Language of document : ECLI:EU:T:2023:831

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)

26 septembre 2019 (*)      

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative Soba JAPANESE FRIED NOODLES – Cause de nullité absolue – Article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 – Recours manifestement dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑663/18,

Nissin Foods Holdings Co. Ltd, établie à Osaka (Japon), représentée par M. S. Malynicz, QC, Mmes G. Messenger, barrister, K. Gilbert et G. Lodge, solicitors,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme G. Sakalaitė-Orlovskienė et M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

The GB Foods, SA, établie à L’Hospitalet de Llobregat (Espagne), représentée par Me E. Torner Lasalle, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 29 août 2018 (affaire R 111/2018‑4), relative à une procédure de nullité entre The GB Foods et Nissin Foods Holdings,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović (rapporteur), président, A. Marcoulli et M. A. Kornezov, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 9 novembre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 25 janvier 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 23 janvier 2019,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Le 28 février 2011, la requérante, Nissin Foods Holdings Co. Ltd, a obtenu auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) l’enregistrement, sous le numéro 9377904, de la marque de l’Union européenne figurative reproduite ci-après, en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)] :

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2        Les produits pour lesquels la marque a été enregistrée relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café ; farines et préparations faites de céréales, pain, pâtisserie et confiserie, glaces comestibles ; miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel, moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ; préparations aromatiques à usage alimentaire ; condiments ; assaisonnements ; essences pour l’alimentation [à l’exception des essences éthériques et des huiles essentielles] ; mets à base de farine ; nouilles ; pâtes ; nouilles instantanées ; nouilles surgelées ; nouilles réfrigérées ; nouilles lyophilisées ; et plats préparés contenant [principalement] des nouilles ».

3        Le 8 septembre 2015, l’intervenante, The GB Foods, SA, a présenté une demande en nullité de la marque contestée, s’agissant des produits visés au point 2 ci-dessus, sur le fondement de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), d) et g), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), d) et g), du règlement 2017/1001].

4        Par décision du 30 novembre 2017, la division d’annulation a partiellement accueilli la demande en nullité, à savoir pour les « nouilles ; [les] pâtes ; [les] nouilles instantanées ; [les] nouilles surgelées ; [les] nouilles réfrigérées ; [les] nouilles lyophilisées ; et [les] plats préparés contenant [principalement] des nouilles » (ci-après les « produits litigieux »), au motif que la marque contestée était dépourvue de tout caractère distinctif s’agissant de ces produits, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

5        La requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation en ce qu’elle accueillait la demande en nullité.

6        Par décision du 29 août 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En particulier, la chambre de recours a considéré, d’une part, que les éléments verbaux « soba japanese fried noodles » de la marque contestée seraient perçus par le public pertinent, à savoir le grand public anglophone, comme descriptifs des produits litigieux. Partant, ces éléments verbaux seraient dépourvus de tout caractère distinctif. D’autre part, la chambre de recours a estimé que les éléments figuratifs de la marque contestée, à savoir les couleurs, la police de caractères et la forme rectangulaire noire, étaient courants et non distinctifs. De même, les caractères asiatiques ne seraient pas suffisants pour créer le niveau minimal requis de caractère distinctif de la marque contestée. Dès lors, la chambre de recours a conclu que la marque contestée ne contenait aucun élément dont les consommateurs se souviendraient en tant qu’indication de l’origine commerciale des produits litigieux et que ladite marque manquait, par conséquent, de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

8        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

9        L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours et confirmer la décision attaquée ainsi que la nullité de la marque contestée ;

–        condamner la requérante à supporter ses propres dépens, conformément à l’article 134 du règlement de procédure du Tribunal.

 En droit

10      Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sur proposition du juge rapporteur, à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

11      En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide, en application de l’article 126 du règlement de procédure, de statuer sans poursuivre la procédure, et ce même si une partie, en l’occurrence la requérante, a demandé la tenue d’une audience [voir, en ce sens, arrêt du 6 juin 2018, Apcoa Parking Holdings/EUIPO, C‑32/17 P, non publié, EU:C:2018:396, point 22, et ordonnance du 17 juin 2016, Hako/EUIPO (SCRUBMASTER), T‑629/15, non publiée, EU:T:2016:384, point 10 et jurisprudence citée].

