons pour lesquelles il devait prendre connaissance de la participation des membres au régime, notamment s’agissant de la possibilité de révéler ainsi les conflits d’intérêts potentiels pouvant influer sur l’exercice de leurs fonctions.

110    Ensuite, si le Parlement entend soutenir que le requérant était dans l’obligation d’apporter précisément tous les éléments démontrant l’existence de conflits d’intérêts pour établir la nécessité du transfert, il convient de constater que, afin de mettre à jour les conflits d’intérêts potentiels des membres lorsqu’ils votent sur le régime, le requérant pouvait légalement se borner à démontrer que ceux‑ci se trouvaient dans une telle situation, en raison de leur double caractéristique de membres et de participants au régime. En effet, la notion de conflit d’intérêt renvoie à la situation dans laquelle l’intérêt identifié peut, aux yeux du public, paraître influer sur un exercice impartial et objectif des fonctions officielles (voir point 106 ci‑dessus) et ne nécessite donc pas la démonstration de l’absence d’exercice impartial des fonctions en cause. Plus particulièrement, il ne saurait être reproché au requérant de ne pas avoir lui‑même identifié l’organe qui, au sein du Parlement, a été appelé à se prononcer sur le régime et, donc, le groupe de membres concernés, avant de demander le transfert des noms des membres en question.

111    Une interprétation contraire conduirait à exiger du requérant qu’il demande, dans un premier temps, l’accès aux documents démontrant quels sont les organes au sein desquels il a été voté sur le régime et, au regard du résultat obtenu, qu’il demande, dans un second temps, l’accès aux documents identifiant les membres qui ont effectivement pris part au vote sur ce point, puis aux documents identifiant les membres participant au régime. Aucune disposition du règlement no 1049/2001 n’impose au demandeur d’accès aux documents détenus par une institution ou un organe de l’Union de suivre une telle démarche, qui ne découle pas non plus de l’application du règlement no 45/2001 s’agissant de documents contenant des données à caractère personnel.

112    Sixièmement, le Parlement allègue que l’intérêt, au regard duquel le transfert des noms des membres participant au régime est demandé, repose uniquement sur l’appréciation du journaliste qui demande l’accès aux documents, en l’espèce le requérant, et non sur des raisons objectives. Or, ce faisant, le Parlement tend à perdre de vue le fait que le requérant s’est fondé sur l’existence de conflits d’intérêts potentiels chez les membres participant au régime à l’occasion de votes sur celui‑ci, ce qui ne constitue pas une appréciation subjective sur une situation donnée, mais bien le constat d’un risque pesant sur un exercice impartial et objectif des fonctions officielles des membres en question.

113    Par conséquent, il résulte des points 88 à 112 ci‑dessus que le Parlement a commis une erreur manifeste d’appréciation en ayant considéré que le requérant n’avait pas démontré la nécessité du transfert des noms des membres participant au régime, qui, en tant que membres de l’assemblée plénière, avaient effectivement pris part aux votes sur le régime lors des scrutins ayant eu lieu le 24 avril 2007, le 22 avril 2008 et le 10 mai 2012, eu égard à l’objectif poursuivi de mise à jour des conflits d’intérêts potentiels.

114    Il convient, cependant, de continuer l’examen du recours par l’analyse des arguments portant sur l’application de la deuxième condition cumulative du transfert des données à caractère personnel, exigée par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, à savoir qu’il n’existe aucune raison de penser que le transfert des noms des membres de l’assemblée plénière participant au régime qui ont pris part au vote sur celui‑ci puisse porter atteinte aux intérêts légitimes de ces derniers.

 Sur l’application de la condition de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 tenant à l’absence d’intérêt légitime à la protection de la vie privée des membres

115    La seconde branche du moyen se divise en trois griefs, qui se recoupent. Par un premier grief, le requérant soutient que les membres n’ont pas d’intérêt légitime à la protection de leur vie privée au sens de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, puisqu’ils soumettent leur conduite à un important degré d’examen du public. Par un deuxième grief, il est d’avis que, dans la décision attaquée, le Parlement n’a pas justifié le fait que la divulgation des documents demandés portait atteinte aux intérêts légitimes des membres. Par un troisième grief, il estime que, même si le Parlement avait, à juste titre, considéré que l’information demandée relevait de la sphère privée des membres, cela ne suffirait pas pour la protéger en tant qu’intérêt légitime au sens de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, qui exige une mise en balance des intérêts en présence.

