Language of document : ECLI:EU:T:2015:96

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

12 février 2015 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale LIFEDATA – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), et article 75 du règlement (CE) nº 207/2009 – Défaut d’appréciation concrète – Obligation de motivation » 

Dans l’affaire T‑318/13,

Vita Phone GmbH, établie à Mannheim (Allemagne), représentée par Mes P. Ruess et A. Doepner-Thiele, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. G. Marten et G. Schneider, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 26 mars 2013 (affaire R 1072/2012‑1), concernant une demande d’enregistrement de la marque verbale LIFEDATA en tant que marque communautaire,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 juin 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 25 juillet 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 23 décembre 2011, la requérante, Vita Phone GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) nº 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal LIFEDATA.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’OHMI, des classes 10 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 10 : « Appareils et instruments médicaux et télémédicaux pour la saisie et la transmission de valeurs relatives aux fonctions corporelles et de biosignaux, tous les articles précités exclusivement pour le secteur de la télémédecine » ;

–        classe 44 : « Téléservices médicaux ; services d’un centre de services télémédical, surveillance télémédicale, prise en charge télémédicale de patients, diagnostique télémédical, en particulier via des moyens de communication électroniques, prise en charge médicale téléphonique et service d’urgence téléphonique dans le domaine de la télémédecine ».

4        Par décision du 10 avril 2012, l’examinateur a rejeté la demande de marque communautaire au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 2, du règlement nº 207/2009, aux motifs que le signe contesté était dépourvu de caractère distinctif et qu’il était descriptif.

5        Le 1er juin 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement nº 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 26 mars 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a considéré que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009.

7        Tout d’abord, la chambre de recours a constaté que les produits et les services en cause, qui appartiennent au domaine de la télémédecine, s’adressaient aux professionnels médicaux et aux patients qui y ont recours, lesquels disposent généralement d’une bonne connaissance de l’anglais et d’un niveau d’attention accru.

8        Ensuite, elle a relevé que le public pertinent reconnaîtrait directement, dans la marque demandée, une combinaison des mots anglais « life » (« vie » en français) et « data » (« données, valeurs, mesures » en français) et que, dans la mesure où elle constituerait une succession de deux mots du vocabulaire anglais de base et où cette combinaison ne serait pas inhabituelle, tout consommateur disposant d’un minimum de connaissances de cette langue la comprendrait, sans avoir besoin de l’interpréter, comme signifiant « données sur la vie ». Par ailleurs, la chambre de recours a souligné que la marque demandée avait la même signification que certains termes techniques du domaine de la télémédecine, à savoir les termes « biosignal » et « paramètres vitaux ».

9        Enfin, la chambre de recours a conclu qu’il n’était pas possible de présumer qu’une combinaison verbale si facilement compréhensible, qui se rapportait, en outre, à l’objet des produits et des services concernés, marquerait directement la mémoire des consommateurs ciblés, leur permettant de la reconnaître comme étant une indication de l’origine commerciale des produits et des services en cause.

 Procédure et conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

11      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, premièrement, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 75 du règlement nº 207/2009 et, deuxièmement, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 75 du règlement nº 207/2009

13      Ce moyen se divise en deux branches, tirées, respectivement, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 et de la violation de l’article 75 du même règlement.

Sur la première branche, tirée de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009

14      Par la première branche du premier moyen, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir méconnu le caractère distinctif du signe demandé, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009, en ce qui concerne les produits et les services visés par la demande d’enregistrement. Elle avance, à cet égard, trois griefs, tirés, respectivement, de l’incapacité du signe demandé de véhiculer un message concret et clair au public pertinent, de l’absence de rapport entre le signe demandé et l’objet des produits et des services visés et du fait que la chambre de recours n’a pas suffisamment pris en compte, lors de son appréciation, la pratique précédente de l’OHMI et de l’Office des brevets et marques des États-Unis d’Amérique.

15      L’OHMI réfute les allégations de la requérante.

16      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. Conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009, il suffit que ce motif absolu de refus existe dans une partie de l’Union européenne.