 Sur le premier chef de conclusions de l’intervenante

12      Par son premier chef de conclusions, l’intervenante demande à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours et de confirmer la décision attaquée ainsi que la nullité de la marque contestée.

13      Or, étant donné que « confirmer » la décision attaquée équivaut à rejeter le recours et que, dans la mesure où, par le rejet du recours, le présent arrêt confirmerait la décision attaquée, laquelle avait confirmé la décision de la division d’annulation prononçant la nullité partielle de la marque contestée, il y a lieu de regarder le premier chef de conclusions de l’intervenante comme tendant uniquement au rejet du recours [voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2018, Star Television Productions/EUIPO – Marc Dorcel (STAR), T‑797/17, non publié, EU:T:2018:469, point 75 et jurisprudence citée].

 Sur le fond

14      À l’appui de son recours, la requérante soulève, en substance, un moyen unique tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en ce que la chambre de recours aurait erronément conclu à l’absence de caractère distinctif de la marque contestée.

15      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

16      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, la nullité de la marque de l’Union européenne est déclarée, sur demande présentée auprès de l’EUIPO, lorsque la marque de l’Union européenne a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 du même règlement.

17      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. L’article 7, paragraphe 2, de ce même règlement énonce que le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union européenne.

18      Selon une jurisprudence constante, une marque a un caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, lorsqu’elle permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI, C‑311/11 P, EU:C:2012:460, point 23 et jurisprudence citée).

19      Le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen de ces produits ou de ces services (voir arrêt du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI, C‑311/11 P, EU:C:2012:460, point 24 et jurisprudence citée).

20      L’éventuel caractère distinctif d’une marque complexe peut être examiné, en partie, pour chacun de ses termes ou de ses éléments, pris séparément, mais doit, en tout état de cause, se fonder sur la perception globale de cette marque par le public pertinent et non sur la présomption que des éléments dépourvus isolément de caractère distinctif ne peuvent, une fois combinés, présenter un tel caractère. En effet, la seule circonstance que chacun de ces éléments, pris séparément, est dépourvu de caractère distinctif n’exclut pas que la combinaison qu’ils forment puisse présenter un tel caractère (arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, point 29).

21      Cependant, une marque complexe est dépourvue de caractère distinctif par rapport aux produits et aux services concernés, dès lors qu’il n’existe pas d’indices concrets, tels que la manière dont les éléments sont combinés, qui indiqueraient que la marque complexe, considérée dans son ensemble, représente davantage que la somme des éléments dont elle est composée (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, points 34 et 37).

22      C’est à la lumière des principes mentionnés aux points 18 à 21 ci-dessus qu’il convient d’examiner le moyen unique soulevé par la requérante.

23      En premier lieu, il ressort des points 20 et 21 de la décision attaquée que la chambre de recours a apprécié le caractère distinctif de la marque contestée par rapport aux produits de la classe 30, qui sont des denrées alimentaires, donc des produits de grande consommation, et par rapport à la perception qu’en aurait le public pertinent, à savoir le grand public anglophone de l’Union. La requérante ne conteste pas la définition du public pertinent ainsi donnée par la chambre de recours.

24      En deuxième lieu, la chambre de recours a indiqué, en substance, au point 22 de la décision attaquée, que la marque contestée se composait du mot japonais « soba », écrit en caractères gras et blancs, et, pour ce qui est de la lettre « o », au moyen d’un cercle rouge en son centre. Il est également mentionné que la marque contestée comprenait l’expression « japanese fried noodles » écrite en caractères rouges beaucoup plus petits et placée en-dessous du mot « soba » ainsi que cinq caractères asiatiques de couleur grise positionnés au-dessus des lettres « ba » du mot « soba », également plus petits que les caractères du terme « soba », le tout étant placé dans une forme rectangulaire noire.