116    Au préalable, il convient de rappeler que la jurisprudence exige que, une fois démontrée la nécessité du transfert des données à caractère personnel, l’institution ou l’organe de l’Union saisi d’une demande d’accès à des documents contenant de telles données mette en balance les différents intérêts des parties en cause et vérifie s’il n’existe aucune raison de penser que ce transfert peut porter atteinte aux intérêts légitimes des personnes concernées comme le prescrit l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 (voir, en ce sens, arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 78, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 30).

117    Une telle exigence doit conduire l’institution ou l’organe de l’Union saisi à refuser le transfert des données à caractère personnel, lorsqu’il est constaté qu’il existe la moindre raison de penser que le transfert porterait atteinte aux intérêts légitimes des personnes concernées.

118    En premier lieu, l’ensemble de l’argumentation du requérant venant au soutien de la seconde branche du premier moyen repose sur la prémisse que, en raison du caractère public des fonctions des membres et de leur statut, les intérêts légitimes de ceux‑ci n’auraient pas droit à un même degré de protection que ceux de personnes qui ne sont pas des personnalités publiques. Parmi les intérêts des membres, il conviendrait de distinguer ceux qui relèvent de la sphère publique, devant faire l’objet d’une protection moindre lors de la mise en balance avec un intérêt en faveur du transfert de données à caractère personnel, de ceux qui font partie de la sphère privée, devant être protégés.

119    Tout comme le Parlement le reconnaît, la distinction opérée par le requérant pour les personnalités publiques entre sphère publique et sphère privée est pertinente pour déterminer le degré de protection des données à caractère personnel auquel elles ont droit sous le régime du règlement no 45/2001, même si ce dernier ne prévoit rien de tel. En effet, il serait tout à fait inopportun d’apprécier de la même manière une demande de transfert de données à caractère personnel quelle que soit l’identité de la personne concernée. Une personnalité publique a choisi de s’exposer aux tiers, tout particulièrement aux médias et, à travers eux, à un public plus ou moins large selon son domaine d’action, même si un tel choix n’implique aucunement qu’il faille considérer qu’il n’y a jamais d’atteinte aux intérêts légitimes de cette personne pour décider du transfert des données la concernant. Ainsi, une personnalité publique a généralement déjà accepté que certaines de ses données à caractère personnel soient dévoilées au public, voire même a incité à agir ou a agi en ce sens. Il doit dès lors être tenu compte de cet environnement pour apprécier le risque d’atteinte aux intérêts légitimes des personnalités publiques dans le cadre de l’application de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 et pour mettre en balance ces intérêts avec la nécessité du transfert des données à caractère personnel demandé.

120    Dans un tel contexte, il convient, pour apprécier, en l’espèce, le risque d’atteinte aux intérêts légitimes des membres, dont font incontestablement partie certains aspects des activités professionnelles comme les éléments de la rémunération, de prendre plus particulièrement en considération le lien que présentent les données personnelles en cause, à savoir les noms des membres participant au régime qui ont pris part aux votes sur ce dernier, avec le mandat de ceux‑ci. Or, la possibilité de participer au régime n’est ouverte qu’aux seuls membres. Ainsi l’existence du mandat de membre du Parlement constitue la condition première et nécessaire pour bénéficier de la retraite complémentaire que le régime met en œuvre. Pour cette raison principale, les données personnelles en cause font partie de la sphère publique des membres.