17      Selon une jurisprudence constante, une marque a un caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, lorsque cette marque permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI, C‑311/11 P, Rec, EU:C:2012:460, point 23 et jurisprudence citée). Il s’agit de permettre au public concerné de répéter une expérience d’achat, si elle s’avère positive, ou de l’éviter, si elle s’avère négative, lors de l’acquisition ultérieure des produits ou des services en question [arrêt du 12 mars 2008, Compagnie générale de diététique/OHMI (GARUM), T‑341/06, EU:T:2008:70, point 29].

18      Le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent ( arrêt Smart Technologies/OHMI, point 17 supra, EU:C:2012:460, point 24).

19      En l’espèce, il convient de relever, d’emblée, que la requérante ne conteste pas la définition du public pertinent retenue au point 12 de la décision attaquée. À cet égard, il y a lieu, tout d’abord, de constater que le public pertinent est composé, d’une part, de spécialistes relevant du domaine médical et médico-technique et, d’autre part, des patients qui ont recours aux produits et aux services concernés. Ensuite, dans la mesure où le signe demandé est composé de termes anglais, le public pertinent est notamment le consommateur anglophone, bien que, comme l’indique la chambre de recours, il soit permis de supposer que les consommateurs spécialisés pertinents d’autres États membres peuvent également avoir une connaissance de l’anglais suffisante pour comprendre la signification de la marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2012, Kaltenbach & Voigt/OHMI (3D eXam), T‑242/11, EU:T:2012:179, point 26]. Le constat de la chambre de recours n’étant donc pas entaché d’erreur, il y a lieu de le prendre en considération lors de l’examen du présent recours.

20      Dans le cadre du premier grief, premièrement, la requérante fait valoir que le signe LIFEDATA consiste en une combinaison de termes qui n’est susceptible de transmettre aucune information suffisamment spécifique pouvant être comprise, sans réflexion supplémentaire, par le public pertinent. En particulier, elle estime que ledit signe résulte d’une combinaison de mots inhabituelle pour les produits et les services en cause, qui ne ressort pas des dictionnaires anglais ni ne correspond aux règles grammaticales de cette langue. Le signe litigieux inciterait ainsi les consommateurs à effectuer un examen attentif et à réfléchir à sa signification, sans pouvoir le percevoir et l’interpréter de manière immédiate comme signifiant « données sur la vie ». La requérante conclu que, dans ces circonstances, la marque demandée est bien capable d’indiquer l’origine commerciale des produits et des services visés par la demande d’enregistrement.

21      Il convient de relever que, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué au point 13 de la décision attaquée, le signe litigieux est composé de deux substantifs, à savoir les termes « life » et « data », lesquels sont combinés sans espace typographique ni trait d’union entre eux. Il s’agit, en outre, de deux termes simples et courants en anglais. D’un point de vue sémantique, ils sont définis par la version électronique de l’Oxford English Dictionary , comme renvoyant notamment, d’une part, à la condition d’être vivant et, d’autre part, à des données relatives à l’information, considérées collectivement, habituellement obtenues par un travail scientifique, et utilisées à des fins de référence, d’analyse ou de calcul.

22      Il y a lieu, dès lors, de considérer que, contrairement à ce que soutient la requérante, le public pertinent pourra attribuer un contenu spécifique à l’expression « lifedata » et qu’il attribuera une signification précise au signe demandé. En particulier, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre au point 15 de la décision attaquée, le signe demandé sera compris par ledit public comme signifiant « données sur la vie ». Par ailleurs, dans la mesure où les deux termes font partie du vocabulaire anglais de base et où ils donnent lieu à une combinaison lexicale habituelle, susceptible d’être reconnue facilement par les utilisateurs ayant les connaissances les plus élémentaires de cette langue, la chambre de recours a pu estimer, sans commettre d’erreur, que la marque demandée sera comprise par le public pertinent de manière immédiate et sans réflexion supplémentaire.