25      En troisième lieu, la chambre de recours a analysé la signification de l’élément « soba ». À cet égard, au point 23 de la décision attaquée, elle a fait référence à l’Oxford English dictionary qui définit le terme « soba » comme un « type de nouilles à base de sarrasin et une denrée alimentaire japonaise populaire ». Elle a constaté que la première entrée de ce terme dans le dictionnaire avait eu lieu en 1986, soit vingt-quatre ans avant la date de dépôt de la marque contestée. En outre, au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve présentés par l’intervenante prouvaient l’usage courant du terme « soba » pour décrire un type de nouilles japonaises à base de sarrasin. La chambre de recours en a conclu, au point 26 de la décision attaquée, que l’élément « soba » de la marque contestée était une indication descriptive pour des nouilles japonaises à base de sarrasin, du moins pour le public anglophone au sein de l’Union. Cette signification descriptive existait déjà au moment de la demande d’enregistrement de la marque contestée. Enfin, l’ajout de l’expression descriptive « japanese fried noodles » confirmerait le sens du terme « soba ».

26      En quatrième lieu, la chambre de recours a considéré, en substance, aux points 27 et 28 de la décision attaquée, que dès lors que, premièrement, les éléments verbaux de la marque contestée étaient dépourvus de tout caractère distinctif dans la mesure où ils étaient à la fois directement descriptifs des « nouilles », mais également descriptifs de la catégorie plus large à laquelle appartiennent ces produits, à savoir les « pâtes », que, deuxièmement, les éléments figuratifs de la marque contestée, à savoir les couleurs, la police de caractères et la forme rectangulaire noire, étaient courants et, en soi, non distinctifs et que, troisièmement, les caractères asiatiques, illisibles pour le public anglophone de l’Union, suggèreraient l’origine asiatique des produits concernés et ne suffisaient pas pour créer le niveau minimal requis de caractère distinctif de la marque contestée, ladite marque ne contenait aucun élément dont les consommateurs se souviendraient en tant qu’indication de l’origine commerciale des produits litigieux.

27      À la lumière des considérations retenues dans la décision attaquée, la chambre de recours a procédé à une analyse exacte de la capacité de la marque contestée à distinguer les produits litigieux de ceux d’autres entreprises.

28      À l’issue de cet examen, la chambre de recours a donc pu conclure à bon droit que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

29      Force est de constater que cette conclusion ne saurait être remise en cause par les griefs soulevés par la requérante.

30      S’agissant du premier grief soulevé par la requérante et tiré de ce que la chambre de recours n’aurait pas pris en considération le consommateur moyen du public pertinent, la requérante fait valoir que bien que le terme « soba » puisse se trouver dans l’Oxford English dictionary, cela ne signifierait pas nécessairement que le public pertinent en connaisse la définition. Au contraire, le terme « soba » ne serait susceptible d’être compris que par une partie du public pertinent, à savoir les experts tels que les cuisiniers ou les consommateurs ayant un intérêt particulier pour la cuisine japonaise.

31      Il convient de relever que, par son grief, la requérante ne remet pas en cause la définition donnée par la chambre de recours du terme « soba », telle qu’elle l’a reprise de l’Oxford English dictionary, mais sa connaissance par le public pertinent.

32      Certes, la seule inclusion d’un terme dans un ou plusieurs dictionnaires ne saurait suffire à démontrer qu’il s’agit d’un terme communément utilisé, dont la signification sera perçue immédiatement par le grand public, même s’agissant des locuteurs natifs de la langue concernée. En effet, un dictionnaire ne comporte pas uniquement des termes connus et utilisés de manière régulière, mais également des termes rares, poétiques, désuets ou relevant de domaines hautement spécialisés, dont la signification n’est connue que de spécialistes peu nombreux des secteurs qui y sont afférents. Il est, ainsi, plus probable, s’agissant de tels termes, que, face à un signe les contenant, le public pertinent ne perçoive pas immédiatement leur signification ou, le cas échéant, leur lien avec les produits ou les services visés [arrêt du 21 juin 2017, Rare Hospitality International/EUIPO (LONGHORN STEAKHOUSE), T‑856/16, non publié, EU:T:2017:412, point 38].