121    Au regard de cette caractéristique, qui limite le champ d’application du régime aux seuls membres, la circonstance que la participation au régime est facultative et résulte d’une adhésion volontaire, ne découlant ainsi pas automatiquement du mandat, ou celle que la pension complémentaire est perçue après l’expiration du mandat, ce qui relève d’ailleurs de la nature même de toute pension de retraite, ne sont pas déterminantes pour faire entrer les données à caractère personnel en cause dans la sphère privée des membres. Il faut, également, prendre en considération non seulement le lien avec le mandat de membre, mais également toutes les informations données par le requérant, non contestées par le Parlement, voire confirmées par les éléments du dossier, sur le fonctionnement du régime, à savoir le financement par le Parlement à hauteur des deux tiers des contributions payées, le comblement des déficits du régime par le Parlement et l’engagement de celui‑ci à compenser toutes les pertes que subirait le régime, ce qui, selon le requérant, assurerait ainsi aux membres participant au régime le maintien des droits à pension acquis. Il s’agit d’éléments qui renforcent l’appartenance des données à caractère personnel en cause à la sphère publique des membres, puisqu’ils dénotent l’engagement financier et juridique important du Parlement dans le régime.

122    Il convient également de tenir compte de la jurisprudence selon laquelle, d’une part, le régime fait partie des dispositions légales ayant pour objet, dans l’intérêt général, d’assurer l’indépendance financière des membres et, d’autre part, les décisions prises à cet égard par les organes compétents du Parlement doivent être considérées comme des mesures d’organisation interne destinées à assurer le bon fonctionnement de celui‑ci, qui relèvent des prérogatives de puissance publique dont il est investi afin de pouvoir accomplir sa mission, les droits et obligations découlant du régime relevant du droit public (voir, en ce sens, arrêts Purvis/Parlement, point 26 supra, EU:T:2011:600, points 60 et 61, et du 13 mars 2013, Inglewood e.a./Parlement, T‑229/11 et T‑276/11, Rec, EU:T:2013:127, point 61).

123    Quant à l’argument du Parlement selon lequel les contributions au régime concerneraient la situation financière privée des membres, il doit être écarté, eu égard au rattachement qui peut être fait entre les éléments financiers du régime, dont les contributions font partie, et la sphère publique des membres. Un tel raisonnement vaut également pour l’argument du Parlement selon lequel il convient de distinguer le comportement de vote des membres, qui ferait toujours partie de leur sphère publique, de leur participation au régime, qui relèverait, selon lui, de leur sphère privée. En outre, le transfert des noms des membres participant au régime ne permet de révéler que l’affiliation de ceux‑ci, sans que soient divulguées des informations sur leur situation financière, notamment sur leur patrimoine, leur épargne ou les instruments dans lesquels les fonds versés au régime sont investis.

124    Eu égard à ce qui précède, il convient donc de considérer que, dans la mise en balance des intérêts en présence, les intérêts légitimes des membres participant au régime, se rattachant à la sphère publique de ceux‑ci, doivent faire l’objet d’un degré de protection moins élevé que celui dont, conformément à la logique du règlement no 45/2001, bénéficieraient des intérêts se rattachant à leur sphère privée.

125    En second lieu, il y a lieu de rappeler que, même dans ce contexte, les données à caractère personnel ne sont transférées que s’il n’existe aucune raison de penser que ce transfert peut porter atteinte aux intérêts légitimes des personnes concernées. Toutefois, le moindre degré de protection des noms des membres participant au régime a pour effet d’accorder un poids plus important aux intérêts représentés par l’objectif poursuivi par le transfert.

126    Comme le fait valoir le requérant, la mise à jour des conflits d’intérêts potentiels des membres, qui est l’objectif du transfert des données demandé, permet d’assurer un meilleur contrôle de l’action des membres et du fonctionnement d’une institution de l’Union qui représente les peuples des États membres ainsi que d’améliorer la transparence de son action. Contrairement à ce qu’a affirmé le Parlement lors de l’audience, de tels intérêts peuvent être légalement pris en considération dans la mise en balance à effectuer en application de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 (voir points 61 à 63 ci‑dessus). Dès lors, au regard de l’importance des intérêts invoqués ici, qui visent à assurer le bon fonctionnement de l’Union en développant la confiance que les citoyens peuvent légitimement placer dans les institutions, il convient de constater qu’il ne saurait être porté atteinte aux intérêts légitimes des membres participant au régime, tels qu’ils ont été délimités aux points 120 et 121 ci‑dessus, par le transfert des données personnelles en cause.