23      La conclusion précédente ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le terme « lifedata » ne répond pas aux règles de grammaire anglaise. En effet, comme le soutient à juste titre l’OHMI, les mots composés, dénommées en anglais « compound nouns », sont habituels dans la grammaire anglaise et résultent de la liaison d’au moins deux termes aux fins de constituer un seul substantif. À cet égard, il convient de relever que le fait que la marque demandée ne contient pas d’espace typographique entre les termes « life » et « data » ne s’oppose pas à ce que la signification des mots soit facilement reconnaissable par le public concerné. En effet, bien que les mots composés soient parfois écrits avec un trait d’union ou une espace typographique, il est également habituel de les représenter ensemble sans lesdits caractères.

24      Deuxièmement, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle la circonstance que le terme « lifedata » n’est pas utilisé pour les produits et les services en cause étaye le caractère distinctif de la marque demandée, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, les signes qui sont communément utilisés pour la commercialisation des produits ou des services concernés sont réputés incapables de permettre d’identifier l’origine desdits produits ou services (arrêt GARUM, point 17 supra, EU:T:2008:70, point 29). Néanmoins, cette affirmation ne saurait être interprétée a contrario pour conclure à l’existence du caractère distinctif de la marque demandée lorsque celle-ci est peu utilisée pour les produits et les services en cause. En effet, il ressort de la jurisprudence que l’appréciation du caractère distinctif d’une marque communautaire ne se fonde pas sur l’originalité ou l’absence d’utilisation de ladite marque dans le domaine dont relèvent les produits et les services concernés (voir, en ce sens, ordonnance du 14 mai 2012, Timehouse/OHMI, C‑453/11 P, EU:C:2012:291, point 19). En l’espèce, il y a dès lors lieu d’entériner l’appréciation effectuée par la chambre de recours au point 16 de la décision attaquée, selon laquelle l’absence d’utilisation du signe LIFEDATA dans le domaine des produits et des services télémédicaux est dépourvue de pertinence aux fins d’établir le caractère distinctif de la marque demandée.

25      Troisièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la marque demandée constituerait un néologisme, il y a lieu de relever que cette circonstance n’est pas de nature à établir en elle-même et de manière automatique le caractère distinctif du signe en cause, permettant dès lors son enregistrement. En effet, il faudrait, à cet égard, que la signification d’ensemble dudit signe prime sur la signification des éléments séparés qui le composent [voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI, C‑304/06 P, Rec, EU:C:2008:261, point 45, et du 29 avril 2010, Kerma/OHMI (BIOPIETRA), T‑586/08, EU:T:2010:171, points 31 à 33].

26      Cependant, en l’espèce, même à supposer que la combinaison « lifedata », prise dans son ensemble, soit un néologisme, force est de constater qu’il n’existe pas d’écart perceptible entre un tel néologisme et la simple somme des éléments qui le composent, au sens de la jurisprudence citée au point 25 ci-dessus. Il est en effet manifeste que l’expression « lifedata », dont les éléments sont attestés dans le lexique anglais de base, signifie, dans son ensemble, « données sur la vie ».

27      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque demandée résultait d’une combinaison verbale facilement compréhensible qui ne marquerait pas directement la mémoire du public pertinent et que, dans ce contexte, elle ne permettrait pas audit public de la reconnaître comme étant une indication de l’origine commerciale des produits et des services visés par la demande d’enregistrement.

28      Le premier grief doit être rejeté.

29      Par un deuxième grief, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir considéré, en outre, que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au motif qu’elle décrivait l’objet des produits et des services visés par la demande d’enregistrement.

30      Tout d’abord, pour autant que la requérante fasse valoir à nouveau, dans le cadre du présent grief, que le signe demandé ne saurait être compris comme signifiant « données sur la vie », il suffit de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 22 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant que le signe demandé serait compris par le public pertinent comme ayant une telle signification.

31      Ensuite, la requérante allègue que, même dans l’hypothèse où le signe demandé serait compris comme signifiant « données sur la vie », cela n’aboutirait pas nécessairement à la conclusion selon laquelle le public pertinent assimilerait ladite signification avec les notions de biosignaux et de paramètres vitaux visées par la demande d’enregistrement, mais plutôt avec la notion de biographie.

32      Certes, comme la requérante l’affirme, il n’est pas exclu que le signe dont l’enregistrement est demandé puisse avoir des interprétations non liées au domaine de la médecine, notamment celle de « biographie » [voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2012, medi/OHMI (medi), T‑470/09, EU:T:2012:369, point 29].