33      Cependant, la chambre de recours n’a pas uniquement tenu compte du fait que le terme « soba » figurait dans l’Oxford English dictionary pour parvenir à la conclusion que la signification de celui-ci était connue du public pertinent, mais a également pris en considération les éléments de preuve apportés par l’intervenante, à savoir, notamment, la copie d’un article diffusé dans le quotidien The Guardian dans lequel un chef japonais établi à Londres (Royaume-Uni) donne une recette de cuisine à base de soba, l’impression d’une page du blogue culinaire Priya’s relative à une recette à base de soba, la copie d’un article publié sur le site internet « Living to eat ! » décrivant les soba comme tout type de nouilles d’épaisseur moyenne et proposant différentes recettes, l’impression d’une page d’un article en anglais publié par un blogueur suédois et qui mentionne les soba comme un type de nouilles japonaises et, enfin, l’impression d’une page du blogue Just Hungry, présentant des recettes de soba.

34      À cet égard, l’argument avancé par la requérante, selon lequel la chambre de recours aurait évalué les éléments de preuve de manière objective et non pas du point de vue du consommateur moyen, doit être rejeté. En effet, en examinant les éléments de preuve apportés par l’intervenante, la chambre de recours a précisément vérifié s’ils démontraient que le consommateur moyen percevait le terme « soba » comme désignant un type de nouilles japonaises à base de sarrasin. Le fait que le terme « soba » se retrouve sur des blogues de cuisine, destinés à être consultés par le grand public pour lui permettre de connaître différentes manières de cuisiner ces nouilles japonaises, mais également dans un article du quotidien The Guardian, très diffusé au Royaume-Uni et qui s’adresse également au grand public, a été, à juste titre, considéré par la chambre de recours comme indiquant que le public pertinent connaissait la signification de ce terme.

35      Ainsi, contrairement à ce qu’affirme la requérante, le terme « soba » n’est pas un terme qui n’est connu que des seuls experts, tels que les cuisiniers. Il convient donc, par ailleurs, de distinguer cette affaire de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 12 mars 2008, Compagnie générale de diététique/OHMI (GARUM) (T‑341/06, non publié, EU:T:2008:70), invoqué par la requérante, dans la mesure où, dans ce dernier arrêt, avait été tranchée la question de savoir si le grand public était susceptible de connaître le terme « garum », absent des dictionnaires de langues contemporains, y compris de ceux comprenant les termes d’origine latine. Il y a lieu d’ailleurs de remarquer que l’affirmation de la requérante selon laquelle le terme « soba » ne serait connu que d’un public spécialisé n’est étayée d’aucun élément concret.

36      S’agissant du deuxième grief soulevé par la requérante et tiré de ce que la chambre de recours n’a pas examiné le caractère distinctif de la marque contestée par rapport aux produits pertinents, la requérante soutient, en substance, que les éléments verbaux « soba japanese fried noodles » ne sont pas descriptifs des produits litigieux. En effet, lesdits éléments verbaux pourraient être compris comme faisant référence à des nouilles japonaises à base de sarrasin qui ont été frites. Or, le public pertinent serait susceptible d’être confronté à l’expression « soba japanese fried noodles » plutôt dans le cadre de la fourniture d’un service, comme dans un restaurant spécialisé dans les nouilles frites, que dans celui de la commercialisation de tels produits.

37      Ainsi, selon la requérante, même si les éléments verbaux « soba japanese fried noodles » peuvent évoquer de manière allusive une méthode de préparation possible des nouilles, cela ne suffirait pas à les rendre descriptifs des produits litigieux.

38      À cet égard, il convient de rappeler qu’un élément verbal est descriptif et dépourvu de tout caractère distinctif si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés. C’est le cas si le lien établi entre, d’une part, la teneur de cet élément et, d’autre part, les produits ou les services en cause est suffisamment concret et direct pour démontrer que cet élément permet, dans l’esprit du public pertinent, une identification immédiate de ces produits ou de ces services [voir arrêt du 15 décembre 2016, Intesa Sanpaolo/EUIPO (START UP INITIATIVE), T‑529/15, EU:T:2016:747, point 62 et jurisprudence citée].