127    La mise en balance des intérêts en présence aurait ainsi dû conduire à admettre le transfert des noms des membres participant au régime et qui ont pris part aux votes sur celui‑ci, le Parlement ne pouvant légalement soutenir qu’il existe une présomption juridiquement contraignante en faveur des intérêts légitimes des personnes concernées par les données à caractère personnel à transférer. Rien dans le texte de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 ne milite en faveur de la reconnaissance d’une telle présomption, l’appréciation d’une demande de transfert de données à caractère personnel requérant de mettre en balance les intérêts en présence, après que le demandeur a démontré l’existence d’une nécessité de transférer lesdites données (voir, en ce sens, arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 79, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 34), condition s’interprétant strictement et imposant que le demandeur fournisse des justifications expresses et légitimes de la nécessité qu’il invoque. En outre, le Parlement s’appuie à tort sur le règlement no 1049/2001 pour justifier l’existence d’une telle présomption, en notant que celui‑ci permettrait des dérogations au droit à la transparence. Si le règlement no 1049/2001 prévoit en effet une exception au droit d’accès aux documents dans l’hypothèse où la divulgation risquerait de porter atteinte à la vie privée ou à l’intégrité de l’individu, en rendant, ainsi, applicable le règlement no 45/2001, cela n’a aucunement pour effet de créer une présomption en faveur des intérêts légitimes des personnes dont les données à caractère personnel sont protégées par ce dernier règlement.

128    Parmi les autres arguments présentés par le Parlement, la critique du caractère proportionné des mesures demandées par le requérant est inopérante. Ce faisant, le Parlement remet en cause la nécessité du transfert des noms des membres participant au régime pour atteindre les objectifs poursuivis par le requérant et non la mise en balance des intérêts en présence.

129    D’autres arguments du Parlement doivent être écartés comme non fondés. Il en est ainsi lorsqu’il considère que, à suivre le requérant, les membres ne disposeraient plus du droit au respect de leur vie privée et que le transfert des données à caractère personnel compromettrait l’indépendance de leur mandat. Aucun élément sérieux ne vient au soutien de telles affirmations, alors que le caractère limité des informations révélées par le transfert des données en cause doit être souligné et que rien ne permet de comprendre en quoi l’indépendance du mandat de membre serait mise à mal si le fait de participer au régime était connu du public. Il en est de même de l’argument tenant au fait que les membres pourraient souffrir de critiques de la part du public quant à un prétendu conflit d’intérêts. Un tel conflit étant inhérent à la fonction de membre du Parlement, les éventuelles critiques peuvent déjà être formulées par toute personne faisant partie du public et connaissant la problématique du régime, sans même que cette personne soit précisément informée du nom des membres potentiellement soumis à un tel conflit d’intérêts. D’ailleurs, il y a lieu de constater que le requérant se fait le représentant de cette critique au travers de ses différents écrits de procédure.

130    Par suite, il y a lieu de constater que le Parlement a commis une erreur manifeste d’appréciation en ayant considéré que le transfert des noms des membres participant au régime qui ont pris part au vote sur celui‑ci porterait atteinte aux intérêts légitimes de ces derniers.

131    Il convient de continuer l’examen du recours, puisque l’erreur d’appréciation commise par le Parlement dans l’application des deux conditions cumulatives de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 ne concerne que les membres de l’assemblée plénière qui ont pris part aux votes sur le régime le 24 avril 2007, le 22 avril 2008 et le 10 mai 2012, et non les membres qui se sont alors abstenus et ceux qui n’étaient plus ou pas encore en fonction, au motif, notamment, que leur mandat avait antérieurement pris fin, ce qui inclut ceux qui avaient fait valoir leurs droits à pension.

 Sur le second moyen, tiré d’un défaut de motivation

132    En substance, le requérant soutient que la conclusion de la décision attaquée selon laquelle l’obligation de protection de la vie privée au regard des données à caractère personnel prévaut sur l’impératif de transparence est viciée par son défaut de motivation. Le Parlement n’aurait pas expliqué en quoi la divulgation des documents demandés porterait concrètement et effectivement atteinte à la vie privée des membres dont les noms figuraient dans ces documents.