33      En l’espèce, les produits et les services en cause ont pour objet la mise à disposition et la transmission de données sur la santé. Or, s’agissant du public pertinent, celui-ci est composé des professionnels médicaux et leurs patients. Par conséquence, il ne saurait être considéré, comme le prétend la requérante, que les informations transmises entre le personnel médical et les patients par le biais des produits et des services en cause soient destinées à relater l’histoire de la vie de ces derniers, c’est-à-dire, leur biographie. En effet, dès lors que les produits et les services concernés sont visés dans un contexte médical, la marque demandée ne saurait être comprise par le public pertinent autrement que comme signifiant « biosignaux » ou « données sur l’état de santé des patients ».

34      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif dans la mesure où, compte tenu de l’interprétation du signe effectuée par le public pertinent dans le contexte médical dans lequel s’insèrent les produits et les services en cause, cette marque se rapporte à l’objet des produits et des services visés de sorte qu’elle ne permet pas d’identifier ceux-ci comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de les distinguer de ceux d’autres entreprises.

35      Le deuxième grief doit être rejeté.

36      Par un troisième grief, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir conclu à l’absence de caractère distinctif de la marque demandée sans tenir compte des enregistrements précédents effectués tant auprès de l’OHMI qu’auprès de l’Office des brevets et des marques des États-Unis d’Amérique.

37      À cet égard, premièrement, il convient de rappeler que si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus [voir arrêt du 14 juillet 2014, NIIT Insurance Technologies/OHMI (SUBSCRIBE), T‑404/13, EU:T:2014:645, point 48 et jurisprudence citée].

38      En outre, selon une jurisprudence constante, les décisions concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire que les chambres de recours sont amenées à prendre, en vertu du règlement nº 207/2009, relèvent d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique antérieure des chambres de recours [voir arrêts du 2 mai 2012, Universal Display/OHMI (UniversalPHOLED), T‑435/11, EU:T:2012:210, point 37 et jurisprudence citée, et du 30 avril 2013, Boehringer Ingelheim International/OHMI (RELY-ABLE), T‑640/11, EU:T:2013:225, point 33 et jurisprudence citée].

39      En l’espèce, il ressort de l’examen effectué aux points 20 à 35 ci-dessus que la chambre de recours a, à juste titre, constaté, sur la base d’une appréciation complète et en tenant compte de la perception du public pertinent, que la demande de marque communautaire présentée par la requérante se heurtait au motif absolu de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009. Il s’ensuit que, conformément à la jurisprudence citée aux points 37 et 38 ci-dessus, cette appréciation ne peut pas être remise en cause au seul motif que la chambre de recours n’aurait pas suivi, en l’espèce, la pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI.

40      Deuxièmement, s’agissant de l’argument tiré de la pratique décisionnelle de l’Office des brevets et des marques des États-Unis d’Amérique, celui-ci ne saurait être non plus accueilli. En effet, il convient de rappeler que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente. L’OHMI et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés par une décision intervenue au niveau d’un pays tiers admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale [arrêt du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec, EU:T:2000:283, point 47].

41      Le troisième grief doit être rejeté.

42      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que la chambre de recours a correctement estimé que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a refusé l’enregistrement du signe LIFEDATA pour les produits et les services en cause.

43      La première branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.

Sur la seconde branche, tirée de la violation de l’article 75 du règlement nº 207/2009

44      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a omis d’apprécier le caractère distinctif de la marque demandée à l’égard de chacun des produits et des services concernés. L’analyse globale à laquelle elle a procédé serait constitutive d’une violation de l’obligation de motivation prévue à l’article 75 du règlement nº 207/2009.

45      L’OHMI conteste les allégations de la requérante.

46      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 75 du règlement nº 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Cette obligation de motivation, découlant aussi de l’article 296 TFUE, a fait l’objet d’une jurisprudence constante selon laquelle la motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés un exercice effectif de leur droit à demander un contrôle juridictionnel de la décision refusant l’enregistrement de la marque communautaire [arrêt du 23 janvier 2014, Novartis/OHMI (CARE TO CARE), T‑68/13, EU:T:2014:29, point 27].