39      En l’espèce, les produits litigieux sont les « nouilles ; [les] pâtes ; [les] nouilles instantanées ; [les] nouilles surgelées ; [les] nouilles réfrigérées ; [les] nouilles lyophilisées ; et [les] plats préparés contenant [principalement] des nouilles ». Or, dès lors qu’il a été établi à juste titre que le terme « soba » est compris par le public pertinent comme désignant des nouilles japonaises à base de sarrasin, celui-ci est directement descriptif desdits produits. Cette constatation est valable pour tous les produits litigieux comprenant des nouilles ainsi que pour les « pâtes » dans la mesure où, ainsi que la chambre de recours l’a constaté à juste titre, les nouilles font partie de la catégorie plus générale des « pâtes alimentaires ». En ce qui concerne l’expression « japanese fried noodles », non seulement elle confirme la signification du terme « soba », mais elle est également, en elle-même, descriptive des produits litigieux.

40      La requérante invoque, pour la première fois devant le Tribunal, le fait que les éléments verbaux de la marque contestée ne seraient pas descriptifs des produits litigieux, car ils évoquent de manière allusive une méthode de cuisson. Or, même à considérer cet argument comme étant recevable, le fait de savoir si les produits litigieux sont constitués de nouilles frites ou non ne saurait influencer la conclusion établie au point 39 ci-dessus. En effet, soit les nouilles comprises dans les produits litigieux sont frites avant leur conditionnement, auquel cas les éléments verbaux sont directement descriptifs de la nature des produits, soit elles pourraient être frites par le consommateur une fois achetées, auquel cas les éléments verbaux sont descriptifs de la manière dont ces produits pourraient être cuisinés par le consommateur.

41      Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, les éléments verbaux ne permettent pas, dans l’esprit du public pertinent, d’évoquer seulement de manière allusive ou suggestive certaines caractéristiques des produits litigieux, mais sont directement descriptifs de ceux-ci, puisqu’ils renvoient aux nouilles soba, à savoir un type de nouilles japonaises à base de sarrasin qui seront soit frites soit pourront l’être.

42      Dès lors que les éléments verbaux sont descriptifs, il ne saurait être soutenu, ainsi que le fait valoir la requérante, qu’ils possèdent le minimum de caractère distinctif requis par la jurisprudence [voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2015, BSH/OHMI (PerfectRoast), T‑591/14, non publié, EU:T:2015:700, point 40 et jurisprudence citée], pour écarter l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. En effet, il ressort d’une jurisprudence constante qu’un élément verbal descriptif au regard de certains produits ou services est nécessairement dépourvu de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services [voir, en ce sens, arrêt du 14 janvier 2016, International Gaming Projects/OHMI (BIG BINGO), T‑663/14, non publié, EU:T:2016:5, point 20 et jurisprudence citée].

43      Par conséquent, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré les éléments verbaux de la marque contestée comme dépourvus de caractère distinctif.

44      Par ses troisième et quatrième griefs qu’il y a lieu d’examiner ensemble, tirés de ce que la chambre de recours n’a pas correctement analysé l’impression d’ensemble de la marque contestée et n’a pas correctement apprécié le caractère distinctif de ladite marque, la requérante considère que la chambre de recours a commis une double erreur lorsqu’elle a estimé que la marque contestée ne contenait aucun élément dont les consommateurs pourraient se souvenir à titre d’indication de l’origine commerciale des produits litigieux. En effet, d’une part, elle n’aurait pas correctement examiné les éléments figuratifs de la marque contestée et, d’autre part, elle n’aurait pas tenu compte de l’impression d’ensemble produite par les différents éléments constituant la marque contestée. En particulier, la chambre de recours aurait accordé une importance excessive à la nature descriptive des éléments verbaux de la marque contestée et n’aurait pas assez tenu compte de l’impression d’ensemble laissée par ladite marque.

45      Il y a lieu de rappeler qu’un style graphique, même s’il possède une certaine particularité, ne saurait être considéré comme étant un élément figuratif distinctif que s’il est susceptible de marquer immédiatement et durablement la mémoire du public pertinent d’une manière qui permette à ce dernier de distinguer les produits du titulaire de la marque figurative de ceux des autres fournisseurs sur le marché. Cela n’est notamment pas le cas si le style graphique utilisé demeure largement usuel aux yeux du public pertinent ou si l’élément figuratif n’a pour fonction que de mettre en exergue l’information véhiculée par les éléments verbaux [voir, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2016, Caffè Nero Group/EUIPO (CAFFÈ NERO), T‑37/16, non publié, EU:T:2016:634, point 42 et jurisprudence citée].