133    Il y a lieu de rappeler que, lorsque l’institution concernée décide de refuser l’accès à un document dont la communication lui a été demandée, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant aux questions de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001 que cette institution invoque (arrêts Suède/MyTravel et Commission, point 35 supra, EU:C:2011:496, point 76, et du 28 mars 2012, Egan et Hackett/Parlement, T‑190/10, EU:T:2012:165, point 90). Une telle explication ne saurait donc consister en une simple affirmation selon laquelle l’accès à certains documents porterait atteinte à la vie privée au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 (arrêt Egan et Hackett/Parlement, précité, EU:T:2012:165, point 90).

134    Il convient, également, de rappeler que, lorsqu’une demande fondée sur le règlement no 1049/2001 vise à obtenir l’accès à des documents comprenant des données à caractère personnel, les dispositions du règlement no 45/2001 deviennent intégralement applicables, y compris son article 8 (arrêts Commission/Bavarian Lager, point 4 supra, EU:C:2010:378, point 63, et Dennekamp/Parlement, point 4 supra, EU:T:2011:688, point 26).

135    Partant, lorsque, comme en l’espèce, l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 trouve à s’appliquer à une demande d’accès à des documents, l’examen du caractère concret et effectif de l’atteinte à l’intérêt protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 se confond avec l’appréciation du risque d’atteinte aux intérêts légitimes de la personne concernée par le transfert des données à caractère personnel, puisque les intérêts légitimes visés à l’article 8, sous b), recoupent la vie privée et l’intégrité de l’individu, visées par cette dernière disposition, auxquelles le transfert de telles données est susceptible de porter atteinte en révélant au public certains de leurs aspects.

136    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences dudit article 296 doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, Rec, EU:C:2007:75, point 80 et jurisprudence citée).

137    Selon le requérant, la décision attaquée ne serait pas motivée quant au point de savoir comment la divulgation des documents demandés porterait concrètement et effectivement atteinte à la vie privée des membres participant au régime.

138    Dans la décision attaquée, le Parlement a estimé qu’il ne serait pas proportionné d’accorder le transfert des données à caractère personnel en cause, eu égard au poids des intérêts légitimes des personnes concernées. Il a fait part de son opinion suivant laquelle l’étendue des intérêts légitimes des membres était certainement moins large que celle des intérêts de personnes privées sans engagement public, tout en faisant valoir que les mécanismes de protection prévus par le règlement no 45/2001 s’appliquaient en l’espèce et que les membres avaient des intérêts légitimes à ne pas voir les données en cause divulguées, celles‑ci faisant partie de leur sphère privée et constituant dès lors un intérêt légitime à protéger comme données relatives à leur situation financière personnelle. Selon lui, les contributions de retraite et les droits à pension en découlant sont toujours des questions privées, sans que le lien avec le mandat de membre ou le mode de financement du régime ait une incidence. Le Parlement a, ensuite, considéré que, dans le cas contraire, la thèse du requérant s’appliquerait à tout le personnel de l’administration publique. Il a réitéré son opinion selon laquelle le transfert des données en cause, fondé sur l’intérêt général des médias et du public à la situation financière personnelle des membres, ne serait pas proportionné, sauf à considérer que les médias et le public aient accès à toutes les données privées des membres et même des fonctionnaires publics qui impliquent des dépenses publiques. Il a contesté la position du requérant selon laquelle la divulgation des documents demandés serait plus appropriée que les mesures destinées à fournir un contrôle public des dépenses publiques. Il a conclu, au regard de ces éléments, que les intérêts légitimes des membres devaient prévaloir sur la prétendue nécessité du transfert des données en cause.

139    Il résulte de la décision attaquée que le risque d’atteinte aux intérêts légitimes des membres et, partant, à leur vie privée, réside dans le fait que, faisant partie de la sphère privée des membres, les données à caractère personnel en cause constituent un intérêt légitime à protéger au motif qu’elles renvoient à la situation financière personnelle des membres, les contributions de retraite et les droits à pension en découlant étant des questions privées. Les autres appréciations portées par le Parlement dans la mise en balance des intérêts en jeu, énoncées au point 138 ci‑dessus, ne se rapportent pas à l’évaluation du risque d’atteinte aux intérêts légitimes ou à la vie privée des membres.