47      Par ailleurs, le caractère enregistrable de la marque doit être examiné et motivé pour chacun des produits et des services revendiqués. Toutefois, lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou groupe de produits ou de services, une motivation globale suffit à cette fin [arrêt du 15 octobre 2013, Electric Bike World/OHMI – Brunswick (LIFECYCLE), T‑379/12, EU:T:2013:529, point 31]. Pour que cette motivation globale puisse suffire, les produits ou les services concernés doivent former une catégorie ou un groupe homogène, le seul fait que les produits ou les services concernés relèvent de la même classe au sens de l’arrangement de Nice n’étant pas suffisant à cet effet [ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI, C‑282/09 P, Rec, EU:C:2010:153, point 38  et arrêt du 12 avril 2011, Euro-Information/OHMI (EURO AUTOMATIC PAYMENT) T‑28/10, Rec, EU:T:2011:158, points 54 à 57].

48      En l’espèce, s’agissant, d’une part, des produits relevant de la classe 10, le Tribunal constate que leur homogénéité découle notamment du fait qu’ils ont tous la même fonction, telle que la saisie et la transmission de valeurs relatives aux fonctions corporelles et aux biosignaux. En effet, l’usage de ces produits permet au public pertinent de transférer et d’accéder aux données sur la santé des patients malgré l’éloignement spatial.

49      S’agissant, d’autre part, des services relevant de la classe 44, ils visent globalement des services télémédicaux qui enregistrent sans fil les signes vitaux des patients, ainsi que diverses autres informations médicales, et permettent le transfert à distance de ces données entre les patients et les personnes chargées de leur surveillance.

50      En outre, il convient de constater, au regard des caractéristiques exposées aux points 48 et 49 ci-dessus, que la prestation des services télémédicaux relevant de la classe 44 ne peut être exécutée que par le biais d’équipements spécialisés, notamment ceux relevant de la classe 10.

51      Dans la mesure où tous ces produits et ces services, qui s’adressent au même public, à savoir les professionnels médicaux et les patients qui y ont recours, ont pour finalité l’enregistrement, le stockage, le traitement, le transfert et la retransmission d’informations et de données sur l’état de santé des patients à distance, d’une part, et que ces services ne peuvent être accomplis qu’à travers l’utilisation des produits en cause, d’autre part, lesdits produits et services constituent, en raison de leurs caractéristiques et de leurs fonctions similaires, voire identiques, un groupe homogène susceptible de faire l’objet d’une motivation globale [voir, par analogie, arrêt du 20 mai 2009, CFCMCEE/OHMI (P@YWEB CARD et PAYWEB CARD), T‑405/07 et T‑406/07, Rec, EU:T:2009:164, points 77 et 78].

52      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure, compte tenu du caractère homogène des produits et des services en cause, qu’une motivation globale par de la chambre de recours était suffisante et que celle-ci n’a dès lors pas violé l’article 75 du règlement n° 207/2009.

53      La seconde branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée, ainsi que le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 207/2009

54      Dans le cadre de son second moyen, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir considéré, à tort, que le signe demandé était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 207/2009.

55      L’OHMI réfute les allégations de la requérante.

56      Ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement nº 207/2009, il suffit qu’un des motifs absolus de refus s’applique pour que le signe en cause ne puisse être enregistré comme marque communautaire [voir arrêt du 13 septembre 2012, Sogepi Consulting y Publicidad/OHMI (ESPETEC), T‑72/11, EU:T:2012:424, point 40 et jurisprudence citée].

57      En l’espèce, l’existence du motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 ayant été établie, à bon droit, par la chambre de recours, il n’y a pas lieu d’examiner l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement.

58      Au surplus, il y a lieu d’observer que, ainsi qu’il ressort du point 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a fondé sa décision de rejet uniquement sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

59      Eu égard aux considérations qui précédent, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

60      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés dans l’affaire, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Vita Phone GmbH est condamnée aux dépens.


Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 février 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.