46      Or, en l’espèce, s’agissant de l’élément « soba », la stylisation dont il fait l’objet n’est pas susceptible de marquer immédiatement et durablement la mémoire du public pertinent au point de lui conférer un caractère distinctif. Au contraire, le tracé s’apparentant à des coups de pinceau et la présence du point coloré en rouge seront susceptibles d’être perçus par le public pertinent comme renvoyant à l’origine japonaise des produits, renforçant, dès lors, l’information véhiculée par l’élément « soba ». Il en va de même des caractères asiatiques qui, en outre, sont plus petits que ceux de l’élément « soba » et écrits dans une couleur grise qui est moins visible sur le fond noir du signe. Enfin, le rectangle noir dans lequel est placé l’ensemble des éléments verbaux et figuratifs de la marque contestée constitue une forme d’encadrement banal qui ne saurait conférer un caractère distinctif à la marque contestée.

47      Par ailleurs, le fait que les caractères asiatiques ont pu faire l’objet d’un enregistrement distinct comme marque de l’Union européenne, dont la requérante est titulaire, n’est pas susceptible de conférer un caractère distinctif à la marque contestée en l’espèce. En effet, en combinaison avec les autres éléments de la marque contestée, ces caractères asiatiques seront perçus comme des éléments décoratifs. Or, de tels éléments sont courants pour les produits alimentaires d’origine asiatique, de sorte qu’ils mettront seulement en exergue l’information véhiculée par les éléments verbaux.

48      De plus, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel les caractères asiatiques seraient suffisants pour conférer à la marque contestée un caractère distinctif dès lors que les nouilles appartiennent à la catégorie plus large des pâtes alimentaires que le consommateur moyen ne perçoit pas comme étant un produit d’origine asiatique. En effet, le fait d’inclure les nouilles dans la catégorie plus large des pâtes alimentaires n’exclut pas leur origine asiatique. Or, la requérante ne remet pas en cause le fait que les nouilles, en tant que telles, sont des produits d’origine asiatique.

49      Quant à l’expression « soba japanese fried noodles », il y a lieu de relever que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, elle n’est pas à ce point inhabituelle par rapport aux règles grammaticales et syntaxiques anglaises qu’elle serait à même de conférer un caractère distinctif à la marque contestée. En outre, de par le positionnement des éléments verbaux dans le signe et leur taille respective, il est fort probable que le consommateur moyen décompose la marque comme étant constituée, d’une part, de l’élément « soba » et, d’autre part, de l’expression « japanese fried noodles ». Dans ce contexte, l’expression « japanese fried noodles » est construite en respectant les règles grammaticales et syntaxiques anglaises et vient, ainsi qu’il a été constaté au point 39 ci-dessus, confirmer la signification de l’élément « soba ».

50      Enfin, contrairement à ce que soutient la requérante, il y a lieu de noter qu’en analysant les éléments verbaux et figuratifs de la marque contestée, la chambre de recours n’a pas accordé une importance excessive à la nature descriptive des éléments verbaux et a effectivement tenu compte de l’impression d’ensemble de la marque contestée. Cela ressort du point 28 de la décision attaquée dans lequel la chambre de recours a examiné si le style graphique, les couleurs utilisées et les caractères asiatiques de la marque contestée étaient susceptibles de lui conférer un caractère distinctif, nonobstant le caractère descriptif de ses éléments verbaux.

51      Pour les mêmes raisons, il y a lieu de rejeter l’affirmation de la requérante selon laquelle le consommateur moyen, confronté à la marque contestée, la percevrait comme une image et non comme une marque verbale de sorte que, considérée dans son ensemble, la stylisation de la marque contestée la rendrait distinctive.

52      Par conséquent, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

53      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le moyen unique et, partant, le recours dans son ensemble, comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

 Sur les dépens

54      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante, ainsi que les dépens de l’EUIPO, conformément aux conclusions de ce dernier. L’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

2)      Nissin Foods Holdings Co. Ltd est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).


3)      The GB Foods, SA supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 26 septembre 2019.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

V. Tomljenović


*      Langue de procédure : l’anglais.