140    Or, l’examen du caractère concret et effectif de l’atteinte à l’intérêt protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 se confondant avec l’appréciation du risque d’atteinte aux intérêts légitimes de la personne concernée prévu par l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, il y a lieu de constater que le Parlement a procédé à cette dernière appréciation, en soulignant que les données à caractère personnel en cause faisaient partie de la sphère privée des membres, soumises à un plus haut niveau de protection en application de ce règlement, et devaient dès lors être protégées en tant qu’intérêts légitimes. Il a noté que les contributions à un régime de retraite et les droits à pension en découlant étaient des affaires privées, indépendamment du régime en cause et de la façon dont il était financé, que la pension de retraite découlant du régime était perçue après la fin du mandat et que les membres devaient verser une contribution financière personnelle significative, qui n’était pas remboursée par lui.

141    Certes, le raisonnement du Parlement, dans la décision attaquée, est relativement succinct, mais il permet tant au destinataire de la décision qu’au Tribunal de comprendre les motifs pour lesquels le Parlement parvient à la conclusion qu’il y aurait un risque d’atteinte aux intérêts légitimes des membres au cas où le transfert des données à caractère personnel en cause serait autorisé. Une telle appréciation englobant nécessairement celle du risque d’atteinte concrète et effective à la vie privée et à l’intégrité des membres, l’argumentation fort peu développée du requérant doit, par voie de conséquence, être écartée.

142    Par suite, il convient de rejeter le second moyen du recours.

143    Il résulte de tout ce qui précède que le recours est sans objet dans la mesure où il y est demandé l’accès aux noms des 65 membres participant au régime et requérants dans les affaires ayant donné lieu à l’ordonnance Albertini e.a. et Donnelly/Parlement, point 25 supra (EU:T:2010:519), et à l’arrêt Purvis/Parlement, point 26 supra (EU:T:2011:600), que la décision attaquée doit être annulée dans la mesure où le Parlement a refusé l’accès aux noms des membres participant au régime qui, en tant que membres de l’assemblée plénière, ont effectivement pris part aux votes sur le régime lors des scrutins du 24 avril 2007, du 22 avril 2008 et du 10 mai 2012, et que le recours doit être rejeté pour le surplus.

 Sur les dépens

144    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, selon les paragraphes 2 et 3 du même article, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs.

145    Le Parlement ayant succombé pour l’essentiel du recours, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que les trois quarts de ceux du requérant. Ce dernier supportera un quart de ses dépens.

146    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les institutions et les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. En l’espèce, le CEPD, la République de Finlande et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Il n’y a pas lieu de statuer sur la demande d’annulation de la décision A (2012) 13180 du Parlement , du 11 décembre 2012, refusant d’accorder à M. Gert‑Jan Dennekamp l’accès à certains documents relatifs à l’affiliation de certains membres du Parlement au régime de pension complémentaire, dans la mesure où il y est refusé l’accès aux noms des 65 membres du Parlement requérants dans les affaires ayant donné lieu à l’ordonnance du 15 décembre 2010, Albertini e.a. et Donnelly/Parlement (T‑219/09 et T‑326/09, Rec, EU:T:2010:519), et à l’arrêt du 18 octobre 2011, Purvis/Parlement (T‑439/09, Rec, EU:T:2011:600).

2)      La décision A (2012) 13180 est annulée dans la mesure où il y est refusé l’accès aux noms des membres participant au régime de pension complémentaire du Parlement qui, en tant que membres de l’assemblée plénière du Parlement, ont effectivement pris part aux votes sur ce régime de pension complémentaire lors des scrutins du 24 avril 2007, du 22 avril 2008 et du 10 mai 2012.

3)      Le recours est rejeté pour son surplus.

4)      Le Parlement supportera ses propres dépens et les trois quarts de ceux de M. Dennekamp.

5)      M. Dennekamp supportera un quart de ses propres dépens.

6)      Le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD), la République de Finlande et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.

Dittrich

Schwarcz

Tomlejnović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 juillet 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.